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French Pages 1499 [1572] Year 1968
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CLAUDEL
V -
1
BIBLIOTHEQUE DE LA PLET ADE
PAUL
CLAUDEE
Journal I
(1904-1932) INTRODUCTION TEXTE
PAR
FRANCOIS
ETABLI
FRANCOIS
ET
VARILLON
JACQUES
PETIT
arf GALLIMARD
Randall Library
VARILLON
ANNOTE
UNC-W
PAR ET
Tous droits de traduttion, de reproduction et @’ adaptation réservés pour tous les pays.
© Editions Gallimard, 1968.
INTRODUCTION
Le Journal de Paul Claudel est né de la crise de Partage
de midi.
Ysé a quitté brusquement Foutchéou le 1° aoht 1904. «Ila fallu que Dieu intervint par un coup de force », car
« la vue méme de Venfer’ » wettt pas réussi a arracher le consul de France des bras de cette femme tres belle qu’aux premiers jours de 1901 il avait installée sous son toit avec Ses quatre jeunes garcons pendant que son mart ' professionnelle ment courait la Chine. Claudel n'est pas décidé a rompre?. Mais Ysé sait quelle eS séparée de Mesa pour toujours. Pendant des mois elle lui renverra toutes ses lettres*. A Dieu ne plaise qu'elle continue de faire obStacle a une vocation monastique dont tl semble bien qu'elle ne peut pas douter. L’homme doit retourner a labbaye quil venait tout juste de quitter quand elle l’a rencontré sur /’Ernest-Simons. Quw’il endosse, et pour de bon cette fois, le froc bénédittin | EZ si, en avril 1905, il commet la « folie » de tenter de la rejoindre en Belgique, une médaille de saint Benoit Llisste sous une grille lui rappellera une fois de plus ce qu’a cause d’elle il s’ob§tinait & oublier (yve75)3: 1. Correspondance Claudel-Suares, p. 48-49. 2. Voir « Partage de midi», atte III, Thédtre, Pléiade, t. I, p. 1043.
Bibl. de la
3. Correspondance Claudel-Suares, p. 51 : « Son écriture sur Venveloppe des lettres qu’elle me renvoyait. » 4. Les références au Journal lui-méme seront données entre patenthéses dans le texte méme, apres Vallusion ou la citation. Le chiffre romain indique le « Cahier », le chiffre arabe indique la page du manuscrit portée dans le texte.
SOOARD
VIII
Introduttion
Pourquoi cette assurance d’Ysé? Parce que Mesa, jour apres jour depuis quatre ans, lui fait confidence de son remords. Sans doute il l’en accable. Cet amour, qui est une faute contre la vocation générale du chrétien, en est une aussi contre la vocation particulitre de Paul Claudel. L’ amie est doublement l’ennemie. Comment dissimulerait-il la contradittion qui le mortifie ? Le voudrait-il quil ne le pourrait pas. Silence maussade,
mouvements
ahumeur,
autant
d’aveux.
« La
femme est la grande humiliatrice (1, 30). » Il ne se peut que, portant en soi « 1 orgueil farouche et hargneux » des Claudel, il évite de le lui faire sentir. La lettre de l’abbé Villaume qu’on lira plus loin (1, 24),
écrite de Paris le 3 décembre de l'année précédente, Ysé en a eu certainement connaissance.
« Trés cher Monsieur Paul »,
disait le curé d’Orly. Un jour elle évoquera cette formule au bas de la priére de l’abbé Perreyve copiée pour lui et par lui collée en juillet 1924 sur une page du Journal : « C’est-i/ M. Paul qui, au lieu de se marier, est retourné a sa soutane (V, 41)?» Liallusion est évidente, sinon précisément a cette lettre-ci (que Claudel a retrouvée a Villeneuve en septembre 1905 et insérée a l’endroit on il avait note d'une
écriture appliquée la mort de son « confesseur et pére spirituel »), du moins a la correspondance habituelle du prétre. Il semble difficile en effet d’admettre que l’abbé Villaume nait écrit qu'une seule fois, entre 1900 et 1904, a un jeune homme qui est « sa pensée presque constante et l’objet de [ses] meilleures prieres ». Le ton de la lettre n'est pas d’un homme qui rompt exceptionnellement le silence. Mais 1’ancien vicaire de Saint-Médard, parce qu’il fait attuellement retraite,
insiste, avec plus de force que d’ordinaire sans doute, sur Lappel de Dieu dont il craint que son correspondant n’en soit venu a méconnaitre l’urgence. Pas un mot sur la présence d'une femme mariée au domicile du consul! Claudel aura donc reculé devant la honte d’avouer son long péché a ce prétre qui tient pour certain que sa place est a Ligugé. Dom Besse, qui avait vu le postulant de 1900 et étudié son cas, attend d’ailleurs le jeune homme « pour Paques »; il prévoit méme de l’associer « plus tard » a ses « travaux ». Le jugement du moine corrobore celui du curé, a ceci pres que l’humble 1. Mémoires improvisés, p. 15.
Introduéttion
IX
prétre, qui a entendu les confessions de « Monsieur Paul », est un peu moins stir de son courage que le Bénédiétin. En septembre 1905, Claudel écrira a Frizeau que cette lettre était « toute pleine d’avertissements solennels' ». Pluriel élusif !_Au vrai Pabbé Villaume disait une seule chose: « Il vous faut revenir ici, vous démettre de vos fonttions et entrer au noviciat des bénédrétins. » Etait-ce assez net ? Seul avait été aussi « net », aussi « catégorique », aussi « parfaitement Simple » que ce oui, Je non que Claudel prétendra avoir entendu, proféré par Dien méme, dans l’oratoire des novices*. De cette opposition entre l’injonition dirette de Dieu et le conseil des prétres le récit des Mémoires porte la trace: « Mes supérieurs, probablement pour méprouver davantage, ont jugé que je devais revenir en Chine®, » Ils disent: pas tout de suite. Dieu dit: non. Un non sans « alternative », Sans « commentaire », mais tel cependant, précisera plus
tard Claudel, qu'il n’ ett pas été impossible de passer outre : « Si f’avais été vraiment un saint ou un héros, qui sait si fe nMaurais pas passé outre a cette défense de Dieu, et si malgré tout je mwaurais pas pu étre véritablement un saint’? » Passer outre par sainteté a la défense de Dien! Tel quel le propos est extravagant. Compte tenu du demi-siecle entre L’événement — un événement tout intérieur — et le souvenir qu'en a gardé Claudel — il a « une excellente mémoire, mais déformante® » — on ne prétendra pas rejoindre au-dela des mots maladroits l’exatle vérité de l’expérience spirituelle. On ose tout juste suggérer que ce non de Dieu a Vhomme fut sans doute aussi un non de l’homme a Dieu. Le « pas tout de suite » des moines n’avait libéré qua demi cette ame manifestement organisée pour une louange de Dieu a travers leforsonnement des signes de la nature et del’ histoire plutot que par le signe austere, pénitentiel, stritt, de la liturgre monacale. On sait combien la tentation du miroir est subtile dans la 1. Correspondance Claudel-Jammes, p. 60. 2. Cf. A. du Sarment, Le¢tres inédites de mon parrain Paul Claudel (Gabalda, 1959), p. 95. 3. Mémoires improvisés, p. 151. 4. Ibid., p. 157. 5. Henri
Guillemin,
« La “conversion”
de Paul
Les Etudes classiques, t. XXV, n° 1, 1957, p. 5, 0. 2.
Claudel »,
Se
Introduttion
vie spirituelle, et qu’il est facile d’appeler Dieu une image de soi qu'on objective naivement, non sans quelque imperceptible mauvaise foi. Ce dont le pocte oftogénaire se souviendra comme d’un « mySstere de la pritre: », qui peut dire s'il neat pas plutot fallu le qualifier d’illusion ? Et que sait-on de la manitre dont Claudel prit congé de dom Besse ? Lui confia-t-il ce non formel que Dieu, selon lui, avait substitué dans sa conscience au pas encore des conseillers humains ? Eprouva-til le besoin de faire contréler au-dehors la voix entendue audedans ? S’est-il méme posé la question de savoir si, croyant se soumettre au jugement divin, il n’ avait pas fait a la fors la demande et la réponse ? Ou bien ne s’interrogea-t-il la-dessus qu apres coup, en Chine, quand il sut que l'abbé Villaume et dom Besse n avaient pas cessé de voir en lui un futur novice ? « Domine, quid me vis facere? dit a peine jeté par terre Vimpétueux saint Paul. Mais ce west pas si facile d’obtenir une réponse. Peut-étre avant de faire quelque chose faut-il étre refait soi-méme. Ceux que Dieu simplement laisse faire (V, 13). » A s’en tenir a Ja lettre du curé d’Orly, cect semble certain: la retraite de 1900 n’avait pas été absolument décisive. Claudel a done souffert, pendant les quatre années de sa vie avec Ysé, d’une vive anxiété: non seulement il offensait Dien et consentait coupablement au gaspillage de l’heure présente, mais il compromettait peut-étre son avenir en s’éloignant du sacerdoce. Comprendrait-on autrement qu'il ait pu écrire a Suarés, le 2 septembre 1905: « Que ne suis-je un prétre, comme je devrais sans doute Pétre...2 » Devrais nest pas un lapsus: aucune raison de penser que Claudel néglige ici de maitriser les mots. Le regret — si remords est trop dire — de n’étre pas prétre L’accompagnera comme une basse obstinée tout au long de sa vie. Il notera, le 28 mai 1927, a!’ occasion d’un bref voyage a Villeneuve: « Seul survit pour moi [dans ce pays] cet apre désir mySlique auquel j'ai eu bien tort de ne pas céder (VI 20). » Et pew avant sa mort, en aout 1953, il se souviendra qu'une Carmélite, en route avec lui vers Saigon en mai-juin 1895, lui avait dit: « Ne doutez pas que vous avez
une vocation religieuse (X, 76 V). »
1. Mémoires improvisés, p. 151. 2. Correspondance Clandel-Suares, p. 45.
Introdutlion
XI
Dans la souffrance de Claudel, dont il es tvident a qui sait lire quelle fut le pain quotidien de cet amant passionné de la joie, la nostalgie du sacerdoce a sourdement duré. Bien stir, une fois marié, « inexorable appel de la voix merveilleuse » se fait entendre sur un autre regisire. Mais le ton @anjourd’hui wamortit jamais tout a fait le ton d’autrefois. Avoir envisagé la cléricature pendant prés de quinze ans, avoir entretenu — ou subi — en soi l'image du prétre offrant le Sacrifice et exercant Vapostolat, aucun psychologue ne muera qu'il y ait la quelque chose d’indestrudtible. Aussi bien comprendrait-on mal Mesa — le Mesa surtout du premier alle — si, a l’arritre-plan de son personnage, a travers ses brusqueries excessives et maladroites, son hostilité a sol-méme, son agressivité mal contenue, l’étrange malaise que sa présence et son langage irradient, on ne savait quelle plate vive saigne au-dedans. Il s’agit de bien autre chose que de l’esprit qui lutte contre la chair, du devoir contre l’adultére ! Plus tard Claudel sera Orian. Plus tard encore Rodrigue. On ne le fera jamais démordre de la convittion qu’il y a dans /’Eiglise la catégorie A — celle des prétres — et la catégorie B — celle des laics. Il ne se consolera jamais qua demi d’avoir été « relégué dans la classe B* ».
Le Journal prend naissance au ceur de cette crise a dimensions multiples. Claudel le commence a Foutchéou en septembre 1904, un mois apres le départ d’Y sé. Avant cette date les notes intimes du poete se réduisent a quelques observations cursives griffonnées sur des agendas de poche. Quatre de ces agendas sont aux archives Paul Claudel. Le jeune diplomate y notait ponttuellement, sans doute par obéissance au consei! de son directeur, les menues
oscillations de son
attention a Dieu et de sa volonté de rigueur ascétique. Il se reproche par exemple, le mercredi 8 janvier 1896, d’avoir « mal parlé des gens »; le lundi 20, d’avoir « plais[ anté] et
mog[ué] X et Y », d’avoir « ri de choses coupables ». Le dimanche 26, tl a entendu la « M[esse] sans att[ention] ». Le mardi 25 février, il a fait une « mauv[ aise] méd[ita1. Mémoires improvisés, p. 156.
XII
Introduction
tion] ». A Voccasion d’un « d[iner] chez X », il note une « conv{ersation] obscéne off[ensante] c[ontre] la religion ». Outre ces reperes d’ordre spirituel, les agendas fournissent quelques jalons pour une étude de Connaissance de |Est.
Ils contiennent enfin une précieuse indication : le jeudi 19 ottobre 1899, quelques jours avant son départ pour Jérusalem, Claudel a « d[iné] avec M. X... » On lit sur cette page, écrits d’une autre encre a une date ultérieure, ces
mots: « Premitre apparition. » Ils’ agit, bien entendu, d’Y sé. Rien d’intime touchant les années 1900-1904 na été conservé:. Mais en septembre 1904, « seul dans cette immense maison solitaire d’on la tragédie n’a pas été toujours absente? », Claudel, qui ne sait pas encore qu’ Y sé ne reviendra pas, lit les Moralia de saint Grégoire. C’eS alors quil ouvre, pour y noter quelques textes au fil de sa leéture, un cahier a’écolier acquis naguére ala papeterie Sacher, 29, boulevard Saint-Maichel. Son propos n'est pas de tenir un journal. Journal implique introspection et rétrospettion. Or l'une et l'autre lui répugnent également. I/ l’a dit et redit: « Si on se met a se contempler soi-méme, on m arrive a rien*. » « Rien... ne me semble plus
faux que la maxime socratique : Connais-toi toi-méme. C’est absurde, on ne se connait pas sot-méme parce que le fond de soi-méme west rien, est le néant. Le vrai moyen de connaissance serait plutot: ‘“Oublie-tot tot-méme’’, oublie-toi toiméme pour étre absorbé dans le spettacle qui s’offre a toi et qui est infiniment plus intéressant, du moins a mon avis*. » « Cest tres mauvais de cultiver ses sentiments... il n’y a rien de plus contraire a la sincérité parce que le meilleur moyen de ne pas se voir est de se regarder... Tenir un journal, se regarder, c’est le moyen le plus certain de se fausser completement’. » « Quand on se regarde, on prend toujours une pose’. » 1. Voit Journal, cahier II, 1. 2. « Choses de Chine », CEwvres en prose, Bibl. de la Pléiade, p. 1021. 3. 4. io 6.
Mémoires improvisés, p. 38. Ibid., p. 198. Eby ja Past Correspondance Claudel-Gide, p. 250.
Introduttion
XIII
L’idée lui tient a ceur; il y revient encore dans son dixiéme cahier, comme sil craignait d’oublier d’en faire état dans ses conversations avec Amrouche: « Le meilleur moyen de ne pas Se voir est de se regarder (X, 38 v). » Et quelques lignes plus loin il se moque: « Le moi, le moi-méme, et le moi-
mémissime (ipsissimus). » S°7z/ faut étre en quelque maniéreun Narcisse pour tenir un journal, nul n’y et plus inhabile quelui. Quant a la rétrospettion, on sait ce que Claudel pense des gens qui ont une prédilettion pour la « banquette arriére »: Chateaubriand, Loti... « Dans un wagon, ily a la banquette avant et la banquette arriére; il y a des gens qui regardent le passé qui s’éloigne, d'autres qui regardent le futur qui arrive... Toute ma vie jai essayé de vivre en avant et de me dégager de cette mélancolie, de ce regret des choses passées qui ne mene a rien qua affaiblir le carattere et l’imagination. » En outre, comme l’a remarqué M. Alain Girard, « il est
fort rare de rencontrer simultanément une altivité produttrice et une activité de journal. Les années de grande produttion interrompent chez un Delacroix la rédattion du journal? ». Or chez Claudel le dynamisme créateur est a peu pres constant, méme dans les derniéres années de sa vie; les chutes de tension
sont bréves et le plus souvent négligeables. La paresse n'est pas son fort. Il et par tempérament tout le contraire d’un intimiste. Il net pas davantage le chroniqueur qui se pose en témoin objettif d’une époque et d’une société. I/ lui arrivera, @ sa manitre qui est souvent celle de l’humour et parfors celle de V’humeur, d’étre l'un et l'autre; mais ce ne sera jamais de propos délibéré. Au départ, « cahier de citations »; a la fin, « fourre-tout ». Cahier de citations: ce sont les mots qu'il emploie quand, le 5 décembre 1905, il en communique a Gide les cinquante premiétres pages: « Je vous envoie un cahier de citations que j'ai prises dans les Ecritures et dans les Péres au moment de ma plus grande détresse morale*. » Quelques jours plus tard, le 16, il prie son ami de lui renvoyer son « cahier de textes* ». Lorsqu’en mai 1907 il en copiera des «excepts » pour Jacques Riviere, ce sera « cahier » tout . Mémoires improvisés, p. 95-96. . Alain Girard, Le Journal intime, P.U.F., 1963, p. 168. . Correspondance Claudel-Gide, p. 55. . Ibid., p. 59. PKH PW
XIV
Introduttion
court». Plus tard, a ToRyo, en janvier 1927, i écrira « Registre » sur la couverture du sixiéeme volume. « Dossier » est le mot de Grégoire a la derniére page des Conversations
dans le Loir-et-Cher. Citant saint Athanase a la suite de Bacon: « Il y a de tout, dit-il, dans mon dossier. » Dans le privé, il parlait volontiers de son « tiroir-caisse ». A Robert Mallet il dit: « Mon journal est un chaos, ou, si vous préferex, un fourre-tout?. » Aux citations bibliques et patriftiques Claudel méle tres vite des remarques personnelles. Ce saint Grégoire qui l’enchante et. qui demeurera un de ses guides de prédiletion dans les foréts exégétiques, il ne se contente pas de le lire la plume a la main; il s’exerce a Vimiter. Et ce sont, des les
premitres pages, ces Plaintes de |’Eglise persécutée l’an de honte 1904, od i/ applique les versets du chapitre XXX de Job a /a politique antireligieuse qui sévit alors en France. Observons en passant quaprés ledlure du Journal,on ne peut plus affirmer que Claudel n’a connu les Péres del’ Eglise qu’a travers les homélies du Bréviaire. Beaucoup l’ont dit, sans preuve, et comme si cela allait de soi. Pour saint Grégoire, il est certain quwil a lu en 1904-1905
les livres XVII
a
XXXV des Moralia. Plus tard il lira de suite et en leur entier plusieurs traités de saint Augustin et tous les sermons de saint Bernard. Il reprendra saint Grégoire en 1937 (VIII, zz). I/ empruntera a la bibliothéque de 1abbaye d’Hautecombe les euvres de Raban Maur et de Rupert de Deutz, ainsi que d'autres tomes de la Patrologie de Migne. A Ja fin de sa vie, il étudiera, au fur et a mesure de leur parution, les premiers volumes de la collettion Sources chrétiennes. I/ est également faux que Claudel wait pris contadl, a cette époque, avec la Bible, que par les fragments épars dans la liturgie. Les versets quil note de septembre 1904 a février 1905, i les a lus pour la plupart dans saint Grégoire, non sans se reporter au contexte. La traduttion et les commen1. Correspondance Claudel-Rivitre, p. 54. 2. « Conversations dans le Loir-et-Cher », CExores en prose, p. 819.
3. Valéry Pp. 10.
Larbaud,
Journal, Gallimard,
1955, Introduction,
Introduttion
XV
taires de Fillion l’agacent, il est vrai*; il n’empéche qu'il les consulte (1, 29). La Bible est sur sa table, avec le Bréviaire en quatre volumes qu'il a rapporté de Ligugé, et les Moralia. On ne peut affirmer ni plus ni moins.
Entre le 24 février 1905 et aott de la méme année, le cahier gris n'a pas été owwert. Une phrase poignante, datée du 14 février, précéde et en quelque manitre éclaire cette lacune: « Les voies terribles de Dieu. Si tu lui demandes quelque chose, crains d’étre exaucé (1, 40). » Ce n’est pas
une réflexion d’ordre général, mais un cri de douleur dont la vérite est attestée par une ligne écrite sept mois plus tard a Suares: « Il a fallu que Dieu intervint par un coup de force;
i est vrai que fjavais prié pour cela. » Claudel n'est pas moins déchiré quwil y a six mois, mais a la souffrance du remords a succédé la douleur d’une s¢paration dont il commence tout juSie a savoir, en ces sombres jours de février, quelle sera définitive. Mais un Claudel au creux de la souffrance n écrit pas des phrases de journal. Aussi bien sur « lVaffreuse nuit de la Sexagésime a Foutchéou® » est-il absolument muet. Nous savons seulement que les jours qui la précedent il lit le chapitre X des Confessions de saint Augustin (I, 41), et que la nuit méme il compose un pocme dont quelques vers seulement échapperont a lincendie de Tokyo en 1923 (VI, 60). Il eS possible que ce soit aussi cette nuit douloureuse gu évoque Lénébres :
Jai été seul dans le pressoir, j’ai foulé le raisin dans [mon délire Cette nuit ot je marchais d’un mur 4 autre en éclatant
[de rire*
Dans I’« amére vérandah® » Jacob s'est battu avec lange. L’année suivante, Claudel écrit a Suarés: « J’étais seul hier . Correspondance Claudel-Riviere, p. 51. . Correspondance Claudel-Suarés, p. 49. SHAE on oak « Corona Benignitatis Anni Dei», CEwre poétique, Bibl. de H BwN la Pléiade, p. 436. 5. « Soulier de Satin », ILI, 13, Thédsre, 1, p. 854.
XVI
Introduttion
dans ma maison de campagne (en France) avec la nuit pleine d’horreur et de mistre au-dehors. Et ¢ était juste 1anniversaire de cette affreuse nuit de la Sexagésime a Foutchéou, il y a un an. Je songeais en récitant mon chapelet au Christ venant sur la terre par un atte ineffable de sa tendresse, a Jésus suant le sang, flagellé, couronné d’épines. Avec quelle vivacité je sentais le grand sérieux de tout cela, ineffable bonté du Sauveur, ses souffrances, sa simplicité, et de mon
coté la
faiblesse, la vanité, la frivolité, les péchés honteux... C’est une courte lueur, et de nouveau me voici relancé dans le fatras
des jours et.des soirs*. » Courte lueur ! Ce n’est pas le « feu » de la veille exaltante ot Pascal connut qu’un signe lui était donné, lui certifiant son salut. C’est moins encore l’enthousiasme du songe également nolturne o Descartes sentit « le feu lui prendre au cerveau » quand le saisit 1évidence de l’unite des sciences. Mais Phumilité du mot ne signifie pas nécessairement une expérience moins cruciale.
La joie de Claudel
cependant sera
tout autre,
précédée d’un tout autre seuil, sans doute plus sanglant.
A partir du séjour en France de Claudel en 1905-1906,
les citations d’écrivains profanes interferent avec les textes bibliques et patristiques. Et l’on voit peu a peu paraitre sur le cahier, sobrement d’abord, plus amplement ensuite,
mais toujours péle-méle, des images, — dont certaines (pas toutes) prendront place dans les auvres en gestation —, des croquis de choses vues, des boutades, des projets, des récits de
voyage, des jugements littéraires et artistiques, des détails de tout genre sur la vie familiale et professionnelle du poete, Jinalement Claudel au jour le jour. Ce qu’a écrit Charles du Bos a propos de Mon cceur mis a nu donne assez exattement le ton des Cahiers claudéliens: « Plutét qu’au journal (ces recueils) ressortissent au carnet on, sans nul autre ordre que les besoins du moment, se juxtaposent le tranchant aphorisme, la note vengeresse qui soulage, le simple renseignement, la Jerme résolution que l’on inscrit dans l’espoir qu'elle ait vertu de talisman, enfin la pritre; et grace a cet entrelacs l’on 1. Correspondance Claudel-Suares, p. 77.
Introduttion
XVII
déchiffre, l’on suit les linéaments de ce quwil y a de plus touchant au monde : une vie quotidienne saisie en son péle-méle familier, et ot, a cause de cela méme, n’en transparait que
mieux:
« Tout ce que l’existence a d’intime et d’amer?. »
Ce journal, écrit a pleins bords, qui commence a l’heure on le poete entre « dans la terre de son aprés-midi® », peu avant « le moment solennel on dans la vie comme sur la cime des arbres l’or commence a apparaitre (Il, 19) », et qui S’achéeve trois jours avant son entrée en agonie, préservera les glossateurs de céder a la vieille tentation déja dénoncée par Montaigne: vouloir faire les hommes, pour les décrire ou les raconter commodément, plus uns qu’ils ne sont. Claudel n'est pas le monolithe massif dont il s’est souvent donné l’apparence. On trouvera certes dans le Journal cent motifs supplémentaires d’articuler des griefs qui ne sont pas tout a fait sans fondement: suffisance, seltarisme, incompréhension, injustice. On s’y heurtera, comme dans maints articles, essais, entretiens,
a une vanité maladroite,
a une
intransigeance hautaine dans le mépris et la condamnation sans appel. Mais on y découvrira aussi des indices de mauvaise conscience, des signes de connivence secrete avec les hommes et
les choses les plus brutalement contestés par ailleurs. Etait-il si stir de sot, cet homme
abrupt qui, semblant confondre
erreur objective et l’errance de l’intelligence, naccordait apparemment aucun droit aux indécis? On la rarement entendu, il eft vrai, remettre publiquement en question ses fugements en coup de vent. Recevant de plein fouet comme une claque qui fait mal les atteintes a ce qu'il tenait pour essentiel, il s’arc-boutait pour la contre-attaque tmmédiate. La violence de la réplique volatilisatt comme fétu la note complémentatre oul’ incise restrittive dont s’enchantel’amateur éclairé. C’ était extréme et définitif. Définitif dans 1extréme. Claudel a toujours répugné au « oui mais » qui conduit a « Vheureuse
opposition
de termes
1. Charles du Bos, Approximations, 25
qui se contrepésent® », 5& sétie, Corréa,
2. « Odes III », Giwvre poétique, p. 260. 3. « Soulier de satin », IIL, 2, Théatre, Il, p. 796.
1932,
XVIII
Introduttion
méme si a un certain niveau la vérité et la jusiice sont a ce prix. Sa vérité et sa justice sont autrement situées. Gardonsnous de passer purement et simplement condamnation sur certaines incompréhensions « scandaleuses » chez un poete qui, dans de larges domaines de la vie de l’esprit et du gout, allait jusqu’a la pointe la plus aigué de la délicatesse, de la nuance et de la subtilité. On ne peut se contenter de rappeler que d’illustres écrivains ont commis avant lui d’inexplicables bévues. Croyons plutét avec Pascal qu’une absurdité évidente chez un auteur sublime invite a chercher autre chose. Le vrai, c'est que Claudel, plutét qua des hommes, s’en prend a des types d’homme, exattement a des types d’exiStence. Les hommes sont rabroués dans la mesure ou ils sont représentatifs de ces types. « Si Claudel, écrit Pierre Ganne, traite de Turc a Maure le “philosophe’’, le “professeur’’,
l’“universitaire”’, C'est quwil sen prend a des types de l’existence en dehors de la joie et de ’humour. I/ les accuse de se prendre au sérieux, le sérieux de lavoir absolu, de ne pas s’ouvrir al étre de la liberté et de la joie, et d’engendrer ainsi un monde mécanique on tout s’explique et rien ne signifie, on tout est possédé et rien west gratuit. Ces le “Gardin aride”’ ridiculement fermé au souffle de I’Esprit. C’est aussi bien le monde du “bourgeois”, Vhomme de l’avoir, encore un “type” promu par Léon Bloy a la dignité métaphysique et représenté avec brio par Renan “tout reluisant des vertus bourgeoises”’. Plus tard apparaitra I’éxégete’”’, c’est-a-dire ’' homme qui prétend posséder la vérité de la Parole de Dieu par les seules ressources de son travail et de sa comspétence scientifiques. On aurait grand tort de prendre au sérieux du Stade éthique ces jugements qui n ont de sens qu’au Stade religieux de la liberté et de l’humour?. » On hésite a croire, en effet, que Claudel ait été entiérement
insensible ala grandeur paienne d’un Goethe. I/l’a coiffé, on le sait, du bonnet d’ane. Mais il note dans le Journal : « Goethe, incapable de sourire, dénué de toute espéce d’humour
ou d’esprit ou de fantaisie, c’est un ane (VI, 200). » Le jugement aun sens typique: c'est existence hors del’ humour 1. Pierre Ganne,
Claudel, humour, joie et liberté, éd. de VBpi,
1966, p. 92. Voit Cahiers Panl Claudel, Ul, p. 244.
Introduttion
XIX
qui eS une « dnerie »; c'est le sérieux absolu au Sade de Léthique qui est dérisoire. Si Goethe, entre tous ses pairs, et
précisément par la vertu de son gétnie, es éminemment représentatif de cette « sagesse », pourquoi se retenir de la ridiculiser en lui et a travers lui ? Serein, tranquille, heureux,
accordé a V’harmonie du monde, étranger au paradoxe de la foi, affirmant ne tenir que de soi son équilibre souverain, Le grand homme sur son piédeStal irrite Claudel jusqu’a la démangeaison. Comme il serait amusant que tant de gens qui le vénerent comme un demi-dieu entendent soudain qu’il brait ! Si saint Paul convainquait de « folie » la sagesse des Grecs, ne sera-t-il pas permis a un pote de qualifier d’« dnerie » celle de Goethe? Mais en septembre 1949 Claudel note: « Goethe dans le livre de Robert d’Harcourt. Jen sors avec une bien meilleure opinion. Il est curieux de voir ala fin du second Paust la Grace littéralement forcer la porte de ce Faust récalcitrant et lobliger a une conclusion manifetement, scandaleusement catholique. Beaucoup plus tour menté, insatisfait, malheureux que je ne croyais (X, 4v).» Du coup, sans renier pour autant sa haine vigoureuse pour le type d’existence que représentait Goethe a ses yeux, le vieux poete se fait modefte : il reconnait s’étre partiellement trompé. L’agressivité de Claudel a Pégard des Protestants et du méme ordre: les personnes sont moins en cause que le « type ». Le mot vient sous sa plume: les passagers du Korea Maru ont « le type protestant (VI, 9) ». Plus tard: « J'ai pour les Protestants la méme horreur, profonde, inStintive, presque physique, que certains ont pour les negres et les juifs. | don’t Stomach
them.
(VIII, 39 v). »
I/s n’ont point de vin, point de sacrement
Les personnes —
Calvin,
Luther —
patissent, bien stir, non sans injustice, des coups de boutoir
portés au « type ». En notre age wcuménique, Claudel evit sans doute émoussé quelque peu ses traits. Mais jusqu’a un certain point seulement, car il ne pouvait pas, sous peine de wétre plus lui-méme, ne pas englober dans un méme refus crispé le protestantisme religieux et toute forme de jansénisme eSthétique, qui selon lui ont partie liée. Claudel n’ ignore pas qu il et injuste: « Ne lui demandez pas son avis sur ses confreres littéraires, car i ne pourrait cesser d’étre injuste qu’en cessant d’étre sincere (IV, &4). » Autrement dit: injuste, je le suis, je veux Pétre. C’est done
XX
Introduttion
qu il ne lest pas autant qu'il le parait. Et quand on sait tout ce que le lycéen Claudel a dh vomir pour survivre, « la civilisation avec la Ville, les classiques avec les romantiques, Racine et Corneille avec Hugo, Kant avec Auguste Comte,
la critique biblique avec Renan, l'histoire avec Taine, 1’évolutionnisme avec Darwin, et le devenir, et le progres, et la
contingence, et la nécessité’ », on comprend qu'il ait été lent a revenir a ce qui avait manqué I étouffer. Il y est revenu pourtant. Du moins il a essaye. Par souci de justice précisément. « Pour étre tout a fait juSte avec Voltatre, il faut avoir lu Saint-Simon, se rappeler ce qu’était alors I’Eglise et le
gouvernement de la France, toute 1’Europe (VII, 1020). » Qu’on ne lui demande pas davantage a l’égard d’un homme qui traitait son cher saint Grégoire d’« imbécile » et considérait ses Dialogues comme un « monument de bétise® »! Corneille ? « Suis-je juste pour Corneille ? Du moins il nous invite conStamment a l’héroisme, a nous dépasser nous-
mémes. Son tort est quil nous y engage pour un motif d’orgueil. Mais dans Shakespeare il wy a méme pas cela, il ny a pas de héros, pas d’appel au sacrifice. Pas un seul qui
somme
toute n’agisse pour des motifs assez terre a terre
(EX, zy 2). »
Renan ? Il est « loin d’étre un imbécile... I] trouve des expressions justes et délicates...[ C’est] un homme sensibleet fin? ». Stendhal? « Relu la Chartreuse de Parme avec un plaisir médiocre. » C’est peu? Votre! Fureur et mépris sont du moins dominés (V, 74). Jules Renard disait: « Tolérex mon intolérance (i, 10s). » Claudel dirait plutét: Aimex mon intolérance ou rejetex-la. Il lui arrive de la rejeter lui-méme. Le cas de Joyce est typique: « Livre de Louis Gillet sur Joyce. Je lui écris une lettre passionnée et probablement injuste sur ce pauvre malheureux sur qui la main de Dieu s’est appesantie. Pourquoi le piétiner ainsi, étant donné que je connais si peu ses livres (VIII, 98)? » I/ reconnait qui a des préjugés. Apres avoir lu le Contre 1. 1963, 2. 3.
Paul André Lesort, Paul Claudel par lui-méme, éd. du Seuil, p. 22.
Lettre n° 5097 4 Damilaville. Cantique des Cantiques, CEwvres completes, XXII, p. 14.
Introduttion
XXI
Sainte-Beuve de Proust, il écrit a Mme Gérard ManteProust: « Tous mes remerciements, Madame, pour ce beau
livre... Il contribuera a faire disparaitre chez moi bien des préjugés'. » Au vrai, quand Claudel fustige, sait-on ce qu'il
a derri¢re la téte ? Il y a presque toujours en lui un A droite et un A Gauche, comme dans la Réverie d’un poéte francais sur Richard Wagner. Souvent l’un des deux se tait, donnant licence a l'autre d’exagérer avec délices. Mais parfois le double surgit pour couper court a l’abus et prévenir la myStification : « Pensex-vous que je naime pas "Tristan?? » Pas question de méconnaitre la grandeur de Proust: « C'est tout de méme un artiste extrémement important et considérable, il n’y pas de doute®. » Une étude méthodique des grandes « injustices » de Claudel , permettrait de déterminer avec assez de précision les auteurs ' et les euvres a propos desquels sous Vaffirmation péremptoire le doute perce. D’ailleurs la maniére dont il enfonce le trait differe du tout au tout selon qu’est ascendante ou descendante la courbe d’antipathie. Pour Wagner il eft clair qu il ne se pardonne pas de l’avoir tant aimé. Sa hargne et de dépit. Darius Mithaud est-il intervenu, dont Virréductible opposition
aux philtres de Bayreuth aurait lentement pesé sur son enthousiasme pour le tempérer d’abord, l’éteindre ensuite, et le muer en ressentiment? Ressentiment amoureux, sans doute, assex
semblable a celui de Nietzsche. On aimerait savoir de quel air, sous les palmes de Rio, Claudel accueillit les premicres confidences agressives de Milhaud. On Vimagine d’abord renfrogné, scandalisé, buté. Puis peu a peu, sensible aux
arguments, il cede. Il a pour cela de bonnes raisons d’esthétique dramatique. Mais il y mélera plus tard, dans sa rage de se chatier soi-méme en piétinant l’idole, d'autres motifs moins convainquants dont sourira, avec une indulgence amusée, Lautre ami musicien, le wagnérien Honegger. On songe, en lisant le Poison wagnérien, au mot si exad de SainteBeuve sur Lesage: « Il enfonce le trait sans pitié, comme s°il avait a exercer quelques représailles*. » CEuvres en prose, p. 1485. Richard Wagner, sbid., p. 869. . Mémoires improvisés, p. 335. LeU ndisp te Wy pn 3.5.5. H N Bw
XXIT
Introduttion
Pour Hugo et Racine la courbe se développe en sens oppose. Al travers les textes qu il saisit au vol, isole, et placarde
triomphalement dans le Journal comme pieces justificatives a Vappui de ses réquisitoires — classiques et romantiques, « tous au sctap heap (VII, 64) » — on le sent qui rode aux fronticres des auvres monumentales, cherchant la bréche par on s’introduire pour les embrasser du-dedans. La Conversation sur Jean Racine, fruit de l’automne le plus tardif, est un chef-d’envre de décantation critique, au terme d’un cheminement dont le Journal nous laisse apercevoir les détours, les retours et les reprises. Assistant en février 1935 a une représentation de Bérénice, if note: « Ennui écrasant... marivaudage sentimental... casuistique inépuisable sur Lamour... ronron élégant et gris... diftingué et assommant (VII, 64). » Vingt ans apres: « Oui, cet bean, ce langage de la nécessité... L’intelligence west rien sans la délettation. Le délice de Racine, c’est cet accord intime de la pensée et du sentiment qui multiplient Pun par Pautre leur frisson jusqu’a Vextase. » Envers Hugo, Claudel wa été juste qu’ademi, Certes ily a loin de la note brutale du Journal en 1908 (I, 95) au discours de-zgs2 sur Le Double Abime?. Ex 1908:
« Hugo et un grand poete, si on peut l’étre sans intelligence, ni gout, ni sensibilité, ni ordre, ni cette forme la plus haute
de imagination que jappelle imagination de la proportion. Simplement une énorme capacité gazeuse résultant de la possession de beaucoup de mots. Insbécillité de ses petites histoires. » En 1952: « Liesprit souffle, mais il ne peut pas soufiler tout le temps. Il y a des reprises d’haleine. Il y a des poussées superbes, mais ily a aussi de ces trous soudains, de ces chutes brutales comme en avion, qui vous font monter, comme on dit, le caur aux levres. Il y a des pietinements, de longs plans inclinés, des répétitions acharnées, un mépris superbe de la matiére du discours, d’ailleurs toujours traversée d’éclairs éblouissants, que seul un maitre peut se permettre.
Mazs le plus souvent ca décolle! Il y a la réussite, ily a Lenvol! Le plein ciel! Pour une minute. Mais une minute qui nous paie de tout le reste. » 1. « Conversation sur Jean Racine », CEwvres en prose, p. 469. 2. CHuvres en prose, p. 475-479.
Introduction
XXIII
Rien a reprendre en ces lignes, sinon que le caur n’y est pas. Claudel nous devait un texte Strittement sévére et chaleureux sans avarice. S’il ne la pas écrit, c'est sans doute qu’il ne put jamais dominer la répulsion que l'homme Hugo, bien plus que le potte, inexplicablement lui inspirait. Quand il dit que les travaux d’Henri Guillemin « nous donnent a son egard comprehension, compassion et sympathie'. », entendons sympathie au sens le plus étroit, celle, toute négative, qui nait de la compassion. Claudel se sentait devant Hugo en proie a un malaise presque physique. I! flairatt une présence « démoniaque », un « environnement noir» (X, 31 2). Les notes de 1951 et 1952 confirment la méditation de 1925
devant le buste de Rodin a Copenhague® : destin tragique de plusieurs de ses proches, « ménage sinistre hanté par tous les démons de la haine, de l’orguetl et de la luxure (X, 31 v) »,
les yeux du poéte surtout enfoncés sous « la facade impresstonnante du front », « yeux ténébreux non seulement étrangers a la joie, mais qui Vexcluent. Le reste de la figure tombant, hagard et presque désespéré (X, 2 v) ». Il faut en prendre notre parti : dans un univers étranger a la joie, Claudel se comporte en étranger; il exclut spontanément ce qui exclut la joie. Il a sans doute fait ce quil a pu pour reconnaitre la grandeur de Hugo. I/ ne pouvait pas davantage. La pitié et mauvaise conduttrice de V’intelligence critique. D’autres « variations » révilent chez ce « sedlaire » d’étranges pouvoirs pour se mettre en quesiton, se déjuger, se contredire, parfois a son insu. Ce qu’il écrivait a Gide en
rg1z sur le Style Louis-Philippe, « le plus mauvais qui ait jamais exis et qu'on confond si drélement avec le style classique® », une note du Journal le confirme en 1921, clouant Lamartine au pilori (1V, 66). Mazs trots lignes lui suffiront en 1952 pour rendre justice, en termes exquis, au
pocte des Méditations : « L’abondance heureuse dun Lamartine,... on pourrait la comparer a cette nymphe fiuide, nourrie d’une pluie monotone, qui par de paresseux détours aboutit a quelque lac prisonnier de son reflet*. » . Ibid., p. 474. i . « Positions I», Ciuvres en prose, p. 19 sq. . Correspondance Claudel-Gide, p. 174. . Vitor Hugo, Cimvres en prose, p. 474. Pw NH
XXIV
Introduttion
Ce Berlioz qu’il admire avec intempérance — et sans doute n’a-t-il jamais su quil l'admirait contre Wagner, comme Nietzsche Carmen — i/ reconnait tout de méme que son Requiem est « une auvre extérieure et éclatante, on des idées superbes sont immédiatement noyées dans I’insupportable rhétorique et phrasétologie ordinaires. Manque de sentiment vraiment profond (VII, 16) ». Et, le 15 mai 1936, c'est
« dans I’ennui et la fatigue » qu'il entend son Te Deam a Saint-EuStache (VII, 90). De Beethoven qui, plus encore que Wagner, fut l’idole de sa jeunesse, il entenden 1935 la Missa solemnis : « Médzocre plaisir, note-t-il. Enorme et pompeux, plutot que saint et émouvant (VII, 63 v). » Il remarque en avril 1951: « Beethoven est déiste, il n'est pas chrétien (X, 38 v). » La cathédrale de Strasbourg, qu’il voyait en 1913 « toute rose entre les feuilles d’avril, comme un étre que le sang anime, a demi humain: », le dégoit quelque peu en 1936: « Les vitraux sont meédiocres, les arcs trapus sans vraie puissance (VII, 90 v). » En mai 1906, al époque ot le néo-thomisme s’interdisait avec plus de raideur que de rigueur toute intelligence des philosophies de l’évolution et de la durée, Claudel avait noté : « L’imbécile Bergson (1, 57). » L’épithéte a été biffée, on ne sait quand. Bien plus tard, en novembre 1936, c est en termes mesures qu'il parle, a propos du Panta rei d’Héraciite,
de « lerreur des bergsoniens (VU, 97) ». La méthode et le Style de Sainte-Beuve le hérissent. En novembre 1939, il prononce: « Sainte-Beuve, le roi des imbéciles (VIII, 57). » Les mots sont maintenus: pas de
rature. Mais en 1954 11 prend un visible intérét a la lecture de Port-Royal (X, 8&4 sq.). Pas d’éloge explicite, mais au fil des notes un silence de sympathie. Le cas Bremond est plus complexe, typique des « variations » qu’on winscrira pas au crédit de Claudel. Il a lu, la
plume a la main, au fur et a mesure de leur publication, tous les volumes de 1’ Histoire littéraire du sentiment religieux. Mais un jour de mai 1929, l’abbé eut l’impertinence, dans un article des Nouvelles littéraires, de Je proposer « pour un prix a Académie sur le méme pied 1. « Corona Benegnitatis Anni Dei», Ciuore poétique, p. 436.
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qu’ Henri Bidou ! (V1, 94) ». Vexé, Claudel releva l’inconvenance. L’ incident donna le signal d’un renversement total de jugement. Henri Bremond désormais eut tort en tout. Pourquoi cherche-t-il querelle a dom Guéranger sur Ja question du latin de la Messe (VI, 187 v) ? Ne donne-t-il pas téte baissée dans le sophisme janséniste des « dispositions convenables pour la fréquente communion (V1, 198 v) »? Son cuvre entiére ne vise-t-elle pas a « donner raison a Fénelon et tort a Bossuet »? (ici il note sechement: « Ce mest pas du tout mon sentiment (VU, 31). » Le partisan du pur amour ne va-t-il pas jusqu’a louer cette absurde Caritée de Mgr Camus qui incendie le ciel et inonde 1’enfer 2 « Ses conclusions sont nettement choquantes, pour ne pas dire plus. » C’est un quiétiste, donc un hérétique (VII, 37). Paul Valéry disait: « Il faut étre profondément injuste. | Sinon ne vous en mélex pas. Soyer juste. » Claudel fut l'un et l'autre, et de plus, quelquefois, injuste sans profondeur, par susceptibilité, vanité, impulsivité, dépit, ignorance syftématique. Il eS arrivé a ce prodigieux letteur de balayer du regard et d’écarter d’un geste des auvres de haut prix. De propos délibéré il s’et refusé lacces a Montaigne, a Feénelon, a Rousseau, a Mozart. Il y avait parfois incompatzbilité fonciére, mais pas toujours. Que de fois, par exemple, nous le surprenons en flagrant délit de « fénelonisme », en matitre d’éducation, d’art poétique, de spiritualité méme! Que d’anticipations claudéliennes dans la Lettre sur les occupations de Académie! I/ ne Pa sans doute jamais su. Que de relations secrétes et profondes entre le baroque de Mozart et le sien! il ne s’en est jamais douté: « Incroyable qu'on ait pu faire des choses pareilles », écrit-il apres Don Giovanni (VI, 776).
Les injustices de Claudel! Compte tenu de la mobilité, plus fluide qw il ne paratt d’abord, de son intelligence critique, et quot qu'il en soit des rancunes de homme qui savatt qu'il w était pas un saint, ilfaut, pour les comprendre, et du méme coup les admettre comme on admet les ombres d’un tableau ou les crevasses d’un glacier, les inclure dans une perspective plus vaste : ce poete est un Catholique. Un Catholique de quelle 1. « Rhumbs », in Te/ que/, Gallimard, Bibl. de la Pléiade, t. II,
p. 92.
XXVI
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espece ? Lui-méme nous invite ane pas disjoindre les questions. On sait que Virgile eft a ses yeux « le plus grand génie que Vhumanité ait jamais produit, inspiré d’un souffle vraiment divin, le prophete de Rome! ». Et le Journal révéle son admiration pour Platon. Cependant, pour Claudel comme pour saint Jéréme, les « tranquilles petits bavardages de la philosophie et des poétes », «Jl agréable sifflotement de Platon, de Cicéron et de Virgile » sont « balayés » par « le rude rugissement hébraique » et l’apparition parmi nous de la Vérité qui est « Espérance déchainée » et Joie, « ce transport de joie toute crue, ce sanglot qui nous arrache a nos souliers au milieu des protestations éperdues de la “raison” et de ’’habitude?! ».
On ne dira pas que ¢’est la confondre les plans, a moins qu'on « adopte une méthode critique fondée sur un éclettisme déliberé » et qu’on admette que la création artistique peut « se nourrir indifféremment de wimporte quelles “ideologies” interchangeables® ». Méthode aberrante qui conduit a n’envisager de l’art et de la foi que les aspetts les plus superficiels, et du coup a fausser l’un et l'autre ! Les mémes raisons qui interdisent de dissocier la poésie de Claudel de sa fot catholique, sauf ane jamars surprendre le « secret de joie » d’ou jaillit Sa plus précieuse richesse, obligent a chercher du coté des limites de son intelligence croyante la clef des étroitesses et des raideurs de sa raison critique. Il eS également vrai que la grandeur de Claudel et dans l’indéchirable unité de son génie et de sa fot, et qu’en lui le chrétien n’a cessé de menacer le poete, et le poéte le chrétien.
Il lui fallait « arranger ensemble les deux mondes* ». Arranger est un des mots qui viennent le plus souvent sous sa plume, surtout quand il évoque l’agitation de son esprit dans les années qui suivirent sa conversion. Intégrer, adapter, accommoder, harmoniser sont également fréquents, en un 1. « Positions I», CEwvres en prose, p. 18, note.
2. Cantique des Cantiques, CEwvres complétes, XXII, p. 447. 3. Pierre Ganne, op. cit., p. 140, n. 64. Cf. Cahiers Paul Claudel, IS p..24450nt, 1.
4. Mémoires improvisés, p. 5%.
Introduction
XXVII
sens tres voisin. Il confie a Jean Amrouche quwil eut a accomplir « un travail d’adaptation excessivement difficile, parce que ce n'est pas du jour au lendemain qu’on apprend a faire une place a des éléments aussi diffciles a intégrer, aussi séparés de nous que la vérité catholique, qui est effroyablement diffcile a intégrer dans notre vie laique, dans notre vie ordinaire, surtout pour moi qui en avais un sentiment tres intense’ ». Dans Ma conversion : « Ce qui était le plus répugnant a mes opinions et a mes gotits, c'est cela pourtant qui était vrai, cet cela dont il fallait, bon gré mal gré, que 7e m’accommodasse?. » En septembre 1927, en marge d’un portrait graphologique qui relevait un « défaut d’harmonte » dans son esprit et dans son caraétére, il note: « Ce nest pas si béte. Ce qu'on peut dire aussi, ¢’et que je n'ai pas encore achevé l’hatmonisation de tous les éléments disparates dont je suis composé (VI, 31). » Non seulement il ne l’a jamais achevée, car ces la condition humaine qu'elle ne puisse Pétre, mats il na pu Ventreprendre et la poursuivre quan prix d’une ascese intellettuelle et spirituelle dont le peu qu'il nous en dit laisse a peine entrevoir ce qu’en réalité elle
lui cotita, Pourquoi sa mémoire le trahit-elle quand, citant Rimbaud dont les phrases de feu wont cessé de 1illuminer depuis sa dix-huitieme année, il écrit: « Le combat spirituel plus sauvage que la bataille d’hommes* », au lien de: « aussi
brutal que...* » ? Il et vrai que Claudel es alors offogénaire et qu'il n'a jamais été scrupuleusement exalt dans lusage des citations. Ce lapsus est tout de méme plein de signification : il se souvient d’une effroyable mélée intérieure. Un peu plus loin, il parle de « Pespece de fureur avec laquelle [il se] défendait contre la Foi qui [l’]appelait® ». Nous savons d’autre part que l’appel de la Fot ne fit qwun, jusqwa son mariage, avec l’appel du sacerdoce. On ne peut douter que la fidélité de Claudel au Credo catholique fut une fidélité cohteuse. La paix survint, et avec elle une souveraine liberté . Ibid., p. 28. . CEuvres en prose, p. 101. . Mémoires improvisés, p. 29. . Une saison en enfer, Bibl. de la Pléiade, p. 244. RwWwhHD M . Mémoires improvisés, p. 51.
XXVIII
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créatrice dans |’épanouissement du génie, mais ce fut une paix armée. Selon les époques la figure du combat changea. Mais il s’agit toujours de protéger ce qu'il avait chérement acquis. Comme l’a remarqué avec beaucoup de pénétration Maurice Merleau-Ponty, « Claudel n’a jamais laissé voir a quel point il comprenait les autres. C’est pourquoi il élevait autour de lui ce rempart d’incompréhension volontaire? ». Souvent, en effet, il les comprenait parfaitement bien, mais il ressentait cette intelligence sympathique comme une tentation. Si le fanatisme est le refus du dialogue, Claudel a bon droit passe pour fanatique. Mais ce refus est tout de surface, d’autant moins viscéral que se découvraient a lui plus délefables les erreurs dont il éprouvait intensément la menace. Eat-il été poéte si les souffles des quatre vents du ciel avaient glissé sur sa peau sans qwil en sentit la caresse ? Le tort de certains critiques est d’admettre, sans plus d’examen, que les poemes qui comptent parmi les plus sensuels — au sens noble du mot — de la littérature universelle aient été secrétés par un bloc de granit. Et il ne s’agit pas seulement de sensualité! La voix des sirenes frappe aussi l’oreille de Pesprit: «Il y a des choses que je wadmets pas, mais évidemment cela mintéresse beaucoup, west-ce pas ? Dans les choses qu'on rejette il y a tout de méme un travail de compréhension...* » Mais tout ce avec quoi il a di « s’arranger », tout ce quil a composé en lui dans la douleur, — ni plus ni moins que l’évangélisation une a une de toutes ses facultés —, qui sait si une concession, une bréche dans le « rempart d’incompréhension volontaire », weit pas suffi a le « déranger », a le « dé-composer »! Il se connait hypersensible, tel qu’un regard, une confidence, une
marque
de
sympathie le bouleverse. Alors il durcit le trésor essentiel, il lui fait une carapace, il le met a& l’abri. « Une influence extérieure — je ne dis pas conStamment, mais a certains moments — peut étre positivement nuisible et vous égarer. I/ doit y avoir une espece de sentiment farouche, d’intrépidité personnelle, pour guider le potte, le poéte en germe, et lui permettre de diftinguer ce qui lui est bon, ce qui lui est mauvais, et de repousser avec une espece d’horreur ce qui est 1. Szgnes, Gallimard, 1960, p. 396. 2. Mémoires improvisés, p. 97.
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XXIX
délétére pour lui. » Cela est vrai du croyant plus encore que du potte. Aussi bien celui qui est indivisiblement l’un et Vautre doit-il étre exceptionnellement attentif a ne pas « s’évaporer en conversations », pour ne pas étre « affaibli » et « troublé? ». « De la vaporisation et de la centralisation du mot, disatt déja Baudelaire. Tout est la*. » Cette attitude qu’il voulait de « centralisation » et qui fut plus d’une fois de fermeture lui est d’ailleurs dittée par des impératifs religieux: dont il ne soupconne pas qu ils sont en partie liés a une époque de faible réflexion théologique. Epinglons ici un admirable texte du P. Yves de Montcheutl,
écrit vers 1930, propre a faire sentir, a partir d’un point crucial, que lVinstruction chrétienne de Claudel, et donc son aptitude au dialogue, s’il fat venu au monde cinquante ans plus tard, eussent été tout autres: « Ceux qui aiment ' sincerement la vérité, fille de l’Esprit-Saint, ne sont pas ceux qui wacceptent de la contempler que la on elle brille de tout son éclat, mais ceux a qui elle est si chére qwils en recueillent partout les moindres fragments, qu’ils la recherchent partout, méme la on lignorance et la perversité des hommes Pont rendu méconnaissable. Ceux qui n'ont pas le courage de L’aimer la on elle est défigurée ne sont pas capables d’avoir pour elle un amour pur la on elle se révéle dans toute sa gloire’. » Dans les années 80, ces lignes eussent paru suspettes, moderniftes avant la lettre.
Un Laberthonniéere, un
Blondel, un von Higel eussent pu les écrire, mais dans les milienx que fréquentait Claudel ces précurseurs étaient ignores ou dprement combattus. On avait alors sur le salut-des infidéles des conceptions fort éloignées de la grande tradition des Péres. Dans la prédication courante on ne redoutait pas de vouer a la damnation (ou a une béatitude dite de « nature pure ») tous les non-baptisés. La_ distinition — cependant classique — entre ceux qui appartiennent visiblement a I’Eglise et ceux qui lui appartiennent invisiblement était souvent passée sous silence, ou du bia
Dat 2
Gidea O03. . Mon ceur mis a nu, Bibl. de la Pléiade, p. 1206. . Yves de Montcheuil, Problemes de vie spirituelle, Paris, 1945,
2
82.
H HPWH
XXX
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moins étroitement envisagée et superficiellement fondée, dans maintes écoles de théologie. On tombe des nues quand on lit gu’en novembre 1926, Claudel, agé de cinquante-huit ans, découvre I’enseignement de Pie LX dans l’encyclique Quanto conficiamur moerore dw 10 aotit 1863: « Ceux qui, souffrant d’une ignorance invincible touchant notre sainte religion, suivant fidelement les préceptes de la loi naturelle gravée par Dieu dans le ceur de tous, et préts a obéir a Dien, menent une vie honnéte et droite, peuvent par la vertu de la lumitre divine et de la grace [qu’ils ignorent] acquérir la vie éternelle. Car Dieu qui voit, scrute et pénétre jusqu’au fond les esprits, 1’ame, les pensées et les habitudes de tous les hommes, Dieu infiniment bon et clément, ne souffre nullement gu'aucun [adulte] soit puni des peines éternelles qui n ait pas a répondre d'une faute volontaire. » Claudel note: « Cela pose une foule de questions théologiques tres délicates (V, 724). » On n’est pas plus naivement surpris. Et pourquoi releve-t-il, deux ans plus tard, ces mots du
De spiritu et littera de saint Augustin: « Dieu eS mort pour tous les hommes, y compris les paiens (NVI, 107) », sinon parce que l’idée est nouvelle pour lui, ou du moins qu il est heureux de la confirmer par une référence autorisée ? Son xele, plus d’une fois intempesirf, son prurit de prosélytisme,
son ardeur indiscréte a « convertir », la théologie superficielle des derniéres années du XIX® siécle en est pour une grande part responsable. Pour Claudel ceci seulement importait: on ne badine pas avec la vérité. Parmi les hommes qui venaient a lui, et qwil a décus, certains, il eS vrai, badinaient; mais d’autres, non. Son discernement ne fut pas infaillible. Admirons qu'il ait eu
’humilité, au moins sur le tard, de
mettre son intransigeance au compte d’une défaillance personnelle: « Si j’avais été un confesseur ou un prétre, jf’aurais essayé plutot davantage de me mettre dans la peau de mon interlocuteur, de le comprendre mieux, de my intéresser davantage. C'est ma triste nature qui en et la cause, je le regrette. Si j’avais été prétre, sij’avais eu plus de charité, si Je métais plus intéressé a la personne en elle-méme, telle quelle était, avec ses défauts et méme ses vices, fjaurais mieux réusst. Je le regrette. » 1. Mémoires improvisés, p. 266.
Introduttion
XXXI
Pour étre juste, il faut renoncer a peser les brusqueries et les étroitesses de Claudel avec des balances qui w étaient pas celles de son temps. L’hérétique, Vapostat winspirent plus aux catholiques d’aujourd’hui la méme horreur qu’a ceux ahier. La dureté al égard des errants nous choque plus que Perreur elle-méme. Il arrive que ce ne soit pas pour les meilleures raisons. Or Claudel était trés sensible a ce que rectlent souvent d’impureté ou de lacheté certaines formes de tolérance. On sait que ce mot le hérissait: « Tolérer, mot ignoble (1, 105). » A mesure que la théologie évoluait dans le sens d'une intelligence plus profonde de l’axiome traditionnel : Hors del’ Eglise pas de salut, il pressentait un péril d’affadissement de la foi. Plus d’un, en effet, qui se croit profond, dévie; d’autres, qui se piquent de largeur d’esprit,
_ manquent simplement de fermete intellettuelle et de courage. ’ Que de missionnaires dont l’élan s’est ralenti, sous prétexte que leur office était moins d’arracher les paiens aux griffes de Satan que de les élever, en leur révélant Jésus-Christ, a la forme d’existence la plus haute! Ce refroidissement du xéle représentait aux yeux de Claudel le mal essentiel dans 2’ Figlise. IN’ayant pu étre prétre, l’écrivain prit done le ton des prophétes, énoncant comme eux, a temps et a contretemps, les vérités qui déplaisent, prenant a la lettre le verset de
Lépitre aux Romains (qu’il note en 1933): Nolite conformari huic saeculo!. I/ fut sciemment abrupt, intraitable, plus sensible a la grandeur du bien qwil voulait aux hommes qu a l’urgence de respetter leur liberté, plus prompt a les « enfourner au confessionnal? » qua s-accommoder de la lenteur de leur cheminement. Faut-il penser que cette « incompréhension », ascétique d’abord et purement volontaire, lui devint peu a peu naturelle jusqua devoir étre finalement comptée, de son propre aveu, au nombre de ses « attributs®
»? A force de faire le sourd,
a-t-il fini par ne plus entendre? Il semble plutét qu'il fut simultanément compréhensif et incompréhenstf, résiSant par devoir a la tentation de sympathie et consentant par tempérament a celle d’antipathie. « Envers toutes les erreurs de la its Hopton, GUL, ba, (Cis WAU, a, 2. Correspondance Claudel-Riviére, p. 27. 3. H. Mondor, Claudel plus intime, Gallimatd, 1960, p. 202.
XXXII
Introduttion
pensée, dit-il, ily a certainement un don précieux de compréhension et de sympathie. Mais il y a aussi un don d’antipathie. Ce serait plutot le mien (X, 57). » Ila prés de quatre-vingtquatre ans quand il s’en avise. Fut-ce un cadeau de la vieillesse ? Il le nie: « Effet de ma formation spéciale, de mon tempérament'. » Il faut Len croire. Il y a toujours eu du Veuzllot en lui, et du Bloy. Comme on le sent fier de se ranger aux cotés de ces « héros »! « Remets ton coutelas dans sa gaine, brave Veuillot, et toi, vaillant Léon Bloy !
(sans parler de P. C.!)?. » Quand il note en 1909 ces
lignes de Bonald, qwil a lues dans Balzac: « Un écrivain doit avoir des opinions arrétées; il doit se regarder comme un instituteur des hommes, car on n’a pas besoin de maitres pour douter (1, 132)», i ne formule pas seulement une regle de conduite, il aiguise le tranchant de son intolérance tout en la justifiant a ses propres yeux. Pour s’assurer de son bon drott, tl glose, le 1°" janvier 1933, le verset Beatus quiallidet parvulos suos ad petram (Ps. CXXXVI, 9) : « On dit de Perreur quelle fait des petits. Heureux qui interrompt cette fécondité maudite avant qu'elle ait eu le temps de se développer, et qui extermine, qui réduit en morceaux ces petits sur la pierre de la Vérité révélée (VII, 7). » Et dl copie, en avril 1941, ce texte de ’Introduétion a la vie dévote : « I/ faut dire rudement et franchement le mal du mal et blamer les choses blamables. Il faut sans doute observer, en blamant le vice, d’épargner le plus que vous pouvez la personne en laquelle il vit. J excepte tous les ennemis déclarés de Dieu et de I’Eglise, car ceux-la il faut les décrier tant qu’on peut. C’est charité de crier au loup quand il est entre les brebis (VIII, 8&1 v). » On ne fait pas aux loups des propositions. Rien d’autre a faire qu’a les exterminer, surtout quand il s’agit de cette race de loups qui se spécialise dans la littérature, et que ce sont de « malheureux enfants » épris d'art, de thédtre ou de poésie qui risquent d’étre manges ! Puisque Dieu a pourvu Paul Claudel, ce rescapé des « tristes années 80 », d’armes puissantes pour
mener a bien l’entreprise — don du verbe au service du don 1. Mémoires improvisés, p. 223. 2. « Un poéte regarde la croix»,
Cures completes, t. XIX,
Py 2055 tt) te
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Introduttion
XXXIII
d’antipathie — Paul Claudel s’y emploie avec une joie passtonnée. Que le vent du siécle soit a l’indulgence n'est pas pour le retenir, Au contraire! Il lui déplait si peu de déplaire | Contredire la mode redouble son A Mais il reconnait que le don « de compréhension et de Sympathie » est « précieux ». C’est un signe qu il ne lui est pas étranger. L’aveu suffiratt, si d’autres raisons manquaient, @ le mettre a Vabri du grief d’intégrisme. Claudel eut pour amis tres chers des hommes parfaitement agnoStiques. Il eut intelligence, le tatt, de ne point les presser indiscrétement a se convertir. On ne l’a jamais vu exercer al égard de Philippe Berthelot un prosélytisme intempérant. Les « appels » qwil lui lanca’, tout indique qu’ils ne furent pas insistants. Au lendemain de la mort de son ami, i écrivit dans le Journal : « Affrenx crévement de caur, tant de priéres depuis trente
ans inutiles. Pour me consoler: 1° ce que je ne puis payer, Dieu qui a envoyé Philippe a mes cotés et a celui des miens le payera a ma place. —« Leurs auvres les suivent. » Tout ce qu il a fait de bien. Rien ne sera perdu et sans récompense. — 2° Le pasteur Vergari qui a fort bien parlé nous dit qu'il y a trois choses que Jésus-Christ ne pardonne pas: Vhypocrisie, la dureté bnceur, la préférence ignoble donnée aux biens de ce monde. De tout cela il était exempt. — 3° Se souvenir de ce que dit saint Jean: Il n’y a qu'un grand commandement : Aimez-vous les uns les autres, et il suffit. I/ lui sera beaucoup pardonné parce quil a beaucoup aimé. Seigneur, quand eft-ce que vous étiex nu et que Je vous ai nourri, etc.? Quand vous avez fait cela a l'un de ces petits, vous l’avex fait a mot. Ainsi il n’y a pas besoin d’une foi explicite. C’est Dieu lui-méme qui se déclare débiteur de tout bienfait a l’égard de nos fréeres (VII, 61). » Dans ces lignes une tendresse virile qui n’a pas a se défier d’elle-méme ouvre L’intelligence croyante a la pleine lumiere évangélique. «Il n'y a pas besoin d’une foi explicite ! » Pour une fois — la seule peut-étre — Claudel, qui se souvient de I’encyclique de Pie LX, ose l’affiirmation. Il sait cependant qu'elle n'est
vraie qu’a certaines conditions. L’amitié ni le chagrin ne Je
retiennent de les préciser. Il veut croire que dans le cas de 1. Voir « Consolations 4 moi-méme sur la mort d’un ami», in Accompagnements, Gallimard, 1949, p. 205. CLAUDEL
V - 2
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Introduétion
Philippe Berthelot elles sont réalisées. Alors, sans en rabattre de sa rigueur dottrinale, il dit son espérance. Mais que son bienfaiteur et ami wait pas connu explicitement le Sauveur des hommes, cela lui créve le caur. La suffisance de la foi implicite n'est pas une consolation de facilité obtenue aux dépens d’un amour passionné de Jésus-Christ. Edouard Herriot, universitaire, radical-socialiste, laiciste
militant, représentait tout ce qu’abhorrait Claudel. Tel quel cependant il l’aimait. La culture et l’éloquence du maire de Lyon le ravissaient au point de l’incliner a tempérer la sévérité de son jugement sur l’humanisme dont on se nourrit du c6té de la rue d’Ulm : « Quel orateur étonnant ! Ouel tat ! Quelle présence d’esprit! Quelle maitrise de Pexpression agréable et de la chose juste a dire! Cela me rendrait plus favorable a l'éducation classique 1X, 36 v). » De religion, pas question. Certes nous ne savons presque rien des longues conversations des deux hommes sous les ombrages de Brangues et de Brottel. Mais il est peu probable que Claudel entreprit Herriot sur ce chapitre. Le Journal en tout cas n’en souffle mot: indice de discrétion. Ils avaient des opinions différentes : le Catholique en avait pris atte une fois pour toutes. Ce défenseur de la foi qui avait identifié ’Asie paienne a Lenfer, ne redoutant point dassimiler a Satan « le trois fois infame Bouddha tout blanc sous la terre allongé comme un ver immonde® », L’idée lui vint un jour « d’un accord possible entre la conception hindoue et la vérité chrétienne (1V, 71 v)». Il a tu les livres saints des religions orientales; il S’et intéressé aux
travaux
de René
Grousset,
de René
Guénon, il a rencontré Sylvain Lévi et Léonard Auroussean. Le contatt diredt avec les textes, les commentaires de ces orientalistes en qui il a trouvé « une sympathie, une impartialité, une fermeté de jugement qui manquaient a bien des ouvrages de leurs prédécesseurs® » ont « dissipé beaucoup de préojugés [qwil avait] contre la philosophie de 1’ Orient? ». 1. Voit Cahiers Paul Claudel, IV, p. 322. 2. « Corona Benignitatis Anni Dei, saint Francois-Xaviet », CEuvre poétique, p. 462. 3. Frédéric Lefevre, Une heure avec..., 3° série, Gallimard, 1925, p. 158.
4. Ibid., 5° série, 1929, p. 116.
Introduttion
XXXV
« L’Amida de la Chine et du Japon est presque chrétien'. » « Cela fausse terriblement le jugement sur [les livres sacrés de I’ Inde] que de vouloir les juger avec notre rigueur occidentale et notre habitude de tout syStématiser®. » « Il n’y a lien de “se garer’’ de rien. Nous ne courons aucun risque a prendre contact avec la pensée de la plus grande partie de l’humanité nt a étudier sa philosophie®. » « Il et consolant de penser que dans toutes les religions se trouvent des dmes si hautes, pareilles a des séraphins dont les ailes se rejoignent par les extrémités les plus hautes*. » Pour qualifier ces propos, la malvetllance, qui a tant de mots a sa disposition et qui a si souvent, pour d’autres attitudes de Claudel, utilisé seCta-
risme, dira sans doute ici libéralisme, voire syncrétisme. En outre voici qu’a ce letteur attentif de saint Thomas un apologue des Questions de Milinda fait toucher du doigt la raideur des schémas de l’anthropologie scolastique. I! note en 1931: « L’erreur des scolastiques et de vouloir trop compartimenter 1’dme humaine. I/ n’y a pas de cloison étanche entre les diverses facultés. Dans intelligence il entre beaucoup de volonté: l’attention. Dans la volonté beaucoup d’intelligence: le tennis. Dans la sensibilité, beaucoup de ces deux facultés : intelligence qui discerne les éléments composants d’un plaisir, volonté qui_y applique tout l’étre ou tel ou tel organe. Et ces trois facultes se retrouvent dans !’imagination (VI, z8r). » Le poéte, bien stir, savait cela depuis toujours !
Mais le philosophe, trop sévérement en garde contre toute pensée étrangére au thomisme, inattentif par syéme a la psychologie des franges et des clairs-obscurs de la conscience, Lavait mal apercu. Ainsi déja, quand il composait I’Art poétique, z/ avait « bergsonisé », tout en se croyant obligé, apres coup, de se déclarer contre Bergson. Ainsi encore, en 1926, il « teilhardise », en attendant, quand il rencontrera
le P. Teilhard de Chardin, de le regarder d’assez haut: « Le scandale des Chrétiens du XIX sitcle devant ies découvertes de la Science vient de ce qu’ils ne pouvaient se représenter Dieu aussi immense et éternel qu’Il l’est (V, 127). » . Ibid., 3° . Ibid., 5° Ibid., 3° Lettre 4 RWwN
série, p. 159. série, p. 116. sétie, p. 158. Darius Milhaud, Cahiers Paul Claudel, III, p. 193.
XXXVI
Introduttion
L’étrange monolithe que voila! « Un cyclone figé », disait Gide. Mais figé n'est vrai que du masque, et de cette carrure physique dont on a trop voulu qu'elle soit le signe d’une assurance de soi sans attention ni question. Et cyclone a le tort d’exclure les souffles de tendresse, ce calme aussi, que la familiarité divine rend compatible avec lexces méme de la mobilité et la rencontre des vents contraires, ce « coup de douceur par quoi la paix se fait tout-a-coup entre une foule éléments discords* » et qui est un des « tempo » essentiels de ce passionné. .
Vaniteux, violent, maussade, insociable, égoifte, avare:
ces épithetes, d&ja ressassées, risquent de fixer pour la postérité le personnage de Claudel. Pour plus d'un, qui s’incline devant l’euvre, la cause est entendue: l homme était
impossible. Aux approximations de la malveillance, le Journal fournit des gages. Mais a la charité de l’intelligence il procure aussi, au niveau d’existence le plus profond, des
arguments décisifs. Claudel s’et accusé lui-méme amplement. Peu de petits cotés de soi qu’il n’ait connus et reconnus, introduisant a la clef un diese plus souvent qu’un bémol. « Il_y a des gens qui réussissent a cacher méme leur hypocrisie (V1, 28). » Pour lui, sa finesse de diplomate et sa roublardise de bourgeois rural sont inhabiles a cacher aucun défaut. I/ se méfie pourtant de la sincérité. Elle « eft simplement un manque d’empire sur sot-méme. C’est plus commode de ne pas se retenir. Le manque de retenue extérieure correspond an manque de retenue intérieure. Et puis a s’exhiber, avec quelques enjolivements, la vanité trouve son compte (X, 75 v) ». Cest le cas, sans doute, quand sans vergogne et avec une pointe de bravade il dit sa proche parenté avec Turelure, ou lorsqu’il
charge Florence d’esquisser le portrait de Furius: « Il faut le voir dans une compagnie, tout maussade et rencogné, wintervenant dans la conversation que par des plaisanteries saugrenues et des coups de boutoir, quand ce n'est pas une de de ces gaffes profondes auxquelles le génie naturel ne suffit pas. 1. Apocalypse, Gallimard, 1952, p. 306.
Introduttion
XXXVII
Il y faut la collaboration d’une puissance occulte'. » Certain amtral,aux heures japonaises, était bon psychologue, qui remarquait: « Je n'ai jamais connu personne qui soit plus content de ses défauts (V, 38). » Si Claudel fut, comme il le dit, « vexé »,
cest qu'il ent préféré avouer lui-méme ce contentement. Voici qui est autrement sérienx: « Si mes livres ont pu faire quelque bien..., c'est par une grace de l’Esprit-Saint dont un rayon a traversé tout ce qui m appartient en propre, cest-a-dire cet amas effrayant de sensualité, de vanité et de violence®. » La gravité du ton, la précision des termes excluent tt la complaisance et situent la confession au-dela de toute littérature. L’homme se connatt, et se hait: « Soyex
témoin que je ne me plais pas a mot-méme*. » Il s’agit bien de petits cotés ! Ce qui est en cause, c'est la résistance massive de la nature — de telle nature, héritée ou acquise, celle de
Paul Claudel — a Paccueil de la liberté et de la joie qui, pour un Chrétien, ne sont pas des valeurs tmpersonnelles, mais « Ouelqwun* ». C'est la lutte pied a pied avec ce Vivant par qui l’on est sot-méme vivant — «Il vit, je vis » —, cet Autre qu'il faut « tolérer en soi-méme® », et qui exige, qu'on soit bénédittin ou diplomate, un absolu détachement de soi. Au lien que la vie intérieure est relation,
on dialogue, avec soi-méme, la vie spirituelle est relation, ou dialogue, avec le Saint-Esprit. Or si les drames, les poemes,
les commentaires bibliques illuminent par éclairs incessants la vie spirituelle de Claudel, si, plus exattement, la moelle de ses cuvres est cette vie spirituelle elle-méme, ce nest
jamais que dans la mesure ot la transmutation d’art est possible sans le veto de la pudeur. Claudel au jour le jour et au ras du sol — toute vie spirituelle eS au jour le jour et au ras du sol — dans sa priére et son ascése, son examen de conscience et son remords, son effort et sa candeur, seuls Le Journal, e¢ sans doute une partie de sa correspondance, peuvent L’entrouvrir un peu. 1. « Conversations 1D. 670;
dans
le Loir-et-Cher », CEawures en prose,
2. Lettre inédite 4 Francois Varillon, 17 mars 1934. 3. « Partage de midi», Thédtre, 1, p. 1052. 4. Odes. II, p. 249, Giuvre poétique. 5. « Partage de midi», Thédtre, I, p. 1002.
XXXVIII
Introduttion
Ce que Claudel, pour accomplir son ceuvre et s’accomplir en elle, devait a tout prix protéger, c’est Pessentiel silence, « source et fin de toute Parole ». Il savait déja quwil est un autre nom de Dieu lorsque, composant I’Art poétique, i/ destinait toute phrase a « se décomposer », toute parole a se « consommer a loreille de Sigé I’Abime? ». Or dans sa vie le silence est environné d’ennemis qui le menacent sans répit. Famille, profession, relations, cérémonies, réceptions, com-
ment au milien de tout cela maintenir et accroitre cette « profonde attention qu’un vrai pocte doit a son auvre® »? Que son univers intérieur soit envabi par le bruit, il s’abime comme Ephraim mélangé aux peuples. « C’est le danger des conversations mondaines. Dans les rapports avec le monde, il
faut au Chrétien une vigilance continuelle pour ne pas se briler. Il faut savoir se retirer a temps, se garder du mélange, d’une communion avec le profane. Des étrangers dévorent sa force et il ne s’en est pas apercu! Ses cheveux: tout blancs se répandent, et il ne sait pas! Les cheveux, ce sont les pensées sans surveillance.
Blancs, desséchés, ils n’ont plus de vie,
plus de suc, la graisse, la grace vivifiante leur fait défaut : Sicut foenum cremium aruerunt et veterascent. Et faétus est Ephraim quasi columba seducta non habens cor (VIII, 53 v). »
Mais imagine-t-on un ambassadeur sans vie mondaine ? Claudel la réduit autant que faire se peut. Ce n'est pas du gout de tout le monde dans son entourage. Encore est-il que ce qui en subsiste lui eft insupportable: « Croix de ma vie mondaine. Inveteravi inter omnes inimicos meos. Habitavi cum
habitantibus
Cedar
(IV, 79 v). » Les
gens n’ont rien a lui dire, et il n’a rien a leur dire. « Que me reprochex-vous tous? Que je suis insociable? que je n’aime pas a étre touché ? et que la conversation de mes semblables, quand ils mont rien a dire, m’accable? Qu’eft-ce que ¢a prouve ? Suis-je le seul homme qu’ennuient les choses inutiles ? Elles ennuient tout le monde. Mais moi elles me causent une
1. Sur le théme du silence dans l’ceuvre de Paul Claudel, voir
Pierre Ganne, op. cit., p. 94. Cf. Cahiers Paul Claudel, Il, p. 245. 2. « Art poétique », CEwvre poétique, p. 145. 3. Mémoires improvisés, p. 155.
Introduttion
XXKXIX
espece de désespoir'! » Il défend sa solitude — ou, ce qui revient au méme, sa liberté — par une ponttualité exemplaire, un horaire jour apres jour minutieusement respedé. Pas de vie plus réglée que la sienne ! Dans les brouillards de Copenhague comme sous le soleil de Rio, au Japon comme en Amérique, sa promenade de fin d’aprés-midi est rituelle. Les enfants qui jouent au bois de Boulogne verront passer, chaque Jour exattement ala méme heure, ce vieillard qui marche d’un bon pas. C°est la qu’enveloppé de silence nourricier il absorbe, mache, rumine. Fera-t-on bien de s’étonner s’il ajoute a ces barritres, comme supplément utile de protection, une demisurdité volontaire? Ses proches nous disent qu’il entendait parfaitement bien ce qu'il voulait entendre. Et si ce rempart dott étre renforcé, la mauvaise humeur y pourvotra. Il n’a pas a s’y appliquer. Elle eS installée en lui depuis toujours, venue ' tout droit de Villeneuve et d’une famille querelleuse, ne dormant jamais que d’un ail. Un rien ta révetlle, une contrariété, une contestation, un inconfort. La brusquerie hargneuse dégénére facilement en violence, et ce sont alors ces « scenes » qu il évoque a plusieurs reprises dans le Journal, ow ces lettres impulsives de sommation, ou ce mutisme grondant que wont cessé d’appréhender ses collaborateurs des ambassades, du thédtre, ou de
’édition.
Claudel s’absout jusqu’a un certain point de n’étre pas aimable. A condition toutefois que la charité ne soit pas blessée ! Or elle l’est bien souvent. Il le sait, il en souffre, i se repent, il prie Dien de l’aider. Habitant trop assidu de la Bible pour wétre pas convaincu que la charité envers le prochain est le signe auquel le disciple du Christ eS reconnu, i garde mauvaise conscience en ce domaine. « Vous ne m avex pas donné de pauvre a nourrir, ni de malade a panser, ni de pain a rompre®. » « La parole qui es recue plus completement que le pain et l’eau » sufit-elle a 1 accomplissement du précepte ? Il n’en est qua demi persuadé. « Je suis a un age, écrit-il en 1934, on l’on ne peut guere se faire d’illusion sur sot-méme. Saint Francois dit que les jongleurs ne peuvent pas étre mis sur le méme pied que les combattants, et que les 1. « Conversations dans le Loir-et-Cher », CEwvres en prose, p. 671. 2. Odes, V, Ciwvre poétique, p. 283.
XL
Introduttion
plus belles paroles ne sont rien a coté du plus mince atte de charité’. » La sainteté est un tissu d’attes minces: avant de lire cela dans Caussade en 1936 (NUL 84), i la entendu des 1890 de ses conseillers spirituels. Mais un pli était pris, datant des plus jeunes années: tout gamin, sa mere lui « expliquait sans charité » les gens de Villeneuve. « Chex tous ces gens, ce qu'il y avait de plus carattéristique, c est la haine. Ils se haissaient tous, surtout entre parents. Violences,
Lriefs, vengeances longuement méditées... Profondes précautions a l’égard des uns et des autres (VIII, 20). » L’ancienne bonne
Vittoire, « qui était une
excellente fille, couvrait
d’injures sa mere, la vieille Brunet (VIII 22) ». L’enfant Claudel ne fut pas nourri de charité. I fallut que Vhomme en découvrit peu a peu V’exigence, et sappliquat a défatre Le mauvais pli. Il y réussit mal. Parfois ilplaide les circonstances atténuantes: « Pourquoi les Catholiques, spécialement les laics, ont-ils si peu de charité envers le prochain ? D’abord parce que, placés dans un état de lutte continuelle, entre les
deux mondes, et ne possédant ni l’un ni l'autre, ils sont dans un état de souffrance et, par conséquent, d’énervement. Ils sont déja désacclimatisés de celui-ci et, par conséquent, on ne peut pas leur demander d’y étre heureux “comme un poisson dans lean’. Un milieu continuellement irrespirable. Rien que des gens qui ne vous comprennent pas et que l’on a cessé de comprendre ! Impuissance de leur faire du bien qui devient trop facilement de la bouderie et de Virritation. Sentiment de ses propres faiblesses, comme un homme qui marcherait continuellement dans un chemin difficile et plein de pierres (la pierre de scandale). Soudaineté des tentations contre la charité. Exntrainement continuel. La et la cause profonde de toutes mes fautes, méme de celles de ch[ asteté] (V, 15). » Le plus souvent, il s’accuse sans ménagement: « En faisant mon examen de conscience, je vois que tous mes péchés, et spécialement ma chute de 1900 » — il ne cessera pas @affirmer que charité et chasteté ont partie liée — « ont eu sans doute pour cause ma dureté de ceur envers le prochain, et cet esprit déteStable de querelle et d’animosité. Passé en revue avec consternation tous les gens a qui j'ai fait tort, en me faisant illusion a moi-méme. Encore maintenant combien 1. Lettre inédite, cf. supra, n. 2 de la p. xxxvir.
Introduttion
XLI
Je suis prompt a mirriter et a essayer de faire mal ! Miserere mei, Deus, de mot qui ai si peu d’indulgence et de pitié, et ne me jugex pas a la méme mesure. Ai-je vraiment vécn en Chrétien depuis ma conversion ? Si tous mes attes et mes pensées étaient inscrits, en quoi cette vie d’un Chrétien différe-t-elle de celle d’un homme qui ne l’est pas? Quelle fatblesse ! Quelle complaisance au mal! Ouelles rechutes continuelles ! C’ est si triste que c’est améerement comique (11, 171). » En pélerinage a la Salette, le 12 aott 1930, il note: « Passif: manque de charité, paroles moqueuses et blessantes. » Il ajoute entre parentheses: « Le Pere Lagrange. » Allusion aux controverses sur les sens littéral et spirituel de l’Ecriture. La polémique n’autorise pas tout. Au retour d’une visite a des amis sur les bords du lac d’ Annecy, en 1943: « Péroré bétement et méchamment, comme chaque fois on ces diversions débouchent mon continuel silence (IX, 9). » En juillet 1949, a Brangues: « Saint Joseph ce matin me fait honte de ma dureté et de mes acces de fureur... Que faire la contre ? C’esSt vivant, ces invincible. Toute dureté, toute rigidité, invite a la destruétion. C’est une attitude passive,
défensive, réattionnaire (X, 1). » Pourquoi saint Joseph ? Parce quwil représente a ses yeux un calme qui a valeur spirituelle, une douceur dont tl a la nostalgie. Parce qu’« il est silencieux comme la terre a l’heure de la rosée* ». Est-ce charité que de refuser I’acces du pare de Brangues a des enfants qui campent? A la messe on ils assistent, il a « des remords (X, 76)». « Remords » aussi, plus tard, d’avoir diftancé Honegger malade, a bout de souffle, sur le chemin de la gare, a Bale (X, 81). Les résolutions qwil prend en arrivant au Japon le 19 novembre 1921 précisent ce quil se reproche sur le chapitre de la charité et la minutie de son ascése: « Au moment de commencer ma mission dans ce pays, bien me mettre
en
téte ces
mots:
prudence,
patience.
Eviter
la
précipitation qui et mon principal défaut. Ne jamais prendre aucune décision importante avant d’avoir réfléchi et prié. Seconde résolution: m efforcer toujours d’étre patient, aimable et souriant. Dissimuler mon ennui. Puisque ma profession 1. « Feuilles de Saints », Giuure poétique, p. 612.
XLII
Introduction
m empéche Vexercice de la charité attive envers les pauvres, du moins ne pas étre une occasion de peine et de scandale pour le prochain, c’est-d-dire pour tout ce qui entre en conta avec moi. Ne jamais mentir. Ne pas promettre des choses que je n'ai pas I’intention de faire. Eviter les moqueries, les théories paradoxales, les propos troniques et scandaleux. Tacher d’écouter et de faire parler plutét que de parler moi-méme. Plus d’attention a légard de ma femme et de mes enfants. Ne pas étre absent quand je suis avec eux, parler davantage, me préoccuper deux davantage. Faire chaque soir une revue de la journée avec une critique de ce qui s’et passé. Prendre des résolutions chaque matin. Patience, réflexion, sentiment continuel de la présence de Dieu et de mon Ange Gardien (IV, 76 v). » son arrivée en Amérique, le 4 mars 1927, méme souci, mémes résolutions, méme priere, avec cette précision
typique: « Que [la Sainte Vierge] me donne la force de supporter avec patience tout l’ennui qui m attend, les conversations vaines et sottes que je dois apprendre a endurer comme ma croix spéciale (V1, 13). » La bienfaisance attive lui fut moins onéreuse que I’égalité a’humeur quand Pirritation ou l’ennui — ceci le plus souvent engendrant cela — menacait son calme. Le journal fournit maints détails sur Pintérét qu’il porta, tout au long de sa vie, aux familles que lui confiaient les Conférences de saint Vincent de Paul, a de nombreux malades, a 1’CEuvre des
vocations du Pére Mary, au Centre des paralysés de Voreppe. Sa prodigieuse correspondance fut, elle aussi, en bien des cas, euvre de charité. Il y avait un temps pour visiter les indigents, un temps pour écrire des lettres. Cela ne rongeait pas le silence intérieur, ne provoquait aucun conflit. Ul note cependant en 1912: « Ne pas prendre pour de la charité le désir d’étre débarrassé de la vue et de la pensée de la souffrance des autres (II, 88). » Cest done qu'il fut tenté, comme tant d'autres, de confondre paix et confort. Mais il sut dépifter L’illusion.
La_ sensualité eS une autre ennemie du silence. Que Claudel fut pétri de chair exigeante, cela ne fait pas de doute,
Introduttion
XLIII
et Henri Guillemin a bien fait de souligner la part d’humble ascése, située loin des « hauteurs », qu’on risque d’oublier
quand on évoque son combat entre décembre 1886 et décembre 1890. Il y a tout lieu de penser qu’il eut aussi a débattre de la question en 1900 avec les Bénédittins de Ligugé. Et, passte la longue crise de Partage de midi, des notes discrétes, mais transparentes, du Journal indiquent que le démon de la luxure lui réclama souvent la nourriture qu’il avait juré de lui refuser. En janvier 1908, sa résolution pour l’année qui commence est de « combattre [sa] vilaine curiosité a regarder et lire les journaux et livres indécents (I, 81) ». Le samedi 12 décembre 1914, il se confesse a Lyon, a@ la cathédrale Saint-Jean, et communie le 13 a Fourviere. Mais douze jours apres, pour Noél, i s’abstient de communier : ses « comptes ne sont pas nets (IU, 87, 89) ». | Le 1° janvier 1915, il est a Paris: « Hélas! Larmes et
regrets a Dieu le matin a Saint-Louis. Le soir, je me confesse a Saint-Sulpice on comme toujours je trouve un prétre tres charitable et tres intelligent. Grandement réconforté. Bonnes résolutions. Apprendre a traiter le corps en ennemi. Quelle mollesse (III 90)! » Les semaines qui suivent, il fait peau neuve; les signes de redressement affleurent aux pages du Journal
: conversations
a@ Clichy
avec
Labbé
Fontaine,
letlure de sainte Thérése, conférence de saint Vincent de Paul (MI, 91-93). I/ écrit: « Ce qui semble exagéré quand [sainte Thérese] parle de son attachement a Dien malgré ses péchés continuels es bien vrai pour mot, pris a la lettre (IU, 94). » Deux notes retiennent lattention: « Hélas! celui qui aime se place en état d’infériorité (III, 92) »; ef: « C’est un grand malheur que d’avoir placé son ceur dans un autre (IU, 96). » On ne tranchera pas si elles sont de portée générale, ou précisément allusives. Mais de nouveau, en 1925, Claudel est harcelé. On lit: « Villenenve, 27 septembre-30 septembre. Crise de 1. » L. signifielaxure, vraisemblablement (il eat écrit larmes en toutes lettres). D’ailleurs, des son retour a Paris: « Notre-
Dame des Vittoires. A travers les fumées suffocantes du péché, jai vu briller deux diamants a la couronne de la Sainte Vierge (V, 20). » C’est bien toujours « cette faute a remiéacher avec le gotit qu'elle a, qu’on avait promis précisé-
XLIV
Introduction
ment de ne pas faire! ». Si l’on y succombe, on trahit la solidarité des fils de Dieu dans le Corps mystique du Christ: « L’homme qui produit un atte impur obscurcit peut-étre des milliers de caurs quw’il ne connait pas, qui correspondent myStérieusement a lui et qui ont besoin que cet homme sott ur comme un voyageur mourant de soif a besoin du verre d’eau de I’Evangile (V, 20). » On hésitera donc a prononcer qu'un tel homme, comme dit Péguy, « manque de manquer ». Mesa, vietlli, répéte dans le secret de son téte-a-téte avec Dieu le mot de sa trentedeuxiéme année: « J'ai été trouvé manquant*. » Qui refait « connaissance avec son néant », il n’y a pas lieu pour lui de faire le malin! On le dit pourtant vaniteux, bouffi d’orgueil. Il west pas sourd au point d’ignorer la persistance du grief. Quand Jean Amrouche, au terme d’une stance de radiodiffusion, lui rend graces de s’étre comporté, en telle circonStance précise, « avec beaucoup d’humilité », il réplique: « C’est un défaut qu’en général on ne m impute pas énormément®. » Plus tard, Amrouche parle net: « Quand on pense a Suares, on pense a la montagne trés haute d’orgueil douloureux qu il était, et,
quand les gens pensent a vous, c'est aussi une figure d’orgueil, mais d’orgueil glorieux et glorifié et satisfait, quwils se représentent. » Claudel acquiesce: « Non, cet orgueil, je ne le nie pas, mais tly a aussi beaucoup un coté de maladresse. Beaucoup de gens sont orgueilleux, mais savent mieux Le cacher que je ne l’ai fait. C’est ma maladresse native qui ne ma pas permis de cacher mes sentiments autant que je Laurais di probablements. » I/ dit bien: Ad. Le mot va loin, et rejoint la note, citée plus haut, sur le piege de la sincérité. Claudel ne se reproche pas de n’avoir pas été hypocrite, mais d’avoir été, d’étre encore, et de devoir étre peut-étre pour la
postérité, par manque de retenue, un objet de scandale. Ce grand poete sait qu’il ef grand potte. Pourquoi feindrait-il de Pignorer ? « Je crois, écrit-il en 1929, quil ny a pas beaucoup d’exemples d’un grand potte aussi com1. « Feuilles de Saints », Cuore poétique, p. 607. 2. « Partage de midi», Thédtre, I, p. 1002. 3. Mémoires improvisés, p. 191.
4. Ibid., p. 266.
Introduttion
XLV
pletement méconnu et ignoré par son temps grace a la haine des académiciens et des professeurs qui n’a jamais cessé de m accompagner. Pourquoi est-ce que je n’écris pas en vers de douze pieds? Si je navais eu un autre métier, le sort de Léon Bloy et de Hello miétait réservé. La France ne chérit vraiment et ne gouite que la médiocrité. Quand je serai mort, on mélevera des monuments et on payera des professeurs pour me commenter. Alors les critiques feront des livres sur mot, alors que de mon vivant, pas plus que les autres grands poetes qui m ont précédé, je nat recu d’eux un verre d’eau. Au fond ce bien ainsi et cela m’a permis de faire mon cuvre sous le regard de Dieu en esprit de solitude et de chasteté (VI, rro). » Certes, en dépit de Vadmirable derniére phrase, ce texte est l’aveu d’une souffrance que l’orgueil du génie conscient de soi nourrit. Mats, en vérité, que voudrait-on ? Que la spontanéité créatrice du pote soit a ce point affranchie de toute réflexion ou retour sur soi qu'elle produise une vuvre de beauté sans savoir qu'elle la produit, un peu comme les myStiques parvenus a l’état passif aiment Dieu sans aimer L’aimer et sans savoir qu ils l’aiment ? Ou bien, si l’on admet que l’analogie west que partiellement valable — chez les saints ce n'est qu'une limite — exige-t-on que lartiste soit insensible a la souffrance de proférer « dans de la ouate » les mots dont il sait quils dowent traverser les siécles ? Arthur Honegger, citant ce mot de Wagner a Mathilde Wesendonck: « Mon enfant, ce premier aéte de Tristan est une chose invraisemblable », ajoute: « De beauté tvidemment », et plaide pour qu’on ne tienne pas rigueur au compositeur de ce qu’il dit simplement ce qui est. Honegger a raison. Encore est-il que lorgueil de Wagner et celui de Claudel different du tout au tout. Celui de Wagner passe tout entier dans son euvre,; celui de Claudel, non. Sa mattrise
de la langue et du Style, et jusqu’a un certain point sa culture religieuse, peuvent, ici ou la, notamment dans les Odes, donner le sentiment d’une sorte de mainmise de la parole sur l’Ineffable, ou, pour parler comme Saint-Simon, d'un « ton
décisif de vrai et de faux » quet amorti sans doute un sens plus aign de lasped « apophatique » que comporte toute 1. Arthur Honegger, Je suis compositeur, éd. du Conquistador,
1951, p. 120.
XLVI
Introduttion
théologie consciente de ses limites. D’on ces mots ambigus d’ Amrouche: glorieux, glorifié, satisfait. Mais « la partie ici-bas » d’un Claudel « west pas Vexplication », c'est «L’exclamation: »\ Environnée @images fotsonnantes et scandée par l’enthousiasme, il ne se peut que le génie qui articule l’exclamation n’ait une allure de demi-dieu joyeusement assuré dans sa démarche et dans sa voix! Il « marche sur la mer »! Il « foule les eaux de la mer en triomphe® »! Liorgueil n'a pas de part en cette jubilation. Et 1’apparence méme en sera progressivement eStompée a mesure que le pocte, habitant plus profondément la Bible et plus intérieurement libéré, adoptera un ton plus bonhomme, plus familier, plus imprégné d’humour. On a opposé a la « vanité » de Claudel l’« humilité » de tel ou tel de ses pairs. Ce genre de comparaison est fallacieux en ce quil confond toujours un peu les plans. On glisse sans crier gare de l’homme a l’ceuvre et de l’euvre a l'homme, de homme épidermique a homme intérieur, de la vanité qui Signore a la vanité qui s’accuse, et l’on ne s’apergoit pas qu au lieu de s’en tenir a ce qui est permis — le signalement des « petits cotés » d’un écrivain — on en vient insensiblement a ce qui esi défendu: un jugement sur une conscience. Vaniteux, Claudel ? Que l’auteur assex dupe de soi pour se croire dépourvu de toute vanité d’auteur lui jette la premiétre prerre ! Et puis? Le 5 janvier 1915, au cours d’un déeuner avec la duchesse de Clermont-Tonnerre et l’abbé Mugnier, il a « fait le cog (Il, 91) »! A la Salette, en 1930, constatant son passif, il note: « Je fats la roue (V1, 148). » Quand on Pacclame a la sortie du Thédtre-Francais apres une représentation du Soulier de satin (Pdques 1949), il eft ravi, mais il se moque:
« Gonfle-toi, grenonille (IX,
99)!» Le surlendemain, cependant, c’est en toute candeur qu'il copie une lettre de Wladimir d’Ormesson qui lui fait part des sentiments de Pie XII a son égard: « Je ne puis vous dire en quels termes le Pape a parlé de vous, de ce que vous représentex comme force pour l’Eglise. Il est envoyé par la Providence en ces temps de désarroi, a-t-il dit. Grace a lui que d’ames sont soutenues, que de ceurs réconfortés, que 1. Apocalypse, p. 139. 2. Odes, IV, GEwvre poétique, p. 265.
Introduttion
XLVII
aesprits éclairés! Et son rayonnement est universel !... La France peut étre fitre de lui, mais I’Eglise n’en et pas moins jiere et reconnaissante a Dieu (IX, 99 v). » Voila qui le venge d'un coup de cinquante ans d’incompréhension de la part de ses « fréres catholiques »! La valeur apostolique de son auvre est reconnue par le Vicaire du Christ! Voudrait-on qu il ajoute de sa main un bémol hypocrite ? Lhumilité toute pure et a un niveau de conscience plus profond. Dans le champ du Journal, on en glane les signes. En avril ou mai 1912, a Francfort: « Donnez-moi de tres faibles tentations, a la mesure de mon courage (II, 87). » En septembre de la méme année: « Vous seul importez. Je ne suis pas intéressant (11, 107). » L’année suivante, apres les fétes lyonnatises pour le centenaire de la naissance d’Oxzanam: « La vie d’un Ozanam et la mienne! Quelle suite d’un coté, quel sérieux, quelle attention ! Et de l'autre quels hasards, quel décousu, quel débraillé, quel gaspillage, quelle négligence de mes devoirs, quel oubli des pauvres! Je Suis comme une marionnette sans cesse en lutte contre les fils qui d’en haut la maintiennent, d’ow continuellement ces chutes et ces gesticulations grotesques (Ill, 3). » En novembre 1921, est Pexemple d’un autre homme de Dieu qui lui fait honte
de sa médiocrité: « Lu avec admiration et humiliation la vie admirable du P. de Foucauld par René Bazin (IV, 76). » Le 23 février 1922, a Tokyo, quelque chose se passe dans Lintimité de sa conscience, que la pudeur empéche de confier méme au journal. Péché, souvenir, dépression ? Une petite croix myStérieuse précede ces simples mots: « Patience. Jeter une brique a mes bulles de savon (IV 79). » 1924 s’achéve dans la paix: humilité et atlion de graces ensemble : « Fin d’une année sans événements, mais remplie de l’égale et uniforme bonté de Dien a mon égard comme d’une douce lumiere voilée. Et moi sifaible, si inerte, st mou. Non pas a travers un voile, mais a travers une épaisse vitre peinte en blanc. Progrés en moi d’un détachement de tout de plus en plus complet. Pendant tout ce séjour au Japon Dieu a été pour moi un fidele collaborateur a dextris e¢ a sinisttis, 4 droite pour faire et a gauche pour éviter, malgré mon huriliante gaucherie, sottise et incapacité (V, 56). » Claudel avait remarqué en lui, des 1908, une lacune
intellectuelle liée a une carence d’ordre moral: « Lenteur
XLVIII
Introduction
a’intelligence chez moi et manque de bon sens provient de mon subjettivisme excessif, de sorte qu'au lieu de regarder la chose dont on me parle, je cherche aussitot en mot-méme, ce qui déclenche parfois des séries absurdes (1, 107). » Id _y revient avec une nuance en 1926 dans une note dont Palmyre fera un chant) : « Le prochain. Mon manque de sympathie provient d’un manque d’intelligence. Je suis comme les enfants qui n aiment que les romans et sont incapables de faire l’effort nécessaire a la lecture de la poésie. Sentir, deviner ces histoires dont les visages et les démarches qui mwentourent sont les témoignages. Comprendre leur message. Compassion et camaraderie avec tous ces compagnons de bagne. Ecouter 1’ame profondément ensevelie sous le visage le plus aride et le plus épais, son soupir dans chaque parole. Se dire que chacun d’eux ma été envoyé par Dieu, quil n’en est pas un a qui Je ne sois capable de faire du bien. Connivence avec tout ce qui en eux est enfant de Dieu (V, 122). » Au vrai, le péché eS au cur de la vie de esprit: « En examinant cette végétation de demi-pensées que je produis Sans cesse Spontanément et qui somme toute sont la vie latente
de esprit, quel effrot de voir que la plupart sont des pensées d’orgueil et de détrattion du prochain! Au-dessous du péché formel une espece de température continuelle de péché (NV, 116). » Effroi nest pas trop dire: « Au pied du Christ je vors tout l’amas de mes anciennes confessions comme un zgnoble tas de linges souillés de sang, d’excréments et de pus (V, 124). » Claudel parle ici comme Ignace de Loyola: « Ulcus et apostema?. » Mais il sait que Vhumilité, cette « tristesse selon Dieu® », ne va pas jusqu’a exténuer la conscience en la conduisant aux limites du désespoir. Humour et bonne humeur lui sont connaturels. Un jour pourtant, a Villenenve, le 20 septembre
1933, Sans autre raison apparente que l’aspett de la maison familiale « completement changé », il avait noté: « Découragement et tentation de désespoir (VII, 34). » C’est done aprés avoir beaucoup lutté et franchi sans doute plusieurs 1. « Conversations Pp. 730. ; ay
dans
le Loit-et-Cher », CEwvres en prose
2. Exercices spirituels, n° 58.
3. Cor., vit, 10.
Introduédtion
XLIX
seuils qu'il peut écrire, a soixante-quatorze ans, dans son
chateau dauphinois que recouvre une neige précoce de novembre : « L’humilité west pas quelque chose de chétif, de trite et qui plie les épaules. Au contraire, c’est quelque chose de surabondant et de joyeux. Plus nous rejetons de nous-mémes et plus nous faisons de place a Dien. C’est comme Peau d’ane qui rejette sa dépouille bestiale pour faire place au manteau royal qu'on se prépare a lui jeter sur les épaules. En méme temps c’eSt une vertu de bonne humeur. Se rendre compte de nos ridicules et de nos vanités, c'est amusant en méme temps qu attriSiant. Ce serait dommage que nous n’ayons pas conStamment avec nous un observateur prét a se moquer de nos grimaces (VIII, 92). »
Le dimanche 20 février 1955, trois jours avant sa mort,
Claudel, souffrant d’une sciatique, ne put aller jusqu’a Notre-Dame pour la messe. Il dut « se contenter de SaintHonoré », sa paroisse (X 97). C'est le dernier mot du Journal. Sur ce regret, la plume lui tomba des mains. Dévotion reconnatissante envers la cathédrale ot, soixante-neuf ans plus tot, tl avait commencé ses « classes » ? Gott aussi
vif qu’aux premiers jours des belles cérémonies respetiueuses des rubriques? L’un et l’autre sans doute. Pour Ll’ancien postulant bénédittin la liturgie était restée la grande éducatrice. Le Journal porte /a trace de sa leflure assidue du bréviaire et de son assistance quotidienne a la messe. Il y a quelques périodes de fidélité moins Striéfe: elles sont rares et de peu de durée. « Principal progrés depuis mon retour en Europe, écrit-il a Hambourg en avril 1914: de nouveau l’assistance quotidienne a la messe (III, 49). » La participation au culte liturgique est le point fixe de sa piéte. Ul faut y joindre la pratique de l'examen de conscience. Tout porte a croire que ses premiers confesseurs 1 initierent a cette discipline et lui firent un devoir de s’y soumettre avec rigueur. Les carnets antérieurs a 1900 témoignent de son obéissance.
Le Journal aussi, souvent de maniére allusive,
parfois avec précision, voire minutie. L’ homme qui écrit ceci (avril 1912) est évidemment exercé a la surveillance de sot: « Je mapercots d’un nouveau défaut qui est la tendance a ne
1,
Introduttion
pas me frapper, ane pas prendre mes fautes au sérieux et a leur trouver toujours d’excellentes excuses (UI, 87). » Il ne redoute pas de verser dans la subtilité: « A l’égard des tentations les plus fréquentes, s’examiner sur trois choses: 1° sil’on trouve une satisfattion, dans le sens d’un attachement et d’une complaisance délibérée de la volonté; 2° si lon ne veut pas y retomber; 3° si l’on veut ne pas y retomber (III, 3). » Que ces distinguo sozent transcrits tels quels d’un manuel de morale, c’est probable. Claudel les adopte pourtant. C’est donc quil veut en faire son profit, ayant éprouvé en lui-méme que nolle et velle non ne sont pas synonymes. ‘En outre, les fins d’année, les changements de poste, les anniversaires lui sont une occasion de soumettre une large période de sa vie au jugement de Dieu. I/ n’y manqua, semble-t-il, jamais. Au-dela de ces points fixes, le Journal éclaire le lent, difficile, tatonnant apprentissage de la vie d’oraison. Claudel s’émervetlle d’abord de découvrir, aux jours sombres on il achive a Villeneuve Partage de midi, gue « /’efficacité infaillible de la priétre eft de foi (I, 43). » De foi eff souligné d’un double trait passionné. Il l’ignorait done ? II le savait comme un enfant sait son catéchisme, sans épronver le besoin urgent que ce soit vrai. Mais aujourd’hui une dme de femme est en péril: il faut que Dieu ne le contredise pas s’il écrit qu Y sé, quia« fait des choses affreuses », est « sauvée* ». Quelques pages d’un catéchisme de persévérance sans prétention, mais « rempli et bondé de textes inestimables (1, 44) » Lilluminent. Arrive-t-il que nos priéres me soient pas exaucées? Ce que, répond saint Augustin, aut mala petitis, aut mali petitis, aut male petitis. « Mais alors quand on demande de tout son ceur, avec toute la ferveur dont on est capable, le salut d’une ame, on eft str de l’obtenir 2
Car on ne demande pas une chose mauvaise, on ne la demande pas mal, et on est en état de grace par le sacrement de pénitence. » D’autres citations abondent dans le méme sens. Claudel feuillette — fiévreusement, semble-t-il — le tome XII du précieux catéchisme, revenant de la page 88 aux pages initiales, retournant a une note de la page 89. Il transcrit: « Il faut prier avec une entiére confiance. Comment invo1. « Partage de midi», Théétre, p. 1056.
Introduttion
LI
quera-t-on celui en qui on ne croit pas?... Il faut nous souvenir que cet I’Esprit-Saint qui prie lui-méme en nous... Avec persévérance: parabole du juge, parabole de l’homme qui demande trois pains... Vérité bien consolante: c'est L’Esprit-Saint qui prie en moi quand je demande a Dieu une chose sainte et bonne. C°est done la Troisiéme Personne qui demande sa conversion “avec des gémissements inénarrables”
(1, 44-46)'. »
Il ne parait pas que Claudel ait jamais mis en question sa foi en lefficacité de la priére de demande, méme si, deux ou trois fois au plus, il laisse échapper un mot de déception a la mort a’amis impénitents. Mais en 1932 — fin septembre ou début ottobre — iljuge « étonnantes » les paroles du Chrif: « Si vous avez la fot, vous pouver dire a cette montagne: Va-t-en et jette-toi dans la mer, et elle le fera. Tout ce que vous demandex avec foi dans la priére, vous le recevrez. » En « serrant le texte », il rejoint d’abord le mala petitis de saint Augustin: « Toutes nos pritres accordées. Mais non pas celles qui seracent nuisibles a nous-mémes ou au prochain. » Puis il ajoute: « Nous ne savons pas nous-mémes ce que nous demandons, dit Notre-Seigneur a saint Jean et saint Jacques. Mais Dieu sait ce que nous demandons sans le savoir et I/ nous l’accorde souvent sans que nous le sachions (VI, 206). » Ces mots ne sont pas d’un novice. Celui qui les écrit est entré dans le santtuaire on Anima converse avec son Créateur. Demander et accorder ont changé de sens. Le fond myStérieux de Iétre est ici désigné, a la fois présent a soi et absent de sot, le paradis du silence « au-dessous de notre connaissance » que les mystiques appellent sommet de lame ou fine pointe: apex, acies, ov acumen mentis. On s’e trop pressé d’affiirmer que Claudel weut que 1. Ces notes ne sont pas datées. Quelques lignes plus bas, on lit: « Matin du 27 novembre.» I] est donc possible qu’en écrivant
sa conversion, Claudel
songe
a Gide qu’il avait invité 4 com-
muniet a ses cdtés le jour de Noél (Gide, p. 54). Mais il est également possible que cette lettre ne soit pas a sa place dans Védition de Robert Mallet. On lit en effet (p. 52) : « 7 novembre 1905, féte de l’Immaculée-Conception. » Claudel fut-il distrait au point de situer cette fete en novembre? II faut sans doute rétablir: 7 décembre 1905, veille de la féte de ’?ImmaculéeConception.
LIV
Introduttion
lumibre. Il disparait, mais il ne cesse pas d’exisler; sa gloire et sa pureté sont de disparaitre, de se perdre et de laisser passer, sans obStacle, la pure et glorieuse lumieére. Toute sa transparence ne l’anéantira pas, il est livré a la lumitre qui le pénetre sans le détruire, sans le briser; or il
faut qu'il soit entitrement livré pour étre fidele a sa mission; sil refusait quelque chose a la lumiére, il voudrait done porter ombre lui-méme et s’imaginerait ajouter a son existence propre par cet amour de l’ombre qui serait l’amour isolé de sa propre personnalité. Pour porter ombre, i le faudrait enfumé, empoussiéré, obscurci, et, aimant sa fumée, sa poussiére, son
obscurcissement, il crotrait jouir de porter ombre au soleil. Ainsi l’dme obscurcie et aveuglée croit jouir de ce qu'elle refuse a Dieu. Les ames sont comme le cristal: leur vraie mission et leur vraie joie, c'est la transparence a la lumiére qui est Vamour (Ill, 25). » Mais cette transparence, dont Vidée le hante, le pocte n’a pas immédiatement compris qu elle est incompatible avec l’agitation d’esprit. Il disait de Louis Massignon: « C’est une ame en état de crampe continuelle qui aurait besoin de se détendre (1, 24). » Pour lui, naturellement détendu, l’effort de méditer le tendait. Pour la premiere fois, a Noél 1923, reprenant un verset de son Magnificat, 7/ ajoute un mot on I’ intelligence d’une certaine passivité se fait jour: « Le secret de la sainteté est de laisser faire Dien et de cesser d’étre a sa sainte Volonté aucun obstacle (V, 22). » Quinze jours plus tard (12 janvier 1924), il explicite pour André Gide sa pensée: « Le Chrétien est celui qui apporte son adhésion complete a ce sourd travail d’une vie nouvelle, qui ne veut plus rien que cette volonté, qui ne vit plus, mais c’est le Christ qui vit en lui. La Sainteté est de supprimer la paroi » — le fode parietem d’Exéchiel ef la premiere citation du Journal! — « de s’anéantir, de cesser d’étre a la volonté divine aucun obStacle.
C’est effrayant, douloureux, mais en méme temps ineffablement doux et passionnément intéressant}. » Les confidences d’une Carmélite, sur le pont d’un paquebot,
achéveront de le persuader, l’année suivante, que cette voie eS pour lui la meilleure. Il note: « Conversation avec la Seur Jeanne qui... me cite ce mot de Consummata : “Expropriée 1. Correspondance Claudel-Gide, p. 240.
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LV
pour cause d’utilité publique.’ Elle me fait remarquer ce mot du Pére de famille adressé aux Chrétiens confirmés, aux ames contemplatives : Fili, tau semper mecum es et omnia mea tua sunt. Oraison continuelle... Pour me faire comprendre Voraison de foi, la Seur Jeanne me cite la parabole du veilleur qui, les reins ceints et la lampe allumée, se tient prét a recevoir Celui qui n’eSt pas la... La Seur Jeanne attache beaucoup d’importance au mot asseoir. Le Chrit fait asseoir ses amis. Il les fait participer a son étre, a sa session a la droite du Pére (V, 66-67). » Cependant les diftrattions le harcélent. I] lui répugne d’offrir a Dieu « un vin plein de mouches (V1, 14) ». « O mon Dieu, je vous donne mon misérable ceur. Les distrattions sont maintenant mon principal ennemi (VI, rj). » La pritre nest donc pas une anticipation du paradis. Les premiers moments de l’oratson surtout sont un combat. Mais « apres les premiétres paroles et sentiments dispersés il se produit une espéce de titage. Toute la substance de l’dme s’en va vers Dieu en une flamme continue (VI, 104) ». Il devient alors possible de « respirer le Christ, s’en remplir les poumons, tout Vesprit et tout le corps, vivre de lui comme dans
une union respiratoire (V1, 109)... » Finie sa carriére diplomatique, les pritres que Claudel
compose — il en note quelques-unes dans son Journal, mais cet pendant son oratson de fin d’aprés-midi qu’elles jaillissent, surtout devant la Vierge de Brangues — on ne s’étonnerait pas de les trouver dans un tome de la grande Histoire de Bremond. Celle-ci est de septembre 1935: « J étais vide et vous m avez rempli. J’étais obscur et vous m’avex illumine. J’étais désert et vous m’avex peuple. J'étais fermé et vous m avex ouvert. J’étais épars et vous wm’avex unifie. J étais malade et vous wm’avez guéri. J’étais sale et vous m’avex nettoyé. J’étais mort et vous m’avez ressuscité (VII, 75). » Ce fragment de litanie est du 8 septembre 1936: « Vierge aimante, Vierge tres douce, Vierge patiente, Verge pardonnante, Vierge compréhensive, Vierge suppliante, Champion jamais découragée, Mére des larmes, source des effusions, dispensatrice de la paix, brasier de l’encens, miroir d’inno-
cence (VII, 94 v). » Priére? Poésie? L’une et lautre. Ensemble sans confusion. Leur double courant circule a travers les derniers cahiers du Journal, d’oa il s’échappe
LVI
Introdu tion
pour irriguer les cuvres exégétiques. L’esprit d’enfance les unit en les maintenant distintts. L’esprit d’enfance: tel est sans doute élément prémystique, donc déja implicitement mystique, présent depuis toujours — depuis Noél 1886 — aux racines naturelles de la spiritualité de Claudel. Les signes en abondent, au fil du Journal. I/ écrit a Rio, en février 19178: « Rien dont Dieu ait plus d’horreur que de ce “respet’ déteftable, pareil a celui de ces soldats qui le couronnaient d’épines, et qui, apres avoir fléchi le genou devant lui, le frappaient et le conspuatent. Sous prétexte de “respect”, il ne faut pas lisoler totalement de’ homme, comme |’ont fait les Musulmans qui l’ont relégué derriére un abime infranchissable, et ont di charger les “houris’” d’assurer le bonheur supréme des Elus. De méme les Juifs qui voient dans 1’Incarnation une dégradation et un blasphéeme. Dieu lui-méme a tellement en horreur ce “respect” quil a voulu étre foulé aux pieds, broyé, traité comme la derniére des créatures, comme le plus infame des criminels.
C'est ce quil a choisi pour sa part, plutot que le “resped” officiel, comme
s'il disait:
Eh bien, maintenant
que vous
m avex ainsi traité, massacré, foulé aux pieds, avez-vous encore peur de moi? Croyex-vous que vous ne pouvex pas me traiter comme l’un de vous et établir avec mot ces rapports humbles, intimes et substantiels que je demande? Entre le Dien froid, lointain et convenable de la religion officielle, et le sauvage qui fait intervenir sa naive idole dans tous les ates de sa vie, ce dernier est peut-étre davantage dans Iordre religieux (IV, 20). » Tokyo, le Vendredi saint 1924, ceci, qui est trés
franciscain: « Considérer la grande simplicité de Sezgneur. Un panvre enfant au milieu des méchants ce qu’il peut en pleurant a chandes larmes. Il va a parce qu’on le lui a commandé, avec courage et de ceur (V, 34). » Quelques semaines plus tard, apres avoir lu
Notrequi fait la croix tout son
une vie
d’ Ampere, il conState que la littérature, a l’inverse de la science, es dangereuse pour la simplicité: « Beaucoup de
savants de vie pure, au ceur chaud, a I’ame simple, honnéte et naive, Newton, Ampere, Pasteur, Cauchy, Berthelot lui-
méme. Au contraire, la plupart des hommes de lettres ont été des monstres d’égoisme et de vanité. La littérature desstche
Introduttion
LVII
le ceeur, elle nous habitue a nous regarder, a nous servir de nos sentiments comme de matériaux, a les exagérer et les fausser, a les exposer devant le public en vue d’un effet a produire. Un auteur est un atteur toujours en scéne et toujours préparé a utiliser ce qu'il sent (V, 38). » En mai 1926: « Causer avec Dien comme avec un sage conseiller, avec un ami infiniment bon, patient et expérimenté, qui ne prend scandale ou étonnement de rien. Les traités de dévotion, spécialement en ce qui concerne le péché, sont écrits sur un ton faché, exagéré et menacant, qui ne fait pas de bien (V, 106). » En septembre 1927, en France: « Pourquoi se représenter toujours un Dieu sévére, un censeur amer et implacable ? et non pas un ceur plein d’amour et de générosité, brillant du désir de nous donner tout ce que nous lui demandons et encore plus. — Ab! jai mis si longtemps & arriver jusqu’a toi ! Laisse-moi me reposer un moment, je n aurai pas le temps de Pennuyer (VI, 32). » Il lit, en fevrier 1936, /’Abandon
a la Providence
divine, du Pére de Caussade, que lui a indiqué Frangoise de Marcilly, Ce petit livre le comble. Le mySticisme qu'il propose est dépourvu de théorie sur l’intuition intelleuelle de Dieu. I! n’invite pas a une contemplation qui anticiperait sur le régne de la Connaissance. I/ affirme en termes simples que l’amour de Dieu n'est pas autre chose que 1’accomplissement de sa volonté. Claudel y retrouve, sySiématisée sans prétention, l’idée fondamentale de sa vie spirituelle: vouloir ce que Dieu veut uni a Lui. Il avait écrit en juin 1930: « Mon Dieu, faites que je ne sois pas au large dans Votre volonté, mais que je la sente toujours de tous cétés sur mot pressant comme un vétement (VI, 137). » En juin 1931: « Aimer la volonté de Dieu pour elle-méme en ce qu'elle wet pas la notre (VI, 183). » Et bien plus tard, en avril 1949: « Pourquoi ce désir d’étre quelqu’un ou quelque chose ? Ii n’y a que dans tien que tout se trouve al’aise (IX, 99 v). » I/ parle alors comme saint Jean de la Croix quwil n'a jamais lu que d'un ail distrait. On a parlé de l’« eudémonisme » spirituel de Claudel, Sa défiance a T’égard de Fénelon (qwil crut toujours quiétiste), les propos des Mémoites sur sa conversion « par intérét », certaine bontade de /’Evangile d’Isaie sur l’amour qui ne
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Introduttion
peut pas ne pas étre « passionnément intéressé’ », ont donné
a ce reproche une apparence de raison. Mais une note de 1933 éclaire ce qu’il entendait par « intérét »: « Quand un homme étouffe, ce qu'il désire, c’est de respirer, et non pas le plaisir de respirer. Ainsi l'amour de Dieu, qui est le besoin de Lui, et non pas le plaisir qui accompagne Ja satisfaction de ce besoin (VII, 37). » Et celle-ci, de dix ans antérieure, distingue le bonheur de jouir du bonheur d’aimer : « Reproche que la religion fait appel a l’intérét en promettant le bonheur comme récompense de la vertu (Kant). Mais quel genre de bonheur ? Le bonheur de ce monde est basé uniquement sur L’égoisme et l’augmentation des jouissances du mot. Le bonheur du ciel eS la préférence d’un autre a sot-méme en toutes choses (IV, 80 v). »
Claudel, sous son air bourru, était sensible et bon. I/
pensait que « la disparition des sentiments affetiueux est un des premiers symptomes de la folie? ». Mais une pudeur le retenait de les manifester. Quand i est seul devant la feuille blanche de son Journal, z/ se laisse aller a écrire: « Mes chers enfants... mon petit Henri... ». Quand sa fille ainée, le soir de son mariage, quitte Brangues, il éprouve un « profond déchirement (V1, 64) ». A la mort de sa mere, il prie ainsi: « Mon Dieu, ayer pitié de l’'dme de Louise Athénaise Cerveaux. Elle fut panvre, simple, profondément humaine, pure
de ceur,
résignée,
dévouée
a son
devoir
quotidien,
travaillant de ses mains du matin au soir. Sa vie fut pleine de chagrins et connut peu de joie. Comment cette femme dont le carattere fut avant tout la modestie et la simplicité eut-elle deux enfants comme ma seur Camille et comme moi? Je ne la verrai plus. Au moment on jécris de l’autre cété de l’Océan, dans la vieille maison de Villeneuve on le jardin est rempli de fleurs (l’acacia chargé de grappes blanches) elle est étendue raide et glacée sur son lit de mort. Je ne sentirai pas le froid de son front sur mes levres comme celui de mon pere. On Venterrera avec lui a cbté de l’église. Enfin j'ai fait ce 1. Isaie, p. 304. 2. « Positions », I, CEwures en prose, p. 23, note.
Introduétion
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que fai pu. C'est grace a moi qu'elle a rempli tous ses devoirs religieux. Meére de Jésus-Christ, ayex pitié de ma mere (VI, 95). » I/ disait, lui qu’on a tant accusé de trop aimer l’argent, que le monde des riches ef sine affectione et sine misericordia. Et /es derniéres années de sa vie mettent en auvre, au fil des heures, un art d’étre grand-pére.
Ow ett &té un Claudel bénédittin ? S’il garda jusqu’a la jin de sa vie la noSstalgie de cette « catégorie A » dont il n’a pas fait partie, du moins écrivit-il, en septembre 1953, ces lignes franches et lucides: « C’est vrai, c’est une belle chose, comme saint Francois, de tout jeter au profit de Dieu et de se débarrasser d’un seul coup une fois pour toutes de tous les , soucis de la temporalité, mais n’est-ce pas aussi une belle ' chose, sans qu’un seul moment le sentiment, la pensée de Dieu soient absents, d’assumer le monde tel qu’il est, sans récuser
aucune de ses charges, famille, métier, services, etc. — et quel et cetera! — fidéle par le caur jusqu’au bout pendant Soixante-dix ans (X, 78)?» FRANGOIS VARILLON
NOTE
Que ce Journal ne sott point un « journal » au sens traditionnel du mot, tout lecteur ale feuilleter seulement, s’en
_convaincra. Ce n'est pas davantage une autre euvre — une | réflexion — paralléle a l’auvre créatrice. Mais toute lefure sérieuse de Claudel en supposera désormais l’intime connatssance. Je veux dire qu'il ne suffira pas, comme on le fera d’abord a juste titre, d’y puiser renseignements, jugements ou témoignages, d’y chercher les sources de l’euvre, d’y découvrir des fragments inutilisés : ébauches abandonnées, images, notes de letiure et réflexions en marge, impressions de toutes sortes... Sa nature méme, l’importance qu'il prit dans la vie et la
création littéraire de Claudel lui donnent un tout autre intéret?, Il faudrait pouvoir en définir clairement la nature et, pourrait-on dire, la « fonttion ». Que représentatent pour Je potte ces Cahiers ? Quelle place tenaient-ils dans sa vie et son ativité littéraire ? Une évolution apparait ici, que rendent sensibles des variations de rythme. En 1904, en 1905, les
notes peu abondantes demeurent apparemment extérieures; Claudel éprouve trés profondément le besoin de tenir un journal et en méme temps pour des raisons complexes s’y refuse. Ce n'est pas en ce domaine sa premitre tentative; en 1900, sur l’ordre de ses supérieurs, il a commence, et aban-
donné aprés quelques semaines, 1. nous Il n’a nous
un
vrai journal intime;
Le souci d’expliquer — ou de justifier — la maniére dont avons annoté le texte, est a l’origine de ces quelque pages. pas paru inutile de dire ce que les problémes ainsi soulevés avaient fait voir dans le Journal.
LXIV
Note
D’ autres existerent a diverses époques, comme celui, ouvert en 1916, on il rassemblait citations et remarques sur « les eaux dans |’Ecriture »; chaque fois qu'un projet précis Loccupe, il distingue du Journal cette recherche particuliére. De méme pour ses euvres; on verra tres vite qu en apparaissent ici les sources lointaines, les germes; des qu’elles éclosent, la séparation se fait. Un exemple éclairera ces remarques. Le 17 mai 1915, apres une visite a la chapelle Sixtine, Claudel note: « La figure de mon drame se précise; l’aveugle, lami,
la main. » Ul s’agit évidemment du Pere humilié, et /’on devine que. le poéte vient d’en découvrir le dénouement: la mort d’Orian et le retour d’Orso, rapportant a Pensée non la téte, comme dans le texte de 1916, mais la main de celui quelle a aimé. Le méme jour, ou peu apres, il esquisse le plan du drame; on ne le trouve pas dans le Cahier, mais sur une feuille séparée, conservée avec le manuscrit. L’euvre commence n'a plus sa place dans le Journal, qui demeure le domaine du hasard quotidien, recueil d’impressions isolées, de notes sans but précis, une sorte de « réservoir » ot il puisera plus tard. Aussi y découvre-t-on les préparations d'une ceuvre, les traces de sa maturation, plus souvent que des allusions on commentaires exattement contemporains de la rédattion, Ce n’est que plus intéressant, puisque toute mise en ordre, toute construction en étant absentes, nous approchons, autant peut-étre qu'il est possible, le mouvement créateur dans sa variété et ses contradittions. Il faut ici insifter sur le réle du Journal comme « réservoir » d’impressions et d’idées. Claudel le relisait, on ne peut en douter; soit qu il recherchat un detail précis, un texte, une réflexion, comme le montrent ici ou la une référence, un renvoi a une page antérieure; soit
qu'il voulit retrouver certaines impressions, lorsquil relit en 1940 les notes prises pendant la guerre de 1914; ou encore, d’une manicre plus souple, par simple curiosité, au hasard, ce quattestent quelques notes marginales. De telles relettures expliquent sans doute d’étonnantes résurgences qu’on mwoserait attribuer a la seule mémoire: un détail purement pittoresque relevé en 1909 se retrouve dans un article écrit en 1938; de méme, un article de 1936 sur I’Autriche nait moins des souvenirs de 1910-1911, comme on l’imaginerait, que de notes prises en 1930 apres l’audition de la Symphonie héroique.
Note yma
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On ne sait s’il faut en ce cas imaginer le hasard d’une rele ture ou une recherche; une seule certitude, l’accumulation des détails
extlut la simple réminiscence. Ce recours dirett, immédiat, au Journal apparait souvent
evident, soit que la reletture de tel ou tel passage suggere une image, un point de départ, soit qu’un projet, une cuvre commencte conduisent le poete a rechercher un détail, des impressions. Saint Martin, poéeme écrit en 1918-1919, utilise tres directement les notes prises a Hambourg en aont 1914, an moment de la déclaration de guerre. Lorsque, dans /es Conversations dans le Loir-et-Cher ou un dialogue de L’Oiseau noir dans le soleil levant, /’écrivain fait allusion au Journal, ce net pas un jeu. « Si tu te donnais la peine de fouiller dans ce cahier vert, la sur la table, il me semble que tu trouverais quelque chose de tres bien dit a ce ‘sujet », remarque un des interlocuteurs, et en effet le poéte
extrait de son Journal la longue citation qui suit. A la limite, telle envre sort du Journal méme. Ce sont,
par exemple, les Cent phrases pour éventails, dont /a plupart ont été relevées en effet en 1925 et 1926. Il suffit a Claudel de recueillir et réunir ces impressions notées a la maniére de certains poemes japonais, en quelques mots, et de donner a chacune d’elles une disposition calligraphique originale et évocatrice. Il est plus intéressant de voir naitre des euvres mieux Strutturées, drames, poemes ou textes en prose. Lantét apparait le mouvement lent d’une maturation qui se prolonge parfois sur des années; tantét une rapide accumulation d’impressions semble contraindre leuvre a jaillir; si Von ajoute que certains poemes, certains drames, un article sem-
blent en quelque maniére différés, inspiration surgissant de notes anciennes, on aura indiqué les divers modes de la création, que révele le Journal. Ainsi L’ Otage se dégage lentement de lectures, de réflexions historiques et politiques dont la premiere remonterait a la fin de 1904 — le plan ne sera fixé quen février 1908. De méme Le Soulier de satin se développe lentement, des 1917, semble-t-il, a lire les notes prises au Brésil. Certains themes,
certaines idées, certaines images apparaissent, se répétent, s’enrichissent au long des années d’apports successifs : lectures, impressions, réflexions... avant de s’exprimer dans une cuvre. CLAUDEL
V - 3
3
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Note
Le theme de l’évolution, par exemple, revient fréquemment, bien avant que Claudel w envisage d’écrire La Légende de Prakriti, gui le développe. On le savait essentiel. On s’attendrait moins a voir surgir plusieurs fois les images autour desquelles s’ordonnera Mort de Judas. Parfois, au contraire,
l’euvre s’impose brusquement; un
mouvement profond, une incitation précédent les impressions qui leur donneront corps; a moins que ces impressions mémes nwimposent Veuvre. $i L’Otage surgit d’une longue suite d’événements auxquels la création donne sens et Structure, Le Pére humilié ef d’abord un schéma vide qu’un séjour a Rome fait passer @ la vie; en quelques pages, les remarques saccumulent, tout ce que voit Claudel, tout ce qu'il découvre semble enrichir son drame;
intention
latente sollicite les
éléments épars et les cristallise: une visite a la chapelle Sixtine, une promenade au Palatin, une excursion a Tivoli...
suggérent un détail ou une scene. On verra aisément encore que la seconde des Conversations dans le Loir-et-Cher Set conStruite autour du theme de la lumiere, des vitraux, a
la suite de visites et d’excursions faites par Claudel pendant son séjour en France en 1925. Un incessant échange se fait entre la réflexion et les impressions, entre la pensée qui se nourrit du moindre détail et la contemplation qui la prolonge. Le hasard apporte des éléments nouveaux — les Nymphéas de Claude Monet, dans cette « conversation »; ou plutét le
mouvement créateur absorbe tout ce qui se présente. La nature des envres wexplique pas ces contradiétions. Des dialogues japonais de L?Oiseau noir, /’un, Le Poéte et le shamisen, s’étale sur des années, un autre, Jales ou
L’Homme-aux-deux-cravates semble tout entier déterminé par les souvenirs récents d’une croisiére sur la mer intérieure du Japon, le troisieme, Le Poéte et le vase dWencens, est une de ces créations différées; Dessentiel est dans le Journal en 1922, a la suite de la visite d’ Angkor; des 1923, Claudel a écrit sur ce sujet un long poeme, qui fut détruit au cours du tremblement de terre de septembre 1923; il revient sur ces impressions, lourdes et sombres, en aout 1926,
alors qu il gotite le calme heureux de vacances L’un des cas les plus curienx est celui de L’Ours écrit en 1917 dans l’exil brésilien et dont l’attion environs d’Hostel; Claudel passait fréquemment
a Chujenzi. et la Lune, se situe aux des vacances
Note
LXVII
avec sa famille dans ce chateau qui appartenait a son beaupere; le retour nostalgique apparait plus net, puisque les images, les détails utilisés dans cette piece figurent dans le Journal en 191s; une reletture est probable qui donne a ces quelques semaines heureuses un charme profond. Le texte S’éclaire ainsi: ¢’est un retour en arritre, au-dela de la mer,
vers ce monde quitté dont réve le poete comme réve le personnage qu il imagine. Parfois on saisit 1’événement attuel qui provoque ce mouvement; lorsque Claudel écrit L’ Architecte, a la mémoire de son beau-pére, il revient naturellement au souvenir de son dernier séjour a Hostel; de méme I’armistice
en novembre 1918 lui rappelle les jours sombres de Hambourg, et il compose Saint Martin. Toute lecture du Journal exige, pour n’étre pas superficielle, ce « regard en avant » vers le « paysage futur », eure a venir, mais aussi un « regard en arriére ». La considération des aboutissements ne peut se séparer de la recherche des sources. L’idéal en ce domaine serait de retrouver derritre chaque note du Journal /e livre, le paysage, la rencontre qui l’a inspirée. Il va sans dire que nous avons souvent di étre plus modestes. Au niveau méme des lectures,
dont Videntification devrait étre simple, certains problemes étaient insolubles. Claudel fut grand liseur; son Journal Le prouve. Mais comment lisait-il? Sans doute avec cette attention passionnée qu'on lui voit pour tout ce qui l’entoure, mais aussi avec une sorte de détachement. « Quelle mauvaise habitude vous avez d’arracher dans un livre la page qui vous intéresse et de jeter le reste » lui dit sa fille dans Les Vitraux de Apocalypse. Et /e poete répond: « Tot-méme; ne Pai-je pas vu l'autre jour effeniller une rose... Un livre est beaucoup moins respectable qu’une rose. » Dans le Journal restent seuls les pétales séchés, des fragments, sans que l’on puisse jamais étre stir d’une lecture sérieuse, sans que l’on puisse méme s’assurer toujours d’une lecture réelle. Deux exemples le montreront. Sur la méme page du Cahier I figurent a la suite un passage de Joseph de Maistre, une citation de Sénéque, un vers d’Horace et une réflexion politique; un peu d’obstination et beaucoup de chance nous ont révélé que Séneque et Horace étaient cités par de Maistre dont s’inspirait également la remarque qui suit. Mais le
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Note
hasard seul pouvait permettre de découvrir le lien entre une citation, apparemment inexatte, de Rémy Belleau, Pattribution erronée a Jubinal, érudit du XIX® sitcle, d’un texte du XIII® siécle, La Sénéfiance de Valphabet, dont i/ eff l’éditeur, et la notation de mots curieux... Ce lien était le
dittionnaire de Littré: la citation de Belleau y est donnée sous le mot « wil », les mots relevés, lorsquils ne commencent
pas par O, se trouvent tous dans le corps d’articles classés a cette lettre, Jubinal est cité dans le premier de ces articles. Claudel, ce jour-la, avait simplement feuilleté son dittionnaire. De tels bonheurs sont rares. Il les faudrait constants pour qu'une recherche des sources fut ce quelle devrait étre, la reconstitution des vrates leftures de l’auteur. Toute letture attestée n’est-elle pas indice et source possible ? Nous avons toujours, ou presque toujours, tdentifié les citations et, le plus souvent sans doute, retrouvé |’ouvrage lu par Claudel. Quelque imprécision toutefois demeure, une marge derreur qu'il fallait signaler. Une seule note, une allusion indiquent souvent en effet la leture d’un ouvrage. Mais telle citation peut aussi étre de seconde main, provenir d’un article par exemple, et telle série de notes attester la lecture non de trois ou quatre ouvrages, mais d’un numéro de revue. Peut-étre un jour pourra-t-on, a partir de ce Journal,
reconStituer Vensemble des lettures de Claudel? Encore faudra-t-il se souvenir des remarques auxquelles conduisait étude des rapports de Peuvre et du Journal. Claudel ne note pas dans celui-ci les lectures faites dans une intention précise, a titre documentaire. I/ a dit lui-méme que 1’ Otage, pour ne citer que cet exemple, devait beaucoup a un ouvrage du comte d’Haussonville sur Napoléon et la papauté. C'est vrai. Pourtant cet ouvrage n'est pas cité dans le Journal; sans doute parce qu’il s’agit moins d’une source lointaine que d'une letture immédiatement utilisée. En ce domaine aussi, le Journal demeure spontané; toute note s’y justifie moins par une intention précise que par un
choix d’instint, on l’on décéle trés vite des constantes et des variations, les intéréts permanents et les mouvements d’un instant. Ceux-ci ne sont pas les moins révélateurs, méme si les autres ouvrent de plus larges Pate ok en permettant d’étayer une étude des dominantes de la pensée et de l’imagina-
Note
LXIX
tion clandéliennes. Saisir 1’état d’esprit du pobte a tel instant, au moment on il écrit telle euvre, ne manque pas d’intérét. I/ faudra donc lire ce Journal en le situant par rapport a la création méme, parallelement a elle, et lui demander ainsi des renseignements « négatifs ». L’importance de telle page de ces Cahiers vient de ce qu’elle ne dit pas, de sa confrontation avec le drame, le poeme, le commentaire biblique ou Particle auquel Claudel travaille alors. Précisons. Que les notes religieuses deviennent plus nombreuses en 1913 et en 1914 alors que le dramaturge écrit Protée et surtout Le Pain dur, éclaire indireflement, mais tres profondément, cette farce et cette atroce tragédie dont Dieu est absent. Tantot se révélera un accord — ainsi entre le Journal de 7916 et Le Pére humilié —, santét comme ici un désaccord au moins apparent, peut-étre plus révélateur que I’harmonie.
Importent moins a ce moment les sources réelles que les
détails, les textes, les impressions que note Claudel. Si la création se situe, ce dont personne ne doute, sur un plan autre et plus profond que la vie intelletiuelle et sensible, traduite par /e Journal, /e rapport de l’une a autre, qu il soit d’entente ou de réattion, ne saurait étre négligé. Lire ce texte en refusant cette perpétuelle confrontation l’appauvrit et le trahit. Ce n'est pas en effet une euvre indépendante, Claudel n'a
pas voulu y donner de soi-méme un portrait dont il nous appartiendrait de dégager les traits; il n’a tenté ni de s’y peindre, ni méme de s’y comprendre puisque n’intervient jamais un mouvement de retour sur soi. Si ce Journal contient malgré tout un portrait, celui-ci ne saurait étre que fragmentaire et partiel, puisqu’il west ni celui de homme que l’on pourrait opposer au créateur, ni celui du créateur aux prises avec son cuvre. Il est lun et autre et vaut seulement par référence. Il faut, pour le regarder, faire « comme un homme qui par transparence au soleil interroge une feuille de papier »; « ses yeux, dit Claudel dans La Muraille intérieure de Tokyo, vozent le texte au retto, mais il devine
en méme temps le paysage qu'on a peint de l'autre cété. » L’absence de toute pose, de toute complaisance et méme de toute composition donne a ce témoignage une étonnante valeur. Mais si révélateur soit-il, ce n'est que l’envers de l’auvre, les
LXX
Note
fils. derriére la tapisserie. Qui waurait la curiosité d’en suivre les détours? Mais peut-on ne pas songer, en tes considérant, au dessin que forment a l’endroit « ces fils entremélés* » ? JACQuES PETIT.
1. Est-il nécessaire de justifier plus précisément notre annotation? Nous avons voulu donner autant qu il nous était possible les sources de Claudel, mais aussi faire référence A l’ceuvre dans
la mesure ot le permettait ’ampleur de celle-ci, suggérer en somme le double mouvement de la lecture. La chronologie, assez minutieuse, établit le parallélisme entre l’ceuvre et le Journal; @eSt pourquoi nous avons cru utile d’y faire figurer non seulement les grands textes, mais jusqu’aux petits poémes et aux articles. Dans /’Avertissement, en téte des Nofes (p. 1027), on trouvera toutes les indications sur la présentation et l’établissement du texte.
CHRONOLOGIE
On pouvait s’interroger sur lutilité d’une Chronologie en téte dun Journal, chronologique par sa nature méme. Mais, outre que celui-ci ne couvre pas les trente-six premiéres années de la vie de Claudel, se posait le probleme des ceuvres. Trés souvent, Claudel ne signale pas celles qui l’occupent. Or, savoir
ce qu’il fait a telle date, tandis qu’il lit tel ouvrage ou prend telle note, donne a ce Journal sa signification vétitable. Aussi, cette chronologie,
ments — apres 1904 — pour les ceuvres, Pour
en
faciliter
succinéte
eSt-elle
sur le plan des événe-
aussi complete
la consultation
que possible
et l'utilisation,
les titres
douvrages (drames, recueils de poémes, etc.) sont indiqués en petite capitales, ceux des poémes, en italiques, ceux des textes en ptose, en romain entre guillemets. Chaque texte est suivi de sa référence, suivant les conventions suivantes : Th. I: Thédtre, t. I, Bibliothéque de la Pléiade, J. Madaule,
J. Petit, 1967. Th. Il: Thédtre, t. Il, id., 1965. Po.: CEwre poétique, Bibliothéque de la Pléiade, S. Fumet, J. Petit, 1967. Pr.: CEwres en prose, Bibliotheque de la Pléiade, J. Petit, Ch. Galpérine, 1965. O. C.: CEwres completes... Gallimard.
1862 2 février: Mariage 4 Villeneuve-sur-Fere, en Tardenois, de Louis-Prospet Claudel et de Louise Cerveaux. Né le 26 octobre 1826, Louis Claudel était originaire de La Bresse, dans les Vosges; il avait été nommé en 1860 teceveur de Penregistrement 4 Villeneuve. Louise Cerveaux était née 4 Villeneuve en
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Chronologie
1840; son pétre, le dofteur Athanase Cerveaux, y exergait; son oncle, l’abbé Cerveaux, était curé de ce village.
1863 Naissance et mort d’Henri Claudel.
1864 8 décembre: Naissance de Camille Claudel.
1866 26 février : Naissance de Louise Claudel.
1868 6 aout: Naissance de Paul-Louis-Charles-Marie Claudel.
11 offobre: Baptéme de Paul Claudel.
1869 Mort de l’abbé Cerveaux. La famille Claudel quitte Vancien presbytére, ot était né Paul Claudel, pour s’installer dans la
maison toute proche que possédait l’abbé Cerveaux.
1870 Ait: Louis-Prosper Claudel est nommé s’inStalle avec sa famille.
a Bar-le-Duc
ot il
1871 Paul Claudel entre a l’école des Sceurs de la Doftrine chrétienne a Bar-le-Duc.
Chronologie
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1875 Paul Claudel entre au lycée de Bar-le-Duc.
1876 Aout: Louis-Prosper Claudel est nommé conservateur des hypotheques 4 Nogent-sur-Seine. Paul Claudel poursuit ses études sous la direction d’un précepteur, nommé Colin.
1879 Septembre: WLouis-Prosper Claudel est nommé a Wassy-surBlaise; Paul Claudel reprend ses études au college de cette ville.
1880 23 mai: Paul Claudel fait sa premiére communion « qui fut a la fois, écrira-t-il, le couronnement et le terme de mes pratiques religieuses ».
1881 y septembre: Mort Cerveaux.
du grand-pére
de Paul Claudel, Athanase
1882 Tandis que Louis Claudel reste 4 Wassy, la famille s’installe a Paris, boulevard du Montparnasse. Camille travaille a l’atelier de sculpture de Colarossi. Paul entre au lycée Louis-le-Grand.
1883 Juin: Louis-Prosper Claudel est nommé 4 Rambouillet. Paul Claudel échoue au baccalauréat. La distribution des prix au lycée Louis-le-Grand est présidée par Renan.
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Chronologie
1894 Achévement de L’Ecuance, de TirE D’Or (2 version) et de la traduction d’AGAMEMNON. Novembre: Nomination a Shanghai. Décembre: Premiére reprise de La VILLE.
1895 Février: Retour en France. Séjours 4 Paris et a Villeneuve ou Claudel travaille au premier a€te de La VILLE. Mai ou juin: Départt pour la Chine. Le Cocotier (Po., p. 25). Juillet: Arrivée a Shanghai. Séparons-nous ici... (Po., p. 9). VERS D’EXIL (certains poémes sont un peu postérieurs, mais
seuls I et X peuvent étre clairement datés). (Po., p. 13).
1896 Janvier : Claudel commence Lr Repos pu SEPTIEME Jour. Jardins, Ville la nuit, Pagode (Po., p. 26). Février : Féte des Morts le septiéme mois (Po., p. 36). Mars: Départ pout Fou-Tchéou, Claudel est chargé de la gérance du Vice-consulat. Pensée en mer, Villes, Thédtre, Tombes-Rumeurs,
L’ Entrée de la
terre, Religion du signe (Po., p. 37). Juin: Le Banyan, Vers la montagne, La mer Supérieure (Po., p. 46). Aoit: Fin du Repos pu SEpTizME Jour (TA. I, p. 795) Odfobre : Signature de la Convention pour |’Arsenal de PagodaAnchorage, 4 la suite des négociations menées par Claudel. Le temple de la conscience, Offobre, Novembre, Peinture, Le Con-
templateur, Décembre (Po., p. §1). Décembre: Retour a Shanghai. Tempéte, Le Porc, La Dérivation, Portes (Po., p. §7).
1897 Mars : Nomination 4 Hank’éou. Claudel est chargé de la gérance du Vice-consulat. Négociations menées en collaboration avec Emile Francqui, pour le chemin de fer Hank’éou-Pékin.
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| Le Flewve, La Pluie, La Nuit 4 la vérandah, Splendeur de la lune, Réves (Po., p. 61). Abril: Reprise de La VILLE. Juillet: Celui-la seul saura sourire... (Po., p. 10), Ardeur, Considération de la cité (Po., p. 67). Septembre : Retour a Shanghai. La Descente, La Cloche, La Tombe, La Navigation noéturne, Piéton, il ne me reste plus que le chemin... (Po., p. 69).
1898
Janvier : Triftesse de l’eau (Po., p. 74). Abril : Halte sur le canal, Hilarité, Une vente (Po., p. 76, 955 et 964). Mai: Achévement de La V1LzeE (2° version) (TA. I, p. 417). Plats et fioles, Paravent, Paul, il nous faut partir... (Po., p. 958 et 13). Juin: Voyage au Japon. Le Pin, L’ Arche d’or dans la forét, Le Promeneur, Ca et la, Le Sédentaire (Po., p. 79). Septembre: Nomination de consul 4 Fou-Tchéou. La Terre vue de la mer (Po., p. 92). Offobre: Salutation, Mes yeux sont pleins de nuit, La Maison suspendue (Po., p. 93). Novembre: Séjour a Shanghai. La Source (Po., p. 96). Reprise de La JEUNE FILLE VIOLAINE. Décembre: La Marée de Midi, Tao Teh King, L’Ivresse du thé
(Po., p. 97 et 963). 1899
Janvier: Bronzes des Song (Po., p. 960). Retour a Fou-Tchéou. Le Risque de la mer, Proposition sur la lumiére (Po., p. 99). Mars : Heures dans le jardin, Sur la cervelle (Po., p. 102). Ofobre: Achévement de LA JEUNE FILLE VIOLAINE (2° version) (Mae lide S7/) 22 offobre: Départ pour la France. La Terre quittée (Po., p. 106). Décembre: Pélerinage en Palestine.
LXXVIII
Chronologie 1900
Janvier: Atrivée en France. Séjours 4 Villeneuve et a Paris. Septembre: Retraite a Solesmes. Début de ’Ode Les Muszs (Po., p. 221). 1 Oéobre: Abbaye de Ligugé. « Développement de l’Eglise. »
I9o1
Retour en Chine sur I’Ernest-Simons. Rencontre d’Ysé. Claudel teptend son poste a Fou-Tchéou. TraduGtions de Patmore : Arbor vitae, De Natura Deorum, Le
Départ, Eros et Psyché, Legem tuam dilexi (Po., p. 307).
1902 La Lampe et la cloche, La Délivrance d’ Amaterasu,
Visite (Po.,
p. 108).
LOIS) Le Riz, Le Point, La Libation au jour futur, Le Jour de la féte de tous les flewves (Po., p. 115). « Une exposition » (Pr., p. 1532). Ait: Achévement de CoNNAISSANCE DU TEMPS (Po., p. 125).
1904 TRAITE
DE LA
CO-NAISSANCE
AU
MONDE
EI DE
(Po., p. 149).
SOI-MBME
Achévement de l’Ode Les Muszs (Po., p. 221). Aout: Dépatt dYsé. 9 oftobre: Mort de Pabbé Villaume. Confesseur de Claudel.
1905
L’Heure jaune (Po., p. 119). « Le Réle du poéte dans la cité » (Pr., p. 1474).
Chronologie
LXXIX
Abril: Artivée en France. Séjours a Ligugé, a Villeneuve, a Paris. Dissolution (Po., p. 119). Ténébres, Chanson d’Automne, Obsession, Le Sommeil dans le chagrin (Po., p. 430). Juillet-aoit: Séjour dans les Pyrénées avec Francqui et Camille Claudel. « Camille Claudel, statuaire » (Pr., p. 272). « Rodin ou Phomme de génie » (Pr., p. 285). Septembre : Voyage en Alsace et en Lorraine. Retour a Villeneuve. PARTAGE DE mip1 (Th. I, p. 983). 28 décembre: Fiangailles avec Reine Sainte-Marie-Perrin.
1906 Ballade (Po., p. 434). ry mars: Mariage. 18 mars: Départ pour la Chine. Mai: Attivée en Chine. Pékin. Début de L’Esprir Er L’EAu (Po., 233). Juillet: Vien-Tsin.
9 décembre: « Lettre
a Arthur Fontaine » (0. ¢. XV).
1907 20 janvier : Naissance de Marie Claudel. Ode II. Macniricar (Po., p. 248). Ode IV. La MusE Qui Est LA GRACE (Po., p. 263). Att :PROCESSIONNAL (Po., p. 293).
1908
Achévement de Ode V : La Matson FERMEE (Po., p. 277). Février : Premier projet de la « Trilogie ». Mars : Début de L’Orace. 23 juillet: Naissance de Pierre Claudel. Hymne de la Pentecdte (Po., p. 389). Hymne du Saint-Sacrement (Po., p. 397). Saint Paul (Po., p. 412). Chant de marche de Noél (Po., p. 464). Mémento pour le samedi soir (Po., p. 472).
oe
Chronologie oo
Sous LE SIGNE DU DRAGON (premier état) (Pr., p. 1046). Mai: Pékin, Funérailles de l’empereur. Juin: Saint Pierre (Po., p. 411). Saint Jacques le Majeur (Po., p. 414).
Aout: Départ de Tien-Tsin. Odobre: Nomination a Prague. Décembre: Installation a Prague. Charles-Louis Philippe (Po., p. 435).
1910 Février : Naissance de Reine Claudel. Dédicace (Po., p. 964). L’irréduttible (Po., p. 601). Priére pour le dimanche matin (Po., p. 377). Hymne du Sacré-Ceur (Po., p. 404). La Visitation (Po., p. 449). Saint Jean Népomucéne (Po., p. 443). « Les Superstitions chinoises » (Pr., p. 1075). « La Lanterne aux deux pivoines » (Pr., p. 1031).
« Le Cheval qui apportait le soleil » (Pr., p. 1089). « Premiére note sur les Anges » (PRESENCE ET PROPHETIE). « La Physique de P?Eucharistie » (O. C., t. XV). 30 mai: « Lettre 4 Arthur Fontaine » (O. C., t. XV). Juin: Achévement de L’OraGE. 4 juillet : « Propositions sur la Justice. » Ait: Début de L’ ANNONCE FAITE A Marie. Septembre-olfobre: Séjour en France. Décembre:
Traductions
de Patmore.
Les
Joujoux,
Le
Départ,
L’ Agalée (voit 1901) (Po., p. 307). L’ Enfant Jésus de Prague (Po., p. 444).
I9Il
Janvier: Traductions de Patmore; Arbor vitae, « L’Hiver », De natura deorim, Legem tuam dilexi, Vesica Piscis (voit 1901, Po.,
Pp. 307).
Chant del’ Epiphanie (Po., p. 379). Souvenir de ce retour (Po., p. 15). « Boileau » (Pr., p. 437).
Chronologie
LXXXI
Mars: A Vienne, Claudel assiste a la représentation de la Tétralogie wagnérienne. « Lettre sur saint Joseph » (0. ¢. t. XV). Mai: Traduction de Patmore : Magna eff veritas (Po., p. 311). Sainte Ludmilla (Po., p. 442). Saint Wenceslas (Po., p. 441).
Saint Philippe (Po., p. 415). Saint Jude (Po., p. 416). Le CHEMIN DE LA Crorx (Po., p. 477). Juin: Achévement de L’ ANNONCE FAITE A Marie (Td. I, p. 11). Séjours a Villeneuve et a Hostel. Début de La Canrate A
TROIS VOIX (Po., p. 327). Septembre: Hymne des saints Anges (Po., p. 453). Nomination a Francfort. Chant de marche de Noél (Po., p. 464).
1912
[Mars-avril]: « Dés le moment ou Jammes... » (Pr., p. 541). Juillet: Achévement de La CANTATE A TROIS VOIX. Voyage a Roche chez Isabelle Rimbaud. « Préface aux CEwvres d’ Arthur Rimbaud » (Pr., p. 514). Saint Barthélemy (Po., p. 417). Aout: Naissance d’Henri Claudel. Novembre: Saint Frangois-Xavier (Po., p. 461).
1945 Notre-Dame Auxiliatrice (Po., p. 408).
Chant de l’Epiphanie (Po., p. 379). La Présentation (Po., p. 383). « Notes sur Mallarmé » (Pr., p. 513). « Ma conversion » (Pr., p. 1008).
Mars: Mort de Louis-Prosper Claudel. —Internement Camille. Abril: Voyage a Strasbourg. Strasbourg (Po., p. 437). Sainte Odile (Po., p. 439). Chant de la Saint-Louis (Po., p. 451). La Transfiguration (Po., p. 450). Prorte (Th. I, p. 311). Traduétion des CuoképHorss d’Eschyle (Th. I, p. 915).
de
LXXXII
Chronologie
Ofobre: Nomination a Hambourg. « L’Annonce faite 4 Marie 4 Hellerau » (TA. I, p. 1384). Novembre: Début du Pain pur. Commémoration des fidéles trépassés (Po., p. 456). Décembre: Saint Nicolas (Po., p. 463). Psaume XLIX (Po., p. 403). Le Jour des cadeaux (Po., p. 445).
1914 Hymne de Saint Benoit (Po., p. 385). Sainte Scolastique (Po., p. 387). Saint Simon (Po., p. 419). Saint Jacques le Mineur (Po., p. 420). Saint Matthieu (Po., p. 421). Saint André (Po., p. 422). Saint Thomas (Po., p. 424). Saint Jean I’ Evangéliste (Po., p. 425). L’Offrande du temps (Po., p. §23). Janvier : « Lettre (sur L’ Echange) » (Th. 1, p. 1299). 2 février: « Lettre 4 H. Charasson » (Th. II, p. 1408). [Février]: « Lettre sur Coventry Patmote » (Pr., p. 529). Juin: Représentations de L’Ovage. « Lettre 4 G. de Pawlowski» (Th. I, p. 1409). « Le Théatre catholique. Lettre au Temps» (Th. II, p. 1409). [Juillet]: « Le Théatre catholique (Lettre au Figaro) » (Th. UH, p. 1412). Aout: Déclaration de guerre. Retout en France. Septembre: Claudel suit le Ministére 4 Bordeaux. Odobre: Achévement du Parn pur (TA. II, p. 417). L’ Evangile du U* Dimanche del’ Avent (Po., p. 966). Sainte Cécile (Po., p. 607).
1915 Feévrier :La Nurr DE Nox
1914 (TA. II, p. 571).
Mars : Aur: morts des armées de la République (Po., p. 537). La Vierge a Midi (Po., p. 539). Le Précieux Sang (Po., p. 541).
Conférence 4 Paris : « Poéme de la nature, de la foi, de la patrie » (Po., p. 1085). Abpril-mai: Conférences en Suisse et en Italie.
Chronologie
LXXXII
Juin: Retour a Hostel. Rome (Po., p. 543). Sainte Thérése (Po., p. 624). Tant que vous voudrex, mon général... (Po., p. 533). Derriére eux (Po., p. 535). Juillet: Affectation au service des prisonniers de guerre. Att: La Grande Afttente (Po., p. 547). Odfobre: Départ pour lItalie en mission économique. |
Début du PERE HUMILIE.
~—
Novembre: Si pourtant... (Po., p. 557).
1916 « Lettre a R. Vallery-Radot » (Pr., p. 1416). Le Crucifix (Po., p. 554). A /’Italie (Po., p. 562). Mars: Ce nest point de nous seulement... (Po., p. 556). Le Jour des Rameaux (Po., p. 559). « La Jolie foi de mon enfance ». Saint Antoine de Padoue (Po., p. 562). A la mémoire de Georges Dumesnil (Po., p. 603). Fin de la traduction des Euménrpes d’Eschyle (Th. I, p. 949). Juillet: Achévement du Pre Humriié (Th. I, p. 491). Novembre: Nomination au Brésil. « Conférence au Foyer franco-belge » (Pr., p. 1409, et Th. I,
D. 1337).
Début de Sainte Geneviéve (Po., p. 633).
1917 2 janvier : Départ pour le Brésil. Ballade (Po., p. 604). Février: Arrivée a Rio-de-Janeiro. L’?HomMeE Er son pgsir (T/A. II, p. 641).
Abril: Fin de L’Ours er 1a Lune (TA. I, p. 593). Mai; Début de LA Messe LA-BAs (Po., p. 491). Juin: « Lettre au P. de Tonquédec » (Pr., p. 1406). Aoiit: Naissance de Renée Claudel. Décembre: Achévement de LA MEssE LA-BAS.
LXXXIV
Chronologie 1918
Mars: L’ Architeée (Po., p. 614). Juin: Achévement de Sainte Genevieve (Po., p. 633).
Novembre: Saint Louis (Po., p. 651). Début de Saint Martin (Po., p. 633). Départ de Rio. Décembre: Traduction de Corymbe de 1’Automne
de Thompson
(Po., p. 319).
eRe) Janvier : Séjour a New York. Retour en France. Le Faible Verlaine (Po., p. 599). Mai: Dessins (Po., p. 689). « Introduction a quelques ceuvres » (O. C., t. XVIII). Premiére idée du SOULIER DE SATIN. Juin: « Lettre a A. Cingria sur la décadence de Vart sacré » (rs pores): Juillet: Nomination a Copenhague. Aout: Départ pour le Danemark. Septembre: Achévement de Saint Martin. Odfobre: Saint Georges (Po., p. 608). « Notes sut les Choéphores » (Th. I, p. 1319).
1920
« Sur la mode » (Pr., p. 163). « Note sur les Euménides » (Th. I, p. 1328). « Préface a la Trilogie » (Th. I, p. 1415). Février ; Plébiscite du Schlesvig. Mai; Voyage en France. Septembre: Début de L’Ode jubilaire (Po., p. 675). Novembre: Sainte Colette (Po., p. 613).
1921 Janvier : Nomination d’ambassadeur. Achévement de L’Ode jubilaire (Po., p. 675). Février : A la mémoire de l’abbé Daniel Fontaine (Po., p. 606). « Discours a4Copenhague » (Pr., p. 1542). « Adieu au Danemark » (Pr., p. 1542).
Chronologie
LXXXV
Mars: Retour en France. Abril: Saint Joseph (Po., p. 612). Mai: « Introdu€tion 4 un poéme sur Dante » (Pr., p. 422). Préface (pout les Morceaux choisis) (Po., p. 967). « Sut L’Homme et son désir » (Th. I, p. 1464).
Juin: Représentations de L’Homme et son désir. Septembre: Départ pour Tokyo. « Du mal et de la liberté » (Posrrions II). Odfobre-novembre : Voyage en Indochine. Artivée a Tokyo. Décembre: « Mon voyage en Indochine » (Pr., p. 1545).
1922 Janvier: « Discouts pout le voyage du maréchal Joffre » (Pr.,
P. 1545).
« Discours sur les Lettres frangaises » (Pr., p. 659). Mai: « Lettre 4 Pabbé D. » (Tor Qui Es-ru ?). Juillet: Poémes au verso de Sainte Genevieve. La muraille intérieure de Tokyo (Po., p. 646). Aout : « Ecce sto ad ostium et pulso » (Posrrrons IJ). Septembre: LA FEMME ET SON OMBRE, I (TY. II, p. 645).
Décembre : Charles-Louis Philippe (Pr., p. 539).
1923 Mars: Représentations de La Femme et son ombre. Juin: « La Poésie japonaise » (Po., p. 1139). Juillet: « Un regard sur |’Ame japonaise » (Pr., p. 1118).
La Route interrompue (Po., p. 691). Septembre: Tremblement de terre 4 Tokyo. « A travers les villes en flammes » (Pr., p. 1133).
1924 « Bounrakou » (Pr., p. 1180). « Tendte la joue gauche » (Posrrions II). Septembre: « Un an aprés » (Pr., p. 1146). Offobre: Le Vieillard sur le mont Omi (Po., p. 745). Achévement du SOULIER DE SATIN. Décembre: « Discouts pout Vinauguration de la Maison francojaponaise » (Pr., p. 1545).
LXXXVI
Chronologie t=)
Janvier:
« Réflexions
et propositions
sur
le vers
frangais »
CAS pes):
« La Nature et la morale » (Pr., p. 1183). Départ pour la France. Mars: Arrivée a Paris. Abril: Jacques Riviére (Po., p. 690). Mai: « La Philosophie du Livre » (Pr., p. 68), conférence faite a Florence. Juillet: « Une promenade a travers la littérature japonaise » (Pr., p. 1153), conférence faite en Espagne. « Remerciements a l’Espagne » (Pr., p. 1547). Séjour au chateau de Lutaines. « Jeudi» des CONVERSATIONS DANS LE Lorr-ET-CHER (Pr., p. 669). Oéfobre: Conférence en Angleterre sur son ceuvre. Novembre: Conférences 4 Lyon et en Belgique sur la littérature japonaise. Décembre : Conférence en Suisse sut son ceuvre. « Léon Bloy » (Pr., p. 528). Abeille (Po., p. 863). La PARABOLE DU FESTIN.
1926 Janvier: Dépatt pour le Japon. Saint Frangois d’ Assise (Po., p. 912). Prorte II (TA. II, p. 361). Feévrier : « Hang-Tchéou » (Pr., p. 1183). Abril: « La Catastrophe d’Igitut » (Pr., p. 508). Sainte Jeanne d’ Arc (Po., p. 842). Juin: « Le poéte et le shamisen » (Pr., p. 820). La FEMME ET SON OMBRE, II (Th. II, p. 651). CENT PHRASES POUR EVENTAILS (Po., p. 697). Juillet: « La Neige », « Deux bambous vetts», « Pont», « La Canne », « L’Abdication au milieu des pins » (Pr., p. 1187).
Claude Laroche (Po., p. 863). Ait: « Le Poste et le vase d’encens » « Histoire de ’équarisseur » (Pr., p. « L’Arriére-pays », « Mies » (Pr., p. « Meiji» (Pr., p. 1196). Lz PEUPLE DES HOMMES Cassés (Th.
(Pr., p. 836). 1191). 1192). II, 657).
Chronologie
LXXXVII
Septembre: « Idéogrammes occidentaux » (Pr., p. 81). Novembre : « Lettre a Miyajima » (Pr., p. 1551). « Jules, ou L’homme aux deux cravates » (Pr., p. 847). « La Maison du Pont des faisans » (Pr., p. 1198). « L’Abime solaire » (Pr., p. 1199). « Projet dune église souterraine a Chicago » (Pr., p. 1422). Décembre: Nomination a Washington. « José-Maria Sert et sa cathédrale » (Pr., p. 288). « NO » (Pr., 1167). « Kabouki» (Pr., p. 1176). « Bougakou » (Pr., p. 1178). « Préface a Les Heures du Foyer, ?H. Charasson » (Pr., p. 1403).
1927 Janvier: « Nascuntur poetae » (Pr., p. 691). « Et toi, que penses-tu du Christ? » (Posrrions, II). « Richard Wagner » (Pr., p. 863). « La Maison d’Antonin Raymond » (Pr., p. 1201). Février : Elisabeth Sainte-Marie-Perrin (Po., p. 968). « Les Funérailles du Mikado » (Pr., p. 1148). Départ du Japon. Mars: Atrivée en Amérique. Chant des petits oiseaux en avril (Po., p. 970). « Nijinsky » (Pr., p. 384). Abril: Départ pour la France. Sous LE REMPART D’ArHENES (TA. I, p. 1113). Juin: Hong-Kong (Po., p. 23). Du cété de la défense (Po., p. 817). Juillet: « Lettre 4 Vabbé Bremond » (Pr., p. 45). Installation a Brangues. Le Livre pe CurisrorHE Cotoms (Td. I, p. 1129). « Dimanche », CoNVERSATIONS DANS LE Lorr-ET-CHER
(Pr.,
Pp. 700). Aoit: Départ pour les U. S. A. Septembre: « Bossuet » (Pr., p. 438).
Offobre : « Lettre 4 Paul Souday » (Pr., p. 1458). « Le Regard amérticain vers la France» (Pr., p. 1557). « [A propos de Sous le rempart d’ Athénes|» (Th. IL, p. 1483). Novembre: « Religion et Poésie » (Pr., p. 58).
LXXXVIII
Chronologie 1928
Janvier:
« Mardi»,
(Pr., p. 735).
CONVERSATIONS
Février: Signature du Traité (Paéte Briand-Kellog). Mars:
« Samedi»,
DANS
d’arbitrage
CONVERSATIONS
DANS
LE
Lorr-ET-CHER
“2
et de conciliation LE
LorRr-ET-CHER
(Pr., p. 776).
« La Mise hors la loi de la guerre » (Pr., p. 1557). Abril: Pauline Jaricot (Po., p. 864).
Juillet: Retour en France. Séjour a Brangues. Commencement de AU MILIEU DES VITRAUX DE L’ APOCALYPSE. Septembre: « Les Invités 4 l’attention » (Posrrions, II).
Ofobre: Retour en Amérique pat la Guadeloupe. Novembre: « La Nécessité dans le vers frangais » (Pr., p. 1405). « Le Voleur volé » (Pr., p. 1520).
« Préface a Le Japon mort ou vif» (Pr., p. 1545).
ee) Janvier : « Lettre a propos de Paul Souday » (Pr., p. 1410). « Note sur la mise en scéne de Christophe Colomb» (Th. II,
Pp. 1491).
Mai: « Discours aux acteurs catholiques de New York»
P- 1557):
(Pr.,
Juin: Mort de la mére de Claudel. Le Bon Samaritain (Po., p. 970). Septembre: « L’ Anniversaire de Lafayette » (Pr., p. 1557). Novembre: « Allocution pour la remise de la Légion d’honneur a Pierre Cartier » (Pr., p. 1444). Décembre: « Lettre 4 A. E. M. » (Posrrions, II). « Note sut Christophe Colomb » (Th. II, p. 1491).
1930 Réponse du Sage Hsien Yuan (Po., p. 974). Janvier : « Lettre 4 A. E. M. » (Posrrrons, I). Février : « Le Drame et la musique » (Pr., p. 1409). Mars : « Sur la grammaire » (Pr., p. 1409). Abril: « Lettre 4 A. E. M. » (Posrrrons, II). « Le Regard frangais vers l’Amérique » (Pr., p. 1557).
Chronologie
LXXXIX
Mai: Retour en France. Voyage a Berlin pour les représentations de Christophe Colomb. Représentations de L’ Osage. Juin: « Lettre a Pierre Brisson sur L’Osage » (Th. I, p. 1419). Septembre: L’ Invitation a dormir (Po., p. 850). « A une grappe de raisin, traduction de Beddoes » (Po., p. 975). Retour aux U.S.A. « Préfaces pour Le Soulier de satin» (Po., p. 975). Novembre: « Lettre sur Chesterton » (Pr., p. 1492). Décembre: « Le Regard en avant » (Pr., p. 1451).
1931 Février : La Confession (Po., p. 821). Abril: « Jean Charlot » (Pr., p. 296). _ «La Troisiéme Rencontre » (Posrrions, II). ’ Mai: Saint Tarcisius (Po., p. 823). « Lettre 4 Mme d’A. » (Posrrions, II). Juin: « Le Départ de Lao-Tseu » (Pr., p. 920). Aout: Retour en France. « Deuxiéme note sur les Anges» (PRESENCE ET PROPHETIE). Odfobre: Départ pour les U.S.A. Décembre: Judith (Po., p. 785).
« Préface 4 R. Jouve, A /a conquéte d’une banliewe » (Pr., p. 1485). « L’Automate-créateur » (Pr., p. 1404).
1932 Janvier: Pour la fete de sainte Agnés (Po., p. 872). « Note sur l’art chrétien » (Pr., p. 121). Février: « Autte fragment sur saint Joseph » (Posrrrons, IJ). Mai: « Commentaire sur le Psaume XXVIII» (AVENTURES DE SOPHIE), Juin: Le Cygne. Jour d’automne (Po., p. 869). « Smata » (Pr., p. 1520). « Les Dix Commandements de Dieu » (AVENTURES DE SOPHIE). Juillet: La Fleur bleue (Po., p. 897). Le Delphinium (Po., p. 897). Aoit: « La Légende de Prakriti» (Pr., p. 944). Départ de New York. Achévement de AU MILIEU DES VITRAUX DE L’ APOCALYPSE. « La Pérégrination nocturne » (Pr., p. 923). Poéme a Marion Cartier (Po., p. 867).
wes
Chronologie
Septembre: Ernest Psichari (Po., p. 845). « Sur la présence de Dieu » pape ET PROEHETE): Offobre:: Retout aux U.S, A. Décembre: « La Salle d’attente » (Pr., p. 925). (Cette « Chronologie » étant paralléle au Journal, on trouvera
en téte du second volume celle qui correspond pattie : 1933-1955.)
a4 la seconde
Jacques Perr.
CAHIER
I
1904 [1] Son départ — 1° aotit 1904. Commencé a Foutchéou, septembre 1904. Naissance de Louise : 22 janvier 19051.
[2] Fendre la muraille (du coeur humain),. Fili hominis, fode parietem. Et cum fodissem parietem,
apparuit ostium unum,
et
dixit ad me: Ingredere, et vide abominationes pessimas quas ist faciunt hic. Et ingressus vidi: et ecce omnis similitudo reptilium et animalium abominatio et universa idola domus Israel depitta erant in pariete (Ez., VIII)*. (V. le commfentaire] de S. Grég[oire], Mor[ala], X XVI, chap. v1, 7°.) Computrescit jugum a facie olei (Is., X, 27)*. In funiculis Adam traham eos, in vinculis caritatis (Os., XI, 4)°.
Sed et lamiae nudaverunt mammam,
lattaverunt catulos
suos (l’enseignement de VDUniversité, monstrueuses modernes)®.
les doétrines
[3] Plaintes de l’Eglise persécutée Van de honte 1904 (Job, XXX)’. Nunc autem derident me juniores tempore quorum non dignabar patres ponere cum canibus gregis meae®. Tous les sectateurs et auteurs des faibles et sottes théories* modernes, dont les péres ne se sont méme pas
4
Cahier I
élevés 4 la hauteur des anciens hérésiarques. — Les chiens, animaux immondes: foris canes !— Les chiens ne sont pas du troupeau, mais ils l’empéchent de s’égarer. Oportet haereses esse. Les chiens ne savent qu’aboyer et mordre. Mais les roquets modernes ne savent méme pas leur métier. Les chiens se régalent d’excréments quwils considérent comme des friandises. — Philosophes modernes, non seulement nous ne vous élevons pas a la dignité de chiens, mais pas méme vos péres et vos auteurs’.
Quorum virtus manuum mibi erat pro nibilo, et vita ipsa putabantur indigni ; |4] egestate et fame Steriles qui rodebant in solitudine, squalentes calamitate et miseria®. La « science»
moderne,
misérable
et dégottante,
qui grignote des détritus et des hypothéses mortes et séches : les rats de bibliothéques, les rongeurs de textes, la lettre morte. Et mandebant herbas, et arborum cortices, ef radix juniperorum erat cibus eorum. Les faits auxquels ils s’attachent. — Herbas, ce qui
n’a pas encore
pris forme et maturité.
—
Cortices,
lenveloppe rude et grossiére qui défend le beau corps
de
Arbre. — Radix juniperorum, \a racine des végétaux
durs,
noirs
et amers,
qui poussent
dans
les lieux
préservés de eau du Ciel; la racine des péchés?.
Oui de convallibus ita rapientes, cum singula reperissent, ad ea cum clamore currebant. Ridicule vanité de ces misérables*. Ad singula ! Quel état fait du plus petit fait isolé que lon peut tourner contre la religion! Conva/libus: le trou qui borne leur horizon. In desertis habitabant torrentium, et in cavernis terrae,
vel super glaream. Le désert laissé par ces eaux décevantes qui ne demeurent pas pour étancher la soif, mais qui ne font que passer, laissant la désolation [5] aprés elles. — Cavernis terrae, les terriers pratiqués péniblement pour
Septembre-Novembre 1904
j
se mettre a l’abri du soleil. Les cavernes des Satyres et des brigands. — G/aream, le gravier, la vanité, la niaise
gloire du monde, la popularité mouvante?. Qui inter hujuscemodi laetabantur, et esse sub sentibus delicias computabant. Sentibus, les pines du mal, de l’erreur, les remords de
la conscience. Le pécheur se réjouit dans son fourré inextricable qui le déchire. V. le passage de Pascal?. Fili Stultorum et ignobilium, et in terra penitus non pavrentes. A savoir les Voltaire, les Rousseau,
les Renan, les Nietzche, et toute la canaille allemande. Aucun contaét, aucune paternité de l’humble, sainte et profonde
nature. Is se sont éloignés de la profonde nature’. Nunc in eorum canticum versus sum, et fattus sum eis in eorum proverbinm.
Pas un fils de chien qui n’insulte notre Sainte Mére VEglise;
les pitres, les professeurs,
les journalistes,
les politiciens, les romanciers, les philosophes, les calicots, les marchands
de vin, les artistes, les poétes, les
savants*,
[6] Abominantur me, et longe fugiunt a me, et faciem meam
conspuere non verentur. Pharetram enim suam aperuit,
et afflixit me, et frenum posuit in os meum. Toutes les blessures Pune aprés Vautre.
Affixit,
Vimpossibilité de se mouvoir. Frenum, interdiction de parler, Pincapacité de s’expliquer®.
Ad dexteram orientis calamitates meae illico surrexerunt ;
pedes meos subverterunt, et oppresserunt quasi fluclibus Semitts SUIS. Orientis, Popposition a la croissance et a la grandeur de l’Eglise. Pedes, les ceuvres de miséricorde. Fluétibus,
Vimmensité des vaines entreprises et couvte les voies de Dieu’.
humaines
écrase
Dissipaverunt itinera mea, insidiati sunt mihi, et praevaluerunt, et non fuit qui ferret auxilium’.
6
Cahier I
Entreprises temporelles contre |’Eglise; calomnies et perfidies des protestants et des libres-penseurs; lacheté des catholiques. ; [7] Quasi rupto muro et aperta janua, irruerunt super me, et ad meas miserias devoluti sunt. La pénitence, les commandements qui défendaient PEglise. Le péché qui roule et entraine les pécheurs comme par leur propre poids. Par leur inertie, emportés, ils dévastent?.
Redaéttus sum in nihilum : abSiulisti quasi ventus desiderinm meum, et velut nubes pertransiit salus mea*. Desiderium, Vamour de Dieu. Nubes, la grace. Nunc autem in memetipso marcescit anima mea, et possi-
dent me dies afflittionis. Notte 0s meum perforatur doloribus, et qui me comedunt non dormiunt®.
Marcescit, le desséchement, la réduction lente. P{ar] ex[emple] abandon des églises de campagne. La nuit de la déréliction, l’os de l’Eglise, les prétres, la sainte hiérarchie elle-méme atteinte et ébranlée. Les mangeurs de prétres. In multitudine eorum consumitur veStimentum
meum,
et
quasi capitio tunicae succinxerunt mes. Mes ennemis ne laissent aucun point de mon vétement [8] intact. Mais a partir du collet seulement. Ils sont impuissants contre la téte qui est Nfotre]S[eigneur].
Comparatus sum luto, et assimilatus sum favillae et cineri®. La boue qu’on foule aux pieds; un vain et informe résidu.
Mutatus es mihi in crudelem, et in duritia manus tuae
adversaris mihi. Elevasti me, et quasi super ventum ponens elisisti me valide. Scio quia morti trades me, ubi constituta et domus omni viventi. Verumtamen non ad consumptionem eorum emittis manum tuam ; et si corruerint, ipse salvabis®.
L’Eglise qui a les promesses éternelles ne mourra
Septembre-Novembre
1904
7
pas; mais elle est livrée a la mort, aux doétrines de mort. La mort est le patrimoine naturel des vivants!. Et
cependant leur perte n’est pas l’ceuvre de Dieu, toujours prét a les sauver.
Flebam quondam super eo qui afflittus erat, et compatiebatur anima mea pauperi?. Miséricorde de l’Eeglise.
[9] Expetlabam bona, et venerunt mihi mala: praestolabar (uncer, et eruperunt Lenebrae?.
Reconnaissance des hommes.
Interiora mea efferbuerunt absque ulla requie, praevenerunt me dies affitttionis*. '
‘Trouble et scandale des fidéles; surprise de l’épreuve.
Moerens incedebam sine furore; consurgens in turba clamabam'. D’apreés Phébreu : « Je suis noirci non par le soleil »; allusion aux effets de l’elephantiasis. Frater fui draconum, et socius struthionum®.
Horrible solitude de l’Eglise; le Désert et les monstres du désert. Cutis mea denigrata est super me, et ossa mea aruerunt prae caumate” |
.
Effets de la calomnie et de la persécution. Versa est in ludtum cithara mea, et organum
meum
in
vocem flentium®. Tw autem, Domine...
[11] S. Grégoire compare le peuple juif aux boiteux, parce qu’ils ne s’appuient que sur un seul testament®.
OQuoniam sprevisti aquas Siloé quae vadunt in silentio(Is.)}°. L’eeil doit se garer de la poussiére et le pied au contraire ne pas la craindre™. CLAUDEL
V - 4
4
8
Cahier I
Ostendisti populo tuo dura: potasti nos vino compunctionis (Ps. LIXG 5). Ecce mittam famem ; non famem panis, neque sitim aquae, sed audiendi verbum Det (Am., VIII,
11).
Punition du cceur endurci par le péché’.
Aqquae furtivae dulciores sunt et panis absconditus suavior (Brows, DX. Mutieres populi mei ejecistis de domo deliciarum suarum ; a parvulis earum tulistis landem meam*. Paroles de l’Eglise persécutée; fermeture des cloitres et des écoles.
[12] Convenite, congregamini, gens non amabilis (Soph., Lit as. Vide,
Domine,
et considera
quia fattus
sum
vilis
(Engen: tia )S. Vae vobis qui cogitatis inutile (Mich., U, 1)’. Tune cognoscam, sicut et cognitus sum (1 Cot., vault, 12)8. Parole d’abime?.
Computruerunt jumenta in Stercore suo (Joél, I, 17)?°. Producam
ergo
ignem
de
medio
tui
(L’homme mortel) (Kz., XXVIII, Meus
qui
comedat
te
18).
eft fluvius et ego feci memetipsum.
Paroles de Egypte (Ez.,
X XIX, 3).
[13] Ev es evs quasi carmen musicum, quod suavi dulcique sono canitur ; et audiunt verba tua et non faciunt ea (Ez., DOOM esaes Ego veni in nomine Patris mei et non accepistis me; si alius venerit in nomine suo, illum accipietis (Joann., V, 43)*4.
Pro eo quod charitatem veritatis non receperunt, ut salvi
Septembre-Novembre 1904
9
fierent, ideo mittet illis Deus operationem erroris ut credant mendacio (II Thess., 11, 10)}. S. Grégoire sur notre connaissance aprés la mott : Moral., lib. XVIII, 78, 79. Et quoniam ipsa eorum claritas vicissim sibi in alternis cordibus patet, et cum uniuscujusque vultus attenditur, simul
et conscientia penetratur. Ibi quippe uniuscujusque mentem ab alterius oculis, membrorum
corpulentia
non
abscondet,
sed patebit animus, patebit corporalibus oculis ipsa etiam corporis harmonia, atque unusquisque tunc erit conspicabilis
alteri, sicat nunc esse non potest conspicabilis sibi. In hac itaque {1 4] terrestri domo quousque vivimus, ipsum, ut ita dicam, corruptionis nostrae parietem mentis oculis nullatenus
penetramus, et vicissine in aliis videre occulta non possumus.
Unde sanifa Ecclesia sponsi sui speciem in divinitate videre desiderans, nec tamen valens, quia aeternitatis illus formam
quam intueri concupiverat ab ejus oculis assumpta humanitas abscondebat, in Canticis canticorum moerens dixit: En ipse flat post parietem (Cant., I, 9)... Unde rursum per
Paulum dicitur: Quis scit hominum quid sit hominis, nisi Spiritus hominis qui in ipso ef? (1 Cor., u,
11). Ef:
Nolite judicare ante tempus, donec veniat Dominus qui et illuminabit abscondita tenebrarum, et manifelabit consilia cordium (I Cor., tv, 5)... Amuro clara, vitro perspicua... Bene dicitur : Non adaequabitur ei aurum vel vitrum. Ad hoc enim saniti omnes ad illa gaudia aeterna perveniunt, ut esse
Deo similes possint, sicut scriptum est: Cam apparuerit, similis ei [15] erimus, quia videbimus eum sicuti est (I Joann., 11,2). Er samen scriptum es : Domine Deus virtutum, quis similis tibi? (Ps. LXX XVIII, 9) e¢ iterum : Aut quis erit similis Deo inter filios hominis ? Unde ergo similes et unde non similes, quia hnic sapientiae et similes erunt
ad imaginem et tantum non erunt ad aequalitatem. Aspiciendo quippe aeternitatem Dei, fit eis ut aeterni sint;et dum visionis ejus donum percipiunt, ex perceptione beatitudinis imitantur quod vident. Ext habent itaque quamdam Dei similitudinem, guia non habent finem ; et tamen incircumscripti aequalitatem non habent, qui habent circumscriptionem. Trouvé au moment ov j’écrivais Part. V de mon Traité?.
10
Cahier I
Passage délicieux de S. Grégoire s. Job, XX VII, 18: In nidulo meo moriar. Jam quippe domum invenit sibi [16] passer, quia aeternum coelt abtisbalion noster Redemptor intravit. Et turtur invenit nidum, quia santta Ecclesia, amore conditoris affeda, crebris gemitibus utitur et velut nidum sibi,idest pacatissimam
jfidei quietem construit, in qua crescentes jilios quasi plumescentes pullos, quousque ad superiora evolent, charitatis gremio calefattos fovet (Mor., XIX, 27)}.
[17] Es avaritia, quae est idolorum servitus (Coloss., III, 5). Autrefois les idoles, maintenant les idées?.
Per magnitudinem enim creaturae et speciem potest intelligibiliter creator videri (Sap., XIII, 5)*.
Invisibilia ejus per ea quae fatta sunt intelletta conspiciuntur, sempiterna quoque virtus ejus et divinitas (Rom., I, 20). Innuit immensa admiratione quod est, mira haec externis oftendendo quae non esf?.
Exaudivi te in abscondito tempeftatis, probavi te ad aquas contradittionis (Ps. LX XX, 8)°. [18] Ubi est Deus qui fecit me, qui dedit carmina in notte ? (Job, XXX,
10)’.
Nemo vos decipiat per philosophiam et inanem fallaciam (Coloss., II, 8)8. Non impedias musicam (Eccli., V). Devise?. Nescitis quoniam angelos judicabimus ¢ (1 Cor., vt, 3)*°. Dimisi eos secundum
voluntatibus suis (Ps.
desideria cordis eorum
et ibunt in
LX XX, 13).
Si autem primum a nobis, qui finis eorum qui non credunt
Det evangelio ? (I Petr., rv, 17)?*.
Septembre-Novembre 1904
II
Scientia quippe inflat, charitas vero aedificat. L’une gonfle, autre construit. [19] Qui sine lege peccaverunt, sine lege peribunt (Rom., Tietz)? Curavimus Babylonem, et non est sanata (Jerem., LI, 9)°.
Erunt homines seipsos amantes (11 Tim., 111, 2). Les « efféminés », ceux qui se plaisent aux louanges, qui y livrent leur esprit‘. Igitur salvabit te de ore angusto latissime et non habente fundamentum subter se (Job, XXXVI, 16)*. Omne peccatum fundamentum non habet, quia non ex propria natura subsist. Malum quippe sine subStantia est. Quod enim, utcumque sit, in boni natura coalescit®. Peccati nulla mensura’.
Satiabor dum manifestabitur gloria tua (Ps. XVI, 15)8. Nam sicut est locus corporis spatium corporale, ita locus
est mentis unaquaeque intentio cogitationis®. [20] Szcut ignoras quae sit via Spiritus, et qua ratione compingantur ossa in ventre praegnantis, sic nescis opera Det,
qui fabricator est omnium (Kccli., XI, 5)?°. Qui ventum observat, non seminat ; et qui considerat nubes nunquam metet (Eccl., XI, 4)". Les tribus de Ruben et de Gad, et la demi-tribu de
Manassé qui ne veulent pas passer le Jourdain’.
« Vide ne feceris; conservus enim tuus sum et fratrum tuorum », dit ?Ange de l Apocalypse?®. NE
Pater, volo ut ubi ego sum ef t//i sint mecnm (Joann., Dec
12
Cahier I
« Ego sum», le nom méme de Dieu, Iahveh'. Le Christ est monté au ciel avec son corps. Nous sommes le corps du Christ.
. Ut qui paradisum perdidit coelum recipiat*. [21] Manna : Manbu, interpretatur Quid est hoc? ? Corpus quod corrumpitur aggravat animam, et deprimit terrena habitatio sensum multa cogitantem (Sap., 1X, 15)4. Congrega:eos quasi gregem ad vittimam, et santtifica eos in die occisionis (Jerem., XII, 3)§. Notre dernier jour. Oui in manu omninm hominum signat, ut noverint singuli opera sua (Job, XX XVII, 7). La chiromancie, la signature du pouce®.
L’origine de Vidolatrie 4 Babylone’? : Calix aureus Babylon in manu Domini inebrians omnem terram ; de vino ejus biberunt gentes, et ideo commotae sunt
(Jer., LI, 7).
[23] Le 9 odtobre 19048 a 2 heures et demie de l’aprés-midi a Pinfirmerie Marie-Thérése
92, rue Denfert-Rochereau a Paris Mort de mon confesseur et pére spirituel L’abbé Joseph Edouard Villaume, ancien vicaire de Saint-Médard, curé d’Orly. Inhumé au cimetiére d’ Epinal. Visi pace.
sunt
oculis insipientinm
mort,
ipst autern
sunt
in
Exuge, serve bone, intra in gaudium Domini tui. Pater, ne relinquas me orphanum. Memento mei apud
Deum. Tu vide aerumnam et despettionem meam®.
Nouvelle regue 4 Foutcheou, le samedi 19 novembre 1904. [24] Visite a la tombe de abbé V. a Epinal avec Henrion (septembre 1911)!”.
Novembre
1904
13
(Lettre de Pabbé Villaume, de 1903")
t Paris, 3 Xbre, St Francois Xavier Trés cher Monsieur Paul
Je fais en ce moment ma retraite chez les Lazaristes. Crest selon Dieu que je Pinterrompe [zc] un instant pour vous dire :Vous étes ma pens€ée presque constante et Pobjet de mes meilleures priéres. Je vous en supplie, ne soyez pas de ces laches qui ont mis la main 4a la charrue et qui regardent en arriére?. En avant, pour vous c’est Dieu aimé, servi, glorifié ici-bas et possédé La-Haut.
En arriére, c’est la gloire, le succés, c’est-a-
dire un peu de fumée, et puis les regrets, les remords, la mort. Quid haec ad aeternitatem® ? Donc il vous faut revenir ici, vous démettre de vos
fonétions et entrer au noviciat des Bénédictins que la persécution vient d’envoyer en Belgique. J’ai vu Pautre jour Dom Besse; il passe l’hiver a Paris, occupé a des travaux auxquels 1] vous associera plus tard. Le noviciat se remplit de jeunes gens comme vous, qui lui donnent les meilleures espérances. Dom Besse croit que vous triompherez — si ce n’est fait — de la tentation
de découragement,
et il vous
attend pour
Paques. Je crois comme lui, mais peut-étre moins fortement; aussi je vais redoubler de ferveur dans mes oraisons pour vous‘. Quoi qu’il arrive, je veux que vous sachiez bien que jamais, jamais ma paternelle affection pour vous ne diminuera. Vous garderez toujours votre place en mon
cceur;
et si Dieu
me
fait la grace de me
faire
miséricorde et de me donner une pauyre petite place avec Lui, je ne cesserai de veiller sur vous et de vous
attirer vers le Ciel®. Votre vieil ami n’a plus longtemps a vivre : tempus resolutionis meae instat®. J’aurais si bien yvoulu vous voir dire la messe! Totus, totissimus tibi in Xto.
J. Villaume curé d’Orly
14
Cahier I
A peine mort, j’ai senti les effets de sa prote¢tion!. [25] Gaude et laetare, filia Sion, quia ecce venio et habitabo in medio tui (Zach., I, 10)?. Pondus enim quoddam est quod omnem replet levet (S. Gt.)3.
animam
quam
Incorporeum lumen est quod et interiora repleat et repleta exteriora circumscribat. Sine Strepitu sermo est, qui et auditum aperit et habere sonitum nescit (id.)4.
Addjunge te ad currum (A&., VII, 29)°. Pater non judicat quemquam, Fifio (Joann., V, 22)°. Autres
sed omne judicium dedit
paroles incommensurables.
Absque muro habitabitur Jerusalem (Z., Ul, 4)’. Ne pas interroger Dieu. Ne lui interdire aucune réponse. N.-S. ne répond qu’a l’ Eglise représentée par Caiphe®; il ne répond pas a Hérode et a Pilate, questions de la curiosité ou sommations de l’insolence. C’est lui qui interroge : Pierre, que dit-on de moi? A Madeleine il ne dit rien : [26] il se montre et elle le reconnait. Crest assez. Pa/pebrae ejus interrogant hominem’. La lune s’est séparée de la terre, comme de la céte d’Adam.
Lorsque maniérte
la distance
continue,
Pun par rapport
de deux
Eve formée
points varie d’une
on dit qwils sont en mouvement
l’autre (le mathématicien Duhamel)”.
Vide ergo ne lumen quod in te est tenebrae sint. Si lumen quod in te est tenebrae sunt, ipsae tenebrae quantae erunt ? (Matth., Vij 23)". Cum me laudarent simul astra matutina.
Les Anges créés les premiers?®.
Novembre-Décembre
1904
15
Quis conclusit ostiis mare, quando erumpebat, quasi de vulva procedens ¢ Accouchement de la mer. Les violences et les tortures du monde qui nait. Cum ponerem nubem vestimentum ejus et caligine illud quast pannis infantia obvolverem®. L’obscurité qui recouvre sa naissance, la naissance
de ce qui n’est pas Dieu. Pannis quippe infantia pedes ac brachia constringuntur, ne huc atque illuc dissoluta libertate jattentur®. [27] Quem ergo fruttum habuistis tunc in illis in quibus nunc erubescitis ?(Rom., VI, 21)4.
Quia sicut induta veslis in visionis suae specie per corpus tenditur, exuta autem fratta complicatur, ita unusquisque qui tunc a Sanitae Ecclesiae statu recesserit, tensus ac decorus
quasi dum indueretur fuit, sed exutus poStmodum, confraéius atque abjetlus jacebit (S. Gtég.). Super Job: Restituetur ut lutum signaculum, et Fabit sicut vetimentum (XX XVIII, 14)*. Faétus sum sicut homo sine adjutorio, inter mortuos liber. Le misérable sort de l’impie qu’aucun lien de vraie charité ne relie a ses semblables®.
Dedit abyssus vocem suam, ab altitudine phantasiae suae (Hab., III, 10)’.
Sicut frigidam facit cisterna aquam swam, sic frigidam facit animam malitia sua (Jérém., VI, 7)*.
Sicut aliquando vos non credidiftis Deo, nunc autem misertcordiam consecuti estis propter illorum incredulitatem; ita et i§ti non crediderunt in vestra misericordia, ut et ipsi miseri-
cordiam consequantur. Conclusit enim Deus omnia in incredulitate, ut [28] omnium misereatur (Rom., XI, 30-32). A méditer cette théorie de la foi, du crédiz, du titre
donné aux Juifs dans S. Paul?.
16
Cahier I
Secretum meum mihi, secretum meum mihi (Is., XXIV, 16)}.
Numquid conjungere valebis micantes Stellas Pleiades, aut gyrum Ar uri poteris dissipare ? (Job, XX XVIII, 31)?. Du temps et de l’espace : expressions homologues. Idée immense a4 développer. La distance. La 3¢ dimension’. L’Eglise comparée 4 Arcturus (la G. Ourse). Santa quoque Ecclesia, cum modo infidelibus Trinitatis notitiam, modo autem fidelibus virtutes quatuor... praedicat, quasi rotatu praedicationis Status sui speciem quodammodo immutat (S. Gr.)4. Stella splendida et matutina (Ap., X XII, 26)°. Numquid nosti ordinem coeli et pones rationem ejus in terra? (Job, XX XVIII, 33)*.
Quis enarrabit coelorum rationem et concentum coeli quis dormire faciet? (tbid., 37)’. [29] Out dixerunt: Linguam nostram magnificabimus, labia nostra a nobis sunt. Quis noSter dominus eft? (Ps. XI,
$*)s Eloquia Domini, eloquia casta.
Argentum igne examinatum, probatum terra, purgatum septuplum (ibid., 7)°.
In circuiti impii ambulant (ibid., 9). Nom des psaumes : Mixmor Miktam (poéme au sens mystérieux, poéme d’or, chant qui doit recevoir l’accompagnement d’une musique gtave et sourde)".
Noms de homme : ben adam, enos, is, geber'®.
Novembre-Décembre
1904
17
Le mot « pupille » comme I’hébreu « ison », désigne la « petite poupée» ou l’homme en miniature que chacun de nous apergoit dans les yeux de son semblable en les fixant de prés?. Sur Nabuchodonosor : Princeps coquorum destruxit muros Jerusalem. Princeps coquorum : \e ventre. Jérusalem : vision de la paix’.
Clamorem exattoris non audit (Job,, XX XIX, 7). — Quis exattor nisi diabolus, qui semel in paradiso homini matlae persuasionis nummum contulit et quotidie ab eo hujus debiti exigere reatum quaerit® ? /
[30] Haec fuit iniquitas Sodomae sororis tuae, superbia, saturitas panis et abundantia (Ezéch., XVI, 40)4.
La femme est la grande humiliatrice.
Quoniam humiliata est in pulvere anima nostra; conglutinatus est in terra venter noster (Ps. XLII], 25)°. Tout le psaume est admirable. Prédiction claire du sort des Juifs. Chant d’amour : aoa mpoogiAlas®. Ps. L, Maiserere.
pésa, la transgression qui sépare ’?h[omme] de son Dieu. hatah, \a souillure. avah, la perversion. A An ta miserationum — Rahamika, tes entrailles.
Dele, mahah, qui signifie tantét essuyer soigneusement, tantédt oblitérer. Lava, kabas, laver 4 la maniére des foulons, en triturant et frappant avec force.
Munda, tahar, terme rituel pour la purification des lépreux. kalil, Vholocauste’.
18
Cahier I Ils disparaitront comme
la limace qui se fond?! en
marchant (Ps. LVII).
[31] Le démon qui entre dans le corps des possédés par la fente au-dessous des ongles?. Les sauterelles qui font un saut et retombent aussitot’.
Regem locusta non habet et egreditur universa per turmas suas (Prov. XXX, 27)*. Quo exemplo (Isaac puteos fodientis) discimus ut in hac peregrinationis aerumna positt, cogttationum nostrarum profunda penetremus ; et quousque nobis verae intelligentiae aqua respondeat, nequaquam nosirae inquisitionis manus ab exhaurienda cordis terra torpescat (S. G.)>.
Commentaire amusant de S. G[régoire] sur le petit baton du Deutéronome (Deut., XXIII, 12)°. 4° O avant Noél (20 déc.). Etat du pécheur dans son péché. Vindum. — Pénalité du crime. I] est lié par les pieds qui pourraient l’apporter a Dieu, par les mains qui ne peuvent plus se joindre pour les bonnes ceuvres. I] est condamné au lieu. In domo carceris. — La prison, le cachot. Séparé de Dieu, séparé de la communion
des Saints, séparé des
suffrages des fidéles, des mérites de l’Eglise, des sacrements. Pour [32] vision les quatre murs nus de la ptison infame a quelques pieds de sa face. Le ciel 4 travers la fenétre grillée. Sedentem. — Destruction de la volonté. In tenebris. — Obscurcissement de Vintelligence qui ne sait plus diriger ’ame. Le bien transitoire préféré au bien éternel, le mal au bien, les yeux volontairement fermés, la délectation réduite 4 ce qu’on peut toucher sans plus. Abolition de la prudence et de la perspective. Et umbra mortis. — La mort. Quelles ténébres dont
Décembre 1904
19
cette nuit la plus noire n’est encore qu’une image et qwune ombre! d O enfant Jésus, O clavis David et sceptrum domus Israel, Lg aperts et nemo claudit, claudis et nemo aperit, veni et educ
illum? | Beneditlus Deus qui non amovit orationem meam et misericordiam suam a me (Ps. LXV, 20)?*. Parole consolante de S. Augustin : « Cum videris non a te amotam
deprecationem
tuam,
securus
esto, guia non
est a te amota misericordia ejus »*. [33] Ego enim Stridebo, sicut Stridet plaustrum onusinum foeno (Am., I, 13). Sub foeni onere Stridere est pondera et iniquitates peccan_ tum cum querela tolerare’.
Deserta faéta eSt terra a facie irae columbae, a facie furoris Domini (Jét., XXV, 38)°. Ordinante enim divino judicio, non eis hic aliud culpa est atque alind poena, sed sua in illis in poenam vertitur culpa
Gace
Transi, hospes, et orna mensam (Kccli., X XIX, 33). De ceux qui cherchent leur gloire propre’.
Lo
,o.
1 — Le phallus, le principe male. o — Le yoni, le principe femelle, l’ceuf, la semence, le zéro, le soleil®.
@ —
Phi, le destru€teur des deux, l’engendreur.
Pvois. Le serpent. 1 o — L’unité et le zéro. « Comme la ligne de la force et le cercle de la compréhension et de la multiplication, ces deux signes représentent 4 la fois Pénergie et espace, la volonté [34] et ’amour, la vie et la substance, le pére et la mére; et quoique deux, ils
sont un puisque le cercle n’est que la ligne tournant sur elle-méme et se suivant elle-méme, au lieu de continuer
dans l’abime pour y dépenser sa force en vain» (The perfedt way, Pp. 59°).
20
Cahier I
Origine de Pidolatrie. « La lettre tue et l’esprit vivifie » Le soleil par exemple adoré ésotériquement en tant que source non seulement de la vie matérielle mais de la vie spirituelle. La figure prise pour la réalité.
Idée trés profonde et trés féconde. Le Sexe. Sex : six. Deus
—
deux.
Origine de Vidolatrie. Commerce entre les esprits mauvais et les femmes. Les dieux paiens. Cronos, Derceto, Semiramis. Les législateurs.
® Le Serpent. La lettre gy, racine d’apha et epha;
hébr. Epbheh, trephah, shephiphon. Copt : nouphion. Grec : opus. POI. Le serpent, incarnation du soleil, le dieu phallique.
®OI-NIKEA. Vi&oire du gor, du serpent. La [35] Phénicie, pays d’Hiram, auteur des francs-macons}. Comme
(Ps.
un
enfant
sevré
mon
Ame
est avec
moi
CX XX). Elle n’est plus tout le temps 4 réclamer
comme l’enfant au sein.
Ps.
CXX XVIII. J’ai été brodé en couleurs dans les
profondeurs de la terre. Formation du corps humain?.
Dies formabuntur et nemo in eis (ibid., 16). Sion admet que l’Esprit-Saint a pu, non seulement diéter, comme il l’a fait aux prophétes (Jérémie), mais encore diriger un travail de compilation comme le Second Livre des Macchabées, ne peut-on penser qu’il a également dirigé les tradutions admises par l’Eglise, comme les LXX et la Vulgate, et que leurs prétendus contre-sens doivent étre respeétés comme le texte original?? Réveil au milieu de la nuit. Exsurrexi et adhuc tecum
sum (ibid., 18)*.
Décembre Deus a Libano
1904
21
veniet, et sanétus de monte umbroso
et
condenso (Hab., III, 3).
Calamum quassatum non confringet et linum fumigans non extinguet (Is., XLII,3)?. [36] Sub umbra dormit in secreto calami in locis humentibus (Job, XL, 16). Calami,
les cceurs
orgueilleux;
ia /ocis humentibus,
les parties génitales®. Protegunt umbrae umbram ejus (ibid., 17).
Nervi tefticulorum ejus perplexi sunts. Et desolabit Dominus linguam maris Aegyptii (Is., XI,
15) (Lingua maris, scientia dottrinae saecularis)’. An extrahere poteris Leviathan hamo ?
La ligne ot est attachée l’hamecon, la lignée des ancétres de N.-S.°.
Reliquit ducem pubertatis suae et patti Det sui oblita est @roveIy17):
Principium saptentiae, posside sapientiam (ibid., IV, 7). Vagi sunt gressus ejus et investigabiles.
Ne des alienis honorem tuum et annos. tuos crudeli. Viae inferi domus ejus, penetrantes in interiora mentis’.
[38]® Lorsqu’il tracait un cercle sur ’abime (Prov., V Ii 27)*. Cunla componens, appoCovoa. Efffossos oculos voret atro gutture corvus (Catulle)'.
Et ignoravit quod ibi sint gigantes (r’fa’im) et in profundis inferni convivae ejus (Prov., IX, 18)**.
Do
Cahier I
Nomen impiorum putrescet (tbid., X, 7). Voltaire, Renan. Leur nom méme sera un poison aprés leur mort?. Sternutatio ejus splendor ignis et oculi ejus sicut palpebrae dilucnuli (Job, XLI, 9)?. L’hébreu
Pinspiration,
n’a que
des consonnes;
le souffle
le texte
qui lui donne
attend
Pesprit, qui
permet aux mots d’étre prononcés. Pater meus in me manens ipse facit opera (Joann., XIV,
10),
Le peuple juif assimilé au patriarche Jacob (Israél) aux yeux obscutcis, « qui dum benediceret, et quid eventret in futuro praevidebat, et quis illi praesens assisteret nesciebat », scilicet X. Sa bénédi&tion est en forme de X‘.
[39] Vae soli quia cum ceciderit non habet sublevantem se. Et si dormient duo, fovebuntur mutuo, unus quomodo calefiet ? (Eccl. UV ton tie: Infinitus numerus eS populi omnium qui fuerunt ante eum,
et qui postea futuri sunt non laetabuntur in eo (ibid., 16). Displicet
Deo
injfidelis et Stulta promissio;
multoque
melius est non vovere (ibid., V, 3). Lustravi universa animo meo etinveni amariorem morte mulieren:, quae laqueus venatorum
eft, ef sagena cor ejus, vincula sunt manus illius. Qui placet Deo effugiet tllam; qui autem peccator est capietur ab illa (abid., VII, 27). Solummiodo hoc inveni, quod fecerit Deus Hominem redtum, et ipse se infinitis miscuerit queStionibus. Quis talis ut sapiens est ? et quis cognovit solutionem verbi 2 (ibid., 30). Non est in hominis potestate prohibere spiritum (cbid., VAT 5:3).
Décembre
1904
23
Nec velocium esse cursum, nec fortinm bellum, nec sapientium panem, nec dottorum divitias, nec artificum gratiam ; sed tempus, casumque in omnibus (ibid., 1X, 11).
[40] Animalia tua habitabunt in ea (Ps. XXVIUL, 11).
Le nombre ro : les ouvriers de la parabole recoivent un denier’. Les noms des trois filles de Job : Dies, Cassia et Cornustibii®.
Ce n’est jamais impunément qu’on accepte le plus léger ridicule (le baron de Vitrolles). Quia unicus et pauper sum ego. ?
Sicut lilium inter spinas, sic amica mea inter filias.
On ne s’appuie que sur ce qui résiste (Vitrolles)*. Ego murus, et ubera mea sicut turris, ex quo fala sum coram e0, quast pacem reperiens (Cant., VIII, 10)’. Vinea mea coram me es.
Fuge (derniére parole du Cantique).
ese Les voies terribles de Dieu. Si tu lui demandes quelque chose, crains d’étre exaucé.
Mardi, 14 février 19051 [41] Per continentiam quippe redigimur et colligimur in unum, a quo in multa defluximus (S. Aug.)?. Da quod jubes et jube quod vis (id.)*.
Et aliquando intromittis me in affettum multum inusitatum introrsus, ad nescio quam dulcedinem, quae, si perficiatur in me, nescio quid erit, quod ifta vita non erit (id.)*. At ego per avaritiam meam non amittere Te volui; sed volui tecum possidere mendacium, sicut nemo vult ita falsum
dicere ut nesciat ipse quid verum sit (id.)®. 24 février 1905° Kaux-Chaudes, aotit 1905’. La chair eucharistique. Spiritu (id.)*.
—
Caro quomodo vegetatur
S. Théodore de Khora : « Le sel sort de l’eau et se dissout dans |’eau; ainsi le moine sort de la femme et se dissout dans la femme’. »
Vacate et videte quoniam suavis es Dominus.
Pévrier- Aott 1905
25
In lumine tuo videbimus lumen’.
[42] La Transfiguration. In duobus vel tribus testibus ‘tat omne Verbum. D’une part Elie et Moise, d’autre part Pierre, Jacques et Jean (commf[entaire] de S. Léon), Astipulantur enim stbi invicem utriusque foederis paginae. Moise et Elie, la Loi et les Prophétes; Pierre, Jean et Jacques, la Foi, l’Espérance et la Charité, les trois choses qui rendent témoignage?.
Angeli pacis amare flebunt. Dissipatae sunt viae, cessavit transiens per semitam, irritum fattum et pattum, projecit civitates, non reputavit homines. Obsorduit Libanus (Is., 33)%. Ouis poterit habitare de vobis cum igne devorante ? quis , habitabit ex vobis cum ardoribus sempiternis ? (id., 13). Cor tuum meditabitur timorem (id.)°.
Et sciant omnes quia tu es Deus conspettor saeculorum (Eccli., XX X,VI)¢.
Le chérubin, rouge comme la flamme et la fraise. Qui sémes les moutons sur les montagnes, nombreux que les grains de ble.
plus
[43] Les moutons pareils 4 des vers qui paissent. Saint Jean Chrysostome : « La priére a une telle force qu’elle rend la parole de ’homme aussi puissante et méme plus puissante que celle de Dieu; car Dieu agit sut les créatures, l’>homme agit sur Dicu. » Saint Liguori: « Mais Dieu, lorsqu’on le prie, donne a pleines mains, toujours p/ws qu’on ne lut demande, parce que ses richesses sont infinies; plus il donne, plus il lui reste 4 donner.» « O mon Dieu, s’écriait David, vous étes bon et libéral envers ceux qui vous invoquent;
vos
miséricordes
sont
si abondantes
qu’elles surpassent toutes demandes. » L’efficacité infaillible de la priére est DE For (Villeneuve)’.
26
Cahier I
Elle est fondée : Sur la bonté de Dieu qui est infinie; Sur les promesses de N.-S. qui sont
infaillibles
(Matth., VII, 7; Matth., VI, 11; Luc, XI, 10; Matth., XVUI, 19; Matth., XI, 23; Joann., XIV, 14; XV, 7;
MVE 825 keto: Sur les mérites infinis de N.-S., par qui /ov/ nous a été acquis et tout nous est DU. [44] Pourquoi nos priéres ne sont pas exaucées. S. Augustin répond : Aut mala petitis, aut mali petitis, aut male petitis. Le méme : « Ouaedam negat propitius Deus quae concedit iratus'. » N.-S. a dit : « ... de oratione vestra fiet vobis ». Sic oratio quoddam semen est ex quo quid boni oriatur nescis?. Mais alors quand on demande de tout son ceeur, avec toute la ferveur dont on est capable, le salut d’une ame,
on est sir de l’obtenir?? Car on ne d[eman]de pas une chose mauvaise, on ne la demande pas mal et on est en état de grace par le sacrement de pénitence. Mais quand? Velociter exaudi me. Mane adstabo et videbo. Panem nostrum quotidianum da nobis hodie. Ora pro nobis peccatoribus nunc et in hora mortis nostrae®. Il ne faut pas tenter Dieu. Et vous, pourquoi tenteriez-vous homme, qui estune chose si misérable# ?
Je ne veux pas la mort du pécheur, mais qu’il se convertisse et qu'il vive! Gérardmer, Colmar, Strasbourg’. [45] Sastine sustentationes Dei (Eccli., I, 2)°. I] faut prier avec une entiére confiance. Comment invoquera-t-on celui en qui on ne croit pas? (Rom., Xyit4; Jacq. 5, 57). Tl faut nous souvenir que cest PEsprit-Saint qui prie lui-méme en nous’.
Avec persévérance : parabole du juge, parabole de Vh[omme] qui d[eman]de trois pains®.
Septembre-Offobre 1905
27
Cum Deus aliquando tardius dat, commendat dona, non
negat (S. Aug.). Propter temetipsum inclina, Deus, aurem
1X),
tuam (Dan.,
Moise se tait et Dieu lui dit : Pourquoi est-ce que
tu cries vers moi? (Exode, XIV, 15)’. II Cor., rt, 18. Nos vero omnes revelata facie gloriam
Domini speculantes, in eamdem imaginem transformamur, a claritate in claritatem. tanquam a Domini spiritus.
Meditatio quae est sedula et affectuosa rerum rimatio; contemplatio guae est inspettio ret sine discursu. De quibus ‘Hugo de S. Vittor : « Cogitatione vago incessu semper huc et illuc divertit, sed meditatio deftinata promotione semper in ulteriora tendit: Contemplatio autem et libera mentis perspicacia in Sapientiae speculo cum admiratione suspensa. Meditationis eft perscrutari occulta, Contemplationis admirari
perspicua’.
[46] Leétio quasi solidum cibum ori apponit, meditatio masticat et frangit, oratio saporem acquirit (Oratio = os) (S. Bernard)*. Vérité bien consolante : c’est Esprit-Saint qui prie en moi quand je demande 4 Dieu une chose sainte et bonne. C’est donc la Troisiéme Personne qui demande sa conversion « avec des gémissements inénarrables ». « Que rien ne vous épouvante, que rien ne vous inquiéte; tout passe » (S. Thérése)’.
L’histoire nous montre partout le spectacle d’un juste crucifié entre deux larrons (L. Veuillot)?*.
L’abbé Michel Caillava, Vitailles Garonne)’.
4 Lauzun (Lot-et-
La Memra (parole) — (les Targums)!°.
28
Cahier I
Ennoia, dianoésis, \e soleil et le paradigme (Philon). « V’homme a été crééa image d’un homme intelligible, incorporel, qui est le Verbe de Dieu’. » Le temps, le Verbe.
Aristote : Pnywa cote To 7poonpaivov Xpovov... Kat eoTw aev Twv Kal” etepov Aeyopevwy oNLELOV?. Traduction d’Arnaud: Le verbe est un mot qui signifie l’afirmation. [47] Tradudction de J. de Maistre : le Verbe est un mot qui sursignifie le temps (plutot présignifie ?). Parce unicae spei totius orbis ! (Yertullien)’.
Ut simus initium aliquod creaturae ejus (Jacq., I, 18). Religio haec et: Visitare pupillos et viduas in tribulatione eorum, et immaculatum se custodire ab hoc saeculo (1d., ibid., Pg i
Non rogo pro mundo. De mundo non sunt sicut et ego non sum de mundo. Sicut et tu me misistt in mundum et ego misi eos in mundum.
Ut
credat mundus quia tu-me misifii, — ut cognoscat mundus quia tu me misisti. — Pater juste, mundus te non cognovit. Joann, XVII, passim. Apparentes contradictions’.
Nunc enim propior est nostra salus quam cum credidimus (Epitre de Avent)’.
Matin du 27 nov{embre] aprés l’adoration noéturne, larmes®. Israel, non erit in te Deus recens neque alienus (Ps. — Noéurne du S. Sacrement)®. Premier Dimanche de |’Avent.
Nunc enim propior est nostra salus quam cum credidimus (Rom., X)?. [48] Rorace, coeli, desuper et nubes pluant justum.
Novembre
1905
29
Vide, Domine, affittionem populi tui et mitte quem missurus es; emitte Agnum dominatorem terrae, de petra deserti ad montem Filiae Sion, ut auferat ipse jugum captivitatis nostrae. Rorate... Consolamini, consolamini, popule meus, cito veniet salus
vestra. Quare moerore consumeris ? quare innovavit te dolor ? Salvabo te, noli timere: ego enim sum Dominus Deus tuus, Santtus Israel, Redemptor tuus*. Les mains desséchées de S. Siméon. Le sucre, le vin, alcool; la feuille, le bois, le cep a la texture noueuse et serrée; l’Aame du vieillard plein d’amour, celle du
cognac le plus sec; le bois méme du cep?. Ne timeas, Maria’.
Jésus est parole et tout est parole en lui (Marie Lataste)4. Ita, pater !
[49] La foi, l’espérance, la charité : Credo, Domine, adjuva incredulitatem meam Etiamsi occiderit me, sperabo in eum.
Domine, compelle me amare te’. « Réjouissons-nous dans ce jour qu’il a fait : c’est Paques. Répétons-le-nous encore et encore a nousmémes dans la crainte et dans une grande joie. Comme les enfants qui disent : Ca, c’est une source, ¢a c’est la mer, essayant d’étreindre l’idée nouvelle et de ne pas la laisser Echapper, comme des voyageurs en un pays étranger qui disent : « Voila donc cette grande ville!
voila ce fameux monument! », sachant bien que ces objets de leur étonnement ont une histoire séculaire et mécontents de savoir eux-mémes si peu de cette histoire. Ainsi disons : Voici le jour des jours, le jour royal, le jour du Seigneur. Voici le jour ot le Christ est ressuscité, le jour de notre rédemption, un jour qui nous a faits plus grands que nous ne nous en doutons.
30
Cahier I
Le Christ est entré dans son repos et nous avec lui. Assez de fatigues, et de richesses, et d’inquiétudes, et
de chagrins, et de remords.
Assez de ce monde
de
misére, assez de tous ces vains bruits. Le bruit, c’est
la meilleure musique dont le monde soit capable. Mais maintenant nous sommes dans le calme, un calme qui nous dit tant de choses. Nous savons [50] combien il
est étrange de sentir un silence parfait qui succéde a un bruit continu. Telle est notre béatitude aujourd’hui. Des jours de calme et de sérénité commencent. Le monde se tait et nous pouvons discerner la voix discréte et’a peine sensible de notre Seigneur. Dépouillons-nous seulement du monde et revétons le Christ. S’éloigner de lun, c’est se rapprocher de l’autre » (Newman, Sermon sur la difficulté on nous sommes de « réaliser » les faveurs divines*). Ap. Bremond : « Nous ne l’entendons presque jamais au moment ou i] daigne s’adresser 4 nous. On ne le reconnait que lorsqu’il n’est plus 1a. Bien mieux quw’une sensibilité parfois bien languissante et souvent décue, c’est la mémoire qui sauvegarde pour nous les
certitudes de la dévotion.» C’est trop général sous cette forme. Mais en effet il arrive souvent que la voix de N.-S. est moins comme une articulation de paroles que comme un parfum qui s’exhale continuellement?.
Je sais bien que la source coule et court Bien que ce soit la nuit, Cette source éternelle et cachée,
Je sats bien on elle a son cours Bien que ce soit la nuit,
[51] Je sats qu’il ne peut étre chose si belle, Et que les cieux et la terre boivent par elle, Bien que ce sott la nuit,
Elle est appelée par les créatures Qui se rassasient de ses eaux bien qu’elles soient obscures, Bien que ce soit la nuit. Saint Jean de la Croix, Cantique de I’ame qui se réjouit d’étre arrivée a la connaissance de Dieu par la foi*.
Décembre
1905
31
Ps. CXXXVIII. « Sz sumpsero pennas meas diluculo et Ji habitavero in extremis maris — etenim illuc manus tua deducet me et tenebit me dextera tua.» Moi. Non e§t occultatum os meum a te, quod fecisti in occulto?. Eripe me, Domine, ab homine malo ! (pour elle)s
21 décembre 1905 Fiangailles avec Reine Sainte-Marie-Perrin‘.
25 décembre. — Le givre dans la forét de Fontainebleau. L’impression des arbres et des branches pris dans une vitre gelée. Le givre : résultat du froid, de
Vobscurité, et expression d’une parfaite tranquillité. L’ame au réveil. L’air se décante comme un vin tran‘quille. Les fils d’araignée : tout couverts de ce duvet, les feuilles des ronces ourlées de blanc. Le rose délicieux des feuilles mortes. Le vert de velours amande
des pins®. [52] Le muguet pareil a la premiére goutte de lait qui vient au sein de la jeune mére.
Le Songe de Gerontius, de Newman — Mais cette séparation se produit-elle par les mesutes grandissantes de lespace qui croissent et se multiplient par mon étre méme et par la vitesse? ou bien traversé-je l’infini par une subdivision sans terme, me
précipitant
du fini vers
linfinitésimal,
mourant
ainsi au monde de l’étendue® ? Le temps: les intervalles... sont mesurés par la seule pensée vivante et croissent ou s’évanouissent avec son intensité. — Et le temps n’y est pas propriété commune. — Chacun est la régle de sa propre chronologie. C’est Pénergie méme de ta pensée qui te retient encore d’approcher de ton Dieu’. Quand donc tu verras ton Juge, sa vue allumera dans ton coeur une grace excellente de respect et de tendresse profonde. Tu deéfailliras d’amour et soupireras vers Lui, et tu ne pourras sentir autre chose qu’une compassion intense de ce que Celui qui est si
32
Cahier I
aimable [53] se soit placé a un tel désavantage que d’étre si vilement traité par un étre si vil que toi. Il y a dans ses yeux une lumiére qui te percera. Et tu te hairas, et tu te seras odieux 4 toi-méme, car bien que sans péché maintenant, tu sentiras que tu as péché jadis, comme tu ne l’as jamais senti jusqu’ici. Et un double et ardent désir te saisira, celui de t’enfuir et de te cacher 4 sa vue, et en méme temps de demeurer en la présence de sa beauté. Ces deux douleurs, si aigués,
si contraires, le soupir d’ardeur vers Lui, quand tu ne Le verras plus, la honte de toi-méme a lidée de Le voir, feront ton plus véritable, ton plus douloureux purgatoire?. — Emmenez-moi,
dit l’4me, et que l’abime le plus
profond soit ma demeure! (Fuge, du Cantique)?.
Voir ce que Newman dit des Anges?.
1900
10-25 janvier 1906 : Lyon’. Perit memoria eorum cum sonitu (Ps. UX)?.
[54] Szcut Pater dilexit Filium, et Ego diligo vos?. L’amour
que te porte le Fils, 4 toi créature,
est
semblable a celui que le Pére porte au Fils incréé. I] taime, non pas simplement comme un pére humain, mais comme le Pére Eternel aime le Fils éternel. I]
préférait me racheter plutdt que de créer des mondes nouveaux
et innocents‘!
Ut quid perditio haec ? Paroles de Judas, adressées encore aujourd’hui par les bourgeois aux Carmélites, aux contemplatifs®.
Quand le soleil brille dans le ciel bleu et que tous les oiseaux chantent en frangais®. Le Christ en croix : l’Infini-souffrant, linfini de la souffrance’.
Lvptvo.a tavra (Hippocrate)$.
Tu Deus qui vidisti me — qui m’as fait Pobjet d’une vision dont le sujet est Dieu méme’. Quo ibo a spiritu tuo ?
34
Cahier I
Filio panem poscenti an lapidem dabit'? (la pierre des tables de la Lol).
[55] La musique est un calcul secret que l’ame fait a notre insu (Leibnitz)’. Nolite conformari huic saeculo®. — temps.
I\ faut étre de son
1€T mats 1906. — Premiers sons de la Mort. Avertissement de détruire la passion’.
L’encensoir
d’or qui atteint le rayon de soleil et
redescend, y laissant un nuage de fumée®.
Le fleuve plein et rapide. Par le grand soleil la montagne de maltsons entassées avec au sommet une haute cheminée faisant un panache de fumée blanche’. Refleurir’.
Le matin a Damas. — Et toutes les fois qu’un souffle
(air passait, on respirait ’odeur délicieuse des fleurs®. La réalité, non pas seulement la réalité accessible a nos sens, mais la réalité totale des choses « visibles et
invisibles». Une poésie vraiment universelle, catholique®. [56] ry mars 1906. — Mariage avec Reine SainteMarie-Perrin a l’Hospice des Jeunes filles incurables de Lyon, fondé par Adélaide Perrin, arriére-grand-tante
de ma femme. Le mariage a lieu le jour anniversaire de sa mort, dans la chapelle batie par mon beau-pére. Grand soleil?. Départ pour la Chine dimanche 18 mars. Rencontré en route le R. P. Chautard, abbé de Sept-Fons"!, « La Gloire et la Grace », du R. P. Terrien!®. Fait d’incube.
— (Sourire d’avril, valse}.) Artivée a Sh’i le 19 avril. Le Fleuve et Hank’eou. Artivée a Pékin le vendredi 4 mai‘.
Feévrier- Juin 1906
35
Deum invisibilem tanquam visibilem (Hébr. a propos de Moise)!. Medius vestrum Stetit quem vos nescitis(S. Jean-Baptiste)?. Entrelacement des mots dans Pindare :
Afin que — a eux — pas — en arriére — Re
—
a la maison — cousin Memnon — vienne?.
—
impétueux
—
d’Hélénos —
Ma Stabilité 4 moi est la persévérance
a changer
(N.)*. [57] 16 mai — Reine enceinte. Tous les hommes
meurent
de chagrin (Buffon)*.
« Je n’ai pas le temps » — En enfer il n’y a plus de temps. La flexion de la branche de la Grande Ourse comme un rameau avec le gros fruit incertain de VEtoile polaire au bout’.
Le vent, le bruit des stores sous la vérandah, le jour, la nuit?.
Le sourire et le rire, il vous [séc] faudrait des théories différentes (Bergson). We trrine; expression de la joie. Sentiment de la liberté. Ironic supérieure. Le rire des Olympiens. Shakespeare. Autre chose’.
19 juin. Désignation a Tientsin®. 20 j[uin] — Belle promenade sur les murs de Pékin. Les rues spacieuses, ombreuses.
La matiére expliquant la vie. C’est comme si pour comprendre un Titien vous analysiez chimiquement
3 G6
Cahier I
les couleurs dont il est composé. Non, philosophes, toutes ces couleurs numérotées et éternellement rejetées au sort ne feront jamais un Titien. [58] Car il Jeur manquerait toujours leur valeur de signe’.
« J’attends le grand dimanche de toute fleur qui est rose’. »
Le monde empli par un grand coup de foudre doré®. z9 juin.— Arrivée a Tientsin‘. Posuerunt signa sua signa (Nos signes seuls sont des signes. Nos principes les seuls principes)®. Soir
sérieux
sero
serere (semer).
S. Augustin met au nombre
des erreurs des Séleu-
ciens quils nient un paradis visible®. Qui remplit, I] est aussi celui qui contient. implevit orbem, ipse continet omnia. — Sap., 1, 67.
Ow
Omnia in ipso conStant. C’est en lui que toutes choses tiennent ensemble’. Cum dicitur Deus in loco esse, comparatur ad locum non
secundum moduim loci sed secundum modum causae (Alb. M.). Quant a lange : Quod ad hunc locum vel illum refertur, hoc est secundum vim et attum virtutis assiStricis vel administricis (id. )°
[59] Lex Moysi per quam non sanatio sed cognitio fatta eft peccati (S. Aug.)!.
Per quem maxima et pretiosa promissa donavit, ut per haec efficiamini divinae consortes naturae (II Pett., 1, 4)". Consortes, non pas participants, mais consorts, associés, solidaires, partageant la méme fortune.
Juin-Septembre 1906
37
Moriamur in nostra simplicitate (inscription de la tombe des dix sceurs de charité assassinées 4 Tientsin en 1870)}. Animus et anima.
Qui fingis laborem in praecepto (Ps. XCIII, 20)°. Comme oranger.
dans la nuit le mélange d’un pin et d’un
L’eau comme
l’Ame
azur coulante’.
Sicut urbs patens et absque murorum ambitu, ita qui non potest in loquendo cohibere spiritum suum (Prov., X XV, 28)°. Victor Hugo’. Aqua frigida animae
sitienti et nuntius bonus de terra
longinqua’. Sapientior sibi piger videtur septem sententias®.
viris loquentibus
[60] Effroyable immensité de Verreur et de la confusion : le fidéle la traverse 4 pied sec comme les Hébreux la Mer Rouge précédés de Moise et d’ Aaron’. Stabat — Magnificat La Vierge des Sept-Douleurs. 17e douleur — Le refus de la foi : malice, vanité, abrutissement 2 douleur — Le péché et la souillure des fidéles
3° douleur Pempéche de 4€ douleur Créateur 5¢ douleur
— Toute la misére humaine porter reméde — La privation de Pamour
a qui on
refusé au
— La terreur devant la majesté de Dieu
offensé 6 douleur — L’abus et la perversion de la grace et du don 7¢ douleur — Douleur de la mére devant son fils.
« C’est moi qui ai permis 4 mon Dieu de souffrir?®. »
38
Cahier I
[61] Mouton le marchand de drap et le baron Beeuf. Et tentaverunt eum in inaquoso’.
Ceux qui se scandalisent de voir aujourd’hui l’Eglise humiliée, abandonnée
et persécutée, sont comme
les
Juifs qui attendaient un Messie entouré de la gloire? et de la puissance mondaines. Quiconque ne croit pas 4 une autre vie est mort dés celle-ci (Michel-Ange). Comme
la prune qui a confi dans le soleil.
Dans le ciel léger la lune couleur d’ceuf de cane.
Proverbes Chinois cités par le P. Huc : — Cultiver la vertu est la science des hommes et renoncer 4 la science est la vertu des femmes. — Les femmes les plus curieuses baissent volontiers les yeux pour étre regardées. — Quand les hommes sont ensemble, ils s’écoutent;
les filles et les femmes se regardent. — Toutes les erreurs n'ont qu’un temps. Aprés cent millions de difficultés, de subtilités, de sophismes, de tournures et de mensonges, la plus petite vérité est encore tout ce qu'elle était. — Il faut faire vite ce qui ne presse pas pour faire lentement ce qui presse.
— On va 4 la gloire par le palais, a la fortune par le marché, et a la vertu par les déserts.
[62] — On n’a jamais tant besoin de son esprit que quand on a affaire 4 un sot.
— L’homme peut se courber vers la vertu, mais la vertu ne se courbe jamais vers homme’.
Defecerunt oculi mei in eloquium tuum dicentes: Quando consolaberis me ? Narraverunt mihi iniqui fabulationes, sed non est lex tua. Hereditate acquisivi teStimonia tua in aeternum. Quaere servum tuum. Venez chercher votre serviteur (Psi° CX 4
Septembre-Novembre
1906
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Comme un canal entre ses bajoyers. Cette nuit poignante tristesse en pensant a la maison vide de Foutcheou. East-flowing rivers contain west-water fish (Prov. Ch.). Siao-Sin — Rapetisse ton ceur = Attention?!
Le dogme est eximium quoddam depositum juvenescens et juvenescere faciens ipsum vas in quo est — Crescat igitur et multum proficiat (S. Vincent de Lérins)*. Pas de cruauté dans la nature : chaque créature opére Pautre de son égoisme. Great enough to be God,interior enough fo be me (Alkaminés japonais)*.
[63] Nolte timere, EGO SUM‘. Sicut ablattatus super matre sua’ — Plus besoin consolations journaliéres et sensibles.
des
Consolation — Etre seul avec... immense et platitudineux...®
Oui fecit coelos in intellettu, qui firmavit terram super aquas (Ps. CXX XV)’. Oui divisit Mare Rubrum in divisiones®.
Non est occultatum os meum a te quod fecisti in occulto
(Ps. CXXXVIID*. Alcyone — Mira Ceti?. Les nébuleuses — L’achévement aux frontiéres du monde du mouvement de la création. De méme que quand il ya eu un grand mouvement dans la mer, il reste ca et 14 des plaques d’écume et de bulles qui crévent. CLAUDEL
V - 5
5
40
Cahier I
Les constellations pareilles 4 de grands ornements chargés de pierres de toutes couleurs’. Les 6 000 étoiles des Pléiades?. Les Vierges Patience et Evodie®. [64] Le 18¢ jour de la 10° lune (3 déc.), si l'on conStruit ou répare un fourneau de cuisine, tout sera défavorable et fatal (Rites chinois)*.
Les protestants : ceux qui « protestent » la parole de Dieu. I] leur faut 4 papier, avec deux signatures.
Marque du diable : tous les ennemis
de l’Eglise
ticanent : ils ne peuvent cacher le rictus®.
froid élixir — Sicut
creator,
Captieux. ita moderator
—
donec
universi
seculi
pulcritudo [sic]... velut magnum carmen ineffabilis modula toris (S. Aug., Ep. 5 ad Marcellinum)’. Innocent II remarque que les gargons crient A en naissant, et les filles E. E A Eva?!
Le méme recommande lceuvre de charité trés habituelle au Moyen Age d’épouser les prostituées®, La nouaille, \a noua —
pour la premiére fois?. [65] C’est le pape POrient a l’Occident.
novale, \a terre mise en culture
qui a transféré
Empire
Periit memoria eorum cum sonitu (Ps. [X)}.
Infixcae sunt gentes in interitu quem fecerunt (ibid.)™. Ante faciem frigoris ejus quis sustinebit®? ?
de
Décembre
1906
41
L’échalote — Vail d’Ascalon rapporté par les croisés Lorrains. Frédéric Barberousse, noyé dans les eaux glacées du fleuve Calycadnos. Pax
pati
patience
pas (nég.).
Segrais, bois séparé que l’on exploite a part. — Cépié, bois d’un an ou deux. Intercidona, déesse des bicherons.
Complet — irréductible. Rien de plus faux que les demi-vérités.
1907 Le 20 janvier 1907, 2@ dimanche aprés l’Epiphanie et féte du S. Nom de Jésus, 4 5 h. 10 du soir, naissance de Marie (Chouchette)!. Ex ore lattentium perfect stilaudem’*. K’ai kan — ouvrir les yeux (des idoles). Dédicace des temples chinois?.
[66] « Celui qui n’amasse pas avec moi dissipe » — comme une chose vivante dont le développement est la condition méme d’existence. « Celui qui ne rassemble pas avec moi dissipe » —
Criterium de la vérité catholique, c’est qu’en tout elle rassemble, la ot les seétes, schismes, hérésies, dissolvent. La métaphore, comme
le raisonnement, rassemble,
mais de plus loin. Epitaphe de Newman Ex umbris et imaginibus Dies
In veritatem eae Spies enie Pouce
s6. 8
6
4
Les ombres aussi et les images sont réelles.
Les créatures 4 ’h[omme]® : Accipe ! redde ! time !
Janvier-Mars
1907
43
Question 4 se poser en toute chose : guid hoc ad aeternitatem ? Gea, fée.
Qu’est le Pentateuque ?Moise ou mosaique? Qui n’a plus le Verbe n’a plus la parole, et ne sait plus de rien oui ou non’. Limitation de la peinture d’aprés Calvin : hisforiae ac res gestae, imagines ac formae corporum. C’est le programme de la [67] peinture hollandaise?.
Les Chinois pour accueillir la nouvelle année font ‘une heure de profond silence. La poésie est la maniére de s’exprimer avec mesure’.
Le diable.
Bacchus (Bar — Cus — fils de Cus, le fils de Cham). Surnoms : Liber, Isodétes (celui qui fait les parts égales). A partir du moment ot cessent les sabbats et les sorciéres commence la Révolution : la Déesse Raison, la Carmagnole autour de l’échafaud. L’anarchie. Ex{emples]
de
mots
abstraits
devenus
concrets
viande, habit.
Trouvé dans un article de l’Independant Review : A propos de assertion matérialiste que la pensée est une fonction du cerveau :
Quid fonétion? Il y a plusieurs sortes de fonétions. Vous parlez toujours de celles des glandes qui secrétent. Mais il y a une fonction permissive du tuyau d’orgue qui laisse passer l’air; la fonction du prisme, ¢ransmissive de la lumiére. Pourquoi de méme la cervelle ne serait-elle pas comme une cloison plus mince permettant le
filtrage de la [68] pensée extérieure*?
44
Cahier I
Life like a dome of many-coloured glass Stains the white radiance of eternity. — C’est une forme nouvelle curieuse de l’averroisme.
Nous avons nos mystéres nécessaires, mais la science a aussi besoin de s’en créer pour comprendre. Quelle idée nous faisons-nous de la Trinité? Mais quelle idée vous faites-vous de |’Ether, notion contradi@toire, impensable, et cependant indispensable aux théories modernes de la lumiére?
Vox Domini in virtute, vox Domini in magnificentia®.
« Et le Liban sautera comme un bison. » Cela décrit effet que produit une haute montagne qui parait et disparait dans la lueur d’éclairs successifs; elle a en effet air de sauter’. Nouille — fosse creusée dans le lit d’une riviére a cété d’un haut fond.
Tous les niais qui « regrettent les anciens dieux », on croirait un quadragénaire barbu qui voudrait jouer a la poupée.
Platon compare le progrés d’un jeune homme dans la géométrie au cours silencieux d’une riviére d’huile*.
[69] Qu’as-tu a dire car il y a beaucoup de témoignages contre toi. Jesus autem tacebat.
Justus cum ceciderit non collidetur (Ps.
XX XVI)*.
Vendredi Saint : Et sicut in frixorio confrixa sunt ossa mea’,
Et non est substantia’ ! Dieu méme, voici que la substance lui fait défaut. Les accusations contre le Christ toujours les mémes: Il veut se faire roi!
Bar-abbas, fils du pére*.
Mars- Avril 1907
45
La discussion minutieuse de la loi ne va guére avec Vhonnéteté.
Origine des dieux et des héros : Gigantes autem erant super terram in diebus illis. PoStquam enim ingressi sunt fil Det ad filias hominum,
illaeque genuerunt : ifti sunt
potentes a saeculo viri famosi (Gen., V)}. Quare appenditis argentum non in panibus et laborem vestrum non in saturitate ? (Is., LIV)?.
Apprehendent septem mulieres virum unum (Is., TV)’. L’esprit male fécondant. D’autre part [70] la femme de ’Evangile possédée de 7 esprits. Les Colombes — S. Jean d’Anglet‘. La terreur de la distance et de la hauteur’.
La longue €pissure qui rend la corde rompue plus solide qu’auparavant. — redintegratio amoris. Chopin sous la grande aile noire du piano’.
L’iambe en musique, sanglot, ’homme pied’. Scherzo en B flat.
blessé au
L’homme qui confesse les fautes d’un autre se sent pur comme un lys dans le jardin d’une blanchisseuse.
Verumtamen in imagine pertransit homo — et substantia mea apud te est (Ps. XX XVII)$. In mansuetudine suscipite insitum verbum (Jacq.)*. Fratres, eftote (Jacq.)?°.
fa&tores
verbi,
non auditores tantum
2-17 avril. Visite de Wright quise marie". Introit
de la Pentecdte
: E¢ hoc quod continet omnia
46
Cahier I
scientiam habet vocis'. Et cela qui tient toutes les choses [71] ensemble a science de la voix. Le petit enfant qui cent fois de suite essaie de se mettre sur son séant, de se lever, en croissant comme une chenille.
Tout l’esprit du protestantisme anglais dans le mot d'un certain Binney : Make the best of both worlds*. Adéle Perrin, cousine de ma femme, entre au noviciat des Petites sceurs de l’Assomption. Mars 073,
Sansc. Dyn — Deus — dies. — En ch[inois], T’ien i-ta, ’unité sur la grandeur — sens F J\.
qui a aussi ce double
Au commencement de l’Evangile de S. Jean opposition entre le jv de Dieu et le eyéveto des Créatures, étre et devenir. “O yéyovey ev adT@ Cw) v4. Ainsi tout ce qui est maintenant a l’état passager de devenir a commencé par étre en Dieu a l’état d’étre.
Zw, tzeu le fils en chinois. Le moine Badilon‘.
Hymne de la procession nomine Domini®.
: Procedamus
in pace in
[73] Le 1°7 juin au matin vu: 1° un avocat 4 la voix composée de deux tons, l’un sourd, l’autre glapissant; 2° un automobiliste qui prononce les r comme les
cailloux d’une route fraichement réparée.
« Les gens convaincus et croyants portent seuls dans la vie de tous les jours la liberté et l’audace, parce que le bon sens et le courage dirigent leur intelligence » (L’excellent Janssen dans /’ Allemagne et la Réforme, to1)s.
Abril- Juin 1907
47
Les Rogations étaient autrefois une espéce de « revue» des propriétés et on devait y assister sous peine d’amende «afin de pouvoir bien se rendre compte de la dimension des champs et de leur exaéte situation »}. La styls, piece du gréement
naval en forme
croix, symbole de la domination portent les monnaies d’ Alexandre.
sur les mers,
de que
Sterling vient de easferlings, les marchands allemands qui faisaient le commerce dans l’est. A PEst de Afrique le Guardafui comme une corne de rhinocéros?.
Les Gréées, Chersis®.
filles de Phocus
qui se reléve
: Péphrédo,
Enyo,
Le 25 juin, féte chinoise de la formation du Ciel et dejlaslLerre:
[74] Ne projicias me in senetiute mea; cum defecerit virtus mea ne derelinquas me (Ps. LXIX)*. La loi de la constance de Quinton n’est qu’une loi
Vhomogénéité
: de méme
que lair milieu ambiant
externe respirable est toujours le méme, de méme
le
milieu interne (cf. Claude Bernard); la feuille, la racine, 4 la méme nourriture puisent des formes différentes'.
Odia restringenda, favores ampliandt*. Nods trountikds (Arist.)?
Tyns éoxarns Tepupopas ovte Kevov eoTw e€whev ovte Tomros (id., De coelo)® Travailler dans le sens de ses défauts.
48
Cahier I Sa téte disparaissait entre ses deux oreilles, pareilles
4 une coquille dont les valves s’ouvrent et se referment. [75] Lorsque je rencontrai le jeune homme, il tenait dans sa main droite rien, et dans sa main gauche une
coquille, une étoile de mer desséchée et une jolie fleur rose.
How may I grieve, who have not ceased to wonder? (Thoreau)}. Une des grandes inepties du transformisme qui considére le « parasitisme » comme une forme de la vie dégénérée. Elle est aussi splendide, composée et vigoureuse que les autres. Ligne de foi, dire€tion de la quille, indiquée sur la boite du compas. Les eaux mouvantes
4 leur tache sacerdotale —
De
froideablutionautour des rivages humains (V.anglais)?. Et mutaverunt gloriam suam in similitudinem vituli comedentis foenum (Ps. CV, 20)? Les Hindous qui adorent la vache, les Egyptiens le boeuf Apis‘.
Les ténébres extérieures. La lumiére est donc toujours intérieure®. [76] Er disperderet eos si non Moyses ele étus ejus Stetisset in confrattione in conspettu ejus. Et pro nihilo habuerunt terram desiderabilem (Ps. CV)*. Et initiati sunt Beelphegor et comederunt sacrificia mortuorum (communion avec le diable). Et irritaverunt eum in adinventionibus suis (ils ont rendu Dieu superflu au moyen de leurs inventions) e¢ multiplicata eft ruina (ibid.)?. Ps. CVI —
Psaume des convertis’.
Juillet-Otfobre 1907
49
Pendant le temps que met une laque d’or Japonaise a murir (500 ans), pendant ce temps dans le ciel... Comme Galilée d’aprés l’oscillation de la lampe du sanctuaire calcule le mouvement des mondes...
Les étoiles qui se déchirent, qui s’arrachent a autre, qui se divisent comme une semence.
l’une
Les nébuleuses qui de petites étoiles se forment comme des inse¢tes dans la toile. Ou plusieurs araignées en train [77] de travailler 4 la méme toile?.
Quomodo fiet istud quoniam hominem non cognosco ? Parole de l’E¢glise : je ne veux pas connaitre ’homme et ses faiblesses, mais Dieu seul. Je n’ai pas besoin de connaitre pratiquement les hommes?. Les solitudes antarétiques soleil tout blanc’.
éclairées
par
un
petit
D’aprés Le Bon, « la matiére ne devrait son apparence de Stabilité et de repos qu’a l’extréme rapidité du mouvement de rotation de ses particules ». (Idée intéressante sauf le paralogisme de particulest.) Le soleil d’Afrique m’a toujours fait effet d’une espéce de clair-de-lune intensifié (Stanley)°. L’eau tombant en colonne compacte d’une certaine hauteur ne serait pas entamée par un boulet de canon.
Heredere, quid times ? egredere, anima mea, quid dubitas ? Paroles de S. Hilarion mourant — 21 0&.*.
Je dors, mais mon cceur veille. L’armée
des cieux pareille aux dix Vierges sages a
qui l’huile ne manque jamais’. [78] Le 28 oftobre
1907, 4 11 h. 1/2 du matin,
po
50
Cahier I
’Fglise Saint-Louis de Tientsin, baptéme de Chou chette, ondoyée déja le lendemain de sa naissance. Parrain : le P. Robert, procureur général des Missions Etrangéres. Marraine: Madame Sucillon, femme du Général. Le P. Desrumeaux, procureur des Lazaristes, administre le sacrement?. Le poéme de Milton plein de beautés et de grand style, mais irréel, reposant sur des péripéties impossibles, déraisonnables, impensables. Milton purement paien. Il croit 4 un Dieu corporel, a léternité de la matiére, 4 la génération du Fils dans le temps? (aprés les anges), 4 la polygamie. Son orgueil. Omnis gloria ab intus*.
19 novembre 1907. Reine de nouveau enceinte. Milton.
La bataille des Anges,
parfaitement
gro-
tesque. « Et la terre aurait tremblé, s’il y avait eu alors une terre.» Les Séraphins artilleurs‘.
Sine legendi Studio neminem ad Deum intentum videas® (S. Athanase). Martyre du bienheureux Bobola, les yeux crevés, les mains raclées jusqu’a l’os, le nez et les lévres coupées, la couronne de branches arrosées qui se rétrécissent, la langue arrachée par le cou, sur son fumier ruisselant de sang par tous ses membres [79] mutilés. La chasuble de paille (Je le vois trés gros et trés grand comme le premier vicaire du Chapitre de N.-D.)*.
L’Océanie, ce paradis de Vhomme « naturel» (Bougainville, Diderot)? — Epouvante des morts, anthropophagie, avortements, confréries de débauches.
Qui fecit coelos in intellefiu (Ps. CXXXV)8. Les trois Mages qui se cognent la téte dans leur empressement au-dessus du berceau de |’Enfant Jésus.
—e
Odfobre-Décembre Dans un style boiteux, comme la Vérité.
1907
comme
51
la Justice, et nu,
Cet homme qui est l’épouse de sa femme.
Voici dans mes péchés comme une moisson mire dévorante comme un incendie La priére qu’on adresse 4 Dieu pour le bon usage de la maladie. ... la maladie qu’on ne peut pas empécher de mourir. Verse ton front sur mon é€paule?.
A Pékin pendant le siége les femmes des ministres pour éteindre l’incendie faisant la chaine avec des pots de chambre. Pichon avec son fusil de chasse et sa chemise de nuit brodée de petits oiseaux en fil rouge. Le messager qui [80] retire une lettre en boulette de son oreille gauche?. Per quem fecit et saecula (Heb.)*. S. Joseph n’était pas seulement ouvrier; il était forcément homme d’affaires. I] était obligé de discuter et de signer de petits contrats, de poursuivre les débiteurs récalcitrants, de plaider, d’acheter des four-
nitures au meilleur compte en spéculant sur les occasions, etc. Toutes choses 4 quoi devait s’entendre ce descendant de David et de Salomon, constru€teur du
temple. — L’arche aussi était un travail de menuiseric’.
Un des caraétéres de la vérité est d’étre catholique ; c[’est]-a-d[ire] de donner raison satisfaisante non pas d’un certain ordre de faits seulement, mais de tous en-
semble.
Oui numerat multitudinem Stellarum et omnibus nomina vocat (Ps. CXLVI). Ainsi l’?Astronome : A du Centaure, 145 des Pléiades, eter.
« Sistre », mot employé dans le Midi pour désigner
52
Cahier I
les conglomérats ou poudingues : Sisteron, Sestriéres (saxtflerium ?). Le génie lyrique : étre moi. Génie dramatique : étre les autres. — V. Hugo. Une des rares idées de cet imbécile. Non.
1908
[81] Résolution pour 1908 : combattre ma vilaine curtiosité a regarder indécents.
et lire
les
journaux
et
livres
Jeanne d’Arc née le jour de P Epiphanie.
Les
premiéres
gouttes
de la pluie des
tropiques
pareilles 4 du rhum tiéde?. Impossibilité et absurdité du mouvement perpétuel. Argument contre la théorie mécaniste auquel il serait peut-étre possible de donner une forme mathématique. Aucune transformation du mouvement ne peut se faire sans une déperdition, provenant de ce que la force anime des corps toujours complexes. Rien ne se perd : si fait, qualitativement. La houille brilée ne régénére pas de la houille. Un mouvement infini présuppose une source d’approvisionnement inépuisable?. Le vers régulier francais également impropre au drame par défaut de souplesse et d’agilité — et au long poéme par lennui et la fatigue qui résultent non seulement de son uniformité mais de sa répétition (times masculines et féminines), formant battement, comme quand on passe derriére une palissade. Sa qualité : la mesure, la nécessité (nombre, rime). Excellent pour les courts poémes’.
Le petit enfant pleurant, blanche de bouillie.
avec
sa bouche
toute
54
Cahier I
[82] Caritas forma fidei (S. Th.)}. Une téte cousue a triple couture. Ce ne sont pas les lettres qui forment les mots; ce
sont les mots qui forment les lettres (prop. a prendre avec qualification) : dés lors s’écroule la théorie de Punivers, coup réussi d’une partie de dés qui se joue dans l’infini du temps’. Quand on veut si gauchement que ce soit imiter la nature, il faut infiniment de précautions, une disposition trés complexe de moyens successifs. C'est avec Vintelligence qu’on Vimite, c’est donc qu’elle est Voeuvre dune intelligence. Omne vivum a vivo®. La grande loi de la permanence. — Lagrange et Laplace sur limpossibilité pour les planétes de déranger l’ellipse de la terre. Les grands télescopes montrent a peu prés 50 millions d’étoiles. L’ellipse différe du cercle en ce quelle posséde la variété des formes.
Toute planéte a une orbite elliptique ayant le soleil a Pun de ses deux foyers. 2° loi de Képler — Toute planéte se meut autour du soleil avec une vitesse telle en tout point qu’une ligne droite tirée d’elle au [83] soleil passe sur des aires égales en des temps égaux’. : 3° loi de K. — Les carrés des temps de révolution sont proportionnels au cube des distances moyennes. Par ex[emple] si la distance moyenne de la terre au soleil est 1, celle de Vénus est 0.723. Or le temps de révolution de T est 365, celui de V 224. Le carré de 365 est au carré de 224 comme l’unité est au cube de 0.723. Mizar et Alcor’,
Janvier-Février 1908
55
En tout, pour commencer, le meilleur (Aristote)!. Contre Ibsen et Nietzche [s/c] : « vivre sa vie», se réaliser
entiérement,
la vie
intense,
la volonté
de
puissance, etc. « Celui qui cherche son ame la perdra. » « Les mots que je ne comprends pas sont ceux qui expriment le mieux ma pensée. »
« .. Au moins pour la gloire de Dieu, si vous n’avez toujours la force d’agir pour sa plus grande gloire. » Le fléau des admirateurs. Une belle femme devient débauchée, un bon écrivain [84] devient vain, c’est-adire impuissant. On Poblige a poser, a ne plus bouger. _ La résistance 4 l’embaumeur.
Argument de Kant que le monde est infini parce que Pespace ne peut étre limité par le non-espace. (De méme pour le temps, mais 1a la réponse est faite depuis longtemps.) Une limite est la séparation entre deux quantités homogénes. Il peut donc y avoir une limite entre 2 figures, mais non pas entre une figure et une non-figure, ni par conséquent entre Vespace et le non-espace. Toute position géométrique est déterminée par des points existants, et non par des points inexistants. Dans tous les points du monde, la position de chaque point est déterminée par les points existants et non par ceux qui sont inexistants du fait qu’ils sont supposes extérieurs. La figure totale est constituée par les rapports de toutes ses patties l’une avec l’autre; il n’y a limite que la ot il y a section. ; Toutes les antinomies de Kant se résolvent a la faculté qu’a toujours Vimagination d’ajouter ou diminuer 1 4 toute quantité. Mais cette faculté est supprimée par l’équation. La ot 2 = 2 vous ne pouvez ajouter a aucun terme. La ligne droite infinie n’est qu’une [85] section artificielle de la circonférence. Ce qui est divisible, ce n’est pas le mouvement, mais son image immobile, la ligne (v. Bergson)?
56
Cahier I
Par ex[emple] il n’y a pas de limite entre un son et une couleur’. Les grands arbres 4 moitié morts avec leur branchage pareil a de gigantesques andouillers. La mort, pour ainsi dire, ne fut pas préméditée, mais naturelle.
A force d’attendre, je finirai bien par passer. Jesus autem tacebat. Le matérialisme
est toujours l’explication du supé-
rieur par Pinférieur (Aug. Comte). Barrés est enraciné dans un pot de fleur. Définition de la joie : la vision de la proportion. Le prophéte Zacharie voit voler dans les airs un rouleau de parchemin long de vingt coudées et large de dix qui semait la malédiction sur la face de toute la terre. La mauvaise presse. Le talent de plomb représente les matrices de la linotype?.
Les industriels coupeurs de cascades, parures de la terre sauvage et ingénue, comme les marchands qui s’en vont dans les campagnes récoltant les chevelures de jeunes filles. [86] Hérode et Jésus. David contrefaisant le fou devant le roi philistin Achimélech (Ps. XX XIII). Infirmitas haec non est ad mortem — et ipsa mors non est ad mortem (S. Aug.)°. Amen, amen dico vobis, si quis sermonem meum servaverit,
mortem non videbit in aeternum (J. VIII)*. Il y a figure dés qu’il y a fermeture et proportion’.
Mars- Avril 1908 Au xvi® et au x1xe siécles soumis a la race blanche.
57
Vunivers
tout
entier
Le méme reproche fait 4 Pie VII qu’a notre grand pape Pie X. C’est une béte, dit Napoléon. On ne peut perdre ses Etats temporels d’une Stultitia — scandale du monde}.
Me
dereliquerunt fontem aquae
ciSternas, cisternas dissipatas aquas (Jér., cap. IT)’.
quae
maniére
plus béte.
vivae, et foderunt sibi
continere
non
valent
Et nunc quid tibi vis in via Aegyptt, ut bibas aquam turbidam ? (id.)%.
Sub omni ligno frondoso tu prosternaberis meretrix. (Mad[ame] de Noailles‘.) Numquid solitudo fattus sum Israel aut terra serotina é Quare ergo dixit populus meus: Recessimus, non veniemus [87] wtra ad te? Numquid obliviscetur virgo ornamento sui aut sponsa fasciae peoralis suae ? Populus vero meus oblitus est mei diebus innumerabilibus (id.)°.
Le diable trompé pendant la Passion‘. Admisit in se impias manus furentium : quae dum proprio incumbunt sceleri famulatae sunt Redemptori (S. Léon)’. Tanquam nugaces aestimati sumus ab illo, et abstinet se a vits nostris tanquam ab immunditits ; et praefert novissima justorum (Rep. Dom. Palm.)*.
L’aphasie extatique’. Puisque les effets sont finis, c’est que les causes sont finales.
Le mouvement ne se fait pas dans le lieu, mais c’est lui qui crée [le] lieu. I] n’y a lieu que 1a ov il y a quelque chose de présent.
58
Cahier I
Ecce salvator tuus venit, et ecce merces ejus cum eo (\s., caps L XIE
Tout le chapitre. Ma fureur, mon indignation. Le salut qui arrive comme une dévastation. [88] Ex vidimus eum et non erat aspedus (Is., c. LIII)?. Comme |’Eglise aujourd’hui, dégoat et scandale des beaux esprits. Pas d’ceil. Et desideravimus eum. Despetium, et novissimum scientem infirmitatem®.
hominum
virum
dolorum
et
Ego autem in medio vestrum sum sicut qui miniStrat'. Ceux qui repoussent Jésus 4 coups de pied, et ceux qui lui laissent avec mépris essuyer leurs pieds comme un domestique. Recommandation d’acheter un sac, une bourse, un glaive. Suivi de la citation : Et il a été réputé avec les iniques. Prudence et économie de l’Eglise terrestre ? et reproches de ce chef? Arrangez-vous car je ne suis plus la en personne. Etenim ea quae sunt de me finem habent®,
Barabbas,
séditieux,
homicide,
révolutionnaire.
Missus in carcerem. La prise de la Bastille. Jesum autem tradidit voluntati eorum.
Et stabat populus spettans, et deridebant eum principes cum eis, dicentes: Alios salvos fecit, se ipsum saluum faciat, si hic eft Christus Dei ele dus’.
Et diem hominis non desideravi, tu scis (Jer., XVII)’.
Mercredi Saint. Le Christ sur la croix accomplit la plénitude de ses devoirs d’état. [89] 19 (Paques)-22 avril. Voyage aux Siling. Les
Abril-Mai 1908
59
anémones violet foncé au cceur jaune. La resserre du gardien bourrée de liasses de papiers poussiéreux. S’il n’y a pas de Dieu, a quoi seront occupées les 4mes ? Permanence Stagnante, vaporeuse. — Toujours le demi-cercle. Pins, peupliers trés verts. J’ai bien vu dans C. E, — Le vent, immense instrument préparé a son soufHe!. Les fondateurs de notre liberté : le député de la Convention qui n’osait s’accouder de peur que Robespierre ne pensat qu’il pensait?. « Le jugement final une fois achevé, la nature humaine sera totalement constituée dans son ferme. Or, parce que toutes les choses corporelles ont été créées pour l’homme, il sera convenable qu’elles passent dans un état qui soit en harmonie avec la nouvelle condition faite aux hommes. Les hommes étant devenus incorruptibles, /a créature matérielle elleméme ne sera plus sujette a la corruption — et c’est 1a ce que n{ous] annonce l’apdétre, quand il dit que la créature elle-méme sera délivrée de la corruption pour la liberté glorieuse des enfants de Dieu®. » « I] est vrai que les étres insensibles n’ont pas mérité cet excés de gloire. Mais il n’y a pas 1a de raison pour qu’elle leur soit refusée; car homme
a mérité lui-
méme [90] qu’elle fat conférée a tout lunivers, en tant quelle est un couronnement de sa gloire propre : comme un homme mérite de recevoir sur son vétement les broderies les plus riches, encore que le vétement ne les ait lui-méme aucunement méritées »
(S. Th.)4.
Tout cela est 4 vous, et vous étes au Christ, et le
Christ 4 Dieu (I Cor.). L’esprit dit ce qu’il a entendu (4° Dim. ap. Paques)'. Les Francais ne réclament pas |’égalité des droits, mais l’égalité des jouissances (H. Heine)*.
60
Cahier I
A 4 heures du matin tous les autres oiseaux sont
réveillés pat les deux pierrots Bétisot et Racinet.
Ut omne quod dedit mihi det eis vitam aeternam'. Vert, banane.
jaune et noir comme
la peau
d’une
vieille
Le chat s’en va par la fenétre sans effort, émotion ou
son.
Et reddam vobis annos quos comedit locusta, bruchus, et rubigo, et eruca: fortitudo mea magna quam misi in vos (Joél, I)’.
[91] Toute la vermine variée des occupations et des pensées
frivoles
et mondaines.
—
Les
générations
d’insectes dévorés lun par Pautre. Le petit tas noir d’élytres et d’excréments que l’on trouve au fond d’une téte de mort.
Entrez par la porte. Celui qui entre par la porte est le pasteur, celui qui n’entre pas par la porte est un voleur (Jeance 2S). Lesprit, Prajapati, désira : Puissé-je étre une plu-
ralité, puissé-je me multiplier? (/e Brahmane des Cent Sentiers ). Au commencement était ?Atman (le souffle), et il était semblable
4 un homme;
il regarda autour de lui
et ne vit rien d’autre que lui-méme; il prononga la 17e parole : « Je suis »; de la vient le nom de « Je»; c’est pour cela qu’encore a présent celui qui est interpellé par un autre dit tout d’abord : « C’est moi», et ne dit
qu’ensuite Pautre nom qu'il porte... Il eut peur. C’est pour cela que l’on a peur lorsqu’on est seul. Il pensa : « Puisqu’il n’y a rien d’autre que moi, de quoi donc ai-je peur? Alors sa peur s’évanouit. Et de quoi donc
aurait-il eu peur? c’est d’un autre que vient la peur. Et il ne se sentit pas satisfait. C’est pour cela que l’on ne se sent pas satisfait lorsque l’on est seul. I] désira étre deux ; il contenait en lui la nature d’un homme et
Mai- Juin 1908
61
dune femme qui se tiennent embrassés. I] divisa cette sienne nature en deux parts : [92] de la vinrent époux et Epouse; C'est pour cela que nous sommes chacun comme une moitié, dit Yajnavalkya. C’est pour cela que ce vide (dans la nature de homme) est comblé par la femme. I] s’unit avec elle; ainsi les h[ommes] furent engendrés (7d. ). L’Etre Unique n’est ni grand ni petit, ni intérieur ni
extérieur. « Non, non » est son nom en tant qu’aucune définition ne ’embrasse, et cependant il a d’autre part
pour symbole la syllabe de laffirmation Om. Il est entré (l’Atman) dans le corps jusqu’au bout des ongles, comme
un rasoir dans et Poffrande aux manes. L’ancienne complétement a Pame
un scorpion dans son nid, comme
son étul faite avec la cuiller est la part réservée
religion du Rig Veda était restée étrangére a Vidée que la mort réservat
de nouvelles
pérégrinations, des alternatives
nouvelles de mort et de renaissance Bouddha, p. 41)}.
(Oldenberg, /
[93] Devant la cuisine anglaise, il n’y a plus qu’un seul mot : soit?! (un vieux) il est comme un jeu de cartes sans l’as de ceeur et comme le journal d’hier.
11-13 juin. Visite aux mines de charbon de Tongshan. Les archives de la terre*. La partie de la terre rangée,
immobile.
Ses feuilles,
visite
comme
d’une
noire bibliothéque. La terre qui se serre comme
ceur.
Impossibilité
terrible compression. sans jeu.
du Pas
liquide
un poing, comme
central
de liquide sans
avec
le
cette
mobilité,
Ouia eadem mensura qua mensi fueritis, remetietur vobis'. Votre pouce, votre coudée. Celui qui se sert d’une
62
Cahier I
mesure fausse n’avére! pas la fausseté d’autrui, mais la sienne. Force, bonne volonté, « présence d’esprit », Consalvi, insinuant comme un parfum?
Carnale enim vulnus, vulnus spirituale oftendit (S. Bernard)°. Le soleil envoie incessamment des particules de matiére éleCtrisée qui peuvent s’unir a celles envoyées par d’autres soleils. Ainsi le pollen de arbre male. Le souffle solaire, pression mesurable de la lumieére. L’imbécile et dégodtant Voltaire, pareil 4 un grand vieux singe pisseur. [94] Prophétiser dans |’Ancien Testament. La louange alors était prophétie comme pour nous elle est confession. A lire : Abbé Rupert, De div[inis| off[éctis}*.
La peinture améne toutes les apparences sur le méme plan (A. M.). Les anciens ostensoirs avaient la forme d’une tour.
Constantin, ofus sapientia Dei exaestuans (Eusébe)*. Sous l’ombre de celui que j’ai désiré je me suis assise (Cant. — Ruth). Je t'épouserai dans la justice et le jugement Je t’épouserai dans la foi (Osée). En ce jour-la j’exaucerai les cieux et ils exauceront la terre; et la terre exaucera le froment, le vin et ’huile (les espéces et le sacerdoce). Vous m’étes un époux de sang! (Séphora 4 Moise dans |’Exode).
Juin- Juillet 1908
63
Une corde qui vibre, création de l’espace. Un neeud sur cette corde parait agrandi, élargi. — N’y aurait-il pas la un moyen [95] de grossissement ultra-microscopique par le mouvement? Former une image agrandie unique d’une infinité d’images ainsi multipliées. Procédé inverse du cinématographe, synthétique?. Le jeudi 23 juillet 1908, 4 minuit et sept minutes, naissance de Pierre Louis Sainte Marie Claudel. Naissance trés facile, par la protection de la Sainte
Vierge?.
Ondoyé le méme jour a 4 h.*. Cette nuit en regardant les étoiles forte notion de la Axité4.
Cette
nuit
rencontré
un
Chinois,
les deux
pieds
coupés, qui chantait a tue-téte en marchant 4 genoux sur ses planchettes, la téte coiffée d’un casque colonial, le torse nu et s’éventant avec une feuille de palmier.
Hugo est un grand poéte, si on peut l’étre sans intelligence, ni gout, ni sensibilité, ni ordre, ni cette
forme la plus haute de limagination que j’appelle Pimagination de la proportion. Simplement une énorme capacité gazeuse résultant de la possession de beaucoup de mots. Imbécillité de ses petites histoires®. Junon aux beaux bras, Vénus callipyge, etc. La Muse de M. Rostand a de belles chevilles. I] entre dans la poésie jusqu’a la cheville. [96] IWuxerunt coruscationes tuae orbi terrae. Vox tonitrui tui in rota (Ps. LXXVI)S. Le bruit du tonnerre qui vient de tous les cétés. C’est fréquent dans les orages d’ici.
L’hérétique disjoindre
ne
sait que
(l’« analyse»,
séparer,
le criticisme).
couper,
briser,
Il sépare
du
64
Cahier I
Verbe la chair, il divise, il éloigne, il met 4 part Dieu et Phomme, la téte et le corps.
Heétérius, ad Elipand{um]. (a propos des Nestoriens)'. Ut in id quod sumimus transeamus, ut simus quod acci-
pimus?. Le Verbe se fait la chair de nous tous. Le lait, Paliment qui sort de la chair.
... quia taro sunt, spiritus vadiens et non rediens (Ps. LXAVIP:. Un masque mais de voit.
qui empéche non seulement d’étre vu,
Loi d’Helmhotz : les tourbillons dans un milieu dépourvu de viscosité continuent indéfiniment (Une des lois de fixité)4. 6 aout 1908 : Quarante ans. Au champ de course
a 6h., tenant la main de Chouchette. L’été, les cigales plein les arbres. [97] Admirables
paroles
du
Comte
de Chambord.
Une conversation du comte de Chambord en 1871° M. F. de Parseval publie dans la Gazette de France la reproduction absolument inédite d’une trés intéressante conversation du Comte de Chambord en mars 1871, aprés la conclusion de l’armistice, avec deux royalistes que le Prince aimait beaucoup. Le récit de cette audience trés intime n’était pas destiné a la publicité : il a été retrouvé dans les papiers d’une religicuse qui en avait conservé une copie et dont on a bien voulu permettre a M. de Parseval d’user. La conversation étant tombée sur la politique, le Prince dit : « Parfois on demande quel sera mon programme, il est bien simple. Cest ’Evangile tout pur, sans en retrancher un iota, car j’ai la conviction profonde que
Aout
1908
65
’Evangile est le code du gouvernement tout aussi bien que celui des individus. » Puis comme l’un des interlocuteurs faisait allusion a une récente initiative relative au rétablissement de la monatchie, le Prince s’écria vivement :
« Vous voulez parler de l’affaire de Bordeaux, la voici en deux mots. Sachez donc que des membres de Vassemblée de Bordeaux, M. Thiers en téte, m’ont fait offrir une restauration immédiate. Cela vous étonne. Cet homme-la fait en effet des avances 4 tout le monde. Je ne m’y fie pas. Maintenant il prétend qu'il lui faut 2 ou 3 ans pour achever son évolution avant de faire la restauration; c’est-a-dire que, s’il veut que je régne, ce n’est qu’a sa facon, a ses conditions, a son heute... — Monseigneur n’a pas jugé a propos de souscrire a ces avances; serait-il indiscret de lui demander les motifs de son refus? — Le premier est que je me serais vu obligé de signer le démembrement de la France et ce n’est pas la coutume dans ma famille. Le second, cest qu’en remontant sur le trone, dans les conditions qui m’étaient faites 4 Bordeaux, j’aurais renouvelé la faute que commit Louis XVIII; sur des bases révolutionnaires il
crut pouvoir restaurer un trone légitime et ce trdne est tombé. Ce qui est révolutionnaire en France, c’esi encore plus les idées que les hommes. Pour moi, je ne peux rentrer en France qu’aprés quw’il aura été fait table rase des institutions révolutionnaires, car je ne
peux revenir dans ma patrie que pour tout sauver, et si je reprenais ma place avec les institutions dont je parle,
je ne pourrais que tout perdre. Ce qui est a démolir le voici : d’abord le code Napoléon, en tout ce qui
renferme de contraire a l’Eglise, et notamment les lois sur l’hérédité et sur le mariage. En second lieu, VUniversité, la triste mére de la déplorable génération qui vient de donner sa mesure a Sedan. Troisiémement la centralisation, ce funeste réseau départemental qui fait que, depuis quatre-vingts ans, les fautes et les malheurs d’un seul sont invariablement les fautes et les malheurs de tous?...
66
Cahier I
— Monseigneur parait oublier un autre ennemi, le suffrage universel ? — Le suffrage universel n’est absurde que dans son application, il ne l’est certainement pas dans son principe. Je veux dire que, philosophiquement parlant,il n’est pas absurde que les membres du corps social ptennent part au gouvernement de ce corps. — Mais remarquez bien cette clause essentielle que l’on oublie toujours — dans ce en quoi il est compétent. Ce qui est absurde, c’est d’appeler, comme on I’a fait au 8 mai dernier, tout un peuple, ignorants et gens instruits,
hommes de labeur et de peine, aussi bien qu’>hommes de loisirs et d’études, 4 se prononcer sur une question qui dépassait de beaucoup la capacité du plus grand nombre; que chacun vote, mais seulement sur ce quw’il est capable d’apprécier, et que l’on n’ait un suffrage que la ot on est capable d’avoir un avis. En ce sens, le suffrage universel a toujours existé depuis
Louis XIV. Aujourd’hui les catégories sociales n’existent plus, par malheur, et je n’ai pas la prétention de les rétablir; mais il reste encore en France une vie municipale, une vie provinciale, une vie nationale a rétablir.
A chacune de ces vies doit correspondre un organisme qui lui soit propre. Qu’est-ce qui empéche — je ne fais, vous le sentez bien, qu’esquisser de grandes
lignes — que la commune se donne librement un conseil de notables qui soit compétent pour les affaires purement administratives
de la province, qu’enfin les
conseils provinciaux déléguent plusieurs de leurs membres pour contribuer 4 la constitution du Conseil national ou Etats-Généraux compétent pour le réglement des affaires purement administratives de la nation, ou pour donner des conseils au chef de |’Etat en matiére politique? Les fon@ions doivent étre proportionnées aux charges et aux lumiétes, et d’autre
part le chef de I’Etat ne peut étre mis en tutelle par ses sujets. Ce sont les deux principes qui réglent la
composition de ces conseils et leur compétence. — Tout ceci, Monseigneur, parait admirablement logique et pratique, mais quand viendra Vexécution de ce beau plan?
Aout 1908
67
— Dieu seul le sait... tot ou tard il faudra trancher la question gouvernementale; le provisoire ne peut pas durer indéfiniment. Or, de quelque fagon qu’on la tranche, on fera toujours deux partis mécontents sur trois. Aucun d’eux n’est aétuellement capable de tenir téte a la coalition des autres. C’est donc l’anarchie qui est au bout de tout cela. Dieu sait que je ne voudrais en rien Pappeler sur mon pays. Mais cela ne m’empéche pas de la prévoir. Ce n’est pas la fidélité 4 mon principe, qui est celui de l’autorité, qui la rend inévitable,
cest l’obstination des hommes qui aiment mieux périr que de renier la Révolution. Eh bien! l’anarchie fera d’abord cette ceuvre de démolition sans laquelle on ne peut rien restaurer en France de solide. Elle réalisera la table rase qu’aucun gouvernement ne peut faire par lui-méme;
elle ouvrira les yeux aux
aveugles
sur la
grande duperie révolutionnaire, et puis commencera mon féle. «
Quand la France,
déchirée
en lambeaux
par les
partis furieux, se sentita acculée a l’abime, elle cherchera enfin une main qui la délivre. Le libérateur ce sera moi. Dans son sauveut, elle reconnaitra son Roi,
et j’entrerai en France comme mon aieul Henri IV est entré dans Paris en le délivrant. » [98] C’est la tendance vers Vunité qui a fait la monarchie;
cest
la réaction
contre
lunité
fausse
(fédéralisme, syndicalisme) qui la refera. Le fédéralisme est une forme beaucoup plus souple et plus moderne que lunité révolutionnaire. Avec lui la France aurait pu prendre ou garder Luxembourg, la Belgique, la Catalogne.
|’Alsace,
le
Diviser pour comprendte est un principe de logique; diviser pour régner est un principe de gouvernement. La monarchie francaise a déja passé par des crises d’adaptation aussi graves que celle-ci. La guerre de Cent ans. Faiblesse des premiers Capétiens comparée a Clovis ou Charlemagne. Une théorie bien constituée est comme un homme vivant qui est appelé a se faire sa place. Au bout d’un siécle la théorie monarchique commence 4 étre vivante et organique. M. ne l’a pas faite, mais il l’a comprise.’
68
Cahier I
Le point encore obscur est l’organisation des corporations : l’ouvrier actuel est socialement une image de Pélef&teur politique, indifférent, interchangeable, et 14 on ne peut dire que ce soit la conséquence d’une erreut [99] théorique. L’intéresser ? La colleéctivité est également incapable de conseil et de direction. Audessus de l’entreprise privée, le rattacher 4 son corps
de métier. I] faut que celui-ci ait des obligations et des responsabilités et non pas seulement des exigences. I] faut qu’il y ait une autre volonté au-dessus?. La Révolution a eu ceci de légitime, que le citoyen a voulu faire partie d’un ensemble social raisonnable et explicable, ne dépendant plus uniquement du fait et de la tradition. C’est ce que j’appelle la révolution contre le hasard. L’erreur n’a pas été de vouloir étre gouverné selon la raison, mais selon une raison incomplete, de
vouloir créer au lieu de comprendre?.
« Pas de science du particulier», il n’y aurait donc pas de science du concret. « Connaitre
quelqu’un
a fond»,
c’est-a-dire
en ce
qwil a de plus bas’®. Quantum potes tantum aude. Grande devise de art et de ’héroisme chrétiens‘.
La lune qui monte si pleine qu’elle a lair de déborder.
S. Cassien, martyrisé Stylets de fer’.
par
ses
Tablettes de Tell-el-Amarna. neur de Jérusalem au Pharaon’,
éléves
avec
leurs
Lettres du gouver-
[100] La Chine est un Empire dévoré par la vermine (L’impot foncier percu est de 400 millions de taéls : 28 millions parviennent au Gouv[ernemen|t Impérial. Le reste est mangé par les parasites)’. Noise, noisette,
Aodt-Septembre 1908 Lascétisme concentre.
indou
dissout,
69
lascétisme
chrétien
Le sceptique est un homme qui ne se doute de rien. Cet air insolemment passif des belles femmes. Les jeunes cavaliers qui vous lancent un vif regard de cété.
La crainte de Padjectif est le commencement du style.
Et senetus mea in misericordia uberi (Ps. XCI)'. L’homme d'oeuvres n’a pas le temps d’étre orgucilleux. L’artiste et ses ceuvres : Volvitur Ixion et se sequiturque
Jugitque. Il se tourne lui-méme?. Posuist firmamentum meum formidinem. Occidit multos triftitia et nulla est utilitas in illas. Je ne suis pas un sculpteur qui fait des statues @hommes qui se tiennent d’elles-mémes sur leurs bases (Pindare)*. [101] Origine du mal : c’est un bien secundum quid que l’on prend pour une fin en soi. C’est une tendance du particulier 4 l’infini. Cela s’accorde avec la définition d’Aristote : Virtus Stat in medio. Il faut une fin supréme pour ca/er nos mouvements désordonnés, un certain locus Standi. Le péché origine/, est la méconnaissance de la fin derniére. Si l'on ne croit pas en Dieu, tout
décale, fiche le camp’. Apollon — Apollyon — Exterminans Apollon apolesas dans Agam|emnon)’. Babylone — et animarum
En effet
la cité de la civilisation industrielle?
hominum.
am plius (Ap.)°.
—
Et vox
molae in te non andietur
70
Cahier I Vidi sedentem in throno
a cajus conspectu fugit terra
et coelum et locus non est inventus eis (Ap., XX, 11).
Timidis autem et incredulis et exsecratis et homicidiis et fornicatoribus et veneficis et idolatris et omnibus mendacibus pars illorum in Stagno ardenti (ibid., XXI, 8). Coelum sicut liber involutus:. Tout y est et cependant il n’occupe point de place. Cela condamne les vices absolument, c’est qu’ils sont des servitudes. — On disait autrefois : il a de la profondeur; aujourd’hui: il a de la surface. — Autrefois : ila du cceur; aujourd’hut:
il a de l’estomac. L’un
sait prodiguer son sang, et l’autre retenir jusqu’a sa diarrhée (Fagus)’.
Chiasme — croix en forme d’X pour désapprouver. [102] Antilambda — antisigma — pour les citations. Origine des guillemets®. Badcler une porte, un port, fermer par une (baculus ).
barre
Extendens coelum sicut pellem (an parchemin)‘, Une bonne poire a du gotit, mais une bonne péche a du fumet. A Vimage dans le paroissien |’enfant donne un gros baiser sale. 20 septembre-5 octobre 1908. Voyage dans le Tcheli Ouest et le Shansi’, Les quenouilles de mais jaune-orange comme
de la
céramique® qui séchent sur les toits des petites maisons de terre, couleurs des toitures impériales. — Les petits
anes disparaissant sous la charge de millet. — Au soir la file interminable
des chameaux
débouchant
de la
passe de Nankou, tous pareils, comme la bande d’un ornement.
Septembre-Oltobre 1908
75
La Grande Muraille. — Je lui ai jeté ma muraille sur les épaules. — Les montagnes enguirlandées de la double et quadruple muraille se dressent comme une esclave chargée de colliers. — Porte de marbre avec 4 bas-reliefs splendides. — L’enfant couleur de fleur de courge. — La lumiére adorablement pale, comme traitée et spiritualisée 4 entrée du tunnel avec les feuillages [103] se dessinant blémes comme des ombtes. — Azur foncé sur la montagne. Le bleu couleur du Ciel. En chemin de fer. — V. plus haut l’argument du chiffre exprimant un rapport qui est invariable. Cela fournit un argument contre la variabilité des espéces. Une espéce ne vit pas seule, elle existe en rapport avec d’autres espéces et celles-ci de méme. —
Si elle varie,
il faut que les autres varient exactement en rapport avec elle pour lui permettre d’exister. Cela est encore possible, quoique invraisemblable pour une espéce, mais pour deux, mais pour 20, mais pour toutes? Quest la difficulté de la création a cédté de celle-la? 23-27, Shansi; — Paysage des montagnes de tan aux parois verticales découpées en terrasses. Le ciel cru ar-dessus. Entre les deux aucuns' fondants de feuilles, de nuages ou de lignes. Que tout cela est jaune?! Ni os ni épiderme*. Steppe de Tai yuen fou avec partout les grandes statues des ancétres de pierre sous les arbres et sur ’herbage. 28. L’horrible mine chinoise de Lintching. 29. Ichang te fou. 30. Peking syndicate. Magnifique plaine sur une pente de 100 km. du rempart Sud du Shansi au fleuve Jaune. Les champs ombragés de grands plaqueminiers tout chargés de leurs [104] gros fruits rouges (kakis), vessies de confitures‘. 2 ot[obre]. Paoting fu. 3, 4. — Retour par eau. Les grandes avenues d’eau ombragées de grands saules. Les immenses marais ot se dresse tout-4-coup la muraille crénelée d’une vieille ville.
En septembre encore la pale moisson de sarrazin. CLAUDEL V - 6
72
Cahier I
L’abbé Moreux compare le systéme des étoiles a deux courants qui s’entrecroisent et qui vont je ne sais ou, le ndtre vers Hercule (cela veut dire qu'il suit Hercule ?)!.
Es etiam alleluia modicum in sermone et multum in pneuma, quoniam gaudium illud majus est quam possit explicari sermone (Durand, Rationale divinorum officiorum)?. La possession détruit ce qu'il y a de plus sublime dans la passion’. Ego doceo sine Strepitu verborum, sine confusione opinionum, sine fastw honoris, sine impugnatione argumentorum (Imit.
JeeNe
Non est qui utrumque — Dieu et Phf[omme]! — traleat arguere et ponere manum suam in ambobus (Job)*. Un journaliste dont le pére assassine la mére qui le trompait. assassin.
Il a la figure dune
fille et les mains
d’un
[105] Un ingénieur neurasthénique qui monte jusqu’au milieu de la cheminée de P'usine pour se livrer a ses idées noires.
L’horrible lumiére électrique qui aveugle sans éclairer. I] n’y a vision que s’il y a plans et ombres. In dedicatione Ecclesiae — Paralip., cap. VII. Toutes les infirmités et fléaux de esprit : s7 clausero coclum et pluvia non fluxerit, et mandavero et praecepero locustae ut devoret terram, et misero pestilentiam®. — Séche-
resse, dissipation, impureté. — Aller 4 l’église et prier. — Il pardonnera septante fois sept fois, le parfait multiplié par Pinfini. — Vere Dominus est in loco isto et ego nesciebam’.
Qui emit non laetetur et qui vendit non lugeat (Ez.,c. VII)’.
Odfobre-Novembre
1908
73
Les Macchabées, prophétie des martyrs, exemple de Pintolérance chrétienne. Tolérer, mot ignoble?. Et induit maledittionem
sicut veStimentum,
et intravit
stcut aqua in interiora ejus, et sicut oleum in ossibus ejus
(Ps. CVIII)2.
L’admirable ps. CX VI, allure allégre, élastique, pas relevé, rebondissant.
Dormitavit anima mea prae taedio (Ps.
CX VIII)*.
Floribus ejus nec rosa nec lilia desunt. Pax cunéta et laetitia continet. Tranquilla sunt omnia et quieta; jugis Splendor... Santti fulgebunt ut Sstellae, — et sicut splendor firmamenti qui erudiunt multos (Toussaint. — Serm. Bed. Ven.)4. [106] Oui fecerit ejus voluntatem manet in aeternum quomodo et ille manet in aeternum (ibid.)*. Pessimisme, manque de maturité, et scepticisme, de profondeur.
... that thrice superfine Feminity of sense... (Browning) Still you stand, Sill you listen, Still you smile, Still melts your moonbeam through me, white awhile (7a,)8 Quis Aeschylum possit affirmare Graece nunc scienti magis patere explicabilem quam Evangelia aut Epistolas Apostolicas ? Unus ejus Agamemnon obscuritate superat quantum est librorum sacrorum cum suis Hebratsmis et Syriasmis et tota Hellenisticae suppellectile vel farragine (Salmasius, De He//eniStica, Ep. ded.)’.
5 nov[embre]. — Découverte du grand poéte Robert Browning. Erreur, hélas?!
74
Cahier I
Il montre bien que le roman n’est qu’une forme dégénérée du poéme (The Ring and the Book. Incroyable bavardage)!. Répugnance 4 gacher le pain et le papier blanc.
Atrociter, Christiane, in proelio ifto concute (S. Bern.)*.
(matin de février) The scrutinizing eye-point of a Star®. Les roseaux : la blache. Pour le respect humain : E/egi abjettus esse in domo Domini (Ps. LX XXIII)‘. [107] Herpin et Plamondot'. 14 noviembre]. Envoyé a Paris mes Cinq Odes, comme une piéce de toile. Ouvrage de 2 ans, que cela paraissait mince dans l’enveloppe®. Méme jour, nouvelle de la mort de ?Empereur Kouang-hsu, le pauvre petit lapin vidé’.
Novembre. Dédicace de S. Sauveur et de la basilique de Pierre et Paul. — Fétes de S. André, de S. Charles Borromée et de S. André Avellin et de S. Clément. De Stes Gertrude, Cécile et Catherine’.
Vobiscum et inhabitabo et inambulabo (In ind[ique] le comm[encement] et la continuation, inaugurée)®. 15 novembre. Mort de ’Impératrice douairiére?®.
Lenteur d’intelligence chez moi et manque de bon sens provient de mon subjectivisme excessif, de sorte qu’au lieu de regarder la chose dont on me parle, je cherche aussitOt en moi-méme, ce qui déclanche [szc] parfois des séries absurdes?!. S. Ambroise et S. Augustin composent les paroles du Te Deum sur la vénérable mélopée dorienne, l’im-
Novembre 1908
75
morttelle action de graces que la légende fait dater du soir de Salamine et qu’on entendait 4 Rome les grands jours de triomphe (Widor, Rev[ue] des 2 Mondes). De méme le Lauda Sion, le Veni Creator, le Vittimae
paschali, origine grecque?. La musique moderne comme l’ogive est faite d’éléments contraires. Une cathédrale est un instrument de musique qui vibre sous l’effort des voix qui la remplissent’. Chambres et antichambres.
Qui assemble le peuple I’émeut. Le criminel qui n’avoue pas se met lui-méme au secret,
[108] Logion d’Oxyrrhinque «... avant de provoquer injustement, ils rusent de toute maniére. Or, prenez garde qu’il ne vous arrive la méme chose qu’a eux, car ceux qui font du mal aux hommes n’en recoivent pas seulement autant parmi les vivants, mais ils endureront des chatiments et beaucoup
de tortures. » Et les prenant avec lui, il les introduisit dans le propre lieu de purification, et il déambulait dans le Temple (hieron). Or un Pharisien, qui était grand prétre et se nommait Lévi (°), s’avanga, les rejoignit et dit au Sauveur : « Qui t’a permis de fouler ce lieu de purification et de voir ces vases sacrés sans avoir pris un bain, quand tes disciples ne se sont méme as lavé les pieds?Etant en état d’impureté tu as foulé ce Temple (hieron) qui est un lieu pur, que personne ne peut fouler si ce n’est aprés avoir pris un bain et avoir changé ses vétements, sans quoi il n’aurait pas ’audace de voir ces vases sacrés. » Le Sauveur s’arrétant aussitdét avec ses disciples lui répondit : « Toi donc qui es ici dans le Temple (hieron), tu es pur? » Celui-ci lui dit : « Je suis pur, car je me suis baigné dans la piscine de David, et étant descendu par un escalier, je suis remonté par un autre, et j’ai revétu des habits blancs et purs, et alors je suis venu et j’ai contemplé ces vases sacrés. »
76
Cahier I
Le Sauveur lui répondit, et dit : « Malheur! aveugles qui ne voient pas! Tu t’es lavé dans ces eaux courantes ou Von jette, nuit et jour, des chiens et des porcs, et,
aprés avoir pris un bain, tu as nettoyé cette peau du dehors, que les courtisanes elles aussi et les joueuses'de flite oignent et lavent, et nettoient,
et parent pour
(exciter) les désirs des hommes. Mais leur intérieur est plein de scorpions et de tout mal. Pour moi et mes disciples que tu dis n’étre pas lavés, nous sommes baignés dans les eaux de la vie éternelle, venant de... mais malheur a ceux qui... » Se tenir respectueusement : car[actére] chin. = tenit comme un mouton?,
se
Il y a des gens qui ne sont point persuasifs, mais contagieux.
Le devoir est toujours au-dessus’. Le baume qui descend sur le col du vétement, Hermon 4 la fonte des neiges!.
Nos autem praedicamus Jesum Christum, Judaeis quidem scandalum, gentibus autem Stultitiam’.
Exili — le parti des barbichets — nonuple. [109] Aussitét aprés la faute : Ef aperti sunt oculi amborum®. Dans Vétat d’innocence, pas de critique, ils acceptent tout ensemble, ils ne voient pas les choses s€parées et par rapport a eux.
Répons de l’Immaculée Conception : Transite ad me, omnes qui concupiscitis me. Et narrabo vobis quanta fecit Dominus animae meae. Vivit Dominus, quoniam adimplevit in me misericordiam suam. Et narrabo vobis quanta fecit
animae meat.
Ego ex ore Altissimi prodivi, primogenita ante omnem creaturam ; ego feci in coelis ut oriretur lumen indeficiens.
Décembre
1908
77
Nondum erant abyssi et ego jam concepta eram. Deus enim creavit me in jusiitia et apprehendit manum meam et servavit me. Nondum erant abyssi et ego jam concepta eram (id.)*. Circumdedit virum in utero, sicut Jeremias ait, et non
aliunde concepit (S. Jét.)?.
Princeps hujus mundi in me non habet quidquam’. Dieu est notre paradis, raisonnable de Dieu?!
et vous,
Marie,
paradis
Apert mihi, soror mea, amica mea, columba mea, immaculata mea.
Trahe nos, Virgo immaculata ; post te curremus in odorem unguentorum
tuorum?.
[110] La méditation : Ini consilium, coge concilium ; pone quasi nottem umbram tuam in meridie (Is., c. XVI)*. Hesebon,
Sabama’.
Spes a turbine, umbraculum ab aestu. L’église au milieu des grandes villes®. Convivinm pinguium, convivium medullatorum, vindemiae defaecatae?®.
vindemiae,
pinguium
Qui s’avance dans les coups de tonnerre et la fumée de la pluie et les colonnades des trombes. Toute la Bible sous les différents auteurs est écrite comme par un seul homme dont on reconnait le style, la maniére, le tour, le mouvement. Quelqu’un qui écrit ad aeternum. C’est le Pére qui parle au Fils. Tout se suit d’un bout a l’autre. Exshetta eum quia veniens veniet, Morientes non vivant, gigantes (les surhommes)
non
78
Cahier I
resurgant, quoniam visitasti et contrivifti eos et perdidisti omnem memoriam eorum (ainsi les races avant le déluge)*. L’emprunt : cette dépression laissée le long de la . voie par la terre enlevée pour faire le remblai. Et delebitur foedus vestrum cum morte et pattum veSirum cum infirmo non Stabit®. S. Lucie, la Vierge sage de Décembre, ou le jour est le plus court. On voulait y mettre le feu comme a une lampe?. [111] L’Eucharistie : Et dabit vobis panem arttum et aquam brevem,; et non faciet avolare a te ultra dottorem tuum; et erunt oculi tui videntes praeceptorem tuum (\s., c. XXX)‘.
Chatiment de Dieu sur Napoléon : « Le cardinal Fesch désigna le médecin et le prétre demandés par ’Empereur... I] choisit, pour le corps, un barbier Corse (Antomarchi) [sic], le plus mal éduqué, le moins exact 4 son devoir, le plus ignorant dans sa profession; pour l’ame un vieux prétre, hébété et aphone, le Corse Buonavita, auquel il adjoignit un jeune prétre (Corse) qui savait a peine lire et écrire. — Napoléon fit demander en France un autre médecin et un autre prétre. Personne ne vint» (F. Masson, Awsour de S. Hélene). Cest Phomme qui voulait avoir le Pape a Paris pour son aumonier®. In salicibus in medio ejus suspendimus organa nostra. — Tientsin en a autant que Babylone’®. Pone, Domine, custodiam ori meo et ostium circum Stantiae labiis meis. Non decline cor meum in verbo malitiae ad
excusandas excusationes in peccatis (Ps. CXL)’.
Noli timere, vermis Jacob (Is.)8. Les choses sont particuliéres, la parole est générale. Les choses sont passagétes, la parole qui les exprime est éternelle, n’ayant per se commencement ni fin.
Décembre 1908
79
Les sens ne voient que des individus et la parole n’affirme que des types; ils ne constatent que le passager et la parole n’exprime que |’éternel'. Tout signe est de plusieurs choses et fixe. [112] Depuis le partage de la Pologne l’Europe est en état de péché mortel (le P. Gratry)*.
Nec audietur vox ejus foris. Non turbulentus (Is.)*.
erit tristis neque
La tisane de gingembre fait revenir vivants que les morts ont épouvantés.
4 eux
les
Pourquoi il n’y a pas de miracles en Chine : les Chinois ont l’imagination tellement pleine de fables qu'il n’y a pas de fait surnaturel qu’ils ne trouvent tout simple et ordinaire.
Toute vieille chose devient magique et méchante : une vieille corde, un vieux balai, un vieux soulier, un
morceau de bois pourri. De méme une stéle, un lion ou une tortue de pierre, les objets enfermés dans un tombeau, une figurine de pagode, une sculpture de pont, une piéce de jeu d’échecs (P. Wieger)’. Quand les eaux baissent, les cailloux apparaissent (prov. chin.).
Attendite ad petram unde excisi estis et ad cavernam laci de qua praecisi estis (Is.)°. Comme je |’ai vu a Baalbeck. Il mord
au plus épais d’un livre comme
une
scie
circulaire dans une planche. Que votre esprit soit comme fraichement tombée.
une nappe de neige
[113] Fluenta Evangelii de ipso sacro Dominici peétoris fonte potavit’.
80
Cahier I
Quis ascendet in montem Domini ? Abiit festinans in montana (Luc)}. Un nombre impair n’est pas susceptible de division exacte. En effet Punité ne peut étre ni détruite ni partagée. Diviser l’unité c’est lui substituer un équivalent? multiple. Filiae eorum compositae, circumornatae templi (Ps. CXLIII)*.
ut similitudo
1909 1909. — Une grande année toute blanche devant moi. La vie serait encore supportable sans ses amusements. Cette science qui au lieu d’ouvrir les esprits les obstrue.
Le pain interdit digérer.
aux
riches
qui ne peuvent
le
Maledittio Matris eradicat fundamenta’. Je suis seul. Je ne suis pas de Port-Royal (Pascal, Prov.)*. Mes promenades sur le mur en terre.
Pourquoi attendrir son juge? Cela n’est pas loyal. Sa tache est déja assez difficile sans qu’on vienne encore lui dire : Je suis honnéte, je suis honnéte (Andreieff)°. [114] Continuité, homogénéité. Par une espéce de marée céleste, l’eau purifiante qui n’atteignait que les corps atteint maintenant les esprits. Ce qui lavait baptise‘,
Ce méme jour, féte de l’eau qui est changée en vin’.
82
Cahier I La méloté de S. Jean Baptiste. La panégyrie.
Hélas! le Jourdain baptisé va se jeter dans la Mer morte, Un grand besoin du temps. Des bibliothéques catholiques populaires. Au moins une a Paris, Prét gratuit. L’enfer. La peine du sens. L’inversion. La flamrhe, plus elle est ardente, elle devient comme invisible.
Avant la révolution. Les physiocrates. Le Trosne : « La situation de la France est infiniment meilleure ue celle de PAngleterre; car ici on peut accomplir es réformes qui changent tout |’état du pays en un moment. » L’abbé Baudeau : « L’Etat fait des hommes tout ce qu'il veut » (ap. Benoist). D’autre part Taine disant quil faut découvrir la constitution d’un pays et non pas Vinventer, n’est pas moins ridicule. La raison a sa part dans le gouvernement des nations. [115] Ch. Benoist : Phénoméne de condensation de Phumanité sur différents points. — Les ouvriers seuls forment une classe, obligés de vivre ensemble tous les jours, communiant dans le méme travail?.
Silvam istam frementium bestiarum et turbulentissimae profunditatis oceanum (S. Léon, parlant de Rome, ou de Paris)®. La nature méne 4 Dieu, mais non pas 4 un Dieu crucifié (Paroles de mon confesseur, le P., maintenant
Mgr Baudrillart). Conversion
de Charles
Nancy. Deo gratias*.
Henrion,
45, rue
Isabey,
L’immersion dans la cuve fumante du vin nouveau5.
Janvier 1909
83
Secundum innocentiam meam super me’ — comme un manteau — Adam vit qu'il était nu. Praeparationem cordis eorum audivit auris tua (Ps. 1X)*.
Qui bonus et hauriet gratiam a Domino, qui autem confidit in cogitationibus suis impie agit (Prov., XII). Celui qui boit eau gratuite, celui qui est confit dans ses propres pensées. Novit justus jumentorum suorum animas; viscera autem impiorum crudelia (id.). Douceur et respect envers les animaux, ces dmes. Redemptio animae viri divitiae suae; qui autem pauper est increpationem non sustinet (id., XIII).
Qui detrahit alicui rei ipse se in futurum obligat (id.). Terrible punition de la médisance. Qui Gte il faut qu’il remette. [116] Cor quod novit amaritudinem animae gaudio ejus non miscebitur extraneus (id., XIV).
suae
in
Hominis est animam praeparare et Domini gubernare linguam (id.)*.
Le froid de novembre et de décembre est la congélation de la mort; morsure du réveil.
celui de janvier et février est la
a pain et 4 pot, au feu et a la chandelle. Il est plus facile de mettre d’accord les h[ommes] sur leurs intéréts que sur leurs sentiments.
Une machine 4 écrire ou la bascule des leviers ne se ferait pas a la force des doigts mais par l’éle¢tricité, le doigt se bornant 4 un contaét. Impression toujours avec une égale force. Des syllabes et des mots et non seulement des lettres (?).
84
Cahier I
Tibi derelittus es pauper (Ps. IX). Renan est la suite de Lamartine. C’est la méme religiosité douceatre et niaise, les mémes aspirations a Vidéal (rien de sincére naturellement), la méme incapacité de focusser. De quoi infaillible témoin le méme style infame?. Psexlk: Gloria Dei est celare verbum et gloria regum inveStigare
sermonem (Prov. XXV, 2).
Livor vulneris absterget mala et plagae in secretioribus ventris (id., XXX)3.
[117] Telle l’écriture, telle la plume. Mauvais sy/e, laid caraéére. Peine a croire qu’un mauvais écrivain soit un honnéte homme. Renan. Sensibles a la tentation. Jour de la Purification. Pierre. Audi tacens (Eccli.). Les fantomes des morts poussent (Rép[onse] de Jamblique 4 Porphyre)‘.
a4 la luxure.
Les mots sans suite et sans sens conjurent le diable. Abus du Verbe.
Imaginatio locorum et mutatio multos fefellit (Im., I, 8)°. ... apparaitre du ciel concave la créature splendide.
Il y a des écrivains qui ne pensent pas noir et qui n’arrivent pas 4 souiller leur papier.
Ecrire est mettre quelque chose de trés-noir au bout
de quelque chose de trés-aigu. Plus la matiére est noire, plus l’écriture est claire’.
Février 1909
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Magis Deus pensat ex quanto quis agit quam opus quod facit. — Multum facit qui multum diligit. Multum facit qui rem bene facit (Im., I, 15). [118] Sz non potes te talem facere qualem vis, quomodo poteris alium ad tuum habere beneplacitum (id.)?. Les Anges n’ont point de lieu parce qu’ils n’ont point de corps, et Dieu n’a pas de lieu parce qu’il n’a point de fin. Mane propone, vespere discute mores tuos (Im.). In silentio et quiete profictt anima devota et discit abscondita Scripturarum*. Vapide — tripoté — rincer. Facilius est omnino tacere quam verbo non excedere®, Claude super te ostium tuum et voca ad te Jesum dilettum tuum*,
Pauci
ex infirmitate
meliorantur;
sic et qui multum
peregrinantur raro santtificantur®. Tout se perd, mais rien ne s’épuise.
Quid alind ignis ite devorabit, nisi peccata tua® ? La parole ne se dissout que dans la réponse et il n’y a qu’une maniére pour elle d’étre entendue qui est d’étre exaucée.
Est enim regnum Dei pax et gaudium in Spiritu Santto quod non datur imptis (Rom., XIV)’. Baucalis®. [119] Frequens illi visitatio cum homine interno, dulcis sermocinatio,
Stapenda nimis.
grata
consolatio,
multa
pax, familiaritas
86
Cahier I
Ouid hic circumspicic, cum iste non sit locus tuae requietionis? ?
C’est la foi et non pas la charité qui transporte les montagnes. Mauvais écrivain, malhonnéte homme.
Qui ne sait
pas ce qu’il dit, comment en croire sa parole? « Ces lieux destinés 4 ne rien faire ot l’on savoure Pidéal soit. par art soit par le repos » (Renan). Voila le critique de la Parole de Dieu.
Columelle, axe — Papelonné.
intérieur
d’une
coquille
spirale.
Unde nihil prohibet corpus Christi esse extra totam continentiam coeleStinm corporum, et non esse in loco continenti
(Shy 3 page evil:
Le papillon qui dort posé sur une cloche. >
7
avakeparawoacbat
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S. Paul, Eph.)®. Si recium cor tuum esset, tunc omnis creatura speculum vitae et liber santtae dottrinae esset.
Ubi es quando tibi ipsi praesens non es® ? Lettre d’El Amarna. — Situation importante de la Palestine entre les 2 grands empires d’Egypte et de Babylone. — Le pharaon traité de [120] soleil, comme Louis XIV. Les dieux solaires, métaphores et non pas
mythes. I] est de méme appelé « tonnerre »*. Sicut castigati sed non mortificati’. Le « mojuna» qui se passe la main sur la figure et aussitot elle devient un ceuf®,
sans aucun
trait et semblable
4
Mars 1909
87
Les fourmis qui luttent avec courage contre marché a la hausse.
un
Pour qu’Il croisse, il faut que je diminue’. Ce n’est pas Dieu qui repousse, c’est le damné qui est repoussé; ce n’est pas Dieu qui bannit, c’est le damné qui refuse. La Justice aveugle pour mieux écouter. [121] Le vieillard a la mort devant lui; mais aussi il a la vie par derriére. Dénonciations de Perrot contre moi et mes « menées cléricales».
Le
10 mars,
Boissonnas
vient faire une
enquéte sur mon compte*. Comme consolation, le méme jour, je recois une lettre d’Henrion m’annongant sa conversion; il communie le 28 fév[rier], jour ot je me suis trouvé communier moi-méme. Des ennemis 4 ta gauche et a /a droite. pleurant, avalant et reniflant de la neige.
Printemps. Le talus chiné de neige se reflétant dans l’eau verte avec les mille baguettes des arbustes dépouillés. L’air froid et le soleil chaud.
Ce crépuscule noir sur le faubourg avec une femme dont le mari se meurt et qui court chez le pharmacien. Phidias avec un ciseau et un couteau taille Jupiter; avec nos millions de chevaux-vapeur et nos outils compliqués nous fabriquons des chromos et des boites a sardines.
La foi en Dieu de notre indigence méme permet de faire un sacrifice. Nouveau, décapé.
nous
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Cahier I
Vinea fuit pacifico in ea quae habet populos (Cant., VIII).
Un sourire lépiderme.
en
risée
(catspaw)
n’atteignant
que
Duméloir?.
[122] Vita plena miseriis et circumsignata crucibus Beatae aures quae venas divini susurri suscipiunt?.
Sur S. Joseph, Genése, ch. XX XIX. — Pouvoir sur les captifs : Tradidit in manu ejus omnes vinitos*,
Lafcadio Hearn borgne et ne voyant ceil qu’avec quelques lambeaux de rétine.
de [autre
Tout ce qui n’est pas Unité est un nombre. Aucun nombre n’est divisible puisqu’on ne peut le diviser sans le détruire. Dieu lui-méme n’existe que par la relation. Le nombre est la racine et le commencement du lieu.
The diamond mornings of the past. Au IIl® livre des Los universel
comme
d’une
Platon parle du Déluge
tradition fameuse®.
La mauvaise Fortune sur nous renverse sa cornucopie’. Opulent. —
Elégances.
Qui ricane, il est prés de grincer des dents’, Qui se moque de ces antiques vérités sur lesquelles vivent les honnétes gens, il ressemble 4 un tenancier de bordel qui rit d’une vieille paysanne. [123] Il se moque de la prédestination, mais il avale sans sourciller les absurdités du transformisme (étre et n’étre pas). Caput artis decere®.
Mars 1909
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Péréfixe?.
Odium philologicum. Les savants qui dans une espéce de guerre interplanétaire se tirent dessus dans des revues qui paraissent tous les trois mois, environnées par le vide astronomique.
Ces compliments qui sentent la chandelle éteinte. Caractéristique
de l’Annonciation
: le secret, le
Diable trompé, Dieu se cachant du diable. Ces couloirs
tortueux, ces caves profondes que j’ai vues 4 Nazareth. Une demeure souterraine?. Conscidisti
saccum
meum
et circumdedisti
me
Jlaetitia.
Le corps glorieux (Ps. X XIX).
Abscondes eos in abscondito faciei tuae. La face elle-méme cachée et servant a cacher (Ps. XXX).
Qui finxit singillatim corda eorum: qui intelligit omnia opera eorum. — Nous avons quelqu’un qui n[ous] comprend (Ps. XX XII).
Melior est manifesta correptio quam amor absconditus (Prov:, xX VIT)*: Le baiser frauduleux plein de miel et de poison. Qui ne se fait pas d’illusion sur soi-méme s’en fait encore bien moins sur les autres. [124] Joate — Jujube — Joubarbe‘.
David se faisant passer pour fou devant Achimélech. Homines et jumenta salvabis, Domine. — Dieu prend soin des animaux. Mutuabitur peccator et non solvet (Ps. XXXVI)°. Caileichats — cogs de Pharaon.
90
Cahier I
« Soyons dur! » — parole de ramolli. Le monde est plein de vérités chrétiennes devenues folles. — Ils se sont partagé ses vétements et les ont tirés au sort (Chesterton). [125] La tradition donne un vote 4 la plus obscure de toutes les classes, nos ancétres; elle est la démocratie
des morts (7d.). Les contes de fées nous parlent de riviéres de vin,
pour nous rappeler cet étrange moment de notre vie ou réellement il y coulait de l’eau (id.). Toute couleur a en elle Paudacieuse qualité d’un choix; le rouge d’une rose n’est pas seulement décisif mais dramatique comme un sang soudainement Verse m(77.) La répétition dans la nature a parfois quelque chose de passionné, comme quelqu’un qui veut se faire comprendre (7d.). Le changement résulte non pas de la vitalité mais de la mort, Dieu seul est assez fort pour exulter dans
la monotonie (id.). Non seulement merveilleux mais volontaire. Le monde ne prouve peut-étre pas un horloger, mais il prouve un magicien. S’il y a propos, c’est qu’il y a une personne (7d.). Quoi que veuille violence (id.).
dire le monde,
il le dit avec
Le courage n’est pas le dédain de la vie, mais le dédain de la mort (7d. ). Un gros homme chez qui l’émotion ne se traduit par aucun mouvement, mais simplement par une élévation de température.
Mars- Abril 1909
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La nature n’est pas notre mére, mais notre sceur (id. ).
[126] Obsfupescite coeli super hoc, et portae ejus desolamini vehementer! Duo enim mala fecit populus meus: Me dereliquerunt fontem aquae vivae, et foderunt sibi cisternas, cifternas dissipatas, quae continere non valent. — Filii quoque Mempheos et Taphnes conStupraverunt te usque ad verticem... Et nunc quid tabi vis in via Aegypti ut bibas aquam turbidam ? et quid tibi cum via Assyriorum, ut bibas aquam fluminis ?... Scito et vide quia malum et amarum est reliquisse te Dominum Deum tuum (Jét., c. Il). Viri impii dixerunt: Opprimamus virum justum injuste et deglutiamus eum tanquam infernus vivum : auferamus memoriam illius de terra; et de spoliis ejus sortem mittamus ' inter nos (Resp. Dom. Palm.).
Manus furentium, quae dum proprio incumbunt sceleri, famulatae sunt Redemptori (S. Léon)?
S’il n’y a pas de sens dans l’univers, il n’y a plus d’intérét. I] n’y a pas de roman sans intrigue (Ch.)°. parfum d’une nauséabonde.
douceur
excessive
jusqu’a
étre
un seul coup de tonnerre la nuit en mars.
Le pauvre poéte Lafcadio Hearn pris dans Herbert Spencer comme un papillon entre deux pages d’un manuels, [127] Confession : le P. Desrumaux avec la voix d’un homme exténué et qui n’en peut plus. Numquid deficiet nix Libani? (Veucharistie) aut evelli possunt aquae erumpentes frigidae et defluentes ?(Jér., X VII)°.
Aveu des transformistes : Depuis la derniére période glaciaire — période eStimée pour l’Europe 4 environ 80 000 ans — les
92
Cahier I
restes que nous trouvons de plantes et d’animaux appartiennent 4 des espéces encore existantes (A. R. Wallace). Il y a donc et des époques travaillées par un soufHle de transformation et d’autres ot il a cessé. Le propre des « lois» de la nature n’est-il pas d’étre constante ? Quelle est cette /oi qui s’arréte une fois son ceuvre achevée ? Ibidem : multitude des oiseaux impossible sans Vabondance des insectes et celle-ci sans la surabondance de Ja végétation. Nous voyons partout les étres parfaitement adaptés 4 leur milieu, avec
une
spécialisation
infinie.
C’est
donc que non seulement cette adaptation est nécessaire, mais aussi sa perfection. Sans une adaptation parfaite, si Pespéce ne peut continuer 4 vivre, c’est qu’elle ne peut commencer a étre. Elle ne peut étre essayée, il faut qu’elle soit réussie du premier coup. Si Peftet change, c’est que la cause a changé. Quel est cet étre nouveau qui apparait [128] sur un point, tout le reste demeurant pareilP Ce n’est pas la nature qui évolue, c'est Dieu qui développe son idée dans tous ses détails? Sine sanguinis effusione non fit remissio. Hyssopus, lana coccinea (Hébr.).
Dixit insipiens in corde suo: Non est Deus’. — Par un acte inverse a la prolation du Verbe. Tout étre nouveau était avant lui.
existe aux dépens de ce qui
Variations non pas qualitatives, mais quantitatives. Loin de changer son type, son idée, l’étre la défend.
In fulgure etenim terror timoris eft, in nive autem blandimentum caritatis (S. Grégoire, Paques)’. La végétation créée le 3° jour avant le soleil et les étoiles. Mercredi.
April 1909
93
Priére : Mon Dieu, moi aussi je veux faire quelque chose pour vous. Paques. Dune jolie femme il ne lui manque que la beauté et le sexes
Chou cabus — caboche — cabbage. lemporaneus
=
temprun.
La délivrée d’elle-méme?. Leste sans grace et alerte sans esprit®.
[129] Le cigare dans sa bouche éloquent comme la . queue d’un chien. I] n’y a pas de mort naturelle. La mort n’est pas dans la nature intrinséque (Leb, Weisman, ap. Metchnikof)*. Ainsi le corps est immortel, étant composé d’éléments immortels. Mais l’4me ne l’est pas! Vos lévres de nouveau les mémes® aprés si longtemps! ... a senti sur son cceur la pesanteur du vrai. dd tis el; TH apxynv 6 Te Kat AGAD bytr.
Principium qui et loquor vobis — vous parle le commencement’.
a Vacc. : cela qui
Corpus sumus de conscientia religionis et disciplinae unitate et spei foedere (Tertullien)’. La volonté est un appétit raisonnable (déf[inition] sc[olastique])*.
Les chrétiens sont poursuivis pour association non autorisée (Pline)’. Non est fidei meritum ubi ratio humana praebet expertmentum (S. Gt.)?.
94
Cahier I
Credo quia absurdum (Tert.) — (S. Anselme, d’aprés Isaie)}.
Credo ut intelligam
« Les épées transformées en charrues.» — La persécution qui laboure le champ du Christ. « Chacun sera en paix sous sa vigne » (la croix du
Christ).
Gratia ex se efficax qua Deus physice movet potentiam liberi arbitrii ad opera salutaria, non modo non laedit nec minuit [130] liberum arbitrium creatum, verum etiam ipsum auget atque perficit (S. Th.)?. Nihil volitum nisi praecognitum. 1€&f mai 1909. — A Pékin, funérailles de l’empereur Kouang hsu. Le pavillon de la Montagne de charbon aux 2 toits ronds couleur de turquoise. L’idée de mort associée a l’idée de chasse. Les chameaux a housse jaune, une peau de zibeline pendue au cou. Les grands disques de papier blanc transparent, monnaie des morts. Les vols de pigeons aN sifflets. Les satellites‘.
Deux carriers accroupis l’un en face de l’autre, l’un enlevant un éclat de pierre de Veil de l’autre. Le jardin au soit avec une béche plantée dans la terre prés d’une touffe diris. Saturus.
Episcopatus unus est, cujus a singulis in solidum pars tenetur (S. Cyp., De Unitate)®. Ce qui est d’orthodoxie douteuse, mais trés instruéctif. Comme
|’ensemble sain
sauve la partie malade (les conciles), tout l’épiscopat participe au bienfait de l’infaillibilité de la partie papale. ... cette parole sacrée sur ma face avec un soufHe d’hyacinthe.
Forum viarum. Fourviére. C’est de Lyon que pattait
Abril-Mai 1909
95
le quadrivium. L’interse@ion de la grande croix des quatre routes qui traversaient la Gaule du N. au S. et de ’E. 4 17’O.1.
[131] tout doré et fréquenté des anges et ruisselant du miel de l’oraison comme un rayon foramineux.
couvert et inondé des fleurs de l’acacia?. Un homme a plus de valeur avec une seule qualité énergique qu’avec beaucoup de qualités molles (Davoult ap. Thiébaut)®. Le
1&7 aoat de Pan
ro avant
le Christ, les chefs
_ de Go peuples Gaulois réunis 4 Lyon inaugurent au ' confluent du Rhone et de la Sadne l’autel de Rome et d’ Auguste. a violent secrecy. une cartouche? de roc-a-roc, sentant l’amande amére.
Suscipistis (Jac.)§.
in mansuetudine
insitum
verbum
(grefté)
Le four a briques Hoffmann avec le feu passant perpétuellement en cercle d’un compartiment 4 l’autre. fureur ducygne
— _ vert olive.
Les vins Burgondes. Les petits souliers de femme 4 museau de tanche. Que ton enfant soit sain comme le sel, bon comme le pain, plein comme
un ceuf, droit comme une allumette
(souhaits provengaux a l’accouchée). Ombre et murmure. emmi — prononcer ami.
96
sou
Cahier E
[132] 19 mai. Je demande mon congé.
Un
ivrogne
soucieux
d’hygiéne
qui prend
son
absinthe avec de l’eau de Vittel.
Une servante danoise balayant le devant de la porte en culotte de cycliste, la pipe a la bouche et des lunettes sur le nez. Ephpheta, avec le doigt mouillé de salive sur les oteilles et les narines — onétion d’huile avec le pouce sut la poitrine et entre les épaules. Exorcisme du sel : et hoc primum pabulum salis gustantem non diutius esurire permittas, quominus cibo expleatur coelesii, Baptéme des enfants. Id. des adultes : Te deprecor ut huic famulo tuo qui in hujus saeculi noéte vagatur dubius ac incertus, viam veritatis et agnitionis tuae jubeas demonstrari.
Leva, comple orationem tuam et dic Amen. Accipe vestem candidam — Accipe lampadem ardentem (Rit[uel] Romf[ain])?.
On signe tous Onétion. Ps. XXVIII
les sens comme
dans |Extréme-
: Deus diluvium inhabitare facit?.
Un écrivain doit avoir des opinions arrétées; il doit se regarder comme un instituteur des hommes, car on n’a pas besoin de maitres pour douter (Bonald, ap. Balzac)*. Les chirurgiens autour du corps endormi qu’ils vont ouvrit, vétus de robes comme des prétres, purifiés, les mains couvertes, la bouche et les narines voilées.
[133] Le vulgaire dispute, le sage embrasse (Sagesse chinoise).
En Chine le grand mouvement des conversions se fait aprés la moisson.
Mai- Juin 1909
97
Ou Dieu a fait les choses, ou elles se sont faites elles-mémes : mais alors elles se sont faites avant
d’étre et leur acte précéde leur existence.
_ 1858. — Le Darwinisme — L’Immaculée-Conception. 1870. — La République et la prise de Rome L’infaillibilité du Pape’. La chouette
—
qui vole dans le crépuscule avec une
queue de souris qui lui sort du bec.
Deux prisonniers 4 fond de cale aux fers par les pieds et les mains, rongeant le méme biscuit qu’ils ; se tiennent avec les dents?. Aprés maints tripotages, le mercure, s’il ne fait pas de lor, au moins il guérit de la vérole. The Tientsin men have a reputation for violence, especially in speech, and all over China are dreaded as quarrelsome and obstreperous; in some places in the central provinces the inns have a Standing notice: « No Tientsin men admitted » (Arthur Smith, China in convulsion)s. Nil in Deo praeter Deum (Ad. de S. Victor)‘.
[136] Hpitre de la Trinité® : Ouis enim cognovit sensum Domini (le Fils assis a la droite) aut quis consiliarius ejus fuit? aut quis prior dedit illi et retribuetur ei ? (Rép.:) Quoniam ex ipso et per ipsum et in ipso sunt omnia (et en particulier zffa)°,
Plusieurs pour conseiller, mais un seul pour choisir. Courtois avait 4 peindre sur tous les murs du Palais de Justice des mains indicatrices. Je lui dessinai une main gauche et une main droite; je pris ma propre main pour modéle. Ainsi celui qui ira demander justice 4 Cayenne se fera montrer le chemin par la main
98
Cahier I
d’un innocent condamné
a mort.
Et cette main sera
peinte par un anarchiste! (E. Degrave, /e Bagne). Quand je remue le doigt, c’est de cet organe méme que part le mouvement qui intéresse ensuite les muscles des fiat comme une branche agitée communique la secousse 4 l’arbre et aux racines. Par la volonté je fixe le point d’appui du levier ot: je veux. MultiplicaSti gentes, sed non magnificaSti laetitiam — Tu as multiplié la foule, mais tu n’as pas accru la joie’. Symphonialis eft anima*. [137] A tous les moments de toute ma vie‘.
je suis contemporain
Parmi les petits singes noirs, du fourré des volées de perruches vertes. La fille dune tenanciére de maisons de tolérance (4 ans 1/2) souillée par un domestique et perdant la vue (syphilis). « Le royaume de Dieu est en vous» comme l’effet dans la cause et comme le Verbe dans le Principe. In lumine tuo videbimus lumen — principe du vitrail et
de la mosaique®. Reine enceinte pour la 3° fois — 10 juin.
Le sage qui péche sans amorce, déja pris.
lui-méme
étant
La mére du poéte Li-Po réva, enceinte, de la planéte Vénus®, L’acceptivité. Nous
rirons dans le ciel tous les huit comme
des
Juin- Juillet 1909
99
dieux, dans nos mains des coupes
de cristal pleines
dune eau brillante comme la planéte Vénus?. En 1870 les paiens accusant les sceurs de charité d’étre la cause de la sécheresse. Aprés le massacre, trois années d’effroyables inondations?. Je suis rassasié de te voir vivre! (Swinburne).
Noémi — Cosmas Indicopleustes — Horace Mouillette — Ratin®. [138] L’eau qui coule, il ne s’agit pas de la suivre, mais de la traverser.
La raison est le parfait [sic], le plus noble et le plus exquis des sens (Montesquieu)‘.
Sainte Dorothée de Cappadoce’. Bigot de Préameneu avait épousé une descendante de
Guillaume de Nogaret®.
Pas de fumée sans feu : ce qu’il y a de plus sale sans ce qu’il y a de plus pur (Ch.)’. Heureux homme qui n’attend rien, car il ne sera pas désappointé (B. Shaw)’. La force d’une chaine n’est pas supérieure a celle de son anneau le plus faible (Ch. a propos de S. Pierre)?. Au
rebours
du
soleil
remontant
les barques
aux
voiles transparentes. L’histoire est une topographie du produit humain. Le Chinois a non seulement sa droite et sa gauche, mais les 4 points cardinaux?®.
Navigare necesse est, vivere non ef necesse». Devise de Bréme.
100
Cahier I
[139] 25 juillet. — Mort du P. Du Cray. Le matin il disait sa messe et le soir déja il sentait mauvais.
Le P. Desrumaux. Tout mon corps me brile comme si j’étais couvert de charbons ardents*.
Liber scriptus proferetur. — Neque obliviscaris in finem®. Illes conduit pendant le jour dans une nuée, et pendant Ja nuit dans le feu. Immissiones per angelos malos (Ps.
LX XVII).
Ps. LX XIX : ps. de la vigne.
Le silence du philosophe et de l’acrobate. Ego dixi: Dii estis et fii Excelsi omnes (Ps. LXXXI, 6)4.
S. Augustin remarque que pour le 7® jour la Genése ne fait pas mention comme pour les autres du matin et du soir’. 24 juin® — S, Jean — La Noél d’été — Le solstice : « Il faut que je diminue et qu’il croisse. » — La Voix engendrée par le Pére muet. — Paul Diacre a qui il rend la voix pour chanter lExw/tet compose cet hymne dont les six syllabes ascendantes ont formé la gamme’.
Clausus clauso hie applaudit... Agnum monstrat in aperto Vox clamantis in deserto Vox Verbi praenuntia (Adam de S. Viétor)8. [140] Non luce iste sed lucerna®. Et ante propheta quam natus (Préface du Sacramentaire Léonien)?°.
Jwillet- Aout 1909
IOI
Importance de la priére a l’église, celle qui se fait a la cour méme de Dieu. Bélandres?.
Ces concisions et ellipses ménent langage des anges (Voiture)?.
tout droit au
Nist quia Dominus adjuvit me, paulo minus habitasset
in inferno anima mea (Ps. XCIII)*.
Le messager qui court tout droit a petits pas — un petit nuage de poussiére se léve alternativement sous chacun de ses pieds‘. Les constellations
du Sud : la Balance, le Chien:
Procyon. L’étoile
du soir merveilleuse,
admirablement pur. —
dorée, dans le ciel
Un hymne dorien’®.
Un groupe de gens nus dans la mer. IIs le font sauter
tout droit, le prenant par les talons... La met comme
une vue sut Dieu®.
Le marin prét a étre englouti voit se lever au-dessus de lui une vague monstrueuse [141] ayant la forme dune téte d’ane. La cuisine anglaise n’emploie pas des condiments, mais des anesthésiques’.
Concert chinois sur eau. L’un chante en grattant une guitare et autre ’accompagne en tapant sur un bol de porcelaine avec un chopstick’, Eléments primitifs de la religion naturelle d’aprés Mert Le Roy: Distinétion entre le monde visible et un monde invisible, sentiment dela dépendance del’homme a Pégard de ce monde supérieur, croyance en un étre supréme, croyance en des esprits indépendants, croyance
102
Cahier I
en l’Aame humaine, croyance en un monde de I’au-dela, sens moral fondé sur la distinétion du bien et du mal,
notion du péché, organisation cultuelle, sacerdoce, distinGtion entre le profane et le sacré, établissement de la famille comme centre religieux et social. — La famille, instrument de conservation!.
Quel crime que de détruire une famille! On peut imaginer un monde complet de louie distin@ de celui de la vue et le compénétrant : et de méme un monde complet de l’esprit distin de celui des corps et le compénétrant?.
Départ de Tientsin pour la France 15 aout 1909 4 113 h. 37 du matin’.
le dimanche
Comme les enfants qui regardent la mére quand le pére a cessé de parler. Voyage trés pénible. Ma femme enceinte. Pierre malade. La bonne espagnole donnée par le Ministre souffrant d’une hernie. [142] Verchni-Oudinsk. Descente de la Selinga, vallée couverte de foréts avec la riviére rapide et noire. Lever de soleil sur le Baikal. — L’Oural. Traversée de la Volga. Les chants dans la gare de Smolensk. Arrivée a Paris le dimanche 29 aofit a 4 h. du s[oir].
Les semailles d’hiver qui verdoient avant la neige, comme les pensées nouvelles dans le cceur d’un vieillard sur lesquelles la mort passera. Les moulins historiés et peinturlurés avant Moscout.
Je ne rétorque pas l’argument, je le franchis sur un pont de paille.
. Solis presbyteris quibus sic congruit ut sumant et dent ceteris®,
Aoit-Septembre
1909
103
Panchévre, nourrisseur.
Cultus justitiae silentium. Vita mutatur, non tollitur?.
Visite aux Carmes le 2 septembre. C’est bien un endroit de massacre et de guet-apens. Le petit perron étroit barré o& venaient buter les vi@imes comme des bétes qu’on assomme. — Pourquoi avez-vous fait couper ce bel arbre ? — Il donnait de ?ombre et au printemps il était infesté de rossignols. Authentique. Creavit omnia simul’.
Niais développements des Sully-Prudhomme et autres sur l’immortalité du corps humain qui devient rose, feuillage, etc. — Quelle consolation [143] 4 un mourant que de lui parler de ses héritiers! — Quelle immortalité que celle que je partage avec le guano! — Je casse la Vénus de Milo : elle n’est pas détruite, puisque n’étant plus statue, elle demeure pavé‘.
Admirables ruines du Val chrétien. La pierre, le ciel de France, le rouge vineux des grands toits. Le 5 septembre, baptéme de Pierre, consacré ensuite
4 la Sainte Vierge. En allant prier devant la tombe de mon grand-pére je m’apercois que c’est l’anniversaire de sa mort, le 5 septembre 1881.
Le lierre qui sort de la tombe de mon oncle l’abbé et qui pénétre 4 lintérieur de léglise. Plusieurs fois coupé il repousse toujours®, La table ronde de famille avec les trois générations, mes parents, ma femme et son pére, mes enfants dans
leur petite chaise, ma sceur et son fils’. Repas presque solennel. A Paris, Camille folle. Le papier des murs arraché a longs
lambeaux,
CLAUDEL
V - 7
un
seul fauteuil
cassé
et déchiré, iz
104
Cahier I
horrible saleté. Elle énorme et la figure souillée, parlant incessamment d’une voix monotone et métallique?. Mes arriére-grands-parents — les Cent — donnant asile aux prétres insermentés pendant la Révolution font le veeu, s’ils échappent 4 la [144] mort, que leur fils sera prétre : mon gtand-oncle Nicolas Cerveaux, curé de Villeneuve pendant 30 ans?. Mot de paysan sur le mauvais temps : On rentre les récoltes, ¢’est comme
si qu’on les volait!
S. Thomas : « Motus moventis accipitur in moto secundum modum moti®,» Par ex[emple] une boule roule, un ressort se détend, un liquide ondule. Plusieurs lignes fines concentriques autour bouche. Elle rit entre guillemets*.
de sa
Le bicycliste au pied de la céte voit la route toute droite se dresser devant lui comme une planche.
Quand j’énonce un chiffre abstrait, par ex[emple] 4, je puis faire deux choses : ou bien déclarer la position dune unité par rapport a 3 autres, ou mentionner 4 unités. Dans l’histoire tout se suit, mais tout ne se continue
pas. Dans les anciens enclos d’examens chinois, sept puits suivant la forme de la Grande Ourse. Les Esquimaux croient aux harpons ensorcelés qui, plongés dans la nuit noire de la porte d’une hutte, reviennent couverts de sang fumant. [145] Laissons hurler la-bas antiques (Boileau, sat. 12)°.
tous
ces
damnés
Le maitre Ernest Barberousse fait abattre le vieux calvaire de Fére. La majorité du conseil est composée de
Septembre 1909
105
cantonniers, de facteurs et d’entrepreneurs de voirie,
tous gens de la route.
Nobutes — balosses — Béquillon (abeille) — Piréne.
Comme
par un radieux matin un pré trempé de
rosée, ainsi tous les soleils, comme d’innombrables gouttes, rutilants dans le soleil de Dieu! Subtilement pour subitement
—
Les bétes fausses
p[our] fauves?.
Autrefois Villeneuve beaucoup plus étendu. Des pierres de foyer jusqu’au lavoir de la Sibylle. Les seigneurs de la Tournelle, de la Loua, du Pas S. Georges. , Villeneuve formé en carré contre les vents. Tourné vers une grande place intérieure comme les maisons arabes. Ma premiére communion, 23 mai 1880.
Constitution chimique de la cellule. L’organisation q[ue] n[ous] venons de décrire est édifiée en grande partie a l’aide de composés chimiques extrémement complexes, appartenant a la classe des corps les plus compliqués
que
connaisse
la chimie,
la classe
des
matiéres albuminoides. Le caraétére le plus frappant de ces composés... c’est qu’ils sont tous d’une trés grande inStabilité, c[’est]-a-d[ire] que les éléments chimiques q[ui] entrent [146] dans leur composition ne sont soudés Pun a Vautre [que] d’une facon extrémement fragile. Ils n’ont méme pu se joindre qu’au prix de l’apport d’une uantité considérable d’énergie. Il en résulte quwils sont trés faciles 4 décomposer, remettant alors en liberté Vénergie q[ui] s’est accumulée en eux lors de leur formation. C’est 1a ce qu’implique leur instabilité. ... Dans la matiére /aissée a elle-méme \es affinités chimiques entrent en exercice de fagon a aboutir constamment 4 des composés stables, aux composés les plus Stables, tandis que dans la matiére vivante ces mémes affinités sont employées de maniére a produire
106
Cahier I
des composés instables, de plus en plus instables. Ces deux tendances contradiftoires dans Vutilisation des mémes affinités chimiques trahissent des principes fondamentaux d’aétivité fonciérement dissemblables. Le chimiste ne réalise des synthéses de corps otganiques que par une espéce de violence (Grégoire, le Matérialisme contemporain). Sainte Fare et Saint Faron de Meaux?.
Les inseétes malfaisants. Maitre Quoniam, notaire. — Maitre Grandhurleur®.
A Rheims Dieu-lumiére, le faubourg de Cérés, le Barbatre*.
21-22
sept[embre].
Visite 4 Laon et a N.-D.
de
Liesse. Laon: les 4 clochers sans cloches entiérement
perforés. La cuve S. Vincent. La statue tombale de Jehan d’Assigny, médecin de Charles VI, intermédiaire entre le cadavre et le squelette. Une sculpture gauloise. Céramique du [147] Moyen Age curieuse servant au pavage des cathédrales. Au Musée, une trés belle copie de Rubens par Delacroix. N.-D. de Liesse. Visite 4 Goudelancourt, origine de la famille de mon grand-pére. Sur le chemin tourbiéres. Les Cent et les Cerveaux y sont autochtones. On en trouve encore dans le pays. Avec La Bresse
du
cété
de mon
pére,
c’est une
des
deux
sources fixes de ma famille. Laon de loin. Mon g[rand]oncle et mon grand-pére élevés au petit séminaire de N.-D. de Liesse. Mon
grand-pére, enfant de chceur,
porte la croix devant la duchesse de Berry quand elle vient visiter le sanCtuaire’. Circumdedisti me laetitia (Insc. 4 N.-D. de Liesse)*.
Ps, CHI. Commentaire de la création. Abyssus sicut veStimentum amittus ejus'. Comme un lange. V[oir] la citation de Job plus haut.
Septembre-Olfobre 1909
107
La Sainte Sage-femme capétienne, l’accoucheuse des Rois de France et du Royaume. La plaine autour de Laon comme un grand manteau fleurdelysé?. Pour bien écrire il faut sauter les idées intermédiaires
(Montesquieu)?. 1€T o¢tobre —
Hostel’,
Paroles de Napoléon aprés l’excommunication « Croit-il donc qu’elle fera tomber les armes des mains de mes soldats ? » Quelque temps aprés dans la retraite de Russie la Grande Armée vaincue par le froid lache ses canons, ses aigles et ses fusils.
Paysage en vastes terrasses superposées commencant par des prairies, continuant par des vignes [148] et finissant par des foréts. Cela ressemble a a préface de Tite-Live. Une cascade sous une motte arrondie couvette de vignes sautant un mur vertical. Tout le vin inclus au site mis en perce d’un seul coup de foret#. Patois latin du Bugey: To so hic. Aula (marmite). Cum plwia (nom de la salamandre, gros lézard noir et jaune qui sort aux jours de pluie). Visite du jeune Henrion‘.
Le Léman Rhone.
est comme
un alambic
qui distille le
L’extispicine®. Ils Le cherchent vainement « zuter cognatos et notos», parmi ses familiers et ses connaissances. Sur la route, au cceur d’une profonde forét, des chatrettes conduites par des femmes endormies et gisant sur le dos. Bonne et Albine’.
108
Cahier I
Latone cramponnée au saint olivier donne naissance 4 Apollon et a Diane’. La fontaine du Groin — la fontaine antique de la Doue ou de |’Adoue? avec sous le pré les eaux s’échappant par une conduite de pierre souterraine. Le pré concave ombragé de noyers®. Le méme esprit de démocratie religieuse les conduisit A nous empester de leurs traductions de l’Ecriture Sainte et des Offices divins (De Maistre, Port-Royal)‘. [149] Tout nombre est a la fois un degré et une somme.
16 of[obre].
Promenade
au col de la Rochette,
Hauteville, col de la Lébe. — Avis de ma nomination a Prague.
Les églises séparées sont stériles parce qu’elles n’ont plus d’époux (J. de Maistre)*. Hostel vient soit de Ostium, soit de Hostia. On y a trouvé une pierre portant image d’un taureau et d’un couteau de sacrificateur*. Ossy, Hostiaz, Aoste. — Conjux. Créer, ce n’est que le jeu; convertir, c’est effet de
sa puissance (J. de M.)’.
Les vérités théologiques ne sont que des vérités générales manifestées et divinisées dans le cercle religieux, de sorte qu’on ne saurait en attaquer une sans attaquer une loi du monde (7d.). A propos des conciles : Une souveraineté périodique ou intermittente est une contradiction dans les termes. Car la souveraineté doit toujours vivre, toujours veiller, toujours agir. Il n’y a aucune différence pour elle entre le sommeil et la mort (id.).
Offobre 1909
109
Aucune promesse faite 4 l’Eglise séparée de son chef (d.). Tile ipse omnium conditor et rettor scripsit quidem fata, sed sequitur; Provid.)*.
semper paret,
semel jussit (Sénéque, De
D’un cété le Colombier et de lautre la Montagne de Colére comme deux grands beeufs au lever et au coucher du soleil se caressant de leurs ombres alternativement?, [150] J. de Maistre serviteur de la maison de Savoie.
Rien de grand n’aeu de grands commencements (M.)°. Rassembler
les hommes
c’est les échauffer
et les
rendre spiritueux comme le raisin‘. Crescit occulto velut arbor aevo (Hot., I Od., 12)°. Unumquodque est quod convenit et secundum naturam. Quando ergo movetur ab aliquo extraneo, non operatur secundum se, sed ab impressione alterius, quod ef servile. Homo autem secundum suam naturam est rationalis. Quando
ergo movetur secundum rationem, proprio motu movetur et secundum se operatur : quod est libertatis ; quando vero peccat, operatur praeter
rationem ; et tunc
movetur
quasi ab alio,
retentus terminis alienis: et ideo « qui facit peccatum servus est peccati» (S. Th., Comm. ia Joannem)®. Bossuet parle des moments « ot tout l’étre humain se sent devenir chair ».
Remarques sur l’idée de Justice qui fait le fondement de la Révolution (Proudhon, Michelet) :
19 N’existe pas dans la nature. Un grain de blé en
produit 100, ou
50, ou 4o, ou rien, mais jamais un
seul grain. 29 Analogue au principe de la conservation de la force et réfutable par les mémes arguments : l’effet
110
Cahier I
n’est jamais équivalent de la cause. Principe d’inertie. 3° Tous les étres créés touchent a Vinfini. On est injuste envers un homme si on ne lui donne pas l’infini, et [151] méme avec un hareng femelle chargé d’un milliard d’ceufs. César, si vous lui refusez empire de
Punivers, vous n’étes pas juste envers lui. 4° L’injustice est le principe de tous les contrats. Si ’échange un objet pour un autre, c’est qu’il vaut moins pour moi, ou 4 dire vrai qu’il ne vaut absolument rien, puisque je puis m’en passer, c’est-a-dire le traiter comme s'il n’€était pas. 5° Elle fait disparaitre la liberté et la gratuité de la société humaine. Je vis dans un état perpétuel de banqueroute. Le Christ a libéré homme de la Loi (S. Paul), la voici de nouveau sur nos épaules, non plus la Loi de Dieu, mais celle des hommes,
comme
au
temps de Empire et du Droit Romain. — Contra, la parabole du débiteur exigeant, a qui le maitre réclame cent mines et qui fait rentrer lui-méme ses créances. « Que votre justice soit supérieure a celle des Pharisiens!» — « Cherchez premiérement le royaume de Dieu et sa justice, et le reste vous surcroit. »
sera
donné par
6° Celui-la seul demande la justice qui n’est pas un juste et la liberté qui est un esclave. En vain.
Nom de pays : Lilignod — /ilium ignotum?. 26-27 octobre — Visite 4 M. Th. de la Rive 4 Présinge*. — Renan sort du séminaire le jour méme ou Newman se convertit. — Le 28, je repasse a Hostel. — Le 29 au matin, j’arrive 4 Paris.
Ps. CXVII. retributionem.
Ego exquisivi mandata
tua —
propter
[152] Dans l’Ain les fours banals®,
« Que votre justice abonde scribes et des pharisiens. »
plus
que
celle
des
Odtobre-Décembre 1909
III
C’est vrai, nous ne sommes pas brillants, mais voici le temps ot vous racolez les infirmes et les éclopés?. Je vivais, mais voici que je survis. 3 nov[embre]. Récit de mon ami L. M. [...]2. [157] La vérité catholique ne résout pas les difficultés, mais elle les éclaire, comme on dit par exemple quw’une touche de rouge éclaire un tableau. Elle ne change rien aux éléments du probléme (par ex[emple] le mal, la [158] liberté), tout reste tel quel, mais elle s’y ajoute; elle ne s’oppose pas, tout se compose part sa superposition. Les mystéres de la foi sont du méme ordre que ceux de la nature, par ex[emple] le mystére de ‘la Trinité et le mystére de union de Ame et du corps.
Mementote vinttorum, tanquam vinti®, 20-25 novembre. Premier voyage a Prague’.
Mlle Braunerova. Milos Marten®. Les églises parées toutes remplies de rayons et de petits enfants. Les petites tuiles tuyautées comme les plis d’une fraise 4 godrons®. Départ de Paris pour Prague le mardi 7 déc[embre] a 9 h. du matin. La 17¢ nuit a Stuttgart. La 2€ a Nuremberg. Arrivée le 9 4 Prague par un temps affreux de neige et de dégel. Le miroir dans un miroir.
Des hommes
a barbe noire, mineurs ou forestiers,
buvant sous les sapins une biére qui sent le goudron (prelat). De ces figures que le Créateur n’a pas finies, les unes parce que c’était trop difficile, les autres parce que ¢a n’en valait pas la peine. A Saint Vojtek, 3° dimanche de I’Avent, le prétre dit la messe avec des ornements gris’.
112
Tantum homo (S. Frangois)}.
Cahier I
habet
de scientia
quantum
operatio
[159] D’aprés la légende et A. C. Emmerich, Ste Anne mariée trois fois et mére de la plupart des personnages évangéliques?. Au bout de nos bras nos deux mains, éléments de
toute mesure et de toute arithmétique, a la fois métre et nombre, opération et pouce. L’églisé vendue. Dimanche, 4 Vheure ot jadis on y célébrait les vépres, M. Vhuissier Paillard mettait en vente, dans Péglise méme de Grisy, en Seine-et-Marne, le matériel et les objets du culte : l’autel, les stalles, le confes-
sionnal, les fonts baptismaux, les candélabres, les chasubles, les dalmatiques et les tableaux... La foule des marchands était la, entourant Vhuissier et M. le maire Triboulet, — les vendeurs du temple.
L’église de Grisy était abandonnée depuis deux ans. Elle menagait ruine et il fallait quelques milliers de francs pour la restaurer. M. Triboulet se refusa a imposer la commune de quelques centimes. Seulement Pargent quwil n’avait pas voulu trouver pour l’église, il crut spirituel de ’employer un peu plus tard a construire un clocher laique, beffroi qui fut inauguré part un vin d’honneur. M. Triboulet est le méme citoyen qui fit abattre et jeter dans un fossé les deux croix du cimetiére de Grisy’.
Quid sunt enim servi Domini nisi quidam joculatores ejus, qui corda hominum erigere debent et movere ad laetitiam spiritualem ? (S. Fr.)4. Le Fr[ére] Egide se promenait dans un jardin en parlant aux oiseaux et en chantant, s’accompagnant en guise de violon sur deux batons qu'il frottait Pun contre l’autre’.
Noél 1909 — J’apprends la mort de Ch. L. Philippe emporté en q[uel]q[ues] jours par une fiévre typhoide*.
IQIO [160] 1910 — L’année poignées de farine.
commence
par quelques
Ba, ba, molto dico et poco fa ! (Sermon du frére Egide)'.
Jours des Rois. L’abbé d’Emmaiis en pluvial d’or, mitre en téte et crosse en main, assis sur un trOne devant Pautel, pareil au Pére éternel. [I] attend et bénit les
ministres qui, revétus de chapes violettes et flanqués de deux acolytes, lui apportent successivement a bénir Por, Pencens et la myrrhe?.
S. F[rangois] dans les moments solennels de son existence se mettait a parler francais. Il s’était réservé la France comme pays de mission, parce que N.-S. dans le sacrement de I’autel y était plus honoré qu’ailleurs®.
Le Juif condamné a rester toujours au dehors, extra caStra, a rester un amateur‘.
L’herbe verte mélangée 4 la neige. Le 12-14 janv[ier], voyage a Vienne. émotion a Vaudition de Tannhauser®.
Profonde
Sainte Colette de Corbie. — Recluse dans sa petite maison murée au flanc de l’église, comme
une galle
114
Cahier I
sur une feuille de chéne, comme un parasite du S. Sacrement. Vision [161] de l’enfer, la main comme soudée au barreau qu’elle a empoigné; le diable plus tard lui coince la téte entre deux barreaux. S. Colette arrive 4 la fin du Moyen Age, elle finit la guerre de Cent ans et le schisme d’Occident. Elle multiplie sur tous les coins de la France les sources de grace, les appareils 4 miséricorde. L’état violent cesse, le pape revient 4 Rome et le roi a Paris. Deux femmes, Pune dominicaine, l’autre franciscaine, contribuent a la
fin du schisme?. Le pape Benoit XIII baise l’épaule du prétre qui assume la charge de l’Ame de S. Colette. Rappel a la pauvreté au moment ot lantiquité et Amérique vont étre découvertes. Préparation d’un ouvrage de défense contre les ravages du protestantisme. Crest le temps de S. Vincent Ferrier — dominic[ain] — qui annonce le Jugement et la fin du monde prochaine. I] préche avec une croix de bois, mais Colette recoit du ciel méme une croix d’or. — Son miracle est de ressusciter les morts. Sur tout ce temps s’étend Pimage du Jugement dernier, c’est ’époque des Sépulcres et des Danses macabres. S. Colette au début de sa carriére murée avec Dieu. Comparer les sorciers qui pour communier avec le diable s’enferment dans un lieu étroit?. Le style « Gramidon »’,
[162] Une grande piéce de brocart avec deux trous dedans, lun pour la téte de la mére, l’autre pour la téte de enfant. En termes de blason une fo/, deux mains serrées se jurant alliance‘.
A Emmaiis : Une femme 4 genoux sanglote 4 cété de moi dans les ténébres au-dessous d’un Ecce homo, cependant que dans Péglise sombre, 4 genoux sur les échafaudages ou
Janvier 1970
115
le long des piliers des moines ¢4 et 14 peignent, un cierge a la main. Le moine en priére devant un mur blanc y voit apparaitre image du Christ dont il suit et dessine les contours avec un crayon. La croix dépasse l’homme dans tous les sens. Pour celui qui croit tout se passe dans or comme
dans les mosaiques.
Les corps s’empéchent, les esprits ne s’empéchent pas (Leibnitz).
)
. )
||
trange solennité donnée 4 la prise de Jéricho, la , Cité réprouvee : Jericho autem clausa erat atque munita, timore filiorum Israel, et nullus egredi audebat aut ingredi. [163] Déxttque Dominus ad Josue: Ecce dedi in manu tua Jericho, et regem ejus, omnesque fortes viros. Circuite urbem cuncti bellatores semel per diem : sic facietis sex diebus. Septima autem die sacerdotes tollant septem buccinas quarum usus est in jubilaeo (cf. les trompettes de Apocalypse), e¢ praecedant arcam foederis: septiesque circuibitis civitatem et sacerdotes clangent buccinis. Cuma@ue insonuerit vox tubae longior atque concisior, et in auribus vestris increpuerit, conclamabit omnis populus vociferatione maxima, et muri funditus corruent civitatis, ingredienturque singuli per locum contra quem Steterint. Les prétres devant l’arche... ef reliquum vulgus arcam sequebatur... Praeceperat autem Josue populo (dicens) : Non clamabitis neque andietur vox vestra, neque ullus sermo ex ore vesiro egredietur: donec veniat dies in quo dicam vobis: Clamate et vociferamini | (Les anges? le peuple saint dans sa révolution autour du peuple maudit? Chaque ordre passant tour a tour devant les portes? Les Anges gardiens entrant « par le lieu en face duquel ils sont placés » ? La clameur qui salue ’Epoux dans la parabole des vierges? Les
116
Cahier I
trompettes qui sonnent le [164] dimanche, l’avertissement sacerdotal et liturgique.) re? circuit — Ef arca reversa in castra mansit ibi. Igitur Jesus de notte consurgente... Et dixit Jesus’ ad omnem Israel: Vociferamini ! tradidit enim vobis Dominus civitatem. Sitque civitas haec anathema: et omnia quae in ea sunt Domino: sola Rahab meretrix vivat, cum universis qui cum ea in domo sunt, abscondit enim nuntios quos direximus. Vos autem cavete, ne de his quae praecepta sunt quippiam contingatis et sitis praevaricationis ret, et omnia castra Israel sub“peccato sint atque turbentur. Quidquid autem auri et argenti fuerit, et vasorum aeneorum ac ferri, Domino
consecretur,
repositum
in thesauris ejus
(Josué, chap. VI)?. Ammon et Moab issus de l’inceste des filles de Loth, ancétres du Sauveur. D’Ammon est issue la fille de Pharaon, roi d’Egypte, que Salomon eut comme épouse, et de Moab, Ruth.
Je le vis encore dans un cceur qui résistait 4 son amour : il avait les mains [165] sur ses oreilles sacrées et les yeux fermés disant : Je n’écouterai point ce qu’il me dit et ne regarderai point sa misére, afin que mon Ceeur n’en soit point touché, et qu’il soit insensible pour lui comme il l’est pour moi (Vision de la B[ienheureuse] Marguerite-Marie)*.
Discussion de l’Ecole laique 4 la Chambre. Etrange malédi€tion de la raison sans Dieu qui ne sait plus ce que c’est que le bien et le mal. (L’arbre de la science du bien et du mal!) Ils ne savent plus parler aux petits enfants et sont confondus par eux. Ils lui demandent du pain et ils lui donnent une pierre pour la jeter au Christ. Ils lui demandent un ceuf et ils lui donnent un scorpion qui se replie sur lui-méme et s’enfonce dans le cceur son dard empoisonné’. Les paraboles, non obscures mais aveuglantes par excés de clarté, parce qu’elles rendent plus proche le Dieu incompréhensible®.
Janvier-Février 1910 Discussions des écoles 4 la Chambre.
ciel envahissant Officiel? !
les caves
Lettre du P. Baudrillart.
marié civilement.
117 Les eaux du
ot s’imprime Tresnea malade
le Journal a Pau et
Je lui écris?.
« Donner» au nfeutre], dans le sens de charger. (Le chauve) pour lui couper les cheveux on se sert de ciseaux de brodeuse’.
[166] L’inondation a Paris. Les séminaires et les couvents servent de refuges aux inondés. L’eau mine tout Paris par en dessous, par les canaux /artificiels, comme la pensée impie mine la civilisation. Les étoiles brillent encore, mais les lumiéres de la Chambre sont éteintes‘. L’eau est A un métre de hauteur
dans N[otre]-D[ame],
jusqu’aux pieds de la statue
de N.-D. de Paris. — Une cométe dans le ciel.
Les clochers du Tyn barbelés comme un épi d’orge’. L’Elbe, en tchéque Labe, la profonde, qui creuse ens’insinuant. — Cf. Lébitz, aimer, caresser, s’insinuer®.
Le chandelier 4 sept branches (9 en réalité)’.
A la Chandeleur la multiplication des cierges entre les mains de l’abbé comme celle des pains. Croire, c’est faire crédit 4 Dieu qui nous a donné sa parole, le Verbe.
La musique italienne revient comme de l’ail (Cavalleria rusticana )*. Veritatem facientes in caritate (Eph., IV, 15)*.
118
Cahier I
Le 9 février, 4 3 h. du matin, 8, Riegrovo nabiezi
(mercredi des Cendres), naissance de Reine Amélie Zdenka. « Souviens-toi que [167] tu es poussiére et que tu retourneras en poussiére!» L’enfant est solide et bien constituée, bien que née un mois avant terme. Enfant de voyageurs, il nait au milieu d’un déménagement dans un logis de hasard, et l’on fait son lit dans une malle. Au jour grande neige?. Ces grains de porcelaine qui servent de poids aux pharmaciens. Pour bien traduire, non seulement les mots, mais les
valeurs. Un mot qui a le méme sens n’a pas le méme poids et la méme intensité?. Emmeénagement au 2 Riegrovo nabiezi, le 14 février. Le P. Hildefonse, du Couvent d’Emmaiis.
Il nous est commandé d’étre pauvre, simple, doux, humble,
chaste,
patient,
tempérant,
zélé, obéissant,
daimer Dieu par-dessus tout et le prochain comme nous-mémes. Il a depuis deux ans sa pendule chez Vhorloger, comme on a un parent dans une maison de fous.
La maison préte, les peintures achevées, les parquets cirés, les derniers meubles en place, le fourneau de la cuisine allumé, la couverture du lit ouverte, la jeune femme du bout de son doigt met le balancier de la pendule en mouvement.
[168] « Manquer de parole » 4 quelqu’un.
X° station — Priére pour les blessés dont on décolle les bandages, pour les pauvres petits enfants fiévreux won change de chemise. Dans toutes les blessures "amour se souvenir de N.-S. dépouillé?,
Février-Mars 1910
119
Ce n’est pas assez de vendre les églises de village, on les fait sauter a la dynamite.
Lettre touchante de la sceur de Ch. L. Philippe me remerfciant des vers que j’ai mis dans la N.R.F.}. Chaque ange, d’aprés S. Th[omas] d’Aquin, est une espéce a lui seul: Species dicitur a spettando : ideoque primo significat formam spettabilem seu exteriorem apparentiam. Et en effet :species super genus quod est quiddam indeterminatum
addit formam,
eee
et perfettionem
rationabilitatis (il s’agit de l’e a. éce] : homme). (J. Pacius supler| Intr. Porphyrit?.) Caractéristiques de Vindividu : forma, figura, locus, Stirps, nomen, patria, tempus.
6 mars 1910 — Dimanche du Laetare — Messe rose 4 Emmatis*. Baptéme de la petite Reine dans la petite église de Saint [169] Vojteck, lair si noble, si gentilhomme. Les fonts baptismaux en étain. Aprés le baptéme le prétre prend l’enfant dans ses bras et l’éléve comme une hostie vers une grande statue de la Vierge. Mlle Braunerova marraine. A la messe, évangile de la multiplication des pains (en caréme). — « Panes hordaceos», Valiment le plus rustique et le plus grossier. Tout est bon a N.-S. pour nourrir le peuple. « Les poissons »: nfous] sommes en caréme. « Colligite fragmenta ne pereant. » « Fugit in montem*.» Le soir au jardin de Petrin le premier rossignol. Ramures fines des bouleaux’. Un feu si vif et si clair qu’il ne fait pas de fumée (d’Urfé)*. Le /ituus des anciens augures, en forme de point d’interrogation, comme la crosse des évéques (les fougéres naissantes)’.
120
L’instin@,
Cahier I
infaillible
chez
animal,
ne
doit
pas
’étre moins dans le domaine de l’esprit (Fabre).
Et Dominus in circuitu populi sui, Ainsi du fond dune ville on voit de toutes parts les collines hérissées de clochets. [170] Cas du minotaure typhée dans Fabre : l’insecte accomplissant pendant plusieurs mois un énorme travail sans prendre aucune nourriture : cest le pendant du radium. Ainsi l’énergie animale peut avoir une autre origine que les échanges chimiques?.
Gonfle, adj[ectif]. Le lavement des pieds et le lavement des mains.
La distance des étoiles de la terre nous est inconnue et reste jusqu’ici incommensurable’. Ainsi le systéme solaire dont les éléments sont connus et mesurés. Puis sans intermédiaire les étoiles incommensurables. Comment expliquer dans le cas d’une création purement mécanique et d’une matiére d’abord également répandue cet étonnant hiatus? La matiére n’est pas pensable sans mouvement, le mouvement n’est pas pensable sans une composition de mouvements. Comme dans un crane on ne trouve plus aucune trace de cervelle, mais une poussiére noire d’excréments et d’élytres, reste des tribus dévoratrices dont la derniére a mangé l’avant-derniére.
_ Réunion de gros banquiers et industriels allemands, jouant au taroch [sz]. Cela rappelle le grave remuement de gros bousiers dans leut tarte. [171] Chrétiens, nous ne tombons la croix tombe avec nous’.
jamais sans que
Nous obtenons l’image de Jésus avec son sang et nos crachats®,
Mars 1910
121
Pour comprendre la douleur de Marie devant la croix, la mére dont on étend la petite fille sur la table
d’opération!.
Plus précieuses que celles de la femme la plus aimée, les faveurs de notre enfant malade, cette petite main quw’il nous donne?.
« Le mouvement n’est pas pensable sans une composition de mouvements », c’est-a-dire sans une organisa-
tion, sans une fin, sans une figure préétablie. Cela rend bien absurde la chiquenaude de Descartes.
L’assoupissement des Rameaux).
précéde la trahison
(Ev[angile]
Avant la Croix la bénédidtion des rameaux. [172] Vénus le matin qui va 4 la rencontre du soleil®. Sema (signe) — Simius —
Simarre — Simagrées‘.
Un chemin de croix ot l’on ne verrait pas N.-S. Le charmant petit cloitre presque campagnard de Lorette avec ses peintures. S. Barbe, patronne de la mort®, Ste Ottilie contre les maux d’yeux, S. Liboire contre les douleurs de calcul,
Saint Florian contre les incendies, Saint Stapin contre les maux de pieds, Saint Blaise contre les maux de gorge, Saint Jean Népomucéne, patron des calomniés. Quem quaeritis ? — Jesum Nazarenum — Ego sum — Et abientes retrorsum prociderunt in terram’.
C’était une croyance autrefois que le jour de lAnnonciation avait été a la méme date que le Vendredi-Saint, et que quand ces deux dates se confondent des événements merveilleux se préparent,
« Stupenda eveniunt», dit Nicolas de Serquigny (par exfemple] 1429 pour Jeanne d’Arc). Indulgence a N.-D. du Puy pour ces années. — Cette année, 1910.
122
Cahier I
Dispersi sunt lapides santtuarii in capite omnium platearum. Cela s’est réalisé littéralement 4 Grisy ow les pierres de ’église démolie ont servi 4 paver les routes’. Cathares —
cafards.
[173] Louis XVIII meurt en réprouvé, en refusant les sacrements. Dieu en damnant les méchants versité (Favre-Gilly)?.
exauce
leur per-
Paques, 27 mars 1910.
L’4me supérieure conservée dans un bocal que l’on place dans un tarare pour la disperser?. Le véritable instrument de découverte scientifique, ce n’est pas le syllogisme, c’est la comparaison‘. Elle repose sur le principe de Phomogénéité de toute la création. Elle va du particulier au général par coups de téte®. Si Socrate est mortel, alors c’est que tous les
hommes sont mortels. Voyons si c’est vrai.
"Hiwkev
attois
e€ovaiav téxva
Oeod yevéobar
(S. Jean)s, Humus —
humilis —
homo. —
Départ des S. Marie,
1/4/107. Toute création est une critique comme le sculpteur qui dégage la statue et qui rejette les débris®. Rougeole des enfants. 2/4. — Visite 4 Kolin®. La fabrique d’alcool. La vapeur bleue d’acide carbonique comme une fumée de cigarettes flottant sur les foudres de mélasse. La fabrique de cyanure. Tout ce qu’on tire d’une bettetave, un aliment, un régénérateur du sol, du sucre,
Mars- Abril 1910
123
de Palcool, un poison violent, de [174] quoi faire de Por, des photographies, du verre, de Vengrais, du charbon. Solovieff.
Dieu
se fait homme
au
moment
ot V’h[omme]
avec César se fait Dieu. L’idole de Daniel embléme de la civilisation moderne: la téte d’or pur, la science athée, la poitrine d’argent, le coeur et ce qui embrase le monde, le ventre d’airain, pas d’entrailles, le fer et Vargile des deux colonnes,
droit de la force sans dieu et volonté du peuple}. Les moines du Mont-Athos par une série méthodique de pratiques et d’exercices arrivent a voir « la lumiére du Thabor » (comme les Indous). Et tres sunt qui dant testimoninum in terra : spiritus, sanguis et aqua ; et hi tres (aa masculin) unum sunt (V [oir] Ile Ode)?. La trinité créée répondant a la Trinité incréée (?)
5/4/10. — A Emmaiis, au cheur perfon&ion du « ludus pascalis» du moyen age admirable de simplicité, de grandeur et de fraicheur. Le drame sacré traduit tout entier en évolutions liturgiques. Diner au couvent au cété de l’abbé.
Ruben primogenitus meus, tu fortitude mea et principium doloris mei; prior in donis, major imperio. Effusus es sicut aqua, non crescas (Gen., cap. XLIX, 3, 4)*. [175] Haec vocabitur virago quoniam de viro sumpta est (Genus,
Est matrimonium simile Euchariftiae, quae non solum dum fit, sed etiam dum permanet, sacramentum eS. Dum enim conjuges vivunt, semper ecorum societas sacramentum est Christi et Ecclesiae... Nam negari non potest ipsos conjuges simul cohabitantes, sive externam conjugum societatem et conjunttionem, esse materiale symbolum externum Christi et
124
Cahier I
Ecclesiae indissolubilem conjunttionem referens; quemadmodum in sacramento Eucharistiae, consecratione peratta, remanent species consecratae, quae sunt symbolum sensibile atque externum interni alimenti spiritualis (Bellarmin, De matr.)'. Du temps d’Ottokar IT la Bohéme s’étendit jusqu’a lVAdriatique et 4 Italie. Cela justifie la géographie du « Conte d’hiver »?. Cette musique
qui n’est pas mauvaise,
mais qui
donne envie d’en entendre de la bonne.
Coup-la-fronde (nom propre de douanier au Journal officiel)®.
trouvé
Le Christ sous la vis et la constriction de nos péchés
exprimé, perdant le sang par les yeux, les oreilles et le nez, par tous les pores.
La Véronique. L’image du Christ faite de nos crachats, conservée comme
une hostie‘.
[176] C’est Pédifice qui prouve le fondement caché.
Non enim possumus quae audivimus et vidimus non loqui (Adtes)5, 17/4/10. Visite
a Rostock chez Mile B[raunerova].
Les quinze empéchements
dirimants
du mariage.
Error, conditio, votum, cognatio, crimen, Cultus disparitas, vis, ordo, ligamen, honestas, Amens, affinis, si clandestinus et impos, Sz mulier sit rapta, loco nec reddita tuto.
Per quae peccat quis per haec et torquetur (Sap., XI, 17). Prima virgo eft santa Trinitas (S. Grég. de Nazianze)’. Caius dixit coelibes quasi coelites et coelestes (Quintilien).
Abril 1910
125
Virginitas es splendor. Cest Vimmortalité qui lutte contre la mortalité (Grég. Naz.) O quam pulchra et caSta est generatio cum claritate !
(Sap., IV, 1)?.
Ktre né par excellence. La naissance, chose énorme. Par excellence ce qui ne se fabrique pas, ce qui ne se trouve pas, ce qui ne s’acquiert pas.
Pour que rien Le Cyrénéen ne Qui sait si a ce bout de la Vraie
de la croix du savait pas qui moment [177] Croix que nous
Christ ne soit perdu. on le forgait daider. méme ce n’est pas le portons??
Le démon chassé par la priére et le jedne. Nous ne réduisons aliments.
notre
imagination
qu’en
lui refusant
les
Les rois semblables 4 Dieu qui obéit toujours a ce qwil a commandé une fois (Card[inal] de Retz)‘. Le droit des peuples et le droit des rois qui ne s’accordent jamais si bien que dans le silence. La salle du Palais profana ces mystéres (7d.) >. La grande aire de Bohéme ov pendant un siécle le fléau hussite égruge toute la chevalerie d’ Allemagne.
Toute la nature est une série d’exploitations superposées. Un milieu existant survient un étre qui lutilise a ses fins. Par ex[emple] la terre, la pomme de terre, Panimal qui mange la pomme de terre, le parasite de cet animal, etc. Il n’y a absolument rien dans le terme antécédent qui explique celui qui lui est superposé. Il n’y a absolument rien dans la terre qui explique la pomme de terre, il lui est totalement impossible de Vengendrer, elle s’en passe, et le tubercule ne peut s’en passer. Exploitation d’autorité, zwposée et sans demander la permission, pas plus que l’enfant a la mére®.
126
Cahier I
Ele&tions du 24 avril. Impression accrue
d’enlise-
ment. Force invincible de la matiére inerte et stupide'. Le Christ demande d’abord qui il est. L’un dit une chose, autre une autre. Puis il interroge [178] les Apdotres (les évéques) et ils se taisent. Le seul Pierre répond (ap[ud] Solovieff)?. Jésus condamné 4 mort. La Vie elle-méme, le principe de toute vie dans le ciel et sur la terre. Sa présence avec nous n’est plus tolérable®. Qui finxit singillatim corda hominum* (Ps. Contre V’hérédité.
XX XIII).
Idée pour un drame : VarchiteGe vient de finir une église (dans mon esprit l’église S. Nicolas)*. Tout est préparé pour la féte d’inauguration du lendemain. La veille au soir, toutes les portes fermées, il montre
4
quelqu’un ce qu’il a fait.
Le vieillard debout dans un souterrain qui lit un énorme livre sur un pupitre a la lueur d’une lampe de cuivre®, Le diable hait les enfants. Les sacrifices d’enfants des
sabbats, les meurtres rituels, le malthusianisme.
Le diapason. Souvenir de cette nuit de folie 4 travers la Belgique et la Hollande.
Les
deux
automobiles,
la fourrure
achetée pour elle 4 Anvers. La Meuse partout rencontrée, sans ponts ni bacs, nous barrant partout le
passage. L’homme qui veut nous donner des coups de couteau. Passage au petit jour 4 Gorcum. L’arrivée 4 Utrecht, partie. Ce vol de agence. Aspect de cette ville vernissée qui me semble atroce et inhumaine. [179] Veille des Rameaux, avril 1905. Retour a Utrecht. Promenade par devant et par derriére ce funébre logement du 101 chaussée de Charleroi. La robe de
Abril-Mai. 1910
127
chambre encore au mur, la bouilloire de cuivre rouge. La médaille de S. Benoit mise sous la grille. Le lendemain, cherché Robert 4sa pension. Namur. En automobile 4 Chivetogne. Retour 4 Paris. Larmes 4 N.-D. Paques. Le lendemain cette lettre de Wiesbaden de Lintner. Et depuis aucune nouvelle. En Angleterre, parait-il. V. en Belgique. Mai 1905, Bruxelles encore. Expieikeia (Arist.). A sweet reasonableness. Idée d’équité et de douceur?.
Charis, a word which can hardly be translated, as it means not only kindness, grace, or favour, but also the reciprocal feeling of gratitude for kindness. The Charites or Graces were the Greek personification of reciprocal feelings of kindness. Hence the temple of the Graces symbolized the mutual services of men to each other, on which society depends?. Elles étaient trois. Combuger, remplir d@’eau un tonneau pour en imbiber le bois. Poulain, piéces de bois assemblées qui servent pour descendre les tonneaux — et pour saigner les cochons. Une des pires sources d’erreurs philosophiques est de considérer l’espace, le temps, la matiére, l’esprit, etc.,
comme susceptibles d’une existence séparée, tandis quwils n’en ont aucune en dehors des étres concrets que Dieu seul a créés. [180] Comme le dit Aristote, la matiére est inconcevable sans la forme. De 1a ces questions oiseuses et absurdes : Comment Il’espace peut-il finir? etc. C’est la fin qui donne son sens a ce mouvement dont tout est constitué. Prudens quaestio dimidium scientiae ef. Voyage a Pilsen, 7-8 mai. Visite a la Grande Brasserie Bourgeoise. Les deux vieux rigolos a gros ventres. Les pages d’antiphonaires au musée. La chimie, étymologiquement est Part de Cham. Féte de S. Jean Népomucéne le 16 mai‘.
128
Cahier I
Idée pour une fin d’aéte. Quelques fusées, s’élevant dans l’air, le soir, la campagne silencieuse et chaude?. Une belle femme
rousse avec sa téte chargée d’un
lourd chapelet de turquoises.
Une longue Aurélie qui rit dans les lilas. Féte de nuit au palais Waldstein. La loggia. La pleine lune. Une figure de jeune fille qui vous regarde et ot le sourire va apparaitre. (L’Ascension, la résurrection on remonte de l’eftet a la cause.
des corps.) Comme
Les lourds harnais des eaux chargés d’argent. Thérése de Jésus comme un custode [181] resplendissant ot les saintes espéces se conservaient inaltérées dune communion 4 l’autre. La croix comme un croc qui va arracher la seconde personne a la Trinité’. Prague, le 3 juin 1910 Féte du Sacré-Cceur.
CAHIER
Ila
1908
[1] Mars? est un vieux monde quia des rides — craquelé et lisse? comme une vieille porcelaine — une vieille boule chenue et ridée. [2] Sur Mars. Article de E. Vincent Hervard, Fornightly Review, aout 07.
Les calottes des pdles ne sont qu’une trés mince pellicule de gelée blanche. Pas de relief. La pression atmosphérique est de 2 1/4 au lieu de 15 livres par pouce carré. Marts recoit moitié moins de la chaleur solaire. La température a la surface est évaluée 4 —34°. Course® en zigzag autour du soleil. Année de 687 jours terrestres, 669 jours martiens. Chaque saison est double de la nétre. En vertu de la théorie cinétique des gaz, Mars par suite de son faible volume est incapable de retenir les gaz qui composent latmosphére et spécialement la vapeur d’eau. Les canaux sont probablement des lignes de rupture volcaniques permettant l’échappement d’assez d’eau et d’acide carbonique pour qu’il se forme un peu de végétations. 1/9° de la terre.
132
Cahier II a
[3] Man’s place in the Universe par Alfred Russell Wallace Chapman & Hall — London’. Févyrier 1908.
Le drame de la famille et de la terre un ensemble de drames. Lieu : emplacement de l’abbaye d’Igny. Convalles Bernardus amat*. Un citque de terre labourée avec des sources entouré de foréts de trois cdtés. Sujet : 1° la séparation de l’Ame, la révélation par
enfant des puissances incluses et nouvelles, une nouvelle combinaison. La crainte. Jalousie du pére contre le fils. L;>homme contre Dieu en lui. L’incrédule pére de prétre. 2° la terre cultivée d’abord par vocation, par attachement naturel et juridique, puis par profit. Concurrence de toute la terre ouverte par les chemins de fer. Divotce. 3° la vérité catholique contre l’attachement local. Point de patrie que le ciel. Salutaire?. Un monastére acquis comme bien national et reconquis a la fin, [4] Lapides Sion lugent quia nemo eS qui veniat ad solemnitatem. Putasne mortuus homo rursus vivat' ? Tu ne préféreras point l’étrangére et la fille de Pétrangére. 1€T drame — Premier Empire. La noble, le défroqué révolutionnaire,
fils de bticherons
sorciers,
préfet,
général, policier? Le pape Pie. Elle l’épouse pour le sauver et lui donne toute l’ancienne société par contrat de mariage’. 2° drame — Le chemin de fer. Le divorce. L’essaim qui se sépare. En méme temps ou séparé. L’optimisme triomphant, la passion charnelle,
’épouse
restée seule, solitaire,
enceinte, moissons, gardant la demeure dans une foi invincible®.
1908
133
3° drame ?Reconnaissance de la terre. Voyez comme elle ressemble au ciel. Ou le pére astronome devenant aveugle. Le fils médecin, le petit-fils prétre? La fille de Vancienne aimée. Adieu a la beauté de ce monde}. Ce sujet me plait 4 cause de beaucoup d’idées entremeélées. [5] Génération du fils. La femme qui sent une bonne odeur?. La joie Consiste 4 contempler les choses qui existent pour toujours. Les notions de l’intelligence sont éternelles, puisqu’en soi elles n’ont ni commencement ni fin. L’esprit produit des choses éternelles. C’est Dieu qui rend toutes les choses intelligibles par une proportion avec lui’. Autre idée — Paques.
L’enfant qui meurt en naissant pareil au soupir d’un coeur dévot. L’enfant vermeil et tout nu avec son bracelet d’or au poignet gauche‘. Aprés le grommellement et le rauque effort et le confus sanglot entrecoupé le son juste enfin s’élance du long gosier de la trompette d’argent en un cri virginal. Toussaint Turelure
—
Chopin.
Le curé Badilon — Le pape Pie. Anne de Séfontaine — Sibylle — Sygne’. La vision est perpendiculaire — L’audition succession dans le méme plan. — Plans différents.
par
AB est contingente, CD est contingente, mais le rapport
de AB
4 CD
est éternel, intelligible, indé-
pendant du fait. De méme le bleu est passager, le jaune est passager, [6] mais le rapport du bleu et du jaune est éternel’.
134
Cahier II a
Ut si fieri posset transiret ab eo hora (S. Marc). Influence de la perversité de "homme sur la nature : Usquequo lugebit terra, et herba omnis regionis siccabitur propter malitiam habitantium in ea? Consumptum est animal et volucre, quoniam dixerunt: Non videbit novissima nostra (Jér., cap. XII). La terre non consacrée.
Pastores multi demoliti sunt vineam meam, conculcaverunt
partem meam: dederunt portionem meam desiderabilem in desertum sobitudinis. Posuerunt eam in dissipationem... quia nullus est qui recogitet corde (id.)%. Pas seulement des racines. La fleur, la graine volante. Parenté du terroir vers toute la terre.
Nocera, Impératrice d’Italie*. Approfondissement — moments — dans une immobilité croissante® : la jeune fille, l’épouse, la mére. Pensée de Séfontaine... Romaine‘. Les chemins de fer — Drame composé d’un départ et dune arriveée. Le mois de Marie — l’Immaculée Conception. [7] Les Carmes
qui aiment les collines séches et
aromatiques, les Bénédictins les lieux bas et humides,
et d’autres une chaire au milieu des vignes, une halte sur la route poudreuse. Le pignon de Chinchy*. Plusieurs jeunes filles?
4° drame —
La fille adultérine, le fils. —
astronome, le fils q[ui] se fait moine®. Amen, Cantalice.
Le pére
Sans date
135
Révé a ?homme quia d’une autre femme un enfant
qui ressemble a sa maitresse antérieure?. Fin. Communion
et non communisme. dans les fruits de la terre.
La communion
Corona benignitatis Anni Dei?. A rechercher : le cérémonial
du sacre des Rois de
France.
Anne
de Coudfontaine’.
Le pére aveugle-né qui tate ses enfants et les recon» nait en les embrassant. [8] Juvence et Jovinient. Discours de Juvence. — L’ Abbé de taille colossale, a carrure de hiérophante, avec une grande barbe noire en trapéze. Rudel et la Comtesse de Tripoli®. Tour d’ivoire aux vétements
deux fois teints d’ot
découle la myrrhe et la casse. Marie
conférant
dans
son
cceur
consetvait
toutes
ces paroles.
Je chanterai vers toi sur la harpe décacorde. Caractére de Cofifontaine : ? L’homme de la fm, il ne voit en tout que des moyens (Sa 17¢ femme |’avait dompté) (par les sens ?).
Mélancolie de ’h[omme] d’attion. Agir est toujours par un autre ou 4 cause d’un autre ?Général. Le droit
comme
de la waissance
—
Le
roi et
les nobles
des fleurs en leur saison. Acceptation
société comme CLAUDEL V - 8
de la
d’une autre nature. 8
136
Cahier Il a
Leur sang semé sur mon sang. Je suis né avec toi. — La naissance contre la fabrication. Le nom — La terre passée en q[uel]q{ue] ch[ose] d’éternel?. Coache, Maquenchun.
Il y a quelque chose de plus fort que le vin pour une femme, c’est d’étre belle?.
Rincer®.
[9] In fine : le semeur.
Le caraétére plus rare que l’héroisme. Entre deux mots il faut choisir le moindre. Drame : différence de la femme aimée et de la femme
possédée. Elle renonce a étre but pour étre mére.
comme un taureau la basse église de S. Thomas de Fond d’Ardenne‘. Un acte entre trois femmes, fiancée®,
Rusbrock* —
la mére, la veuve,
la
S. Hildegarde (R. Chamonal)’.
Le trésor de Poraison —
Le custode plein de manne
(pyxide)®. Son orient comme 4 une perle. On peut étre a la fois un fonétiste et une phoutue béte.
Il parait que beaucoup de direfteurs de théatre sont homosexuels. Cela me rappelle mon cousin Bedon qui est marchand de vin et qui ne veut boire que du cidre,
Sans date
137
Un drame sur les Juifs avec le grand Chandelier 4 sept branches (9 godets en réalité). Une cantatrice juive?. Un drame en un seul ate avec des femmes [10] seulement pour personnages?. Qw’il est gentil! il ne lui manque d’une jolie femme que la beauté et le sexe’.
le divin jeune homme, ce corps odorant comme un cédrat de Semen‘. « La douce Espérance.» Une comédie sur l’espéfrance avec pour personnage central un h[omme] ' @affaires, incapable de résister 4 toutes les ouvertures que la Fortune lui fait, semant au hasard de tous les cétés, trahissant sans scrupule ses femmes,
ses amis,
trahi lui-méme. A la fin captant la fortune d’un vieux bonhomme pétre ou oncle de la femme qu’il a aimé[e] et qui l’a trahi, tirant successivement
de sa serviette
d’abord un petit soulier de femme, puis un atte d’association. Quand tout est fini et qu’elle est dépouillé [sic], elle entre. C’est le dénouement. — Un jeune h[omme] faible et gourmand avec la rose rose. — Un grand ceil froid et inintelligent de jeune fille®. Les
3 religions
chinoises
complémentaires
lune
de l’autre. Le taoisme, divination, bonne aventure.
Les coups réguliers dans les monastéres bouddhistes, comme on compte pour s’endormir. Confucius parle du « Grand Extréme ». Idée de spontanéité dans la nature, un fait 2 qui fait 4, etc.
Boddhisatva* Poussahs. [11] Les pousahs [sic], les protecteurs. Les dieux 4 la porte du temple, les dieux aprés les disciples. Double sens des mots « esprit » et « essence » (en chinois aussi).
138
Cahier II a
Pour les taoistes les étoiles sont l’essence des choses sublimée. Les incarnations d’étoiles fréquentes chez les T[aoistes]. Les dieux dans les étoiles. L’étoile polaire, le Grand Roi des Cieux.
Les dieux représentés sous une forme triple. Les dieux présentent leur rapport chaque année. Tsen Shin, dieu de la richesse.
Le terme chinois pour religion est £aon, instruction. Les 3 relations et les 5 vertus. Les examens — Obliger a lunité d’éducation uniquement par les programmes. Le péché est un acte qui prive ’homme de son selfrespect et blesse son sens de la justice. Péché en ch[inois]: say. J’ai péché contre vous, signifie : Je vous demande pardon, ou je vous serais obligé. Confusion de la peine et du péché. B[ouddha] sauve du 1@ plutét que du second. Le bonheur est dans la tranquillité. Pas idée de rédemption mais de guérison. Bouddhisme : le faux et le vrai. Confucius : le juste et injuste. Taoisme : le grossier et le pur. Alchimie. (Religion in China, pat J. Edkins,
Tribun & Co., 1884"). [12] Suite « La mort est la dissolution de la vapeur de trois pouces. » Shin, Pame, Vopposé est hing, forme. Culte du principe — Le nom, le verbe. Le paradis du ciel de Ouest?. Amitabha — Nan ou a mi to fou’. Les Ch[inois] ne se marient pas dans les familles qui ont le méme caractére (contre Mahomet).
« Chaque pierre ici a son souvenir et pourrait raconter une étrange histoire. » Surtout les pierres que l’on a dans la vessie. Quw’il sache que c’est le patrimoine d’un dieu!
Sans date
L’hypocrite
—
139
Jovinien de Taillehache.
Fleur double et stérile.
Fable : L’Homme qui court aprés la Fortune et la Femme qui l’attend dans son lit. A Tientsin le rabbin qui ayant perdu la foi s’était fait bijoutier. Pour un bal travesti ’entrée des Conjon@ions : Ou, Car, Si, Mais... Le dialogue de Couac et de Parce que.
Tu rappelles ces jours blancs, tiédes et voilés Qui font se fondre en pleurs les cceurs ensorcelés (Baudelaire)?. [13] Sur le len SubStantia angeli non est subdita loco ut contenta, sed est superior eo ut continens, unde in potestate ejus et applicare
se loco prout vult, vel per medium vel sine medio (motu etiam non continuo). Locus angeli non accipitur et aequalis secundum magnitudinem, sed secuncum contactum virtutis.
Dum angelus movetur localiter, applicatur ejus essentia diversis locis; animae autem essentia non applicatur rebus quas cogitat, sed potius res cogitatae sunt in ipsa. Motus angeli non dependet ex motu coeli (S. Th. Aq., I a, LIU, De motu angelorum). Question de la bilocation. S. Th. neg[at]. « Un ange ne peut étre a la fois dans le ciel et sur la terre*. »
Q. 52. Note. — Locus definitur ab Ariftotele (4 Phys., c. 6) superficies prima, immobilis, corporis ambientis seu terminus vel finis continentis, immobilis, primus.
In hac definitione superficies ponitur ut genus, in quo locus convenit cum coeteris cujusque naturae superficiebus ; coetera vero adjuntta vicem gerunt [14] differentiae. Locus quidem concipitur ut quoddam ambiens, cujus extremae lineae claudunt, ut ita loquar, vacuum quoddam a locato repletum. Quae extremae lineae quamvis materialiter mutentur, tamen formaliter ut circumscriptivae corporis locati, eaedem
140
Cahier II a
immobilis perseverant. Unde dicimus quod homo Stans immotus in flumine sit semper in eodem loco quamvis semper circa ipsum removetur superficies aquae. — Situs est disposttio partium corporis locati in loco. — Spatium eft diftantia illa quam intercedere intelligimus inter unum et aliud corpus vel inter partes unins ejusdemque extensionis (Zigliara, Summa Phil., t. 1). Esse in loco dicitur dupliciter. Circamscriptive... (L’ange) diffinitive aliquid est in loco quando ita determinatur ad unum locum, ut illo quasi finiatur sen diffiniatur, nec possit simul alium locum adaequatum occupare — Sacramentaliter — Ubique?. Per applicationem virtutis angelicae ad aliquem locum qualitercumque dicitur angelus esse in loco corporeo (S. 'Th., Tap lilaa% Angelus esse in loco nihil alind est quam perfette et immediate continere [15] illum in genere causae efficientis (Cajetanus)‘. SubStantia incor porea sua virtute contingens rem corpoream, continet ipsam, et non continetur ab ea; anima enim est in corpore ut continens, et non ut contenta; et similiter angelus dicitur esse in loco corporeo, non ut contentum, sed ut continens
aliquo modo (S. Th., loc. laud.)§. Un grand nombre de vibrations consécutives cependant ne forment qu’une note. C’est VPoreille qui fait cette note, en y étant préparée et accordée. Toute la musique ne serait donc due qu’a « l’imperfetion » de notre oule’,
Le lieu ne s’établit que par rapport et comparaison’. En dehors de Péternité il n’y a que le mouvement, ou temps; en dehors de l’unité il n’y a que le nombre, ou espace. Il faut 3 pour toute fermeture. Les 3 dimensions’. La matiére infinie et interminable. La forme finie et terminée’, Numert infiniti non atiu sed potentia (Phys., liv. TH,
Sans date
chap. vu. infinitum)*.
IAI
De infinito sensibili non dari corpus sensibile
Mais... nous avons la police Et quelque chose en nous d’eunuque et de recors (Tristan Corbiére) *.
[16] Sichels, 1. Corpus definitur quod est terminatum superficie; sed infinitum est essentialiter interminatum. 2. Numerus numerabilis; sed omne numerabile potest numerando pertransire : ergo non infinitum. 3. Tout corps est composé; or le composé ne peut étre que de parties finies. _ 4. Sil y a un corps sensible infini, il n’y a plus de ' lieu, plus de point possible eu égard a l’infini des repéres, plus de mouvement parce que plus de sens. Non potest ex finitis speciebus conftare corpus infinitum (puisqu’elles sont au moins finies du coté de leur différence)*. Aristote (c. Ix) compare l’infini en puissance aux jeux olympiques qui deviennent successivement en acte et pat parts®.
Les notions de tout et d’infini sont contradictoires (Cox), La laitue est contenue par sa graine. L’infini inconnu parce qu’il n’est qu’en puissance. Idée : au lieu du vide, guid d’un anéantissement momentané ?
Du vide. Le mouvement circulaire. Rien ne prend une place sans en laisser vacante une autre égale. Ce n’est pas l’espace qui permet le mouvement, c’est le mouvement qui crée l’espace. Dans le plein absolu le vide est permis par [17] un mouvement modifié créant un espace moindre. Spatium — Se par (au) — passus (le pas — pas nég.) — passus (pati).
142
Cahier II a
Tout ce qui n’est pas Dieu est par rapport a Dieu. Dieu seul est permanent : tous les autres étres sont interrompus et mélangés de mort. L’impermanence de chaque étre éclate par le moyen des autres qui en sont les révélateurs et les Zémoins. C’est seule la volonté de Dieu qui les arréte et qui leur dit : Tu miras pas plus loin. Idées trés intéressantes du « Timée» sur l’ame se rapprochant beaucoup des miennes (d’aprés Ar[istote], De Anima, 1, chap. vit) : Plato docuit primo quod quia simile cognoscitur simili, ad hoc ut anima cognoscat res, debet
constare ex principiis et elementis rerum; sed per ipsum principia et elementa sunt numeri: ergo consequenter extsti-
mavit animam constare ex numeris. — 2°| quod cum ex numeris aliqui sint harmonict, aliqui non harmonict, anima conStat ex numeris harmonicis (provoquant la consonance. — cf. phénoménes dits de résonnance [s7c]...). — 3° quod quia numeri naturali ordine sunt dispositi veluti in quamdam rettitudinem, anima, quae conStat ex numerts, est veluti linea recta et ideo cognoscit objetta aspettu retto seu cognitione diretta — 4°/ [18] quod sicut linea retta potest fletti in circulum, sic anima potest etiam cognitionem veluti circulariter flettere, ita ut redeat ad cognoscendam seipsam* (Au lieu de mouvement circulaire, épanouissement vers la périphérie, vers les fins qui la limitent de tous cétés, connaissance de soi-méme par le choc constant contre ses limites auquel elle pourvoit). Plus loin (c. x1) rejicitur sententia docens animam esse numerhim moventem seipsum.
« Punttum nihil alind est quam unitas habens positionem, ideoque punttum supra unitatem addit solum positionem?. » — Tous les arguments d’ Aristote contre cette théorie se réduisent a 2: 1° Il considére Punité comme ayant forcément une existence locale et concréte;
2° Il considére le nombre comme formé d’unités a la fois distinétes et simultanées, tandis que je le considére 4 la fois comme un rhythme [sic] et comme un métre (comme les prisonniers qui communiquent en tapant sur les murs de leur prison).
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L’étre inexplicable et se répétant suivant un certain rhythme vient de Dieu et est une image de Dieu. L’étre particulier est un dieu a éclipses. [19] La fin de Pame est le corps. Dieu se sert de Pame comme d’un instrument pour la création du corps. De anima), U, chap. 1. Anima eS allus quo corpus organicum constituitur potens exercere operationes vitales. Dire que lame est aétus primus corporis organici potentia vitam habentis, Cest insinuer que le corps est le premier, comme la puissance avant l’aéte : tandis que le corps est l’effet et l’ceuvre de l’Ame, trouvant ses limites dans la série des différences qui l’entourent.
Aristote, Métaph., V, chap. v1. — De lPunité. Unum per se dicitur 5 modis. 1°| Unum per se dicitur quae sunt continua (seipsis aut in alio, per atium aut per naturam)... Haec omnia dicuntur continua, quia unus est per se motus eorum, ita ut talt motu moveri non possit una sine alio. Dicitur vero motus unus ex eo quod partes motus non possunt tempore separari atque dividi (sicut motus ligni aut lignorum colligatorum),; omnes tales motus simul tempore; 2°] cum subjettum constituitur per formam unius specie ; 3°| Unum secundum genus; 4°] quorum definitio est una; 5°| quorum ratio et intelletius explicans quid sint est omnino indivisibilis quia sunt simplicia. — Omnia quae dicuntur unum conveniunt in hoc quod habent aliquam indivisibilitatem vel indivisionem. — Unum et principium numeri. Quod est omnino indivisibile et non habet |20| posttionem in continuo est unitas ; quod est omnino indivisibile sed habet positionem in continuo et puntium ; quod est divisibile secundum unicam dimensionem est linea, secundum 2, superficies, secundum 3,
corpus solidum. c. x1. Dicitur prius quod et propinquius principio. c. xxx. Dicitur accidens per se quod per se et necessario competit rei, tamen non est essentia ejus. — Sunt in ordine ad substantiam quam supponunt esse ens*. Le mystére de l’apparition de ’4me. A quel moment ame intelligible et immortelle commence-t-elle a animer le corps?
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Pas dés le principe méme. Pratique de l’Eglise pour le baptéme. Une série de mouvements s’épousant l’un sur l’autre. Et Verbum caro fattum est. Forma prior materia (VII, chap. 111). Materia est id quod per seipsum neque est quid, neque quantum, neque quale, neque aliud quidpiam dicitur, neque horum negationes (chap. 111). La matiére est une puissance, c’est une lettre de change sut la Toute-Puissance pour une certaine fin, elle tire
sur Dieu dans de certaines limites. Compositum magis subStantia quam materia’.
Et substantia mea apud te est (Ps. XLI)?. [21]... Dieu fit 4 imitation de l’éternité cette image delle qui procéde suivant le nombre et que nous appelons le temps (Timée)°. L’ Espace est ce qui expose (exposant au sens math[ématique]). Ce qui soustrait au temps, les choses n’existant plus que par leurs rapports et proportions contemporaines (v[oir] les arts plastiques). Il y a 2 idées dans le terme de substance : ce qui est immobile et stable — ce qui est dessous et qui sert de base et de principe. C’est-a-dire l’étre. L’étre a raison de la négation qu’il contient (naitre) est expulsé du sein du Créateur. Il n’est arrété et défini que par une nécessité qu’il trouve en lui-méme et sa propre constitution (forme) ou extérieure (connaissance). Par imitation l’étre se connait surtout par son contact a l’extérieur, en se pressant sur la limite qui lui sert de matrice. C’est le choc
contre
la fin, contre
la forme,
qui
précipite la matiére. Lumiere, chaleur, éle€tricité : états d’animation de la matiéte.
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Il n’y a de fixe que les relations qui par définition sont invariables. Ce qui dure est ce qui persiste dans une méme relation comme une tenue, une pédale. [22] La distance, ou appréciation des proportions, ou temps que met I’ceil a recréer. .. La substance
vérité, Cest au
que
limage,
différente
de la
sein de laquelle elle nait, changeante
représentation d’un étre supérieur, doit par la méme se produire dans quelque autre chose, de laquelle elle emprunte en quelque maniére |’existence... Quant a Pétre vraiment étre, ... la raison déclare... que, aussi longtemps que deux choses différent entre elles, elles ne pourront exister l’une dans l’autre, de maniére a étre a la fois deux choses et une seule chose (Timée, p. 221,
et ce q[ui] précéde)!.
Espace : ywpa. L’étre, le lieu et la génération sont trois principes distinéts et antérieurs 4 la formation du monde (dbid. ). En lui-méme Dieu est Tout-Aéte : hors de lui-méme,
il est Toute-Puissance. Formation des corps. — Comparaison avec l’action des vans et des tarares (sbid., p. 122)°. Un monde unique. Pour comprendre la transsubstantiation, voyons ce qui se passe en notre esprit au moment de la communion, ot nous nous représentons le Christ tout entier
et dans toutes ses parties 4 la fois sous ses espéces que nfous] recevons. Mais en Dieu ce qui chez [23] nous est réalité. I] n’y a pas d’imagination en Dieu. Tout est acte, tout est réalité. La ot nous imaginons, il crée, il est. Idée trés obscure de la contemporanéité de tous les
moments
du temps
avec
l’éternel
suggérée
sacrifice du Calvaire et de la Messe?.
L’homme : spiritus vadens e¢ non revertens®.
par le
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Le présent n’est pas qu’une simple maniére de parler : c’est ce qui est en train, ce qui est en train de se faire, ce qui n’est pas fini. 2 et 2, c’est une somme. 2 fois 2, c’est un produit. Dans le premier cas, le nombre n’est qu’un accident,
2 pains et 2 pains. Dans le premier [s7c] cas, le chiffre est VPessentiel, 2 fois 2 pains; on les fait réapparaitre; on les reproduit identiques : il y a opération, génération, similitude : le couple initial qui de lui-méme suscite les autres; ils ne lui sont plus apportés et surajoutés du dehors.
Parmi les nombres pairs, ceux qui ont pour base un impair : comme
6,14.
Nombre et grandeur, étendue et quantité, ce ne sont pas du tout les mémes choses. I] faut une base.
Dans la nature jamais de mesures justes et de chiffres ronds : mais toujours des approximations. C’est une condition de la beauté.
L’Eternel : ce qui ne peut pas ne pas étre. [24] De lEucharistie?. L’Apotre nfous] apprend que ceux qui ne « discernent point le corps de N.-S.» commettent un grand crime (Cave[chisme] du Cloncile| de T[rente])’. Aprés la consécration, il ne reste rien de la substance
des deux éléments (7d. )4.
J.-C. se porte dans ses propres mains. Se dat suis manibus (S. Aug.)°.
L’Eucharistie ne contient pas seulement le Corps de Jésus-Christ avec tout ce qui constitue un corps vétitable, comme les os et les nerfs (id.), mais J.-C. tout entier. Le corps n’y est pas séparé de la divinité®,
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Les paroles de la consécration produisent ce qu’elles signifient!. Le corps de J.-C. n’est dans |’Eucharistie ni par déplacement local, ni par création, mais par mutation
de la substance du pain?. L’Eucharistie garde les apparences et méme la propriété naturelle du pain qui est de nourrir et de fortifier le corps®. J.-C. n’est pas dans ce sacrement comme dans un lieu. Les choses ne sont dans un lieu qu’autant qu’elles ont quelque étendue. Or quand nous disons que Jésus est dans |’Eucharistie nous ne faisons pas allusion a ’étendue plus ou moins grande de son Corps, mais a la substance elle-méme considérée indépendamment de Pétendue. Car la substance du pain est changée en la substance, et non pas en la quantité, ou en la grandeur, du Corps de J.-C. Or personne ne doute qu’une substance ne puisse étre également enfermée dans un petit espace aussi bien que [25] dans un grand. Ainsi la substance de lair est aussi bien dans une petite partie d’air que dans une grande; la nature (ou la substance) de l’eau n’est pas moins entiére dans un petit vase que dans un grand. Et comme le Corps de N.-S. remplace la substance du pain dans |’Eucharistie, on est obligé de convenir qu’il est dans le Sacrement de la méme maniére que la substance du pain y était avant la consécration. Or la substance du pain était aussi bien et aussi entiére dans la plus petite partie que dans le tout. Cela ne se Mais d’autre qui demeurent Par conséquent
discute méme pas (7d. )4. part il est impossible que les accidents s’attachent 4 sa Chair et a son Sang. il est de toute nécessité que, contre
toutes les lois de la Nature,
ces accidents subsistent en
eux-mémes et sans étre soutenus par aucune substance (id.)§.
Quantitas substantiae eft substantialis forma, realiter ab illa distinfla, quae separari et conservari potest sine illa (note ad q. 88, a. 2). La substance : ens per se subsiftens. L’accident : ens cui debetur esse in alo’. Primum autem accidens quod afficit immediate substantiam
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corporalem est quantitas : omnes enim corporales substantiae sunt quantitate praeditae, qua etiam [26] mediante accipiunt coetera accidentia: v.g. corpus mediante quantitate accipit colorem, figuram, etc. Sic quantitatem definit S. Th., opusc. 481; « Accidens extensivum seu diftributivum subSlantiae in varias partes integrantes » (note ad q. 75)°. Panis supersubstantialis*. Deus non est causa tendendi in non esse (S. Aug.)4.
Pour expliquer la consécration : Verba quae Ego locutus sum vobis, spiritus et vita sunt (St Jeanevays. Mon corps est véritablement une nourtiture, sang est véritablement un breuvage.
mon
Ce dogme, comme tous les autres, est au-dessus de la
raison, mais ne peut pas étre contre. A tout moment de la durée Dieu crée et maintient la substance et celle-ci 4 son tour produit les accidents suivant les fins auxquels [sic] ils sont adressés. Dans ?Eucharistie Dieuse rapproche et est devenu substance. ... Sed substantia in subtantiam, et sic substantia corporis Christi vel sanguinis et sub hoc sacramento ex vi sactamenti, non autem dimensiones corporis vel sanguinis Christi. Unde patet quod corpus Christi est in hoc sacramento per modum substantiae et non per modum quantitatis. Propria autem totalitas substantiae continetur indifferenter in parva vel magna quantitate. Unde et tota substantia corporis et sanguinis [27] Christi continetur in hoc sacramento post consecrationem sicut ante consecrationem continebatur ibi tota substantia panis et vini (Q. 76, a. 1)°.
Nam infinitum repugnat non solum naturae sed etiam gratiae (id., a. 3)’. Ipsa autem natura subStantiae praecedit etiam quantitatem
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dimensivam. Et ideo quia conversio substantiae panis dire fe terminatur ad substantiam corporis Christi, secundum cujus modum proprie et dirette est in hoc sacramento corpus Christi; talis diftantia partium est quidem in corpore Christi vero, sed non secundum hance distantiam (cette échelle!) comparatur ad hoc sacramentum,sed secundum modum suae substantiae (id. )*.
Art. 4. — Hine intelligas corpus Christi in EuchariStia esse figuratum, coloratum, etc., in ordine ad se, non in ordine
ad locum. Quae omnia facilius intelletin quam imaginatione percipiuntur (Billuart)?. Modus essendi cujuslibet rei determinatur secundum quod eff et per se, non secundum quod est ei per accidens; sicut corpus est in visu, secundum quod est album, non secundum _ quod est dulce, licet idem corpus sit album et dulce ; unde et
dulcedo |28| est in visu secundum modum albedinis, non secundum modum dulcedinis. Quia igitur ex vi hujus sacramenti est in altari substantia corporis Christi, quantitas autem dimensiva ejus est ibi concomitanter et quasi per actidens, ideo quantitas dimensiva corporis Christi ef in hoc sacramento non secundum proprium modum (ut scilicet sit tota in toto, et singulae partes in singulis partibus), sed per modum substantiae cujus natura est tota in toto et tota in qualibet parte®,
Le Christ cesse d’étre sous les espéces non parce qu’il les quitte, mais parce qu’elles le quittent et cessent d’étre — quia illud quod de se habet esse indeficiens, non potest esse deficiendi principium,; sed alio deficiente, hoc desinit esse in eo; sicut Deus cujus esse est indeficiens et immortale, desinit esse in aliqua creatura corruptibili per hoc quod creatura corruptibilis desinit esse... Unde patet quod Christus, per se loquendo, est immobilis in hoc sacramento
(76, a. 6)4.
In hoc autem sacramento non datur accidentibus quod ex vi suae essentiae non sint in subje Go, sed ex divina virtuie susten-
tante, ef ideo non desinunt esse accidentia, quia nec separatur ab eis definitio accidentis quae est [29] aptitudo ad subjetium, quae semper manet in tis, non atualis inhaerentia, nec competit eis definitio substantiae (77, a. 1)°.
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Composita ex: esse et quod est (id. )*. Duo principia: Unum est quantitatem substantiae esse specialem formam, realiter ab illa diStinam, quae separari et conservari possit sine illa; secundum eS materiam esse primam materiae dispositionem, qua mediante, recipit alias formas accidentales, ita ut proxime illi adhaereant, sicut color in superficie (note ad id., a. 2)?. Dimensio... quantitas positionem habens (id.)*.
Corpus Christi non vadit in corpus hominis (S. Ambr.)*. Sur les anges (S. Th.). Licet
quaedam
locis
corporalibus
non
contineantur,
circumscriptione tamen substantiae non carent (S. Aug.)*. In eis est aliqua compositio attus et potentiae, et non eft idem in eis Esse e¢ Quod est’. Intellecius non apprehendit res secundum modum rerum, sed secundum modum suum”. [30] Quod est est ipsa forma subsistens ; ipsum autem esse est quo substantia esf.
Substantiae immateriales finitae secundum suum esse; sed infinitae secundum quod earum forma non sunt receptae in alio®. Par ex[emple] la blancheur en soi.
Nombre des anges : Multi sunt exercitus supernarum mentium, infirmam et constritlam excedentes nostrorum materiqlium numerorum commensurationem (S. Dion., Coel, Hier.)*°. Numerus,
non causatus
ex discretione
continui, sed ex
distinttione formarum™. L’ange n’est pas dans le lieu a la maniére du corps. Le corps est dans le lieu parce qu’il s’y trouve appliqué selon le contaé& de la vertu dimensive, qui n’est pas dans les anges, mais est en eux la quantité virtuelle (ouforce ?). Par l’application donc de la vertu angélique
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a quelque lieu, l’ange est dit (comment que ce soit) étre dans le lieu corporel’. Angelum esse in loco, ait Cajetanus, [31] nihil aliud ef quam perfette et immediate continere illum in genere causae efficientis®. Omnes sunt adminiftratorii Spiritus in ministerium missi
propter eos qui hereditatem capient salutis (Hébr., I, 14)8. Le mouvement des anges : par contacts virtuels avec le lieu, successifs et non pas forcément continus‘.
Les anges chargés de comprendre Sa création. Angeli sciunt ea quae sunt in terra secundum propriam ' naturam mentis (S. Dion., De Div. Nom., VI1I)°. Deus tota in totis congregat, id est, omnia in omnibus (id. )°. Alngeli|
illuminantur
rationibus
rerum
(les raisons
détre) (7d. )’. Alngelus| intelligit, non quidem perfecte, nec secundum propriam rationem (rerum — Deus tantum ) sed communem®. Abyssus?.
S. Aug. De Genesi ad litteram: [32] Quomodo possit intelligi Deus dicere: Fiat lux, nist per creaturam, cum ipse sit incommutabilis’® ?
Intelligamus Dei ditium incorporeum in natura Verbi ejus coaeterni revocantis ad se imperfettionem creaturae, ut non sit informis, sed formetur secundum singula quae per ordinem exsequitur™ Aquam — spiritualem vitam quamdam ante formam conversionis quasi fluctantem*. Oui feciti mundum de materia informi (Sap., X1, 18).
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Materia origine non tempore formam praecedit’. Prior omnium creata est Sapientia (Kccli., I, 4).
La lumiére créée, reflétée. Fiat lux, comme s’il disait : Que ma lumiére soit réverbérée, répercutée. Tout ce qui est intermédiaire entre la source de lumieére et la
paroi vient se peindre dessus. Il sépara la lumiére des ténébres, ce qui refléte de ce qui est opaque. — « Et fut fait d’un soir et d’un matin Un jour», [33] c’est-adire d’une occultation derriére l’ceuvre future et son ombre poitée et d’une réapparition ot l’ombre devient partiellement transparente. Ce qui n’était qu’ombre devient forme’. Fundavit terram super aquam (Ps.)4. Quia non primo cognovit rationalis creatura conformationem suam et postea formata est;sed in sua ipsa conformationem cognovit, id est, illustratione veritatis, ad quam con-
versa formata e : cetera vero quae infra sunt tta creantur, ut prius fiant in cognitione realis creaturae, ac deinde in genere suo? Quapropter lucis conditio prins eft in Verbo Dei secundum rationem qua condita est, hoc est in coaeterna Patri Sapientia; ac deinde in ipsa lucis conditione secundum
naturam qua condita est; illic non fatta, sed genita; hic veri fatta, quia ex informitate formata; et ideo dixit Deus:
Fiat lux, e¢ faGta est lux; ut quod ibi erat in Verbo hic
esset in opere. Conditio vero coeli prius erat in Verbo Dei secundum genitam Sapientiam ; deinde facta est in creatura spiritualt, hoc est in cognitione angelorum secundum creatam in illis [34] sapientiam ; deinde coclum fattum est, ut esset
etiam ipsa coeli creatura in genere proprio, Et sic omnes aliae creaturae®.
..: (Omnia haec) Angeli melius noverunt interius in ipso Dei Verbo... (II, 8)*. La connaissance antérieure 4 l’étre?.
Le 4° jour, création du soleil, de la lune et des étoiles. « Et sint in signa et tempora, et in dies, et in annos®. »
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An circa speciem fattae rei dies appellatio sit, et circa privationem nox : ut nondum specie formata materia nox dita sit unde formanda erant coetera; sicut potest quamvis in rebus formatis, intelligi tamen in ipsa mutabilitate informitas materiae...? An potius in ipsa re falta atque formata eadem mutabilitas, hoc est deficiendi, ut ita dicam, possibilitas,
nox appellata sit, quia inest rebus faltis, etiamsi non mutentur, posse mutari ? Vespere autem et mane non quasi per temporis praeteritionem et adventum, sed per quemdam terminum quo
intelligitur quousque naturae sit proprius modus, et unde sit naturae alterius consequenter exordium (14). [35] Que veut dire : « e¢ sidera sint in signa» ? L’astrologie ? Les corps ressuscités.
Tam potenti natura Deus fecit animam, ut ex ejus beatitudine redundet et in corpus plenitudo sanitatis et incorruptionis vigere (Aug.)?. Deus hominem fecit; qui, quamdiu non peccator, immor-
talitate vigeret, ipse sib1 auctor esset aut ad vitam aut ad mortem (Aug.)°. : Per peccatum intravit mors in mundum (Rom., V, 12)‘. Pati, removeri a naturali dispositione. —
Impassible,
par ce méme empire de |’ame sur le corps’. Faétus est homo in animam viventem (Gen., II, 7). i-e. vitam corpori dantem. Corpus animale. — Aprés la résurrection pas d’aliments®. Lignum vitae — vertu médicinale’. Une ame incorruptible dans un corps corruptible. Id enim per se videtur esse de intentione naturae quod eft semper et perpetuum; quod autem et solum secundum aliquod tempus, non videtur esse principaliter de intentione naturae, sed quasi ad alind [36] ordinatum; alioquin, eo corrupto, naturae intentio cessaretur. Quia igitur in rebus corruptibilibus nihil et perpetuum et semper manens, nisi species; bonum speciei et de principali intentione naturae,
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ad cujus conservationem naturalis generatio ordinatur. Subftantiae vero incorruptibiles manent semper, non solum secundum
speciem, sed etiam secundum
individua;
et ideo
etiam ipsa individua sunt de principali intentione naturae. Sic igitur homini ex parte corporis, quod corruptibile est secundum naturam suam, competit generatio ; ex parte autem animae quae incorruptibilis et competit ei quod multitudo individuorum sit per se intenta a natura, vel potius a naturae auttore, qui solus est humanarum animarum creator’, Se servir de toute la création’. Théorie
de la convenance
et du lieu convenable’.
Si terrena nostra habitatio dissolvatur, domum habemus non manufattam, sed conservatam in coelis (II Cor., v, 1)*.
L’4me va au ciel ou a l’enfer comme par son poids propre’. Recedit anima a corpore, secum
trahens omnia, sensum,
imaginationem, rationem, intellettum, intelligentiam, concu-
piscibilitatem et trascibilitatem (Aug., De Sp. et anim., coy)
[37] Le feu lie, empéche d’aller ot l'on veut. Le mouvement empéché se change en incendie’. Inflammat rotam nativitatis suae (Jacq., III)8.
Praeterit figura hujus mundi (I Cor., vit, 11). R. 18%. Anima se habet ad corpus non solum in habitudine formae et finis, sed etiam in habitudine causae efficientis (De anima)™. Dei opera sunt perfetta (Deutér., XXXII, 4)".
Comparatio animae ad corpus sicut artis ad artificiatum™. In resurretione corpus hominis animae totaliter correspondens, quia non resurgit nisi secundum ordinem quem habet ad animam rationalem, Membra possunt dupliciter considerari in comparatione
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ad animam, vel secundum habitudinem materiae ad formam,
vel secundum habitudinem instrumenti ad agentem. « Eadem enim est comparatio totius corporis ad totam animam et partium ad partes», ut dicitur De An. — Si ergo membra accipiuntur secundum primam comparationem, finis eorum non est operatio, sed magis perfettum esse speciei, quod etiam post resurrettionem requiretur... Secundam — finis operatio... Sed tamen instrumentum non tamen servit ad exequendam operationem |38] agentis, sed etiam ad ostendendam virtutem ipsius. Capillus de capite vestro non peribit (Luc, XXI, 18)?. Veritas uniuscujusque rei est proprietas sui esse quod Stabilitum
est ei (Metaph.,
c. iv)’.
Donec occurramus omnes... in virum perfettum, in mensuram aetatis plenitudinis Christi (Eph., IV, 13)‘. Les bienheureux tiv De, C. XVAl)*.
conservent
leur sexe (Aug., De
Tae operationes quae ordinantur ad primam perfe ttionem humanae naturae vel causandam vel conservandam non erunt in resurrettione®.
Clari, subtiles, agiles, impassibilesque Ommnes quadruplici pollebunt dote beati". Le temps n’est pas le méme. Passio est motus praeter naturam (Damasc.)®
Cujus terminos patiens, proprios
ratio eft quia omne quod partitur trahitur ad agentis, quia agens assimilat sibi patiens, et ideo in quantum hujusmodi trahitur extra terminos in quibus erat (S. Th.)®.
[39] Qualis coelestis, tales et coeleStes*. Reformabit corpus humilitatis nostrae configuratum corpori claritatis suae, secundum operationem quae sibi possit subjicere omnia (Philip., III, 21)".
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Non erunt ibi cogitationes volubiles (Aug., De Trin.)*.
Les sens chez les élus, le sens du goit?.
De Gener. in 2 — Subtile eft repletivum partibus et partium partibus ; quia propter naturam humidi quod male terminatur termino proprio, bene autem alieno, sequitur suum tangens, et fiuit undique ad suum capiens, et sua subtilitate quamlibet ejus partem minimam subintrat®. Quia in corporibus raris forma praedominatur materiae magis ideo translatum eS nomen subtilitatis ad illa corpora quae optime substant formae, et perficiuntur ab ea completissimo modo’.
Spiritus carnem et ossa non habet, sicut me videtis habere (Luc, ult. 39)°.
Coeli solidissimi quasi aere fusi sunt (Job, XXXVI, 18)*. Comme dans un miroir (Jac.)’. Intra Deum currunt, quocumque mittuntur (S. Grég., De ang.)®. [40] Sur les anges (suite).
Angelus incorporeus et immaterialis dicitur quantum ad nos; sed comparatus ad Deum materialis et corporeus inventtur.
Angelus eft substantia intellettualis semper mobilis (S. J. Damasc.)®. Licet quaedam locis corporalibus non contineantur,
cumscriptione
cir-
tamen subftantiae non carent (S. Amb.)?®.
Il y a en eux laéte et la puissance. — Composés de quo est et quod eft, vel ex esse et quod est (Boéce)". Substantiae immateriales creatae sunt finitae secundum suum esse, sed infinitae secundum quod earum formae non receptae in alto...
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Unumquodque intelligitur in quantum a materia abstrahitur ; quia formae in materia sunt individuales formae quas intellefus non apprehendit secundum quod hujusmodi». Intelletus apprehendit res non secundum modum rerum, sed sec|undum| suum. Unde res materiales, quae sunt infra intelleium nostrum simpliciori modo sunt in intelleétu nostro quam sunt in seipsis. SubStantiae autem angelicae sunt supra... Quas intellettus noster apprehendit secundum {41| modum suum sicut apprehendit Deum?. Ce qui est commun. Le nombre existe chez les anges. Point commun avec nous. Angeli differunt specie tantum®.
Ubi angelus operatur, ibi est (S. J. Damasc.). Théme et variations®. Motus — transitus ab uno in alium Statum (Atist.). Pas de mouvement 7” inffanti, parce que mouvement et temps sont une seule et méme chose’. Angeli dividuntur in substantiam, virtutem et operationem (S. Denys)’.
Angeli suam perfettionem intelligibilem consequuntur per intelligibilem effiuxum, quo a Deo species rerum cognotarum acceperunt simul cum intelletiuali natura. Unde Augustinus dicit... quod coetera quae infra angelos sunt ita causantur ut prius fiant in cognitione rationalis creaturae, ac deinde in genere sno’.
Angeli superiores intelligunt per species magis universales quam inferiores®. [42] Aug., De Gen.: Multum interest inter cognitionem rei cujuscumque in Verbo Det, et cognitionem ejus in natura ejus ; ut illud merito pertineat ad diem, hoc ad vesperam™.
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S. Denys : De coelestt hierarchia. La hiérarchie ecclésiastique image imparfaite de la hiérarchie céleste?. Cogitando scilicet apparentes has pulchritudines, arcanorum esse decorum effigies; ac sensiles odorum suavitates expressas esse figuras spiritualis dispensationis, et tmmaterialis illustrationis speciem pro se fere lumina materiata*. Similitudes et dissimilitudes nous enseignent également?.
Ce
qui est chez nous
« masculg eorum ratio».
irascibilité, chez les anges
—
Ce qui est chez les brutes
concupiscence, chez eux « divinus amor intelligendus, sublimissimae purissimaeque claritatis et infaillibilis pulchrificaeque venustatis». — De méme, lirrationabilité et Pinsensibilité des brutes, leur éminence qui surpasse tout sens et toute parole‘. Scopus santtae hierarchiae ef Det, quanta fieri potest, assimilatio conjunttioque. Ipsius etiam Dei, ut Eloquia loquuntur, cooperator. Purgatum, illuminatum, ...° [43] Seraphim = incensores vel calefacientes®. Cherubim == copiam cognitionis, sapientiae diffusionem’. Seraphim
—
Mouvement,
pointe, ferveur, pouvoir
d’exciter et d’enflammer, de se purger continuellement, illumination. Cherubim = Connaissance et do€trine. Trones = Sublimité qui « nec in infimis rebus habitat, sed totis viribus in eo qui vere summus est, immobiliter firmiterque haeret »®. Sur fes3: Motum proprium aequabilemque per amorem Dei constanter tenent, invariatum... Sed inconcussam semper
deiformis sua proprietatis sedem tenent®. In circuttu ejus tabernaculum ejus (Ps.
XX XV, 16).
Dominationes : \iberté. Virtutes = virilité (et spontanéité). Poteffates = ordre. Principatus = poteftas principandi et gubernandi™.
CAHIER
II
IQIO
[1] Prague, le 6 juin 1910! Une chose en existence actuelle est identique avec la connaissance de cette chose (Aristote)?. In senetiu fertilissimae glandiferae (Pline)°.
L’histoire des manuscrits d’Aristote si étrange le catalogue de la bibliothéque d’Alexandrie, leur trouvaille aprés un siécle et demi d’enfouissement en Troade. Et cependant personne ne met en doute leur authenticité : c’est qu’il ne s’agit pas de la Bible‘. Un teint comme
une
coquille translucide,
comme
la fleur de bégonia®. Seigneur,
s’il vous
faut une
croix, me
voici.
Si
misérable que je sois, je vaux toujours bien un morceau de bois®. C’est moi que vous teniez serré entre vos bras dans la troisiéme chute, quand vous gisiez sur le dos, la face vers le ciel’. L’empierge du blé, le lacet de la vigne. L’alouette qui monte au ciel les ailes [2] étendues comme un séraphin en criant cinq fois de suite : hi! hi! hi! hi! hi®!
162
Cahier II
Ne nions pas que les Autrichiennes aient du «schick». Mitaine blanche d’ou sortent de gros doigts boudinés. Autour du poignet un bracelet en celluloide rose imitant un ruban avec sa boucle et les trous pour l’ardillon?.
L’étre chez Dieu seu/ est identique avec l’aéte (S. Th.). Principe capital et qui domine tout spécialement les théories de la connaissance. L’homme
humble ne s’agenouille pas, il s’asseoit.
Potest etiam hujus rei (Vimmfortalité] de l4me) accipi signum ex hoc quod unumquodque naturaliter suo modo esse desiderat. Desiderium autem in rebus cognoscentibus sequitur cognitionem. Sensus autem non cognoscit esse nisi sub hic et nunc. Sed intelletus apprehendit esse absolute et secundum omne tempus. Unde omne habens intellettum naturaliter desiderat esse semper. Naturale autem desiderium non potest esse inane (S. Th., Ia, q. 75, art. 6)%. [3] Elle péche finement un demi-cornichon un bocal avec une longue pince de bois®. Stare —
Stella —
dans
stalice (en tchéque) — stern —
Star.
Mais stir : remuer.
29 [juin]. — Féte de S. Pierre et S. Paul — Double profession 4 Emmaiis!.
Inscription sur un glaive de justice :
Fiat justitia Et verbum caro fattum est Pereat mundus’.
Habit, habitus — la méme image’.
Coutume, costume —
Deux fois
Juin- Juillet 1910
163
L’amande délicieuse du visage (avec la méche blonde pendante le long de la joue)?. 7 juillet. — Départ de ma femme et des 3 enfants pour la France, par Linz.
M. Toublanc, instituteur
4 Madagascar — Madame
Montacheval, corsetiére.
Genitum non fattum®. Une grande glace transparente avec un visage [4] de femme que |’on voit au travers et un autre visage de femme qui se refléte dessus de l’autre cété. Merlon, petite butte de terre. La plaine couverte
parcourent,
de moissons,
se répondant
d’un
Phorizon a coups de tonnerre; quantités d’alouettes chantant.
deux
bout
orages
la
a l’autre
de
dans lintervalle
des
Les sculptures en stuc au-dessus des trois portes de Saint Jacques avec des nuées d’enfants, les grands batons des pélerins. A l’intérieur tout ce qui vit est en or jusqu’au vaste cadre sublime du fond comme une porte de gloire. Les sculptures partout comme un grand vol d’oiseaux qui se seraient posés de tous cétés*. Les plafonds en perspective. Les ciels rouges couleur de fumée d’encens. Il crache avant d’entrer chez le marchand de vin.
Allemands ou Tchéques, la méme biére coule dans nos veines. La biére est plus épaisse que l’eau. Le bois de quercitron. La petite fille pauvre
été vétue
dun gros bonnet de fourrure.
d’une chemise
et
164
Cahier II
29 juillet. — Voyage a Dresde. Les porcelaines violettes au musée. La Vierge de Mantegna. — Le Poussin. Les B[erthelot] chez moi. 5] Deus Stetit in synagoga deorum: in medio autem deos dijudicat (Ps. LX XXI, I).
Exaudivi te in abscondito tempestatis; probavi te apud aquam contradittionem (Ps. LXXX)?. 31 juillet-8 aoait. — Séjour des Berthelot avec moi. — La chapelle de S. Venceslas avec ses incrustations de marbres rares et d’améthystes. Karluv tyn, rayon de chapelles posé sur un roc, sur une mitre de pierres dont on voit la corne tout en haut*. Au sommet une chapelle d’or, une cellule de paradis avec des fenétres de pierres précieuses*. Outremer et or. La chapelle ot priait le roi Charles avec la chatiére par ot on lui passait les aliments et les papiers d’état [szc]. La bibliothéque de Strakov. Dans l’une tous les livres blancs comme Vhabit des Prémontrés. Dans Pautre toute dorée les livres brillants et multicolores formant comme des émaux chatoyants. S. Nicolas, une porte somptueuse,
une
arche aux
pilastres d’orgues prismatiques ouverte sur le soleil couchant. L’accord délicieux des gris et d’un rose presque humain. L’apparat grandiose des loges donnant sur le cheeur, la salle du Trdne. Les quatre évéques colossaux parlant®. S. Thomas, le cheeur. Idée d’une présence [6] perpétuelle suggérée par une assistance perpétuelle, les loges intérieures et mystérieuses grillagées d’or. L’adoration perpétuelle. S{aint] N[icolas]*. Comme un sermon de Massillon’. Il y a des églises qui montrent et d’autres qui regardent’.
Un peu de chaque chose, et rien du tout, a la francoise (Montaigne)?®.
Ce que dit Pascal de l’esprit géométrique pourrait
Juillet- Aout 1910
165
s’appliquer a toutes les choses humaines ot |’on voudrait apporter une rigueur incongrue. Les idéologues, les polytechniciens, les sociologues, les socialistes.
Lire mot par mot?.
Tl est utile d’avoir des idées d’ensemble méme fausses. Car une vue d’ensemble ressemblera toujours plus a une vérité d’ensemble qu’une vision de détails. 42 ans — Quand ce livre encore blanc sera rempli,
jen aurai prés de 50. Lage de mon pére quand je suis né’. Bilek : grés flammé. Le corps a corps de la flamme et de la biiche?.
Sz, st — Sienne.
No, no —
Devise
dans la Cathédrale de
A ajouter : l’Eglise des Dominicains dans Husova ulice avec ses énormes piliers carrés rouge et or, pareils 4 des pattes d’éléphant, qui ont lair de se déplacer avec vous quand on marche, dans la votite [7] une formidable construction en trompe-l’ceil pyramidant jusqu’au ciel — la Loreta comme une boite précieuse et peinte. La grandeur et la petitesse ne sont pas seulement quantitatives mais qualitatives. I] s’agit moins de masse ue de rapport et de proportion, dans des ordres eae Partout ot il y a unité il y a indivisibilité. Impossible de concevoir un espace qui ne puisse étre divisé, impossible de concevoir un individu qui puisse l’étre?.
11 aoat. — Avis de la parution des Odes. Chapon m’envoie un télégramme « Sisyphe vainqueur! ». Le diable qui a mis tant d’obstacles a la publication de ce livre se venge en me le souillant de certains détails®. Fascination exercée sur Pascal par un esprit médiocre
166
Cahier IL
et superficiel comme Montaigne. Toutes les raisons de scepticisme qu’il allégue sont bien peu de chose et figuraient depuis longtemps dans les catalogues de sophismes. Par ex[emple] ce qu'il dit qu’il n’y a pas plus de raison d’aimer une femme pour sa beauté ou un homme pour son esprit, que d’estimer un homme
vain [8] sur ses vétements, car ce sont 1a de simples qualités qui passent. Il ne voit pas que dans les deux premiers exemples, il y a liaison essentielle du sujet 4 accident, et que celui-ci en disparaissant ne laisse pas le sujet intadt. Il y a une différence entre une possession et une propriété. Un peu de cette scolastique si méprisée le lui aurait appris. Tout le reste est de la méme force. Quand Pfascal] parle de lui-méme c’est bien différent?. Premiére éducation des enfants : Histoire Sainte avant tout (surtout Ancien Testament), magnifique fondement pour Vimagination sans fables, La Fontaine,
la grammaire, avec un tas d’exercices et d’exemples amusants qui proménent l’esprit de tous cétés, l’attention éveillée continuellement par la crainte de fautes, Florian, une Histoire de France bien naive, rien que les
rois et les batailles, trés peu de géographie trop vaste pour un enfant, l’arithmétique, surtout donner le sens
de la mesure abstraite, comparer différentes longueurs, donner a mesurer différents objets, mettre un liquide dans différents récipients, |’ Histoire Naturelle, gravures des différents
animaux,
les métiers
simples.
Pour
le
latin, Lhomond, pour le grec le Jardin des Racines grecques, qui transforment les régles en individus concrets et traditionnels. I] faut que [9] enfant acquiére tout de suite le sens de la proportion. Quelle perte que la disparition des anciennes mesures, qui formaient des étalons naturels, le pied, le pouce, coudée, l’aune?!
la toise,
la
Avoir toujours fortement le sens de la réalité et du concret.
Le gateau d’autrui pour nous est toujours fait avec du lait de coq (Proverbe tchéque).
Aout 1910
167
Des rayons de soleil par un ciel pluvieux; on dit qu il tire de Peau (id.). 14-15 aoat. — Voyage chez le sculpteur Bilek a Chynov et 4 Tabor. Le bouleau est comme une pauvre femme en haillons qui grelotte et qui tremble devant le mari barbare.
La plus sombre forét de sapins : au milieu il y a un endroit ot tout devient d’argent, tronc, feuillages et mousses; un seul papillon blanc y vole. Un
homme
comme
d’affaires
une arme
‘travaillant pour lancer inférieure recourbée!. Madame
: Vorbite
chargée
de |’cil
4 feu, tous les traits contraétés
le trait qui porte,
et
la lévre
X, poste restante, a Séléné-sur-Mer?.
Dem hei\l[i]g[en| Benedikt die ganze Welt erscheint in einem Lachtstrabl*. [10] A la troisiéme chute le Christ épars, entiérement détruit et démoli. 13 Station — A chaque homme est donné un Christ spécial 4 qui il fait souffrir passion. La Sainte Mére au jour du jugement reprendra son enfant sur ses genoux et'regarde ce que n{ous] lui avons fait*.
Noms étranges de pays prés de Rostock — Zalov, le chagrin — Moran, la mort — Zabiak, le tueur.
Elle parle et dit qu’elle m’aime encore ah que le son de ses paroles était doux! Elle parlait et le son de ses paroles a cessé, un peu
avant leur soufHe sur ma joue, Récit de Mademoiselle Braunerova. Un jour elles voient arriver une petite fille de 8 ans tout en larmes, CLAUDEL
V - 9
9
168
Cahier II
montrant ses poignets ensanglantés, disant qu’elle avait été attachée avec une corde par sa belle-mére qui la battait cruellement parce qu’elle ne rapportait pas assez d’argent quand elle allait mendier, suppliant qu’on la garde. Ils la gardent a la maison. Elle était contente. Quand elle voyait Madame B[raunerova] elle se jetait sur elle et lui serrait les genoux dans ses bras en l’appelant Madame en or, Madame en soie, Madame en satin (trés joli en tchéque, ces étoffes étaient pour elle quelque chose de splendide). [11] On Vappelait Mademoiselle Pomme-de-terre (Sleena Bramborova). Les jeunes filles qui lisaient beaucoup de romans russes avaient accueilli la petite avec enthousiasme, la lavant, la peignant elles-mémes (ses poux tombant sur le papier blanc). Au bout de 2 mois, la famille part pour Vienne,
on laisse l’enfant seule
avec une vieille cuisiniére trés méchante. Au retour on ne la retrouve plus. Elle a disparu. Le passeur interrogé dit qu’il a fait passer l’eau a une petite fille en larmes. Un an aprés Mademoiselle B[raunerova], alors agée de 15 ans, peignant prés de l’eau, voit tout a
coup une petite main d’enfant qui sort de leau. Elle va chercher le passeur et montant en bateau ils retrouvent le corps de Mademoiselle Bramborovya. Elle était sur le dos, le courant la faisait rouler et ressortir
tour a tour l’un des deux bras étendus au-dessus de sa téte. Elle la reconnait 4 un petit corsage rose qu’elle et sa sceur lui avaient cousu. Elle avait séjourné 3 semaines dans l’eau. La chair s’arrachait sous la gaffe. Le vieux fossoyeur de Zalov leur [12] dit : je m’y connais, voyez comme cette enfant a pleuré, et relevant le coin de la paupiére il leur montra les veines comme crevées et arrachées. Elles cousent elles-mémes le linceul et lui donnent une petite couronne. Elle est
au
cimetiére
Novi
Hradec,
et
Mademoiselle
B[raunerova] lui apporte des fleurs quelquefois.
Le monsieur juif a cété dune petite adtrice qu’il entretient, vu de dos, il tient une rose rose qui lui pendille sur le derriére, le pantalon découvrant la chaussette.
Aout 1910
169
Pascal devant le chevalier de Méré dans un ébahisse-
ment auvergnat (cf. Bourget)! 1+i141 TX
Discours
ale eal
mw
de Cenkov : « Oui, Monsieur
le Consul,
pour cette affaire d’adjudication, vous pouvez compter sur moi, vous pouvez compter sur le “‘Samostatnost”’. Le “Samostatnost”’ est un
bon journal, j’y écris, il va
devenir quotidien. Vous devriez dire a Pont-aMousson de prendre des actions, elles codtent 400 francs, une dizaine, une vingtaine. C’est un journal idéaliste. Ce que j’aime dans le “Samostatnost’’, [13] C’est que cC’est un journal idéaliste. Le rédacteur en chef est un idéaliste. Il a été en prison. » Aétes de Pie X (aotit 1910).
La Sacrée Congrégation des Sacrements. Décret sur lage d’admission a la Premiére Communion. Combien Jésus-Christ sur terre a entouré les petits enfants
d’un
amour
de
prédilection,
les pages
de
’Evangile lattestent clairement. Ses délices étaient de vivre au milieu d’eux; il avait Vhabitude de leur imposer les mains, de les
embrasser, de les bénir. II s’indigna de les voir repoussés par ses disciples, qu’il réprimanda par ces paroles sévéres : « Laissez venir 4 moi les petits enfants, et
ne les empéchez pas : c’est a leurs pareils qu’appartient le royaume des cieux » (Marc, X, 13, 14, 16). Combien
il appréciait leur innocence et leur candeur d’4me, il la suffisamment montré quand, ayant fait approcher un enfant, il dit 4 ses disciples : « En vérité, je vous le dis, si vous ne devenez semblables a ces petits, vous
n’entrerez pas dans le royaume des cieux. Quiconque s’humiliera pour étre comme ce petit, celui-la est plus grand que tous dans le royaume des cieux. Et quiconque regoit un de leurs pareils en mon nom me recoit » (Matth., XVIII, 3, 4, 5).
170
Cahier Il
Contre le « Sillon ».
Quand on songe 4 tout ce qu’il a fallu de forces, de science, de vertus surnaturelles pour établir la cité chrétienne, et les souffrances de millions de martyrs et les lumiéres des Péres et des Doéteurs de l’Eglise et le dévouement de tous les héros de la charité et une puissante hiérarchie, née du Ciel, et des fleuves de grace divine
et le tout édifié, relié, comme
pénétré
par la vie et l’esprit de Jésus-Christ, la sagesse de Dieu, le Verbe fait homme. Quand on songe, disonsNous, 4 tout cela, on est effrayé de voir de nouveaux prétres
s’acharner
a faire
mieux,
avec
la mise
en
commun d’un vague idéalisme et de vertus civiques. Que vont-ils produire? Qu’est-ce qui va sortir de cette collaboration? Une construction purement verbale et chimérique ou l’on verra miroiter péle-méle, et dans une confusion séduisante, les mots de liberté, justice, fraternité et d’amour, d’égalité et d’exaltation humaine, le tout basé sur une dignité humaine mal comprise. Ce sera une agitation tumultueuse, stérile pour le but proposé et qui profitera aux remueuts de masses moins utopistes}.
Arrivée de M. Joukowski, Consul de Russie, et de Centurione, Consul d’Italie.
Evangile de l’Ange gardien : Haee dicit Dominus Deus: Ecce ego mittam Angelum menum qui ptaecedat fe, et custodiat in via, et introducat in locum quem paravi. Observa eum, et audi vocem
nec contemnendum putes; peccaveris ; et est nomen vocem ejus, et feceris omnia tuis, et affiigam affligentes (Exode, X XIII).
ejus,
quia non dimittet [14] cum meum in illo. Quod si audieris quae loquor, inimicus ero inimicis te. Praecedetque te Angelus meus
La mola asinaria® promise 4 ceux qui scandalisent les enfants. L’ane attaché A son propre instrument et noyé avec lui.
Aott-Septembre 1910
I7I
Jésus-Christ ne nous demande pas d’étre un esprit général et complet, s’intéressant 4 tout, allant tout regarder. Il y a une différence entre /’homme du monde et le catholique. Terrible rigueur de l’Evangile, si ton pied, si ton
ceil te scandalise,
coupe-le,
arrache-le.
Oui, ce pied, cet ceil méme qui est ma chair et que vous avez fait, mais qui me ménent ot il ne faut pas. Entrer dans le royaume du ciel tronqué, mutilé'. Suppression du moyen matériel. Vid[e] sup[ta] PAnge?.
: « Now dimittam te », dit Jacob a
Le sang est Punion de l’eau et du feu.
Le mouvement perpétuel est le type de ’absurdité mathématique, et c’est cependant lui qui fait toute Pexplication que les matérialistes ont 4 nous offrit de Punivers.
[15] 1T@ st[ation]. — C’est le juge qui proteste qu’il n’est pas coupable. Le
« divertissement»
de
Pascal,
toujours
passer
dun objet a l’autre. Toujours cette injustice de P[ascal] de reprocher 4 Phomme comme un vice ce qui fait sa nature méme. Faut-il qu’il fasse lange? « Tous ses malheurs viennent de ne pas savoir rester en repos
dans une
chambre.»
De méme
s’il meurt,
c’est qu’il a le tort de vivre. L’homme passager est informé par les états successifs de la nature qui passe comme lui, nous vivons par les sens dans le présent, nous vivons par limagination dans le futur ou dans le passé. On ne peut cependant imaginer ou désirer des choses présentes et toutes nos facultés doivent avoir un emploi. Il n’y a pas de quoi prendre ce ton de censeur’. Le désordre n’est pas l’absence d’ordre, ce qui serait impossible, c’est un ordre mauvais ou qui n’est pas fondé sur la raison.
172
Cahier II
Conversation avec M. M. sur sa conversion. vais en parler 4 Emmaiis — 10/91.
Je
La foule crie et ’on ne voit au-dessus d’elle qu’un fondtionnaire qui se lave les mains?. « Je vous remercie, Mon Dieu, de m’avoir créée. »
Derniéres paroles de Sainte Claire mourant (fondatrice des Pauvres Clarisses). [16] Les philosophes sont de si pauvres psychologues. « La
vie est
un
réve
bien
lié»
(Leibnitz,
Pascal,
Descartes, Montaigne, etc.). La couleur n’est pas la méme. Il y a un élément qu’aucun philosophe n’a vu, cest la tension interne qui accompagne chacun de nos actes, pensées ou paroles. C’est tout a fait différent dans le réve ou dans la veille. Dans l’un nous sommes actifs, dans l’autre passifs, déclanchés d’ailleurs. Autre
différence : la complexité. Encore : Vimagination seule est en jeu, jamais l’intelligence. Pas de contrdle suf nos opérations mentales que nous ne gouvernons plus. Il y a bien d’autres différences, en fait ce sont deux états totalement
distinéts,
comme
tout le monde
le
ie en dehors de ces faiseurs de paradoxes a l’esprit aussé, Ouvert, suant, fumant comme un plat de tripes.
Les paysans des environs soleil « le Bourguignon »’,
de Paris appellent
le
En tchéque pour la biére le pluriel ne commence
qu’a 5: I pivo 2piva 3
——
singulier duel >
A
§ pivi
[17] Le bouquet de feuilles de chéne triomphalement agité dans le clair soleil] de Septembre.
Septembre 1910
173
Un rayon de soleil attrape toute la rangée de moines, Pombre de chaque téte portée sur la téte voisine!. Un journaliste né dans une tour en Calabre ot son pére faisait des chemins de fer. 14 sept[embre].
Arrivée
de mon
VJ{ice]-Consul,
M. Malivoire de Filhol de Camas. Il arrive de Bolivie,
plateaux de 4000 métres d’altitude ot le seul combustile est de crottes de lamas.
Kutna hora — 18 sept{[embre]. — Vue de la Terrasse de Sainte Barbara®. Ces grands couvents des Jésuites qui ont Pair d’un barrage de science et de do&rine opposée a l’hérésie. Cette sculpture de confessionnal : un ermite enchainé a l’air féroce. Déjeuner a la Croix Bleue. Sainte Barb[ara] de loin comme un buisson d’épines*. Ses trois couvercles. Le thyrse, sculpté par derriére. Sedletz, grande église gothique, tableaux
intéressants,
2
fresques
d’une
admirable
fraicheur. Kolin a pied. Rencontre d’une grande charrette chargée d’oignons. A la tombée de la nuit j’entre dans une église franciscaine. Un vague catafalque entre les gros cierges mortuaires, devant lequel
on dispose des couronnes. [18] Selon Socrate, ’amour est le désir de renaitre par entremise de la beauté, c’est ce désir que faisait sentir a4 un jeune homme une jeune fille grecque en lui disant : « S’il ne me restait que le fil de mon collier de perles, je le partagerais avec toi» (Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe. — A propos du rossignol de Rome). Le radium est une espéce de Saint Sacrement de la matiére.
Rue
d’Ulm,
14 ow jadis le Saint Sacrement
était perpétuellement exposé, on conserve une partcelle de radium plomb.
dans
un
tabernacle
tapissé de lames
de
174
Cahier II
Sans aucune préparation les troupes avaient cependant le dessus en 1830, c’est la royauté qui a pris la fuite, on ne sait pourquoi. De méme en 1848, en 1870;
de méme le refus d’Henri V; de méme toujours le manque de cceur.
Boulanger;
Powvoir de l’argent — En 1830 le colonel SaintChamans engagé dans |’émeute donne de l’argent au peuple qui se met aussitét a crier : Vive le Roi! avec enthousiasme. Talleyrand au Congrés de Vienne recoit des millions du Roi de Saxe et du Roi de Naples?. En 1909, menaces de guerre avec la Serbie, lAutriche dépense 500 millions en armements : avec 10 millions bien placés elle aurait acheté toute la Serbie (Ludikar).
Niquida, nom de village. 23 sept{embre].
[19] Départ pour Hostel. Arrivé
le 25 4210 h. du soir par la Suisse. Le lac de Genéve.
Saint-Cybard?. 28 sept[embre]. — Promenade par un temps admirable.
en auto a Nantua
Draco ifte quem formasti ad illudendum ei (Ps. CIID* — comme un joujou chinois. Et
mutaverunt
gloriam
suam
in similitudinem
vituli
comedentis foenum (Ps. CV)4. L’age de la Béte — Page du Mufle.
Villeneuve, 1°? o€tobre. —
Bobiche® avec
ses che-
veux blond clair et ses yeux profonds. Conséquence
des reliques
—
Si une
vertu
reste
attachée aux vétements des saints, de méme pour tous
Pame réagit sur le corps, sur l’os essentiel, lapidaire. Ridete quidquid est domi cachinnorum (Catulle)®.
Septembre-Ofobre Ce moment
1910
solennel ot dans la vie comme
I7§ sur la
cime des arbres ’or commence 4 apparaitre?.
Les champignonnistes prétendent que la présence dune femme qui a ses régles dans leurs caves nuit aux champignons. Hardi! (audatter )— devise de Jeanne d’ Arc. [20] Le coq du clocher de Villeneuve percé de balles par les Prussiens qui tiraient dessus en 1870.
Sorcier, sourcier. Vampire, Brucolaque. La grande piéce rouge de terre labourée avec deux attelages hersant allant en sens opposé, l’un de trois chevaux noits, l’autre de quatre beeufs, et un semeur semant de la main, plantant une branche verte pour reconnaitre son alignement?. Au fond la céte des Vignes avec les limites de ses champs en rayons. Entendu de la bouche d’un cordonnier boulevard Montparnasse : Prenez ces pantoufles, Madame. Vous y entrerez comme dans de la cendre chaude. C’est tout laine’.
Parti en auto le 17 o¢tobre en auto [sé] avec les B[erthelot]. Accident avenue d’Italie, la voiture défoncée par un timon de voiture. Madame B[erthelot] manque d’étre tuée. Marlotte, Moret, Pont-sur-Yonne.
Sens le soir‘. Deux maniéres de vieillir : ’esprit qui ’emporte sur la chair, ou la chair qui ’emporte sur l’esprit®. Autrefois on faisait de l’archite@ture avec trois dimensions, aujourd’hui on n’en fait plus qu’avec deux. Sens. Les rosaces en fond de cuve. Le jardin de larchevéché. La grande rosace avec la petite couronne fragile au centre. Ressemblance avec N[otre]-D[ame] de Paris. La métropole.
176
Cahier II
[21] 19 o€t[obre]. — Partis de Sens 4 10 h. Villeneuve-sut-Yonne (église Renaissance). Joigny, arbre de Jessé. Chemins! comme pour rouler les tonneaux, Laroche, Pontigny cistercien, magnifique abside ronde
pincée comme une tente, Tonnerre et ses toits, Tanlay et ses pyramides, Montbard le soir. Superbe paysage s[ur] la France aprés Pontigny. 20/ Montbard. Superbe cloitre roman de Fontenay. Alise. La statue de Sainte Reine qui ressemble 4 ma femme. Les pierres taillées en forme de briques. Dijon, le puits de Moise. Le soir 4 Morey chez loncle de Graillet?.
21/ Départ de Vougeot aprés visite de la cave. Beaune. Le Van der Weyden, la pharmacie. Détour dans la vallée de la Cusayre. Tournus le soir. Le vieil hoétel du xvirr® siécle. 22/ Tournus. La facade en petites pierres. Le clocher d’un rose pale deélicieux, les énormes colonnes du Narthex. Macon. L’hdétel de |’Académie de Macon. La terre d’un rouge sombre puissant. Cluny, étonnant. L’art du chapiteau. Art tout intérieur. Fouillé profondément, calculé 4 voir de bas en haut. Longue route vers Autun a travers les bois sous la pluie. Autun 47h.
23/ Autun — La superbe cathédrale, le tympan, les chapiteaux (tables), la fléche. A travers le Morvan, Saint-Pére, Vézelay, Auxerre.
2 nov[embre]. Retour 4 Prague par Nancy, Pont-aMousson et Munich. A Coincy le vieux homme avec le vieux cheval si triste! Munich. — vitraux. Le Christ crucifié. Pressoir.
[22] Conf[essé] le 28, a S. Sulpice 4 [un] vieux prétre inconnu. Que Dieu le bénisse pour le bien qu’il m’a fait! Le pluriel donné a certains noms de villes comme Marseilles, etc., signifierait peut-étre que plusieurs
Odtobre-Novembre
1910
oy
centres de population s’étaient groupés sous un méme nom. Le fait est certain pour Prague (cependant au singulier). Mademoiselle B[raunerova]. « Dans le Sud de la Bohéme les gens sont si pauvres! J’ai vu une petite fille qui venait acheter pour deux ceufs de café. On lui en donnait plein le creux de la main et elle tirait les deux ceufs tout chauds de son petit tablier rose. » Contre-chant.
Une peinture représentant le Jugement dernier. Une longue ligne droite pareille 4 l’aréte d’une cataracte ot apparait le front lancé 4 toute vitesse d’un Niagara de damnés, cependant que les élus montent au ciel en immenses colonnes de lumiére et de fumée (comme Peau pulvérisée).
L’Eglise est une société qui se confesse et qui se réforme (ap[ud] Mer Baudrillart, Cluny et la papauté)}. [25] Omne caput languidum et omne cor maerens (Is., cape L)*.
Homme d’affaires : les yeux comme des billes de marbre.
bleu-foncé,
ternes
Ecce enim... Dominus... auferet a Jerusalem et a Juda validum et fortem, omne robur panis et omne robur aquae ; fortem et virum bellatorem, judicem et prophetam et artolum et senem ; principem super quinquaginta et honorabilem vultu, et sapientem de architettis, et prudentem eloquit myStict. Et dabo pueros principes eorum, et effeminati dominabuntur eis (Is., cap. II)*. Il ne s’agit pas de traduire, il s’agit de transsubStantier*.
Le méridien de la Grande Pyramide, d’aprés l’abbé Moreux, divise 4 peu prés en [26] deux les terres
178
Cahier II
habitées (dont la majeure partie est englobée dans sa | latitude), Or ce méridien est a peu prés celui de Jérusalem. Ainsi se justifie la prophétie relative au crucifiement : « In medio terrae. » Digladiabile discidium | (Prudence)?
Stella solem genuit. Il y a deux maniéres de faire mal au coeur. Lorigine
de logive
serait dans
l’entrecroisement
de deux cintres (Chateaubriand)’.
Aujourd’hui, dans le naufrage général de la raison et de la morale, heureux qui surnage, ne ftit-ce que sur un radeau
de fortune,
fait de trois tonneaux,
d’un
piano 4 queue et d’une cage a poules! Qui judicat me Dominus est. Qui me juge prend la place de Dieu.
Tous ces poétes sans rognons! Ecce stupebit unusquisque ad proximum combusta, facies eorum (Is.)°.
tuum: facies
Mlle B[raunerova]. — On vient d’ensevelir un jeune homme a Rostock. Comme on le croyait catholique, [27] on le mit dans un cercueil décoré dun crucifix. Deux jours aprés sa mére arfive, et comme elle était protestante elle le fait retirer du cercueil et mettre dans un autre qui était décoré d’un calice. Ne sachant que faire du premier, on I’a mis aux enchéres. Personne n’a essayé de profiter de cette occasion! R. A. Fleury 4 Condom (Gers)*. Sur la facade de l’une des vieilles maisons de la place de Hotel de Ville on voit une brebis en pierre.
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Décembre 1910
179
Il y avait 1a autrefois une foire pour les animaux. Un enfant tomba d’une fenétre du second étage. Une brebis était 1a qui le recut sur le dos et ’empécha ainsi de se tuer. La grandeur de Beethoven est celle d’une ame qui se posséde. Cette profonde douceur, cette lenteur parfois, pleine de délices. Boris Godunoy!. C[on]f[essé] le 23 au P. Hildefonse Lichtenstein.
Deux maniéres de briller : ou de rejeer la lumiére ou de la produire. 7
Les cloches Baudon et Baude?.
Quand on aime, ces yeux levés, ces élans aussitét
contenus d’un cceur trop plein’. [28] Antequam parturiret, peperit; antequam veniret partus ejus, peperit masculum... Numquid ego qui alios parere facio, ipse non pariam ¢ dicit Dominus ; si ego qui generationem ceteris tribuo, Sterilis ero ? ait Dominus Deus tuus. Laetamini
cum Jerusalem omnes... gaudete cum ea gaudio universi, qui lugetis super eam, ut sugatis et repleamini ab ubere consolationis ejus; ut mulgeatis et delicits affiuatis ab omnimoda gloria ejus. Quia haec dicit Dominus : Ecce Ego declinabo super eam sicut fluvium pacis, et quast torrentem inundantem gloriam gentium, quam sugetis (Is., cap. LX VI)*.
Ces livres des grands auteurs tout garnis des notes de quelque pion, comme ces piéces de gibier ot lon trouve encore les grains de plomb du coup de fusil qui les a abattues. Impression de majesté immense extréme douceur et lenteur’®.
obtenue par une
La nuit 4 demi dormant. Les premiéres cordes sont d’or, les secondes
de soie, et les derniéres
de ces
180
Cahier IT
filaments spirituels dans la nuit tendus sur la table de Pythagore?.
Celui qui ne jetine pas la veille de Noél ne verra pas le petit cochon d’or (cette tache qu’on fait au plafond avec un miroir et un rayon de soleil). [29] La soie, le bruit d’une femme a cété de nous qui marche (au crépuscule dans une ville avant que les lumiéres soient allumées)?.
Parole poignante du Christ 4 chacun « Vinea mea eletta, quid fect tibi ?»®.
de nous
Et non seulement la nourriture, mais l’enivrement!
A Prague, (Karlovonam) cette maison d’ot Faust fut emporté par le diable*. Il y a dans l’armoire au fond du secrétaire une petite glace qui conserve son reflet de jeune fille; elle Va enfermée 4 clef. Une lyre tricotée avec pour cordes des fils de coton blanc. Oh, Madame, mon comme un poulet.
mari est si beau!
il a le dos
Ecce, Domine, tu cognovisti omnia novissima et antiqua.
Tu formasti me et posuisti manum tuam super me. Confortata est scientia tua ex me (Ps. CXL)°. Dirigatur oratio mea sicut incendium in conspedtu tuo
(id.).
Singulariter sum ego donec transeam®.
Filiae eorum templi’.
compositae,
circumornatae
ut similitudo
Le pauvre vieux cheval Petit Gris abattu.
IQII [30] T
Le x [janvier], temps radieux —
le 2 et le 3, neige,
les taches blanches de tous cOétés, la riviére comme grasse, épaisse et figée, avec des caillots qui se forment?.
Sport = desport’.
« Pour ne pas faire de fautes d’orthographe, il faut que j’écrive trés vite. » Légende d’ Autun — Deux époux s’aimaient tendrement.
La femme
meurt; on laisse dans son tombeau
une place a cété d’elle pour le mari. Quand on l’y porte 4 son tour, le cadavre de la femme tend la main et prend celle de son mari. En administration le conseil et la décision viennent
toujours des subalternes. Nous aussi sur la croix un jour nous gotterons de ce vin devenu aigre.
L’Epiphanie, manifestation — Autrefois, le 6 janvier on célébrait les trois triomphes de ’?Empereur Auguste. Les rois et l’étoile, ’eau du Baptéme, l’eau transformée en vin*. Bénédiétion des eaux, le moment
ov elles s’arrétent.
A Prague l’eau des Trois Rois.
Le plain-chant, jubilation, dilatation de chaque mot
182
Cahier II
pour que toute la vision intérieure y tienne, la vision expulsée en son. I//uminare, Jerusalem’. [31] La voie du Ciel, c’est de triompher sans lutte; de répondre sans parler; de faire venir sans appeler, d’arriver a ses fins par la disposition de sa providence (Lao tzeu)?. Le 8/1, diné a Emmaiis.
Maitre Tch’eng l’ancien a raconté que, en Perse, une ancienne sépulture ayant été ouverte, dans les cendres d’un cadavre décomposé on découyrit un cceur pétrifié. On le scia en deux et on y trouva un paysage comme peint. La tombe était celle d’une captive qui 4 force de penser a son pays natal en avait fait se figer Pimage dans son cceur?. Le I-king et les spéculations de Pythagore‘. Epiphanie — Toutes choses visibles sur la neige. L’Immaculée Conception — Die Erscheinung’. Par la neige le ciel prend comme un moulage de la terre. La pomme, le fruit par excellence, pomum, tonde comme l’univers*, toute chair, suc et sucre. Le diable
— Apple, apfel, radical jab/ en slave. Sed vincere in bono malum’.
Grande neige, la riviére prise. [32] Le succés* des maximes de la Révolution est da a leur évidence apparente et grossiére. Prenons par exemple celle qui semble la plus sensée et la plus plausible : « L’impdt doit étre consenti par ceux qui le payent. » Il n’y a rien au fond de plus absurde et plus irréalisable. 1° En principe. Car i/faut que Etat vive. C’est une nécessité premiére et impérative qui ne peut dépendre du consentement de personne.
Janvier 1911
183
2° En fait : ni les femmes, ni les mineurs, ni les étrangers, ni les Sociétés!, cependant contribuables, ne
sont électeurs. 3° Strictement appliqué ce principe comporterait le vote de ’impét par les seules PESOS qui le supportent, par ex[emple] Pimpot foncier [33] par les proprictaires. Ainsi les aides et subsides du Moyen Age. 4° En
fait léle€torat,
le systéme
des
majorités,
Pimpossibilité de choisir un représentant adéquat, la cuisine parlementaire, etc., réduisent a rien la part de
consentement que je suis censé donner. On ne voit pas lintérét que les républicains euxmémes ont a s’attacher 4 ce langage archi-faux et démodé de l’époque la plus superficielle et la plus niaise qui fit jamais. Les principes républicains se réduisent a deux : « Je ne veux pas au-dessus de moi de pouvoirs de fiction (ayant leur principe en eux-mémes? au dehors de la Nation) », « Je veux me réserver® le moyen de faire sentir mon mécontentement aux Gouvernants. » Au xvuré siécle la force cesse d’étre nécessaire‘ a la préservation de la France. La loi martiale prend fin. Au régime de la force succéde celui des intéréts®. A Vautorité succéde la force, a la force l’image de la
force. Comme on dit d’un tel qw’il est fort au billard. Les élections sont une image fictive de la guerre, une mélée immonde. Fort au sens absolu d’en bas, comme
le fromage’®.
[34] Mais c’est toujours la force qui l’emporte. Le peuple s’amuse d’une fiction. On peut mériter d’un homme, d’un supérieur. La foule ne peut étre qu’entrainée ou corrompue. Les élections sont l’abdication rabachée tous les 4 ans par un peuple’ gateux. La premiére vertu d’un roi est le courage de verser le sang. L’expérience de la vie rend indulgent a légard des « tyrans ».
184
Cahier II
Au Tonkin on fusillait « les pirates » avec un seul fusil pour ne pas salir les autres. Le pauvre Dr Mesny mort de la peste 4 Moukden, ou il avait été chargé d’organiser les mesures de protection}. Que de choses sur un chapeau de femme! mais on ne peut y cultiver les pommes de terre. Chateaubriand, frére d’une sainte, Julie, Madame de
Farcy, qui le convertit. De qui est cette parole « mais je concois qu’on meure de contrition »?. La glace cassée qu’on enléve par charretées, comme les morceaux d’un puzzle. Premier soleil du cru 1911. Acre judicium — \a critique acérée. [35] Le petit X.
nommé
maire
envoie
aussitdt
tous’ ses souliers chez le cordonnier.
Vous riez de travers, avec ce dentier acheté d’occasion.
Entrez
si vous
le voulez,
et regardez-moi
faire.
Mais ne bougez point, je vous prie! pas un souffle! Le doreur au milieu de ses feuilles impalpables. La mort héroique du Dotteur Mesny. — On mande de Vladivostock au Rousskoé Slovo: Invité par les autorités chinoises 4 aller combattre
la peste 4 Fondziadian, le doéteur Mesny, qui dirigeait Pécole de médecine chinoise de Tientsin, ot il était professeur, s’était consacré 4 cette tache avec une
compléte abnégation. La fatalité voulut que la contagion latteignit dés le premier jour. Ayant diagnostiqué la maladie sur lui-méme, le doéteur Mesny fit preuve d’une admirable maitrise de soi. Afin de ne pas
Janvier-Février 1911
185
exposer la vie de ses collégues, il demanda lui-méme une voiture, sortit de sa chambre aprés s’étre enveloppé dans un drap imbibé d’une solution de sublimé, et se rendit au baraquement des pestiférés. Artrivé au baraquement, Mesny déclara qu’il serait mort dans deux jours et demanda qu’on avisat sa famille de son décés. Les médecins russes firent l’impossible pour sauver leur confrére, mais lui, toujours soucieux de ne pas
transmettre la maladie, ne souffrait méme pas qu’on prit sa température}. Si j’avais la bonne fortune de rencontrer un maitre qui sut bien diviser son sujet, je suivrais ses pas comme ceux d’un dieu (Platon, Phédon)?. Le courant qui s’embarrasse et s’obstrue, s’épaissit®. [36] Le peintre Mucha prétend qu’il n’y a ni hommes ni femmes
complets,
mais
pourcentage plus ou moins n’est pas exact.
dans chaque individu
un
grand des deux. —
Ce
Nous autres sommes ainsi faits que nous trouvons wil y a moins de difficulté a étrangler les gens qu’a les craindre (La reine Christine de Suéde)‘. La bénédiétion de Saint Blaise donnée cierges en croix allumés'.
entre
deux
Il demande au saint marabout de lui cracher dans la bouche pour dissiper les erreurs de son cerveau.
Les Mahométans considérent le négoce comme la profession la plus noble puisque c’est celle qui fut exercée par le Prophéte.
Elegit Deus... et ea quae non sunt, wt ea quae sunt deStrueret (I Cor., 1)8. L’enfant
qui dort cramponné
au rebord
de son
186
Cahier II
berceau, comme passerelle.
l’officier de quart a la barre de sa
Ce matin entre deux messes comme un homme entre
deux flambeaux qui fait deux ombres divergentes.
Idées sur la mise en scéne : 19 Eviter les portants, les frises, etc., tout ce qui donne 4 la scéne cet aspect pas solide, de carton, de
loques flottantes. Je réclame le droit 4 la [38] troisiéme dimension!. Par exemple il faut représenter un arbre pat un corps vraiment cylindrique et non par une représentation soi-disant en trompe-l’ceil. Un plan ne peut donner Villusion de la 3° dimension que lorsqu’on est en face et qu'il n’y a qu’un point de vue. Il en est ainsi pour les tableaux, mais non au théatre ot le speCtateur ne voit de face que la toile de fond et tout le reste obliquement. Il faudrait trouver un matériel non pas rigide comme la toile collée sur des lattes, mais plastique, léger? et malléable tout en gardant la
forme qu’on lui donne. I] ne faut pas peindre mais sculpter en trompe-l’ceil. 2° Les colorations sont complétement fausses, jamais au point. Cela résulte d’ailleurs de |’établissement de la scéne par plans et non par volumes. Pas d’ombres possibles. 3° Supprimer la rampe, ou en tout cas se servir @une lumiére qui projette des ombres d’un méme cété. La difficulté est qu’au théatre le personnage est presque toujours en silhouette sur la toile de fond qui est censée représenter la partie éclairée. 4° La scéne ne doit pas avoir une dimension’, un
cubage uniforme, qu’il s’agisse d’une scéne d’intimité ou d’un vaste déploiement scénique. Chaque scéne a un volume autour d’elle qui lui convient. Il faut pouvoir restreindre les dimensions de la scéne 4 volonté. Cela
€éviterait aussi ces marches des acteurs pour la remplir si fausses et si fatigantes. 5° Pas de vétements tout neufs. 6° Couvrir la scéne, éviter qu’on voie les planches‘.
FPévrier 19711 [37] Omnibus
enim
mobilibus
187 mobilior
est sapientia ;
attingit ubique propter suam munditiam (Sap., VII, 24). St enim inimicos servorum tuorum et debitos morti cum tanta cruciasi attentione, dans tempus et locum per quae possent mutari a malitia; cum quanta diligentia judicasti jilios tuos quorum parentibus juramenta et conventiones dedi sti bonarum promissionum (id., XII, 20-21).
... e£ pugnabit cum Deo orbis terrarum contra insensatos (id.)*. [39] Liebessehnsucht?.
Les joues rondes de lenfant qui empéchent chaque cété une grosse larme claire de couler.
de
Toute la laideur de la mise en scéne actuelle provient de ce qu’il n’y a pas d’ombres. Jouer le jour, éclairer avec de la vraie lumiére?
Ur-Sorge, —
Ur-mutter-Furcht®.
Quadrato agmine.
Boutons de grenadin‘.
Du 12 au 19, représentations de la Tétralogie'. Le violoncelliste penché en avant sur son instrument entre ses jambes tirant des sons comme de sa propre caverne. La main gauche comme détachée ne tenant a rien volant sur le manche de I’instrument. La marche funébre de Chopin. Un homme qui s’avance seul 4 pas saccadés de plus en plus profondément dans la région des ombres de la mort. Dans Chopin laccompagnement est toujours si beau, on entend l’4me sous pression, le cceur palpitant et faisant : « ha! ha! hahaha» en attendant le chant qui va jaillir de lui’.
188
Cahier II
[40] Schumann toujours sentimental, agréable et un peu niais.
La grosse jeune fille qui prend le galop comme un cheval de labour. Parabole de la semence pour la parole de Dieu. Cela s’applique 4 tous les cceurs. Dans tous les cceurs il y a une part qui tombe dans les épines, une autre sur la roche dure, etc., et combien dans une terre bonne et
optime!? — « Que la main gauche soit votre chef d’orchestre » (Chopin aux pianistes)’. La bonne allemande sentimentale ne se couche jamais sans glisser une certaine lettre sous son oreiller.
La petite fille ’imite et chaque soir fourre pieusement sous le sien un vieux prospectus jaune’. 22 février. —
Nomination
de Consul Général.
Suarés prétend qu’on jetait des pierres 4 Tolstoi sur le chemin de Toula. Non, i/ n’y a pas de pierres en Russie. Il faut en faire venir par la petite vitesse, a l’usage des
gens qui n’ont jamais péché4. Depuis la mort de Tolstoi krach de l’encre en Russie. Soixante-douze wagons-citernes en souffrance dans la gare de Toula, renvoyés vers la Mer Noite. [41] Croac® — Ali Maimon Habenichts®. Le
kilometre
est mille
fois
lenjambée,
le mille
1000 fois la longueur du corps, l’espace en arriére et en avant mesuré avec une jambe pour levier par le méme pied. Du 9 au 13, voyage a Vienne. Opérette, ballet. Certains tours que la grammaire autorise sont plus criminels que des fautes. Summum jus, summa injuria’.
Février-Mars 1911
189
Style de Sainte-Beuve : « La corde fondamentale », « la proportion ow!’on est dans un sillage » (Cause[ries] du Lundi, t. TD).
Non veni sotvere, sed adimplere?. Pas de so/ution, mais tout est rempli. La vérité est catholique. Visite de Mlle Emma D. Sanders.
La croyance a la métempsychose universelle dans PAsie paienne a pour raison la nécessité de trouver une cause au mal actuel, soit le mal commis
dans un
état antérieur. D’aprés
les
Chinois,
|’ « influence»
suit l’action
comme le son le coup sur la cloche’®. I] est naturel que l’année commence en décembre ou le soleil est le plus bas. [42] On appelle les vers 4 soie « paon-paon » (les précieux).
Lettre de Mlle de Lespinasse : « De tous les instants de ma vie. Mon ami, je souffre, je vous aime et je vous attends‘. » Le grand jeune homme roux qui a la haute taille et Paspect mélancolique du chameau. Le prétre a la barre de communion ensemengant le long sillon humain de bouches ouvertes.
L’euvte n’est pas le produit de artiste, Partiste est Pinstrument de Vceuvre. Juger un artiste par les anecdotes, juger d’une statue par les débris. Il est naturel que la création artistique entraine un certain déséquilibre’. Bod, Boudha, Odin, Bog (en slave), Gott, God.
190
Cahier II
Moréas, les raisins secs de Patras}.
Mars 1911. — Mort chrétienne de Charles Tresnea, aprés avoir regu les sacrements. Ses derniéres paroles ont été: « Je suis heureux?. »
La foule veut le faire roi, sed fugit in montem ipse solus*. (le temps) dont les moments ont cessé d’étre consécutifs (Rév. R. H. Benson, None other Gods)s. [43] Herbier et pépiniére.
La grosse jeune fille qui vend des pommes cuites : la figure rouge et irréguliérement tuméfiée avec des « ceils » enfoncés dedans comme une pomme de terre. Santtificabo Nomen meum magnum inter gentes (Is., cap. XXVI)*. Quiescite agere perverse (id., c. 1).
quod pollutum ef
Principe de lascétisme indiqué par S. Ignace — Agere contra’. Louis XVII en venant au monde portait sur la cuisse gauche une tache ayant la forme d’une colombe, ce que Marie-Antoinette appelait le « signe du Saint-Esprit ».
La cause de toutes les grandes défaites du Moyen Age, Crécy, Poitiers, Azincourt, Courtrai, Nicopolis, Granson, Morat, etc., a été toujours la méme : l’arme-
ment absurde adopté a cette époque. On ne doit pas s’armer pout la défensive. L’armure était pour la parade (cf. le football). Dés qu’on se battait pour de vtai, ’enarmuré était massacré. 17 apparition de Parmure : les gladiateurs dans la révolte d’Autun, que les légionnaires renversent 4 coups de haches et de leviers. Autre raison de Parmure : elle favorisait le petit nombre, elle était une défense contre les surprises et les embuscades : faite pour la petite guerre. [44] Absurdités du panthéisme : ou le Tout est fini,
Mars- Avril 1911
191
et alors il n’est pas Dieu, ou il est infini, et il n’est pas
le Tout, puisqu’il ne peut jamais arriver 4 étre zoza/. Un tout indépendant de la somme de ses parties?. 31 mars. — Coqueluche de Gigette. La contemplation sonore, la contemplation par Pouie du train de la vie, de ses rythmes [45] et de ses figures. Le chaos est une impossibilité mathématique. d’existence sans un ordre.
Pas
La Tyrienne touche le vétement du Christ et lui soustrait sa guérison comme par surprise et malgré lui. « Qui m’a touché? une vertu est sortie de moi. »
La fin de la sphére est le centre et non point la périphérie. La nourrice de Mlle B[raunerova], Pepi, avait tou-
jours pendu a sa ceinture un long mouchoir destiné aux enfants. Elle leur racontait des histoires merveilleuses dont elle ne savait plus le commencement ni la fin. « C’est Sarka® qui était malheureuse de se voir ainsi
attachée a ce chéne par les cheveux! Des quantités de cotbeaux volaient tout autour,
mais ils ne voulaient
pas godter de sa viande parce qu’elle était encore vivante. Un jour on tendra une chaine d’or de Prague jusqu’a Amsterdam et tous les Juifs passeront dessus. » De tant de choses profanes j’ai tiré la conséquence chrétienne. 2° Station. — Susception solennelle de la Croix par le Christ. Acceptation de cette communion : « Ef miserunt lignum in panem meum.» Le mal, la croix non [46] pas détruite, mais sanctifiée. Dieu maintenant y est attaché. Non veni solvere sed adimplere®. Ve st[ation]. perdut.
—
Afin que rien de la croix ne soit
192
Cahier I
Un emploi pour un fonétionnaire : Conservateur de la Mer Caspienne (qui s’évapore un peu tous les ans). Il faut porter la croix avant que la croix ne nous porte?.
10& station. Le dépouillement, la parfaite nudité, la nudité eucharistique, l’anéantissement dans l’amour, de tout sauf amour. Il n’y a plus rien de lui qu’on voie. Non erat illi aspeétus*. Il y a un principe d’Archiméde pour les esprits : Toute idée étrangére introduite dans la cervelle éprouve une poussée éliminatoite proportionnelle a la densité du milieu qu’elle déplace. Il faut un effort dont peu de gens sont capables, si l’on veut conserver cette idée le temps nécessaire pour l’examiner et, le cas échéant, l’assimiler. Tout ce qui est plein a une tendance 4 rejeter. (Pascha) donec impleatur in regno Dei (Luc.) Sed ut adimpleantur Scripturae’. La révélation écrite d’avance comme [47] en creux.
Jeudi-Saint. — Les trois moines sonneurs. D’abord de profondes révérences pour mettre les cloches en branle, en haleine, des tractions lentes. Le 1° moine
athlétique et impassible, ne tirant qu’avec les bras, les 2 autres tout jeunes, sonnant éperdument, presque emportés, arrachés de la terre par la cloche. (Les pieds pris dans des courroies pout se fixer au sol.)
L’h[omme]
d'affaires, les yeux grand ouverts, lair
avide, ahuri et comme fasciné.
Sile monde est fini, c’est donc qu’il y a un nombre de choses limité? C’est une maniére imparfaite de s’exprimer. Par ex[emple] on peut dite que nous avons trois principaux organes, le coeur, le foie et les poumons. Mais qui ne voit que ce chiffre n’a d’importance ici que mnémotechnique. Le chiffre n’importe que quand
Avril 1911
193
il y a figure et alors il s’y absorbe. Je peux me représenter la figure du pentagone, indépendamment du nombre 5. Pour Dieu il n’y a que des individus, chacun complet en lui-méme et absolument ininterchangeable?. [48] Insouciant, amateur de vin blanc. Le développement de lerreur nominaliste au x1x® siécle est du en grande partie a l’emploi des forces générales de la nature. On considére léletricité, la vapeur, la lumiére, comme des faits premiers dont la houille, les couples de fer et de cuivre, etc., ne sont
que les moyens. C’est une vue fausse. L’élément premier est toujours la matiére concréte, et la force , n’est que son passage a l’état de mouvement.
« Je vais vous livrer toute ma pensée. » — Non, je vous en prie! Clovis et Louis sont un méme mot (Chlodowig). Ainsi le premier roi baptisé fut un Louis?.
Puer nostri forma risus Pro quo vervex eft occisus
Vita signat gaudium
Mane novum, mane laetum Vespertinum tergat fletum
Ouia vita vicit lethum Tempus est laetitia
Ad{am] de S. Viétor’.
Credo magis soli Mariae veraci Quam Judaeorum turbae fallaci. Hen (celt.) Senex Ainé. Seni ? Parce qu’on devient vieux a 60 ans? —
Hex,
Sex.
Laméthode de lascience qui est la synthése et ’induction, ot la mineure prouve la majeure, n’est bonne que
la ot. lexpérience et le fait permettent de contrdler Vafirmation. Sinon, comme [49] en philosophie et en philologie on aboutit 4 l’extravagance et aux chiméres. imagination est synthétique, la raison est analytique. Il faut que les propositions de l’une ne soient pas
194
Cahier II
contraires aux fins, il faut que celles de l’autre ne soient pas contradittoires dans les termes. Contre la théorie de la Nébuleuse ou toute autre supposant un état diffus de la matiére antérieure aux corps planétaires.
— # quelque état de diffusion qu’on le suppose la
matiére a€tuellement concentrée dans les planétes et le
soleil suffirait-elle 4 occuper l’énorme espace « délimité» (combien vaguement!) comme frontiére extréme pat Porbite de Neptune? — Comment supposer cette masse gazeuse ou cette semoule d’atomes obéissant sans déchirement a un mouvement uniforme de rotation? C’est contraire a
tout ce que nous savons des gaz. — L’état gazeux pour les corps solides n’est pas un état d’équilibre. C’est un état violent. Pour d’autres au contraire cest état normal. Comment supposer un état de choses ot ces conditions contradictoires soient réalisées A la fois?
— Toujours la chimaera bombynans in vacuo’. Quand une hypothése est moins
claire que les choses qu’elle
prétend expliquer, il vaut mieux s’en passer. [50] Léger comme
si ses os étaient d’aluminium.
26 avril. — Déménagement Jungmannovya, 27. 2-4 mai. — Voyage a Pilsen. Fabrique Skoda. Les énormes canons qu’on trempe en les plongeant dans un bain @’huile, qui fait une famme de 30 métres de haut. Dans un hall vaste comme une cathédrale. Les deux ouvertures 4 des hauteurs différentes d’ot descendent obliquement de larges bandes de soleil. A la verreric, la longue vessie de verre au bout de la canne?’.
Jean le Bon, moyennant 600 000 écus d’or, donne sa fille Isabelle au fils de Galéas Visconti de Milan, en
Pinvestissant du Comté de Vertus en Champagne’. A la naissance
de Louis
d’Orléans,
Bertrand
guesclin le touche sur l’épaule de son épée.
Du-
Aoril-Mai Philippe
de
Vertus,
1911
mort
195
a 24
ans
en
1420},
deuxiéme fils (aprés Charles d’Orléans) de Louis et de Valentine de Milan déme de Milan.
—
Galéas
Visconti
construit le
Papyrus — Lucullus — Persique. (Mendiants) — Caymans — quémandet?. De tous les trésors de l’antiquité cassés en petits morceaux, l’art chrétien fait les mosaiques et les vitraux®,
[51] Galiache (p. Galéas). Lfouis] d’Orléans assassiné le 23 novembre 1407 4 7 h. du soir dans la rue Vieille-du-Temple; sa main droite séparée du corps. I] avait pris pour embléme un baton noueux,
Béhagne, Bohéme
Bohéme.
: « Puces,
Eustache
poulx,
Deschamps
puour
sur
et froidures.»
la La
biére amére, les choux pourtis‘. Caractéristiques de la Bohéme : la grande plaine a betteraves sans cours d’eau, les villages autour de la mare stagnante ou barbotent les oies et les enfants, les vallées étroites et encaissées, les routes poudreuses bordées d’arbres fruitiers, les clochers carrés surmontés d’un bulbe®.
24 mai. — Voyage a Slany’. A la porte d’un journal socialiste de Prague, groupe
de rédacteurs ct d’imprimeurs mangeant des cerises dans un sac en papier. L’un petit et gros, Gampy’, petit veston, chapeau mou
en godiveau, souriant et
vague comme un bonhomme de neige qui commence 4 fondre. L’autre grand, en redingote et vétements noirs, chapeau
melon,
lair blafard
et grossier
a la
fois d’un instituteur et d’un charretier, la figure complétement mAchée par la petite vérole.
196
Cahier I
Horreur de la foule. Pendant 1 h. 1/2 sur le bateau suffocation au milieu d’une horde de grosses femmes, pareilles 4 un parc de gros cochons ronds’, qui gtognent, mangent, boivent, turbulent, agitent la queue et font leurs excréments. [52] Pour aimer Phumanité il faut la voir de loin. Pauvres gens?! Question si la véritable civilisation ne dépendait pas dune répression impitoyable des classes inférieures. Horreur de leur déchainement. Face a face. Assis tout le jour dans le wagon devant cette grosse femme et la contempler avec une horreur qui ne laisse place 4 aucune autre pensée, atterré. Optavi et datus et mihi sensus ; et invocavi, et venit in me
Spiritus sapientiae ; et praeposui illam vegnis et sedibus, et
divitias nihil esse duxi in comparatione illius ; nec comparavi illi lapidem pretiosum, quoniam omne aurum in comparatione illins arena eS exigna, et tanquam lutum aestimabitur argentum in conspettu illius. Super salutem et speciem dilext illam, et proposui pro luce habere illam, quoniam inextinguibile eft lumen illius... Venerunt autem mihi omnia bona pariter cum illa, et innumerabilis honeftas per manus illius,
et laetatus sum in omnibus : quoniam antecedebat me ifta Sapientia, et ignorabam quoniam horum omnium
mater est.
Quam sine fittione didici et sine invidia communico, et honeStatem illins non abscondo. {53| Infinitus enim thesaurus est hominibus : quo qui ust sunt, participes fatti sunt amicitiae Dei, propter disciplinae dona commendati
(Sap., VII. —
Epfitre] de la messe de S. Th[omas] d’Aquin et de S. Philippe de Néri)*. C[on]f[essé] pour la Pentecdte. Trés frappé de ces mots de mon confesseur : « Ayez confiance dans l’infinie richesse de lEsprit-Saint.» J’aime le sens de ce mot*.
Cucurri in siti (Ps. LXT)§.
La marmotte Mandchourie,
ou tarabagan, cause de la peste en quand elle est saine pousse un cri qui
Mai- Juin rrr
197
ressemble a « pop’a, pop’a!» Ce qui signifie 4 peu prés en chinois : pas de mal, n’avez pas peur! La floraison opulente couleur de brume.
et molle
des hydrangceas
En 1793 le vaisseau les Drotts de /’Homme, a peine construit et sortant du port d’Audierne, est coulé par les Anglais. Les Goo hommes d’équipage sont noyés et leurs corps rejetés sur la gréve ot on les enterre dans le sable. [54] Récemment la tempéte a déplacé la dune et les ossements et cranes disjoints des 600 hommes jonchent le sol de nouveau. Les droits de Phomme!! Grande
jeune
fille,
Vair
fin,
hardi!,
et
altier,
presque méchant.
Pauvre petite jeune femme, l’air fatigué, marchant courageusement? dans sa robe comme dans des vétements mouillés, comme remorquée par sa figure qu’elle tend en avant, effarée et souffrante.
.. Ainsi... au 1¢f dimanche de lPAvent le répons Ass piciens a longe ou, prétant a Isaie un rdle qui rappelle une scéne célébre des Perses d’Eschyle, la liturgie fait adresser au chceur par le préchantre ces paroles énigmatiques : Aspiciens a longe ecce video Dei potentiam venientem et nebulam totam terram tegentem. Ite obviam et et dicite: Nuntia nobis si tu es ipse qui regnaturus es in populo Israel. Et t{out] le cheeur répond comme s’il découvrait lui aussi ce que le prophéte découvre : Aspiciens a longe ecce video Dei potentiam venientem et nebulam totam terram tegentem. Le Préchantre Quique terrigenae et filii hominum, simul in unum dives et pauper.
[55] Le Cheeur
Ite obviam ei et dicite :
198
Cahier II Le Préchantre
Oui regis Israel intende. Qui deducts sicut ovem Joseph! Oui sedes super Cherubin ! Le Chceeur
Nuntia mibi si tu es ipse qui regnaturus es in populo Israel. Mais qu’a-t-on besoin d’interroger ainsi ’horizon? Celui qui vient est connu. II n’y aura pas de triomphe assez beau pout saluer sa venue : Le Préchantre
Tollite portas, principes,
vestras, et elevamini, portae
aeternales, et introibit.
Le Cheeur Oui regnaturus es in populo Israel. Le Préchantre Gloria Patri et Filio et Spiritui Sano. Le Chceeur
Aspiciens a longe ecce video Dei potentiam venientem et nebulam totam terram tegentem. Ite obviam ei et dicite: Nuntia mihi si tu es ipse qui regnaturus es in populo Israel. Amalaire le commente avec une juste admiration. (Mer Battifol, Hist[oire| du bréviaire romain, pp. 135-136)
[56] Bénédiétion du cierge pascal et du feu nouveau, usages venus de France 4 Rome aprés le viri® siécle
(id. )?.
Il faut envisager les événements par séries et ne pas intervenir légérement dans une série une fois déclenchée. « Ordres, contre-ordres, etc. »
L’homme d’action doit étre incapable de se représenter avec une égale force les résultats de décisions contradictoires.
Arrivé a Hostel, le samedi 10. Voyage dans l’odeur de foins coupés a travers |’Allemagne et la Suisse.
Juin 1911
199
La fée pourchassée qui se blottit dans le sein d’un roi sous la forme d’un petit lapin blanc. Histoire du Prince Chéri, les métamorphoses boudhistes (Mad[ame] Leprince de Beaumont, /e Magasin des enfants). Impression d’innocence : l’enfant d’un an qui dort pendant
qu’on
entend
un
petit cricri
intermittent.
Lenfant : la plus grande innocence résultant du plus grand trouble de ame. Fleurs bleues du « Ne m’oubliez pas». Aussi naif le ciel en juin avec ses étoiles
qui reparaissent pour peu d’heures. Les étoiles d’été qui ont la vie courte’.
[57] Bruit de Peau qui s’égoutte ou de loiseau solitaire, dans un fourré (Ecoute! écoute!) Cout! Cout?! A Lyon on appelle Berthe ces grands pots de fer-blanc pour le lait. Paroles d’un membre de la Commission de Fourviére*. On voulait mettre Napoléon a cheval et saluant Notre-Dame dans une mosaique® représentant les gloires de la France : un membre de la Commission s’y opposa et finit par dire : « Eh bien! sion met Napoléon, au moins qu’on ne le mette pas 4 cheval! » Voyage a Paris : 20 juin — a Villeneuve : 21. La vieille femme qui pour charger son fagot se couche par terre sur le dos. Accablement de juin : toute la terre occupée et surchargée de travail. Duval
: ce
n’est
pas
travailler,
ca,
Cest
brader
(baraterie ?)°. Au sujet de la vente de Bellefontaine, conversation avec le notaire Pradier et le marchand d’immeubles
Lévy : le premier, gros, court, la téte de Verlaine avec des sourcils en crochet’, noir, de grosses jambes dans
de petits souliers. Le second, grand et maigre, lair inquiet, avec CLAUDEL
V - 10
un tic dans le coin de la bouche,
les fe)
200
Cahier IT
membres attachés comme taine] non vendu?.
avec des ficelles. B[ellefon-
Retour 4 Hostel, 28 juin. Paysage d’Hostel. Comme une immense ville [58] effondrée, de longs pans de murailles verticales subsistent 4 toutes les hauteurs. Regards de glaciers. Vaste cuve emplie dun pur éther?.
Si les étoiles s’éteignaient toutes a la fois comme quand on ferme le compteur’. Une naive petite étoile tendrement qui dit : Ne m’oubliez pas?. La Vigne, le Froment et ?Ombre'. Départ d’Hostel,
11 juillet —
Genéve,
12, c[on]-
f[essé]. — Interlaken et lac de Thoun (13) — Lucerne et Zurich (14), Constance et Munich (15), Prague, 16.
La Jungfrau, prodigieuse cataracte. 13, commencement @oreille’.
de mes
bourdonnements
Le savon sur la toilette qui travaille de toutes ses forces 4 sentir bon sans y parvenir. Scéne au clair de lune sur la terrasse du chateau : la vieille mére, le jeune homme qui revient seulement pour quelques heures, les 2 sceurs, l’une mariée avec ses
enfants qui dorment. La lampe de la bicyclette qui s’allume’.
Lettre de Robert VJ[...]8 qui va se faire capucin (20 juillet), Romont, Suisse, canton de Fribourg. Mad[ame] V. accompagnée de sa sceur, va 4 Mastrils pour essayer de faire revenir Robert avec elle. Elle n’y réussit pas. 23 j[uillet].
Juin-Aoht 1911
201
[59] Mlle B[raunerova] veut avoir un cercueil qu’elle peindra elle-méme tout bleu avec une quantité de fleurs et de petits oiseaux}, Promenade avec elle 4 Rostock le long de la Voltava remplie d’ordures. Sur la berge se proméne fiérement un faéteur de pianos en calecon flottant bleu ciel avec des chaussettes et des jarretelles pour les retenir sur les mollets nus. Un jeune vagabond comme Rimbaud en chemise grise. Un autre qui remet frénétiquement son pantalon et y entasse la chemise, comme Adam chassé du Paradis terrestre.
Aux tayons de la lune le feu d’un diamant 4 une petite oreille sous d’épais cheveux noirs?. 29/30 [juillet]. — Excursion a\ Stiechowitz. Ces rivieres blondes, la Moldau, la Sazawa. J’y apprends a monter a cheval. La nationalité est au catholicisme ce que le moyen est a la fin. Un catholique ne peut trouver cette fin hors de PEglise, puisqu’il est persuadé que hors de
V’Eglise il n’y a point de salut. Il faudra donc recon-
naitre et confesser en théorie comme en pratique, que, pour le catholique, union avec VEglise est bien
[Go] plus importante que Punité nationale Pie II (Aeneas Sylvius)]*. La nuit, dans équipaget. Comme chardons'.
on
le parc,
nettoie
une
le roulement queue
[le pape
sourd
de cheval
d’un de
ses
Le geste doux et facile d’une femme qui se met a4 genoux.
Japprends 4 monter a cheval. Le vice ne compose pas*.
202
Cahier IT
Du 19 au 23 [aotit] « Reizender Ausflug» dans la région des Riesengebirge (Spindlermihle, Schneekoppe, Schneegrabe, [61] sources de Elbe, Klansenwassef). Un jeune Allemand mangeant trois ceufs sur le plat avec un air de bonne foi stupide. Quand on a vu beaucoup vtaie vache fait de plaisir!
d’Allemandes,
qu’une
Plantes : le habnichlieb, le knieholz. Une belle femme représente autre chose que ce qu’elle est.
Pantscher falls: on fait asseoir les trois Allemands sur
un banc face a la montagne et tout le monde donne 18 pfennigs. Le rustique sonne de la corne. En haut de la montagne un compére ouvre une vanne et la cascade toute blanche commence
avec la plus grande dignité.
Mais au bout de quelques métres, on ferme la vanne et la pauvre cascade reste en plan, au milieu de sa dégrin-
golade, sans queue ni téte, toute béte et ne sachant plus que faire! Messe a Spindlermihle au milieu de vieillards tout roses et sans aucunes rides.
[62] Retour dormant a moitié avec le fort parfum des champs et une étoile qu’on retrouve de temps en temps quand on rouvre loeil. Le vert-Catilina (couleurs 4 inventer).
A midi un terrassier tout de son long voluptueusement couché sur un tas de cailloux. Coiffé du shako autrichien, il s’endort, la longue pipe a foyer de porce-
laine au coin de la bouche comme un veau repu qui lache peu a peu le pis.
L’équitation apprend au corps
A tenir ensemble.
Aout 1911
203
Vénus endormie dans un nid de corail rose.
Il y avait bien moins de différence entre le seigneur et le vilain qu’entre Pouvrier et Pingénieur (Dr Le Bon)?. Au cirque Péléphant qu’on fait asseoir sur la banquette : il se gratte le fondement avec une vraie satisfaction comme un vieux caissier qui a des hémorroides. La race juive n’est plus la méme depuis le Calvaire, ce n’est plus le méme sang qui coule dans ses veines. « Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants. »
— Cf. le passage si difficile de [63] l’Apocalypse sur la troisiéme partie de l’eau changée en sang? ? Un cheval ne peut pas galoper plus de trois minutes.
Robert amené de force par sa mére, puis repris par son pére et emmené avec lui en Belgique. Si ces cahiers sont imprimés aprés ma mort, suptrimer tout ce
qui regarde les tiers,
>
spécialement L. M.*.
Proemium essentiale... mensuratur secundum intentionem charitatis, non secundum magnitudinem fattorum, quia Deus
magis pensat ex quanto quam quantum fiat (S. Th. Aq.)§.
Réforme de Cluny au xr® siécle. Excessive longueur des offices. A peine une demi-heure de libre par jour pour causer dans le cloitre (S. P. Damien, ap. Denifle)*. .. Unde tibi Tot rugae... (Juvénal)? Z[denka] B[raunerova]. « Je roulerais du haut en bas comme une pomme de terre. »
Au salon aprés diner un jeune homme [64] tentera vainement de séduire si l’on voit un vermicelle suspendu au bouton de sa chemise.
204
Cahier II
Turnoyv. Le rocher au clair de lune. Trosky?. Le bain dans |’étang. Babylone. Antoine me demande de jouer /’Osage. Refus?. Spire, spirale; spiro, spiritus ; spero; speira (semence).
Jouissance taciturne de soi-méme, comme l’homme qui tire eau de son puits au clair de la lune’.
Le sourd qui appelle l’écho et s’étonne qu’il ne lui réponde plus. Départ de Prague, 7 [septembre], 7 h. — Villeneuve, 8 — Nancy, 11 — la vallée de Celles et le Donon, 12 et 13 — Epinal (Ch. Henrion), 14 — Gérardmer, 15-18.
A Véglise N.-D. de Genéve, commencement des bourdonnements d’oreille qui ne m’ont plus quitté et ont abouti a la surdité+. Conversation avec Charles Henrion® sur ses expériences de spiritisme. On lavertit que « lesprit» Pavait demandé : il se donnait comme l’esprit d’une sceur morte. Lévitation de tables. I] sent tout a4 coup quelque chose sur sa téte, le médium qui avait les deux pieds posés dessus, sans aucune espéce de poids, et qui écrivait au plafond. Le médium change de voix et se donne pour l’esprit d’un jeune homme qui vient de se suicider et qui est poursuivi par les « mauvais esprits». A la suite scéne de pandemonium, [65] meubles renversés, soufflets donnés par des mains invisibles. « L’esprit guide» leur donne le conseil de purifier la chambre avec de eau bénite. Conseil aux membres
de la Société de faire leurs Paques,
méme
sans confesser leurs pratiques spirites. Un des partticipants devient presque fou. Le médium s’enfonce dans le sein une longue épingle 4 chapeau sans se faire aucun mal. Nomination 19 septembre.
au Consulat
général de Francfort le
——em a a — —
Septembre-Olfobre 1911
205
L’ancien seigneur de Villeneuve Du Ranty, affilié a la Compagnie du Saint Sacrement. S. Vincent de Paul passe a la Tournelle dont il fait donner le bénéfice a un de ses dévoués, Pinterel, seigneur de Villeneuve,
parent de lami et correspondant de La Fontaine’. M. de peintre devient céramiste crotte au pot.
et joint ainsi la
L’orage comme un taureau qui s’enlise et saisit la nuée entre ses deux pattes?. Sur le chemin épars et marchant dans la méme direction, mon pére 4gé de 85 ans, ma mére, 71, ma sceur, 45, son fils Jacques, 19, moi, Reine, 30 ans, mes ‘enfants Marie et Pierre, 5 et 3 ans.
[66] Napoléon toujours resté capitaine d’artillerie. Sa manceuvre est toujours de démolir, de démanteler Padversaire au point central, de l’éviscérer. Jamais de mouvement tournant, sauf 4 Waterloo, ot il échoue (?). Départ pour Prague, 25 [septembre] — de Prague, 27 (veille du jour de S. Wenceslas) — Berlin, 28 (Conversation avec Cambon)*. Arrivée 4 Francfort, 29. Le 30, je cherche une maison. C’est moi qui représente la République F[ran¢]aise dans cette capitale de la Juiverie!
Pauvreté de l’Allemagne tout entiére assise sur le Rhin®, Erreur et sottise de Talleyrand de l’avoir donné [ste] a la Prusse. Ces gens dont la conversation ressemble a une toile sans fin ot les mémes choses reviennent indéfiniment.
L’avarice: les espéces dévorant la substance (E. Hello)*. La premiére proclamation des Révolutionnaires chinois est datée de l’an 4619 de la dynastie des Han!
Jardin zoologique : un petit singe avec les testicules
a
206
Cahier IT
bleu ciel et le membre écarlate. Le chimpanzé inquiétant avec une physionomie presque humaine : tout 4 coup il se met la téte par terre et lappe ses excréments. Le tilleul sous lequel Napoléon passa ses troupes en revue aprés la bataille de Hanau (octobre précisément, il devait étre tout jaune et resplendir dans le soleil couchant). [67] Dans une des derniéres conversations, ou plutét entrevues, de Napoléon et du Roi (de Prusse), l’Empereur fixa ce dernier fort longtemps, le regardant du haut en bas, puis examinant ses pantalons gris,
il lui dit : « Vous étes obligé de boutonner tous les jours tous ces boutons-la? Est-ce par en haut ou par en bas que vous commencez? » (Souvenirs de Louise de Prusse)». Prés de la statue doute symbolique,
de Gethe un monument, composé d’une urne et
sans dun
robinet : Purne sans doute pour indiquer le vide, et le robinet, Pabondance?. I] y a lieu partout ot il y a jin’.
Haec enim operatio (generatio) maxime omnium operationum viventibus est naturalis, unumquodque inquam aliud sibi simile procreare, animal quidem animal, plantam autem
plantam,
ut sint semper hoc patto conditionemque
subeant, quoad possunt, divinam. Id enim ipsum appetunt universa, gratiaque ipsius omnia agunt quaecunque secundum naturam agunt (Aristote, De anima, I, 5)‘. [68] On appelait « titire » Phybride de la brebis et du bouc; « musmon » celui de la chévre et du bélier; celui de la truie et du bélier « cuino »; de la vache et du cheval « jumart ».
Une affiche — Un fakir et la science Yoga Wissenschaft mit Demonstrationen®
Vieilles fleurs : le Bon Henri, la Dame de Onze heures, la Claudinette, la ravenelle, l’ancolie.
Odfobre-Novembre
1911
207
Quoique les doétes aient quelques bluettes d’esprit dans les matiéres spirituelles, cela ne se fait pas néanmoins par fond de simple et enivrante sapience, qui abhorre les formes et les images comme la mort (/a Vie et les Maximes du Vén{érable] Fr{ére| Jean de S. Samson aveugle des le bercean et religieux laic de 1’Ordre des Carmes Réformés (1571-1636), Paris, 1651).
1 nov[embre]. — C[on]f[essé] au Stadtpf. Abt?. S. Paul ravi au 3° ciel, il ne sait si avec ou sans le corps, c[’est]-a-d[ire] si oui ou non ce ravissement avait une conséquence dans le lieu’. cette bouche armée de vingt dures petites dents‘.
De
ces
ames
opaques
qui ne donnent
de lumiére
qu’en la rejetant?. [69] Hypocrite — que j’ai de mauvais?
Pétouffe. « Moi, Tant pis®.
Mais que cacherai-je, sinon ce Et souvent
je suis incapable
en le cachant,
je
de dissimuler. »
Hero worship. De préférence celui de Marat. De préférence par des moyens de voirie. Que de villes de provinces recélent les noms de Gambetta et de V[i€tor] H[ugo] parmi leurs intestins’. Je suis ce qui est et tu es ce qui n’est pas (N[otre] S[eigneur] a S. Cath[erine] de Sienne). Principium (a Vacc. tTyv apxnv) qui et loquor vobis (S. Jean). . in pace et principio (Sép[ulture] des Catacombes). Creatoris namque potentia, et omnipotentis atque omnite-
nentis virtus causa est subsistendi omni creaturae (S. Aug., De Gen. ad litt., TV, 12. Sur le repos du 7® jour)®. 83 Bockenheimer Landstrasse, au second.
Si, comme
le montre
|’Eucharistie, il n’y a pas
208
Cahier I
didentité rationnelle entre les accidents et la substance des choses matérielles, c’est qu’il y a dans celles-ci une part pour les sens et une part pour la raison, la razson d’étre, Vintelligence. Les qualités sensibles indiquent qu’il y a de ce cété une fiz et que l’esprit ne peut aller plus loin du cété du néant?. [70] La condition du corps est espace; la condition de l’esprit est le temps?. Sic enim excoecat, sic obturat Deus
deserendo
et non
adjuvando (Aug., Ev. Joann.)?. Mais Dieu désertant sa créature! Deus illuminat omnem hominem venientem in hunc mundum (Jfean], 1, 9). Vale omnes homines salvos fiert (1 Tim., 1). S. Th[érése] dit que nous ne recevons pas la grace parce que nous fermons notre fenétre. « Que serait-il advenu de l’Eglise si dés ’origine le peuple juif s’était converti en masse au christianisme? » Il fallait qu’ils rejettent la semence®. Ceux qui ne recoivent pas la grace sont ceux qui sont déja pleins d’autre chose. Des hommes enfermés dans un lieu obscur, 2 procédés pour avoir de la lumiére, ou allumer une lampe, ou ouvrir leur prison®.
Etrange et compléte correspondance du physique et du moral manifestée par le langage. Le corps est la métaphore de l’esprit’.
Ils remplacent le raisonnement par l’association Widées, le fait par affirmation et la preuve par Villustration. L’unité seule peut étre infinie. I] n’est pas absurde de parler de Un infini, mais non pas d’un 2 ou dun 3 infini. Rien n’est infini que par la possibilité d’ajouter cet I.
Deus non potest esse causa tendendi in non esse (S. Aug.)®. [71] Le corps sperituel (S. Paul)’. L’Esprit.:Exhalé.
Novembre-Décembre
1911
209
Le 3° ciel. Le ciel physique. Le ciel des élus. Dieu méme?.
Adam, forma futuri, S. Paul (Rom.) cité par Pascal’. Le sol de la forét couvert de feuilles mortes, origine
de la mosaique. La figure du Christ se dessinant sur Pautomne paien, sur l’immense jonchée de la forét paienne. L’école de Dusseldorf et celle de Beuron! Pour étre un artiste, il ne sert 4 rien d’avoir Dieu au cceur si l’on
n’a le diable au corps. Mayence.
Voyage avec mon beau-pére le 2 déc[embre]. Le Rhin. La cathédrale, toute par larges dés et cubes. Les deux absides, les deux trénes se faisant face formida-
blement. Abyssus abyssum invocat. Pas de portail. Le fronton délicieusement épousé par la ligne ronde d’une abside. La couleur rouge vivant de tout cela, couronne impériale et pourpre, jusqu’au gris extréme des deux petits clochers 4 pompons. Caraétére vénérable. C’est Péglise des Conciles, émergeant des longs siécles de définitions, non pas Déglise militaire et mystique. La domination,
la civilisation
définitivement
assise
en
cette terre barbare, en cette antique marche de lEmire. [72] Musée Romain-Germanique. Partout des tombes de soldats. Chaussures des légionnaires trouvées dans une source. Aprés avoir parcouru le monde entier elles ont duré jusqu’ici. Casques de légionnaires®. Dans la tombe, l’4me partie, les ossements disparus, il ne reste qu’une mince bulle irisée*.
méme
Au musée un concert vénitien charmant et voluptueux, de Tiepolo? Et toujours dans l’azur admirablement léger, les rempatts rouges de la Cathédrale Carlovingienne et ses caissons cubiques. Les deux portes de bronze: Wellugisius arcep. ex metalli specie valvas effecerat primus?.
210
Cahier II
Le Rhin. La on sent non plus seulement une nation,
mais l’Europe. La voiel. ... leurs lois effectives, c[’est]-a-d[ire] leurs relations invariables de succession et de similitude (Aug. Comte)’, c[’est]-a-d[ire] les formes?.
La loi est une construction idéale, qui exprime non pas ce qui se passe, mais ce qui se passerait si certaines conditions venaient 4 étre réalisées (Meyerson)‘. Absurdité
de latome
indifférent,
la différence,
la
propriété, étant une des conditions essentielles de la matiére, de l’étre fint®.
« Cette classe d’hommes [les philosophes} moins soucieux de découvrir la vérité que de la répandre » (Condotcet). [73] (froid) le mordant vinaigre. Mode StiaveStranota sit omnibus hominibus (Philippenses)*.
I] faut apporter a sa vie, portée par portée, Pintérét et Papplication du musicien qui déchiffre. L’émotion que produit apparition d’un nouveau dessin mélodique. Les accords finals. Reine enceinte’.
Colombe nuit. Bruit.
de Sigmaringen.
Noél. Cloches
dans la
Ces crépuscules du matin en décembre. A Prague la neige, ici la pluie, la petite place mouillée et ces ciels de sépia qui s’éclairent a peine derriére les arbres grelottants. Le médecin pour les oreilles avec sa voix puissante
et volumineuse comme un appareil de massage. Le style de Maeterlinck est tellement cou/ant qu’avant
Décembre
1911
2EE
que l’on ait eu le temps de saisir le sens d’une phrase on est déja porté a celle qui la suit. [74] Une forét, mais une forét d’hiver que la lumiére de toutes parts pénétre.
Quand la trompette sonnera, le Sage dira:« Il ya un moment que je l’entends » (Ibn Makila, Au désert de la Haute-Egypte, xv®, cité par L. M.)}. « Vivre sa vie » — Faire la vze. Le viveur.
Contre Pinfinité du monde créé : Qui numerat multitudinem Stellarum et omnibus nomina vocat (Ps. CXLVI, 4). ... ef Sapientiae ejus non est numerus (tbid., 5)?.
eis
IQI2
Ciel brumeux
et triste. Grand’messe
a St-Antoine.
« Bier Stimmung »* Le mouton
aime la misére.
Opération d’un petit polype dans le nez. Le frémissement étrange et profond de la chair sous le couteau. L’histoire des peuples paiens est comme un morne cirque ot les crimes et les chatiments renaissent indéfiniment les uns des autres?, Inimici ejus terram lingent. Les pécheurs n’aimeront que la terre. Ils jouiront de plaisirs terrestres (Pascal)®.
[75] 6 janvier. — Cinq-centiéme anniversaire de la naissance de Jeanne d’Arc comme me le rappelle Péguy’. 9. — Excursion Fuchstanz.
en traineau
dans le Taunus.
—
Boria ou Porta signifiait en Bas Latin, lieu occupé pat des broussailles et des marécages*. Port-Royal, Bar — bourrache — bourrique ? Poussieren en Baviére veut dire faire la cour.
Janvier 1912
213
Le secret de Maximin, d’aprés l’autographe au crayon du Vén[érable] Eymard (1868)1. « Les 3/4 de la France perdront la foi et la 4° partie qui la conservera pratiquera tié¢dement. La paix ne sera donnée au monde que lorsque les hommes se seront convertis. Une nation protestante du Nord se convertira a la foi, et par le moyen de cette nation les autres nations reviendront 4 la foi. Le Pape qui viendra aprés celui-ci ne sera pas romain. Et quand les hommes setont convertis, Dieu donnera la paix au monde. Puis cette paix sera troublée par le monstre; et le monstre arrivera a la fin du xrx@ siécle ou au plus tard au commencement du xx®. Voila tout ce que la Dame m/’a dit. » Luxit et elanguit terra, confusus es Libanus et obsorduit (Is.). Cela rend bien Vaspeé& brouillé, sale et jaunatre qu’ont a certains jours les Alpes et les Pyrénées?. [76] Promenade dans la forét emplie d’une brume dense, les troncs verts et pourpres de ces grands brins de bois. Cloches si étranges en revenant?.
Ego sapientia habito in concilio (Prov.)'. L’amour dans le mariage vit tout entier sur ce que les coureurs appellent le « second wind »*. Dans Isaie le mem fermé signifiant 4 la fois le sein inviolé
de Marie
et 600, soit les Goo ans
avant
le
Messie (Pascal)®. N’écoutez jamais rien des faiblesses d’autrui. Et si quelqu’un vient se plaindre a vous des faiblesses d’un autre, priez-le humblement de ne rien vous en dire. Ne
vous plaignez de personne. Ne demandez rien. Ne contredites qui que ce soit (S. Jean de la Croix).
La morale et I’art. La passion est coupable, mais la compassion ne lest jamais,
214
Cahier II
[art ne peut s’interdire la peinture des passions, révélatrices des parties les plus profondes de |’ame humaine!. Noms allemands faits d’un génitif latin : Andreae, Jacobi, Joannis, Nicolai, Paull.
Ces vieillards qui n’ont aucune raison de mourir parce qu’ils n’en ont jamais eu de vivre. « Sonder les cceurs et les reins. » I] parait aujourd’hui que les reins jouent le plus grand rdéle dans le développement du corps et de intelligence. Capsules surrénales. [77] Porta —
L’enceinte mystique une fois tracée
par la charrue, porza était ’endroit ot on la portait, ou on la soulevait pour ménager une entrée’,
La poudre dont le mime enfarine sa figure comme la neige sur le paysage. Elle a pour effet de supprimer les ombres, d’attirer tout au méme plan : tout se dessine sur une surface. Confirmation par Holzhauser (+ 1658) de idée que jai toujours eue sur les sept lettres de l’Apocalypse. Il distingue lage séminal ou apostolique; irrigatif ou des martyrs; illuminatif ou des doéteurs; pacifique ou régne social, jusqu’a Charles V; purgatif depuis cet age et qui dure encore; consolatif, préparant les fidéles aux tribulations des derniers temps; désolatif, ou de |’Antechrist?.
Solécisme solennel de l Apocalypse :azo to ay Kat 6 nv Kal 6 epxdjrevos. Le nom de Dieu ne (se) déclinant pas‘.
Ego sum principium et finis, alpha et omega (Ap., 1).
AQ A, le principe, angle
divergent
relié par esprit
prolongé indéfiniment par 2 de ses cétés,
Janvier-Février 1912
215
£2, le retour de tous cétés vers lui-méme sans que ses prolongements parviennent complétement 4 le circonscrire. Primus et novissimus*. [78] Des vers. Non point de faibles tintements, mais de grands coups 4 la Pindare, fermes comme le galop d’un cheval. Des vers qui soient un art par euxmémes, le coup du bourdon de la cathédrale. Des vers
qui heurtent la prose et l’ennui, avec la force d’un boulet. Des vers qui, au sein du Chaos et de l’antique
Nuit, jettent un pont par-dela l’infranchissable, crient a tous les fils du matin que la Création recommence. Je veux composer des poemes qui, au lieu de suggérer la contrainte, respirent la plus franche liberté (Emerson, Le#tres)?. Omne individuum ineffabile (Scol.)*. La fin du monde d’aprés II S. P., m1, 4-134:
... dicentes : Ubi est promissio aut adventus ejus ? Ex quo enim patres dormierunt, omnia sic perseverant ab initio creaturae. — Latet enim eos hoc volentes quod coeli erant prius, et terra de aqua et per aquam consistens Dei verbo ; per quae ille tunc mundus aqua inundatus periit. — Coelt autem, qui nunc sunt, et terra, eodem verbo repositi sunt,
igni reservati in diem judicit et perditionis impiorum hominum. —
Unum vero hoc non lateat vos, carissimi, quia unus
dies apud Dominum sicut dies unus. —
Non tardat Deus
promissionem suam, sicut quidam extStimant; sed patienter
agit propter vos, nolens aliquos perire, sed omnes ad poenitentiam reverti. —
Adveniet autem dies Domini ut fur ; in
quo coeli magno impetu transient, elementa vero calore solventur, terra autem, et ea quae in ipsa sunt exurentur (les
damnés)... [79] Novos vero coelos et novam terram secundum promissa ipsius exspettamus in quibus justitia habitat.
Epitaphe étrusque d’un enfant : A Titi Cali. Il y a cing jours il était plein de forces; maintenant un peu de cendres dans une urne enfermé.
I] est fini, le petit bruissement de paroles!
216
Cahier II
Faciam eum columnam et foras non egredietur amplius (Apoc., II, 12). Librum scriptum intus et foris Zd., V). Les (a in circuitu et intus plena oculis (IV, 8)*.
_La fumée du puits de ’abime qui obscurcit le ciel. Les sauterelles qui en naissent, embléme d’orgueil et @impudicité. L’ange qui jure par Dieu, par le ciel, par la terre, par la mer, qu’il n’y aura plus de temps. Le feu, la dévastation, la fumée, l’obscurcissement, le soufre, la suffocation®.
Il n’y a pas de régle qui ne peut étre blessée quand il s’agit du Schéner (papiers de Beethoven). Aquae, ubi meretrix sedet, populi sunt, et gentes, et linguae (Apoc., XPVITh a9/)*,
Videbar quidem vobiscum manducare et bibere; sed ego cibo invisibilt et potu qui [80] ab hominibus videri non potest, utor (L’ange ap[ud] Tobie, XII, 18)*. La force ne comporte point d’illusion : c’est la vérité toute pure (Napoléon).
Les actions les plus violentes usent le cceur moins que les abstractions : c’est pourquoi les militaires valent toujours mieux que les avocats (/d.). A cette usine d’Offenbach
le rhythme [sic] formi-
dable des machines faisant tout trembler.
Le grand banquet des oiseaux dans |’Apocalypse. L’ange dans le soleil qui crie aux oiseaux : Venez, et mangeons la chair des rois, et des forts, et des tribuns. Et vidi sedentem super thronum... a cujus conspettu fugit coclum et terra, et locus non inventus est eis (Ap., XX, 11)’.
Février-Mars
1912
217
Et infernus et mors missi sunt in Stagnum ignis (ibid. ). Le feu stagnant, sans méme?.
écoulement,
brdilant sur lui-
Les timides rangés avec les pires malfaiteurs (X XI, 8). La Jérusalem nouvelle forme un cercle parfait (XXI, 16). Et civitas non eget sole et luna ut luceant in illa (ibid., 23). — Et portae ejus non claudentur per diem, nox enim non erit illic. — Malédiction sur ceux qui diminuent les paroles prophétiques. Mensura angeli, quae est hominis*.
[81] Dans le Talmud la S. Vierge est appelée fille d’Héli, comme
dans S. Luc, III’.
24 fév[rier]. Voyage 4 Paris a travers la Lorraine en larmes. Les tristes petites maisons de Metz dans la nuit tombante.
Elle regarde en arriére et voit qu’un grand bonheur était fait de ce long ennui. Retour, 28 [février]. L’anapeste!.
L’enfant de 15 ans et le maitre sur qui se léve un ceil brun®. [82] En ces moments comme dans un petit noyau est enclose la semence de toute |’éternité (S. Fr. de Sales). Tout était si rangé, si calme, et la lumiére de Dieu si
claire en cette bienheureuse ame, plus pure que le soleil, plus blanche que la neige, qu’il voyait jusqu’aux moindres atomes de ses mouvements (Sainte Chantal de S. Fr. de Sales)*. La révolution de 1848 a été accomplie par 600 individus dont la plupart ne savaient ce qu’ils faisaient ni ce qwils voulaient (Mérimée)’.
218
Cahier II
Oui enim secundum carnem sunt, quae carnis sunt sapiunt ;
qui vero secundum spiritum sunt, quae sunt spiritus sentiunt... Quoniam sapientia carnis inimica eft Deo ; legi enim Deo non est subjeda, nec enim potest (Rom., VIII, 5, 7)?.
The proud full sail of this great verse (Shakespeare)?. Invisibilia enim ipsius, a creatura mundi, per ea quae fatta sunt intelletta conspiciuntur ; sempiterna quoque ejus virtus et divinitas (Rom., I, 20). (les paiens) ésipientes, incompositos, sine affecione, absque foedere, sine misericordia (tbid., 1, 31)°. [83] Cela qui pendant de longs jours n’était pour moi que des yeux,
Cela pour de longues nuits n’est plus pour moi que des étoiles (Riickert, Kindertotenlieder)*. Et moi, pécheur inique, (Jac[opone] de Todi).
riche,
gras
et reposé
Lamentation de la Madone sur la Passion de son fils Jésus-Christs. — Dame du Paradis, ton enfant est pris, JésusChrist bienheureux, Accours, 6 Dame,
et
vois
comme
les
gens
le
frappent! Je crois qu’on le tue tant on le flagelle! — Comment se fait-il que sur lui qui ne fit jamais de vilenie, sur le Christ, mon espoir, quelqu’un ait mis
la main? — Madame, il est trahi, c’est Judas qui l’a vendu : il en a eu trente deniers; il en a fait un beau marché.
— Au secours, Madeleine, 4 présent ma mesure est pleine! on emméne le Christ, mon fils, comme il m’a été annoncé. — Au
secours,
6 Dame,
4 l’aide!
Voila
qu’on
crache au visage de ton fils; les gens le ménent d’un lieu 4 Vautre; ils ont livré a Pilate.
— O Pilate, ne fais pas tourmenter mon fils : je puis te démontrer comme on I’accuse 4 tort.
Mars
1912
219
— Crucifige ! Crucifige! Un homme qui se fait roi, selon notre loi, s’oppose au sénat. — Je vous supplie de m/’écouter, pensez 4 ma douleur! Peut-étre allez-vous revenir de ce que vous avez projeté. — On pousse dehors les larrons qui seront ses compagnons. On le couronne d’épines pour s’étre appelé roi! — O mon enfant, mon enfant, mon enfant! O mon enfant, amoureux! lis! Mon enfant, qui donnera un
conseil 4 mon cceur angoissé ? Mon enfant, beaux yeux, comment ne réponds-tu pas? Mon enfant, pourquoi te retires-tu du sein qui t’a allaité? _
—
Madame, voici la croix que la foule apporte, ot
' la vraie lumiére doit étre élevée. —
O croix, que vas-tu faire ?Tu vas m’enlever mon
fils? Et que lui reprocheras-tu, puisqu’il n’a pas de péché en lui? — Viens au secours,
6 toute dolente, voila qu’on
dépouille ton fils! Et i] semble que la foule veut qu’il soit élevé en croix. — Si vous lui enlevez ses vétements, laissez que je le voie, comme les coups cruels l’ont tout ensanglanteé. — Madame, on luia pris la main, on la lui a étendue sur la croix; [84] on la lui a déchirée avec un gros clou, tant on l’y enfonga. Ils lui prennent l’autre main, l’étendent sur la croix
et la douleur s’embrase 4 mesure qu’elle se multiplie. Madame,
on lui prend les pieds et on les cloue au
bois en lui brisant toutes les jointures; le voila tout rompu. — Alors je puis bien commencer ma plainte : mon petit enfant, ma joie, mon fils, qui t’a fait mourir, mon
tendre fils ? Ils auraient mieux fait s’ils m’avaient arraché le coeur, au lieu de me le tirer sur la croix pour y étre déchiré. — Maman, tu es donc venue! tu me fais une blessure
mortelle; tes larmes me font mourir; je te vois dans un si grand tourment!
220
Cahier I
—O
fils qui es ma cause, fils, pere, €poux, mon
fils, qui t’a frappé, mon fils, qui t’a dépouillé? — Maman, pourquoi te plains-tu? Je veux que tu restes, que tu serves mes compagnons que j’ai achetés au monde. — Mon fils, ne dis pas cela! Je veux mourir avec toi; je ne veux pas m’en aller avant que le souffle me
quitte.
Que nous ayons le méme tombeau, enfant de ta pauvre mére! pour que la mére et le fils soient noyés ensemble-dans la douleur. — Maman, le cceur brisé, je te remets entre les mains de Jean, mon élu; qu’il soit appelé ton fils. Jean, voila ma mére, prends-la en charité; aie pitie
delle qui a le coeur percé. — Mon fils, ton Ame s’en est allée, fils de la malheureuse, fils de l’égarée, fils empoisonné par la
douleur! Fils blanc et vermeil, fils sans pareil, mon fils, a qui m/’attacher ?Mon fils, tu m’as donc laissée.
Mon fils blanc et blond, mon fils, visage de joie, mon
fils, pourquoi le monde,
mon
fils, t’a-t-il ainsi
méprisé P Mon fils doux et charmant, fils de la dolente, mon fils, comme le monde t’a méchamment traité! O Jean, fils nouveau, il est mort, ton frére; j’ai
senti le poignard qui m’avait été prophétisé. — Homme qui a fait mourir le fils et la mére, 4 ton tour inflige-toi une dure mort, afin que le fils t’emyes comme sa mére, que la mére t’embrasse comme son
fils.
J. de Todi. Un mot du P. Fleureau, missionnaire 4 Canton. Tout enfant, on le trouve qui faisait un trou dans la
terre. « Que fais-tu la? — Je fais un trou pour traverser la terre et aller trouver les Chinois. » La mort toujours accidentelle. Ils veulent 6ter a ame Vimmortalité et voici quils la retrouvent dans
le corps.
Abril 1912
221
Souvenirs de la bataille de Villersexel : Parmi les cadavres de soldats allemands, on en trouva un qui avait dans son sac 6 boules de billard, un autre une
crinoline de petite fille enfoncée dans une gamelle! Deux uhlans [85] s’étaient cachés dans un grenier. On les larda 4 coups de sabre a travers les bottes de foin. L’un de ceux qui les avait [séc] tués entra dans la salle les deux mains remplies de thalers et le tout ruisselant de sang.
L’Evangile
de Schopenhauer,
Tolstoi, d’Ibsen, de Rousseau,
de Nietzsche,
de
de Tertullien, d’Au-
gustin, est un Evangile controuvé, frelaté, inauthentique, apocryphe! L’Evangile de Jésus-Christ, ’Evan-
gile de S. Paul, — et ici M. Mahling cite Jésus-Christ, cite S. Paul avec une abondance d’érudition et une tichesse d’information étonnantes —, l’Evangile de Jésus-Christ est éminemment« Lebensbejahend», souverainement optimiste. La JOUISSANCE, Oui dites si vous le voulez, la jouissance méme sensuelle, la jouissance sexuelle — ne craignez pas de le dire —, est non seulement permise, elle est voulue par l’Evangile, parce que VEvangile, c’est la nature, et que la nature, c’est la jouissance, et cela aujourd’hui, pas demain, s’il vous
plait, dans un avenir nébuleux et nuageux du régne de mille ans, mais aujourd’hui sUR CETTE TERRE D’ADAM
ET DEVE! Voila ce que M. Mahling nous a rappelé, voila ce qu’il fallait rappeler, voila ce qu’il faut opposer avec énergie 4 toutes les falsifications de la démocratie sociale, quine cesse de vociférer que l’Evangile est une religion de fantaisie, qui ne console les ames des miséres du présent qu’en les bergant des réves de Pavenir. J'ai été surpris que notre ami ne nous ait pas parlé de Luther, le grand réformateur de la vie humaine, homme qui contre tous les ascétismes du moyen age... (Le pasteur réformé Ch. Correvon dans « Le Ralliement», Francfort/M[ein], avril 1912, 4 propos d’un sermon du Pasteur Mahling. Ce Mahling occupe 4 Berlin la chaire de Schleiermacher’.)
222
Cahier II
Faéfus sum tanquam vas perditum (Ps. XXX)}. Comme ces vases jetés qu’on voit a issue
des
grandes villes, gamelles rouillées, bouteilles vides, marmites d’émail écaillées, ustensiles, comme un seau de toilette.
[86] S. Paul sur le chemin de Damas. Tout converti jeté 4 bas de son cheval, ou de son dada. L’oreille
de Malchus.
jentende si vous
Comment
commencez
voulez-vous
par me
couper
le monde
reste
que
les
oteilles?
L’aiguille qui habille (Prov[erbe] arabe).
tout
nue
Le jour consacré a la Sainte Vierge est le Samedi, jour du Sabbat, ot: Dieu s’est reposé, souvenir de son
attente et de sa foi la veille de Paques. M. Rauh cherche le moyen de donner a la morale une certitude égale a celles des sciences de la nature (!!!) (E. Boutroux). La dévotion a la plaie cachée. Le pied gauche du [Christ en cro]ix caché sous le pied droit. N[apoléon dans] ses batailles est toujours celui qui a[ttaque] et qui impose sa volonté 4 l’adversaire.
Le monde passe, je [ne prie pas pour le] monde?. Une seule religion parce que une seule catholique: les autres laissent des facultés de ’homme inemployées, et de toutes la plus importante, l’amour, le désir’,
Le cap Spartivento (ot se partage le vent). Bossan,
Varchitecte
de Fourviére,
faisait tout
sur
le papier, et n’allait méme pas voit ses monuments une fois exécutés. Cela ne l’intéressait pas!
Aboril-Mai 1912
223
[87] Une des causes d’infériorité de l’architecture actuelle est qu’elle fait tout sur le papier, en plan. Il manque la troisigme dimension. Il manque l’ombre que fait le soleil de Dieu, il manque la coopération du soleil, transversal
4 toutes
nos
ceuvres!.
Tous
les
détails sont interchangeables, ce qu’on a déterminé une fois sur le papier, il n’y a plus qu’a le reproduire mécaniquement autant qu’on veut. Mais dans la réalité toute position exige et produit
une
disposition
décorative particuliére. Il faudrait travailler sur maquette. C’est comme si un sculpteur se contentait de livrer son dessin au praticien. La femme ne sort jamais, n’est complétement elleméme qu’actrice’.
Je m’apergois d’un nouveau défaut qui est la tendance a ne pas me frapper, a ne pas prendre mes fautes au sérieux et a leur trouver toujours d’excellentes excuses. Donnez-moi de trés faibles tentations, 4 la mesure de mon courage!
Pour la Doétrine comme
pour la morale, la croix
faite sur mesure mais nous dépassant de tous cédtés, nous titrant de tous cétés a l’extréme limite de nos forces et au dela’.
[88] Sa gaieté rappelle
’Ecriture
qui folatrent
celle des
comme
montagnes
de
de petits agneaux,
et colles sicut agni ovium.
Tout est saucisse en Allemagne, une enveloppe bourrée de choses disparates : la phrase allemande est une saucisse, l’Allemagne politique est une saucisse, les livres de philologie et de science, avec leurs notes et leurs références, saucisses, Goethe, saucisse! — Ces
colonnes du casino de Wiesbaden faites de coquillages agglométrés, saucisses*! Ne pas prendre pour de la charité le désir d’étre
224
Cahier IT
débarrassé de la vue et de la pensée de la souftrance des autres.
Le bénitier 4 la porte des églises nous fait penser au puits de la Samaritaine: Situ savais quelle est cetteeau... Le cerveau conscient éduquant peu a peu linconscient, organisant tout le service des réflexes (De motu animalium, c. VXI... e¢ ex consuetudine unum exsequitur post aliud, prout praescribet lex), comme pat une espéce de loi impersonnelle maintenant promulguée une fois
pour toutes. L’esprit passe sur la mati¢re comme I’archet sur la corde, ou plutdt comme le soufHe sur les cordes vocales?.
La phrase, une ligne idéale faite d’éléments mouvants, rythmiques et séparés, comme des ouvriers qui se jettent des briques de l’un 4 l’autre. Une ligne faite de briques qui sautent de main en main. [89] Aujourd’hui pour la premiére fois je vois les ombres des gens et des choses qui m’entourent®. Les macgons en blouses bleu-foncé ¢a et 1a‘ travaillant au milieu des murs de briques rouges. Dans la forét au milieu de l’aprés-midi la triste salve
du pic sur le tronc d’un arbre creux, pareille a la crécelle du Vendredi-Saint.
Platon (Timée) compare la moélle allongée et les nerfs a des liens et 4 des ancres qui rattachent l’Ame au corps. Le foie est une espéce d’enclume et de miroir brillant’. Der Obermensch — comme on dit Oberleutnant ou Oberkellner — Monsieur le Surlieutenant, Monsieur le
Surgarcon.
Voyage a Hanau. — Les tailleurs de diamants avec leur face souffrante et affinée et leurs doigts longs et
|
Aril-Mai
1912
225
fins. — Cliver un diamant, le séparer dans le sens de son plan de cristallisation. 5 000 pour faire un gramme. — Abime minuscule plein d’étoiles dont il faut 5 000 pour ne pas faire un carat. Le bijoutier avec sa loupe sur le front. Mon chateau d’Allemagne derriére le fossé herbeux, avec les glycines autour des fenétres et sur le portique de pierres rouges. [90] Le petit marteau du ciseleur. Six grosses perles l’une sous l’autre et la derniére une admirable perle rose en poire. L’air fin et épuisé d’un tailleur de diamants. Les diamants @abord plantés dans la cire noire, puis on calque dessus la monture!. La jeune fille qui chante a l’église avec sa petite bouche toute ronde. Un
moment
seul visible comme
la flamme
d’une
lampe d’alcool en plein jour. Etonnant symbolisme de l’histoire de Joseph dans
la Genése. Joseph qui fait venir en Egypte son pére Jacob, est-ce la réconciliation d’Israél? « entendit cela, il fut comme
sommeil entiére,
profond.» oui,
mais
Les
un homme
11
fréres
l’humanité
Quand Jacob qui sort d’un
Phumanité
élue, convoquée
tout en
Egypte. Et que représente Benjamin? L’innocence persécutée. On le persécute parce qu’il a volé au Christ sa coupe, son calice, et on le trouve dans son
sac’. L’argent qu’on trouve [dans] les sacs, les sacrifices que n[ous] avons faits et qui n[ous] sont rendus au centuple. Et Joseph pour s’abandonner 4 ses larmes et a sa tendresse attend que les Egyptiens soient partis. Il y a des sons et des mots en francais qu’il faut absolument un blanc pour laisser se dissoudre et se résoudre?. Ces 10 jours entre l’Ascension et la Pentecdte comme
lattente qui précéde un grand orage. [91] F. H. Consul Général des E[tats]-UJnis], un grand homme d’aspeét froid et compassé, fagade et
226
Cahier II
pitoyable rempart dezriére lequel se déchainaient tous les diables de l’alcool, de la paillardise, de la syphilis et de la solitude. A l’hétel qu’il habite, il se jette la téte
en bas dans une cage d’escalier du haut du 4® étage. Il tombe sur une table de desserte, chargée de vaisselle sale, la chute de ce grand corps fait trembler toute la maison. 27 mai. — Promenade a Limbourg. Magnifique position de la cathédrale posée sur un rocher au-dessus d'une piéee d’eau et qui a l’air de monter par degrés dans le ciel 4 mesure qu’on s’en approche. Sur le cété entassement de constructions romantiques comme un dessin de Victor Hugo. De coté ils forment écran et ’on voit par derriére les mitres des 7 clochers, comme un conciliabule d’évéques géants occupés autour d’un rite mySstérieux, présidés par un colosse. A la messe? la vieille femme en capuche noire au milieu des petites filles si immobile et décolorée qu’elle était presque
invisible. Les 7 religieuses dormantes. Langenschwalbach — Wiesbaden. Le dimanche en chemin de fer la pauvre femme qui met dans la main de sa fille a cdté d’elle une main toute noire et déformée.
Rimbaud, ce marcheur forcené, était petit-fils d’un tailleur (et fils d’un officier d’ Afrique sortant du rang)?. Ce petit vieillard dans sa maison chaude [92] et confortable, dans quelques jours des gens vont venir, on le mettra dans une boite de bois, on l’emportera du cété des faubourgs, on fera un trou dans la terre et on le mettra dedans. C’est 14 maintenant sa demeure par tous les temps.
Au printemps les fleurs qui disparaissent dans la verdure, comme la mer qui résorbe son écume?. Un vieux pure une vieille tour en ruines, qu’on
voit par un trou
dans le feuillage.
Mai- Juin 1912
227,
« A quoi est-ce que je sers?» dit la fléche, pointue dun bout, ailée de autre, et tenant mal dans le carquois.
« Pourquoi louvrier a-t-il fait de moi cette chose inexplicable et savante que le mouvement seul anime!?» Jusqu’a ce qu’elle s’enfonce en tressaillant dans le cceur de la viétime choisie! | Fattum et cor meum sicut cera liquescens in medio ventris mer? Le
ccur
de
mon
Dieu
est
devenu
dans
mes
entrailles comme de la cire qui se liquéfie!
—
Je retrouve ma théorie de la vision dans Platon :
tAatwvikn ouvatyera (Timée, pp. 208-209). '
Sainte Christine l’Admirable, patronne de la bonne
mott’. Elle se fait donner l’aumdéne de force.
Le diaphragme Pappartement des
(Limée)®.
comme la cloison qui sépare hommes de celui des femmes
[93] ... et tenir dans ses bras pendant les longues minutes d’oraison ce corps mystérieux et glacé®.
Et le flanc arrondi des antiques vaisseaux pas plus mollement n’épousera la vase au fond de quelque Célébe, que d’avance je ne me préte a ce choc ténébreux’. Gratia non tollit naturam, sed perficit.
La matiére est capable de salut (S. Irénée)’. Si la théorie matérialiste était vraie et si la folie consistait dans une décoordination de nos cellules nerveuses,
elle serait caractérisée
par Virruption
du
hasard : une série de gestes et de mots sans aucune suite, comme un gramophone qu’on tourne a l’envers. Or ce n’est pas le cas. La folie est une espéce de sépara-
228
Cahier IT
tion du monde,
d’autonomie
monstrueuse
donnée
a
Pimagination qui impose ses réves au possédé: celui-ci n’est plus le maitre chez lui. Les deux principales formes de la folie suggérent une intervention diabolique, le délire de la persécution et celui des grandeurs, la terreur et ’orgueil. D’ot vient qu’elle présente un nombre de formes si limité? Quant aux lésions physiques qu’ona cru observer, toujours la méme question: effet ou cause?? Limites dans lesquelles il est permis de croire au développement : « La vérité religieuse sera de mieux en mieux fixée, définie et exprimée scientifiquement (profeéfus intelligentiae ). [94] « Des dogmes latents ou simplement matériels, c[’est]-a-d[ire] non définis, deviendront explicites et formels (profecius scientiae) ; « Les vérités religieuses actuellement définies seront Pobjet d’un développement de plus en plus riche, profond, étendu, provenant d’une considération de plus en plus précise et de plus en plus détaillée, ou par voie de conséquences, tirées scolastiquement des principes précédemment posés (profeétus sapientiae)*. » Le genre précaire de satisfaction qu’on obtient en se
grattant est tout a fait semblable 4 la « gloire ». « paves » pour coquelicots : c’est plein de paves’. Voyage a Villeneuve et 4 Paris. Dép. 26. — Villeneuve 27, 28, 29 juin. Les deux vieux seuls dans la vieille maison félée avec la vieille servante et le cricri dans la cendre de la cuisine. A V{illeneuve] je suis toujours overwhelmed by pathetic.
Histoire de la vieille servante qui reste en condition jusqu’a 7o ans. A cet age elle apprend 4 lire, mais ne veut jamais rien lire que des histoires édifiantes. Elle vit jusqu’a 92 ans avec une rente de 17 sous par jour, et sur ses é€conomies trouve le moyen de payer le
Juin- Juillet 1912
229
voyage a Lourdes d’une infirme. En mourant elle prétend qu’elle voit la Sainte Vierge. (Pourquoi pas ?) Paris, 30 juin-1¢T juillet. — Causerie avec L[ouis] M[assignon] que je retrouve pale et émacié. [...]! Il me parle d’un protestant qui, ne croyant pas 4 la confession, écrivait ses péchés sur un bout de papier et
les avalait ensuite. [95] 2-3 j[uille]t. — Visite profondément émouvante chez Berrichon et la sceur de Rimbaud a Roche par Attigny. Caractére sombre et mystérieux de tout ce pays
d’Ardennes,
basse
continue
des
foréts,
eaux
lentes et qui dorment, chargées de visions. L’ Aisne a Vongt [sc], encombrée de nénuphars couleur de jade ' Opaque et de turquoise laiteuse, et trois longs roseaux jaunes. C’est la sur les rives de ce sombre canal ombragé de deux lignes de peupliers ténébreux que R[imbaud], la jambe coupée, attendit la voiture qui devait le ramener chez lui. La maison a grand toit d’ardoises et de pierre corrodée avec la date 1791 au-dessus de la porte et l’odeur de grain qui la remplit. Je dine dans cette chambre ot il a souffert, je couche dans son lit dans cette chambre ot il a écrit « la Saison en Enfer ». La sceur de Rimbaud, noire paysanne avec un grand front, ses yeux de douleur et la forte bouche de son frére. Elle me parle des derniers jours d’ Arthur. Lui et son frére Frédéric autrefois avaient injurié un mendiant 4 jambe de bois assis sur le bord de la route et lui avaient jeté des pierres. « C’est le chatiment », répétait-il souvent. Il meurt d’un sarcéme du fémur,
inarrachablement attaché 4 sa jambe, son frére Frédéric, charretier, la cuisse écrasée. Ses derniers jours [96] 4 Marseille. Admirable lettre d’Isabelle?. Enfin il parlait et laissait échapper ses réves. Isabelle a ce moment ne connaissait rien de lui. « C’est comme si je parlais avec Dieu. Je m’en suis méme accusé a confesse. » Le jour de sa mort, il tournait la téte de cdté et d’autre et appelait sans cesse : « Ma sceur! ma sceur! » — Le 3 juillet, je vais 4 Charleville. Il est enseveli sous un naif monument de petite fille dans un tombeau
230
Cahier IT
tout en marbre blanc avec des roses, aux cdtés de sa
sceut Vitalie (morte 4 17 ans d’un cancer aussi a la téte). La mére Rimbaud a ce moment fit ouvrir la tombe et ramena elle-méme en sanglotant les os de son
enfant morte dans un linge fin. Charleville plein fournaises au fond de cette sombre vallée qui l’été cesse de répercuter le tonnerre. Méziéres armé fiévreux sur ses fossés Stagnants, laissant tomber remparts. Cette derniére photographie terrible ot
de ne et ses on
le voit tout noir, les pieds et la téte nus, en costume
comme de forgat, les pieds nus aux rives de ce fleuve d’ Abyssinie. Quand il était 4 Roche en cet été de 1891 sur son lit de douleur souffrant horriblement, sa sceur
lui dit : « Pourquoi ne continues-tu pas a écrire? on dit pourtant qu’autrefois tu as fait de trés belles choses.» Il répondit :« Je le [97] sais bien, mais je ne pouvais pas continuer, je serais devenu fou.» Puis aprés un moment de silence: « Et puis c’était mal.» Et cela d’un air si triste! Ce n’est qu’aprés sa mort qu’Isabelle a été initiée a Pceuvre de son frére et a comprise. — Les paysans ardennais souvent chastes. — Ce sol saturé de mysticisme d’otressort cette source perdue. Pays desources?. Le 4, conv[ersation] avec Mad[ame] Kalff?. M[esse] a S.-P[ierre]. Le 5 c[ommun]ié a S.-P. de Chaillot avec L. M.
Visite de ’abbé Fontaine a Clichy. Bernardin. Variot. Sorel. Giraudoux. Retour le 6°.
Si vous ne donnez qu’un sou, du moins nettoyez-le.
La mort d’Arthur Rimbaud (Lettre d’Isabelle Rimbaud [Madame P. Berrichon] A sa mére) : « Marseille, mercredi 28 o€tobre 1891. « Ma chére Maman,
« Dieu soit mille fois béni! J’ai éprouvé dimanche le plus grand bonheur que je puisse avoir en ce monde. Ce n’est plus un pauvre malheureux téprouvé qui va
Ns un élu
de moi: c’est un juste, un saint, un martyr,
Juillet 1912
231
« Pendant le courant de la semaine passée, les aum6niers étaient venus le voir deux fois, il les avait bien
recus, mais [98] avec tant de lassitude et de découragement quils n’avaient osé lui parler de la mort; samedi soir toutes les religieuses firent ensemble des priéres pour qu’il fasse une bonne mort; dimanche matin aprés la grand’messe il semblait plus calme et en pleine connaissance; l’un des auméniers est venu et lui a proposé de se confesser; et il a bien voulu! Quand le prétre est sorti, il m’a dit en me regardant
dun air troublé, d’un air étrange : “ Votre frére a la foi, mon enfant, que nous disiez-vous donc? Il a la foi, et je n’ai méme jamais vu de foi de cette qualité! ” Moi, je baisais la terre en pleurant et en riant; O Dieu! quelle allégresse! méme dans la mort, méme par la ‘mort; que peut me faire la mort, la vie et tout l’univers et tout le bonheur du monde, maintenant que son ame est sauvée! Seigneur, adoucissez son agonie,
aidez-le 4 porter sa croix, ayez encore pitié de lui, ayez encore pitié, vous qui étes si bon! oh, oui si bon. Merci, mon Dieu! merci! « Quand je suis rentrée prés de lui, il était trés ému mais ne pleurait pas, il était sereinement triste, comme
je ne l’ai jamais vu. I] me regardait dans les yeux comme il ne m’a jamais regardée. I] a voulu que je m’approche tout prés, il m’a dit: “ Tu es du méme sang que mot: crois-tu, dis, crois-tu?”’ J’ai répondu : “ Je [99] crois. D’autres bien plus savants que moi ont cru, croient :
et puis je suis stire a présent, j’ai la preuve, cela est? — Et c’est vrai, j’ai la preuve aujourd’hui! — I] m/a dit encore avec amertume : “ Oui, ils disent qu’ils croient,
ils font semblant d’étre convertis, mais c’est pour qu’on lise ce qu’ils écrivent, c’est une spéculation. ” J’ai hésité puis j’ai dit : ““ Oh non, ils gagneraient davantage d’argent en blasphémant.” I] me regardait toujours avec le ciel dans les yeux, moi aussi. I] a voulu m’embrasser, puis : “ Nous pouvons bien avoir la méme Ame, puisque nous avons un méme sang. Tu crois alors?” et j’ai répété : ‘ Oui, je crois, 2/ faut croire.”’ Alors il m’a dit: ‘Il faut tout préparer dans la chambre, tout ranger; z/ va revenir avec les sacrements. Tu vas voit, CLAUDEL
V -
II
II
azz
Cahier IT
on va appotter les cierges et les dentelles : il faut mettre des linges blancs partout. Je suis donc bien malade! ” Il était anxieux, mais pas désespéré comme les autres jours et je voyais trés bien qu’il désirait ardemment les sacrements, la communion
surtout.
« Depuis il ne blasphéme plus jamais : il appelle le Christ en croix, et il prie, oui, il prie, lui! Mais Pau-
mOnier n’a pas pu lui donner la communion : d’abord il [100] a craint de l’impressionner trop; puis il crache beaucoup en ce moment et ne peut rien souffrir dans sa bouche : on a craint une profanation involontaire. Et lui, croyant qu’on I’a oublié est devenu triste, mais ne s’est pas plaint. « La mort vient a grands pas : je t’ai dit dans ma derniére lettre, ma
chére maman,
que son moignon
était fort gonflé, maintenant c’est un cancer énorme entre la hanche et le ventre, juste en haut de l’os : mais ce moignon qui était si sensible, si douloureux,
ne le fait presque plus souffrir. Arthur n’a pas vu cette tumeur mortelle; il s’étonne que tout le monde vienne voir ce pauvre moignon auquel il ne sent presque plus rien; et tous les médecins (il en est déja bien venu 10 depuis que j’ai signalé ce mal terrible) restent muets et terrifiés devant ce cancer étrange. Maintenant c’est sa pauyre téte et son bras gauche qui le font le plus souffrir; mais il est le plus souvent plongé dans une léthargie qui est un sommeil apparent pendant lequel il pergoit tous les bruits avec une netteté singuliére. Puis la nuit on lui fait une piqdire de morphine. « Eveillé, il achéve sa vie dans une sorte de réve continuel, il dit 4 présent des choses bizarres, trés
doucement, d’une voix [101] qui m’enchanterait si elle ne me pergait le cceur. Ce qu’il dit ce sont des reves — pourtant ce n’est pas la méme chose du tout que quand il avait le délire, on dirait et je crois qu’il le fait exprés. Comme il murmurait ces choses-la la sceur m’a demandé tout bas: “Il a donc encore perdu connaissance >?” Mais ila entendu et est devenu tout rouge; il
n’a plus rien dit; mais la sceur partie il m’a dit : “On me croit fou, et toi, le crois-tu? ” Non, je ne le crois pas,
c’est un étre immatériel presque et sa pensée s’échappe
Juillet 1912
233
malgré lui. Quelquefois il demande aux médecins si eux voient les choses singuliéres qu’il apercoit et il
leur parle et leur raconte avec douceur en termes que je ne saurais rendre ses impressions; les médecins le regardent dans les yeux, ces beaux yeux qui n’ont jamais été si beaux et plus intelligents, et se disent entre eux : c'est singulier. Il y a dans le cas d’Arthur quelque chose qu’ils ne comprennent pas. Les médecins d’ail~ leurs ne viennent presque plus parce qu’il pleure souvent en leur parlant et cela les bouleverse. «Il reconnait tout le monde; mais il m/’appelle parfois Djami mais je crois que c’est parce qu’il le veut et que cela entre dans son réve voulu aussi; d’ailleurs il méle tout et... avec art; nous
sommes
au Harrar;
[102] nous partons toujours pour Aden,il faut chercher des chameaux, organiser la caravane; il marche trés facilement avec sa nouvelle jambe articulée; nous faisons
quelques tours de promenade montés
sur de beaux
mulets richement harnachés; mais il faut travailler, tenir les écritures, faire des lettres. Vite, vite on nous
attend, fermons les valises et partons. Pourquoi a-t-on laissé dormir? pourquoi ne laidé-je pas a shabiller? Que dira-t-on si nous n’arrivons pas aujourd’hui? On ne le croira plus sur parole, on n’aura plus confiance en lui! Rt il se met a pleurer en déplorant ma paresse et ma négligence, car je suis toujours avec lui et c’est moi qui suis chargée de faire tous les préparatifs. « Il ne prend presque plus rien en fait de nourriture et ce qu'il prend c’est avec une extréme répugnance; aussi il a la maigreur d’un squelette et le teint d’un cadavre; et tous ses pauvres membres paralysés, mutilés, morts
autour
de lui! O Dieu, quelle pitié!
« A propos de ta lettre et d’Arthur : ne compte pas du tout sur son argent : aprés lui et les frais mortuaires payés, voyages, etc., il faut compter que son avoir reviendra 4 d’autres; je suis absolument décidée 4 respecter ses volontés et quand méme [103] il n’y aurait que moi seule pour les exécuter, son argent et ses affaires iront 4 qui bon lui semble. Ce que j’ai fait pour lui, ce n’était pas par cupidité, c’est parce qu'il
234
Cahier II
est mon frére, et que, abandonné par l’univers entier, je n’ai pas voulu le laisser mourir seul et sans secours;
mais je lui serai fidéle aprés sa mort ce qu’il m’aura dit de faire de son habits, je le ferai exa€tement, quand en souffrir. « Que Dieu m/assiste et toi aussi: besoin du secours divin. « Au revoir, ma chére maman, coeur. 5
comme avant, et argent et de ses méme je devrais nous avons bien je t’embrasse
de
« ISABELLE!. »
HO6pital de la Conception — Marseille’. Ces riviéres qui du Liban courent a la rencontre du soleil et se perdent dans le désert®. Séjour de Henrion chez moi du 11 au 16 juillet.
Le 15 visite chez Mlle Muller von Zigler 4 Wiesbaden.
Le conciliabule des églises comme un tas de gerbes qui mélent leurs épis. 26-30 juillet. Voyage en Bohéme ou je vais servi de témoin a Marten®. 26, Nuremberg, la ville de tuiles
descendant des deux cétés vers la Pegnitz comme un livre ouvert par le milieu. La maison [104] d’ Albert Durer. 27, Roztok, conversation avec Marten qui s’est converti.
28, Turnoy.
29, le mariage.
30, Prague
et
retour 4 1 h. du matin.
Treuil: treu® 2 Le moulin sur l’Izera Ptiper. Les graines de tilleul qui descendent en pivotant, sur leurs deux ailes. Le papillon qui ouvre son cocon avec son ceil, en le coupant d’une des facettes de ce diamant naturel. 44 ans. Visite.
Juillet-Aott 1912
235
L’histoire est comme une messe ot Dieu de temps en temps se retourne et dit : Dominus vobiscum’.
11/8. Heidelberg. L’appareil digestif marmite, creuset, alambic?. L’enfant qui va naitre comme un coin.
Velle —vultus — velum — velut — (velox ?) —vel —. Gratiae gratis datae — Comme la science, le don de prophétie,
le don
des langues
et des miracles, et les
autres choses de méme nature. Ces priviléges qui sont accordés quelquefois méme aux méchants ne se donnent | jamais pour un intérét personnel, mais pour le bien et pour l’édification de toute l’Eglise (Ca[échisme] du Cloncile| de Trente)®. N.-S. loue la foi du Centurion qui lui avait envoyé quelques anciens d’entre les Juifs pour le prier de guérir son serviteur (A[u] s[ujet] de lintercession des Saints). [105] La Forét toute remplie par la foule des dimanches. Le sujet du Songe d'une Nuit d’ Eté sur une immense échelle. Les longues haies reétilignes avec les groupes étagés en perspective. Cyclistes, couples, pensionnats. Marche indéfiniment dans le feuillage. Comme un hote cher et vénérable qui est entré chez vous et dont on caresse la main.
Ce sont les chauves-souris qui lui ont révélé le secret. Selon
sir Hiram
expériences peuvent
Maxim,
de l’abbé
se conduire
et comme
Spallanzani,
librement
le prouvent
si ces
les
animaux
dans les ténébres, ce
n’est pas parce qu’ils possédent des yeux spéciaux, doués de la faculté de voir dans la nuit, mais parce que leur sens du toucher est si extraordinairement développé qu’ils ressentent a distance les moindres vibrations extérieures.
236
_
Cahier II
Cuvier croyait que cette sensibilité particuliére avait son siége dans les membranes des ailes. Mais notre ingénieur a découvert que ce sixiéme sens siége sur la face des chauves-souris. Chez certaines espéces, ce sont les oreilles et la levre supérieure; mais chez la chauve-souris de Blainville, ’organe du sixiéme sens s’étend sur toute la face qui est munie d’un systéme pileux extrémement sensible. Ces divers organes percoivent les mouvements des inseétes que chasse la chauve-souris. La perception de la présence des objets inanimés s’opére d’un autre facon; le battement des ailes de la chauve-souris pendant son vol produit des ondes; ces ondes vont heurter les objets voisins, et ce
heurt provoque a son tour des vibrations que percoivent alors les organes du sixiéme sens de |’animal obscur. C’est le choc en retour. C’est la lumiére d’une lampe que nous tenons 4 la main, qui éclaire un objet et qui permet 4 nos yeux de voir cet objet; la lampe, ce sont les ailes; la lumiére, ce sont les ondes produites pat le mouvement des ailes; l’objet éclairé, c’est Pobjet
inanimé dans l’ombre; nos yeux, c’est ’organe sixiéme sens de la chauve-souris?. 21 aout. —
du
Visite des Marten.
Si on voyait les ames en creux par ce dont elles ont besoin au lieu de les voir convexes et repoussantes?. Le samedi 24 aoat 4 8 h. 3/4 du soir (vigile de la Saint-Louis), naissance de Henri Louis Charles Marie, un gtos garcon bien solide. Ma femme souffre depuis 2 h. du matin. Le Dr Kutz. Madame Muller. Ma femme nourrit®. Ll’
[106] Lugné-Poé et Madame Annonce faite a Marie. Jaccepte*.
L’opaque
ciel de l’abime
Kalff me demandent
avec
pour
étoiles
des
monstres immanents, des animaux en forme de mitres
@évéques et de dés 4 coudre; et ’o&opode comme un
Aout-Septembre
1912
237
ange de ténébres, pleurant tous ses tentacules allongés au milieu de ce gouffre d’encre, une grande étoile bleue allumée au sommet de sa couronne de projecteurs rouges et blancs}. « S’étiaffer » (diale€te vaudois) s’écraser — un fruit s’étiaffe en tombant.
Comme le soleil du matin reflété sur une plaque d’or. Je demande a Dieu des avances sur sa miséricorde.
S. S. Pie X dans sa 17 encyclique (4 o@[obre] 1903) dit ceci: « Haec profetto qui reputet, is plane metuat, (corum quae) supremo tempore sunt exspettanda, sit perversitas haec animorum libamentum quoddam ac veluti exordium ; neve filius perditionis, de guo Apostolus loquitur (II Thess., Il, 3)jam in hisce terris versetur. » Hitler?.
Simultanément dans lescalier le pas lent et lourd de quelqu’un qui monte et le pas court et précipité de quelqu’un qui descend. L’aveuglante lumiére de la porte qui s’ouvre®.
Les vergers de Bergen. [107] Vous seul importez. Je ne suis pas intéressant. Le chirographe attaché 4 la croix (comme on affiche un insolvable)‘.
13 septembre. L’ Annonce®.
—
Visite
de Variot.
Lecture
Elle bondit dans ses longs voiles avec immatérielle de l’écureuil.
de
la grace
Le désert de Babylone avec les fours a briques de toutes parts qui fument*.
238
Cahier II
Un sourire sans joie comme mal au ventre.
un nourrisson qui a
La reconnaissance comme envers un sage ami qui prend la peine de vous conseiller. Gabriel Ferrand me donne des nouvelles de Rimbaud qu’il a connu 4 Aden et a Zeilah. Trés doux, coiffé aux enfants d’Edouard, sortant nu-téte 4 ce terrible soleil. Il vivait avec une femme abyssine, qui
fit une faysse couche. Accroupi, les pieds et les mains nus et teints au henné. Il riait sans aucun bruit et la main
devant
sa
bouche,
avec
une
espéce
de petit
gloussement. Sa conversation était totalement insignifiante, «de queues de poires». Lettres d’épicier ignorant. Petites histoires mal racontées. I lui demande des livres. I] répond qu’il s’est servi des quelques romans qu’il avait pour faire des paquets et des cornets. Méprisé de tous et considéré comme un « voyou» (sans rien de malhonnéte) et un loufoque. Les yeux seuls étaient extraordinaires, « toujours portés en avant». Paraissant absolument insensible [108] a la nature. Souffrance basse et continue, ne pas la prendre a Phéroique continue.
mais
d’une
maniére
encore
plus basse
et
Toute la doétrine et toute la science du salut se rameénent a4 4 points principaux qui sont : le Symbole des Apdotres, les Sacrements, le Décalogue et l’Oraison
Dominicale (G[rand] Cat[échisme])}.
Est-ce queJe ne remplis pas le ciel et la terre ?(Jér.)?. La simple contemplation de la nature ne peut pas faire connaitre Dieu 4 tout le monde (G[rand] Cat[échisme})®.
Défense laique, défense républicaine. Aprés 30 ans de persécution, il est exaltant de ne les entendre parler
Septembre-Oftobre 1912
239
que de défense. La position de l’enfer est défensive?. « Non veni solvere sed adimplere®. » Non pas dissoudre, mais remplir, non point la solution d’aucune croix, mais la remplir en me mettant. Plus une croix désormais, plus une crux, plus une X, sans que je sois dessus, et qui ne me serve de signature et de monogramme. Lundi 30 septembre a 11 h. 1/2, baptéme d’Henri. Henrion parrain. 9 o€t[obre]- 27 o&[obre]. — Voyage a Paris pour py tee faite a Marie. Lugné Poe, Suzanne Després, Gladys M[...], Variot, Lara, Iribe, Rollan, Magnat. Du 19 au 22, Villeneuve. Visite au [109] doyen de Fére.Geéniat*. Crier et accentuer sur la consonne. Prolonger sur la derniére syllabe’. Affaire Barackova. Judica me, Deus, secundum justitiam meam et secundum innocentiam meam super me (Ps[aume] des morts)*. Juge-moi, Dieu, selon ma justice 4 moi, selon la
régle qui m’est appropriée, et selon mon innocence au-dessus de moi (conférée par la grace). 2 raisons de miséricorde. Abyssus abyssum invocat, in voce cataratlarum
tuarum.
L’abime de la Genése (V, 2) — la terre alors inane et vide qui invoque le ciel et leve les mains (Hab.) — « a la voix de tes ca[ta]ractes ». — La voix est produite par le souffle qui passe. E# spiritus Dei ferebatur super aquas’.
Firmamentum eS Dei omnibus timentibus eum (Ps. XXIV). Le ciel supréme ou Dieu méme. Ascendam in coelum, ad sedem Dei altissimt (Is.)*. Ecce Sto post oftium et pulso (Cant.) [s7c]°. Ténédos devant les Dardanelles?®,
240
Cahier II
Nunc tantum sinus et Statio male fida carinis*. Maintenant rien qu’une rade et mouillage mal str pour les bateaux (Aen., II).
[110] Didici quod omnia quae fecit D\omi|nus perseverent in aeternum (Eccl., II, 14)?. Tous les radicaux hébraiques sont formés de trois lettres.
Sainte Alpais au x1r® siécle décrit le systéme solaire tel que Copernic le révéla plus tard?.
En 1700, Clément VII reproche 4 Léopold d’avoir admis les princes de Brandebourg parmi les électeurs du Saint Empire‘. Et viderunt Deum Israel et sub pedibus ejus quasi opus lapidis sapphirini et quasi coelum cum serenum est (Ex., XXIV, 10). Et similitudo super capita animalium firmamenti, quasi aspetius cryStalli horribilis et extenti super capita eorum desuper (Ez., I, 22).
Fecit quoque mare fusile... (II Par., rv, Vil22): La mer d’airain du Temple. Tous les sont sans doute susceptibles d’une mystique. Et in conspettu sedis tanquam mare cryStallo (Ap., IV, 6)*.
2, et III Reg.,
détails donnés interprétation
vitreum
simile
En faisant mon examen de conscience, je vois que
tous mes péchés, et spécialement [111] ma chute de 1900, ont eu sans doute pour cause ma dureté de coeur envers le prochain, et cet esprit détestable de querelle et d’animosité. Passé en revue avec consternation tous les gens a qui j’ai fait tort, en me faisant illusion a moi-méme. Encore maintenant combien je suis prompt a nm irriter et a essayer de faire mal! Miserere
mei, Deus, de moi qui ai si peu d’indulgence et de
Novembre
1912
241
piticé, et ne me jugez pas 4 la méme mesure. Ai-je vraiment vécu en chrétien depuis ma conversion? Si tous mes ates et mes pensées étaient inscrits, en quoi cette vie d’un chrétien différe-t-elle de celle d’un homme qui ne lest pas? Quelle faiblesse! quelle complaisance au mal! quelles rechutes continuelles!
C’est si triste que c’est amérement comique. — Eglise
de S. Léonard. Frandon,
Héritte, Drogin,
Blanchot,
Dubail,
Ra-
taud, les gens de Tientsin, Marie, Peyrot, les 3 mendiants, Barack, mes propres parents, Louise’,
Creatura est effectus Trinitatis creantis sub triplici genere causalitatis :; Efficientis a qua est in creatura unitas, modus e¢ mensura; Exemplaris a qua est in creatura vetitas, species e¢ numerus; Finalis @ gua est in creatura bonitas, ordo ef [112] pondus. Ouae quidem reperiuntur in omnibus creaturis, tanquam vestigium Creatoris, sive corporalibus,
sive spiritualibus, sive ex utroque compositis. Nam quoniam principinm perfetissimum a quo manat perfettio universorum necesse est agere a se, ef secundum se, ef propter se, ef guia nullo in agendo indiget extra se, necesse est quod habeat intentionem triplicis causae respettu cujuslbet creaturae, scilicet efficientis, exemplaris et finalis. Necesse eft etiam omnem creaturam secundum hance triplicem habitudinem comparari ad primum causam. Omnis enim creatura conStituitur in esse ab efficiente, et conformatur ad exemplum, et ordinatur ad finem ; et per hoc et una, vera, bona; modificata, speciosa, ordinata; (S. Bonav., Brevi/oq.)?.
Angelus est substantia (Damasc.)’.
mensurata,
discreta, ponderata
intellefualis
semper
mobilis
L’inconscience dans |’évanouissement provient de ce que l’4me n’a plus de fin ni d’écho ou se répercuter. [113] E volse 7 passi suot per via non vera
Imagini di ben seguendo false Che nulla promission rendono intera (Dante, Purgatorio, c. Xxx)*.
242
Cahier IT
Fin novjembre]. — Séjour du jeune Piero Jahyer? avecson paletot écarlate et son passe-montagne en laine grise. Descendant de Vaudois. Son pére pasteur se tue quand il a 12 ans par remords d’avoir manqué a ses devoirs de fidélité conjugale. A 20 ans, crise de foi et de pureté. Dieu le conduit au temple out il voit celle qui est maintenant sa femme. L’Apollo,
papillon
des
altitudes
alpestres,
qu’on
ne trouve jamais au-dessous de 2 ooo m. Une grande voilure blanche avec un disque rouge au bas. On le
trouve ivre et pamé sur les brilants résédas sauvages. Voyage 4 Paris (3 déc[embre]) pour les répétitions de ma piéce. Mad{ame] Frappa qui [114] joue Mara a perdu son petit garcon 4 4 ans d’un sarcOme dont il avait été atteint a l’age de trois mois. A sa mort pendant 2 jours elle est folle. Elle fuit et se retrouve on ne sait comment
a Beauvais, couchée dans la salle
a manger d’un hotel. Répétitions dans un atelier de mécanicien, 22, rue Turgot?.
Scriba eruditus in regno Dei similis proferenti de thesauro suo nova et vetera
52)*.
est patrifamilias (Matth., XIII,
Omnia autem haec in figura contingebant illi (1 Cor., Xp bs La multiplicité comporte l’étendue. Ecce gigantes gemunt sub aquis (Job, XXVI, 5)5. Villeneuve, 15 déc[embre]. — La flore de décembre : laurier-thym, fougéres, giroflées, fier aspic, des bancs de résédas coriaces, roses de Noél (ellébores), une
petite fleur mauve (saxifrage) qui ressemble madrépore et qui sent trés bon et de vieux boutons de rose tout mollasses®.
4 un petits
[115] Sujet : horreur de la fade personne de tous les jours’.
Samedi
21
déc[embre].
—
17¢ représentation
de
Novembre-Décembre
1912
l’ Annonce faite a Marie par « ?Guvre» Malakoff avec succés?.
243
au Théatre
Vocalises de bégue et pirouettes d’unijambiste. Quand papa lapin mourra J’aurai sa belle culotte J’aurai sa culotte de drap*. Jay donné mon cceur 4 la gribouillette®. Et quod nunc est ratio impetus ante fuit (Ovide)'. Visite au musée d’histoire naturelle. Les admirables fossiles en bas-reliefs conservés comme entre les
feuilles d’un herbier. Le diplodocus, le triceratops. Les vols étourdissants d’oiseaux de paradis et de colibris®.
Retour le 24 [décembre] avec mon beau-pére. Le 31 [décembre] visite de Marguerite®. DileGius meus cadant umbrae’.
mihi et ego illi donec inclinetur dies et
LRN [116] re? janvier. — Temps beau et assez froid. Madame
Bilco, 107, avenue Mozart.
Concert. Le Turandot de Busoni. Valse no&turne — Sinfonia domestica de Richard Strauss, 7 h. du soir, 7 h. du matin. Orphée de Gluck, il y avait q[uel]q[ue] c[hose] a faire avec ce sujet?.
Couleur
de girafe.
Chez les Weinberg. Maison d’une richesse insolente
et presque effrayante. La solennelle forét qu’on voit par toutes
les fenétres.
Le salon ot Von a signé le traité de Francfort. Mobilier du pur Second Empire. Glaces ovales aux cadres surchargés, cuivres et marqueteries compliquées, fauteuils crapaud, capitons de soie jaunes, porcelaines aux bouquets bourgeois. Le petit enfant qui dort dans son berceau en faisant le salut militaire. 16-1 — Promenade avec de Neufville, —
en traineau dans le Taunus Cronberg, Schmitten, Sand-
placken. Les foréts et les montagnes dans la neige.
Janvier 1913
245
Ca m’est égal — Ganz wurst! Cest tout saucisse pour moi. [117] Tout le complexe’.
Cratyle a raison de dire qu’il existe des noms naturels aux choses et que tout homme n’est pas un artisan de
noms, mais que lest celui-la seul qui considére quel nom est naturellement propre a chaque chose et qui sait en reproduire |’Idée dans les lettres et les syllabes (Platon, Cratyle)*. Gemmes : Abraxas, Ia6 intaéte et datant de plus dans les terres du Main. cristallisé — A lintérieur » qui le constitue‘. 7 fév[rier]. —
— La noix hickory presque de 100 000 [sic] retrouvée Le petit lingot d’or natif, d’un quartz, l’acide liquide
Passage des Miomandre’.
La musique est le seul art qui ait pour matiére le mouvement lui-méme. PSpEHenCs de Ramsay® qui semblent indiquer la transformation de Il’énergie en matiére (avec les rayons X). La diversité, sur terre, des idiomes empéche personne de proférer les mots qui, sinon, se trouveraient,
par une frappe unique, elle-méme matériellement, la vérité (Mallarmé)’. Conversation avec Hollaender, représentant de Reinhardt®, petit juif 4 face carrée et aux yeux clignotants. Il se tient debout [118] les jambes croisées en X (a retenir).
L’église de pierre grise avec son hennin d’ardoises comme ces vierges usées dans le service des cliniques et des lazarets. ... camper tout Vhiver a la belle étoile comme choux,.
les
246
.
Cahier II
« La condition nécessaire du salut, dit S. Thomas,
c’est Pincarnation du Verbe. Il a donc fallu que le mystére de l’Incarnation fait connu de quelque maniére, dans tous les temps et par tous les hommes. » — « Ce que l’on appelle maintenant la religion chrétienne, dit S. Augustin, existait chez les Anciens et n’a jamais fait défaut depuis la naissance du genre humain jusqu’au temps ot le Christ s’est incarné, Epoque a laquelle la vraie religion qui existait déja commenga d’étre appelée la religion chrétienne.» Rome a condamné Jansénius soutenant que le Christ n’était pas mort pour tous les hommes. Le pape Alexandre VIII a condamné Arnaud niant l’existence de la Grace hors
de l’Eglise. S.Th[omas] écrit : « L’acte humain est jugé vertueux ou vicieux selon la notion du bien chez lagent et non selon Vobjet matériel de l’aéte. » — S. Alphonse de Liguori : « Non seulement celui qui opére avec une conscience faussée ne péche pas, mais probablement il acquiert du mérite. » Ces textes d’aprés Loewengaard!.
[119] 21-24 fév[rier]. — Voyage a Hellerau. L’institution Jacques [sic] Dalcroze. Le théatre Salzmann. Hegner — Reinhardt et Hollaender?. Ut sint unum sicut et nos unum Zaye:
sumus (Jean, XVII,
D’aprés /e Temps (26 févr. 13) — Les étoiles ne sont pas immobiles... Mais par suite de la distance a laquelle elles se trouvent et de nous et de leurs voisins immédiats, leur déplacement relatif est insensible. C’est bien bizarre. Nous avons des représentations graphiques datant de plusieurs milliers d’années de la « Grande Outse » par ex[emple] quin’a pas changé, et de plusieurs siécles de toutes les autres constellations,
par ex[emple] systémes multiples comme les Pléiades.
La sinistre étoile louche Algol.
Feévrier-Mars
1913
247
Statuit terminos gentium Altissimus secundum numerum angelorum Dei (Deut., XXXII, Invenit eum solitudinis®.
8, sec. Septuag.)}.
in terra deserta in loco horroris et vaStae
Formatis igitur Dominus Deus de humo cunétis animantibus terrae, et universis volatilibus coeli, adduxit
ea ad
Adam ut videret quid vocaret ea; [120] omne enim quod vocavit Adam animae viventis, ipsum est nomen ejus. Appel-
lavitque Adam nominibus suis cuntta animantia et universa volatilia coeli, et omnes bestias terrae (Gen., I, 19)°.
Mon pére gravement malade depuis une semaine. Je recule de partir sans raison, par paresse, par désir | secret d’arriver trop tard. Le 1[*T mars], télégramme urgent. Je pars le soir. Sur la Marne aurore admirable de ce Dimanche du Laezare. A pied jusqu’a Villeneuve. Arrivée 844. Mon pére mort presque subitement a 3h.du matin, sans s’étre confessé, bien qu’a plusieurs reprises il en ait manifesté le désir. La figure jaune, Pair
recueilli,
self-communing,
le froid
mortel
de
ce cadavre!. On fait la fosse entre 2 contreforts de l’église. 2 métres de pierres 4 enlever. La mise en biére. L’enterrement le 4. Camille mise 4 Ville-Evrard le 10 [mars] au matin’®.
J’ai été bien misérable toute cette semaine. Les folles 4 Ville-Evrard. La vieille g4teuse. Celle qui jasait continuellement en anglais d’une voix douce comme un pauvre sansonnet malade. Celles qui errent sans rien dire. Assise dans le corridor la téte dans la main. Affreuse tristesse de ces 4mes en peine et de ces esprits déchus®. [121] Le printemps qui du fond des buissons nous tend mille petites pattes veloutées.
Cartoufles, crobins : pommes de terre’.
Catalyse ; combinaison de deux corps 4 laquelle est
248
Cahier II
nécessaire la présence d’un troisitme qui demeure intaét. Par ex[emple] l’acide sulfureux et ’oxygéne seuls demeurent
intaéts,
en
présence
platine ils se combinent sulfurique?.
de
la mousse
et produisent
de
de lacide
Viderunt te aquae, Deus, viderunt te aquae : et timuerunt et turbatae sunt abyssi. Multitudo sonitus aquarum, vocem dederunt nubes... In mari via tua et semitae tuae in aquis multis, et vestigia tua non cognoscentur (Ps. LX XV) [szc])?. De torrente in via bibet. Pour étancher sa soif il ne trouve
que
cette eau
rapide et qui fuit ses lévres. Ut ascendam ad populum accinttum nostrum (Cantlique] de Habacuc)‘. Toutes les objections a J.-C. ont été faites une fois pour toutes le jour du Vendredi-Saint.
[122] La consécration des Eaux le Samedi-Saint. Deus cujus Spiritus super aquas inter ipsa mundi primordia ferebatur, ut jam tunc virtutem sanctificationis aquarum natura conciperet... uf unius ejusdemque elementi mysterio, et finis esset vittis et origo virtutibus... qui hanec aquam regenerandis hominibus praeparatam, arcana sui numinis admixtione fecundet : at sanétificatione concepta, ab immaculato divini fontis utero in novam renata creaturam, progenies coelestis emergat; et quos aut sexus in corpore, aut aetas discernit in tempore, omnes in unam pariat gratia mater infantiam (Suit ?exorcisme des mauvais esprits qui peuvent étre mélés a l’eau). Sinz etiam purificandis mentibus efficaces. — Puis mélange de Vhuile et du chréme.
Deux phénoménes étranges de réves. En 1895, le bateau arrivant 4 minuit 4 Hongkong, je dormais sur le pont et je révais. En ce moment éclata un coup de canon qui me réveilla aussitét. Dans le moment infiniment court qui sépara le coup
Mars 1913
249
de mon réveil, j’eus le temps d’imaginer toute une histoire par quoi ce coup se rattachait 4 mon réve. Les énigmes, les questions posées en réve, qu’une partie de lame propose 4 l’autre, et dont elle a a trouver la solution. Sans [123] doute la question d’abord, puis la solution, combien bizarre!
Quid namque per siniftram, nisi vita praesens, quid vero per dexteram nisi perpetua vita designatur ? Unde in Canticis Canticorum scriptum est: Laeva ejus sub capite meo et dextera illius amplexabitur me (S. Grég., hom. 21, leg{on] de Paques)}. Qualunque melodia piu dolce suona quaggin, e pin a se lanima tira, parrebbe nube che squarciata tuona, comparata al sonar di quella lira, onde si coronava il bel zafiro, Del quale il ciel piu chiaro s inzaffira (Dante, Parad., c. xxttt)*. Il n’était pas son esclave, mais l’esclave du désir quelle lui inspirait (Arnold Bennett)®.
Une petite choucroiate de feuilles de roses. Image; zdem. — La breloque. Je pense, donc je suis — Descartes Ce que je pense est — Malebranche Seul ce que je pense existe — lidéalisme kantien. Una tibi (cadran solaire de Montauban)‘. Francfort s{ur] le Mein Terminé le 30 mars 1913.
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CAHIER
Iii
Ouvert le 21 avril 1913 Francfort-sur-le-Mein.
NS [1] Le 31 mars 1913 représentation de /’Annonce a F[ranc]fort au Neues Theater par la troupe de I’ Buvre ' sur Pinvitation des Kammerspiele. Succés. Couronne de laurier. Le 2 [avril] 4 Strasbourg au GrandThéatre?. Succés également. Le Dr Bucher?, Mlle Koeberle®. Soirée chez celle-ci. Vendredi, Ste Odile‘. Salzmann’. Légende circassienne. Le destin est une femme monstrueuse haute comme une montagne, incapable de plier ou de tourner la téte. Elle a un ceil sur le sommet du crane. Ses mains infatigables cherchent incessamment au milieu de la foule homme heureux. Quand elle l’a trouvé, elle Péléve jusqu’a ce quwil artive dans le champ de’son ceil et alors elle le laisse tomber.
Soir de printemps. 3 enfants dont l’un avec une veste rouge autour d’une [2] brouette chargée de choux. Mlle Jullien 87, rue Lévis 17°. Mon petit morceau de beurre en or®!
Bonum ex integra causa, malum ex quocumque defectu (Adage scolastique)’. 2-11 mai, — Voyage a Paris pour la représentation
de /’Annonce 4 la Comédie des Champs-Elysées® (4 mai). Court-circuit des lampes rouges au 3° adte.
254
Cahier II
Tristes révélations sur C.1. Le 11, jour de la Pentecéte,
excursion 4 Beauvais. La Cathédrale, supréme effort du Gothique, exhaussée au milieu de l’appareil de levage, effort presque spasmodique des contreforts, supreme lancée de la pierre : cité d’arches appuyée comme sur les tranches d’un livre exfolié. A l’intérieur, colonnes
avec les nervures concaves et musculeuses d’un hétre. Couleur du hétre. La vieille église de la Basse-(Buvre qui barre la route et qui n’a pas [3] voulu céder la place 4 cette grande Vierge, sa fille, 4 moitié née. Déjeuner
a ?Hotel-des Trois Piliers, communiquant cuisine. Avec Sylvain Pitt?. Judicia tua abyssus multa (Ps.
avec la
XX XV, 7?).
A Végard des tentations les plus fréquentes, s’examiner sur 3 choses : 1° Si l’on y trouve une satisfaction, dans le sens d’un attachement et d’une complaisance délibérée de la volonté;
29 Si Pon ne veut pas y retomber; 3° Si on veut ne pas y retomber. La vie d’un Ozanam et la mienne! Quelle suite d’un cété, quel sérieux, quelle attention! Et de l’autre quels
hasards, quel décousu, quel débraillé, quel gaspillage, quelle négligence de mes devoirs, quel oubli des pauvres! Je suis comme une marionnette sans cesse en lutte contre les fils qui d’en haut la maintiennent, d’ot continuellement ces chutes et ces gesticulations grotesques*.
Et pulchritudo agri mecum est (Ps. XLIX, 11). [4] 10-12 juin. Opération a mon petit Pierre, on lui enléve une partie de la cloison nasale. Thérése Carmélite Dieu.
de l’Enfant 4 Lisieux,
Jésus et de la Sainte Face, Priez
pour
nous,
servante
de
Mai- Juin 1913
255
Un quinquagénaire jaune et ravagé, lair d’un croupier Mexicain, avec une moustache noire terminée par deux minces queues de cerises. Attio est in passo (S. Th.). Par nature tout ce qui est en acte meut et tout ce qui est en puissance est mu. La nature de tout acte est de se communiquer autant qu’il est possible : d’ou chaque agent agit selon qu’il est en a¢te, et agir n’est pas autre chose que communiquer ce par quoi l’agent est en ade, autant du moins que cela est possible.
Raison pour laquelle les scolastiques suivent Aristote (Albert le Grand : guia pauciora vel nulla [5] inconvenientia _ sequuntur ex dictis ejus)?. Vezera novis augere (Léon XID).
Deux juifs qui discutent : tout en eux est crochu et s’accroche, les deux nez et les vingt doigts. Dans le paysage allemand toujours quelque chose d’encombré et d’obstiné. Paysage caractéristique : une grande plaine avec autour les replis verticaux et sinueux d’une forét verticale comme le rebord d’une tourtiére.
Excursion en auto dans le Spessart et la Franconie Bavaroise : petites chapelles de saints. Chaque maison avec son image ou sa Statue, sous un ciel plein de menaces au bord d’une route ow circulent des gens lourds et silencieux, une de ces petites chapelles, suggérant partout l’idée d’une supplication et d’un danger. Proverbe russe : les juifs quand ils se battent, c’est avec un fusil courbe.
[6] Argumentum pessimi turba ef (Sénéque)s. 17-20 juin. Voyage a Schwaigern chez le comte Neipperg’. Maulbronn: le jardin claustral plein de
256
Cahier III
roses et de sapins, la fontaine close a 3 vasques dans la chapelle gothique, la chaire sculptée, chardons, bois, raisins et oiseaux, le Christ tout seul'. Wimpfen, Heilbronn, Odenwald.
Contemplata aliis tradere (S. Th. Aq.)?. 24 juin-5 juillet. Hellerau. Représentation d’Orphée. Ajournement
de ma
piéce. Mme
Dohrn,
Reinhardt,
Dohrn. Tatiana Givago?. La musique est ame de la géométrie. Contradiction dans ma figure; le front et le nez puissants, puis une petite bouche naive, un petit menton faible, gras et indécis. Mon nez est au service de mon front, mais non pas de mon menton. Non! cette petite bouche fine, extraordinairement vibrante
et délicates. Laquelle l’emportera, des deux parties de ma figure? [7] Sur tous les points du pays, le Roi avait des compagnons en sa majesté (Guy Coquille)®. Promenade sur le Rhin et la Moselle. A pied par les foréts de Boppard 4 Brodenbach. Le soir retour en ch[emin] de fer le long du Rhin dans cette puissante vallée si bien proportionnée 4 ce fleuve formidable. La grandeur obtenue par l’exaéte proportion. La lune. Ces violentes pluies de juillet; et l’église soudain sous ces nappes d’argent vomit l’eau par toutes ses gargouilles. Viderunt te aquae, Deus; viderunt te aquae (Ps. LXXVI,
17)* Départ pour la France en auto le 19/7 avec Gautier. Chateau de Bruchsal. Strasbourg. L’ Alsace sous une pluie battante. Coucher a Kaysersberg. 20 [juillet]. Le Dr Bucher? 4 Ferland. La Schlucht
Juin- Juillet 1913
257
par un froid glacial. Gérardmer. Remiremont. Plombiéres. Luxeuil. Vesoul. Au tournant du chemin la jeune fille en bleu qui s’abat comme si elle avait recu un coup de fusil. Baume-les-Dames. [8] Besangon. Causerie avec les professeurs Le Garais et Le Vaxelaire. 21 [juillet]. — Ornans. La Loue. Pontarlier. Lac de S. Point; Jura; Morez. La Faucille. La Valserine. Nantua. Arrivée 4 Hostel 4 5 h. — 22. Dent du Chat et tour du Lac d’Annecy. — 23. Lyon.
Bourdonnement d’oreilles. C’est la rumeur Océan éternel que je commence a entendre.
de
L’élément fixe que postule la pensée pour com' prendre le mouvement local n’est pas un solide concret (comme le veut Aristote), ce repére fixe est, pensent les Scotistes, l’“bz du mobile, ... sa position par rapport a d’autres corps, soit réels, soit idéaux. Quant au mouve-
ment, il apparait aux disciples de Duns Scot, a Jean le Chanoine par ex[emple], comme une continuité réelle, un écoulement
effectif, forma fluens, ens continuativum,
pareillement le temps objectif, véritable durée fluante. Et la pensée, croit-on, altére nécessairement l’essence
de une [9] et de l’autre dés qu’elle tache a les comprendre; elle leur substitue des séries d’états distincts, esse discretum, qui n’ont qu’une valeur conceptuelle et correspondent 4 Vesse continuativum, sans lui étre identique. Cette théorie scotiste qui annonce, on le voit, certaines théses de M. Bergson, dérive d’une doétrine de Damascius; elle est acceptée plus ou moins complétement par Buridan, Albert de Saxe, Paul de Venise
et Gaétan de Tiéne. Ouvrages de Duhem. Dufourcq, /es Origines de la science moderne. Rev|[ue| des 2 Mondes, 15/7/13}. D’aprés cet auteur, Buridan, Albert de Saxe et Oresme, fondateurs de la science moderne en réaction contre Aristote.
1099. — Prise de Jérusalem par les Croisés.
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Cahier III
1199. — Bataille de Qarn Halttin et reprise de Jérusalem par Saladin. 1291. — Prise de S. Jean d’Acre par les Sarrazins. Ruine des Templiers. Philippe le Bel. Schisme d’Occident. Guerre de Cent Ans. Hussites. Protestantisme?. [10] Luther opposé a l’héliocentrisme. Par la voix de Tycho-Brahé?, l’église luthérienne signifie qu’une hypothése, pour étre acceptée, doit s’accorder avec Aristote et avec l’Ecriture aussi bien qu’avec l’expérience (1578). —
Le luthérien Kepler est condamné
par son église. Parole d’une vieille fille 4 une autre qui venait d’acheter un terrain au cimetiére pour y reposer au cété de son frére : « Gabrielle! je ne vous comprends pas! Que va-t-on dire de vous? étre couchée ainsi a cété dun homme? » L’Empereur Frédéric passait tout son temps 4 coller soigneusement dans un registre les fragments de journaux ou l’on parlait de lui. Lettre de Mad{ame] Chabaneix sur la mort de son mari, le Dr Chabaneix, (4 mon grand étonnement pieusement) décédé 4 Tientsin du typhus contraété a Phopital chinois. Mme Ch[abaneix] écrit que sa conversion est due au P. Lebbe* et a mes livres. Cela m’effraye. Je me sens [11] tellement passif et sans aucun mérite. Jai été choisi (ou plutot mes livres) comme un tuyau de plomb ou de fer‘.
Des parfums sur Ses pieds — et des ordures sur Sa téte.
Jésus, ma vie!
31 juillet. — Lettre de B[erthelot] m’offrant Hambourg. J’accepte. Encore un pays du Nord, pluie et froid, moi qui aime tant le soleil!
Juillet-Aott 1913
259
2 aott. Promenade a la Combe [...]! et au col de Richemont.
Angelus
est substantia
intellettualis
semper
mobilis
(Damascéne)?. Omnis creatura certis suae naturae circumscripta est limitibus... Licet quaedam locis corporalibus non contineuntur,
circumscriptiva tamen substantia non carent (Ambr., Spltritu| S{anéo}*, I, 7).
De
Quo est et quod est, esse et quod esse. Intelligentia est finita superius, in quantum scilicet recipit suum esse a suo superiori. Infinita inferius in quantum non recipitur in aliqua materia (De causis)*. [12] Jour de pluie. Les glaciers derriére le Bourget qui brillaient comme de l’argent. Arrét dans une ferme. Les trous dans la toiture du grenier comme des étoiles. Les créches de chaque cdté, on donne le foin aux vaches par des guichets fermés par des panneaux glissant sur des rainures. Un fou, un aléné. Chavornay, la Lavanche.
Nihil prohibet angelo assignari locum divisibilem per contatum suae virtutis, sicut corpori assignatur locus divisibilis per contattum suae magnitudinis (S. Th., I, q. 53, art. 1)°. Angeli dividuntur in subStantiam, virtutem et operationem
(S. Dion.)°. Angeli illuminantur rationibus rerum (id.)". Species per quas angeli intelligunt, non sunt a rebus acceptae, sed eis [14] connaturales... et ideo suam perfettionem intelligibilem consequuntur per intelligibilem effluxum, quo a Deo species rerum acceperunt simul eum intelletiuali natura.
260
Cahier III
Unde Augustinus dicit quod coetera quae infra Angelos sunt, ita causantur, ut prius fiant in cognitione rationalis creaturae, et deinde in genere suo. 13-14/8. Voyage a Annecy. Boringe. Couché sous le toit de Taine?. La famille Saint-René-Taillandier. Excutsions 4 Thdnes et Albertville. Cfon]f[essé}] a Annecy. Renan extrémement
sale et crasseux e¢ /es ongles des
mains démesurément longs.
B[erthelot] me propose Hambourg. J’accepte. Départ d’Hostel le lundi 19 [aoft]. Emotion et tristesse. Belley. En auto jusqu’a Voiron par le lac d’Aiguebelette et S. Laurent du Pont. Grenoble. C[ommuni]é a l’église [15] S. André. Le vieux prétre lamentable avec les touffes de poils noirs qui lui poussaient ¢a et 1a sur la téte et le visage. La grosse jeune femme en mauve a genoux, les pieds ne touchant pas terre. En autobus jusqu’a Villard de Lans. Lugné-Poe et Suzanne Després*. En auto par les G[rands] Goulets jusqu’a Pont en Royans. Retour a Grenoble par la pluie. 22. Clichy et l’abbé Fontaine‘. Les B[erthelot]. Vendredi Ville-Evrard’. Le g[rand] canal. Les pécheurs Watteau. L’>homme maigre, guindé et pierrot, avec son litre vide et ses boulettes d’asticots; la grosse Parisienne. 23. Vu le Cardinal Amette qui approuve et bénit notre Union coopérative de priéres*. Rue Mazarine, ces 2 yeux de damnés pleins de luxure et d’une épouvantable tristesse derriére les photog[raphies] obscénes. Le soir J. de Vilmorin. 24. En auto avec les B[erthelot] et Cam[ille] Mallarmé. Senlis; puis Villers Cotterets; la Ferté Milon, Meaux. Mon parrain soigné a l’hdpital par une sceut de S. Joseph de Cluny. 25. St Louis’. Villeneuve.
[16] [28] aodt. St Augustin’, M[esse] 4 Fére 4 7 h. Memorare quae mea substantia numquid enim vane consti-
Aott-Septembre
1913
261
‘mista omnes filios hominum ?... Memor esto, Domine, opprobrit servorum tuorum (quod continui in sinu meo), multarum gentium. Quod exprobraverunt inimici tui, Domine, quod exprobraverunt commutationem Christi tui (Ps. LXX XVII). Plus veau que veau qui jamais a fini sur un lit de nouilles. Prés de Fére un gros petit vieux portant une faux sur l’épaule, comme le Temps des rébus, et tenant 4 la main un écriteau avec inscription : Chasse gardée. Chantilly. Ce qui m’a frappé, plus encore que le chateau mal restauré par un morne architecte de PInstitut ala facon d’un immeuble cossu, c’est sa situation. Il n’occupe pas le centre de la perspective; [17] il est placé de coté. Le sujet principal demeure les eaux en large miroir étalé au premier plan, la forét, le ciel. Le chateau se tient un peu de cété comme le résultat myStérieux et nécessaire de toute cette magie, seigneur? enchanté et latéral. L’ancien Condé insolemment avait relégué du cété de la ville les écuries et la chapelle. 30 et 31 aout. Pitt? nous chante de vieilles chansons. Le 31, ouverture de la chasse, pluie a siaux [s7c]. Visite aux Levoll-Chausson qui m’envoient leur auto. Les grandes plaines 4 blé du Soissonnais, et de tous cdtés
par dizaines les grosses meules en procession. Mercin dans la vallée. Feuillages bleus verts comme sur les vieilles estampes en couleur. 2 sept[embre]. Messe pour le repos de l’ame de papa. Départ. Paris, ’abbé F., M*. Arrivée a F[rancfor]t le 3 au matin. Vere scire, scire per causas (Bacon)§.
[18] Parole d’un ancien chartreux. La plus grande mortification 4 la Chartreuse est la mortification du vide. La on n’a que Dieu seul et peu d’hommes peuvent se contenter de Dieu.
262
Cahier III
C’est vrai, c’est une petite qualité, mais elle sert toujours plus qu’un grand défaut. Légéreté avec laquelle on pense aux peines du Purgatoire. Supposons qu’il nous faille seulement pendant 24 heures séjourner dans un endroit étroit, bralant et ténébreux. Le « Black-hole » de Calcutta.
Opération du panaris 4 mon pouce, on m/’enléve ’ongle!. A ce sujet observations curieuses confirmant mes théories sur la sensibilité. Quand on a injeété la novo-cocaine, la sensibilité disparait en envoyant une gréle de petits coups espacés jusqu’a l’extremité du pouce. Au moment ot la sensibilité n’est plus, mon pouce a disparu, c’est comme
s’il ne faisait [19] plus
partie de moi, m’était complétement extérieur. (De méme le corps tout entier aprés la mort quand il ne sera plus parcouru et animé par la vibration vitale.) Puis la vibration revient, on la distingue trés nettement a cause de ses coups espacés différents de la pulsation du sang. Dans les six heures suivantes de grande douleur, observation du sang comme un ouvrier intérieur armé d’un marteau et d’une truelle qui vient réparer la maison endommagée. Toujours le travail du dedans au dehors. Comme
c’est curieux, cet animal au
dedans de nous qui sait si bien tout ce quwil a 4 faire®. Inane et volumineux du redondant édredon?.
Hellerau du rg sept[embre] au 6 o@[obre] p[our] la représentation de la Verksindigung’. Eva Marstersteig trés mauvaise, dans Violaine, Dietrich trés bonne dans
Mara. Decarli et Ebert, bons. 2. mauvaise répétition générale. Bonne représentation®. Le Prince et la P[rinc]esse [20] Johann Georges de Saxe (BourbonCaserte), présents et trés aimables. Aussi |’? Ambassadeur. La vieille Comtesse Waldstein me dit que l’ Annonce eSt le dernier livre que son mari ait lu avant sa mort et que c’est pour cela qu’elle est venue. Aussi présents : Lobkowitz, c[omt]esse Orczych, Neipperg® et sa femme, etc. Public surpris et qui
Septembre-Oltobre 1913
263
n’applaudit pas, on me dit, ému. N[ous] rentrons le lendemain avec Reine. Conversation chez Branuplo avec d’Estournelle?. Je sens ce vieux banquier Juif profondément ému et remué par mes livres. D’Estournelle 4 qui je parle du mouvement religieux parmi la jeunesse intelle€tuelle a Pair plein de trouble, d’incertitude et de remords. —
A Hellerau longues conversations avec le Juif Paul Adler?, qui tient 4 m’accompagner 2 fois 4 la messe le dimanche. Jésus parmi les do¢teurs : [21] Audientem et interrogantem eos. — La maniére d’instruire pour lui est d’écouter, d’interroger, de provoquer nos réponses. Du moins c’est ainsi qu’il enseigne les doéteurs, en faisant sortir d’eux ce qu’ils savent. Benedicite, aquae omnes quae super coelos sunt, Domino ; benedicite, omnes virtutes Domini, Domino (Daniel, Clanti]Jque des 3 Enf[ants])*.
12 o€t{obre]. Promenade pluie battante. Montabaur. Les appareils
sensoriels
en auto 4 Ems par une ne constituent
pas la sen-
sibilité; mais ils lui fournissent les moyens de se faire connaitre 4 nous. Amiftus lumine sicut veStimento. Amictus dolore sicut vestimento'.
Mardi 14 o@[obre]. Je pars pour Hambourg 4 9 h. 48 du matin. J’arrive le soir. Je suis attendu a la gare par Gaillard, Tournis et Pingaud®. A. Léger’. Causerie sous le tunnel de lElbe. Impression affreuse de la vieille ville. Les hauts clochers pointus protestants, glauques comme des aiguilles de glace, pareils 4 des sémaphotes faits pour signaler la [22] terre de loin’. L’ Alster et ses cygnes. Je choisis une maison Alsterufer 8 : 2 étages et un jardin. Ma propriétaire est une aimable vieille dame boiteuse, Madame Caulier. L’église de Sainte Marie si triste au milieu de cette cour d’école. CLAUDEL
V - 12
12
264
Cahier II
Le 19 et le 20 [o€tobre]. Voyage a Hellerau, ot Dietrich joue Violaine, simple et naturelle’, Mad. Feldh.? joue Mara, assez grossiérement. Le public impressionné, parait-il.
En France les attaques contre moi commencent a se multiplier. Il fallait s’y attendre®. (Le vieillard) boire seul un vin profond, un de ces silencieux Bourgognes qui ont plus de truffe que dardeurs; Dans le transport de l'amour humain, qui ne sait qu’on se mange, qu’on se dévore, qu’on voudrait s’incorporer en toutes maniéres, et, comme disait un poéte,
enlever jusqu’avec les dents ce [23] qu’on aime, pour le posséder, pour s’en nourrir, pour s’y unir, pour en vivre? Ce qui est fureur, ce qui est impuissance dans amour
corporel, est vérité, est sagesse dans amour
de Jésus (Bossuet, Méd|[ztations] sur 1’Evangile, la Céne, 24° jour). Une fois qu’on a gotité Dieu, il nous attire avec une puissance infinie. Vous diriez qu’il nous tire la moelle des os et le sang des veines (Tauler)®. .
.
.
ae,
2
.
.
Tourne ton regard vers ton adorable Bien-Aimé et considére-le avec tendresse. Rien n’est meilleur, plus
agréable, plus délicieux, ni plus indiciblement doux que de l’aimer (Henri Suso)*, Ainsi aprés ces longues m’apparais le plus fort.
années, de nouveau
tu
Un vieux petit oiseau. La poésie voudrait chanter, mais ne dirait-on pas aussi parfois de la musique qu’elle essaye désespérément de parler’?
[24] Nunc tantum sinus et Statio male fida carinis®. Rade a présent quelconque et mouillage mal sir.
Oltobre-Novembre
1913
265
Le comte Ernaut dit 4 Raoul de Cambrai : Je sens que je ne t’aimerai que le jjour ou je taurai tué. Le chevalier mourant qu’on communie avec 3 brins dWherbe. Guillaume-au-court-nez donne la communion a Penfant Vivien?.
Si je t’ai choisi, c’est 4 cause des souffrances que je savais que tu devais me causer. Cet effroyable hiatus un instant sur la croix entre Phumanité et la divinité de N.-S. Cette nuit révé que j’ai pris un fiacre que je quitte sans le régler? en lui disant d’attendre; qu’est-ce que aural a payer quand le cocher me repincera, la nuit prochaine ?
La
derniére
chose
qu’ait faite ma
sceur,
est une
couverture en morceaux de soie de ses vieilles robes pour ma petite fille. Je regarde ces larges fleurs éclatantes et toutes diverses, écloses sous les doigts d’une folle.
[25] Dieu qui frappe ses ennemis par derriére « znimicos suos in posteriora »*,
Israel salvatus est in Domino salute aeterna (Is., XLV) Vere tu es Deus absconditus (et plus loin) non in abscondito locutus sum (id., ibid.). Nescierunt qui levant lignum sculpturae suae et rogant Deum non salvantem (id., ibid.).
In memetipso juravi, egredietur de ore meo justitiae verbum et non revertetur (id., ibid. )*. Mittit crystallum suam sicut buccellas, (n{ous] n’avons en cette vie le ciel limpide que comme pat bouchées); ante faciem frigoris ejus quis sustinebit ? — le froid qui
266
Cahier III
résulte de l’absence du soleil éternel, la rigidité dun ceeur pétrifié). Emmittet verbum suum et liquefaciet ea ; flabit spiritus ejus et fluent aquae (Ps. CXLVII). La personnalité humaine
ne sera jamais anéantie;
elle a la promesse de l’éternité, mais elle peut étre comblée, envahie, [26] submergée, de méme qu’un morceau de crystal est comblé, envahi, submergé par la lumiére. I] disparait, mais il ne cesse pas d’exister; sa
gloire et sa pureté sont de disparaitre, de se perdre et de laisser. passer, sans obstacle, la pure et gloricuse lumiére. — Toute sa transparence ne lanéantira pas, il
est livré 4 la lumiére qui le pénétre sans le détruire, sans le briser; or il faut qu’il soit entiérement livré pour étre fidéle 4 sa mission; s’il refusait quelque chose 4 la
lumiére, il voudrait donc porter ombre lui-méme et s’imaginerait ajouter a son existence propre par cet amour de l’ombre qui serait l’amour isolé de sa propre personnalité. Pour porter ombre, il le faudrait enfumé, empoussiéré, obscurci, et, aimant sa fumée, sa pous-
siére, son obscurcissement, il croirait jouir de porter ombre au soleil. Ainsi lame obscurcie et aveuglée croit jouir de ce qu’elle refuse 4 Dieu. Les Ames sont comme le cristal : leur vraie mission et leur vraie joie, c’est la
transparence a la lumiére qui est amour Luce de Luxe, ap. Bremond)?
(/’Abbesse
[27] Ut quid destruxifti maceriam ejus, et vindemiant eum omnes qui praetergrediuntur viam (Les juifs sortis du ghetto). C[ommuni]é le 2/12 pendant que le P. Barge* en Belgique disait la messe 4 mes intentions. Il m’a semblé que Dieu prenait solennellement séance dans mon cceur, me rappelait ses bienfaits passés, m’indiquait® ma vocation qui est de le faire connaitre et pour cela m’invitait 4 une connaissance plus intime et plus profonde de lui-méme. — A S[ainte]-Marie — Hier je rencontre Pabbé W. 4 la porte, juste au moment ot je partais, n’espérant plus me c[on]ffesser].
Novembre-Décembre
1913
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Discours de lambassadeur des E[tats]-U[nis] a la chambre de Commerce qui rappelle qu’au Moyen-Age quand toute lAllemagne était ensevelie dans les ténébres de lidéalisme, il n’y avait que quelques villes comme Hambourg pour tenir allumée la lampe sacrée du commerce}. Comme un homme qui pour toujours a perdu son équilibre sur lui-méme?. [28] Ecclesia et, plebs adunata sacerdoti®. Il est d’autres arbres, d’autres eaux...
Cause formelle intrinséque : qua res fit. — — extrinséque : ad cujus imitationem res
Jit. Ps, XLIX
Sz esuriero, non dicam tibi...
Peccatori dixit Deus: quare tu enarras justitias meas et assumis teStamentum meum per os tuum ? (de quoi te mélestu? qui t’autorise a parler a ma place? Toi qui hais la discipline, toi qui tournes le dos 4 mes discours.) — Si videbas furem currebas (tu faisais ’empressé) cum eo, et cum adulteris portionem tuam ponebas. Os tuum abundabat (débordait) malitia et lingua tua concinnabat dolos. Sedens adversus fratrem tuum loquebaris (tu prenais ton temps, tu te faisais juge, tu instituais un jugement) ef adversus filium matris tuae ponebas scandalum... Et tacui. Et tu as pensé, gredin, que j’étais semblable a toi? bien! je vais te faire un proces. Je constifuerai contre toit. [29] Petrae, sicut cera liquescent ante faciem tuam (Cant. Judith, 16-18)°. : ' La béatitude toujours accompagneée de liquéfaétion. V[eu]ve Bilco, 1 place des Perchamps, 16¢°.
Les vieilles maisons de Hambourg comme les poupes de gros bateaux serrés les uns contre les autres.
268
Cahier III
La difficulté qu’on a aujourd’hui, dés que la religion disparait, 4 maintenir la notion d’un Dieu personnel prouve le miracle qu’a constitué pendant des siécles la foi du peuple Juif. Le probléme du vide : il ne peut y avoir de plus ou de moins dans l’espace, mais il peut y en avoir dans le mouvement.
La science parait indiquer que certaines parcelles de matiére qui nfous] ont appartenu sont a jamais différenciées et ne peuvent plus rentrer dans la circulation. Noél. Premiére neige de année. Atroces calomnies contre nous 4 propos de l’internement de Camille 4 Ville-Evrard de Lelm et des Thierry! dans /’Avenir de I’Aisne et diverses feuilles de [30] chantage, dénoncant un « crime clérical». C'est bien. J’ai recu tant de louanges injustes que les calomnies sont bonnes et rafraichissantes; c’est le lot normal
d’un chrétien.
Les derniéres théories sur la géologie indiquent que la terre dans sa masse plus dure et plus compacte que Pacier serait composée intéricurement d’un noyau métallique (fer) et d’une écorce de pierre, avec ¢a et 1a diverses poches fluides. L’existence du radium compense et au-dela le refroidissement du globe. Le mot doit faire naitre Pidée, Pidée doit peindre le fait : ce sont trois empreintes d’un méme cachet, et
comme ce sont les mots qui conservent les idées et les transmettent, il en résulte qu’on ne peut perfe€tionner le langage sans perfectionner la science ni la science sans le langage (Lavoisier, Préface du Traité de Chimie)?. [31] Les localisations cérébrales
Depuis longtemps on a attribué aux différentes régions ou zones du cerveau des fonctions bien déterminées, Cependant le physiologiste allemand Goltz en
Décembre 1913
269
1889 et un savant russe, le professeur Zeliony, tout récemment, ont pu détruire graduellement la plus grande partie du cerveau d’un certain nombre de chiens, lesquels ont survécu a l’état végétatif pendant un an et plus, exaétement quinze mois et trois semaines,
sans présenter les symptémes graves auxquels on s’attendait d’aprés les docteurs classiques. Le doéteur R. Robinson a observé avec Zambaco pacha,
qui vient
de s’éteindre,
un
cas
curieux
qui
semble confirmer chez homme ce que les physiologistes ont constaté par la viviseétion. Dans une note présentée cet aprés-midi a l’Académie des sciences par M. Edmond Perrier, direéteur du Muséum
d’histoire naturelle, le doéteur R. Robinson
fapporte qu’un homme de soixante-deux ans, 4 la suite ‘une légére blessure a la région occipitale, présenta quelque troubles visuels qui attirérent |’attention. L’examen des yeux montra 4 gauche un peu de Stase; au bout de quelques mois, la parole devint un peu confuse, mais le malade ne présenta par ailleurs aucun signe alarmant, ni paralysie, ni convulsions. L’audition, l’odorat, le sens tactile, le gotit n’étaient
pas troublés. On a attribué l’état intelle@tuel un peu précaire du malade 4 la sénilité. Au bout d’un an, une attaque épileptiforme, la premiére et la derniére, emporta le malade. Le docteur R. Robinson fit ’autopsie en présence de plusieurs médecins. Le cerveau était constitué par une mince coque,
laquelle, incisée, donna
issue 4 une
énorme
quantité de matiére purulente. Tout le cerveau, excepté Vécorce, était en bouillie et formait un abcés colossal.
Comment cette grande destruction cérébrale n’avaitelle pas donné lieu 4 des symptémes graves et caractéristiques ?M. Van Gehuchten,
|’éminent neurologiste
belge, a publié cette année méme deux cas de graves lésions
du
cerveau,
sans
détermination
de
signes
spéciaux. Naguére, le professeur Pierre Marie avait montré qu’il n’y avait pas une localisation des lésions dans l’aphasie, 4 la troisiéme circonvolution frontale gauche, centre déterminé par Broca. De tous ces faits le dof&eur Robinson conclut que la
270
Cahier III
doétrine des localisations doit étre revisée. I] peut se produire dans les parties non touchées du cerveau des compensations dont nous ignorons la nature et la modalité. M. Edmond Perrier a fait remarquer qu’une simple égratignure du cuir chevelu peut donner naissance a un abcés considérable du cerveau. On a vu également des abcés du rein a la suite d’une égratignure survenue 4 la plante des pieds. I] faut donc faire attention aux petites blessures, notamment 4 celles de la téte. Voila les savants?! [32] Avoir conscience conscience de soi.
de
Dieu
comme
on
a
Il est bon de se coucher du monde en Dieu pour se lever en Lui (S. Ignace d’ Antioche)?.
1914
ref janvier. Froid et beau temps. Réveil par la musique militaire. L’ Alster gelé. Hier soirée avec le ‘personnel du Consulat et les Skinner. 2 [janvier]. L’abbé Fontaine m’écrit que Jacques Riviére s’est confessé la veille de Noél'. Robert V. Institut St-Paul 4 Melle-lez-Tournai?. Une grande forét de cannes
4 miel.
Les demoiselles et les vieux monsieurs qui suivent leur banniére avec une conviction de primitifs.
33] Départ pour Paris le 8 janvier. Répétitions de /’Echange. Scénes avec Kalff. Répétition générale le 22. rre len23
Ch. Dullin J. Copeau Marthe Lechy Elbernon
Louis Laine Thomas Pollock Nageoire Kalft Marion
Succés autant qu’il me semble. A la 17€ on m’appelle sur la scéne aprés le 3° acte. Départ le 24 [janvier] a 1 h. 45. Retard du train. Nuit a Cologne a l’hétel de VEwige Lampe. La cathédrale, diverses églises peinturlurées. Le Rhin qui charrie des glacons (tous ronds et entourés d’une espéce de bourrelet). A travers la Westphalie. Dilmen’.
272
Cahier II
Billot. Cep. Fourche patibulaire. Cornempot. Mortdefroid, marbrier?. Samedi 17 janv{ier] a Paris. J’étais a la messe de 8 h. 4 N[otre]-D[ame] et le curé ne venait pas. Je le vois qui arrive et qui attend. Vient une bande de gens et au milieu un homme de trés haute taille, barbe grise, nez
en bec d’aigle, marchant péniblement soutenu sur 2 béquilles. Il s’asseoit [34] et on le communie. Puis on le remporte sur une civiére. C’était Paul Dérouléde qui avait voulu faire cet acte religieux avant de partir pour Nice, ot il est mort le 29. Sa sceur communte a cété de lui. G’a été une chose belle et touchante. R[equiescar] i[n] place]?. Ne post perditum mundum perdere contingat et coelum. Voir les amis vieillir.
On n’est pas sur une cime parce qu’on habite au 5° étage: Se parjurer sur le conseil de son avocat comme on se
purge sur l’avis de son médecin‘. Ces grands Juifs de la tribu d’Issachar (ane du testament d’Israél)®.
Quand je souffre, ce n’est pas Vintelligence qui souffre, c’est Phomme-intelligent. Et quand N.-S. souffre,
ce
n’est
pas
la divinité
qui souftte,
c’est
Phomme-dieu. Et de méme que intelligence en s’attachant a la souffrance nous permet de souffrir davantage, la divinité 4 son tour en s’attachant 4 la souffrance [35] lui confére un caractére d’infinité. 5 février. Nouvelle
de la mort
de Wolf
Télégramme de Salzmann : « Wolf décédé accident montagne horrible malheur®. » Le méme jour Henri fait ses premiers pas.
Dohrn.
suite
Janvier-Février 1914
273
6 février. Représentation de /’Annonce en tchéque au Narodin Divadlo de Prague, avec succés, parait-il.
Des lettres de Marten et de Braunerova
disant que
Poeuvre est passionnément discutée en tant que catho-
lique?.
La Grace. — En cassant des cailloux, on peut mériter 5 francs, 10 f., 100 f...., 1000 f., mais on ne peut pas
mériter d’étre Roi de France. De méme les bonnes ceuvres, en justice, ne peuvent pas mériter la possession de Dieu; mais elles peuvent provoquer l’Amour. Non pas dans Vordre de la Justice, mais dans celui de VAmour?.
[36] Soirée au Hansa Theater et au Trocadero. Au ' Hansa les projeéteurs pour les annonces, faisceau de rayons colorés qui interrompus par l’écran reproduisent les lettres et les dessins, comme les cartons du
canut. Au T[rocadero] femmes qui dansent. Vers la fin invasion de ménagéres allemandes en costumes ridicules. Au milieu d’elles ce grand danseur femelle, pareil a la Mort des gravures, la téte surmontée d’un toquet d’ot. pend une plume noire. Autour d’une’ vieille demoiselle a la téte chargée de grosses plumes de joyeux bourgeois, l’un chauve comme une pomme, boivent du vin rouge. Le loyal pochard au faux-col abimé qui léve d’une main vacillante un verre d’ot tombent des larmes de vin rouge. Chez le bourgmestre une vieille demoiselle verse d’abord de |’eau dans son vin rouge, puis le tout dans
le champagne. 10-12 [février]. Voyage a Hellerau pour le « tranerfeier » de Dohrn. II s’est tué en Suisse prés de Triente ou il se trouvait en compagnie de la D.*. Sur un chemin de descente rapide se trouvaient deux pierres. II glissa sur l’une et se cassa la téte sur l’autre. On I’a incinéré 4 Lausanne, cérémonie horrible, me dit Tatiana qui y
assistait*. [38] On glisse le cercueil sur des rails vers le trou flamboyant, le bois flambe, on sent l’odeur de la
274
Cahier III
chair! qui grille. A H[ellerau] catafalque sur lequel je fais mettre une croix, chants, discours idiots. Arrivée
le soir de la mére Dohrn toute tremblante et presque mourante. Je cause une demi-heure avec elle. La femme de WJ[olf] enceinte. Tout ce monde a vaueau comme des barques emportées en pivotant sur un courant irrésistible. Voila ces créateurs d’une nouvelle religion et d’une nouvelle humanité. Braves gens d’ailleurs. Fin d’Hellerau pour moi et de ce cycle d’une année.
Martyrologe Romain du 25 jour de décembre : « L’an depuis la création du monde quand Dieu au commencement
créa le ciel et la terre, 5299; depuis le
déluge, 2957; depuis la naissance d’Abraham, 2015; depuis Moise, 1520; la 65® semaine suivant le prophéte Daniel; la 42° année de l’Empire d’OGave Auguste, au Sixiéme Age du Monde, Jésus-Christ, Dieu éternel et Fils du Pére Eternel, nait 4 Bethléem de Juda, fait homme et [39] de la glorieuse Vierge Marie. » Ayant dfemand]é par ordre d’obéissance ce qu'il fallait penser de ces données, la vén[érable] Marie d’Agreda obtint d’En Haut la confirmation de ces dates’. Dans le dialogue de S. Hildegarde? il est écrit : « Mon Fils est venu au Monde quand le jour de la durée des Temps se trouvait au moment correspondant au temps qui s’écoule depuis ’heure de None jusqu’a Vheure de vépres. Mon Fils a paru dans le monde aprés les cinq premiers ages et lorsque déja le monde était
déja presque sur son déclin. » — D[o]m|ine] g[uo|niam advesperascit.
Cf. Mane nobiscum,
J'ai connu autrefois au [collége] de Vassy un grand collégien roussaud et louchard dont l’ambition était d’étre huissier; je peux donc dire que jai connu un huissier a l’état d’innocence. Sceur Marie de la Croix en 1886:
Notre génération marche au devant de I’Antéchrist dont elle doit faire la rencontre®.
Février 1914
275
[40] Un épais nuage d’encens ot l’on finit par distinguer un prétre en vétements d’or et de lin qui tend le bras vers un objet mystérieux?,
Tant d’églises bralantes, comme des méres en larmes qui supplient sans remuer les lévres?. Cantabiles mihi erant juStificationes tuae, in loco peregrinationis meae®, Tu autem in nobis es, Domine, et nomen santlum tuum
invocatum est super nos (Jét., XIV, 9)4. rer M. Dieu créateur. I] aurait pu étre seul. Tout est créé par un atte de générosité et de complaisance , gratuite.
2@ M. Souffrances du Christ qui lui sont présentes d’avance pendant t[out] le cours de sa vie. La jeunesse, puis la passion, l’ombre de la mort. Cette passion aussi chez le Christ, il ne peut plus continuer 4 n’étre que Dieu.
Toutes
les souffrances
ceptées mais créées pour lui’.
librement, non pas ac-
[41] Feng shui®. I continued : —« When there was first talk of railways being made you remember how people said the fengshui of every place would be ruined. ‘There were sacred spirits who would be disturbed, dragons whose wrath would bring disaster; fairies of good influence who could desert the place and leave it bereft of all good and happiness. When you lived at home and heard such talk, what did you think of it ? » He seemed to think carefully before answering, as if to delve after his true thought and recollettion in this matter, to give me a just answer. Then he said: — « When we were young at home our old teacher used to explain to usa bout fengshui. Iknow people talk about fairies and the rest of it, and some many believe and some not in all these creatures and spirits ; but you are miftaken to make fun when people talk of fengshui. It has a great deal of good meaning. The teacher used to say that the place where we were born and lived was guarded and protetted by heaven from all
276
Cahier III
ill; and by the works of the good men who were there before us it had been made safe and provided with all that a place needed to make it good to live in. It was often flooded, but Still it was our home and we were brought up to think it good. Now the meaning of this fengshui is this, that no place is so poor or small but that if the people there live well and keep the rules of live; dead justly with each other, and preserve reverently what has been handed down to them ; then surely in one generation or another there will grow there, assurely and naturally as trees or flowers, some great scholar or judge whose renown and honour will proclaim to the world the virtue of his native place. This has been again and again proved in our history ; some of the greatest and best men of our country in all times have been born and spent their young days in little places such asl come from. Why is that? Simply because one great man ts the fruit of a tree of generations ; the tree must grow undisturbed, and spread its branches in peace. All the good things that we were taught to preserve and hand on to our children grew in that way; we were poor, but we had our family relationships, and that meant companionship in enjoyment and mutual help in trouble ; we had our village festivals, and these we kept and enjoyed in the old way as we had been taught ; the land was cultivated with the same care as of old;
and for the rest we had our share in the fair weather and the vtorm, the sunshine and the rain that came to us in the course of
nature. That was all we had of our life ; ifyou changed these things, you destroyed us, and made us Strangers in our country. « The law of Compensations. — You know yourself that the new ways and the old do not Stand together;so that whatever the new may bring of convenience or knowledge or wealth, it takes away, perhaps not all at once, but very surely, all that bound the people and the place together. Once the change begins nothing can restore the old system — it is gone for ever, and the men that come after can never be the same as those who sprang up and grew in the old atmosphere. The source ofgreat souls is dried up ; the tree that bore the fruit of quiet thought and calm reason, that might have yielded its share of great and noble men to guide the people, is bent low, or its branches seared, or its roots poisoned. The whole life of that place must wither, even though its men and habitations multiply in number and richness : the fengshui of the place is ruined, »
=
Février-Mars 1914
277
[42] Le Four Crématoire ne laisse de P>homme qu’une poignée de cendres et tous ses boutons de culotte?. L’aumOne
délivre de la mort et c’est elle qui efface
les péchés (Tobie, XII, 9).
Elisabeth de Hongrtie, Elisabeth de Portugal’. Funiculus triplex difficile rumpitur®. Pendant
longtemps,
environ
pendant 4 siécles, il
n’y eut Wéglises que dans les centres populeux — donc pas d’églises rurales. Les rares chrétiens des campagnes... Introdudtion de la messe basse : vrir® siécle. Les colleétes sont composées de 4 membres paralléles a peu prés égaux, et rythmés, grace a la combinaison de syllabes accentuées et de syllabes atones (Laboureau)!. I
.
L’éclair du poisson dans le filet® et celui de la piece d’argent qu’on donne 4 la quéte. >
?
P
py
A
P
La chaleur d’un corps de femme 4 travers l’étoffe. [43] Nous n’avons la conscience de la forme de notre corps que par le contact. Conscience totale par une espéce de moulage’®. Un homme dont toute la Bourse.
le sourire
Le soleil comme
un exécuteur.
suffit 4 faire monter
Vouloir c’est causer, et le moi est la premiére cause qui nous est donnée (Maine de Biran)’. Le réparateur harpiste.
de fils télégraphiques
comme
un
Femme petite et caillette*. Qui me regarde d’un ceil
278
Cahier III
brun du milieu d’autruche.
de ses pelleteries et de ses plumes
Il tient 4 la main un petit bouquet comme cételette froide enveloppée dans du papier.
une
Le cou du cygne comme un bras musculeux.
Comme un petit roquet sur la voiture d’un blanchisseur aboyant aux 4 coins de la plateforme. C’est Léon Werth}. [44] Voyage 4 Berlin. 14-15/3. — Confort dégottant et malsain de ces hétels modernes. — Lits de plumes.
Idées de dessins pour la « Corona »?. Clair ardant — la pourpre quadragésimale. Au lever du jour deux matelots dans leurs lourds vétements ruisselant d’eau et de soleil attirant sur la plage une longue épave, reste de leur navire naufragé. — Tu es poussiére et tu retourneras en poussiére. — Qui croit en moi des fleuves d’eau vive jailliront dans son sein pour une vie éternelle (S. Jean, VII, 38). On ajoute a l’eau bénite le sel, comme p[our] composer un sérum conservateur, stimulateur, préservant a la fois de l’atonie et de la corruption, donnant 4 notre
vie la saveur q[ui] permettra au prochain de s’y [45] recréer et 4 Dieu de s’y complaire, 'unissant 4 celle de nos fréres par ce signe d’hospitalité que fut autrefois le sel. Quand v[ous] entrez dans un église et que v[ous] v[ous] offrez mutuellement de l’eau bénite, vfous] renouvelez le geste antique q[ui] faisait offrir le pain et le sel 4 ses hétes (Sertillanges), Vinum a vi diffum (Vatron)4,
[46] Asperger un défunt, tafraichissement et la clarté.
c’est lui souhaiter
le
Mars- Avril 1914
279
Ubi est Deus qui fecit me, qui dedit carmina in notte ?
(Job)*.
Exechiel accipit librum in quo scriptae erant lamentationes, carmen
et vae?.
Quis enarrabit coelorum rationem et concentum coeli quis
dormire faciet (Job)%. Sublatis verbis, quasi quidam sonus aeternae praedicationis fit ipsa imago internae visionis (S. Gr.)4. L’autruche qui a des ailes dont elle ne peut se servir est Pembléme de l’hypocrisie®.
Le pécheur comme dans un puits dont l’orifice est trop étroit. Et urgebit super me puteus os suum’. rf avril. Conférence de S[ylvain] Pitt’?: Vieilles chansons paysannes Frangaises, ot: assistait 1)Ambassadeur de France a Berlin, M. Cambon. Ch. A. Cingria® accompagnait [47] sur une vieille épinette italienne. Le lendemain Blankenese® avec les enfants. Vendredi, Hagenbeck", les singes, le vieux singe a perruque, I’étang des animaux fossiles en ciment. Samedi, Liibeck, le Memling de la cathédrale, le vin blanc du Rathskeller!!. Dimanche, Liineburg, l’archite€ture 4 cordages, la petite Annonciation du Dome.
Pitt et Cingria partent le 6. — Les 2 pingouins collerettes safran chez Hagenbeck.
a
Les toits glauques de l’église Sainte Marie s[ur] lesquels on s’attendrait 4 voir marcher un ours blanc.
L’hospice des vieillards, chacun logé comme Japin dans une caisse en planches.
un
Sicut aqua effusus sum (1s.)¥.
Et in occulto locutus sum nihil. Quid me interrogas ?
280
Cahier III
Interroga eos qui audierunt quid locutus sum ipsis: ecce hi sciunt quae dixerim Ego. (L’Eglise, totalité et intégralité de son enseignement.) 15 avril; Hét[el] Esplanade.
[48] Longue prudence des Juifs. Une vieille Juive recommande toujours dans une maison de faire attention 4 bien traiter les enfants. Car dans 10 ou 15 ans ils seront grands et se souviennent. S. et son frére, 2 terribles requins d’affaires, ont
composé ensemble un recueil de romances, paroles et musique, qui s’appelle les « Lieds du cceur » et qu’ils veulent faire relier dans des bijoux d’or vrai. Rtre séparé de sa surface. L’automobile a toutes les odeurs de la terre ajoute la masse et la vitesse. Elles se jettent sur vous 4 la force de 60 a Vheure.
L’automobile permet les vues d’ensemble et l’intelligence géographique?. Le jeune paon avec un spasme convulsif qui croit faire voir sa roue et ne montre que son derriére.
Les étranges oiseaux-poissons (pingouins) d’Hagenbeck avec leurs ailes-nageoires. [49] L’Arétin distingue parmi les vins, le clair léger, le charnu gentil et le rondelet piquant. L’ours blanc avec le balancement continuel de sa téte au bout de son long cou’, — Tristesse de tous les animaux, méme les singes. Impression de déchéance.
— Simplicité de la création dans ses grandes lignes. Tous tiennent dans 7 ou 8 pavillons. L’Arche de Noé aurait pu largement charger tout ce jardin de Hagenbeck4.
Abril 1914
281
Principal progrés depuis mon retour en Europe : de nouveau I’assistance quotidienne a la messe. Brunot : la triple prononciation de I’s dans sous : tous les hommes, je les connais tous, tous eux —
six,
six ceufs, ces six — existait autrefois pour tous les pluriels. — La prononciation ova de oi est une prononciation faubourienne q[ui] a prévalu pendant la Révolution?. Coupe normale OSes
NS
des vers de Racine:
¥ —
vy —
at
Napoleon a coté de Pie VII fait figure d’un enfant rageur. [50] Le vieux chéne au printemps, l’immortalité de nouveau le revét comme
une lumiére verte.
Charité de Dieu, ’hostie ‘dans la bouche des communiants comme une piéce d’argent.
Une vie comme du fumier, une quantité de vaine paille reliée par de Pordure. Un regard court comme une piqitre. De vieilles comparaisons qui prennent leur sens : Pherbe ce matin sous la rosée comme trempée de larmes. L’haleine du petit enfant premiers coucous.
telle que Vodeur
des
Une voiture de marchand arrétée sur la route — la couverture jetée sur le cheval — un bois d’arbres en fleurs — un ciel couvert d’avril — les enfants qui jouent sur le talus — toutes ces eaux stagnantes couvettes de pétales blancs — les bateaux avec leurs mats réfugiés dans ces eaux tortueuses — le roman de ca. Lihe.
282
Cahier IIT
3 transatlantiques l’un derriére l’autre qui descendent vers la mer. [51] Une barque hommes qui traverse l’Elbe.
ramant avec violence
Le printemps?. Une grande riviére trouble.
Vieilles. paysannes aux faces sévéres. Ps. CIIl. — Ex+tendens coelum sicut pellem; qui tegis aquis superiora 67us. Terminum posuisti quem non transgredientur; neque convertentur operire terram. Oui emittis fontes in convallibus; inter medium montium pertransibunt aquae. Expetabunt onagri in siti sua. Super ea volucres coeli habitabunt... Hoc mare magnum...*.
Aristote définit Pintelligence : ce par quoi nous pouvons devenir toutes choses (De Axima, L. III, leg. 10). Un sourire qui descend des yeux et un qui monte de la bouche. Ce n’est pas lintelligence qui est immortelle, C'est ame intelligente et par 1a accessible 4 Dieu. L’intelligence n’est qu’une des facultés de l’4me.
(Les Anges) — Facientes operationem in aquis multis. — Ipsi viderunt opera Domini et mirabilia ejus in profundo
(Ps. CVI).
[52] 29/4. Encore Lihe avec ma femme. L’auberge au bord de l’Elbe, toute retentissante de cuivres, du
roulement des jeux de quille et de ce ténor qui chante a pleine poitrine. Retour. On danse sur le bateau. 2 femmes ensemble chargées de chapeaux noirs [....]4. Robes rouges. Le pavillon de cuivre® d’un tuba au
|
Abril-Mai 1914
283
milieu sur le bleu de la mer. Le marin 4 figure plate qui avait lair d’avoir été martelé et travaillé 4 coups de poing. — Le cerisier tout frais éclos. — Le poirier absolument fourré de fleurs. Ot a-t-il pris dans un tel azur toute cette neige? Tenebrosa aqua in nubibus aeris (Ps. XVII).
Et apparuerunt fontes aquarum, et revelata sunt fundamenta orbis terrarum (a°). Et assumpsit me de aquis multis (A°). Quoniam in te eripiar a tentatione et in Deo meo transgrediar murum (d°)}, ConscidisSti saccum (Psm xeoxd xe
3/5. Promenade
meum
au
et circumdedisti
me
laetitia
cimetiére d’Ohlsdorf.
Allées
d’arbres noirs. Pas de croix. Sur une tombe un chien un fusil, un chapeau et une carnassiére en bronze.
rd
[53] Nous étoufferons le catholicisme dans la boue, disait M. Quinet, béte d’encre qu’on enfouissait hier. Si vous ne tuez pas, il n’y a rien de fait! Le catholicisme est né dans la boue, il n’y meurt pas. Jetez a l’égout le corps du chrétien, infligez ce martyre a ce cadavre; la priére le suivra, de ’égout elle fera une catacombe, une terre
ot germera le froment du Christ. Sans doute la béte d’encre est bien forte et son suintement
est mortel;
mais corrompre la priére et dissoudre les vertus des sacrements, ce prodige dépasse les puissances de votre chimie. « Versez
le sang,
ouvrez
la boue, faites des lois,
lachez des soldats, décrétez que le bien est le mal et que le mal est le bien; vous étes mortels et le christianisme
ne lest pas. Contre tout ce que vous saurez faire, les chrétiens ont l’obstination divine, ils vous résisteront,
ils vous useront. Ils vous enterreront. Ils enterreront vos grands politiques, vos grands savants, vos grands
284
Cahier IIT
guerriers, vos grands livres. Vous pouvez les écraser des ruines du monde,
ils s’obstineront
4 vivre, ils
surgiront des décombres, et tout cet entassement ne sera que votre tombeau. La terre dévastée leur fournira toujours assez de bois pour y planter une croix. Malgré vous, vous aurez l’honneur et vous subitez l’affront de
porter |’étendard du vivant. «Il y a longtemps que Dieu dit 4 Moise fugitif : Retourne, ceux qui voulaient t’éter la vie sont tous morts. Et Moise prit sa femme et ses fils, les mit sur un Ane et-retourna en Egypte, portant 4 sa main la verge de Dieu.» L. Veuillot?. Nemo repente fit summus*. Ego autem in multitudine misericordiae tuae (Ps. V, 8). Le Ciel fourmillant d’étoiles avec ses distances incommensurables’.
Idée ce matin. Rien n’est en vain, tout a un sens
spirituel. Donc le mouvement du monde et des astres n’a pas non plus une explication purement physique, mais comme une phrase et comme de la musique : nombre, proportion.
[54] Tout le mouvement du monde avec autant de soin qu’un virtuose appliqué a un passage difficile. Vox Domini super aquas; Deus majeStatis intonuit, Dominus super aquas multas (Ps. XXVIII). Le vin et l’eau : la vie et l’éternité.
Non pas des pleurs, mais du sang comme quelqu’un qui éclate en larmes! Théme®, Comment puis-je t’aimer, qui passes entre mes bras? Mémes termes pour le physique et le moral : se tendre, se relacher, saisir, embrasser, progresser, etc.
Mai 1914
285
C’est le corps qui rend l’4me visible comme siére fait d’un rayon de soleil.
la pous-
Quand l’automne est annoncé par les choux. La pluie qui commence sur l’étang. Sénecgon — rue — potentille — renoncule scélérate. Les voix de la Passion — Hurlements de la foule —
Murmures — Injures — Discussions! — Moqueries — Appels — Cheeur des saintes femmes — Jésus parle.
La Vierge —
Un gros Allemand le cigare a la bouche, avec un bouquet de fleurs dans un [55] papier de soie attaché? _ sur le ventre. Et posuit pedem suum
dextrum
super mare, sinistrum
autem super terram (Apoc., X, 2). Et Stetit supra arenam maris (Apoc., XII). Et vidi tanquam mare vitreum mistum igne (Ap., XV). Et secundus Angelus effudit phialam suam in mare, et fattus est sanguis tanquam mortui, et omnis anima vivens mortua est in mari (XVI, 3). Aquae, quas vidisti ubi meretrix sedet, populi sunt, et gentes et linguae (Ap., XVII, 16). Vocem aquarum multarum : alleluia (Ap., XTX). Et ostendit mibi fluvinm aquae vitae, splendidum tanquam cryStallum procedentem de sede Dei et Agni (XXII, 1). In medio plateae ejus et ex utraque parte fluminis lignum vitae, afferens fructus duodecim, per menses singulos reddens fruttum suum, et folia ligni ad santtatem gentinum (XXII, 2)%.
Adulteri, nescitis quia amicitia hujus mundi inimica est
Dei ? (Jacq., IV, 4)*.
[56] Il faut étre de son temps. Ouicumque ergo voluerit amicus esse saeculi hujus, inimicus Dei constituitur. An putatis quia inaniter Scriptura dicat: Ad invidiam concupiscit Spiritus qui habitat in vobis (id.)*. D’une main soigneusement enveloppée d’un mouchoir il saisit son nez comme un objet chaud®.
286
Cahier III
[58] Chaque éle€tion ouvre une vue d’ensemble sur la bétise et la méchanceté des Frangais : spectacle accablant! Sans gloire, sans honneur puisque sans lutte, n[ous] n[ous] enlisons au milieu de cette masse de Sstupidité et d’inertie. Peut-on imaginer un systéme de gouvernement plus idiot que celui qui consiste 4 remettre tous les 4 ans le sort du pays et la solution des questions les plus graves et plus délicates, non pas au peuple, mais 4 la foule, 4 une cohue de réunion publique! C’est une véritable gageure. Tous les 4 ans la France désigne ses représentants dans un accés de catalepsie alcoolique?. Et erit tanquam lignum quod plantatum est secus decursus aquarum, quod fruttum suum dabit in tempore suo? (Ps., I, 3; cf. avec Ap., XXII, 2, plus haut).
Vétu d’innocence et pareil 4 une goutte d’eau. Parmi tant de fils télégraphiques un est d’or.
(Dans le Paradis) le sol est parfaitement sec et les pins ruisselant de gouttes [59] translucides. «Il y a quelque chose en moi qui a cessé d’étre conciliable avec mon existence en ce monde’. »
On définit par la fin. Les 3 heures d’attente ineffable sur la croix.
Malédiction de Tyr... e¢ in cathedra Dei sedi in corde maris (Ez., XVIII, 2)¢. Socrates fut jugé le plus sage des hommes, non pour estre le plus sgavant et le plus habile, ou pour avoir quelque suffisance par dessus les autres, mais pour mieux se cognoistre que les autres, en se tenant en son rang, et en faisant bien homme (Charron)*.
Vox erat ei quasi vox aquarum multarum (Ez., XLII, ze
Mai 1914
287
Ez., XLVII. Les eaux qui sortent du temple a POrient. — Les eaux qui sortent du cété droit. — Jusqu’aux talons, jusqu’aux genoux, jusqu’aux reins et « torrentem quem non potui pertransire quoniam intumuerant [60] aquae profundi torrentis, qui non potest transvadari » — Et in ripa ligna... — Et ait ad me: aquae istae quae egrediuntur ad tumulos sabuli orientalis (la mer Motte) e¢ descendunt ad plana deserti,
sanabuntur aquae. —
intrabunt mare, et exibunt; et
Et omnis anima vivens, quae serpit,
quocum@ue venerit torrens, vivet, et erunt pisces multi satis,
posiquam venerint illuc aquae istae; et sanabuntur et vivent omnia ad quae venerit torrens. — Et Stabunt super illas piscatores — sicut pisces maris magni, multitudinis nimiae — Et super torrentem ex utraque parte lignum pomiferum, fructus in cibum, folia ad medicinam (cf. Apoc.). — Puis une description géographique et symbolique de la Terre Sainte. Absque muro habitabitur Jerusalem, prae multitudine hominum (et jumentorum ?) in medio ipsius. Et ego ero, ait Dominus, murus ignis in circuitu, et in gloria ero in medio ejus (Zach., chap. II)’. [61] Et dixi: Non pascam vos: quod moritur, moriatur ; et quod succiditur, succidatur, et reliqui devorent unusquisque
carnem proximt sui (Zach., XI, 9)°.
Et tuli virgam meam quae vocatur Decus (honneur, beauté) et abscidi eam, ut irritum facerem foedus quod percussi cum omnibus populis (id., 10). Et dicet: Non sum propheta, homo agricola ego sum, quoniam Adam exemplum meum ab adolescentia mea (id., XIII, 5). Exibunt aquae vivae de Jerusalem; medium earum ad mare orientale, et medium earum ad mare novissimum ; in
aeState et in hieme erunt (id., XIV, 8).
Un salon ot il y a de la vieille dame.
288
Cahier III
Motus
localis non
(S. Th., op. LIT).
solum
es in loco, sed circa locum
Ubi. — circumscriptis passiva locati ab attwa circumscriptione loci perveniens (Jean de S. Thomas)’. Et sicut non potest dici quis vestitus nisi a veste sic nec ubicatus nisi a loco circumStante. [62] Angelus autem non fundat praesentiam localem, nisi in ratione agentis et operantis, ideoque nec loco continetur, sed locum continet: ita quod sicut anima est corpori praesens informando,.ita angelus agendo et per applicationem virtutis dicitur esse applicatus loco. Ergo sicut informatio et applicatio animae ad corpus non fundat praesentiam quae sit ubi et hujus praedicamenti, ita nec angeli virtus applicata fundat praesentiam quae sit ubi, sed quae sit praesentia attionis (id.)*. InStans, ubi non diftantia*.
Il y a enveloppe la ot notre corps est arrété par quelque chose qui n’est pas lui. 23 mai. Départ par F[ranc]fort-Strasbourg. Messe a la cathédrale.
24, Belfort. Lyon illuminé le soir’. 25,
Aguettant®. 26, /’Annonce’, Herriot’, succés. 27, Exposition. Les bois coloniaux. 28, Paris. Répétitions. Représentation le 5 juin®. G[rand] succés?®, Le 10, départ. Tournai. Les Dominicains, leur couvent dans un marais entouré d’arbres immenses". L’ Antienne sonore et aurorale de S. Dominique. La Féte-Dieu, les 4 porteurs du dais sous le scapulaire, ceints de cuir, avec des tétes rases de croisés. Tout blanc, clair, guerrier, et
ptompt?®. Les PP. Barge, Gillet [63], de Poulpiquet*®, le Prieur. Massis'*. Excursion en auto p[our] voir Robert V.1° chez les Salésiens 4 Melle-les-Tournai. Il est sale, les cheveux en touffe. Le pas léger, cet air furtif et de
ne tenir a rien de son pére. Causerie dans le grand jardin conventuel sous le ciel gris. Son pére, failli une seconde fois. I] vit misérablement de son métier de commissionnaire en dentelles; sa mére 4 Londres, elle
souffre des intestins. Adieu! Causerie avec les péres que mes idées intéressent?*. Jean de S[aint] Th[omas]?’.
Mai- Juin 1914
289
Bruxelles. Je ne rencontre pas les Francqui!. La maison du 1o1, Chaussée de Charleroi?. C’est maintenant une
boucherie. Tout le bas est peint en rouge. Les 3 fenétres du premier étage. Arrivé le matin, le 13, a Hambourg. Le lendemain Travemiinde. Les Seckendorff*, Dessins. Mon portrait. J. Joérgensen‘. Cette courte ligne d’or la-haut dans le ciel comme un rivage. CAECILIA, famula tua, tibi quasi apis argumentosa deservit®.
La locomotive d’un long train de marchandises, Hst arrétée prés d’un arbre et le mécanicien cueille ' des cerises®.
[66] La lumiére est une espéce d’humidité divine. La flamme est une espéce de feu humide (Joubert)’. Avec la rapidité de la cause n[ous] voulons la plénitude de l’effet (Ernest Hello). Pourquoi cette ombre une seconde sur ton visage comme celle d’une aile? Au-dessus d’une rue comme sur l’eau d’un fleuve, dont on boit et dont on préléve des échantillons. Ezéchiel, XLVII.
1. Et convertit me ad portas domus, et ecce aquae egrediebantur subter limen domus ad orientem ; facies enim domus
respiciebat ad orientem; aquae autem descendebant in latus templi dextrum, ad meridiem altaris. 2. Et eduxit me per viam portae aquilonis, et convertit me ad viam foras portam exteriorem, viam quae respiciebat ad orientem : et ecce aquae redundantes a latere dextro. 3. Cum egrederetur vir ad orientem, qui habebat funiculum in manu sua, et mensus est mille cubitos et traduxit me per
aquas usque ad talos. [67] 4. Rursumque mensus et mille, et traduxit me per aquam usque ad genua. 5. Et mensus est mille, et traduxit me per aquam usque
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Cahier III
ad renes. Et mensus eSt mille, torrentem quem non potui pertransire, quoniam intumuerant aquae profundi torrentis, qui non potest transvadari. 6. Et dixit ad me: Certe vidisti, fili hominis. Et eduxtt me, et convertit ad ripam torrentis. 7. Cumque me convertissem, ecce in ripa torrentis ligna multa nimis ex utraque parte. 8. Et ait ad me: aquae iftae quae egrediuntur ad tumulos sabuli orientalis et descendunt ad plana deserti, intrabunt mare, et extbunt et sanabuntur aquae. 9. Et omnis anima vivens, quae serpit, quocumque venerit torrens, vivet: et erunt pisces multi satis posiquam venerint illuc aquae iftae et sanabuntur et vivent omnia ad quae venerit LOrrens.
10. Et ffabunt super illas piscatores, ab Engaddi usque ad Engallim siccatio sagenarum erit; plurimae species erunt [68] piscium ejus, sicut pisces maris magni, multitudinis nimiae. 11. In littoribus autem ejus, et in palustribus non sanabuntur, quia in salinas dabuntur. 12. Et super torrentem orietur in ripis ejus, ex utraque
parte omne lignum pomiferum, non definet folium ex eo, et non deficiet fructus ejus ; per singulos menses afferet primitiva, quia aquae ejus de santtuario egredientur ; et erunt fructus ejus in cibum, et folia ejus ad medicinam*.
Rose blanche, il est vrai mais ce qui a passé audedans est rose, l’ombre dans le cceur touffu. Be. wh
Et aspedtus rotarum et opus earum quasi visio maris (la mer qui voit) — cbant, et non revertebantur — quocumque tbat spiritus, illuc eunte spiritu, et rotae pariter elevabantur sequentes eum, spiritus enim vitae erat in eis — Sonum alarum,
quasi sonum
aquarum
sublimis Dei*. [69] Les 4 Animaux
multarum,
quasi sonum
: Et unumquodque eorum coram
facie sua ambulabat; ubi erat impetus Spiritus, illuc gradiebantur, nec revertebantur cum ambularents.
Dieu dans le désert du Sinai avait fait placer sur le propitiatoire de l’Arche d’ Alliance 2 chérubins destinés
Juin- Juillet 1914
291
a lui servir de trdne, le psalmiste avait chanté la gloire de Dieu assis sur les chérubins (Ps., LX XIX, 2); il avait méme montré ces étres mySstérieux servant pour
ainsi dire de char au Seigneur (Ps. XVII, 11) (Vigouroux)},
1° juillet. Voyage 4 Copenhague. Le Mecklenbourg onduleux comme une grosse houle. Warnemiinde. Le Prince Georges et la Princesse Marie sur le bateau. Le pale Danemark. Cop[enhague]. La rue et la place rococo,
les
fenétres
encadrées
d’éléphants,
l’hétel
Phénix. La promenade au bord de la mer. Les bateaux a tous les coins de rue, les tours, piles en équilibre.
Bras de mer qui sont des rues, avec une tour 4 chaque bout. Cataracte de tuiles. Le Musée ethnographique. : T[rés] belles tentures chinoises. Les idoles en chapeaux haut de forme de Nicobar®. Chez les Bapst® déjeuner [70] avec Brandés*. Klampenborg®, bain de mer. Le long jour scandinave qui n’en finit plus, paroxysme de langueur. Un moment seulement la nuit fera semblant de venir. La mer toute ronde a horizon. Les cdtes de Suéde. Le lendemain la forét de hétres. Le pavillon de courses fantastique. L’H6tel de ville, la gare. Diaprure des briques a l’intérieur employées sur enduit. Charpentes rouges®.
Braque’.
Le marbre n’est pas froid. Ces marbres antiques qui ont contenu des dieux, au soleil de la Gréce, vious] oubliez qu’ils étaient si brdlants* qu’on ne pouvait y tenir la main. La nuit méme ils restaient chauds.
Idée du drame qui fera suite au Pain dur. L{ouis] N[{apoléon] T[urelure], ambass[adeur] en Italie, sa fille qu il aime, demi-juive. — Elle aime un homme qui est 4 Dieu et qui la repousse. Elle le [suit] en Dieu. — Sc[éne] d’ironie a la fin. 3 juillet 14°. Faunus dans les roseaux; sa téte seule passant, un
gtos garcon joufflu, un chapeau [71] rond et la pipe au coin de la bouche.
292
Cahier III
Chouchette
malade
a Paris. On a craint la t. Elle
va mieux?.
Qui elucidant me vitam aeternam habebunt (Eccli.)*.
Nemo militans Deo implicat se negottis saecularibus (Timothée)®. Le
«doigt
d’homme
de
gloire»
des
romanichels,
doigt
mort, qui déterré a certaines conditions, 4
cettaines époques de la lune, permet, quand on le porte sur soi dans une expédition, de cambrioler impunément chaumiéres et chateaux’.
En allemand c’est le méme son qui exprime d’un homme qu’il mange et qu’il existe : er is(s)z. 16 [juillet]. Promenade avec Jacques® aux lacs de la région d’Entin : Keller see, Ugli see, Entiner see, bain.
Je suis de ceux qui comprennent qu’on peut passer Péternité 4 contempler une ligne droite. [72] Descente de tout lAlster en petit bateau. Retour a la sauvagerie. Sur les rives toute une population nue, dégotitamment grasse et rose®.
Dimanche 26 [juillet], le matin en allant 4 la messe grande affiche blanche au coin de la rue chez le marchand de tabac, d’aventute :
le beau
mot
de délivrance
et
KRIEG!!! Ode de la guerre : On étouffait, on était enfermé, on
crevait dans ce bain grouillant les uns contre les autres’, (les ouvriers, les lingots présentés 4 la cisaille, la rangée d@ouvriers 4 Offenbach dans de demi-ténébres assis devant un cylindre qui tourne), Tout-a-coup un coup de vent, les chapeaux (canotiers, juillet) qui s’envolent,
Juillet 1914
293
les journaux, la risée comme le vent mélé d’une grande pluie sur Peau d’un lac, la foule qui se met a chanter. Délivré du métier, de la femme, des enfants, du lieu Stipulé, ?aventure. A la méme heure dans toutes les
gtandes villes d’Europe, Hambourg, Berlin, Paris, Vienne, Belgrade, S.-Pétersbourg. Le tiers de la mer transformé en sang (Apoc.)?. [73] Images : le courant d’air par la porte qui s’ouvre, la guerre qui introduit sa téte et ses épaules et qui d’un coup de reins arrache, déracine toute la porte avec ses tours, la bréche. Hourra! Le canon trempé dans son bain d’huile et la grande flamme. Une fois de plus tous les peuples vont s’étreindre et se retrouver, se sentir dans les bras un de l’autre, se reconnaitre. , Inlassablement, une fois de plus a ta tache, vieille
' Europe! (Entrée du Cheval de bois)s. Visite des Marwitz.
Seckendorff
et de
Bernhard
von
der
Ps, XXXV. Judicia tua abyssus multa. Inebriabuntur ab ubertate domus tuae, et torrente voluptatis tuae potabis eos. Quoniam apud te est fons vitae et in lumine tuo videbimus lumen*. 28 [juillet]. Déclaration de guerre de |’A[utriche] a la Serbie. 30 [juillet]. Prise de Belgrade. Mobilisation partielle russe. N[ous] faisons nos malles. [74] Qui numerat multitudinem Stellarum et omnibus eis nomina vocat (Ps. CXLVI)°. Les Elus. Speculator aftat desuper (Hymn Amb.)*.
Flumen Dei repletum est aquis... Quoniam ita est praeparatio ejus. Rivos ejus inebria, multiplica genimina ejus in stillicidiis ejus laetabitur germinans (Ps. LXIV)’.
294
Cahier III
Qui fecit coelum et terram, mare, et omnia quae in eis
sunt (Ps. CXLV)}. Donc 3 choses.
Ad nibilum Li)?
devenient tanquam
aqua
decurrens
(Ps.
31 juillet. Jungfernstieg. Grosse Bleichen. La foule morne et silencieuse dans les rues. Impression de fatalité>. 1[er] aodt. Ultimatum de |’Allemagne 4 la Russie et a la France. Chaleur lourde et humide. Le soir mobilisation de l’Allemagne. 2 aott. Ciel gris. Chaleur étouffante. Les Cosaques passent la frontiére. Les Allemands occupent le Luxembourg. Bombardement de Libau. Aéroplane Frangais. Au grill-room [75] de Esplanade. Le garcon Guillaume qui va 4 Thorn. Enervement. Magnifique soirée vaporeuse sur |’Alster. Les trains qui roulent au milieu d’une haie de gens qui les acclament*. La lune comme un ceuf jaune rouge parmi les feuillages d’un grand arbre. Je mets les scellés sur les archives.
Comme on offre une rose ou un ceillet 4 quelqu’un qui part, la police de Hambourg me donne un Schutzmann pour garder le local du Consulat. Ces cafés sinistres ot l’on essaye d’oublier de mourir
en lisant des journaux illustrés. Le ministre de Russie pareil 4 une piéce anatomique mal conservée ou poussent par-ci par-la des poils noits. Les Russes [Donizinski]® sont partis le 2 par Warnemiinde et Malmo.
Le port avec tous ces bateaux morts, épaves flottantes.
Aoiit 1914
295
Les premiéres larmes. Les premiéres figures rouges et pleurantes. [76] Anxiété dune
capitulation en France, bruits
que Paris est en flammes, Poincaré assassiné, une foule
pleurante dans les rues, etc. Tout cela balayé par _. Pannonce réconfortante de la Déclaration de guerre (3 aout). A roh. du soir Weber vient m’annoncer de la part du Sénat que je dois me préparer 4 partir dans les 3 h. Attente toute la nuit. Remise des archives au consul d’Espagne. A 11 h. Weber vient me chercher. Nous sommes 7, Henri, agé de 2 Pingaud, attaché, 'sa femme Adéle.
moi, ma femme, mon petit garcon ans, mon v{ice]-consul, Gaillard, mes domestiques Camille Trontin et Nous partons sous les huées, les
ctachats et les projectiles de la foule. Ma femme se cache au fond de la voiture avec enfant pour ne pas étre maltraitée1. A la gare, pas de porteurs. On me fait prendre 8 places de premiére et l’on n[ous] fourre tous avec nos bagages dans un compartiment de seconde. Changement a Altona. A Neumiinster des policiers viennent n[ous] arréter, et escortés de soldats armés n[ous] descendons 4 la salle d’attente (toujours portant nos bagages) ot. ’on examine nos papiers. Retour (tels une troupe d’acrobates) sous les insultes de la foule. « Eine hibsche Gesellschaft! Eine nette Gesellschaft? ! ! » Discussion [77] avec un Rittmeister qui a pris notre compattiment et n[ous] insulte. Quelqu’un monte de force avec nous. N[ous] sommes 8 (avec les bagages). Il fait une chaleur étouffante et l’on n[ous] force 4 tenir les vitres fermées. Pour vivres, des sardines, du pain et
2 bouteilles d’eau. Cris perpétuels et piétinement de Venfant sur sa mére pendant 14 heures. Changement a Flensburg. A la frontiére 2 examens de nos bagages par un employé grossier. Arrivée 4 Vamdrup. Arrét et changement 4 Lwenkov. Arrivée 4 Esbjerg. Le dernier bateau est parti la veille, le service est interrompu. On parle d’une occupation de la ville par les Allemands, PAgent consulaire n[ous] invite a partir. Départ pour Copenhague. Arrivée le 6 (jour de ma naissance) a 9 h. CLAUDEL
V - 13
13
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Cahier III
du matin. Nous] descendons dans un misérable hotel, le « Missionshotellet », prés de la gare. Chambre sale et obscure, ornée, 4 mon inexprimable dégott, d’une gravure « Luther a la Diéte de Worms». L’Ambassadeur a Berlin J. Cambon est arrivé le méme jour et n[ous] raconte ses malheurs!. Déjeuners chez [....]? et 4 la Légation. Longues stations sur la place de V’Hotel de Ville devant les Lurene? [78] et le Politiken ou l’on affiche les nouvelles (favorables). Déclaration de guerre de l’Angleterre, victoire de Liege. A ?Ambassade l’attaché militaire, colonel Junt, |’attaché naval
Faramond, le M[inistre] de Belgique Albert. Dimanche on décide que n[ous] partons le soir via Bergen. Messe. C[on]f[essé] 4 S. Anocken‘ le soir. Départ 4 9 h. du soir avec en plus le chauffeur de ’Ambassade Louis Britell, sa femme, Pauline Caille, femme de chambre, et
1 petite fille de 4 ans®. Descente 4 Helsendr. Bain. A Helsingborg, Suéde, visite par la douane. Train misérable et comble. 3 h. d’arrét 4 Angelholm. La Suéde nocturne, langueur désespérée. Paysage comme au moment de la mort. Changement 4 Goteborg. Changement a Mellerud. N{ous] mangeons q[uel]q[ue]s smorbrot. Christiania 4 3 h. Grand Hotel. Diner chez le ministre Chevallez. Départ le soir 10 aott a to h., train
assez confortable jusqu’a Bergen a travers la Norvége de roc, de neige et de lacs, une terre de fissures. Bergen
et ses [79] pécheries. A 1 h. départ sur le [....]® plein de passagers. Mauvais temps. Mal de mer de l’enfant, de ma femme et de moi. Le lendemain beau temps, belle traversée. Le 14, arrivée 4 Newcastle, ot le consul
B[....]? (grand, sec, un monocle) nfous] attend. A toute vitesse a travers |’Angleterre jusqu’a Londres ou nous arrivons a 3 h. (King’s cross). Misérable hétel de Charing cross. L’Ambassad[eur] Paul Cambon pontifiant dans son fauteuil de gothique Vittoria. Le 15, messe a N.-D. de France. Le 16 [dimanche] voyage trés pénible jusqu’a Paris par un train omnibus (ayant manqué l’express 4 Arras). N[ous] croisons* de nombreux trains chargés de troupes anglaises. Arrivée a minuit. Descente 4 ’Hétel Terminus Nord. Le lendemain Ministére. Camille va 4 Enghien. Berth[elot]
Aott 1914
297
me raconte les événements. Paris désert, silencieux et
purifié. Villeneuve, 19 aout 141.
[80] 21 aoat. Mort du pape. Eclipse de soleil. Installation du nouveau curé de Villeneuve. M. Godet. Je signe comme témoin a son installation avec le vieux David [....]?. Cérémonie de linstallation. Le curé prend possession de tous les signes et instruments de son ministére. L’autel, le livre des Evangiles, le siége, le confessionnal, la chaite, les fonts baptismaux, les
cloches. '
Catéchisme du P. d’Hauterive, t. 5, p. 43°. Voici la traduction du décalogue que M. Chateau-
briand donne mot a mot de l’hébreu : 2. Tu ne feras point didole par tes mains ni aucune image de ce qui est dans les étonnantes eaux supérieures (a), ni sur la terre au-dessous i dans les eaux sous la terre. (a) Note du P. d’Hauterive : cette traduction est loin de donner une idée de la magnificence du texte. Shamajun est ane sorte de cri d’admiration, comme la voix dun peuple qui en regardant le firmament s’écrierait : Voyex des eaux miraculeuses* ! 4. Car en six jours Dieu fit les étonnantes Eaux supérieures, la terre et la mer, et tout ce qui est en
elles (Ex., XX). Paddington 5561 —
21 Queen’s gfar]d[e]ns W.
Au milieu de la rue devant la maison de M. de Bonnefoy 3 femmes se repaissant de nous regarder avec un intérét comparable a une nourriture. Endroits ot l’on a vraiment intéré¢ Pun a Vautre. Veuve, comme la terre dépouillée en ce mois d’aott, mais quelle splendeur! de Vor a perte de vue’. [81] Dimanche 23 aot. Je sers la premiére messe du Curé.
298
Cahier III
Suite. En allant chercher le pain a Fére, j’apprends que le chemin de fer commence 4 se détraquer (25 aodt). Passage de grands trains de réfugiés venant des Ardennes. I] faut partir. Maman s’y refuse. Départ le 26 4 10 h. avec Reine et les enfants dans un train de réfugiés. Hétel Paris-Lyon-Palace prés de la gare de Lyon. Billets obtenus 4 grand’peine. Ils partent le 27 au soir, Louise’ raméne ma meére lundi. Marche ininterrompue des Allemands vers Paris. Affolement au Ministére. Rencontre de De Hus. Mariage de B. le mardi ou je sers de témoin. Mercredi déjeuner chez B. Arrivée d’André Bferthelot] qui nous affole par des nouvelles pessimistes. Paris incapable de se défendre. Les Prussiens vont tout briler — (Visite des « Taubs » au-dessus des boulevards. Explosion d’une bombe pendant que nfous] prenons un bock chez W[eber], moi, Fontaine, Lalo et Debussy). — En toute hate je fais partir ma mére et ma sceur avec André dans son auto, elles couchent au chateau [82] d’André a SaintLyé prés d’Orléans, puis au chateau de La BJ...] aussi lui appartenant 4 Benest (Charente). Quant a moi je pars jeudi avec les Berthelot] dans le train du ministére. Effroyable chaleur. Bordeaux. Je m’installe chez Gabriel Frizeau. Je suis employé au Ministére de la guerre a la censure des télégrammes. Travail de nuit. A la féte de la Nativité les choses ont Vair de prendre une meilleure tournure. Je m/’installe avec les Bf[erthelot] dans un apparte-
ment meublé 17, rue du Champ de Mats’. Dans la grande bataille de la Marne livrée entre la féte de la Nativité et celle du T. S. Nom de Marie, nous avions a notre gauche S. Geneviéve, au centre S. Rémi et 4 notre droite Jeanne d’ Arc.
D’aprés Pordre du jour du général Tulff von Tschipe c’est le lendemain 8 [septembre] que devait avoir lieu Peffort décisif®.
Aott-Olfobre 1914
299
[83] Les batailles de la Marne et de |’Aisne livrées _ avec S, Rémi au centre,
Ste Geneviéve
4 gauche et
Jeanne d’Arc 4a droite. Latet enim eos hos volentes, quod coeli erant prius, et terra
de aqua et per aquam consistens Dei verbo (II Petr., 111, 5)}. _
27 0&[obre]. Promenades pendant ce mois a S.-Emilion 4 Haussegor? (l’océan, la lune, les pins, les bruyéres, les Pyrénées fantémes dans le lointain). Incendie de Reims. J’entre au service des prisonniers? avec Cruchon-Dupeyrat. Arcachon et de nouveau POcéan. Ces gros morceaux de chairs translucides sur la plage, avec ces profondes soupapes ot je mets les doigts. Priéres. Mauriac et son frére. Madame Riviere. Jacques retrouvé. Olivier Hourcade tué. L’ennemi arrété : tu miras pas plus loin. Les blessés, cette expression de faiblesse et d’innocence. Pierre Mille et sa femme. Mme de Margerie. Mme de Vilmorin (Mélanie)‘.
Coeli enim qui nunc sunt, et terra, eodem verbo repositi sunt igni reservati in diem judicii et perditionis impiorum hominum — Adveniet dies Domini ut fur; in quo coeli magno impetu transient, elementa vero calore solventur terra autem et quae in ipsa sunt exurentur. ... Coeli ardentes solventur et elementa ignis ardore tabescent (id., 6, 11)5. [84] lenis in conspectu ejus exardescet (Ps. XLIX)*. Pie X : Ignis ardens’. Ignis ante ipsum praecedet (Ps. XCI)8. Omnia sic perseverant ab initio Constance des lois de la nature.
creaturae
(Petr.)®.
Le feu est ce qui divise en esprit et cendre. La
Grande
Bataille,
comparable
au
feu du Pur-
gatoire. Toute la France placée dans ce long sillon, en attendant le jour de la Résurretion. Surget in incorruptione’®,
300
Cahier III
En quoi la Religion de inventions humaines. Les otdinaires dans l’ordre de intelligence. Mais l’autre
Dieu différe de toutes ces unes ont des choses extral’imagination et méme de est inouie dans lordre du
ceeur : incarnation, l’eucharistie. L’hémorrhoisse au milieu de la foule et de la bous-
culade! qui parvient 4 toucher le bord du vétement [85] de Jésus-Christ. Tel notre désir au milieu des pensées mondaines et des distractions de toutes sortes.
Télégrammes et lettres de ma femme. Son frére Sainte-Marie? blessé, tué probablement dans un effroyable combat prés d’Ypres le 2 novembre. I disait dans sa derniére lettre : « Si je meurs,
ne me
plaignez pas, car je jouirai auprés de Dieu du bonheur réservé aux martyrs. »
Visite 4 Francis Jammes 4 Orthez. Edification de cette maison chrétienne. J[ammes] tout rose dans sa grande barbe grise. L’archiprétre avec ce cancer qui lui ronge la joue. Lourdes. Récitation du rosaire avec J[ammes] devant la grotte*. Visite 4 Phopital. La salle des amputés. Le négre colossal avec ses deux énormes mains enveloppées de bandages. Je suis chargé de faire de petits tracts pour répondre a la propagande allemande dans les pays neutres. Travail 4 ’Imprimerie Delmas‘. Visite de Madame’.
Les B[erthelot] absents 4 Paris et presque tout ce mois. Philippe sur le front et en Angleterre. [86] Riviére Fournier tué*,
prisonnier
4
Konigsbruck.
Alain
28 nov[embre]. Voyage a Paris. 4 déc[embre]. Lyon, Reine, Hotel Terminus. Chez les Antoine’. Voyage pour mes tracts. A Paris les g[ran]ds Magasins. Le Ministére occupé par les attachés. 6 décfembre]. Hostel. Soleil latéral d@’hiver qui donne un relief au moindre sillon. Sur les hautes pyramides des glaciers le rose du soleil
Novembre-Décembre
1914
301
_couchant. Matin. 3 silhouettes en teintes plates l’une - sur lautre, noir sur noir, la ligne nette et dentelée de Phorizon.
J’attends, je prends racine et me couvre de choux de Bruxelles. Une auréole de gouttes d’eau brillantes. 8 déc[embre]. Jour de ’Immaculée Conception. Au soir aprés une lettre du Ministére de la Guerre qui nous Otait tout espoir, tout a coup un t[é]l[é]gramme de mon beau-pére annongant que Sainte-Marie est prisonnier et blessé en Allemagne. C’est un miracle. ,N.-D. récompense son vieux serviteur?. A Paris, a N.-D. Auxiliatrice de Clichy sur la priére de Vabbé Fontaine, j’ai fait une conférence sur la guerre dans l’église méme devant un millier de personnes sans aucun art [87] et aucune difficulté; tout cela coulait comme de source 4 ma grande surprise. — En allant a Lyon cet horizon au-dela de la Loire sur les foréts jaunes et bleues foncées qui me parlaient des siécles passés et du temps de Charles VII. Cosne, Gien, Nevers.
Hostel jusqu’au vendredi 11 [décembre]. Le lendemain c[on]f[ession] cath[édrale] S. Jean de Lyon. La rosace bleue de la nef, astrale, mystique, paradisiaque?. C[ommuni]é le 13 4 Fourviére (chapelle). Le soir général [....]% Le 14 départ pour Marseille par une pluie battante et un ciel jaune. Je m’endors et a Avignon je suis réveillé par un rayon de soleil sur ma face. Sommeil quelques instants en songeant que c’est lui. Marseille; Hotel Terminus. Ce matin ot la ville et
le port étaient dans le brouillard d’ou n’émergeait au haut de sa colline que N.-D. de la Garde. Courses, Cannebiére, le Vieux Port, la Réserve. L’Office 4 6 h.
dans cette église de faux gothique. La Vierge dans ce soleil en clinquant. Idée de la pureté. Cette émotion une seconde fois 4 la présence de la Vierge, comme
a
302
Cahier III
Fourviére au printemps. II faut que j’écrive ce poéme. Ayez pitié de cette détestable faiblesse’. Le 16, départ pour Avignon. Hotel de Europe prés du pont [88] ot coucha jadis Bonaparte. Autographe de Lacordaire. Le pont. Vue d’Avignon de l’autre coté du Rhéne. N.-D. des Doms. Le Palais. Promenade dans Avignon noéturne. Marche le long des remparts. Nuit. Le lendemain messe 4 cette vieille église au chceur peint. Le palais. La monnaie. Le délicieux parc. Vue admirable sut le Ventoux, la plus longue, la plus belle, la plus
harmonicuse ligne de montagnes que j’aie vue de ma vie jusqu’a cette cime coiffée de neige. O adorable lumiére! soleil, je n’aime que toi?! Les 2 Rhénes autour de la Barthelasse. Retour par ces maisons roses et dorées, la petite ruelle sous le palais avec cette longue ogive et cet énorme contrefort. Orange, infecte petite ville méridionale. Le Théatre, j?y passe une heure, problémes insolubles. Ces énormes dégagements, les 2 bastions, pas de scéne ni de coulisse, ce mur machiné et creux®. Qu’est-ce qu’on jouait la-dedans ? [89] Retour a Lyon dans un train plein de jeunes soldats de la classe
15. Elisabeth
m’apprend
que la nouvelle
du
salut de S.-M. est fausse*. Le monsieur s’était trompé de nom. C’est mieux ainsi. La famille de mon beaupére était digne de ce martyr. Tristesse du pauvre vieillard. Un jour a Lyon. Visite au re€teur et aux fréres Lumiére. Départ pour S.-Etienne, triste ville ouvriére. Je suis regu par le cousin de ma femme, Théodore Perrin’. Visite de la fabrique d’obus du Chambon. Colcombet, Ch[ambre] de c[ommerce]. S.-Chamond: z h. inutiles. L’Eglise, large vaisseau ot je
ptie. De nouveau Lyon le soir. — Départ le mardi matin pour Hostel avec mon beau-pére. Mes enfants, la bonne chére, les montagnes couvertes de neige. Ces
§ mois n’auraient-ils marqué pour moi qu’un progrés dans la vie matériclle? Je ne fais plus rien. Noél. Pas c[ommuni]é. Mes comptes ne sont pas nets. Lundi matin, départ par la pluie, Lyon. Le soir je m’embarque pour Paris. Mal au coeur dans un compartiment surchauffé. Paris. Je rends compte de ma mission. L’année s’achéve dans l’ennui, la tristesse et la pluie.
idl) [90] 1°T janvier. — Hélas! Larmes et regrets 4 Dieu le matin a S.-Louis.
Le soir je me
c[on]f[esse]
4
S.-Sulpice ob comme toujours je trouve un prétre trés ‘charitable et trés intelligent. Grandement réconforté. Bonnes résolutions. Apprendre 4 traiter le corps en ennemi. Quelle mollesse! 2
janvier.
—
Diné
avec
mon
collaborateur,
le
mfarqulis de Dampierre. 3 janvier. — Ste Genevieve. Supplications pour la cause alliée. Ste Genevieve spiritus agnitionis et dilectionis'. Diner chez les B[erthelot] et vains bavardages. Salut t[rés] beau a S.-F[ranc]ois-X[avier]. Villeneuve n’a pas été abimé par les Allemands. La maison a été bousculée mais on n’a pas fait autre chose que de boire le vin, de briler le bois et de manger les confitures et les cornichons. Jécris le 1€7 vers de Ja Vision des Eaux futures. Pourrai-je aller plus loin? Tant que cette guerre ne sera pas finie, j’attends [91] comme si ce poéme en dépendait?. 5 janvier. Déj[euner] avec la Duchesse de ClermontTonnerre, la c[omt]esse Antoinette de Brémont et Vabbé Mugnier’. Fait le coq. 6 janvier]. Epiphanie. N.-D... —Il y a 25 ans au moment de ma conversion je rencontrais 4 N[otre]D[ame] un grand pauvre 4 longue barbe blanche qui ptiait 4 genoux dans un coin et se prosternait en baisant la terre (il me semble méme que je l’ai mis dans la Ville)’, Ces jours-ci j’ai rencontré de nouveau un
304
Cahier III
pauvre exactement le méme, barbe et prosternation. C’est sans doute ainsi depuis la construétion de I’Eglise. Multiplicatae sunt aquae et elevaverunt arcam in sublime a terra (Gen., VII, 17).
Semel loquitur Deus et secundo id ipsum non repetit (Job, XXXIII, 14). 10 janv[ier]. Dim[anche]. Déj[euner] chez labbé Fontaine avec Pitt, Cingria et DJ....]8. Je fais marcher le soufflet de l’orgue aux vépres. Ut absorbeatur quod mortale est a vita (1 Cot., v, 4)*. Le Christ en son corps mystique (l’Eglise) dévorant cette mortalité. Christus deglutiens mortem (1 Petr., 111, 22). [92] Hélas! celui qui aime se place en état d’infériorité. L’aéte de manger comprend l’appréhension, l’écrasement, ’humectation, la déglutition®, le mélange, l’assimilation.
S. Paul enlevé au 3¢ ciel reste aussi 3 jours i” profundo maris®.
Nous savons confusément que nfous] avons une ame, parce que nous l’avons entendu dire et que la foi Penseigne, mais les richesses que peut renfermer cette ame, mais Hote qui y fait séjour, mais le prix inestimable qu’elle vaut, c'est 4 quoi nous réfléchissons rarement (Sainte Thérése)’.
Les sages disent qu’un lien commun unit le ciel et la terre, les dieux et les hommes, au moyen de l’amitié,
de la modération, de la tempérance et de la justice. Et c’est pour cette raison qu’ils donnent a cet univers le nom de Kosmos, et non celui de désordre (Platon, Gorgias)$.
Janvier-Février 1915
305
[93] Voyage a Paris de Reine qui vient m’amener Pierre 28-1-7/21 — Pierre va 4 l’école 4 Massillon.
Eve Francis? malade des suites d’une opération, 60, rue Violet. Jai recommencé a faire partie des Conférences - §.-V[incent] de Paul. Je visite 19, rue des Ursins une femme? dont le petit gargon a eu la jambe écrasée par une auto et 4, rue de la Huchette Mad[ame] Gidon, tuberculeuse qui gagne 30 f. par mois et qui avait sur
son lit un pauvre petit enfant qui commengait a tousser. La souffrance des petits enfants me déchire le coeur, ' Jécris un petit drame de citconstance : /a Nuit de Noé/ 19144. Difficultés avec le s[ieu]r Fournol. Belle lettre de ce pauvre Wyzewa® qui souffre d’une ulcération de la langue. Paterne Berrichon‘.
6 février, 1€T jour de printemps. Le coucher de soleil a déja de la fratcheur, de l’ardeur et de Phumidité. Entendu le merle avec une joie infinie dans les arbres des Invalides’. La guerre, crise de temps en temps, comme au mois de juin la « manne », la grande destruction des insectes males. [94] 21 fév[rier]. Clichy. Cingria et son grand Antiphonaire. L’abbé Fontaine me raconte la mort de sa méte, mére de 3 prétres. Aprés avoir dit son chapelet,
elle s’est renversée en arriére avec un soupir, le jour de N.-D. des Vidtoires. Plutét qu’une mort, dit-il, c’est une dormition comme celle de la Sainte Vierge.
Je travaille avec Mer Baudrillart aux 2 tracts catholiques pour les pays neutres.
306
Cahier III
La figure blanch4tre et molle des Allemands pareille 4 une omelette mal cuite. S. Thérése dit qu’elle n’avait aucune imagination. « Jignorais 4 ce moment que l’4me pit voir autrement que par les yeux du corps?. » Ce qui semble exagéré quand elle parle de son attachement 4 Dieu malgré ses péchés continuels est bien vrai pour moi, pris a la lettre.
Différence essentielle entre la résignation stoicienne et le sacrifice chrétien. L’une accepte le mal particulier en raison d’un [95] bien général, mais elle le considére cependant comme un mal auquel elle se résigne. Le chrétien ne considére comme mal que ce qui le sépare de Dieu, et le mal qui Vafflige, s’il vient de Dieu, n’est pas un mal, mais au contraire un bien qui
Ven rapproche. C’est pourquoi le stoicien est triste, mais le chrétien est joyeux, et trouve joie dans son sacrifice méme?. 2€ Vendredi de Caréme®. Le S. Suaire. [12 mars.] Et conculcavi populos in furore meo, et inebriavi eos in
indignatione mea et detraxi in terra virtutem eorum LXIII)‘.
(\s.,
Samedi. Récit de la Bénédiftion de Jacob volée a Isaac. Stabilivi eum in frumento et vino. — Qui est Esai le premier-né? Les Anges? Lucifer le « Principe des Voies »? Velu, les rayons ?Dieu trompé par le contaét, l’Agneau au lieu de la Béte sauvage. « Ecce odor agri plent.» Les paiens sont bénis dans® la graisse de la terre et la rosée du ciel, qui ont déja été attribuées 4 Jacob,
par conséquent seulement comme participation. Une primogéniture antérieure a celle de la création, celle du Fils. [96] Madame
Gidon,
tuberculeuse,
4, rue
de la
Huchette, et son pauvre petit gargon Paul qui commefice a tousser®.
Mars r9r5
307
Danses d’Arméne Ohanian chez Miss Barney et la Duchesse de Clermont-Tonnerre. La danse de la mort,
Padme seule et prisonniére sans aucune issue. Elle danse sur un iambe court, les bracelets 4 ses pieds faisant un bruit de mort et de feuilles séches. Dans une seconde version, hier, désespoir, défi, désir. Danse 4 genoux, le
cotps tendu et frémissant essayant de s’arracher de luiméme. Danse du voile, la femme entre deux amours,
tout son corps va et vient, recule et en méme temps avance d’un autre cété et vient s’imprimer sur le voile de la cheville 4 ’épaule en un moulage d’une seconde?. — Dialogue chanté charmant.
Le méme Bourges?.
jour enterrement
de la pauvre
Sita
Cest un grand malheur que d’avoir placé son cceur dans un autre. Ce grand Dieu veut que ’ame comprenne qu’Il est prés d’elle : qu’ainsi elle peut lui parler sans envoyer de [97] messagers et sans élever la voix, parce qu’a cause de sa proximité il l’entend au moindre mouvement des Jévres (S. Thér., ze, chap. x1v)°.
L’4me ne connaissant rien au dela d’une telle jouissance... elle n’ose ni remuer ni changer de place; il lui semble que ce bonheur va lui échapper; quelquefois méme elle voudrait ne pas respirer (zd. ). L’Ame dans cette oraison de quiétude doit se conduire avec douceur et sans bruit... Qu’elle goite... la vérité, et ne s’inquiéte en aucune facon de l’entendement q[ui] n’est qu’un faiseur de bruit... Les priéres vocales si l’4me a le pouvoir d’en faire; car lorsque la quiétude est grande, elle éprouve une peine extréme a parler... Les ames hautes regarderaient comme une honte et un déshonneur de ne quitter les biens de ce monde que parce qu’ils sont périssables, car elles les abdiqueraient avec plus de joie encore s’ils devaient durer toujours (chap. xv).
308
Cahier III
Vendredi des 5 Plaies. [19 mars.] Egressae sunt de petra aquae largissimae ita ut populus biberet, et jumenta (Num., XX)}.
Aqua quam ego dabo ei, fiet in eo fons aquae salientis in viam |sic] aeternam (Jean, 1V)?. [98] Chap. xvi. Oraison d’union. — Cet état est un sommeil des puissances oU sans étre enti¢rement perdues en Dieu, elles n’entendent pourtant pas comment elles opérent. L’4me enivrée de l’eau de la grace que Dieu lui verse 4 longs traits, elle ne peut, elle ne sait
plus ni avancer ni reculer; elle n’aspire qu’a jouir de cet excés de gloire. On dirait quelqu’un qui, soupirant aprés la mort, tient déja en main le cierge bénit, et n’a plus qu’un souffle 4 exhaler pour se voir au comble de ses désirs. C’est pour l’4me une agonie pleine d’inexprimables délices, ot elle se sent presque enti¢rement mourir a toutes les choses du monde et se repose avec ravissement dans la jouissance de son Dieu. En cet état elle ne sait que faire; elle ignore si elle parle, si elle se tait, si elle rit, si elle pleure; c’est un glorieux délire,
une céleste folie ot lon apprend la vraie sagesse. Passage bien saisissant chap. xvur. — J’étais, au commencement, dans une telle ignorance, que je ne savais pas que Dieu fit dans tous les étres. Mais comme, durant cette oraison, je le trouvais si présent 4 mon ame, comme la vue que j’avais de cette présence me [99] semblait si claire, il m’était absolument impossible d’en douter. Des gens qui n’étaient pas doétes me disaient qu’il s’y trouvait seulement par sa grace. Persuadée du contraire je ne pouvais me rendre 4 leur sentiment et j’en avais de la peine. Un trés savant théologien de Vordre du glorieux Saint Dominique me tira de ce doute; il me dit que Dieu était réellement présent dans tous les étres, et il m’expliqua
de quelle
maniére il se communique 4 nous, ce qui me remplit de la plus vive satisfaction. D’aprés l’ex[emplaire] lu et annoté par Huysmans, légué 4 Pabbé Fontaine’.
Mars 1915
309
}
| L’admirable chap. xix. — Elle voit sa misére... _ comme les toiles d’araignée dans le rayon du soleil. Elle voit qu’elle mérite ’enfer et qu’on la chatie avec de la gloire. A cette vue, comme la cire devant le brasier, elle se fond en louanges de Dieu, ainsi que je voudrais le faire moi-méme en ce moment. Soyez béni, Seigneur, q[ui] d’un regard avez fait de cette eau im_ pure de mon 4me une eau assez claire et limpide p[our] étre servie a v[otre] table. — Les larmes peuvent tout gagner et une eau en attire une autre. Je me suis plus tot lassée de l’offenser qu'il ne s’est lassé de me pardonner. — L’oraison de ravissement ou pluie. — Chap. xx. Elle tombe avec tant d’abondance que, si la terre ne se refusait 4 un tel bonheur, [100] nfous] pourrions croire 4 juste titre avoir au-dedans de nous, dans cet exil, la nue mystéricuse du sein de laquelle ce grand Dieu la verse par torrents dans notre ame... De méme que les nuées attirent les vapeurs de la terre, il attire 4 lui notre ame... On sent d’une maniére trés sensible que la chaleur va s’affaiblissant et q[ue] le corps se refroidit peu a peu, mais avec une suavité et un plaisir inexprimable. Dans l’oraison d’union, n[ous] trouvant encore comme dans nfotre] pays, n[ous] pouvons presque toujours résister a Pattrait divin quoique avec peine et un violent effort, mais il n’en est pas de méme dans le ravissement; prévenant t[ou|te pensée et tlou]te préparation intérieures, il fond souvent sur vous avec une impétuosité si soudaine et si forte que v[ous] voyez, v[ous] sentez cette nuée du ciel, ou cet aigle divin v[ous] saisir et v[ous] enlever. — Les enlévements. — Lorsque je voulais résister, je sentais sous mes pieds des forces étonnantes q[ui] m’enlevaient; je ne saurais 4 quoi les comparer. Nul autre de tous les mouvements q[ui] se passent dans l’esprit n’a rien qui approche d’une telle impétuosité. C’était un combat terrible. Malgré nous nf{ous] voyons que n[ous] avons un maitre. —
Un détachement étrange, si merveilleux
que je n’ai point de termes p[our] l’expliquer. Une priére ineffablement douloureuse. Tout a coup lame [101] sent en elle je ne sais quel désir de Dieu. En un instant pénétrée tout entiére par ce désir, elle entre
310
Cahier TIT
dans un tel transport de douleur qu’elle s’éléve audessus d’elle-méme et de tout le créé, Dieu la met dans
un si profond désert qu’elle ne pourrait, en faisant les plus grands efforts, trouver sur la terre une seule créature qfui] lui tint compagnie. Elle est en proie a une peine si délicate et si pénétrante, elle se sent dans un si inexorable désert... Le martyre d’une si effrayante solitude. Dans cet état, l’4me ne parait plus étre en elleméme, mais comme le passereau sur le toit; elle habite
solitaire la partie la plus élevée d’elle-méme, je dirai plus méme, c’est au-dessus de la partie la plus élevée d’elle-méme... Crucifiée au monde. II ne lui vient de consolation ni du ciel ow elle n’habite pas encore, ni de la terre a laquelle elle ne tient plus et d’ot elle ne veut pas en recevoir. Ce sont comme les suprémes angoisses du trépas; mais il y a dans cette agonie de la souffrance un si grand bonheur que je ne sais 4 quoi le comparer. C’est un martyre ineffable 4 la fois de douleur et de délices... les bralants désirs de la mort... Un seul désir me consume alors, celui de mourir. Je ne me souviens ni du purgatoire, ni de ces grands péchés par lesquels j’ai mérité ’enfer. Tout s’efface de ma mémoire et s’absorbe dans ce brtlant désir de voir Dieu. Ce désert et cette solitude. [102] « Ton ame se purifie dans cette peine, elle y est travaillée et purifiée comme Vor dans le creuset afin que la main divine puisse mieux étendre sur elle l’émail de ses dons. » La volonté demeure seule unie par le ravissement. Dans les deux autres puissances il se manifeste un mouvement semblable a celui de ?ombre de Vaiguille des cadrans solaires, laquelle ne s’arréte jamais’. Dimanche de Laetare. [21 mars.] Les genévriers : en picard pézérots ou pertrouilles. Les grappes de raisins muscat, les aubergines, les grosses quenouilles des mais entre les feuilles desséchées, les melons, les figues (d’aprés les sculptures
de ?Hétel Fieubet). Chap. xx1. — O comme elle sent sa captivité dans
Mars 19175
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son corps et la misére de la vie! Qu’elle comprend donc bien la raison qui portait S. Paul 4 supplier Dieu de len affranchir! Avec I’Apdétre elle éléve de grands cris vers Dieu et demande la liberté, mais c’est avec
une si véhémente aspiration et des désirs si impétueux que t[rés] souvent elle parait vouloir s’élancer de sa prison p[our] saisir cette liberté qu’on ne lui accorde pas encore!. Dans les commencements les progtés sont moins sensibles parce qu’ils ne sont pas encore confirmés [103] par les ceuvres?. Protestation contre ceux qui veulent écarter de la méditation toute idée corporelle, mais® celle de ’humanité du Seigneur]. Voila ce qui est p[our] ’ame marcher en air et s[ans] aucun point d’appuit. Chap. xxvu. — II Pinitie 4 ce parler sans paroles qui est le langage de la patrie... Ainsi dés l’exil Dieu et lame s’entendent par cela seul qu’il veut étre entendu delle et ils n’ont besoin d’aucun autre artifice pour s’exprtimer leur mutuel amour. Ici-bas 2 personnes d’esprit et qui s’aiment beaucoup s’entendent méme sans signe, simplement en se regardant. Matin 9 h. Le fleuve vert foncé au milieu de la ville sous larche des ponts. Le cheval tout rasé sauf les jambes qui a l’air d’avoir de hautes bottes de poils rouges. Le pont de fer rouge et derriére soudain une élévation de vapeut.
Chap. xxv. semble
— Mais cette divine lumiére ne res-
en rien 4 celle du soleil; elle seule parait a
ame une lumiére naturelle, tandis que celle de cet astre ne lui semble en comparaison que quelque chose d’artificiel... Dieu la montre si soudainement que si pour la voir il fallait seulement ouvrir les yeux, on n’en aurait pas le loisir. Mais il n’importe qu’ils soient ouverts ou fermés... Mais imagination ne pourrait-elle passe représenter ainsi la personne de J.-C. ? [104] Non, car cela est de toute impossibilité. Car la seule beauté de la blancheur d’une des mains de J.-C. surpasse infiniment tout ce q[ue] nf[ous] saurions n[ous] figurer.
eae
Cahier III
21 fév[rier]'. Visite a Cingria a Clichy devant un terrain vague qu’il compare a un enclos pour éléphants. Charmant piano d’Ignace Pleyel 1812, 4 mon avis bien supérieur aux pianos modernes dont le son a l’abstraction d’une gravure sur acier. La on sent la corde avec son timbre propre, comme un vin qui a le gotit de terroir. La tierce de Picardie, passant du mineur 4 une résolution en majeur, retour au grave et a la sérénité?. D’aprés lui, les 2 fldtes des aulétes antiques n’étaient pas faites pour qu’ils en jouent en méme temps, mais p[our] passer rapidement d’un mode a l’autre. Histoire des petites filles fabricantes de tapis 4 Constantinople guidées par un chanteur. La broderie change et varie avec le ton employé. Histoire du Jésuite astronome dont la téte toujours branlante et en mouvement ne patvenait jamais a se fixer. Il allait chercher l’abbé Fontaine qui des deux mains et de force lui maintenait la téte devant [105] Pobjeftif de son instrument. Dés qu'il avait trouvé son étoile il y restait fixé, mais aussitot décollé, sa téte recommengait 4 branler de tous cdétés. Dans la chambre de C[ingria] une lunette astronomique avec un bougeoir a cété sans doute p[our] éclairer le firmament. — Je parle le soir devant les paroissiens de ’abbé F[ontaine]. — La veille visite des Zeppelins. — Concert de musique russe, a la fois encombrée, désordonnée et sale comme les intérieurs
du pays
ou les fenétres
Orientalisme
ne
sont
jamais ouvertes.
d’Odessa, luxe d’hétel meublé. 2 chan-
sons de S.*, charmantes. Grosse symphonie caverneuse de Borodine. Faiblesse de cette musique uniquement sonore, toujours lart pour lart?. Un joli jeune homme
avec une jambe de moins.
de 22 ans, chasseur 4 cheval
Comme une piéce d’argent parmi les sous au fond une large bourse. Cet avocat qui se vantait que la « Civilisation » avait éteint les étoiles®. Les Zeppelins arrivent et toutes nos lumiéres fabriquées s’éteignent comme part enchante-
Mars 1915
$53
ment. Au-dessus de la ville-lumiére reparait l’énorme ciel étoilé.
[106] Toutes les lumiéres éteintes, le fleuve au travers de la cité noire et grouillante. La, profondément recueilli, je commengai 4 m’adres-
ser 4 N.-S. avec le plus grand abandon. Car alors, c’est amour qui] parle, ame est dans un tel transport qu’elle n’apergoit plus la distance q[ui] la sépare de celui auquel elle s’adresse; elle se voit aimée de son Dieu
et cette
vue
fait qu’elle
s’oublie
elle-méme,
s’imaginant étre toute en lui et ne faire qu’un avec lui
sans
ombre
de
division,
elle
dit
des
folies
(chap. xxxrv)}.
Pendant cinq heures de suite, allant toujours a Pallure d’un train express, nous passames en automobile entre des murs de soldats en marche. Nous passd4mes régiment aprés régiment, brigade d’infanterie aprés brigade, ensuite des hussards, des uhlans, des cuirassiers, des batteries de campagne, puis encore de l’infanterie, des canons de campagne, des ambulances, puis des canons de siége trainés par trente chevaux du génie, un corps de téléphonistes, des chariots de pontonniers, des automobiles blindées, encore des uhlans, encore de l’infanterie en casque a pointe, tout cela coulant aussi irrésistiblement qu’un
grand fleuve, tous les visages tournés vers la France. Toutes les éventualités semblent avoir été prévues. Les cartes de Belgique dont est pourvu chaque soldat sont les plus beaux spécimens de topographie que j’aie jamais vus, portant tous les sentiers, toutes les yee tous les batiments, tous les bouquets
d’arbres. A un certain endroit, un énorme fourgon militaire contenant une imprimerie complete était arrété au bord de la route, et on y imprimait et distribuait aux soldats qui passaient l’édition du matin du Deutsche Kriger [sic] Zeitung.
314
Cahier III
Des cuisines de campagne circulaient le long des lignes en servant de la soupe et du café fumants aux hommes qui tendaient des tasses de fer blanc qu’on leur remplissait sans qu’ils eussent une seule fois a rompre le pas. Il y avait des chariots pleins de cordonniers militaires, assis 4 la turque, en train de raccommoder les souliers des soldats. D’autres chariots, qui avaient toute l’apparence de simples chars de ferme 4 deux roues, cachaient sous la
courbure de leur béche neuf mitrailleuses qui pouvaient en un instant étre mises en jeu. Le corps médical était magnifique, aussi pratique et parfaitement équipé que l’hdpital d’une grande ville. Des bicyclistes portant des rouleaux de fils isolateurs suspendaient des téléphones de campagne d’arbre en arbre, si bien que le général qui commandait pouvait parler avec n’importe quelle partie de cette colonne longue de cinquante mille. L’armée ne dort jamais toute a la fois. Quand une moitié se repose, l’autre moitié avance. Les soldats sont traités comme de _ précieuses machines qui doivent donner le maximum de rendement. C’est pourquoi ils sont bien nourris, bien chaussés, bien vétus, et soignés comme un muletier négre soigne ses mules (¢raduit par Emile Legouis )}. La marche des Allemands sur Paris (aodt 1914). D’aprés un journaliste américain. [107] 29 mars, lundi. Voyage a Hostel pour la 1té c[ommunion] de mapetite fille Marie. Lyona 1oh. 50. Hostel le lendemain a 3 h. 4% par une pluie battante.
Comme le voyageur qui rentre dans son pays, tout est labouré, et la terre pourpre monte jusqu’au milieu des vitres du wagon. Le pissenlit et la violette, ’un pour le gotit et autre pour lodorat, tous les deux profondément imprégnés du sentiment de la terre hivernale et macérée?.
Mars 1915
315
Dans la campagne encore vétue de sa robe franciscaine, le printemps éclate par plaques d’un vert violent et par arbres ¢a et la roses comme le paradis. Ma petite fille que 17
communion,
je conduis
comme
un
4 sa retraite
berger
avec
de
son petit
mouton. Descente jusqu’au fond du torrent par des chemins d’herbe et d’eau. (Samedi 27 [mars]). Conférence aux Annales. Poémes
de la Nature, de la Foi et de la Patrie. Cantiques du Rhone, de la Chambre intérieure et de Ombre, par Eve
Francis.
Ste Scolastique,
S. Pierre,
Ste Cécile,
Enfant Jésus de Prague par moi. Parabase de la Nuit de Noél par E[ve] F[rancis]. — Succés complet?. [108] Bandes de brumes de toutes parts préparant le changement de scene — comme lesprit d’un jeune homme tout en désordre et en préparation’.
Sentiment d’amertume, une main que l’on touche du bout du doigt.
Velut
somnium
surgentium,
Domine,
imaginem ipsorum ad nthilum rediges (Ps.
in civitate
tua
LX XII).
Quid enim mihi eS in coelo? et a te quid volui super terram? (id. )*.
Quasi in silva lignorum securibus, exciderunt januas ejus in idipsum, in securi et ascia dejecerunt eam (Ps. LX XII). Liquefatia eft terra et omnes qui habitant in ea; ego confirmavi columnas gus (Ps. LX XIV)S. In spiritu furoris tui congregatae sunt aquae; Stetit unda fiuens, congregatae sunt abyssi in medio mari (Exode, XV, Cant. Moys.)®.
Les justes sauvés. — Les Egyptiens engloutis. — Image du Jugement!
316
Cahier III
[109] L’Enfer et le Paradis, question de poids ?— La méme eau q[ui] exalte submerge?? Jeudi-Saint. 1¢? avril. — 17° communion de Chouchette 4 l’église de Vieu. Pierre va froidement a la Sainte Table sans qu’on l’ait apergu et communie de son cété! Temps splendide. Les montagnes comme un cratére
démantelé,
comme
un
énorme
récipient
de
neige et de roc dans V’azur contenant une liqueur ineflablement grise, derriére la ligne des peupliers sans feuilles. La rosée étincelante, les prés d’un vert violent, enragé,
faisant
sur
le flanc
du
coteau
comme
des
couleurs d’émail et d’émeraude liquéfiée marquant les épanchements des sources. — Ce grand chateau plein de jeunes méres et d’enfants; — on en a expédié tout un paquet ce matin, d’autres crient dans le jardin, et a
3 ou 4 fenétres il y en a de tout petits qu’on léve et dont la large figure apparait derriére les vitres comme un fromage. La grosse maison carrée ayant 4 son coin comme un fusil une tourelle extravagante aigué comme un cri de joie. — Paysage composé de couleurs fraiches et intenses, vert pur, vert-jaune, bleu du ciel, violet. —
Ce sage vieillard?. Paysage
encore
décomposé
et déséquilibré.
Ces
couleurs violentes au milieu de la masse hivernale.
[110] Un
enfant
qui attache la vigne avec 3 ou
4 brins d’or dans la bouche.
Les armes du nouveau Pape : un aigle menagant qui s’éléve au-dessus d’un paysage tricolore formé par une mer bleue et par une église blanche et rouge sur un rivage oblique. S. Thérése meurt, couchée sur le cdté gauche tenant le crucifix, plutét par la violence d’une extase supréme
q[ui] détache l’4me du corps’. La route blanche q[ui] apparait ¢a et 14 dans la campagne comme un fil qui fait des points irréguliers dans une étoffe de couleur‘.
Abril 1915
317
Sur la route un groupe de cogs et de poules affairés autour d’un tas de crottin, tout ce bouquet en mouvement de crétes rouges. Flore — les touftes de primevéres dans les prés aussi tendres que du beurre, pareilles 4 de jeunes seins, a des coupes de papillons blancs. Vert intense, aussi vert qu’une jeune fille qui rougit jusqu’a la racine des cheveux}. Ce qui empéche d’ouvrir la porte, c’est cette masse de chévrefeuilles! [111] Principe de continuité. — D’un seul coup le péché originel avec toutes ses conséquences — y compris la rédemption.
Samedi-Saint
[3 avril]. Promenade
par une pluie
battante, Don, Chavornay, Talissieu, Artemare. Cette
vallée du Rhéne par ces temps de pluie et de vapeur qui me rappelle étrangement Foutchéou jadis. Paques [4 avril] : pluie torrentielle toute la journée’, Le soir par une échancrure des nuages la montagne noire et ruisselante d’eau et de neige.
La terre s’amollit, ses pores s’ouvrent, et une épaisse vapeur s’en exhale.
Présence tout d’un coup comme une colonne d’or, comme le héros qui sonne tout-a-coup au milieu de nous en tombant sur ses deux talons (armute). « La lumiére blafarde des rayons lunaires frappe en plein leurs visages tandis que leurs corps sont noyés dans Vobscurité de la tranchée. »
Lundi 5 [avril]. —
Temps superbe. Promenade au
col de la Lébe avec Chouchette, Pierre, Gigette, André, Marc, Bernard, Jean, Georges et Marthe*. Tout le
diadéme blanc des montagnes. La neige.
318
Cahier III
[112] Le jour ot la religion romaine parlera anglais
et francais, souvenez-vous bien de ce que je vous dis : il n’est rien que v[ous] ne puissiez atteindre (J. de Maistre)}. S. Thérése avec une figure rayonnante, contemplant un petit enfant qui meurt et voyant les anges qui viennent a sa rencontre. Cette ignorance s’est érigée en systéme sous le nom d’agnosticisme.
Cette
lourde
ignorance
dont
Platon
dit : qu’elle se targue d’étre le sommet de la pensée humaine: "Ayafia tis mdoa yader?), doxobca elvat peyloTn ppdvyncts?.
Ils sont venus 4 se crever les yeux systématiquement ou, comme
disait Pascal, 4 « courir 4 l’abime en se
mettant q[uel]q[ue] ch[ose] devant les yeux pour ne pas voir» (Mgr Baunard)?.
Jésus « jeune villageois, plein de naiveté, un peu sophiste, prédicateur bizarre, anarchiste a4 quelques égards, faisant des actes qui seraient considérés maintenant comme [113] des traits de folie, tempérament passionné,
pressant,
impératif,
ne
souffrant
aucune
opposition, laissant percer contre ses ennemis un ressentiment sombre, “ sans compter”’ qu’il est probable que beaucoup de ses fautes ont été dissimulées » (Ernest Renan)‘. S. Jean-Baptiste totus vocalis erat®. Jason — Le Pont-Euxin — En avril dans le soleil indécis de ’heure du goidtter les montagnes avec leurs toisons de foréts couvertes de neige* comme d’énormes brebis 4 tribord.
Saison chaotique, tumultueuse, neige, pluie, gréle, coups de vent, le soleil dardant ses projecteurs, une
plaine inondée illuminée une seconde avec un large trongon d’arc-en-ciel tricolore.
April 1915
319
Dans le soleil couchant quand passent montagnes des tempétes de neige roses.
sur
les
Le 12 [avril] par un t[é]l[é]g[ramme] de Lunéville n{ous] apprenons la mort de notre pauvre domestique [114]
Camille
Trontin!,
des
suites
d’une
fiévre
typhoide. Inconvénient des décors de théatre, la fixité, surtout
quand il s’agit d’eflets tragiques. Dans la nature tout Peffet vient de ce quwils ne durent qu’un moment?. Assis au pied d@une énorme montagne couleur de vin. Fragments d’horizon — de longues lignes? lune au-dessus de autre suspendues — ils apparaissent tout blancs évoqués a travers l’azur — enveloppés comme une vestale.
L’horizon fin comme un fil de harpe, comme rebord de ma coupe qui est pleine*.
le
Les vrilles de la vigne — le buis couleur de feu, le feu rouge a travers la fumée. Excruciant®. Le perroquet qui parle sanscrit. Chez les mystiques francais, un peu de cet esprit de retranchement, de parcimonie, de castigation minutieuse de soi-méme qui est un des traits de notre caractére, pas celui qui me plait le plus. [115] Ca lui pend au nez comme un sifflet de 2 sous — Vert comme une queue de poreau [svc].
Deux fleurs de printemps :erythrium dent-de-chien, aux feuilles tachetées de brun poussant sous la neige’, daphné ou bois joli. Le cri du huant ti ti ti ti ti ti! —
320
Cahier III
Le merle qui chantait en février, il siflle maintenant’. L’aubépine signifie défiance, le narcisse orgueil, Pamandier imprudence. Dimanche 18 [avril]. — Voyage a Belley. Fin de Faus: Faust aidé du diable essaye de faire reculer /a mer. Créateur ou d° créancier?.
La grande source verte jaillissant en ondes concentriques. La vigne sur la pente de la montagne. Une jeune vache tirant la charrue. Un homme entre les manches, la femme, un enfant tirant les cornes de la béte, un
enfant 4 cdté tenant un aiguillon avec de gros bas roses attachés au-dessous du genou par des cordons noirts. [116] Voyage en Italie Départ le 27 avril. Arrivée 4 Genéve. Je déjeune 4 la campagne avec les fréres Cingria. Arrivée 4 Lausanne. Diné avec Stravinsky. Dép[art] le lendemain a 10 h. Je trouve Eve Francis dans le train. Le Simplon. Milan, hotel de la Ville. Gennari*. La galerie Vittor-Em-
manuel. Le coucher du soleil sur le Dome. Le comte Galluatti Scotti. Le 29, visite au Dome. Déjeuné tous ensemble a La Cova. Pestalozza, Comte Cara S. Ambroise, S.-Marie des Graces, /¢ Céne du Vinci. Conférence dans la salle du Conservatoire, prés de I 500 personnes. Grand succés. Soirée chez le Comte
Scotti. Toute laristocratie milanaise. F[rancis] joue la scéne de /’Osage. Départ le lendemain a 10 h. Fleurs, Arrivée 4 Lausanne le 30, Salle pas trés remplie. Succés. Vin blanc. Excursion 4 la Tour de Marsan. H. Le lendemain messe en allemand. Genéve. Diné avec le consul, toute la société] genevoise. Lundi 3 mai, le matin achats. [117] Déj[euné] chez le frére de Cingria. Conférence t[rés] brillante a l’Athénée. Déj[euné] au buffet avec le c[onsul] g[énéral]. Fribourg, ville
Aril-Mai 1915
321
trés curieuse? a4 plusieurs niveaux. Hétel Suisse. Conf[érence] toujours t[rés] réussie. Beaucoup de pretres. Dép[art] p[our] Berne. Ambassade, passeports. Létchburg, Arano, Milan. Avis d’une conf[érence] a Bologne. Soirée chez le Comte Tahon de Revel. Le lendemain, réception au Lycaeum, photographie. Samedi [8 mai], départ p[our] Bologne. G[rand] Hoétel Italie. Dimanche, messe 4 S.-Pierre. Promenade a
S. Michele in Bosco. Achille Ricciardi, Raggianti*. Lipspo Prontali. Lundi déj[euné] chez le consul Casaianca. Visites. Conf[érence]. Manifestations. Peppino Garibaldi*®. Mardi 11 [mai], dép[art] p[our] Florence, chemin de montagnes et de tunnels, pluie. Hétel Corona. Pas de nouvelles de Luchaire. Les Offices, Ponte Vecchio, le Déme, le soir départ de F[rancis]. Le
lendemain Jahyer‘. San Miniato, Viale dei Colli. Mr de Luchaire. Puis Fiesole, les roses, les iris en plein champ de blé, glycines, catalpas, acacias, les fleurs partout sans
le faire exprés. [118] Le lendemain, dimanche [16 mai], Dome. Eglise S[an]ta Croce. Le soir Cascine. Lundi le matin
couvent
de
S.
Marco;
manifestations’.
La
sublime Crucifixion de Fra Angelico*. La Madeleine vue de dos embrassant la Vierge. Le musée avec les Botticelli et un autre Angelico, les couleurs sublimées et p[our] ainsi dire glorifiées, le bleu, le rouge, le rose. Le soir, la Chartreuse. Puis a4 limproviste? diné dans
une auberge, retour s[ous] un magnifique ciel étoilé pendant que Jahyer me récite des vers de Dante. Le lendemain musée du Bargello, musée du Déme (les enfants chantant). Départ pour Rome’. Arrivée hotel Marini. Tout de suite impression d’espace, de lumiére et de grandeur. Les palais; les jardins. S.-Pierre (messe), collection de couronnes et d’arcs de triomphe (trop d’or, de peintures et de marbres de couleur), la Confession; la Croix de cuivre de Pie X. La tour de l’édifice
q[ui] tourne avec une grace énorme. La pierre qui a Yair de crier encore sous la scie. Jamais rien de plus ietre. Le soir départ avec une bande de vieux [119] Garibaldiens en chemises rouges. Les quais du Tibre. Le forum avec ses énormes massifs de briques démantelés.
322
Cahier III
Les tapisseries autour des Michel-Ange avec Dieu dans une robe rouge!. Les arcs de triomphe de Titus et de Constantin. Le Colysée. Impression énorme. Toutes les routes de la terre aboutissent 1a, a cet effroyable muscle concentrique, 4 cette cuve, 4 ce pressoir, ceil, débouchés de partout, pour quoi donc voir? Lutter, souffrir. Jusqu’a
ce quelqu’un soit vainqueur?! Odeur délicieuse, celle que je préfére, fumeuse, apparentée aux pétunias’, provenant de petites fleurs jaunes dans les décombres. Le sous-sol étrangement complexe et machiné. Démission de Salandra‘ en fuite. C’est la guerre. Manifestations a la Place du Peuple. — 17 [mai] — Déj[euné] a la Place de Venise. Je me fais expulser de lAmbassade d’Autriche. S.-Pierre. Priére 4 la Confession. Visite du Vatican. Musée ot beaucoup d’hommes-femmes. La beauté commence avec les magnifiques tapisseries de Raphaél. Puis les chambres. Un bas-relief. Un poéte entouré de muses rigides et comme cottées de mailles. [120] Trois choses de toute beauté, sommet de toute la peinture, /’Ecole d’ A[thénes], la Dispute, la Messe, au fond au-dessus d’une Pie¢a. Les loges, le plafond dans un miroir, ces peintures dans le ciel bleu-vert. La
Sixtine. Impression énorme.
Saisissement
de voir /e
Jugement dernier dans cette eau, dans cet azur, dans ce
fluide q[ui] sera notre séjour’. Le plafond, toute la manceuvre des préparations et des mystéres dans une étrange fumée. Cela bouge presque invisible, accumulé dans le tonnerre. Les figures soi-disant décoratives qui sont les Anges a leur office, sources de tous les mouve-
ments. Les Sybilles dans leurs cavernes. Matinée de puissance et de grandeur inoubliables. Le matin en allant a S,-Pierre, plusieurs idées importantes, la figure de mon drame* se précise. L’aveugle, lami, — la main’. — Le soir promenade dans Rome, le Panthéon, Vadmirable jardin du [121] Pincio. — Mardi [18 mail] : S.-Jean de Latran, S.-Marie Majeure, la touchante petite €glise de S.-Praxéde avec ses 2 arches de mosaiques. Le soir, visite 4 Ambassadeur de France, Barrére, ramolli, puis au P. Delaroche 4 S.-Paul in Montorio,
sa maison toute couverte de belles roses. Il demandera
Mai 1915
323
plour] moi une audience au S. Pére. — Mercredi [19 mai]: S.-Paul hors les murs, vaste et magnifique promenoir, par la porte, le péristyle blanc et la campagne derriére. Vers S.-Paul-Trois-Fontaines. Une grande porte qui s’ouvre et derriére un parc de coquelicots, la plaine, les fragments d’un aqueduc aa lointain. S.-Paul 3 Fontaines, ravissant monastére au milieu des roses et des eucalyptus embaumés. Baisé les trois tétes de S. Paul. Le soir S.-Sébastien, Quo vadis, les Cata-
combes, la Villa Appienne, l’Aqueduc 4 travers la plaine. Les galeries dans la pouzzolane', l’église en voute et déja en forme de croix, dans une chapelle la téte de ?Océan, Jonas avalé*, le poisson. — Jeudi [zomai], Tivoli. La Villa Hadriana, entiérement batie en
petites briques comme un travail de mosaique. Monté a pied a travers les oliviers vers Tivoli. Les Cascades.
L’Arc-en-ciel. Limité par lArc-en-ciel. La chevelure éblouissante® et tricolore. Sous la cascade il pousse dans ’abime pour l’accueillir de grandes fleurs pareilles a des cratéres de sacrifices et 4 des pavillons de trompettes. [122] L’eau brisée et emportée en grands nuages, il n’y a plus rien, ni liquide, ni solidite, mais seulement une explosion dans le soleil. Le Pape q[ui] a ouvert aux eaux le double tunnel. Le bas de robe divine 4 la porte de la grotte de Neptune. Au-dessus des grottes, un ciel en lair plein de formes et de volontés. Le temple rond de la Sybille. — La Villa d’Este. Si quelqu’un n’a jamais pleuré 4 fond, qu’il ne cherche pas 4 comprendre ce qu’est ce théatre de larmes parmi les roses et les présences noires. Au bas la couronne des cyprés renversés en arriére et pamés avec noirceur sut le ciel dans le bruit des eaux éternelles qui jaillissent et descendent — répétent l’étrange colonne du haut‘. La belle fille qui se cachait sa figure sale sous un fagot de branches séches, avec des feuilles vettes de quel vert! Un enfant avec elle comme dans les sculptures. La campagne infinie. Le déme de S.-Pierre tout petit la-bas. Retour par le tramway. Séance définitive de la Ch[ambre] Italienne®. C’est la guetre. — Vendredi [21 mai], S.-Pierre — Longue priére et ex[amen] de conscience®
324
Cahier III
[123] Humilité. Deux moyens de se faire petit. Se mettre 4 genoux ou batir autour de soi quelque chose dans le genre de S.-Pierre de Rome. Je suis aveugle. Je n’ai conscience et forme de mon cotps que lorsque tu le prends dans tes bras’, Un peuple en moi. Sygne — Israél — Ce qui n’a pas pu aboutir. Ce qui doit étre et m’explique. Toucher le point juste ot je détruis en toi ce qui ne voulait pas. — S[ygne] a sauvé le Pape, et toi, sauve-moi 4 mon tour. Je suis toute seule dans la nuit! devant le S. Sacrement. — Le soir je veux aller me c[on]f[esser] a S.-Louis des Francais. La route tout autour est barrée par la troupe qui garde le Sénat ot a lieu la séance de guerre. Je vais 4 S.-Paul in Montorio voir laimable P. Delaroche. Il me montre 4 Monte Verde emplacement de la future église 4 construire par mon beau-pére®. Puis descente par le Transtévére. Visite au Cardinal Gasquet, président de la Commission de la Vulgate, dans son beau palais. Visite a la petite basilique Ste-Marie de Transtévére, tout a fait intéressante avec ses mosaiques et la disposition [124] de son cheeur. Tout au fond le siége de l’Evéque, le Pére, devant lui la table ot il distribue le pain 4 son
peuple. Dans les basiliques l’officiant dit la messe, face au public*. Autour, ses acolytes. Un peu plus bas, le cheeur des chantres. Enfin, encore plus bas, le peuple. Cest un peu instinétivement ce que j’avais réalisé a Hellerau pour le 1° ate de /’Annonce*. Cela aussi confirme mes idées sur le cheeur religieux, successeur du chceeur antique et dialoguant avec l’Aeur, ? Officiant (par ex[emple] dans le dialogue q[ui] précéde la Préface)®. En rentrant je trouve une invitation 4 Yaudience du Pape pout le lendemain samedi 4 10h. Y,. — Samedi [22 mai], je vais louer un frac chez le tailleur. Nouvelle invitation a la Messe et 4 la Communion du Pape pour dimanche, jour de la Pentecbte, 4 9 h. Comme tout cela s’arrange d’une maniére frappante et merveilleuse! — Vu le Pape 4 midi moins le 1/,. Petit, vif,
Mai 1915
325
prompt. Pas limpression de grandes vues}. Suisses; gardes nobles, domestiques pourpres, introducteurs en chapeaux [125] a plumes, officiers, gardes nobles, escaliers
4 n’en
plus finir, tapisseries,
parquets
de
marbre. J’arrive derriére un couvent de Lazaristes et une vieille dame noble appuyée sur une canne. Je parle au pape d’une conversion, des signes de renaissance dans la jeunesse intellectuelle, du gouvernement, des conditions de reprise de rapport avec Rome. Le pape dit qu’il n’exige pas un Canossa?’. Il me bénit, moi et ma famille. Cette neige éblouissante, ces cing gouttes d’émeraude a la croix sur sa poitrine, cette autre émeraude a son doigt et la-dedans ce petit homme. Le soit Ste-Marie de Cosmetin, les solitudes de l’Aventin.
C[on]f[essé] 4 S.-L[ouis] des F[rangais], ot l’on me ‘recommande la communion fréquente. Le soir visité Mlle Camille Mallarmé a la Pension Albion. Affiches de mobilisation.
Quand je suis sorti du Vatican 4 midi, toutes les cloches sonnaient, il faisait blanc, cette atmosphére de
pierre brilante. Le pape m’a parlé sympathiquement de Marc Sangnier*. — Dimanche [23 mai], messe du pape, il a un beau profil bien dessiné. Je communie a coté d’une centaine de dames, de bonnes sceuts et de
petites filles. Puis une messe d’adtions de graces. Le matin visite au Musée du Capitole. — Comme une grande colonne de marbre blanc — comme un fit de neige éblouissant si brilant qu’on ne peut y tenir la main‘, [126] Belle statue de Vénus. Ce marbre poli et transparent comme une chair éternelle. Les ombres. Idée d’un dessin. Une femme
ramant les deux bras
en avant; le pied haut sur le [...]°. Grand mouvement. La Diane d’Ephése. Sa poitrine comme le versant d’une colline couverte d’oliviers; ruisselante de cavaliers et d’animaux paissants.
326
Cahier III
Tant que vous voudrez, mon général?!
Midi. Déjeuner avec le P. Delaroche. Promenade a S.-Pierre in Montorio et dans le jardin voisin. SteCécile du Transtévére. L’Arc de Constantin. Le Forum boarium. La Cloaca Maxima. Le Forum. Le Palatin qui me fait une impression sinistre. Moins un palais que la taniére de quelque béte monstrueuse. Toutes ces chambres souterraines, ces passages, ces vues des étages superposés et ce cirque dedans pour s’amuser. La nuit tombait quand je me trouvais dans ces chambres souterraines. Véritable sensation de peur. Le soir la guerre est déclarée. Lundi [24 mai] voyage 4 Albano et au lac de Nemi. Temps superbe. Descente a Castel Gandolfo. Le lac :-bois de chénes [127] qui m’Otait toute vue. Un peu égaré. A midi 144 Nemi. Déjeuné a la Trattoria de Sanétis en vue d’un site admirable. Mon verre rempli d’un vin d’or, la coupe du lac vert (4 coté d’un mur délicieusement rose), la mer aprés la campagne Romaine. A droite four et fabriques moyenageuses. — Retour en flanant par le cété Nord du lac. Genzano, bu du vin blanc en pleine [rue], Ariccia, Albano, Castel Gandolfo. Diné en vue
du lac. Retour par un coucher de soleil époustouflant. Quelle lumiére! quelle terre! la mer 1a-bas. Les aqueducs qui nous accompagnent. Prodigieuse journée. Grande impression de l’Italie pastorale. Les chemins creux qui sentent la laine. Les bergeries souterraines dans le roc. La vieille voie romaine. Le chemin a
travers les rochers. Les chevaux chargés de bois et qui, débatés, se roulent dans V’herbe. Belle route pontificale
en terrasse sous les ormes avec une vue sur la plaine et la mer. Un homme large, solide, comme du granit, qui sent bon Vherbage et le bois de chéne, redoutable 4 tous,
bon a peu de gens, 4 moi seule! tenir comme un comme la foudre.
cheval,
difficile, dangereux 4
soudain,
violent,
rapide
Mardi [25 mai]. Visite le matin aux app[artements]
Mai r9ry
327
Borgia, a la Bibliothéque du Vatican, au Musée du V[atican] (2 Caravage, 1 Titien, 1 Dominiquin surtout).
L’aprés-midi au Musée National. La Jeune [128] Fille d’Antium, la superbe Vénus de Cyréne, |’Hermaphrodite bien significatif tout de méme de ce qu’il y a au bout de tous ces Bacchus et de tous ces éphébes. Cherché Mlle Camille Mallarmé. Au Palatin chez Giacomo Boni. La jeune princesse Santa Borghése. Les fouilles. La maison de Catilina. La salle 4 manger rotative de Néron. Les plantes antiques telles qu’elles étaient du temps d’Evandre. La férule, sorte de fenouil géant. Les huttes de treillage et de bois de la République. Pendant q[{ue] nfous] étions 1a, orage sur Rome. Diné a l Auberge des Césars; bien pittoresque. Je la raméne chez elle. Elle me parle de la Duse, qui m’admire beaucoup. Palais de la Reine Marguerite?. Celle-ci aurait répondu a l’Empereur Guillaume q[ui] lui d[eman]dait de s’entremettre pour la paix : « Les Savoie ne régnent qu’un 4 la fois.» — Au moment du mariage les Vestales remettaient aux jeunes mariés l’eau et le feu. Le feu sur l’autel familial, eau
dans V7w-
pluvium, cet espéce de bassin o¢togonal au milieu de la maison d’ot est venu peut-étre le baptistére. Mercredi [26 mai]. Santa Scala. Thermes de Caracalla. Promenade le long de la muraille du Sud. Visite de M. Bucaille, dela Jeunesse Catholique Francaise. Départ
pour Florence a 6 h. — Magnifique nuit d’été sous le clair de lune. Hotel Cavour. Albano avec sa longue rue. C’est toujours Alba la Longue. Le tombeau des Curiaces : — Dans les maisons romaines on conservait le feu [129] dans Vatrinm (ater) et ’eau dans Vémplwium comme dans nos églises. Chaque maison était un petit temple. Disparu aujourd’hui. Jeudi matin [27 mai], visite 4 la Duse*, 54 Via di Della Robbia. Elle habite dans une petite pension au 3° étage. Recu par Mad. Luchaire, une étrangere, qu’elle connait depuis 2 mois, la seule personne q[ui] soit avec elle. Sa fille est en Angleterre. Elle est poitriCLAUDEL V - 14
14
3.28
Cahier LI
naire avancée, elle a eu un violent crachement de sang cette nuit. Comme elle désire beaucoup me voir, elle
me fait dire d’entrer dans sa chambre avec Madame L[uchaire]. Une vieille femme a la physionomie t[rés] dessinée, teint basané, couronnée d’abondants cheveux
noirs. Voix dans les notes élevées. Un jersey de laine blanche. Elle tousse beaucoup. Elle me parle d’une maniére infiniment humble et touchante du désir qu’elle avait de me voir. Son temps est fini. Elle n’a joué qu’un mauvais théatre, la guerre va balayer tout cela, elle a du moins la joie de me voir et de saluer Pavénement d’un art nouveau. Je mets une dédicace sut un volume de mon théatre, que je vois qu’elle a beaucoup lu et feuilleté. (Camille Mallarmé m’a dit que toutes les corrections que j’avais faites 4 mes premiéres piéces [130] étaient celles qu’elle attendait.) Elle m’a beaucoup parlé de /’Echange, de ce que je dis des femmes de théatre et qui lui parait si triste, si profond et si juste. Elle m’a cité les vers quiterminent mon Théatre : « Paul, il nous faut partir»? et « Mes mains sont vides ». On voyait qu’elle en faisait application a elleméme. Chez la femme, l’A4me ne midrit que quand elles sont vieilles*. Pise. Admirable nuit le dos appuyé au marbre tide du baptistére par un ineffable clair de lune. L’enceinte crénelée tout autour. La vieille porte hérissée de clous avec son verrou formidable. La tour penchée, Une luciole une seconde qui éclaire la face d’Apollon ou la hanche de marbre de Vénus. Une colonne de marbre toute chaude?.
Le matin, le baptistére. Admitable
cavité architec-
turale. Le Dome trés beau. Curieux et trés beaux vitraux. L’escalier de marbre au-dessus du chceur. Tout en haut. Monté a la Tour Penchée. Les cloches. La campagne toscane. La mer. La petite chapelle de marbre prés de Arno, — Uniformité de plus en plus gtande des gens, comme un fleuve qui aprés les vallées ct les cascades, s’élargit dans la plaine plate. — Cette nuit les épiceries encombrées de fiaschi et de salaisons,
Mai- Juin 1915
329
[131] ornées d’une grande balance brillante au milieu, et des gens en chemise rouge qui discutent les bras nus avec une longue pipe a la main, toute la figure parlant et colorée par l’émotion. Les petites filles avec leur toufte de cheveux noirs. Le marché dans le cloitre. Départ pour Génes a 3 h. 30. La veille perdu mon pardessus. Idées de dessins pour les évangélistes. Celui qfui] lit dans un livre avec un Ange. Celui qui biche un livre les 2 poings dans les oreilles. Celui qui écrit sur son genou et qui attend linspiration avec cette espéce de sourire niais et sublime. Celui qui rature en se grattant la téte. Celui q[ui] écrit rapidement en faisant signe de Vautre main qu’on lui laisse la paix. Celui q[ui] éloigne 'son papier pour le lire. Celui q[ui] médite et prie, les deux mains derriére la téte. Celui qui serre les poings?. Le désir sacré. — L’exclamation ardente?.
Le Campo Santo, plein de la terre apportée de Jérusalem. Les peintures d’Orcagna si convaincues. Les corps frais que vomissent les morts et dont les anges s’occupent. — Beau vase grec. — Deux types de femmes, la Duse a raison. Pas seulement la mére de
famille, la Bacchante*. Départ pour Génes. Voyage t[rés] désagréable. Chaleur. Quantité de tunnels. Génes. Magnifique ville, palais splendides, d’un [132] caractére, d’une couleur, d’un dramatique, d’un pittoresque
incomparables*. L’homme
Vintimille.
d’affaires,
homme
3 Américains
typiques.
de loi et son
clerk.
L’homme de loi sourd, avec un ri€tus qui découvre ses dents ayant l’air de sucer la conversation au moyen d’un long cigare. Nice. Bain, roulé rudement sur les galets, par une mer brutale. Avignon, je retrouve ma femme. Le lendemain Mondevergue, visite 4 ma sceur. Beaucoup maigri, jaune, l’ceil brouillé. Mieux moralement. Elle me parle avec estime et sympathie des sceurs et des médecins. Lyon. Croisé avec Eve Francis. Hostel. Mes enfants. Fin du voyage. 1° juin 1915.
330
Cahier III
Dans les fresques de Pise, Benozzo Gozzoli, les 3 jeunes anges chez Abraham, ils mangent, celui q[ui] a la bouche pleine. Avignon. L’arcade, la rue, le [...]. L’évangéliste sous un parapluie?.
Lyon. Le P. Perroy’. — Antoine? a qui je parle de Vaspect étonnamment [133] sculptural de l’abside de S.-Pierre me dit que cela est dt a ce que la pierre est /ayée, ©[eSt]-a-d[ire] taillée comme avec un ciseau et un fer de hache, tandis que maintenant elle est bouchardee, c’[est]-a-d[ire] écrasée avec une espéce de masse a dents plus ou moins serrées.
Etrange temps voilé. De la lumiére et méme du soleil sans qu’on en voie la source. Les arbres font une large ombre ronde sur la prairie sans aucun soleil. La nuit — aveugle — comme travers eau d’une source?.
le soleil sur le sable a
Sémélé dans la pluie et l’arc-en-ciel, dans la pluie brillante sur elle aussi douce que des grains de riz. Promenade sur la créte de la montagne. Les prés entre les grands mélézes. — Retour, l’orage qui monte de la vallée précédé d’un rideau et déme de vapeurs rousses, et suivi d’éclairs, de tonnerres, et d’une pluie
immense sur tout le pays. Pareil 4 une coquille onglée, a des griffes de lion. A 3 h. du matin, mal éveillé, un oiseau q[ui] chante note par note, un jardin entiérement rempli de feuilles de roses.
[134] « Platon punit dans l’Enfer de sa République les vertueux par habitude » (A vérifier)>. Droiturier®. Concave comme
une feuille de rose.
Juin 1915
331
La terre — la profonde vallée pleine d’un bruit de grenouilles, comme un collier de grelots. A la Sixtine les grappes d’hommes nus qu’on juge, comme des cerises 4 pleines mains qu’on puise dans un panier. Départ d’Hostel vendredi 11 [juin] au matin. Lyon — Vartot!. Arrivée a Paris samedi 12. Samedi
—
19 [juin]. Voyage a Villeneuve. Le canon
dans le lointain comme un bruit d’orage dans lodeur des foins coupés et le chant des oiseaux. Retour le mardi 22.
'
Osculetur me osculo oris sui; meliora sunt ubera tua vino,
fragrantia unguentis optimis. Sub umbra illius quem desideraveram sedi, et frultus ejus
dulcis gutturi meo. |
Introduxit me Rex in cellam vinariam ; ordinavit in me caritatem.
Fulcite me floribus, Stipate me malis quia amore langueo (Cant.)?. [135] Je connais une personne q[ui] étant dans cette oraison entendit une belle voix chanter. Elle est t{oute] convaincue q[ue] si ce chant se fat prolongé, son ame aurait quitté le corps par l’excés du plaisir et de la suavité que N.-S. lui faisait godter; mais le Divin Maitre fit taire la voix. Quant a la personne q[ui] était dans cette extase, elle pouvait bien mourir, mais non pas prononcer une parole p[our] faire finir ce chant cat le mouvement extérieur était tellement anéanti en elle que le moindre signe lui devenait impossible (S-Thi)*. De Mondevergnes!, la pauvre Camille envoie un chapelet 4 maman faits [sic] avec une graine 4 forme de coeur qu’on appelle « larmes de Job».
(Sur les contemplatifs.) Aussi faut-il que N.-S. leur
332
Cahier III
donne, non l’eau q[ui] rafraichit, mais le vin q[ui] enivre afin qu’en proie 4 une sainte ivresse, ils ne sentent plus en q[uel]q[uJe sorte leurs souffrances et quwils aient la force de les supporter (S. Th., /e Chemin de la Perfection, xx).
Tout le chap. xx est consacré a /’eau vive et a ses propriétés. — O mon tendre Maitre, quel ineffable bonheur ce serait que de se voir submergé dans cette eau vive! Jusqu’a y perdre la vie! Pensez-vous que cela soit impossible, [136] mes filles?... J’en connais une a qui cette eau vive était prodiguée en si grande abondance qu’elle séparait presque son ame de son corps... A mon gré la soif n’est que le désir d’une chose dont n[ous] avons si g{rand] besoin, g[ue] n[ous] nfe] saurions sans mourir en étre entiérement privés. Chose étrange le manque d’eau nous tue, et sa trop g[ran]de quantité n[ous] dte également la vie, comme les noyés en sont la preuve (S. Th.)?. « Une faute finie ne saurait mériter une peine infi-
nie.» — Précisément elle n[ous] sépare de l’infini et nfous] enferme dans le fini’.
rer juillet. Je rentre aux Prisonniers de guerre‘.
Le Mauvais Riche demande a Lazare dans le sein d’Abraham de lui mettre seulement une goutte d’eau sur le bout de la langue.
Une grande ville au soleil couchant brillante comme un tas de pierreries. Chaque homme a une triomphe a sa portée.
lutte, un
martyre
et un
N.-S. promet a celui qui donnera un verre d’eaw en son nom le centuple et le royaume du Ciel’. [137] Ouvre sollicite.
un
cceur transparent
au plein qu’il
Juillet- Aout 1915
333
Vu au Val-de-Grace un savant Roumain, M. Marbais, qui, parait-il, a trouvé un sérum contre la tuberculose. Grand, gros (stigmate du penseur sédentaire),
avec une large figure basanée, de beaux yeux bruns, un front superbe et d’abondants cheveux gris. Si Madeleine avait coupé ses cheveux par pénitence,
avec quoi aurait-elle essuyé les pieds du Seigneur? Visite de Gallimard au Ministére qui vient me faire
de nouvelles propositions. Trois femmes du monde en vétements de deuil avec parmi les longs voiles de crépe trois honnétes paires de beaux yeux bruns brillants. Visite de Reine, 10-17 j[uille]t.
Qwils il se b bourrent jusqu’aa en roter! | [138] rf aott. Promenade a Fontainebleau. Valvais. Samois?, [139] Je ne trouve rien de plus propre que l’eau pour exprimer les choses spirituelles. Aussi en suis-je grandement amie et l’ai-je considérée avec une attention
toute
particuliére
(S. Th., 4 Chateau intérieur;
4 dem[eure]). L’autre bassin se trouvant dans l’endroit méme
ou
jaillit la source se remplit sans aucun bruit. Que si la soutce est fort abondante comme celle dont nous parlons, elle fournit tant d’eau a ce bassin qu’il en sort un gros ruisseau qui coule sans cesse, sans qu’il soit besoin pour ce sujet d’user d’aucun artifice (7d.)?. ron
.
.
.
Fcrire dans un frais matin de juillet et ?ombre des feuilles sur le papier. Anniversaire de la Guerre*. — Souvenir du 2 aoitt. Pluie. Visite chez les Giacchi. L’examen des chevaux sur Je « Griin ». La triste messe le matin a Sainte-Marie.
334
Cahier III
Le vieillard 4 longue barbe qui se prosterne a soin d’emporter un petit bout de papier crasseux qu’il pose par terre pour ne pas se salir le front. [140] L’affreux pou. Arrivée 4 Hostel le 6 aoat, jour de ma naissance.
Taine affreusement louche, le matin il mangeait sa soupe en manches
de chemise, assis au milieu de ses
chats. Trés questionneur.
La priére du soir a la petite église de Belmont. La voite des tilleuls éclairée par la lanterne.
La verge de Moise changée en serpent. L’éclair de la vie? Le serpent d’airain. Les sabres qu’on vient d’aiguiser, encore tout chauds de la meule. Le sowffe du canon. Les hommes autour de la piéce, rouges, suants, dépoitraillés, dans le tonnerre et la fumée.
Ces deux beaux yeux en moi pendant que tu étais au sein de ta mére, comme
des étoiles futures?.
Un bras nu d’enfant dans les groseilliers. L’abbé Fontaine m’écrit qu’il va étre nommé Curé de S.-Antoine des Quinze-Vingts. [141] Souvent, par une maniére que je nfe] saurais expliquer, ces paroles divines comprennent plusieurs sens, Outre celui qu’elles expriment par le son... ce mode d’entendre q[ui] est si délicat et si admirable, qu’on ne saurait assez en bénir le Seigneur (S. Th., 6° dem|feure], chap. 11)°.
Celui q[ui] a la priére de Josué peut arréter le soleil, arréte aussi quand il lui plait les puissances de |’Ame et tout Pintérieur (zbid.)*.
Aott 1915 _
335
Dans la forét inscription sur un sapin : La mort a - Phomme; Cormaranche 2 k. goo, Altitude 679 m.'. Lorsque dans ces 2 detniéres demeures, Dieu est dans une ame comme dans le ciel empyrée, tellement uni a elle qu’elle n’est plus qu’une méme chose avec lui, cette Ame est ravie hors d’elle-méme et se trouve si
_ abimée dans la joie de le posséder, qu’elle est incapable de comprendre les secrets qu’il expose a sa vue (6 Dem., Iv). Et comment ferait-il p[our] aimer une créature aussi imparfaite q[ue] moi? S’il m’aimait je l’estimerais moins’. [142] Et jam nemo me despiciat ! (Cant., VII, 1)’.
Un ramponneau sut le nez. Un jour de brume. Le bateau qui sombre dans l’eau grasse. Une large plaque d’huile irisée. Quelques tétes qui s’agitent un moment. Comme une pannerée d’épluchures.
La lune, une vieille dame qui n’a pas d’oreilles‘. La tente du platane sous le clair de lune — le chemin parsemé de taches phosphorescentes’ — le champ labouré noir comme du velours — le groupe formé par les beeufs, le char et une paysanne bleue — la joubarbe séche sur le mur comme un cierge et comme une fusée. Un ceil rond vissé dans l’orbite comme clef anglaise®.
avec une
La pelle du four banal et le crochet p[our] remuer le brasier. Un employé de Caisse d’Epargne, mon confrére de S.-V[incent] de Paul, me raconte que 70 personnes de
338
Cahier II
chateau intérieur. Souvent ce corps méme ne se connait plus : il participe visiblement a cette mystérieuse vigueur dont Dieu remplit l’Ame, quand, aprés Pavoir introduite et la gardant avec lui dans son cellier, il Venivre du vin de son amour. I] sent comme une
nouvelle vie qui lui vient de 1a, de méme qu’il sent la nourriture fortifier ames élevées 4 un mais le travail et la est en elles allant
tous ses membres. Ainsi la vie des état si sublime n’est pas le repos souffrance; la force intérieure q{ui] beaucoup au dela de ce qu’elles
peuvent éxécuter... (7d.)}. Croyez-m’en, p[our] donner a N.-S. une hospitalité parfaite, il faut q[ue] Marthe et Marie se joignent ensemble (7d. )*.
Jai dit q[ue] q[uel]q{ue]fois le démon n[ous]finspire des desseins q|ui] sont au-dessus de nos forces afin de n[{ous] faire abandonner ce qu’il est en n{otre] pouvoir de faire p[our] le service de Dieu, et afin de nfous] tenir dans la pensée [147] q[ue] nfous] avons satisfait a tout quand nfous] avons désiré des choses impossibles (zd. )*. Wsensainte: Unicus, multiplex, discretus, certus, omnia prospiciens*.
Si vous saviez combien de méres seront en enfer pour n’avoir point donné au monde les enfants qu’elles devaient lui donner (Le Curé d’ Ars). Les mains du mourant levées en l’air comme pour chercher une harpe’. « On n’est pas de bois.» nalité ?»
—
« Est-ce
une
person-
4-7 sept{embre]. Visite de Darius Milhaud’. Effervescent et insipide comme de |’eau de seltz.
Septembre 191s
339
La profonde vallée poudroyante dans le soleil d’ou monte le bruit de la batteuse. De beaux enfants q[ui] sentent la framboise et la créme fraiche.
Retour a Paris lundi 13 [septembre]. — Travail au Ministére aux Prisonniers de Guerte.
[148] La mort des ames q[ui] ont brilé de amour de Dieu est souverainement suave et douce : la douceur de mourir surpasse tout ce qu’elles ont jamais ressenti de plus doux dans le cours de leur vie spirituelle. La cause de cet inénarrable plaisir qu’elles gotitent en , mourant, c’est qu’elles succombent a la force méme de ' Pamour divin. Prés de s’unir 4 Dieu, elles commencent
a entrevoir sa beauté, qui va se donner 4 elles et les transformer en soi, et l’impression de béatitude divine causée par cette vue est si puissante qu’elles succombent. Ainsi leur mort commence par un élan extatique d’amour qui brise leurs liens et se termine par la claire vision et la pleine possession de Dieu (S. Jean de la Croix, Vive flamme d'amour, Cant. I, v. 6)}. Une carmélite prés de mourir aS. Thérése : « O ma mére, que je vais voir de grandes choses?!» Le feu et élément qui liquéfie [149] le monde qui a Pair si solide sous fumée condensée?.
nos
pieds et qui n’est que
de la
Suarez mourant‘. Je n’aurais jamais cru qu'il fat si doux de mourir. Du 23 au 30 s[eptembre], voyage et séjour a Villeneuve. M. le curé Godet. Le colonel Balaran. Le 25,
la grande offensive, 20 000 prisonniers. N[ous] l’apprenons lundi. Nolite possidere aurum atque argentum®. — Ce conseil évangélique est aujourd’hui rempli par tous. On ne posséde plus que du papier, on vit de foi.
340
Cahier III
Le 21 septembre, j’apprends ma nomination 4 Rome, chargé d’une mission économique en vue d’étudier la place que la rupture des relations avec l’All[emagne] peut faire a la France en Italie. Le 7 o€tobre, installation de M. Abbé Fontaine, comme curé de Saint-Antoine des Quinze-Vingts. Le 10 oétobre, chute de Delcassé!.
Le 4 o€obte, je mets [150] de la rue de Lubeck.
Chouchette
a la pension
La grande tige desséchée de la gentiane jaune pareille a un baton de chantre.
De Max. Vera Sergine®. Mceurs gens de théatre.
dégotitantes des
17 o€t{obre]. Le matin l’abbé Fontaine. Le soir Pitt et Cingria.
Parti le mardi 19 [oétobre] de Paris. Profonde dépression a cause des mauvaises nouvelles des Balkans®. Lyon. Pagnon, Morel, Coignet, Lignon‘, Aguettant®. Vendredi 22, Hostel. Samedi, admirable promenade, les foréts de feu et d’or. Dimanche, Lavancher. — Lundi, pluie.
Dieu sifflera et il appellera contre toi les nations des extrémités de la terre (Isaie, d’aprés Mgr d’Hulst). La baleine a avalé Jonas et nous, nous pouvons bien avaler la baleine.
Vie de Mgr d’Hul# par Mer Baudrillart. — Curieux et presque stupéfiant de voir limportance que cet homme pieux, doéte et intelligent, [151] attachait a la « science » et aux « savants »*. Quand on a fréquenté
des érudits, il est facile de se rendre compte qu’il n’y a pas de gens moins siirs et qui se rapprochent davantage du type du maniaque et de l’aliéné. La science nous
Septembre-Novembre
1915
341
invitant constamment a de vastes conclusions tirées de faibles données
est un irritant, un excitant vraiment
dangereux pour limagination. L’affirmation et la conviction remplacant la certitude. — La critique biblique. Difficultés purement artificielles. Les patriarches, les enfants de Dieu et les filles des
hommes,
problémes qui ne sont « angoissants» que pour les savants, et dont nos péres se tiraient avec un peu de gout, un peu de bonne humeur et beaucoup de soumission. — Au fond les bourgeois du xrx® siécle étaient embarrassés des histoires trop poétiques de la Bible, comme un parvenu qui rougit de se promener avec sa vieille mére en costume trop pittoresque. — Cest un temps ot rien n’arrivait, le temps des romans d’André Theuriet. Nfous] nfous] rendons compte aujourd’hui [152] quwil peut tout de méme arriver quelque chose.
21 noviembre], S.-Cécile au Transtévére. — 22. S.-Clément. — 2 décembre, St-Bibiane. — 4. S.-F[ranclois-X[avier]. — 26. S.-Laurent-hors-les-murs. — S.-Etienne et S.-Etienne le Rond.
Coeli —
Du
Epiphanie, S.-Athanase, messe
26 au 1, Ara
de rite grec
— S.-André Della Valle, messe de rites orientaux. — 20 janvier, S.-Sébastien. — 21, S.-Agnés, S.-Pierre
aux Liens. — 25, S.-Paul hors les murs. — 29, Trinité des Monts, S.-F[rang]ois de Sales'. Départ pour l’Italie le mercredi 27 o€t[obre] 4 14 h. de Vaprés-midi. Chambéry. Couché 4 Modane. Descente sur l’Italie par un temps splendide. A Turin, la pluie. Visites...2. Départ pour Rome, w[agon]-l[its]. Arrivée par un temps superbe. S.-Pierre. Quelqu’un me frappe sur l’épaule : c’est le P. Delaroche. Déjeuné avec lui. Villas de Monteverde. [153] Le lendemain recherches d’appartements. Hotels. Mardi, appartement a la Tr[inité] des M[onts]. Diné avec de Billy. Mercredi [3 novembre], Tondini, Schaffer, Toti. Jeudi, promenade au Pont Milvius, retour par la Villa
Borghése et le Pincio. Arbres chargés d’oranges et de
kakis.
342
Cahier II
L’agent de location Toti grisatre et poussiéreux comme une teigne de tapis. 6 nov[embre]. — Musée des Thermes. Admirables Statues de Bacchus et des Niobides. S.-Marie Majeure. Magnifique place du Quirinal. Le rouge de la terrasse et le jaune du palais. Les Grecs ont manifesté ce qu’il y a vraiment de divin dans le corps humain, l’exemplaire supréme de tout univers, a lui seul toute la création. — Devant cette stéle égyptienne violette, tout 4 coup la sensation brélante d’un jour de Empire Romain, lés rapports avec Egypte comme une chose contemporaine. Au Piémont ce groupe composé d’une femme, d’une vache et d’une brebis. Les collines aux environs de Rome avec ¢a et la sur leurs versants des troupeaux de moutons!. Rome la nuit vue de la terrasse de ’hotel. La colonne
d’ Antonin émergeant d’un carrefour plein de lumiére?. [154] Promenade s[ur] la terrasse du jardin Médicis. La verdure q[ui] est léternité, les feuillages épais, séclusion sans réclusion, les pins le déme, les cyprés Pinvocation, les roses la volupté, les palmiers la cataracte végétale, ’exubérance de la terre, ou la priére exfoliée, la fontaine dans le milieu’. Dieu est le lieu des esprits comme
l’univers est le
lieu des corps (Malebranche)!. Tu nous
a faits pour toi,
6 mon
Dieu, et notre
coeur est sans repos jusqu’a ce qu’il se repose en toi (S. Augustin)®. Cest une dure destinée que d’étre le Pére de tous les hommes'®.
Le soleil qui se couche comme une « gloire » 4 droite du Dome de S.-Pierre. La maison Dieu littéralement’.
Novembre-Décembre
1915
343
En pensant 4 mon passé, je trouve parmi mes années parfaitement heureuses, c’[est]-a-d[ire] celles ot jai joui de la tranquillité intérieure et ou je me suis trouvé en harmonie
avec le milieu extérieur,
1892 a Paris,
1899 a Foutchéou, et, en somme, 1915 4 Paris, 4 Hostel et a Rome. Le Colisée vu d’en haut. Le Forum.
[155] O bone vir et bone frater, latebas animam meam (S. Aug. a S. Paulin de Nole)?. Seigneur, tu as connu toutes mes pensées de bien
loin... tuas prévu toutes mes voies, la parole intelligible (sermo) n’est pas dans ma langue... Admirable a été ' faite (par sa réalisation) ta science de moi, elle a été confirmée (par lévénement) et je ne puis rien 1a contre. Quo ibo a spiritu tuo et quo a facie tua fugiam ? (Ber CX OOX WIT). Et ego provocabo eos in eo qui non est populus, et in gente Stulta irritabo illos. Ignis succensus eft in furore meo, et ardebit usque ad inferni novissima (Ignis ardens = Pie X) devorabitque terram. Mea et ultio et ego retribuam in tempore. Ubi sunt dii vestri in quibus habebatis fiduciam ¢ Videte quod Ego sim solus et non sit alius Deus praeter me (Deut. Cant. Moys.). Levabo ad coelum manum meam et dicam: Ego vivo in aeternum®.
[156] L’4ne de Balaam — Ce n’est pas qu’un 4ne parle qui est étonnant, c’est qu'il se taise.
Dieu a divisé les nations pour assurer la liberté de son Eglise et avec elle la liberté du genre humain (Lacordaire 4 Mme Swetchine)‘. Le prédicateur maigre q[ui] parlait avec tant de feu et d’éloquence le jour de la S.-Nicolas dans cette église du Velabre,
au milieu des matrones
romaines
dont
Cahier III
344 qjuel|q[ues]-unes
donnaient le sein. — Comme un magnifique salon doré pour le pauvre peuple dans ce quartier de misére. S.-Agnés hors les murs. S.-Laurent hors les murs — La voie Appienne.
19 Corso d'Italia. Appartement Della Gindia Santasilia. Le Comte Billy. :
Primoli,
Besnard,
de Donna
Maria
les Carrére,
les de
[157] Un jour Claude Bernard, a l’amphithéatre de médecine, passant a cdoté de viscéres humains, observe qu’un organe attire particuliérement les mouches : c’est
le foie. « Mais il doit y avoir du sucre la-dedans », pense-t-il. Et il découvre la fonction glycogénique du foie. Cest un procédé d’association didées tout a fait analogue a celui de la poésie. Un Rimbaud en aurait fait un vers par ex[emple] : Noirs essaims attachés au sucre des vieux foies.
qui aurait fait rire les imbéciles. Mais Vimpulsion motrice est la méme. La source premiére? de la science n’est donc pas le raisonnement, mais la vérification en détail d’un couple proposé par l’imagination. Ces grands obélisques.
palais
couleur
de
soleil.
—
Les
Le progrés est un symptome. Un symptéme de quoi? — A la bonne heure! quel plaisir de causer avec des personnes intelligentes! C’est précisément vers ce point que j’ai conduit la conversation. Je pense que le ptogrés, un progrés visible et accéléré, est toujours un symptome de fin. La fin de quoi? — La fin de ’humanité (Solovief)?.
[158] A Rome depuis le commencement tendance a Péglise ronde sans cloisonnement intérieur, le Colysée,
Décembre
1915
345
le Temple de Vesta, le Panthéon, S.-Etienne le Rond, les églises de Borromini. La cavité, le creux, la cloche.
La hutte de Quirinus avec le trou en haut pour la fumée}.
Beauté
de la messe
dans
le décor
des
églises
romaines, soie, encens, or, peintures, marbre. A Ste-
Marie Majeure une maison d’or portée par les anges au milieu de nuages d’encens, une colonne de porphyre rouge entourée d’une guirlande d’or qui émerge du milieu des sacrifices’. Noél chez les Sceurs de l’Assomption ot va Gigette. Elles entrent processionnellement avec leurs grands _ manteaux blancs a traine, un cierge a la main, robe brune avec une croix sur la poitrine. Pour la méditation a genoux dans leurs stalles tout enveloppées de leurs voiles. Le brun de la pénitence qui devient la pourpre du triomphe. Rencontre de Guitry qui me demande /’O/age pour une tournée dans l’Amérique du Sud’. [159] G[ran]d’Messe de Noél a S.-Marie Majeure. La planche de la créche dans un reliquaire de cristal. La coupole de mosaique comme un tapis usé par Péternité, le ciel en projection, la cuve de marbre aux
tons de chair, la foule entre les colonnes, léglise illuminée dans toute sa longueur. Toujours Pidée de beauté, de couleur, de paradis. La messe parmi les flammes. Sous une votdte d’or le Pontife qui dit la messe dans les flammes, en bas la tombe splendidement
arée. — Les Sceurs qui regardaient le menton 4 la balustrade, ’amande du visage (avec un bout de serretéte noir en haut) encadrée dans la fraise tuyautée, Vame qui met la face au guichet. — L’Ara Coeli. La petite fille en robe marin qui préchait avec éloquence sur une estrade. La statue de Léon X. Celle de Grégoire XIII. Idées de statues funéraires, le bras qui pend de toute sa longueur tient un chapelet. Un autre la téte
3.46
Cahier III
et les cheveux pendants. Un autre a plat ventre, la téte sur un livre, tournée de profil; les mains renversées.
Une statue [160] de moine (par ex[emple] S. Thomas d’Aquin) 4 genoux sur un livre qui a l’air de l’emporter de ses 2 ailes battantes. Une statue de sainte couronnée d’épines, un genou au pied de la croix et la main qui en atteint la traverse. — La créche de l’Ara Coeli avec une porte ouverte qui laisse voir un croissant de lune et tout un paysage avec de petits personnages lointains q[ui] arrivent. — S.-Pierre aux Liens. Le Moise}, Chez le comte Primoli, le 28. Causé avec la Duse, pleine de flamme et de vie. — P[rimoli] nous raconte
Phistoire d’une femme belge devenue folle, qui avait les bras si fortement croisés sur sa poitrine qu’on ne pouvait parvenir a les desserrer. Quand cependant on put les ouvrir on y trouva un enfant mort. — P[rimoli] nous parle aussi de son oncle le Cardinal Bonaparte qui était bien embarrassé pour dire sa messe le 5 mai qui était 4 la fois ’anniversaire de la mort de Napoléon et le jour de la Saint-Pie. — Il me donne une grande photographie du plafond de l’église des Scalzi par Tiepolo, détruite par les [161] Autrichiens. Un grand ceillet dans sa main comme un javelot?. 31 décembre. Promenade sur |’Aventin. Saint-Sabin. Sainte-Sabine, toute en fouilles et en démolitions. Saint
Alexis au milieu de cet Institut d’aveugles. Le cloitre de marbre blanc et les orangers au milieu. Le puits de marbre*, Au dedans la statue de S. Alexis et lescalier au-dessus de lui soutenu par les anges. La petite place de Malte, le trou de serrure par lequel on voit une allée entre des murailles de verdure et le dome de S.-Pierre. S. Anselme
bénédiétin,
les 2 alphabets
entrecroisés.
Le chemin tournant q[ui] descend de l’Aventin. Le Testaccio. Les chemins bordés de murs. Une église abandonnée ot poussent des herbes. Ste-Marguerite; Les Thermes de Caracalla. Retour par le Palatin. Un
Décembre 1915
347
coucher de soleil jaune, le soleil dissous dans sa propre splendeur. Bonne fin d’année. Visite a la Farnesina. Admirables peintures de Raphaél, Vhistoire de Psyché1. Raphaél est le poéte de Pazur, lui seul a créé des étres qui soient dignes d’un ciel parfaitement bleu. Psyché si candide devant Jupiter avec les 2 colombes blanches qui battent des ailes derriére elle. Mercure volant. Psyché sur un char. L’Amour que Jupiter baise sur le front. Le groupe des 3 femmes. Quelle peinture de béatitude! Le [162] Polypheme de Sebastiano del Piombo dans [autre salle avec la mer d’un bleu de gentiane. — S.-Pierre au coucher du soleil — S.-Sylvestre, foule dans son église. La crypte, le reliquaire avec le crane. A midi la statue _ de la maison du Bernin, les bas-reliefs de Varce de la r Paix.
1916 ef janvier. Le matin, brouillard. Puis beau soleil. A 11 h. &% réception a l’Ambassade. Chez le Pape. Pauvre discours de B.1. L’aprés-midi visite. Les Besnard. Diner 4 l?Ambassade avec le Personnel.
Revenu a pied avec les de Billy. 2 [janvier]. Messe au Gésu. Visite au P. Delaroche, blessé 4 la jambe. Rome toute rose du haut S.-Pierre in Montorio dans le soleil couchant.
La substance : ce qui fait le Christ dans
de
Eucharistie
est ce q[ui] fait le chrétien dans la communion.
Transformisme : l’animal q[ui] est supposé changer de forme était ou adapté ou inadapté a sa fonétion primitive. S’il y était adapté, pourquoi change-t-il de forme? S’il y était inadapté, comment pouvait-il vivre?? 3 [janvier]. Journée avec le Marquis Misciatelli et le Clom|]t[e] Primoli. Le [163] matin a 10 h., jardins du Vatican. Le mur garni d’orangers chargés de fruits. Le Casino de Pie IV avec sa cour ovale au bas de cette
cote couverte d’arbres. Diner au club, palais Sciarra. Le soir’ S.-F[ranc]ois a-Ripa avec la chfapelle] de S.-F[ran]cois d’Assise. Chez Jacomina SJ...]8, son portrait, sa¥pierre; le touchant asile de S.-Cosmas avec ses 2 cloitres, ses vieillards qui se chauffent, la vieille cen-
tenaire, le tableau de Pinturicchio, S. F[rang]ois et Ste Claire, S. Onuphre, la chambre du Tasse, son buste
Janvier 1916
3.49
avec les lauriers q[ui] hérissent la téte, le chéne mort. Le cloitre avec la vie de S. Onuphte, le petit moine avec son pain si touchant. Visite aux Carrére malades. La créche de S.-F[ranc¢]ois a Ripa, avec les moutons et la ville en perspective de chaque cété.
The keen vibration of bright light is hell (Young, illustré par W. Blake chez le c[om]t[e] Primoli)'. Aion de graces. Comment faire? Est-ce moi qui... 2 promenades
a Ostie. Castel Porzano avec Primoli
, et Taigny. Lettre 4 Henriette Van [...]?. Vu plusieurs fois la Duse’. La charité envers
soi-méme
dont le nom
est aussi
pénitence et humilité. Voltaire a Damilaville*. Vous et moi ne pourrons nous faire ce que Douze faquins (les Apétres) ont pu accomplir? [164] Rome, avec ses églises, comme des pleins de Vor du soleil couchant®, pleins d’encens, avec des parvis couleur de rose Dans l’arch[itecture] dite baroque alliance la sculpture,
de V’archite€ture
réservoirs de feu et trémiére. étroite de
et de la peinture,
et
passage facile de l’un a l’autre*®. S. Andrea delle Fratte. S. Augustin, dans /a C7té de Dieu, cherche 4 nommer
cet amour intrinséque et organique des éléments q[ui] n[ous] constituent et l’appelle du nom de pax’.
HeSterni quippe sumus®. Qui autem inquirunt Dominum animadvertunt omnia’.
Et visitatio tua cuStodivit Spiritum meum*.
350
Cahier III
La charité met entre nos mains le pouvoir de refaire un monde meilleur. Adinventio expettationis». Quasi mane expansum super montes*.
On ne respecte que les choses dont on ne se sert pas. — Peut-étre q[ue] je v[ous] respecterais davantage si v[ous] ne m’étiez pas si nécessaire’. 21 janv[ier]. S.-Agnés. Aprés la G. Messe [165] on bénit les agneaux dont la laine servira a la fabrication des palliums. On en apporte 2 dans des corbeilles attachés par des rubans, l’un verts, l’autre rouges. Ils ont de drédles de gros bouquets entre les oreilles. La PEvéque les bénit. Le cardinal Mercier du haut d’une tribune assistait 4 la cérémonie. L’aprés-midi S. Agnés a la place Navona, batie sur emplacement du lupanar ou la sainte fut exposée et ot un ange préserva sa vertu. Visite du souterrain, restes des pourtours du Cirque.
Coucher de soleil sur le Tibre. Ces maisons délicieusement roses et grises dans le ton du dessous de ces champignons qu’on appelle des mousserons‘. Est-ce que la souffrance est réellement un manque,
une privation ?Quand je me pince le doigt, il n’y a pas privation, il y a au contraire excés, surcharge de la sensibilité, travail violent et trop intense, déséquilibre. Henri malade d’une petite fluxion de poitrine. Camille Mallarmé prépare une conférence sur moi pour le 2 février. In cogitationibus impii interrogatio est (Sap.)°. Per exteriora ad interiora; per interiora ad superiora (S. Bonaventure)*.
Janvier-Février 1916
351
[166] 29 janvier. — S.-F[ranc]lois de Sales. — Rencontré au Pincio Mad[ame] de Seckendorff!!! Son mari, officier de cavalerie, fut tué le 24 aodt dans une
charge 4 Saint-Hilaire prés de Cambrai. Elle apprit la mort par une lettre que sa belle-mére recut d’un officier pendant qu’elle-méme en lisait une de son mari. Son frére, de la Croix-Rouge Belge, est prisonnier a Berlin. Elle est 4 Rome depuis le mois de mai, plus ou moins chassée par sa belle-famille qui avait vu toujours dun mauvais ceil cette étrangére, fille d@’un Anglais et dune Polonaise. Elle déjeune avec nous. Nous n[ous] rappelons les jours joyeux de Hambourg! Elle nous] fait grande peine. Le soit chez M. de Nelidov, Ambassadeur de Russie,
, réception en ’honneur du cardinal Mercier ov assiste ’ aussi le cardinal Gasparri, Secrétaire d’Etat. 30 [janvier]. Longue causerie avec le P. GarrigouLagrange et déjeuner avec Joh[annes] Jorgensen, q[ui] m’a défendu courageusement contre un article du Corriere d’Itaha®.
31 [janvier]. Départ pour Naples. Hotel du Vésuve. 1[¢"] fév[ rier]. — Via Toledo jusqu’a la Place Dante — Via dei Tribunali — Edifices gothiques — Maisons ruinées couvertes d’herbes. — Les rues étroites vers la ch[apelle] S. Elena, tout le monde travaillant dehors, les pigeons, les paniers [167] 4 provisions descendant des balcons au bout de longs fils, les linges q[ui] séchent. — L’aprés-midi les rues poussiéreuses dans le port, les méres q[ui] balancent les enfants avec le pied dans des berceaux d’osier. La poussiére suffocante. Naples, capitale de la Pauvreté. La bouche ouverte des enfants, pareille a du corail rose.
Conylersation] avec Jammy au Cercle F[rang]ais. 2 fév[rier]. La Mfesse] dans une église aux votites sutbaissées q[ui] ressemble a une grotte. Le Musée. Les danseuses d’Herculanum. Natcisse, le petit bronze
bleu et vert
dans
un
rayon
de soleil, le bas-relief
352
Cahier LI
représentant Hermés, Orphée et Eurydice, avec l’ombre qui avait Pair vivante et q[ui] bougeait. Dumontet 4 la Ch[ambre] de C[ommercle. Promenade avec Verdier. [...]1 S. Chiara, le Gesu Nuovo. Conv[ersatiJon avec Maitre. 3 fév[rier]. Visite 4 Castellammare a M. Jammy, Agent Consulaire, qui habite une grande maison dans le genre colonial, servi par une trés vieille femme. Le jardin carré rempli d’orangers. Les petites maisons en dés avec une coupole de ciment. Son frére retrouva sur Pancien quai d’Italie Pline l’Ancien avec tout son cortége. Le [168] Vésuve rempli de vignes. Torre Annunziata protégée en 1906 par la Madone que tout le peuple, curé en téte, porta au-devant de la lave. « Nous nous ferons briler 1a si la lave avance. » Elle s’arréta. Vin de Gragnano t[rés] agréablement piquant. Le jardin plein d’oranges. Excursion en voiture a Sorrente, oliviers et orangers, petites vallées abruptes,
la pente douce versant dans la mer des éboulements @huile et d’or q[ui] est la plaine de Sorrente, la mer transparente au bas des falaises, les bateaux q[ui] péchent a la flamme, toute la baie bordée de lumiéres, la Grande Ourse dont la pointe extréme est tout prés de la terre et semble désigner un point, et précisément dans son prolongement comme une autre étoile par terre une lumiére du méme feu. La Petite Ourse élégamment courbée en plein ciel. Si belle qu’elle n’est comparable qu’au sommeil le plus profond?. Naples est un grand balcon sur la mer. « Aprés vous, cher Monsieur!» porte est celle du cimetiére’.
—
Pas quand la
4 fév[rier]. Vendredi. Promenade au petit Vésuve. Solfatares. Estampage en grand. Le petit édicule dans un coin avec une épaisse [169] fumée qui s’en échappe. Virgile, Dante en Italie avaient l’Enfer sous la main.
Encore aujourd’hui on peut se payer une sibylle pour 3 frs, sous forme du guide qui fait tout fumer rien
Février 1916
353
qu’en soufflant sur son cigare. Retour par une route effroyablement poussiéreuse, Pausilippe.
5 fév[rier]. Salerne avec Jammy. L’aprés-midi Paestum avec ses trois temples, l'un 4 Neptune avec ses €normes colonnes fauves (cannelées comme un chiton de lin); l’autre plus large, colonnes blanches, le 3° a Cérés. La longue ligne de la mer 4 travers les colonnades (la mer, la vie future). Quand j’étais dans le temple de Cérés, tout a coup je vis briller au-dessus de moi le croissant de la lune précisément comme une faucille. La longue ligne du troupeau de beeufs, les moutons, le berger avec sa cape et son chapeau de feutre pointu (la cape, la toge romaine), le feu sous une hutte de paille pointue. Retour 4 Salerne.
6 fév[rier]. Cathédrale. Tout a coup chants audehors. Irruption d’une procession de femmes 4 genoux. En téte une petite fille portant une croix de bois, entre 2 autres qui portent de gros bouquets, puis d’autres, puis les vieilles. — Salerne avec [170] ses étroites rues a escalier, traversées par des arc-boutants.
Quelle joie de vivre, les villes ont la gaieté de petites cascades! Quand le soleil du matin réveille Vazur délicieusement froid et le fait chauffer peu a peu. Les pinceaux rouges du soleil levant sur les montagnes abruptes. Le ch[emin] de fer a travers les gorges de Romagnano (14 mill. pour 18 km); les plateaux, les vallées 4 vastes horizons de la Basilicate (Potenza), puis descente a travers un chaos de terre vague ravage par eau et le vent, de tristes plaines. Métaponte, halte prés d’une caserne rose et de 5 eucalyptus, la pluie, Taranto, gare noire, un petit ménage italien, la femme a l’air tragi-
que, le gros lieutenant de vaisseau, le mari qui s’occupe del’enfant et qui se tient le pouce al’intérieur des doigts. Brindisi, longues avenues éclairées par de petits lampions bleus et des lanternes oranges. Hotel de l Europe. Music-Hall.
Public de chauffeurs et de matelots, des
méres italiennes avec leurs marmailles qu’elles fessent,
Pune donnant le sein. — La Mission F[ranclaise, le G[énér]al de Mondeésir, le commfandant] [171] de
Cahier III
354
Staél, M. Cazalet, Ag[ent] Consulaire. Le port en corne de
cerfs,
encombré
de
bateaux,
torpilleurs,
sous-
marins, les gros Anglais roulant dans leurs camions automobiles, tout le trimbalement du sauvetage d’une nation. Diner a la table du Général. — Départ a 10 h. La c6te de |’Adriatique, avec des villas qui ont lair taillées dans du blanc condensé, et qui ne font pas d’ombre, mais simplement des transparences, 1a ot le blanc répercute. Toute la campagne remplie de vieux oliviers. Bari, la cathédrale, stupidement rococo. Par derriére la belle fenétre sarrasine soutenue par de petits _
éléphants. Départ dans la nuit. — Arrivée
4 Rome a
9%. Autour de Paestum les montagnes édifiées comme des chateaux de magiciens?. Jeudi ro [février]. — Arrivée 4 Rome du Gouv{ernement] F[ranclais. Bourgeois, A. Thomas, G[énér]al Pellé, de Margerie.
Jadis future?.
Le péché n’empéche pas lefficacité de la priére. « S’il ne se léve a cause de l’amitié il se lévera A cause de Pimportunité. » — « L’amitié, dit S. Jean Chrysostome, ne pése pas tant auprés de Dieu que la priére; ce que l’amitié n’a pu faire, la priére le fait. » « Si v[ous] pouvez croire, tout est possible a celui qui croit. » [172] Noms de Muses fantastiques : Rosa sitis — Non lana hic — Undecies tibi — Hinnulus Euphratis — Futura olim — Mira Magni marmoris — Spina docebit — Media memor®. Un masque noir comme une nuit portative.
11 féy[rier]. Briand 4 Rome. Féte au Campidoglio. Manifestation de la Place Farnése. Diner 4 ’ambassade. Toasts.
Février-Mars
1916
355
14 féy[rier]. Entrevue t[rés] émouvante avec le cardinal Mercier, qui me parle avec beaucoup de bonté de mes livres qu’il a lus.
13 fév[rier]. Les 2 planétes Vénus et Jupiter toutes rapprochées lune de l’autre. Plus en arriére Saturne et Mars. Conjonétion le 14 4 4 h. du matin’. Le mari dont la femme cause avec un bel officier et qui, son enfant sur les genoux, se cache le pouce entre
les doigts comme Brindis1’.)
un poignard.
(Entre Tarente
et
Déja du temps de Néron la principale raison de la persécution contre l’FEglise fut cette constitution d’as‘sociations
non autorisées, les « hétéries » illicites. Le
Digeste est t[rés] sévére contre elles?.
Ce n’est pas parce que je t’aimais, mais parce que je ne t’aimais pas assez‘! [173] 29 fév[rier]. Nouvelles de ce matin. L’offensive allemande sur Verdun semble arrétée. Jours d’angoisse. Tremblement et serrement de cceur en allant acheter le journal du matin. Time Jesum semel transeuntem et non redeuntem?.
Au Transtévére beau type de ruffian gras avec sa grosse moustache noire, son feutre chocolat clair et une belle cravate Lavalliére vert de laitue. Regu la nouvelle édition de /’Art poétique®.
Ouae est ifta quae ascendit de deserto, deliciis affluens ? (Cant., VII)’. Dominus sit inter me et te’.
(Paroles d’un prédicateur)
Qu’il serve
de milieu
entre vous et moi, il est 14 caché dans le misérable effort
d’une Ame qui essaie de le transmettre (V. Ghika)?.
354
Cahier III
Staél, M. Cazalet, Ag[ent] Consulaire. Le port en corne de cerfs, encombré de bateaux, torpilleurs, sousmarins, les gros Anglais roulant dans leurs camions automobiles, tout le trimbalement du sauvetage d’une
nation. Diner 4 la table du Général. — Départ a 10 h. La céte de l’Adriatique, avec des villas qui ont l’air
taillées dans du blanc condensé, et qui ne font pas d’ombre, mais simplement des transparences, 14 ot le
blanc répercute. Toute la campagne remplie de vieux oliviers. Bari, la cathédrale, stupidement rococo. Par derriére la belle fenétre sarrasine soutenue par de petits _ éléphants. Départ dans la nuit. — Arrivée 4 Rome a
9%. Autour de Paestum les montagnes édifiées comme des chateaux de magiciens?. Jeudi ro [février]. — Arrivée a Rome du Gouv{ernement] F[ranclais. Bourgeois, A. Thomas, G[énér]al Pellé, de Margerie.
Jadis future’. Le péché n’empéche pas l’efficacité de la priére. « S’il ne se léve a cause de l’amitié il se lévera a cause de Vimportunité, » — « L’amitié, dit S. Jean Chrysostome, ne pése pas tant auprés de Dieu que la priére; ce que l’amitié n’a pu faire, la priére le fait.» « Si v[ous] pouvez croire, tout est possible a celui qui croit. »
[172] Noms de Muses fantastiques : Rosa sitis — Non lana hic — Undecies tibi — Hinnulus Euphratis — Futura olim — Mira Magni marmoris — Spina docebit — Media memor®. Un masque noir comme
une nuit portative.
11 féy[rier]. Briand 4 Rome. Féte au Campidoglio. Manifestation de la Place Farnése. Diner 4 l’ambassade. Toasts.
Pévrier-Mars
1916
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14 fév[rier]. Entrevue t[rés] émouvante avec le - catdinal Mercier, qui me parle avec beaucoup de bonté de mes livres qu’il a lus.
13 féy[rier]. Les 2 planétes Vénus et Jupiter toutes rapprochées l’une de l’autre. Plus en arriére Saturne et Mars. Conjonétion le 14 4 4 h. du matin’. Le mari dont la femme cause avec un bel officier et qui, son enfant sur les genoux, se cache le pouce entre
les doigts comme Brindisi?.)
un poignard.
(Entre Tarente
et
Déja du temps de Néron la principale raison de la persécution contre l’Eglise fut cette constitution d’as‘sociations non autorisées, les « hétéries » illicites. Le Digeste est t[rés] sévére contre elles*.
Ce n’est pas parce que je t’aimais, mais parce que je ne t’aimais pas assez‘!
[173] 29 fév[rier]. Nouvelles de ce matin. L’offensive allemande sur Verdun semble arrétée. Jours d’angoisse. Tremblement et serrement de cceur en allant acheter le journal du matin. Time Jesum semel transeuntem et non redeuntem®. Au Transtévére beau type de ruffian gras avec sa grosse moustache noire, son feutre chocolat clair et une belle cravate Lavalliére vert de laitue.
Regu la nouvelle édition de /’Art poétique’. Quae est ita quae ascendit de deserto, delictis affluens? (Cant., VID’. Dominus sit inter me et te®.
(Paroles d’un prédicateur)
Qu’il serve
de milieu
entre vous et moi, il est 14 caché dans le misérable effort
d’une 4me qui essaie de le transmettre (V. Ghika)?.
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Cahier III
Je dors, mais mon cceur veille?. Réalité physiologique. Le jeune Grec frappé a mort et qui reste debout un moment. Et dans son esprit, l’4me a moitié arrachée de son corps, se [méle] le sol boueux prés du Scamandre, le char
renversé,
les cadavres
dans
le sang
et les
heureuses campagnes Elyséennes pareilles a des champs de colza du mois [174] de juin, comme le soleil rouge de 4 heures du matin sur le mur de la maison natale.
A travers les ouvertures corbeaux diagonal.
du Colysée un vol de
Le prétre qui sur |’Aventin interprétait le vol des oiseaux. S. Francois de Sales devant l’image de la Vierge noire 4 S.-Etienne du Mont entend une voix qui lui dit : Glorifitatio nominis mei non damnator, sed Jesus?. S. Aug[ustin], Czé de Dieu, La Paix. Pax itaque corporis est ordinata temperatura partium, pax animae trrationalis ordinata requies appetitionum, pax animae rationalis ordinata cognitionis rationisque consensio, pax corporis et animae ordinata vita et salus animantis (’énumération continue par le beau développement ptogressif), pax hominis mortalis et Dei ordinata in fide sub aeterna lege obedientia, pax hominum ordinata concordia,
pax domus ordinata imperandi atque obediendi concordia civium, pax coelestis civitatis ordinatissima et concordissima societas fruendi [175| Deo et invicem in Deo, pax omnium rerum tranquillitas ordinis. Ordo est parium dispariumque rerum sua cuique loca tribuens dispositio... ... Conturbavit carnis pacem ista perversitas et ideo moleSa est; verumtamen anima corporis pacata est et pro ejus salute satagit et ideo eft qui doleat quae si molestiis ejus exclusa discesserit quandiu compago membrorum manet, non est sine quadam partinm pace quod remanet...
... Quapropter si irrationalia essemus animantia, nihil appeteremus practer ordinatam temperaturam partium cor-
Mars 1916
357
poris et requiem appetitionum... Si enim desit pax corporis,
impeditur etiam irrationalis pax animae quia requiem appetitionum consequi non potest... Sed quia homini rationalis anima rationalis inest, totum hoc quod habet commune cum bestiis, subdit paci animae rationalis*. L’humilité est Pamour de la Vérité et de la Justice (M. Olier)?. Nouvelles angoisses. Scala Santa. Le Christ et la Vierge qui deviennent plus visibles 4 mesure qu’on monte’.
[176] Me dereliquerunt fontem aquae vivae et foderunt sibi , cisternas dissipatas quae continere non valent aquas (Jéx., II, rt). La cupidité est une idolatrie (Coloss., III, 5). La grace ne détruit pas la nature, mais la présuppose et la perfectionne (S. Th.)°. Erat nubes tenebrosa et illuminans nottem (Ex., XIV, 20). —
Dies diet erudlat verbum, et nox nolti indicat scientiam
(Ps. XVIII, 3) — et nox illuminatio mea in deliciis mets (Ps. CXX XVIII). V[oir] sur ces trois textes le comm[entaire] de S. Jean de la Croix, Montée du Carmel, p. 84°.
Et d’abord... il faut savoir qu’en toute ame, méme dans celle du plus grand pécheur, Dieu réside et demeure substantiellement. Cette sorte d’union est toujours un fait entre Dieu et les créatures. Elle leur conserve l’étre qu’elles ont, de maniére q[ue] si elle venait 4 leur faire défaut, la non-existence et la rentrée
dans le néant s’ensuivraient (¢b7d., p. 93)’. [177] Récit dune attaque de Vaux par un officier. Mars’, E vedo al cannocchiale i tedeschi; prendono lo slancio,
avanzano in masse profonde. Dietro le prime teste altre
358
Cahier IIT
ancora se ne vedono a perdita questa forza massiccia pesante distintamente; so toccano gomito sentirsi in contatto, di sentirsi
d’occhio. Come una marea avanza. Ora li vediamo a gomito, hanno bisogno di piede contro piede. Cam-
minando col Mauser sotto 1’ascella, vuotano il caricatore con
un gesto disciplinato dell’indice. Ma avanzano come wna marea monstruosa; dalle loro file, attraverso il fraStuono dei loro cannoni che continuano a infuriare, salgono canti che sembrano latrati. Se e questa l’anima tedescha che st fu falsamente rappresentata profumata di sentimentalismo; essa ha per estrinsecarsi solo hurla che hanno dello sciacatlo e della iena. I miei soldati fremono. Li trattengo. Ma fino a quando potro riuscire a frenarli dietro al parapetto ? D’improvuiso, quando il flutto tedescho e a trecento metri da noi scoppiano formidabili mille detonazioni simultanee ; e la nostra artiglieria che, lasciato avvicinare il nemico, ora lo falcia in pieno
insieme con le nostre mitragliatrict. I miei soldati gridano: « Bene ! » e fanno altrettanto... E’ certo questa la piu formidabile scena infernale che abbia veduto in diciotto mesi di guerra. L’Yser ove pur la lotta fu sovrumana, e nulla al paragone. Avro sempre innanzi agli occhi quelle visione atroce. La nostra mitragha arriva sui tedeschi tuonando e fischiando come una raffiica spaventosa ; tutti i nostri cannoni di ogni calibro sparano contemporaneamente lanciando in aria un ampio ventaglio di carne tedesca taglinzzata. Le fanterie tedesche di prima linea erano tanto serrate che i soldati colpiti oscillavano un instante sotto l’urto del proiettile e anche gia morti restavano ritti in piedi qualche secondo. Le file successive erano letteralmente falciate. Si vedevano diStintamente volteggiare in alto teste, braccia, gambe e perfino torsi in un Sumo rosso-giallastro che saliva a nugoli. Era come se avessimo dinanzi a noi un muro umano le cui pietre altro non fossero che teste spaccate. I corpi si accumulavano in lunghe fila alte in certi punti un buon metro. Ebbene malgrado queSta spaventosa carneficina, questo inimmaginabile macello, questa ecatombe che sfida in orrore tutti in quadri piu foschi, vi erano ancora tedeschi e tedeschi che avanzavano contro di noi, scavalcavano i corpi del compagni caduti calpestandoli spesso coi pesanti Stivaloni, e che so slanciavano innanzi finche, presi sotto il fuoco delle mitragliatrici, si abbatevano inerti innanzi ai nostri reticolati.
Mars- Avril 1916
359
A un certo momento vi fu tuttavia nella orribile marea che St lanciava contro di noi un gran disordine che si manifestava tn movimenti circolari, come vortici viventt, dietro i cadaveri.
Allora i nostri cannoni e mitragliatrici, raddoppiando di violenza, scagharono su quella esitazione tale un uragano d acciaio che, volte le spalle, si ripiegarono dietro un avvallamento del terreno. Dopo questo sforzo gigantesco che fece _ letteralmente tremare la terra, dinanzi all’ enorme mucchio di - cadaveri, vi fu un momento di sosta. Sembrava che la belva, incalzata e domata, si rannicchiasse in un angolo di quella gabbia sangionosa che e il campo di battaglia con le fanci piene di bava, anelante. Au déjeuner de la Villa Borghese le menu était orné dune reproduction du beau groupe du Bernin que vous connaissez, Apollon et Daphnis. Au-dessous on avait inscrit un texte de S. Paul(Epfitre] 4 Tim[othée]) : Non coronam habebit nisi qui legitime certaverit. C’est fort bien trouvé! Au Capitole le service était fait par des domestiques en livrée de la Renaissance. Mais les costumes noits des invités étaient bien piteux au milieu de ces fresques et de ces marbres magnifiques?! Une
nuée
épaisse était sous
ses pieds. I] monta
au-dessus des chérubins,il s’éleva sur les ailes des vents.
Les ténébres l’enveloppaient; sa tente autour de lui, c’étaient des eaux obscures parmi les nuages de lair (Ps. XVII, 10). Par Vobscurité sous ses pieds, lenveloppe de ténébres et la tente autour de lui q[ui] est l’eau ténébreuse, comprenons l’obscurité de la Foi dans laquelle il est enfermé (S. Jfean] de la Cr[oix], ch. viir)?. [178] Gustato spiritu, desipit omnis caro®.
Mittit crystallum sicut bucellas. S. Jean de la Croix trad[uit] : Il envoie son aliment par bouchées*.
Ps. XLII. — Vers applicables a la guerre actuelle et bien propres a terminer ce cahier : Mortificamur tota die ; aeSlimati sumus sicut oves occisionis. CLAUDEL
V - I5
15
360
Cahier II
Exsurge, quare obdormis, Domine ? exsurge, et ne repellas
in finem. Quare faciem tuam avertis ? oblivisceris inopiae nostrae et tribulationis noSstrae ?
Quoniam humiliata est in terra anima nostra; conglutinatus est in terra venter noster.
Exsurge,
Domine,
adjuva nos,
nomen tuum.
Ainsi soit-il!
30 avril 1916. Rome?.
et redime
nos propter
CAHIER
IV
vi
1916 [1] Paris. Hotel Mirabeau, 4 décembre 1916}.
[2] Un cahier commencé le 30 mars 1916 a Hotel de ‘la Bonne
Femme
de Turin, m’a été volé en méme
temps que ma valise et différents papiers a la Gare de Lyon?. Tout ce printemps et cet été furent occupés par une série de voyages : Nord de I’Italie, (avril) Bologne, Ferrare, Ravenne, Faenza, Florence, Sienne, Pérouse,
Assise (cette arrivée le soir avecles cloches étonnamment pures et fraiches). Mai et juin dans les roses 4 Rome. 16 juillet. Libourne, Spezzia, Lerici, Porto Venere (ces filles de la mer dans les rochers aux yeux sauvages,
noires, en haillons, droites comme
des dards). Puis
Hostel. Puis Paris, trois semaines. Mon métier d’attaché commercial, le chemin de fer du 45¢ paralléle’. Puis tournée commerciale dans le Sud-Ouest de la
France.
Limoges,
Périgueux,
la Cathédrale;
pays
admirablement frais et feuillu, avec cette lumiére rose et verte d’ Aquitaine, Bordeaux, les tas de marchandises
sur le quai des Chartrons recouverts de baches vertes a grosses fleurs rouges pateilles 4 des cachemires de sultan, Lasserre*, visite 4 la veuve et a la belle-fille de mon ami Georges Dumesnil (Madeleine Lebesque)* —
ce jour méme ow il est mort, admirablement beau, j’étais aller [sc] communier 4 Vieu. Grand jour d’émotion mystique. Toulouse, la Garonne, [2 v] SaintSernin,
l’admirable
cathédrale
désaxée,
Carcassonne
(S.-Nazaire, expériences d’agriculture de M. Jean au domaine
de Bru), Cette, le Midi en vendanges,
les
364
Cahier
IV
énormes grappes noires dans le vert fort des pampres accablés. Nimes, Avignon, Lyon. — Hostel : mon beaupére malade, hernie étranglée, opération, serein comme un vieux Christ. — La Suisse : Henrion interné dans un effroyable repli de Alpe, a Finhaut, ce glacier qui débouchait la-haut a cette créte comme un torrent de verre’. Domodossola; l’admirable chemin de croix du xvuire siécle, retour sous les treilles chargées de raisins,
les chataignes q[ui] roulent sous mes pas. — Milan. La Chartreuse de Pavie: blanche ot le rose afHeure, comme ’émotion sainte 4 une joue de vieillard, les vottes bleues ocellées, effet de robe de moine, la tunique de Ancien des jours, éclatante par l’art du foulon, la
neige, le parchemin prét 4 inscrire ?Office. Le grand Cloitre : les vingt-quatre petits hermitages [s7c] chacun avec son clocheton entourant ce grand carré absolument vide et nu qui est? un cimetiére et qui représente le néant de cette terre. La campagne Lombarde cet autommne, avec partout ces courants d’eau noire, claire
et vive. — Rome admirablement belle dans le soleil doobre. Le dome blanc et pontifical de Saint-Pierre tel qu’on le voit de la place du Quirinal dans la lumiére de ro h[eures] du matin. L’ Hotel de Russie, la Baronne de Seckendorff*, Miss Carr, [3] (notre promenade en juillet 4 Tivoli, au temple de la Sibylle, ce grand trou plein d’oliviers et d’eaux écumantes et rugissantes, la délicieuse truite rose péchée la-dedans comme une nymphe comestible*, et avant cette promenade seul dans la campagne torréfiée de Rome a 3 heures de Paprés-midi, cette lumiére si forte qu’elle empéchait de rien voir, la corne d’une automobile sur une route
qui sillonnait cette fournaise, ce lézard grand comme un petit crocodile, ce bain délicieux dans les eaux froides et rapides de l’Aniene dans un site antique, roches, roseaux, peupliers),
—Retour vers Paris: 5 jours
chez ma belle-sceur Millon*®, 15 Avenue du Trocadéro. Retour vers Modane pour aller y chercher les délégués de la « Federazione dei Consorzi Agrari» que j’ai invités 4 faire une tournée en France. Ils sont 19 (en ottobre, Plaisance, la vieille cathédrale, les deux Farnése de bronze). Lyon, Villefranche, Le Creusot,
Décembre
1916
365
Bourbon-Lancy (Puzenat)', Clermont-Ferrand (Betgougnan), Paris, Creil. — Le 4 novembre, récital de
mes ceuvres au Gymnase. Copeau (/a Cloche) — Commencement de la Cantate (Delvair, Lara, aussi mauvaises que possible), 2 scénes (actes I et II) de Partage de Midi (Eve Francis admirable, Hervé assez bon). — Récit du messager de Tése d’Or (Copeau t[rés] mauvais). Poémes de guerre, Janvier, Copeau, Francis. — Le 9 novembre départ pour I’Italie. J’arrive le 11 dans notre bel appartement du 66, Via di Due Macelli. La terrasse d’ot ’on domine Rome. Mes 4 chers enfants. Reine m’apprend qu’elle est enceinte. Grande joie pout moi et reconnaissance a Dieu. Je fais le projet de la nouvelle Mission [3 v] Commerciale qu’on m’a demandé d’organiser. Le matin je vais a la messe a S. Claudio ot le S. Sacrement est toujours exposé. La Duse, douloureuse et pathétique, qui me demande d’écrire pour elle un drame religieux cinématographique. — Le dimanche 19 [novembre] étant a mon bureau on me téléphone de venir a l’Ambassade. C’est Berthelot qui m/’offre le poste de Ministre a Rio de Janeiro! Grandes incertitudes toute la semaine. Je pars presque décidé a refuser. Puis sur les conseils de B[erthelot], une fois arrivé a Paris et sur la description que lon me fait de Rio, j’accepte (1°" décembre), — On prépare des représentations de /’Osage.
A la corne de la lune comme un glaive. 11-18
[décembre].
Représentations
de /’Otage. —
Francis, Hervé, Arquillére, Savoy*. Succés sans cesse
croissant. Arrivée et départ de ma femme que je quitte Je 24, malade, 4 Chambéry. Bousculade du départ. Banquets. Je pars le 9 49 h. 50 du soir pour Lisbonne, via Madrid. — Francis Jammes 4 Paris le jour de Noél. Diners chez Fontaine et chez Madame Alphonse Daudet?.
IQI7 5/1. Boutroux, Bergson, Barrés, Imbart de la Tour, chez Graga Aranha. Départ de Paris le 9 [janvier] (mardi) a 9 heures 50 du soir a la Gare d’Orsay avec Darius Milhaud? q[ue] j’améne comme secrétaire et chargé du service de la propagande.
A la gare Louise,
Antoine,
Elisabeth?.
Temps affreux de neige fondue. Irun, triste promenade sut la route de Fontarabie. — Les Basques a figures massives avec leurs petits bérets. N[ous] gravissons les plateaux par une neige épaisse. Vue sur des gouffres et des arbres empaquetés, bancs de fourrures, dans le feu [4 v]| de la locomotive?. Le lendemain matin réveil un peu-aprés Avila. Les vastes horizons de ce deésert sauvage de Castille couvert de neige. Paysage d’aventures et de romans‘ : la-bas il y a quelque chose qui surgit. Madrid a 1o hfeures]. Prix exorbitants au Palace Hotel. Visite 4 Ambassadeur,
dans sa petite
maison frileusement tendue d’épaisses tapisseries. L’aprés-midi visite au Prado, Le Corrége (Madeleine et le Christ ressuscité), Les 2 Zurbaran. Le Titien (Descente de Croix, la femme couchée). Les 4 longs Tintoret. Un admirable Christ mort de Rubens. La Trinité. Les Buveurs, lApollon aux forges de Vulcain de
Velasquez.
Les
Bacchantes,
aux
Antiques.
Admirable musée. Aucune admiration pour Goya et Greco’. Acheté deux broderies chez une vieille brocanteuse. Départ a 11 hf{eures] 20. Réveil au milieu d’un grand désert d’oliviers et de chénes-liéges; une couleur
Janvier 1917
367
de feu aux fissures de la fenétre. Délicieuse fraicheur du matin a la petite station sous les eucalyptus. Le Tage, avec ses bateaux 4 la proue gracieusement relevée, aux grandes voiles latines roses et rouges. Santarem. Les orangers chargés de leurs pommes d’or. Lisbonne. Assez belle ville avec les maisons aux facades tapissées de majoliques, ce qui leur donne un aspect fleuri et festoyant. Celle-la surtout avec des reliefs de pierre sous les fenétres et des balcons de fer peint. Le lendemain essayé vainement de trouver une messe. Toutes les églises désertes. Priére fervente a la cathédrale. Demandé la délivrance et ’amour. Je trouve une église ot [un] trés vieux prétre, chenu, gros, rouge’, a demi aveugle, dit la messe. I] n’y a pas assez d’hosties _pour me communier. [5] Ecrit des lettres. Déjeuner a ’ la Légation installée dans un ravissant petit hdtel peint et décoré
a Vitalienne.
Daeschner?,
M.
et Mme
de
Montillé. A Belem avec D.*. L’église de Manoél, étonnante et féerique, Inde rejoignant le gothique, les longs fits prismatiques et historiés. Le Cloitre asiatique ou jouent les orphelins. Mouvements de cheeur et de groupe étonnants. Retour par le tramway encombré de petit peuple. Cet homme qui tenait une poule caquetante entre ses bras. Aucune nouvelle de P Amazone*. — A la Cathédrale l’orgue avec les faisceaux de trompettes horizontales®. « Au secours!» dit la poule. « Je vas mourir®! » Trois
femmes
avec
des
corsets
d’or
imitant
des
troncs de palmiers. Cet homme q[ui] portait dans un panier un paon et sa femelle.
Une lampe éleftrique dans les eucalyptus. Je monte sur l Amazone (attaquée par un torpilleur allemand au moment ot elle entrait 4 Vigo le lundi 15 [janvier] 4 5 heures du soir). Départ le lendemain a 3 heures de l’a[prés]-m[idi].
368
Cahier
IV
Cette petite fille blonde qui dansait légérement comme une fée au milieu du salon, et de chaque coté lentement et solennellement Océan qui monte et qui descend.
Cette autre petite fille quia les bas et les cheveux de la méme couleur marron. Le bateau en route vers le Sud. Devant lui l’immenise systéme Sstellaire d’Orion. [5 v] Mon étoile! Non pas une étoile seulement mais la coruscation au troisiéme étage du ciel de ce corps fait de feux, les uns visibles, les autres devinés ou dont seule la lueur bleuatre apparait, de ce g[ran]d corps dont le nom est multitude?.
Coucher de soleil jaune, violet, bleu. Quel violet et quel bleu?! Recettes de /’Otage (Th. Antoine) 1916 Déc. 11 Lundi 12 Mardi 13 Mercredi
14 Jeudi |matinée /soirée 16 Samedi 17 Dimanche
{matinée | soirée
1096,20 1 260,80 1 409,60
976,20 962,90 1787
3 262,50 1 837,304
[6] Le lundi 22 [janvier] arrivée 4 S.-Vincent, iles du Cap-Vert°. Ces iles rougeatres, stériles et dures comme des pains de fer fondu’. Les soldats négres en képi. Les plongeurs autour du bateau. On nous apprend qu’un corsaite allemand s’est échappé et qu'il patrouille PAtlantique sud ov il a déja coulé ou capturé? plusieurs bateaux,
armant
un
d’entre eux pour lui servir de
compagnon. Redoublement de précautions et de nuit a bord’. T[é]l[é]g[ramme] 4 ma femme.
Janvier-Février 1917
369
Heures deélicieuses qui précédent et suivent le coucher du soleil. Quelle douceur, quelle paix, quelle majesté entre la terre et le ciel! Grosses phosphorescences de la mer dans le sillage du bateau, pareilles aux roses qui montent du fond de l’ceil quand on appuie dessus. Eclosions de la mer remuée. Lunes, étoiles, dessus l’écume?.
Le bateau noir qui remue d’une seule piéce avec ses grands manches? anguleux. Impression tragique hier soir. Ou sommes-nous? Sommes-nous engagés dans la supréme navigation? La terre est loin’.
Une pédale de cuivre briller sous la petite semelle. N[ous] passons la ligne le jeudi 25 4 10 h[eures] du soir pat un vrai temps de pot-au-noir. M. et Mme
X. n’aménent
pas avec eux leur enfant
au Brésil, mais ils aménent leur chien. °
Parlar visibile (Dante, Purg.)4. Arrivée 4 Pernambouc le dimanche 28 [janvier] au matin. Les lignes des cocotiers. Le Consul Béraud et M. de Fonseca montent a bord p[our] me recevoir. Le 29 au soir Bahia. Je descends a terre avec [6 v| le Consul Orlandi et M. Guenero de Castro, homme gros et turbulent. Bahia sur une falaise avec ses maisons peintes et historiées pareilles 4 un décor de Guignol suranné. Le négre a la coupée qui conduit a ce clair de lune dans la mer. Négresses en robe blanche empesée. Est-ce que c’est aimer que etc...
Arrivée le 1°" février 4 Rio. A 5 heures sur le pont, Ventrée, le Pain de sucre. Mon pavillon au mat d’avant. Le fort q[ui] tire les 21 coups de canon. Débarquement. Revue des troupes avec musique et drapeaux. Une douzaine de photographes. La colonie frangaise. Je m’installe 4’ Hétel Moderne. La Légation, horrible-
370
Cahier
IV
ment chaude. Chevalier’, Promenade en auto autour de la baie. Copacabana et les plages de sable blanc, couvertes d’un peuple qui se baigne dans les trois vagues de la mer. 2 février.
Visites
4\ mes
collégues.
Le Canal
do
Mangue. Le Silvestre. — 4. Petropolis?, 11-12%.
Omnem animam viventem quae est vobiscum in generationes sem pilernas. Et recordabor foederis vobiscum et cum omni anima vivente quae carnem vegetat (Gen., IX)!. Fils de Japhet. — Insulae gentium®. nations divisées de l’Europe. Ez
celebremus
nomen nostrum
Toutes
ces
antequam dividamur in
universas terras (Gen., XI)*. L’Arbre de la Science du Bien et du Mal. Au chap. 11 de la Genése apparait cette figure de Arbre qui avec celle de Rau reparait presque a chaque [7] page de la Bible. L’Arbre produit par la terre d’un germe qui y est mis par la force du soleil et par la vertu de l’eau. I produit un fruit, c[’est]-a-d[ire] une semence enveloppée et accompagnée de saveur. Saveur, sagesse. Quand Eve le goitte, elle ne prend plus Dieu comme fin, elle se prend elle-méme
comme
fin, c’est a elle-
méme qu’elle veut procurer un plaisir. C’est elle-méme qu’elle prend pour mesure de ce qui est bien ou mal, c’est cela qu’elle reconnait au goat, en y participant. — Ce quwil y avait d’essentiel 4 manger dans le paradis. Le principe de la manducation q[ui] est consommé dans ?Eucharistie. Aucune déle€ation parfaite, aucune possession, sinon celle que je me procure en absorbant
Pobjet, en me l’assimilant, en le faisant disparaitre en moi, et moi en lui’. Est bien cela seul que je puis assimiler. Dés qu’il a mangé de cette science, il mourra,
il s’apergoit de sa honte, c[’est]-a-d[ire] de ses organes de reproduction, cela par quoi il est éternel, cela par qui il n’existe q[ue] pour un temps. Il n’y a qu’un mal,
Février 1917
371
cest de cesser d’étre. Le mal est une cessation de l’étre. Il s’apercoit de soi-méme, tandis qu’auparavant il ne voyait que Dieu. L’arbre de Vie principe de salut extérieur qu’on s’assimile. La semence, ce qui produit. Il a mangé non seulement la pulpe, mais la semence, connaissance de toute saveur, de toute chose par rapport a soi. Echantillon complet. II s’associe au goat de tout ce qui a pouvoir de naitre et lapprécie par rapport a lui-méme?. Abraham q[ui] dit 4 Pharaon que Sara (la stérile) était sa sceut et cependant elle était son épouse®. D[ieu] a Abr[aham]. — Ego Deus omnipotens. Ambula coram me, et efto perfettus. Terram Chanaan in possessionem aeternam®.
Est civitas haec juxta ad quam possum fugere, parva, et salvabor in ea; numquid non modica est, et vivet anima meat ?
F.° dit que les 3 affaires les mieux concues et les mieux administrées sont : le Pennsylvania Railroad, V’Eglise catholique, et la Maison Swift et Armour de Chicago. [7 v] Et dum furtum facit fraudes et rapinas affert amabilt suae (Esdras, III, 4)*. Abraham
achéte le champ
ow il ensevelit un mort
40 sicles d’argent’.
Comme une jeune fille q[ui] est ivre d’étre jeune et d’étre belle et q[ui] s*embrasse doucement |’épaule’. Le sable de la mer, jonché de ces grandes palmes desséchées?. Isaac 4 Jacob: Tw es jilius meus? Et respondens ait : Ego sum, — et dixit ad eum : Accede ad me et da mihi osculum, fili mi (Gen., XX VII).
372
Cahier IV
Expavit Isaac stupore vehementi'. Dieu aveugle, q[ui] reconnait ses enfants 4 ?odeur. Esaii et Jacob; encore une séparation. Therezopolis, Gavea, Tijuca. Vista Chineza, la Table de ’Empereur. La corniche’.
Je m’installe le 18/2 4 la Légation. Carnaval.
Histoires de financiers. Le financier qui s’approprie 150 000 frs de frais de publicité. Qu’en avez-vous fait? Aucun journal n’a rien publié sur laffaire. « J’ai payé leur silence. » Prenez ma vie, mais laissez-moi ma bourse!
Sitivit anima mea in deum fortem apparebo et videbo faciem Domini* ? Nouvelles
vivum : quando
de Paris. Représentation
Nuit de Noé/ au
Chantier,
en présence
réussie de la du Cardinal
q[ui] a dit des paroles aimables 4 mon égard!.
L’homme trés vieux en train de mourir sur un lit étroit. Il y a un ange qui se tient prés de lui avec un encensoir et q[ui] le regarde. Heureusement que pour vous dire’... Si seulement vous ne me regardez pas...
Joseph est appelé par l’ordre du Pharaon Salvator mundi. [8| On trouve dans leur sac /igatas pecunias comme les piéces de Judas. On les accuse d’étre venus dans la terre de J[oseph] comme espions (exploratores). Benjamin, ‘qui est ce frater minimus? Enfant prodigue? Pax vobis. Pecuniam quam dedistis mihi, probatam ego habeo. Féte encore comme pour |Enfant Prodigue. — Praevenit me Deus ut reservemini super lerram.
Séparation vers Egypte (chap. xirx)*. J’ai ensemencé ta bouche de baisers’.
Feévrier-Mars
1917
373
Sapienter opprimamus eum (Ex., I, 10)}. Quasi appensum quid ob recordationem (la Croix), (Ex., XII, 16).
Les Russes disent qu’une bonne terre est celle qu’on pourrait labourer avec un coq, les rouettes pas plus grosses qu’un grain de pavot.
Non sequeris turbam ad faciendum malum,; nec in judicio plurimorum acquiesces sententiae, ut a vero devies (Ex., XXII, 2)%. Ce qui me monte du cceur en la voyant, c’est de la musique, c’est une louange qui me sort de la bouche comme les versets du Magnificat?!
Si pure, que le foyer d’ot sort une telle splendeur est alimenté avec des lingots de glace. Audiens autem Josue tumultum populi vociferantis, dixit ad Moysen: Ululatus pugnae anditur in castris. Oui respondit : Non est clamor adhortantium ad pugnam, neque vociferatio compellentium ad fugam, sed vocem cantantinm ego audio (Ex., XXXII,
17, 18)°.
Dimanche 18/3, Petropolis. J’apprends la prise de Bapaume, de Péronne et de Noyon. — La révolution Russe. N[ous] communierons avec Dieu, n[ous] résiderons en Dieu suivant les deux espéces, l’eau et cette solidité
qui est la cause. La chair est ce qui figure et ce qui voile. Elle a pour centre le Ceeur. Le corps qui contient toutes les mesures et toutes les proportions’. [8 v] Cfon]f[essé] au P. Renault, lazariste, a Botafogo’. Réunion francaise. Je suis frappé d’une caractéristique des gens de notre race, presque tous trapus, a
374
Cahier
IV
grosse téte, avec le tronc large et développé, sur des jambes courtes. Visite
4 la verrerie
a S. Christov4o1.
—
du pére Esbruand
Chute du Ministére.
(80 ans) —
Ribot,
ministre] des A[ffaires] E[trangéres], 20/3”.
Il parait que lPacteur du Chantier qui jouait Jean, sergent, décoré de la Croix de guerre, a voulu communier le jour de la piéce pour pouvoir vraiment dire : « Je suis pur et sans aucun péché. » C’est PAbbé Pfoivrel] qui I’a écrit 4 Antoine’. Anima cum obtulerit oblationem sacrificita Domino, simila ertt ejus oblatio (Lev., Il, 1)*.
Tune placebunt terrae sabbata sua cunttis diebus solitudinis suae; sabbatizabit, et requiescet in sabbatis solitudinis suae,
eo quod non requieverit in sabbatis vestris quando habitabatis in ea (Lev., XXVI, 34-35)°. Les ravages actuels des Allfemands]. Annus pro die reputabitur (Num., XIV, 34)*. Contaét, adhérence, fusion.
Quia D{omi\nus D{eus| tuus ignis consumens est, D{eus| aemulator (Deut., IV, 24)’.
Sacrifices et culte : subter omne lignum frondosum (ibid.,
XID.
Non facietis tbi quae nos hic facimus hodie: singuli quod sibi retium videtur (zbid.)®. Manger en présence de Dieu les dimes (zbid.).
Jesus autem tacebat. — Comme si le propre de Jésus était de se taire?®, Parmi le tumulte des théories et des passions, Dieu ne se fait reconnaitre 4 nous que par son silence. Au
Mars-Avril 1917
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travers de ce bruit profane, le propre du Verbe est de se taire. Romatie.
Jeudi-Saint. — L’église toute dorée et sculptée du Couvent de Sao Bento}. Il n’y a pas deux amours,
dit Lacordaire, ’amour
divin et ?amour humain. Il n’y a qu’un amour. L’objet seul est différent?.
[9] Il y a une espéce d’égoisme qui est une préoccupation de soi-méme non pas pour s’y enfermer, mais au contraire pour s’en délivrer. Le Pfére] H[umilié] comme un prisonnier n’est occupé que de ses liens®. 3 avril. — Entrée en guerre des Etats-Unis. 5 avril, torpillage du Parana.
—
Le sable des allées jonché d’énormes fruits pareils a des bombes de cuivre. 16-19 avril. Voyage a S.-Paul. Le plateau désert. Lumiére triste et décolorée. Visite au président Rodrigues Alves. Jolie villa décorée de pots de fleur et d’azalées. En auto jusqu’a Alto da Serra d’ot lon voit Vile de Santos, l’estuaire, les sinuosités de la montagne et de la céte*. En haut Pauberge Asi in
Brasil. Chevalier nous parle des finances de Haiti, la conversion des « gourdes » qui sont la monnaie du pays. Le chemin de fer ne fait pas ses affaires. Pour lutiliser on se sett des voies pour la plantation des bananes. Les recettes sont plus au moins bonnes suivant la récolte. Atrivée de mon Attaché militaire, le Vicomte de la
Honi, accompagné de sa femme. Quae est haec ira furoris ejus tmmensa ? (Deut., XXIX)°.
376
Cahier
LV
Mandatum hoc, quod ego praecipio tibi hodie, non supra te est, neque procul positum, nec in coelo situm, neque trans mare positum, — sed juxta te est sermo valde, in ore tuo, et corde tuo ut facias illum (Deut., XXX)’. Dans le livre de Josué les pierres q{ui] servent de témoignages?.
Ouem docebit scientiam ? Et quem intelligere faciet anditum ? Ablaétatos a latte, avulsos ab uberibus. Quia manda, remanda, manda, remanda, expetta, reexpetta, modicum ibt,
modicum ibi. In loquela enim labii et lingua altera loquetur ad populum istum (Is., XXVIII, 9, 10, 11). [9 v] Le Christ dans sa nature humaine :
In ipso habitat omnis plenitudo divinitatis corporaliter (Coll. ste), 1b, o,)*. 22/4 — Chevalier
Diner offert par moi au Jockey Club a a l’occasion
de son
départ,
en
présence
Min[istre] des Finances. 24 — Banquet Chevalier a |’Assyrio. 26 — Départ de Chevalier’. 24-30 — Voyage de Milhaud 4 S.-Paul.
Quomodo in aquis resplendent vultus prospicientium sic corda hominum manifesta sunt prudentibus (Prov.,
XX VII,
19)%,
Méme au cas ot l’on est sir de ne pas étre trompé, il ne faut pas que l’ame s’applique a voir clair dans les articles de la Foi, car il s’agit de sauvegarder le mérite de la Foi pur et entier, pour arriver, par la Nuit de Pentendement, a la lumiére pure de Vunion. II est extrémement important de se fier, les yeux fermés, aux prophéties du passé, méme quand une révélation nouvelle les fait comprendre. L’Apétre S. Pierre avait vu sur le Thabor un rayon de la gloire du Fils de Dieu, et pourtant, dans sa lettre canonique, il dit ceci : Habemus firmiorem Propheticum sermonem : cui benefacitis
Abpril-Mai 1917
70
attendentes (II Pet., 1, 19). « N[ous] avons la révélation et qui donne plus de certitude. V[ous] ferez ien de v[ous] y tenir. » Ce que je comprends ainsi : La vision que j’ai eue du Christ N[otre]-S[eigneur] sur le Thabor est absolument vraie, mais les paroles prophétiques au sujet de sa Divinité donnent plus de certitude, et v[ous] ferez bien d’y attacher votre 4me (S. Jean de la Croix, pp. 260-261)}. Si elle veut s’unir 4 Dieu, la mémoire ne peut moins faire que de s’anéantir en t[ou]tes ces formes (fournies par les sens). Et cela se comprend attendu que l’union est irréalisable aussi longtemps q[ue] persiste une forme q[ui] n’est pas Dieu, car Il ne peut étre contenu sous une forme ou connaissance distinéte quelconque, ainsi q[ue] n[ous] avons dit dans la Nuit de l’entendement. N[{otre] Rédempteur l’a déclaré : Nul ne peut servir [r0] deux maitres, et c’est pourquoi la mémoire ne saurait en méme temps étre parfaitement unie 4 Dieu et a des formes et connaissances distin¢tes (7d., p. 293)?. Car tout ce qui est naturel dés qu’on veut en faire usage dans le surnaturel est plus un empéchement qu’une aide (p. 299)%. Grace a cet oubli et 4 son éloignement des créatures, ame se trouve disposée a recevoir limpulsion du Saint-Esprit et son enseignement, cart d’aprés la Sagesse : Auferet se a cogitationibus quae sunt sine intelle tu (Saprelsss) (piig12)%
L’a4me p[our] aller 4 Dieu doit se purifier de tout ce q[ui] n’est pas Dieu; il faut donc effacer de la mémoire toutes ces formes et connaissances p[our] s’unir a Dieu en parfaite et mystique Espérance. Toute possession
est contraire a cette vertu, puisque, d’aprés S. Paul, elle a pour objet ce gu’on ne posséde pas (Hébr., XI, 1)
(p. 315)°. Les moustiques, les fléaux, l’ennui, la guerre®, pour
nous faire souvenir de force que ce n’est pas pour un bonheur compatible avec ces lieux-ci que nous sommes
faits. On ne nous y laisse pas la paix.
378
En soleil. empli ment
Cahier IV
allant diner dans Vile de Lage+ coucher de Vaste golfe du ciel entre les nuages et la terre d’or trés jaune. Plus tard les montagnes netteviolettes.
La peur, c’est le signe du devoir. — L’amour consiste non a sentir qu’on aime, mais 4 vouloir aimer. — L’ame fait du bien dans la mesure de sa propre sainteté. Le Pére de Foucauld, assassiné en haine de la foi le
1€t déc{embre] 1916 a Tamanrasset?. Si Dieu existe, il est parfait. S’il est parfait, il n’a
absolument besoin de quoi que ce soit en dehors de lui. Rien hors de lui n’est, ou lui est nécessaire.
Le
ptincipe de toute création est donc un atte gratuit, fait pour® le bien non de celui qui crée, mais de celui qui est créé. La création implique donc la bonté, un bien proportionné a Pétre donné et construit a cet effet?. [10 v] Dimanche 13 mai. Discours au Théatre San Pedro, féte en Vhonneur de la jeunesse francaise. Succés. Nous recueillons prés de 13 000 francs pour les Orphelins.
Je finis de recopier /’Ours et la Lune’.
Porro ad me dittum est verbum absconditum, et quast furtive suscepit auris mea venas susurri ejus (Job, IV, 12). Stetit quidam cujus non agnoscebam vultum, imago coram oculis mets, et vocem quasi aurae lenis andivi (id., 16). Deridetur justi simplicitas. Lampas contempta apud cogitationes divitum, parata ad tempus Statutum (id., C. X11, 5)°.
Volupté. — Le papillon sur la rose. Il ne vit plus que par ce battement lent des ailes’. Départ de Guiard le 18 mai par le Demerara.
Mai 1917
379
Dimanche 20. Promenade dans les montagnes de la Tijuca avec Milhaud. La sombre forét. Le chaos de feuilles et de palmes, mélangé de fougéres arborescentes?, Vendredi
25. Le soir visite 4 l’observatoire qui se
trouve en haut de la vieille ville au Morro del Castillo? sur les ruines d’une vieille église Jésuite abandonnée et de beaucoup de caraétére. Le dire€teur, un Francais, M. Maurice, est un grand homme maigre articulé comme un instrument scientifique. I] a 9 enfants. II] nous montre la Lune a son premier croissant avec ses mers et ses cratéres, lamas d’étoiles colorées Kappa de la Croix du Sud, létonnant essaim appelé Omega du Centaure, la magnifique étoile double Alpha du Centaure’, l’étoile double rouge Antarés. Grande émotion de voir ces créatures de l’Infini. I] nous dit que les évolutions de trois corps Pun par rapport a lautre est un probléme tellement difficile au point de vue mathématique qu’il est presque insoluble. Que sera-ce pour ces milliers de corps qui composent [lamas] du Centaure, et qu’un « caipis »t de Pintérieur [11] com-
parait, me dit M. Maurice, a une poignée de riz qu’on jette aux poules? « Force centripéte, force centrifuge », virtus dormitiva. 27 mai. Pentecdte. Ce caipis 4 moustache noire qui tenait négligemment de la méme main une poule destinée au canja dominical® et une blague a tabac en caoutchouc. Vu Ruy Barbosa® dans sa bibliothéque, fréle comme un vieil inseéte et couleur tabac. Sa vue, d’un cété la tour démesurée du Corcovado, comme un observatoire de Océan, de l’autre le Pain de Sucre’.
Eliu le poéte. En venter meus quasi mustum absque spiraculo, et coaréat me spiritus uteri met. — En venter meus quasi musinum absque spiraculo, quod lagunculas novas disrumpit. — Loquat et respirabo paululum : aperiam labia mea, et respondebo (Job, XXXII, 17-20)8.
380
Cahier IW
Spiritus Dei fecit me, et spiraculum Omnipotentis vivificavit me (id.,
XX XIII).
Ecce haec omnia operatur Deus tribus vicibus per singulos, ut revocet animas eorum a corruptione et illuminet
luce viventium. Il les sauve trois fois (¢d., XX XIII, 29-30). Si direxcerit ad eum cor suum, spiritum illins et flatum ad se trahet?. 2 juin. — mon pére,
Ma nourriture est de faire la volonté de
Apprenez de moi que je suis doux et humble de coeur. Voici ce coeur qui a tant aimé les hommes.
Ecce sponsus venit, exite obviam eis. L’eau est agile, elle détruit le poids, glorieuse, elle brille, impassible’®.
Neque enim faciet pater meus quidquam grande vel parvum nisi prius indicaverit mihi (1 Reg., xx, 2)°.
[11 v] Quodcumque dixerit mihi anima tua, faciam tibi (tbid., xx, 4)’.
Paroles de Satil: Quoniam tenent me angustiae et adhuc tota anima mea in me est (II Reg., 1, 9)8.
Promenade en auto au clair de lune avec les Parr®. Tijuca, Gavea. La lumiére pareille a celle de l’extase. L’épaule de la montagne de granit pareille a un taureau assyrien!,
Dimanche to [juin]. Promenade au Saco do Sao Francisco, espéce de grande baie enclose comme un lac au milieu des montagnes. Les misérables huttes
Juin- Juillet 1917
381
des gens qui vivent dans le sable sous les bananiers. On
roule vers la porte un tonneau de tafia peint en bleu. Coucher de soleil.
Christiant mori expeditum genus (Tertullien)}. « Que faites-vous la devant le S. Sacrement? lui demandait-on un jour. — Je le dévore et il me dévore » (Sceur Thérése du Sacré-Cceur)?.
Crest déja bien assez d’étre sottes par nature; que sera-ce si nous voulons l’encore étre [sic] par grace? (Sainte Thérése)*.
Vie intéressante de Madame Barat*. — La révolution préparant une admirable moisson de vierges. Qui ' sait si celle-ci n’en prépare pas une autre non moins belle de veuves ? Fétes pour Itamaraty’.
Varrivée
de ’?Escadre Américaine
—
30 juin. Arrivée du Croiseur Marseillaise — Réception par moi le 11 juillet. Le 14, visites, etc. . Commandant de Closmadéne’. Le Pangermanisme. Une Puissance mondiale ne doit jamais étre satisfaite. — De méme que l’Impératif catégorique de Kant prescrit d’agir en vertu de la maxime qu’on peut en méme temps vouloir ériger son acte en volonté universelle, de méme [12] l’Impératif impérialiste pour Etat est le suivant : « Agis de telle maniére que ta volonté puisse devenir la loi universelle du monde » (la Puissance mondiale, par Adolf Grabowsky). I] nous est donc donné de voir notre peuple crever de nouveau son enveloppe pour porter la main sur Pinfini. Des aspirations immémoriales qui remontent a des milliers et des milliers d’années s’élévent de nouveau parmi les vagues grisatres de nos troupes qui déferlent en France et en Russie... Le Nord comme le
382
Cahier
IV
Sud, l’Occident aussi bien que l’Orient, doivent étre le libre théatre de nos efforts. Personne d’autre ne doit pouvoir nous barrer la route du monde entier. Nous avons, comme Faust, besoin de tout. Quiconque veut
s’y Opposer porte atteinte 4 ce que nous avons de meilleur et de plus sacré. Les aspirations mondiales ne constituent nullement un besoin de posséder. — Ces aspirations ne sont que l’immémorial instinct qui attire les hommes 1a ov il n’y a pas de frontiéres, la ot est Pinfini. Les aspirations mondiales sont le plus intime secret du sang germanique (/’A//emagne devant les portes du monde, par le Dr Friedrich Stieve). Il y a dans la nature méme de notre peuple je ne sais quoi qui aspire a dépasser les frontiéres actuelles de sa puissance... Encore que le peuple Allemand prit pendant des siécles son parti d’étre devenu impuissant, la pensée des Allemands n’en resta pas moins universelle, elle n’en embrassa pas moins toute |’Europe... Nous avons de tous temps senti en nous le besoin d’étre une puissance mondiale (le Prof. Martin Spahn, la Lutte pour notre avenir)}. Parole q[ui] m’est citée par le Professeur Dumas, d’un de ses éléves d’une magnifique intelligence et d’un grand avenir qwil conjurait de se réserver pour la France : « Je plains ceux qui n’ont a donner que leur vie pour la France. » Tué 5 jours aprés.
Nouvelles de Jacques Riviére interné en Suisse. — 13 aout.
[12 v] Isabelle Rimbaud, morte le 20 juin 1917, me fait son légataire universel. Plus tard j’ai renoncé au testament et tout rendu a P[aterne] B[errichon]?. Du 17 juillet au 2 aoit voyage dans le Sud. Départ sut la Marsez/laise avec le Commandant de Closmadéne. Santos, S.-Paul, le Parana et le Santa Catarina avec leurs
foréts
de pins araucaria
(le Royaume
du
Persil),
Juillet- Aout 1917 PIguassu, ?Uruguay,
383
le Rio Grande, les Autruches,
Santa Maria, Cacequy (le vieillard q[ui] vient n[ous] saluer), les huttes pareilles 4 des boites 4 biscuits en tuines), Rio Grande, la Lagune, Porto-Alegre’, le Président Borges de Medeiros?. Réception triomphale partout, musique, drapeaux, cortéges, discours. Retour par le méme chemin. Arrété en pleine forét 4 minuit par des insurgés politiques (Ismael Martins, le Colonel S., le chef de brigands Gonzalve 4 la Dent d’or!), S.-Paul de nouveau, la colonie Frangaise, Rio ot réception triomphale*. A mon arrivée j’apprends la naissance, dans la nuit du 2 aodt, d’une superbe fille‘. Et je trouve sur ma table une lettre de [séc]®. Aprés 13 ans! Grandes négociations engagées.
Vie spirituelle. I] faut fermer ses portes et ouvrir ses fenétres. Ballets Russes. Ensemble chatoyant, mais aucun principe d’art réfléchi. Les ensembles sont des marmelades. Nijinski est un homme intéressant, il n[ous] dit avoir trouvé la notation de la danse. Dans le Spectre de la Rose, dans les Sy/phides, il est affreux. Car il y a quelque chose au-dessous du mauyais, c’est la perfection dans le mauvais*®. 2 voies.
La danse
doit-elle
étre expression
d’un
sentiment ou a-t-elle un but purement décoratif ? Essai par Milhaud
de son petit orchestre, maigre,
chaque instrument conservant sa voix et sa démarche personnelles, manifestant intention de toutes les [rencontres] — Essai [13] de déclamation soutenu uniquement par des batteries avec succés complet. Ansermet’.
Dieu s’est fait homme Dieu (S. Aug.).
afin que ’homme
soit fait
N’ayant plus que leurs fusils brilants. Maria Chabelska
Léon Wojcikorski®.
« Parade ».
384
Cahier IV
Conversations intéressantes avec Nijinski. L’apresmidi d’un Faune’. Les Contes Russes. 19 juillet. Mort de mon beau-pére 4 Lyon®. Toujours ce mois de dénouements. 1-3 sept{[embre]. Voyage 4 S. Paul pour présider le comité Syrien. Harangue a la réunion des Syriens et Libanais. Banquet de 80 couverts a Trianon. Promenade 4 Cantareira avec Montgolfier et les Nijinski. Le lendemain conversation intéressante avec Nijinski sur mon projet de ballet et déjeuner avec eux au
Trianon’. L’Institut de Butantant. Le Professeur Vital Brasil. Le venin des serpents a un pouvoir extra-
ordinaire de faciliter la digestion. I] permet de digérer les os. Seules les plumes, les cornes, les écailles ne sont
pas digérées. 7 sept{embre]. Revue des Sociétés de tir au champ de Sao Christovao dans une pagaye extraordinaire. 8-11 [septembre]. Voyage a Thérezopolis avec les Parr. Cette brume qui ici comme aux E[tats]-Unis est une caractéristique de l’Amérique, donnant une impression de profond assoupissement. La grande colonne d’or rouge que faisait le soleil sur les eaux immobiles. Deux palmiers sur un triste lot. L’hétel Magourou', le Frangais planteur de légumes. L’ingénieur Norbert, ces petits animaux de la Terre de Feu qu’il a tués sous la neige. Promenade le matin. Le singe Gregorio chez cette vieille Francaise au milieu de la forét. L’oiseau Tangara. Le soir magnifique promenade 4 Quebrada Fresca’. Les 2 ravissantes villes, pleines de roses et de fleurs d’arbres fruitiers. San Antonio,
San Luiz. Les
Eucalyptus. La forét vierge comme une paroi verticale de verdures superposées. Et toujours cette étrange brume assoupissante. Le moyen le plus simple de dissimuler sa pensée est encore de mentir.
Septembre-Oftobre 1917
385
[13 v] Toute pensée, toute image dans l’esprit est accompagnée d’une certaine tension. On peut imaginer une série d’états de tension, dépouillés de pensée. L’état mystique. 2 éléments, intensité et temps. Lettre écrite par
’Abbé Lancrenion, Médecin aide-
major au 39° d’artillerie, ala mére du lieutenant Charles Halphin, tombé au champ @honneur, le 15 mai 1915 :
« Et je veux vous le dire aussi, le Dieu infiniment puissant et miséricordieux, dans lequel nous croyons tous, quoique différents de religion, dans lequel votre
fils croyait, a pris auprés de lui, je l’espére, l’Ame droite et loyale qui s’est sacrifiée pour le devoir, et il l’a prise pour Vimmortalité. J’ai prié du fond de mon cceur, hier, aujourd’hui, ce Dieu de miséricorde de recevoir _ votre fils auprés de lui et de v[ous] réunir a lui, quand ' le temps sera venu, pour une réunion éternelle et bienheureuse » (Ap[ud] Barrés, p. 290).
Dimanches a4 Petropolis. Décors pour le petit théatre de Madame Parr.
L’ Homme et son désir®, I’Annonce.
Jean Rival, 19 ans, tombé au Liny, le 20 juillet 1915. « Le jour de l’assaut, ma chére J., a ?instant supréme
ou sur le signe de mon capitaine, j’enléverai ma section au cri de: ‘“‘En avant! a la baionnette!”’, 4 cet instant
superbement tragique ot l’on joue sa vie, je songerai a vous, soyez-en stire : “En avant, les gars! En avant, ala baionnette, pour les Francaises nos sceurs!”’ » Bernard Lavergne : « En avant! 4 la baionnette pour la France et pour nos mamans!» (Ap[ud] Barrés, /es Diverses Familles spirituelles de la France). Ce papillon bleu, ce gros feuillage du manguier.
oiseau jaune dans
le
19 octobre 1917. — Cette lune australe dont on voit le bord inférieur. Ce soir Vénus posée sur la pointe extréme du croissant. La lampe de Psyché’.
386
Cahier IV
Rogo, Pater, ut sint consummati in unum. Hie est finis, haec consummatio, haec eft perfettio, haec ef pax, hoc est
gaudium Domini, hoc est gaudium in Spiritu Santo, hoc es silentinm in caelo (S. Bern[ard], De Amore Dei, cap. rv)}. [14] Mort de Marie Lataste. — Le 10 du mois de mai vers 4 heures du matin, lorsque autour de sa cellule une multitude d’oiseaux s’éveillaient dans les
grands
arbres
et chantaient
les louanges
de leur
Créateur, la sceur Marie Lataste préta Voreille, sourit, baisa le crucifix et rendit son 4me a Dieu?.
[14 v] « Si tu pouvais voir la beauté @une ame en grace avec moi, c’est la derniére chose que tu verrais ici-bas car tu en mourrais d’amour.» Alors que, dit PApotre, « voyant Dieu comme il est, n[ous] serons semblables 4 Lui». — Axima nostra foeda est per iniquitatem: amando Deum pulchra efficitur. Quantum in te crescit amor tantum crescit pulchritudo. Quia ipsa charitas est animae pulchritudo (S. Aug[ustin], Trad. LX in Ep. I Joann.)*. Au centre de la Bataille de la Marne « Arbre
de la
Justice ».
L’ampleur des cieux dilate, elle ne rapetisse pas les ceeuts, elle étend, elle n’affaiblit pas les amitiés. Dans la lumiére de Dieu on apprend ce qu’on ignorait et on ne désapprend pas ce qu’on savait déja (S. Bernard). Grande pauvreté des petits enfants qui possédent deux sous. Grande humilité des petits enfants.
Mise a sac de maisons allemandes le 3 Novembre. Petropolis, magasins saccagés, sacs éventrés, meubles et voitures jetés dans le canal, et au-dessus de tout cela
le drapeau brésilien flottant, avec Vinscription : Ordre et Progrés. Jours sombres, défaite Italienne, trahison Russe‘.
Offobre-Décembre
1917
387
Nouvelle lettre de R. (11, 11)}.
L’homme qui se fache est toujours le dernier a savoir les choses. 21 nov{embre]. Présentation de la Sainte Vierge. Sermon de charité 4 ’Eglise de Botafogo. Viétoire des Anglais.
Qui diligit cordis munditiam, propter gratiam labiorum suorum habebit amicum regem®. [15 v| Metor est manifesta correptio quam amor absconditus (Prov., XX VI). Date siceram moerentibus, et vinum his qui amaro sunt animo (Prov., XXXI,
6)‘.
3 déc[embre]. — Signature du contrat relatif aux 30 bateaux ex-allemands affrétés pour 110 millions. Ant[onio] Carlos, Min[istre] des Finances. Ant[onio] Lage, Paulo Prado’.
Le matérialisme ne sera jamais sinist paradoxe. Et quoi de plus froid qu’un paradoxe banal? Le portugais est une langue qui bourdonne et siffle. Un Portugais illettré de Pernambouc se faisait lire sa correspondance par un secrétaire, mais il avait soin de lui faite se boucher les oreilles avec du coton, pour qu'il ne st pas ce qu’il lisait. « Bégu» en picard s’applique aux personnes qui ont la mAachoire inférieure avancante.
Didici quod omnia opera quae fecit Deus perseverent in perpetuum,; non possumus eis quidquam addere vel auferre riicce, Wie t4)*:
Expoliavi me tunica mea, quomodo induar illa? Lavi pedes meos, quomodo inquinabo illos ? (Cant., V, 3)’. Sanabiles fecit nationes orbis terrarum (Sap., I, 14)*.
388
Cahier
IV.
Le mouvement de pénétration des Vosges se dessine au x1Ir¢ siécle; c’est en 1285 qu’apparait pour la 17? fois dans les aétes publics le nom de Gérardmer, comme celui d’une localité perdue dans les bois, d’accés dif-
ficile... Au xiv® siécle véritable ruée pour la possession agricole de ces hautes vallées... C’est parmi les bicherons,
bosseliers,
sabotiers,
cultivateurs
d’occa-
sion et de rencontre que se recrute le peuple des censitaires. — « C’est a la liberté que les habitants des Vosges, quoique dans le pays le plus ingrat de la Lorraine, doivent le peu d’aisance dont ils jouissent »
(Vidal de Ja Blache). En 1530 Jacques Elophe Claudel de la Bresse, pére [16 v] de 13 enfants, patriarche de toutes les familles du pays, Garnier, Perrin, etc.}. Le nom semble indiquer une origine normande. « Tracassiers et jaloux les uns des autres?. » Eis ra tov 7épav —
vers les choses d’au-dela.
Dim[anche] 16 décembre — Départ le soir pour un voyage sur la ligne du N[ord]-Ouest avec Bartholomé, Machado de Mello, etc.’. Bauru. Sur le banc devant la
locomotive. La forét vierge qui vous jette au visage ces poignées de graines vivantes. Le Parana. La création réduite a cette énorme masse d’eau qui descend et a ces deux murailles de verdure. Plus on se rapproche de la Création telle qu’elle est sortie des mains de Dieu,
plus on trouve de simplicité®. Ce qu’on appelle monotonie n’est que de l’éternité incomprise. Le Matto Grosso. Les élevages de bétail du Land and Cattle. Les plantations de manioc, une vingtaine d’énormes pis comme du lait. Le mais, 400 pour 1. Planté dans l’inter-
valle des arbres bralés qui jonchent le sol. Le riz. A perte de vue les champs de café. Saint-Paul. Conférence a la Société Pauliste d’agriculture sur la Propagande du café en France. Déjeuner chez le Président Altino Arantes. Retour a Rio. Jours de lutte et d’angoisse. L’intervention une fois de plus pour me protéger®, Le Tiété. Les cataractes. Les puissances de l’eau non
Décembre
1917
389
amorties. Passage 4 un plan nouveau avec tonnerre?.
Bauru, Itapura, Tres Lagoas, Arapua?. Deus escreve direito por linhas tortas®. Combien la destinée Juive est-elle plus grande selon le christianisme! Le Judaisme ainsi a contenu le salut du monde, il lui a engendré un Dieu. D’aprés le Judaisme,
ce n’est plus qu’une
petite secte oes
comme les Parsis, attachée a des priviléges prescrits, a des rites inexplicables et a des promesses irréalisées. [17] Je vais a Copacabana
dans une atmosphére
délicieusement marine et limpide voir se coucher dernier soleil de l’année.
le
Tu autem idem ipse es, Domine, et anni tui non deficient.
1918 .
ret janvier. Temps couvert et chaud. Le matin a 10 h. 44 réception des Frangais de la colonie. Quoniam tanquam momentum Staterae, sic et ante te orbis terrarum, et tanquam gutta roris antelucani quae descendit in terram.
Sed misereris omnium,
quia omnia potes; et dis-
simulas peccata hominum, propter poenitentiam. Diligis enim omnia quae sunt, et nihil odisti eorum quae fecisli; nec enim odiens aliquid constituisti aut fecisti. Quomodo autem posset aliquid permanere, nisi tu voluisses ? aut quod a te vocatum non esset conservaretur ? Parcis autem omnibus, quoniam tua sunt, Domine, qui amas animas (Sap., XI, 23-27). Tu autem Dominator virtutis, cum tranquillitate judicas,
et cum magna reverentia disponis nos: subest enim tibi, cum volueris, posse (tbid., 18)?. Noli discedere a muliere sensata et bona quam sortitus es in timore Domini; gratia enim verecundiae illius super aurum (Eceli.5) VIL, ‘24)*. Le signe le plus naturel de la joie n’est-ce pas la gaieté? Dans
une conversation
avec le Professeur Dumas
qu'elle avait appelé pour soigner une de ses pensionnaires, la tenanciére d’une des boites de Rio lui dit avec satisfaction en parlant de moi: « Enfin, on se sent représenté!! »
Coucher de soleil de la plage d’Ipanema'.
Janvier 1918
391
[17 v] L’étrange cri continu des cigales brésiliennes pareil au sifflet des marchands de cacaouettes [sic].
A hell which every one believes to be reserved for people a &reat deal worse than himself (Schiller, Humanism). Toute espérance repose en grande partie sur ’appui ue lui fournit ’imagination. Si nous ne pouvons nous aire une conception réelle de la chose que nfous] désirons, nous sommes disposés a |’éloigner de notre esprit et a la placer hors du champ de notre intérét actuel. Or, nous ne saurions nous dissimuler que depuis beaucoup d’années, un travail se fait qui consiste a enlever Pun aprés l’autre tous les appuis sur lesquels dans Vimagination populaire la croyance 4 limmortalité s’est jusqu’a présent soutenue. Si n[ous] persistons 4 fermer lune aprés l’autre les issues par lesquelles un homme cherche 4 atteindre sa destination,
a la fin il abandonnera
son entreprise et s’engagera
dans une autre direétion. Ainsi, si les hommes
tiennent une espérance dire que sa réalisation formes qu’ils pensaient fin ils feront volte-face
entre-
et si nfous] continuons 4 leur ne peut prendre aucune des qu’elle pouvait prendre, a la et déclareront que l’espérance
elle-méme est visionnaire. Telles semblent étre actuellement les conséquences de n[otre] démolition du paysage d’une vie future, des draperies majestueuses qui l’entouraient. En enlevant ces accessoires nous n’avons rien laissé que le vide (J. Gamble, « Immortality. A Christian belief», Ouaterley Review, n° 450)?. Les Anges, amis familiers des hommes,
Les Archanges, gardiens des Cités, Les Principautés, qui gouvernent les Empires, Les Puissances, dont la fonction est de contenir les
forces malignes, Les Vertus, par lesquelles Dieu réalise ses miracles,
Les Dominations,
chargées de guider les souve-
rainetés temporelles et les Mondes,
Les Trénes, q{ui] entourent le tr6me de Dieu dont ils sont les interprétes, CLAUDEL V - 16
16
392
Cahier IV
Les Chérubins, Divinité,
q[ui] contemplent
Les Séraphins, tout embrasés Saint Michel).
face a face la
d’amour
(Office de
[18] On pronongait autrefois pour Cheptel, Chatelet (Ch’tel, Ch’let). — V. Balzac, /es Héritiers Botrouge’. Rodin — Artficle] de Ch. Morice. Mort [Noviembre] 1917). ... logique de sa nature lexige. Et que de fois, en effet, ne l’avons-nous pas vu caresser et « renifler » les fragments antiques qui composaient sa collection? Carriére était un observateur infaillible et Penthousiasme chez lui ne paralysait pas la clairvoyance. Il montre bien le Rodin vrai : ce nez, d’abord, monu-
mental, dune seule venue et qui rejoint d’un trait dunion
immédiat
la vie extérieure
au
cerveau;
ce
cerveau, sirement abrité par le mur étroit et droit du front; et puis, la barbe, abondante, douce, longue, flottante, neigeuse, voluptueuse, qui caresse le visage
dans le vent et atténue de son cadre ouaté la netteté un peu rude des traits... La bouche, cachée 4 demi par la barbe et les moustaches, se voyait peu, chez Rodin;
elle ne se révélait guére que dans le rire, qui, naturellement, la déformait : un rire puissant et grimagant. Et les yeux se défendaient. Leur regard bleu clair se fixait comme une pointe sur celui de l’interlocuteur; on avait Pimpression dune fléche d’azur nettement décochée, et tout a coup s’éteignait le ciel d’ou était tombée la fléche : d’épaisses paupiéres se fermaient sur les globes bleus, comme des volets sur les fenétres d’une maison éclairée. Un instant, le maitre demeurait silencieux, il méditait sur ce qu’il venait de voir et d’entendre, et,
défiant, préférait dissimuler le travail d’assimilation et d’élimination auquel il était en train de se livrer; et, de
nouveau tout a coup, une fléche encore, accompagnée de quelques paroles nettes et définitives. Cette mimique était surtout rituellement observée dans les relations @affaires. Cela sentait ’homme longtemps éprouvé et
Janvier 1918
393
qui se reprochait d’avoir, dans sa jeunesse, répondu souvent trop vite; on ne l’y prendrait plus. Il restait indélébilement marqué par les épreuves qui, aprés avoir désolé sa jeunesse, l’avaient poursuivi es sommet de son age mar, jusqu’au seuil de sa vieillesse. Qu’un homme}... Une humble maison si basse que les poules se proménent sur le toit. 20/1. — Promenade 4 Nova-Friburgo*. La forét comme une toison, comme une laine, qui habille la montagne du haut en bas. Cette femme mulatre, au cinéma, en satin bleu, une rose rouge 4 la ceinture, qui
_ se haussait pour atteindre de la main l’ampoule élec'trique. A la messe un négre a longue barbe blanche, le ruban du Sacré-Cceur autour du cou. Tous ces mendiants négres. La main qui se souvient. — On sait que les personnes amputées d’un membre conservent le « sens» de ce membre et que le membre perdu peut méme les faire souffrir. Un soldat écrit au Manchefter Guardian : « J’ai eu l’infortune de perdre la main gauche a la Céte de Messines en Juin dernier, et toute la souffrance occasionnée par la blessure est dans la main que je ne posséde plus depuis longtemps. Ce qu’il y a actuellement de particulier, c’est qu’un jour les doigts de la main amputée sont ouverts et le lendemain fermés. Ce changement s’opére durant le sommeil, et une fois ou deux, en des nuits agitées, j’ai réellement senti ce changement se faire. J’étais gaucher et, durant l’attaque, je tenais mon revolver de la main gauche, aujourd’hui perdue. Quand les doigts sont clos, ils sont exactement dans la position ot ils se trouvaient en serrant le revolver. La seule explication que je puis offrir est que ce qui me restait de la main aprés avoir été blessé fut amputé exattement 24 heures aprés. Ainsi je fus blessé vers 4 heures du matin et fus opéré vers la méme heure le jour suivant, et c’est précisément
394
Cahier
IV
vers cette heure que s’opére le changement dans position des doigts?. » Cela confirme ma théorie que la sensation comme mouvement est le résultat d’une préparation venant Pintérieur qui reproduit le prétexte extérieur. Sens sensibilité ne sont pas identiques. La sensation possible sans les sens’.
la
le de et est
Une lettre de ma femme m’apprend le mariage de RK. F. en janvier*. [18 v] Nov[embre]
1917. —
Mort de Léon Bloy*.
Marco Polo vit dans ile Mystorak larbre du soleil et celui de la lune q[ui] parlérent 4 Alexandre pour lui annoncer son trépas.
Prado me parle d’un de ses ancétres, Fernando Diaz de
Paes
Leme,
un
des
bandeirantes
des
temps
héroiques. A 80 ans il organise une expédition pour découvrir les fameuses Montagnes d’émeraude®. Son fils s’étant révolté, il le fait fusiller. Un
des
bandeirantes
tenait
ses
comptes
sur
les
marges d’un exemplaire des Lusiades qu’il portait partout avec lui.
Non impedias musicam (Eccli., XXXII,
5)*.
Que le philosophe ne regarde jamais une loi de physique comme une vérité inébranlable et illimitée q[ui] demeurera éternellement vraie, q[ui] ne rencontrera jamais d’exception : loi approchée, d’une approximation q[ui] nlous] satisfait, mais q[ui] ne satisfera plus nos successeurs, toute loi de physique acceptée aujourd’hui est destinée un jour 4 étre rejetée (Duhem)’. 29/1. — Grande émotion, affaire du Convenio’. 1/2. — Premiéres heures de la matinée, la lune disparaissant comme un front chauve. — Anniversaire de mon arrivée a Rio.
Janvier-Février 1918
395
Ce n’est que vivre... Nous ne croyons pas que la paix ait quitté le monde sans lassentiment divin. Dieu permet que les nations quel avaient placé toutes leurs pensées dans les choses e la terre se punissent les unes les autres par des carnages mutuels du mépris et de la négligence avec lesquels elles Pont traité (Benoit XV)+. [19] Triple opération du feu : Tripliciter sol exurens montes, radios igneos exsuffians, et refulgens radiis suis obcoecat oculos (Eccli., XLII, 4). Le S. Esprit. Les effets qui empéchent de voir la cause?? (Luna) Vas castrorum in excelsis, in firmamento coeli _ resplendens gloriose (id., ibid., 9)°. Et tabernaculum erit in umbraculum diet ab aeStu, et in
securitatem et absconsionem a turbine et pluvia (Is., IV, 6)8.
Is. Ecce virgo concipiet®, etc. Juda est attaqué par les deux rois de Syrie. Isaie déclare 4 Achaz qu’il n’a rien 4 en redouter, et il lui
propose un signe, « qui aille jusque dans la profondeur de l’enfer, ou dans la hauteur au-dessus ». Achaz refuse.
Crest alors qu’Isaie lui annonce la conception d’une Vierge, q[ui] aura un fils, et avant que ce fils sache distinguer le bien du mal, les deux brigands auront disparu. Or cette prophétie, si on la prend littéralement, ne s’est nullement réalisée, l’Ecriture ne fait mention d’aucune vierge qui ait enfanté, et d’un si
grand prodige 4 l’occasion d’un incident d’ailleurs si médiocre et si obscur. Il faut donc supposer que le prophéte a vu les événements en perspective, et que n’importe quel événement de l’histoire, n’importe quel grand danger [paien] menacant le peuple élu, aurait aussi bien pu servir de premier plan au fait central que constitue le mystére du salut et de la rédemption. Comme
s’il disait : Ecoute, une vierge enfantera, et
avant que son fils ait gotité de notre nourriture, toutes tes misérables craintes se seront évanouies. « Comment
3.96
Cahier [IV
fais-tu de l’avenir le signe du présent? et d’un événement qui ne se réalise pas 4 mon expérience le gage dun fait que tu prétends devoir se réaliser ?» — Non pas seulement signe, mais cause. La cause et le signe de ton salut, non pas seulement dans le temps, mais
dans |’éternité, c’est cette Vierge que je t’annonce qui enfantera?. [19 v] Le coq qui essaye de chanter /a Marseillaise.
Au-dessus de la baie de Rio ces montagnes fréquentées par les tapirs. 19/2. Du 9 au 14 [février] (jours gras) séjour 4 Thérézopolis. Grande promenade a cheval qui m’éreinte. Entretiens avec Norbert qui m’apprend un tas de choses sur le Brésil?. Nouvelles émotions!
Plus ou moins heureux suivant que l’on est plus ou moins cause. Le monde futur est le monde des causes?.
« ... dit-elle 4 cété de moi 4 demi nu dans son lit. Il dort. Sa poitrine nue qui brille dans la clarté nocturne »
(19/2)*.
Lettre du 22 sept[embre] 17 de Madame Dohrn me disant quelle s’est convertie et qu’elle croit en Dieu. Disparue dans les troubles bolchéviks. Ses petits fils*.
Non te servire feci in oblatione, nec laborem tibi praebui
in thure (je ne t’ai pas fait me servir dans une offrande volontaire, et je ne t’ai pas donné ta tache dans l’encens) — Verumtamen servire me fecisti in peccatis tuis, praebuisti mihi laborem in iniquitatibus tuis (Ce sont tes péchés qui ont été ta tache, c’est cela qui a été ton service) (Is., XLIII, 28)*. Extraordinaire beauté et enthousiasme de ces chapitres.
27/2. Vote de l’accord franco-brésilien 4 la Chambre. Premiére heure du matin. La Lune encore
luisante
Février 1918 parmi des nuages fantastiques, paysage de nuées bleu et gris.
397 dans
un
étonnant
A la messe du matin cette vieille fille jaune, 4 maigre moustache, l’air un peu fou, coiffée d’un chapeau de
paille brun en ballon qui ressemble a la coiffure de Pallas Athéné, avec sur le coté un petit neeud couleur giroflée. [20] Que de chapeaux inouis j’aurai vus a ces messes du matin! Que de types de vieilles femmes et de vieilles filles?! Un nombre si parfait qu’il ne saurait étre exprimé part un chiffre?. « Crois-tu que mon cceur suffise 4 guérir le tien? » (Parole de N.-S. 4 une Religieuse du S. C.).
Rien dont Dieu ait plus d’horreur que de ce « respect » détestable, pareil a celui de ces soldats qui le couronnaient d’épines, et qui, aprés avoir fléchi le genou devant lui, le frappaient et le conspuaient. Sous prétexte de « respect» il ne faut pas l’isoler totalement de ’homme, comme l’ont fait les Musulmans qui l’ont relégué derriére un abime infranchissable, et ont da charger les « houris » d’assurer le bonheur supréme des Elus. De méme les Juifs qui voient dans l’Incarnation une dégradation et un blasphéme. Dieu lui-méme a tellement en horreur ce « respect» qu'il a voulu étre foulé aux pieds, broyé, traité comme la derniére des créatures, comme le plus infame des criminels. C’est
ce qu'il a choisi pour sa part, plutdét que le « respect » officiel, comme s’il disait : Eh bien, maintenant que vous
m/’avez
ainsi traité, massacré,
foulé aux pieds,
avez-vous encore peur de moi? croyez-vous que vous ne pouvez pas me traiter comme l’un de vous et établir avec moi ces rapports humbles, intimes et substantiels ue je demande*?? —
Entre le Dieu froid, lointain et
convenable de la religion officielle, et le sauvage qui fait intervenir sa naive idole dans tous les aétes de sa vie, ce dernier est peut-étre davantage dans lordre religieux‘.
398
Cahier
La femme cravate.
IV
délie sa ceinture et ’homme
dénoue
sa
Point d’appui non plus sur les pieds mais sur le Coeur ou Cause. [20 v] C’est une affaire 4 mener simplement et résolument comme les autres (la mort) (Le P. de Ravignan). Speculatores ejus caect omnes, nescierunt universi: canes muti non valentes latrare, videntes vana, dormientes et amantes
sommnia... Kenite, sumamus vinum, et tmpleamur ebrietate : et etit sicut hodie, sic et cras, et multo amplius (Is., LVI, 10-12).
Quia ego tacens et quasi non videns (Is., LVII, 11)}. La fléche avec
une
pointe de cristal de roche.
La
fléeche terminée par une espéce de massue pour tuer les oiseaux.
17/3. Promenade au Bico do Papagaio. — La forét avec ses fougéres arborescentes comme aux temps fossiles. Grimpade a pic dans la terre et les racines jusqu’a cette pile de rocs d’ot l’on domine deux versants. Mouvements immenses de la nuée sous mes pieds. L’ombre de la montagne qui se refléte au cceur du brouillard entourée d’un iris qui passe du bleu pAle par le jaune pale au rose pale. La forét au-dessous de mol, immense €ponge vette’. La nature n’est qu’une immense
ruine.
du suif au lieu de cervelle.
Ces petites femmes blondes 4 l’air timide qui portent sur la téte un édifice aussi ambitieux que SainteSophie’. Souvenir affectueux de la chére sceur Brigitte ip m’a apprisa lire 4 la Doétrine chrétienne de Bar-leDuc. La vieille chére sceur Alexis‘.
Mars 1918
399
Un tout petit papillon jaune se pose sur le sourcil de Palpiniste. Par terre une espéce d’orchidée comme une pomme de thyrse ou une massue rouge et rose. [21] Recordatus sum tui, miserans adolescentiam tuam, et charitatem desponsationis tuae, quando secuta es me in deserto, in terra, quae non seminatur (Jér., I, 2)*.
Gribouillans gribouillabit. A. S.*. Dimanche
des
Rameaux
a
Petropolis.
Le
soir,
2 processions aux flambeaux s’avancant a la rencontre Pune de l’autre, une escortant le Christ sous sa croix,
Pautre la Sainte Vierge, avec un grand manteau ‘velours
noir et tenant
un mouchoir
de dentelle
de 4 la
main. En chaire sur la place publique un prétre commente. — Le Vendredi-Saint a 9 heures du soir, autre
procession dans ma rue. La croix, 2 lignes de cierges. Des petites filles costumées en anges qui portent tous les accessoires de la Passion, y compris le coq et le crane. Grosse caisse par derriére tapant doucement a coups sourds. Toute cette foule recueillie de négres en marche par derriére sous Vallée des palmiers par ce grand clair de lune. Dimanche de Paques. 31/3. Messe basse dans cette église de copeaux dorés de S. Bento. Le bruit des cloches en bas par cette fraiche matinée radieuse qui arrivent [sic] par la porte grande ouverte. — Le soir ptomenade a Campo-Grande et plage de Guaratiba. Le vieux petit village avec ce bras de mer dominé par ses trois cocotiers’, ses vieux toits de tuiles. Huttes de
pécheurs au bord de la mer comme en Océanie. L’éclat de la robe orange de cette petite fille entre les feuillages. Arbres q[ui] poussent jusque dans la mer. Encore une autre baie. Bain parmi les rochers. Danses de négres. 21 mats. Grande offensive allemande. Autres jours d’angoisse*.
400
Cahier
IV
Jésus dit : Ouid me interrogas ? interroge ceux a qui je m/’adressais tous les jours et que j’ai instruits, ils pourront te répondre de tout et rendre témoignage de moi. Jésus entre, toutes portes fermées. 1€T avril, le soir promenade 4 la petite ile de Paqueta?, [21 v] Cocotiers. Vieilles maisons Portugaises. La maison solitaire avec un promontoire couvert de palmes entrecroisées ouvert sur |’étendue. En rentrant failli aborder
des chalands
abandonnés.
La ville, un
immense demi-cercle de lumiéres, avec une espéce de trodne lumineux au milieu. — Meilleures nouvelles’. 2/4. Reine me t[é]l[é]g[raphie] qu’elle est 4 Lyon.
Théories et imaginations. On finira par se lasser de vivre dans le monde des hypothéses improuvables. 7/4. Travaillé avec la Fée rouge? a un abat-jour. Effets d’ombre avec des figures découpées. Ecce ego adducam eos de terra aquilonis, et congregabo eos ab extremis terrae : inter quos erunt coecus et clandus (comme dans la parabole), praegnans et pariens simul, coetus magnus revertentium huc (Jér.,
XX XI, 8)‘.
14-15/4. Promenade a Lages, usine et réservoir de la
Light and Power. Un seul barrage d’une centaine de métres a suffi a former un énorme lac qui occupe toute une ramification de longues vallées. Promenade en launch électrique au milieu de ces foréts 4 demi submergées. La fazenda accommodeée avec tout le confort moderne, cuisine et chauffage 4 l’électricité. Monsieur] et Mad[ame] Bevan, 3 petits 4 cheveux presque blancs. L’usine avec ses neuf énormes toupies (générateurs). Vision dela force énorme de l’eau. De méme au réservoir cette longue nappe ruisselante d’eau a Vétat de charpie comme le coton prét a étre filé. — Les 2 Statues en porcelaine blanche de Porto, ’Hiver et ?Eté. En
Abril 1918
401
revenant cette petite maison rose avec 3 portes en ogive. Un monsieur lisant son journal vu dans l’encadrement. A ses pieds un enfant couché tout de son long par terre. — Cette force énorme et comme spiritualisée transportée sur un seul fil (88 000 chevaux) puis transformée en une multitude de petits courants. [22] M. Rego de Barros. — g[rammel]s.
En rentrant t[é]l[é]-
In loco isto (quem vos dicitis desertum, eo quod non sit homo neque jumentum ) (Jjér., X XXIII, 10)! Crest donc qu’il y a d’autres étres.
A Lages Peau comme désagrégée par la violence avec laquelle elle est lancée, un élément qui déja res‘semble au feu. Du mouvement déja presque sans matiére comme la force qui s’en dégage et qui fuit par le fil. Les feuilles qui s’ouvrent et se referment sur lui. Le torrent vu de haut comme un marbre immobile et comme des échevaux de coton. Justification de la réponse d’Aristote contre Héralite [szc] sur la forme permanente. Il y a un autre testament. Et statuam eis teamentum alterum sempiternum (Bat., Jiagsit:
24/4. L’harmonium aussitot il se tait*.
q[ui] m’empéchait
de prier,
Ce jésuite qui ne pouvait pas mourir avant d’avoir la permission de son supérieur. Au front orgueilleux de Goethe je préfére cette lumiére qu’on voit sur le visage des Filles de la Charité. Lettre de B[erthelot] q[ui] m’avertit que je ne puis rentrer avant Octobre.
402
Cahier
IV
Premiére Station. Jésus condamné a mort. Le Juge, le jugement, livrant lachement le Christ a la foule des passions q[ui] hurlent.
Les poétes brésiliens canaris mécaniques.
: une
petite collection
de
Un cocktail plutét cuisant que chaleureux qui est comme l’approbation d’une mauvaise conscience. Ce pays inconnu qui est la-bas comme de l’or dans lefuturiye Ballet d’Anna Pavlova?, sans aucun intérét.
Décoration pour un salon en cretonne avec un fond jaune et de grands dessins rouges et noirs. De méme, théme des [22 v] feuillages tropicaux, la feuille de chamaerops’, la double boule des cocos.
Le régne des avocats. Naturellement la liberté a laquelle un avocat tient le plus, c’est la liberté de la parole. Le Principe des nationalités poussé a l’extréme, c’est le régime du divorce transporté du domaine de la famille dans celui de la nation. La volonté momentanée @une majorité plus ou moins éclairée ne suffit pas a abolir le passé et 4 engager l'avenir. — La liberté d’un peuple cesse 14 ot le danger d’un autre commence. Ex[emple]: ?Irlande. Lui accorder l’indépendance com plete serait pour l’Angleterre une folie. —II est amusant de voir Amérique se faire le champion du droit des peuples a disposer d’eux-mémes quand on se rappelle la Guerre de Sécession qui fut la négation (parfaitement justifiée) de ce principe, contre ’unanimité des
Etats du Sud qui voulait [sc] se détacher de Union‘.
Plus nous allons et plus du régime de la liberté nous devons passer 4 celui de la compétence. Ex[emple] : Phygiéne, ot ce sont non
meédecins q[ui] décident, et
plus les députés, mais les
d’une maniére draconienne.
Abpril-Mai 1918
403
Liberté de la parole, de la presse, de la pensée, etc.
Tout cela dans le fond part d’un mépris naif et grossier pour tout ce qui n’est pas le fait, l’acte réalisé et matétialisé! Comme si la pensée ne comptait pas, était par elle-méme
inoffensive!
Ainsi
le vol est déli€tueux,
excitation au vol (en particulier) l’est également. Mais excitation au vol, en général’, les théories de négation
de la propriété ne le sont pas. De méme pout les autres théories : liberté de la chair, etc. L’aéte est défendu,
mais l’acte qui détruit chez les individus opposition a Paéte ne lest pas. C’est idiot. — Toute pensée exprimée et communicable est un adte et un atte ayant une portée sociale, et peut étre délitueux. L’expression de certaines opinions est parfaitement un délit et parfaitement un crime. Messe pour les soldats Portugais tués dans la derniére Offensive. Le sermon a été long, mais quid hoc ad aeternitatem ?
Sermon ou conférence, le meilleur moyen de n’avoir pas sommeil, c’est de dormir.
2/5. Concert de Milhaud : Festival Debussy?. [23] 8/5. Arrivée de la Mission Anglaise Bunsen. Conversation avec lAmbass[adeur]. Diner a I’Itamaraty.
Une musique si belle que je ne saurais lui préférer que le silence’. Plus j’étudie les gens heureux, plus je suis eftrayé de
leur incapacité divine. La vie heureuse et commode conduit 4 l’aflaissement de l’4me. On jouit sans faire de mal et cependant peu a peu le ressort se détend, la priére cotite, la mortification s’enfuit; on est a l’égard
de Dieu dans un état négatif (Lacordaire)‘.
Domine, nisi te quid volui in caelis et a te quid desideravi super terram ? (Ps. LX XII, 25).
404
Cahier
IV
Pentec6te 19/5. Petropolis, et brouille avec les Parr. © Un simple ennui peut devenir un grand chagrin par tout ce qu’il réveille.
Le bonheur est d’étre une cause, et de servir plus ou | moins 4 Dieu'. La grace, le sourire irrésistible?. Une telle joie qu’elle ne peut s’accorder qu’avec la doulfeur]. Il faut que le cceur ait été ouvert®.
O lux beatissima — fidelium'.
Reple cordis intima —
Tuorum
Incroyable absurdité de cette idée qui fut celle pourtant de tant de profonds philosophes et de grands esprits! du xrx® siécle, Hegel, Renan, et encore main-
tenant ce pauvre Thomas Hardy, d’un dieu en formation qui n’est pas encore mais q[ui] finira par étre tout a fait un jour. Bien qu’on s’abstienne soigneusement
de définir ce terme Dieu (4 qui on a trouvé d’ailleurs
un riche écrin de synonymes) qu’est-ce que ce Dieu soumis au temps et qui est chaque jour un peu plus qu’il n’était la veille ?Dieu est Etre parfait. Comment peut-il étre un peu plus Dieu et un peu moins Dieu? [23 v] Out puise-t-il le principe de son développement, dans sa seule volonté ou hors de sa volonté? et ou en trouve-t-il la matiére en lui-méme ou hors de luiméme? Autant de contradictions dans les termes. C’est la un de ces monstres informes, une de ces idoles 4
membres disparates, que le xrx® siécle a adorés. Qu’estce qu’un Dieu soumis au temps? 28/5. — Attaque des Allemands et enfoncement des lignes de Aisne. Angoisse pour ma mére, pour ma sceur, pour Villeneuve, mon pays natal®. 30/5. — Féte du T. S. Sacrement. Prise de Soissons. Les Allemands prés de Fére. Jours de profonde tristesse. Usquequo, Domine 2
Mai- Juin 1918 31 mai. Prise de Fére-en-Tardenois mands. 3 juin. Arrét de Voffensive Chateau-Thierry.
405 par les Alle-
allemande.
Prise
de
6. — définitif. Ma mére et ma sceur sauvées, parties pour Benest (Charente) chez les André Berthelot, comme en 1914.
_
7. Féte du S. Cceur!. Féte des cceurs transpercés, des affections méconnues, des désirs insatisfaits.
Jésus prie pour les gens qui ne savent pas ce qu’ils font. A la messe par exemple. |
Qui deducts velut ovem Joseph. Les moutons
4 la transhumance.
Sur le ruban d’un chapeau canotier pourquoi ne pas dessiner les figures du Zodiaque ou les symboles planétaires P | |
9. Promenade en auto avec le jeune Perrier a Guaratiba*. Panne d’auto, excursion en pirogue. Les maisons roses et bleues sous les grands palmiers. Au retour j’apprends la nouvelle offensive all[emande] entre Noyon et Montdidier. Mon amour de la chair.
est si grand qu’il a oublié les chemins
Malheur de |’4me sourde, aveugle, paralysée, et qui entend comme 4 travers plusieurs murs‘.
Attentes et déceptions. Le
8, nouvelle
de mon
départ possible pour
les
Etats] -Unis. [24] Pris la main bouteille.
dans le sac et la bouche
4 la
406
Cahier
IV
Aux femmes : Pro co quod moerere fecistis cor justi mendaciter, quem ego non contristavi (Ez., XIII, 22).
Ma mére et ma sceur se sont réfugiées 4 Hostel. 10 [juin].
Le temps qu’un grand chagrin se change en une agréable mélancolie. Quae retribuam D{omi|no pro uniwersis beneficiis suis ? (Pso CXV 512). Ajournement indéfini de mon retour en France.
16/6. Promenade au Bico do Papagaio. voyons 3 gros singes dans les arbres’.
N{ous]
Le saladier fossile ot bouillent des lacs de lie et ces
mers fumantes ot folatrent des morues grosses comme des frégates a trois ponts, en tdle*!
Cette large feuille grasse et transparente, comme si elle était faite de paraffine.
Les électuaires végétaux. Rio Pebad Ede
Ee 174
hue2o°.
A PAssyrio la nuit les femmes qui dansent convulsivement,
et de lorchestre
partent tout
4 coup
des
chants et des rires de damnés qui vous donnent froid dans le dos.
Le pianiste Arthur chienne repoussée.
Rubinstein*’.
Offensive
autri-
24/6. Partie de péche avec les Lage. On prend 6 gros poissons.
Juin 1918
407
La rime au bout d’un vers de 140 pieds comme une ablette d’argent. (Le Sud) J’ai connu les régions par-dela d’ot ce souffle si doux m/arrive... Mot
de Geethe
S’immobiliser, « L’Etat
est
providence Phomme
: Wie ich beharre,
c’est s’asservir
des sans
Vessence
hommes, limite,
de
bin ich Knecht.
(cité par Boutroux)!. toutes
les
réalités,
la
Etat
est
... le véritable
[24 v] infini,
complet,
réel,
divinisé, absolu» (Feuerbach, cité par Lévy-Bruhl, /’All|emagne| depuis Leibnitz, p. 420). Et Pon parle des Idoles et du Dieu Nabuchodonosor! « Il est de essence
de l’Etat de n’admettre aucune
force au-dessus de soi» (Treitschke, Po/tik, I, p. 37). Pas
méme
Dieu.
28/6. Essais de photo chez Perrier avec Rubinstein en se servant de lumiéres éleftriques d’intensités différentes pour modeler le visage*. Déj[euner] chez Madame Lage. Le soir chez les Guerra’, /e Sacre du Printemps & quatre mains avec M{[ilhaud], /’Oiseau de Fen.
29/6. Au soir, départ pour Therezopolis avec M[ilhaud] et les H[oppenot]. Promenade dans la forét vierge vers la Cascata Feroz, les arbres couverts
dorchidées
au-dessus
de lumiére
dans
de la petite
les feuillages.
riviére,
Fazenda’
taches
Baker.
Le
lendemain, 5 heures de cheval entre Ther[ezopolis] et Itaipava par la fazenda Sant’Antonio. Diner chez les Parr. Couché a l’Hétel Moderne. Deéc.’.
Causé avec le Comm. D. qui était sur /’Eclaireur a Sh[angha]li en méme temps que moi au moment de l’émeute de la Pagode de Ningpo (1898). Tragique histoire du Commandant T. II avait épousé une jeune
408
Cahier
IV
femme beaucoup plus jeune que lui qfui] avait trompé pendant son séjour en Chine. Mourante, elle lui avoua tout — et guérit. I] ne dit rien mais ne pardonna pas. Au bout de six ans ainsi passés elle se tue. Pietas ad omnia utilis et (Le prédicateur de ce matin chez les Sceurs). S. Paul. A tout,
méme
aux
affaires,
4 la littérature,
a la
guerre. Elle donne une fraicheur, une jeunesse éternelle d’esprit, elle neutralise? la passion et les mouvements de l’4me immodérés, elle éclaire l’intelligence et la repose. Par elle Vesprit est posé, il n’est plus en perpétuel suspens.
S. Jean Damascéne appelle Dieu « une mer de subStance sans détermination et sans borne »?. [25] L’étre que les créatures se partagent ne leur appartient pas : cet étre est propre 4 Dieu plus qu'il n’est propre a chacun de ses bénéficiaires; la communication que ceux-ci en regoivent est tellement mystérieuse que nul ne peut marquer de quelle fagon Dieu et nous sommes distinéts, et que les plus hauts penseurs se voient forcés de dire, avec saint Thomas d’Aquin : L’étre de Dieu et le ndétre ne font pas addition, et
avec saint Augustin : Dieu est intime aux choses plus que les choses 4 elles-mémes. En effet, Dieu n’attend pas que les choses soient pour les aborder; il les touche, si je puis dire, pour les mettre en possession d’elles-mémes; il fonde leur possibilité, puis leur étre, et c’est seulement ensuite, comme par réflexion,
que cet étre emprunté sera présent 4 soi. Bien mieux, notre présence 4 nous-mémes est encore une présence
de Dieu; car Dieu
occupe
par nous
cette
place de son empire; Dieu ne s’écarte point de l’endroit ot nous subsistons, ni de l’étre que nous détenons; il est par nous diffusé comme la lumiére dans
Pair et dans les corpuscules de lair; c’est bien vraiment
en lui, non
par une
confusion,
mais par une
compénétration ineffable que non seulement vivons et nous mourrons, mais Nous sommes.
nous
|
Juillet 1918
409
Il suit de 14 — notre vie tout entiére n’étant jamais qu'un contaét avec nous-mémes et avec tout — que nous sommes en présence de Dieu non seulement a titre direct, comme
nous
l’exprimions,.
mais
par
Pintermédiaire de tous nos objets, y compris cet objet immédiat qui est nous-mémes (R. P. Sertillanges, la Vie en présence de Dien). Ainsi tu te figurais qu’il n’y avait pas de moyen entre nous deux... Crois-tu le contraire a présent??
Je t’avais fixé ce rendez-vous’. 7/7. Promenade
par lintérieur de la montagne
de
Gavea a Tijuca. Les buissons pleins de grosses fram_boises rouges. ,
Ce matin une négresse avec une camisole bleu foncé, une autre camisole dessous d’un bleu presque noir et dépassant d’un pouce et un jupon bleu clair.
Le principe de l’Espace est une exclusion réciproque ou impossibilité pour deux étres différents de coincider dans les mémes limites ou termes. Quand la nature se dissout, est-ce qu’elle pourra retenir un cri de douleur? 9/7. Dans Hzéchiel, XX XVIII-XXXIX — Prophétie de Gog et Magog q[ui] semble si étrangement s’appliquer aux événements aCtuels : 22. Ef judicabo eum peste, et sanguine, et imbre [25 v| vehementi, et lapidibus immensis; ignem et sulphur pluam super eum, et super exercitum ejus, et super populos multos q[ui| sunt cum eo. 1940%.
Une théorie physique n’est pas une explication. C’est un systéme de propositions mathématiques déduites d’un petit nombre de principes, q[ui] ont pour but de représenter aussi simplement, aussi complétement et aussi exa¢tement que possible, un certain nombre de /ois expérimentales (Duhem)*.
410
Cahier IV
C’est exactement ce que j’ai dit dans Connaissance du temps. Le mot /oi seul est de trop, puisqu’il indique une déduétion de la cause a l’effet rendue obligatoire par un principe q[ue] l’expérience ne suffit pas 4 fournir. Les théories physiques ne sont qu’un dessin schématique de faits plus ou moins complexes’. . ce lien fa€tice de nos théories scientifiques, apte seulement Aa coordonner momentané.
un
état
de
connaissances
La vieillesse a plus besoin d’aétion que la jeunesse (Blucher). Combattre, c’est s’exposer — et c’est s’imposer.
Les lettres qu’on a écrites et pas envoyées, elles arrivent?. Jai encore dix minutes 4 admirer ce musicien — celles q[ui] précédent l’audition de son ceuvre. Féte du 14 juillet. Manifestations toute la journée en ’honneur de la France. Le matin je remets un drapeau au tiro 245. Le soir grand banquet au Derby
Club, en présence du représentant du Prés[ident] de la Rép[ublique] et de tous les ministres. Je prononce un grand discours qui a beaucoup de succés*. Toute la semaine visites et discours. Concert de Rubinstein. — Reproches a P.‘ pour son idée de descendre a PHétel Central. — Le Conseil des Ministres m’envoie des félicitations pour le profit que les achats de café rapportent au Trésor’. A approfondir ce qu'il faut entendre par Vinvariation de Dieu toujours semblable 4 lui-méme, par conséquent [26] insensible et dénué d’affection. Montrer que cette conclusion est fausse, et comment Dieu
aime,
souffre,
désire,
s’irrite
et
se
réjouit,
comme n{ous] le voyons a chaque page de la Bible et des révélations des Saints. Invariable quant a luiméme mais devenu rapport au regard de sa créature. Et
Juillet 1918
411
cette invariation elle-méme n’est pas celle de la mort,
mais une opération de la Trinité agissant suivant un regard continuel de chaque Personne au dehors d’ellemémel. Cette vieille femme serrée dans son chile noir qui gravit les marches de la chapelle en boitant et en toussant. 19 juillet. — Seconde victoire de la Marne?. 21 — Reprise de Chateau-Thierry. — Photographies de Madame H.*. Promenade au Jardin Botanique‘. Bal a l’Itamaraty en Vh[onneur] du Minfistre] des A[ffaires] Etr[angéres] de Uruguay, Balthazar B.°. Un jardinier en chemise rose prés d’un arrosoir vert. 23/7. Le communiqué indique que nos canons ont fait taire les batteries allemandes établies 4 Villeneuve.
28/7. Reprise de Feére-en-Tardenois. Reprise de Soissons.
—
3 aott.
25 juillet. Départ pour Guaruja® avec les Lage, Milhaud], les Hoppenot, les Zeppelin et André Perrier sur l’I/apuca. Madame Prates et sa beauté a la Ingres. Brouillard. Santos, Guaruja sur cette magnifique baie de sable blanc. Galopades et bains de mer. Le 29, en auto par la serra et le matto vers S.-Paul, brouillard. Le lendemain départ en wagon spécial, la fazenda et le cafezal’ du Conseiller Antonio Prado. Tristesse et solennité des familles brésiliennes,
particuliérement des enfants. Promenade dans la plantation, cette terre pareille a du tabac fin. Les deux jiquitibas gigantesques dans ce qui reste de la forét vierge, particuliérement ce vieux écimé par la foudre, les racines comme la patte d’un étre monstrueux, 4o métres
de tour. Quand le conseiller est arrivé en 1863 tout était encore forét vierge, on voit encore sa maison d’ot il tirait sur les jaguars. C’est lui qui a tout défriché et planté. La fazenda fournit tout, viande, légumes,
céréales, lait, beurre, fromage, café. De la
412
Cahier IV
fazenda, on voit tout le travail des champs, les chemins
par ot reviennent les colons et les chars chargés de produits, les deux [26 v] lignes de chemin de fer. Comme le Pére éternel il peut se dire qu’il a fait tout cela et que son ceuvre est trés bonne. Les colons sont surtout des Italiens et des Japonais qui vivent en bonne intelligence et méme s’entremarient. Une négresse, cette japonaise qui passe sur le chemin avec son sourire timide et bridé et ce petit dans le dos, cette truie de toutes parts assiégée par ses marcassins. Ravages de la gelée. Les bananiers comme des fantémes jaunatres -dans leurs suaires déchiquetés. Au retour 2 aout, anniversaire de ma petite Dodine’, lettre de ma femme et premiéres photographies de mon ange chéri. Lettre de ma sceur Louise de Massary Belmont — Ain — Chez Madame Nicolas
le 11 juin 1918? Q[ui] nous aurait dit, mon cher Paul, qu’un jour n[ous] serions venues chercher un refuge dans ce beau pays d’Hostel et q[ue] n[otre] cher vieux Villeneuve serait détruit? Ah! cest bien dur pfour] nous, je t’assure, et n[ous] n[ous| habituons difficilement a cette idée q[ue] n[otre] maison est perdue, q[ue] n[otre] jardin justement plein de fruits et delégumes cette année est en possession des Boches. [...] C’est un véritable désastre pour nous! — Et dire que depuis plus de 6 mois on disait dans le [27] pays: « Siles Boches poussaient du cété de Berry au Bac, ils passeraient, rien n’est prét de
ce cété-la!» Et presque plus de soldats de passage, aucune activité dans nfos] régions! A la poussée du mois de mars nfous] avions déja eu trés peur, puis, voyant q[ue] la bataille se dirigeait au nord n[ous] n[ous] étions rassurés, méme craignant davantage p[our] Paris q[ue] p[our] Villeneuve, j’étais allée chercher bien des choses appartenant 4 maman q[ui] y sont restées. [...]. — Donc nfous] étions bien tranquilles a Villeneuve]. Les 2 Berthelot? 4 qui
Aout 1918
javais quand
413
d[eman]dé conseil s’étaient presque fachés je leur disais nfos] craintes, Jacques! de
méme, nfous] n’en avions plus aucune. Soudain pendant la nuit du 26 au 27 mai nfous] enten-
dons une canonnade terrible dans la direction du Chemin-des-Dames, puis au matin plus rien. N[ous] croyons a une attaque locale comme cela arrivait souvent et n[ous] n’y pensons plus. Le soir un vétérinaire q[ue] n[ous] logions depuis le commencement de Vhiver vient nfous] dire q[ue] les Allemands avaient passé |’Aisne et avancé de 4 km. mais qu’ils étaient arrétés. Nfous] voila fort inquiétes, nfous] montons cependant n[ous] coucher, mais... pas pour longtemps! A 10 h. (nuit du 27 au 28) les avions boches commencent a n[ous] survoler et 4 bombarder _les dépdts de munitions de Saponay, de Fére, les ' gares, les convois d’automobiles montant des renforts
sut la route
de Coincy, etc., était
épouvantable,
nous ne savions ot. nous fourrer. Au matin, le 28 donc, 4 8 h. environ arrive un régiment d’infanterie
venant de la bataille et des ambulances. Les officiers nous donnent des détails sur ce q[ui] s’est passé (je n’ose te les raconter, c’est trop triste!) mais n[ous] rassurent absolument. « Ne craignez rien, nfous] disent-ils, les ennemis n’avanceront plus beaucoup maintenant, cat les renforts sont arrivés, deux de n[os] meilleurs corps d’armée sont la et on dit méme qu’on commence 4 les refouler.» Néanmoins comme les All[emands] étaient 4 ce moment-la tout prés d’Arcy je commence a faire mes malles. L’aprés-midi d’excellentes nouvelles arrivent : un aumdnier q[ui] était allé chercher des blessés n[ous] assure que les Boches ont reculé de 10 kms. et que c’est ridicule de partir, qu’ainsi n[ous] sommes stirs de tout perdre parce que les soldats francais pilleront tout. N[ous] restons donc, [27 v] quoique un peu malgré nous, beaucoup de gens de Villeneuve partent pendant t[ou]te la journée, surtout les jeunes filles, jeunes gens, enfants, mais pas une téte de bétail, pas un k[ilo] de grain, rien nfe] s’en va. La journée se passe assez tranquillement et la nuit aussi, on entend bien le canon, i] semble méme
414
Cahier
IV
quwil se rapproche mais nfous] n’y faisons pfas] g[rande] attention, endormis par les assurances de nfos] officiers. Brusquement 4 5 h. du matin (le 29) une détonation épouvantable retentit q[ui] nf{ous] fait sauter 4 bas du lit, je d[eman]de par la fenétre a un automobiliste ce q[ui] se passe. « Ce n’est rien, dit-il,
ne vious] inquiétez pas, ce sont nos piéces lourdes installées 2 Saponay q[ui] tirent, ouvrez v[os] fenétres p[our] qfue] les carreaux ne cassent pas. » Boum! une seconde
détonation,
puis une
3° éclatent,
tous
les
carreaux dégringolent chez nous, dans (atelier, dans le salon, partout. Je m’habille précipitamment et je sors p[our] me renseigner sérieusement. En ouvrant la porte je me rencontre avec un jeune major q[ue] n[ous] avions logé dans le courant de l’année q[{ui] arrivait 4 bride abattue p[four] nfous] prévenir du danger. « Dépéchez-vous, nf{ous] dit-il, les Allfemands] sont a Louprigne, on vient de faire sauter les dépdts de munitions
de Fére, la gare et le
chateau brilent. V[ous] n’avez q[ue] le temps, partez au
plus
vite,
cest
la déroute.»
Comment
faire?
personne ne veut n[ous] prendre dans les voitures déja chargées de bagages et maman ne peut aller jusqu’a Chateau-Thierry a pied. Enfin Dufréne moyennant 100 f. consent a prendre Maman et 2 valises et nous 2, Eugénie et Mme Régnier suivons 4 pied, avec un panier et 1 sac plein d’argenterie. Une chaleur étouffante, des routes pleines de soldats, d’émigrés, de
convois de toute sorte — trés pénible voyage. Mad[ame] Régnier manque de rester en route, on la hisse sur une voiture 4 foin. N[otre] pauvre maison est restée t[ou]te g[rand]e ouverte, pleine de soldats q[ui] fouillent déja partout. Je m’apercois q[ue] j’ai oublié ma montre et une chaine en or sur la commode.
N[ous] sommes tristes, hélas! Maman ne se plaint pas, j'ai le coeur gros de la voir ainsi arrachée de chez elle. A Courpoil le canon semble se rapprocher, du cété de Vézilly, on hate le pas (il était 10 h. et les AlI[emands] Poccupaient 4 7 h. du soir), des gens disent [28] q[ue] Fére brile, on voit en effet beaucoup de fumée dans cette direétion, il faut se dépécher. II fait
]
Aokt 1918
415
bien chaud, n[ous] sommes fatiguées, n[ous] avons soif et faim. Enfin 4 1 h. n[ous] sommes 4 Ch[4teau]T[hierry], chacun s’y prépare également p[our] le départ. Allons-n[ous] pouvoir prendre un train?... Quelle anxiété!! On ne traverse plus le pont en voiture. Dufréne consent 4 n[ous] porter n[os] valises a bras jusqu’a la gare. La plus de 1 000 personnes entassées devant un petit guichet ot un seul employé distribue les billets. On se bat littéralement. J’ai encore les bras tout bleus des coups q[{ue] j’ai recus. Enfin a 4 h. j’ai mes 3 billets (Mad[ame] R[égnier] était restée avec sa fille 4 Ch[ateau]-T[hierry]), n[ous] allons peutétre pouvoir partir; un train passe, bondé, impossible de monter. Un 2€ 4 6 heures 14 et a force de coups de coude et avec I’aide de 2 soldats n[ous] parvenons a ‘ nfous] caser tant bien q[ue] mal dans un couloir. N[ous] respirons! le train part, il marche bien, et a 9 heures n[ous] sommes chez nous! Quel soulagement!
On
mange,
on se couche,
on va pouvoir
se
reposet! Pas du tout — alerte de Gothas! II faut descendre 4 la cave! et t{ou]tes les nuits la méme chose pendant 8 jours. Maman est épouvantée, elle veut quitter Paris le plus tét possible. Les André B[erthelot] trés gentils insistent beaucoup pfour] q[ue] n[ous] allions a Benest, nfous] le décidons, puis voyant q[ue] maman est t[rés] ennuyée d’aller chez les autres, n{ous] acceptons la proposition de Reine q[ui] n[ous] offre une maison 4 Belmont et n[ous] y partons le 5 juin, encore avec combien de difficultés! tu le devines, des heures de queue partout, aux billets, aux
bagages, etc., je ne sais comment j’ai résisté. Enfin nfous] sommes bien maintenant, libres, et chez nous, ne craignant plus ni canons ni gothas, et nfous] avons tes enfants p[our] n[ous] distraire. — Seulement c’est 500 f. de location, c’est cher. Comment arriverons-nous jamais 4 payer t[ou]tes nos dépenses, la pension de Camille, etc.? Maudit argent! J[acques] [...] a été bien tourmenté a nfotre] sujet, aucune lettre ne lui parvenait, ce n’est que hier qu'il n[ous] sait en sécurité. Lui est en grand danger, tout prés de Rheims. Dire qu’il s’en est fallu d’un cheveu que
416
Cahier
IV
je sois partie 4 Paris le 25 mai pour la permission de J[acques]. Jamais [28 v] Maman ne s’en serait tirée toute seule. Les Duvillé au lit tous les 2 sont restés, une femme Bouré sur le point d’accoucher, avec une
fille coxalgique dans le platre, restées aussi, pas une voiture d’évacuation! 80 vaches a Préau restées dans les
prés! Et combien
de bestiaux,
de cochons,
de
poules, de lapins, des champs superbes. Ah! les B[oches] auront de quoi manger p[our] longtemps! Cette jeune femme qui brode 4 l’écart d[ans] )obscurité. Et on voit de loin qu’elle a compris a cet éclat blanc de ses dents! dans le cercle rouge de la bouche. 6 aotit. Cinquante ans! commencement de la vieillesse, les jours durs d’oétobre, — coincidant avec cette puissante révélation de amour! Ce matin, la pluie. Messe chantée chez les Sceurs de |’Adoration. La vie du Christ dans le Credo racontée presque a voix basse de ce ton joyeux et enfantin. 9/8. Lettre de R. 19 juin. — « Moi, je t’écrirai, mais ne réponds pas — je sais que tu penses toujours a moi, que tu pries pour
moi, ah prie toujours
et
beaucoup — tu me dois ga — si inattendue et mystérieuse que je sois, crois-moi, je suis celle que tu as connue et mon ame est encore plus sceur de la tienne que tu ne crois — les ondes de ta pensée me trouvent a travers le monde — et souvent je sens les jours ot ton 4me est triste et en détresse. Cette nostalgie affreuse de deux ames séparées qui se cherchent et se désirent et qui brise le corps et donne une sorte de nausée mentale. Chaque année le sentiment de solitude devient en moi plus fort au lieu de diminuer depuis que je t’ai quitté. » « Notre petite Louise va faire sa premiére communion le jour de la féte de S. Pierre et de S. Paul le 29 juin. » 8 aout. —
Victoire de |’Avre et Somme.
& = —
Aott 1918
417
Sut des chevaux blancs harnachés
d’or.
[29] Cette vieille dame aux yeux protubérants dont les paupiéres sont bordées d’un balai de cils bruns épais et courts. Assomption. Excursion manquée vers la Gavea, terrible débrouillage dans la forét vierge. — Sortant de ’énorme nuit, et de la mer, et de la montagne, et de la forét, la ville 4 ce tournant du chemin commence
tout 4 coup par un bec de gaz, une épicerie et une Station de tramways. Mulatresse grosse et courte en corsage feuille morte qui marche en sifflant de toutes ses forces. 18/8 3€ promenade au Bico do Papagaio avec le « casal»! par un temps presque froid. Au retour clair de lune sur la forét, ’ombre des grandes palmes sut le chemin.
19. J’obtiens du gouvernement brésilien la reconnaissance de l’indépendance de la Pologne. Je comprends maintenant pleinement ce qui m’est arrivé en 1900. Annonce parue dans le Jz Shampu de Kioto «annoneant la mise en vente de /’Ofage dans la traduction américaine » (Communiqué par le Chargé d’ Affaires du Japon 20/8/18)’. Lettre de Bismarck a d’Arnim, ambassadeur 4 Paris, du 16 Novembre 1871, insérée a l’Offcie/ du
7 avril 1911, aprés lecture 4 la Chambre par M. Gaudin de Villaine : « Une politique catholique de la France lui donnerait une grande influence en Europe et jusque dans VExtréme-Orient. Le moyen de contrecarrer son influence
au
profit de la ndtre,
c’est
d’abaisser
le
catholicisme et la papauté qui en est la téte. Si nous
418
Cahier
pouvons
atteindre
IV
ce but, la France
est a jamais
annihilée. « Jentreprends contre |’Eglise une guerre qui sera longue et terrible. Il le faut pour achever d’abatsset la France. Entretenez dans les feuilles radicales francaises la peur de l’épouvantail clérical, en pro-
pageant les calomnies
ou les préjugés qui ont fait
naitre cette peur. Faites aussi parler souvent, dans ces
feuilles, des dangers de la réaction et des empiétements du clergé! Ces balivernes ne manquent jamais leur effet sur les races ignorantes. « Mettez tous vos soins 4 entretenir cet échange de services mutuels entre les républicains et nous; c’est la France qui en paiera les frais.» Propter hoc, ecce ego lattabo eam, et ducam eam in solitudinem, et loquar ad cor ejus. Et vocabit me Vir meus, et non vocabit me ultra Baali. Et sponsabo te mihi in fide et scies quia ego Di omi|nus (Osée, I). [29 v] Et dixit Dominus] ad me : Vade, et dilige mulierem dilettam amico et adulteram, sicut diligit D\omtnus\ filios Israel. Et dixi ad eam : Dies multos expettabis me : non fornicaberis et non eris viro; sed et ego expettabo te (Osa: Ty
at, e)es
Quievit paululum civitas a commistione fermenti, donec fermentaretur totum (Os., VII, 4). Il faut que le mal méme ait le temps d’accomplir toute son ceuvre’. Et fadtus est... quasi columba sedutta non
(id., 11).
habens cor
Da eis |Do\m{ine|. Quid dabis eis ? Da eis vulvam sine liberis, et ubera arentia (id.)®. Caro enim concupiscit adversus spiritum, spiritus autem adversus carnem; haec enim sibi invicem adversantur, ut
non quaecumque vultis, tlla faciatis... Manifesta sunt autem opera carnis: q{uae| sunt (Gal., V, X1V® Dimf[anche].’) [30] C’est a cette date, en effet, qu’avait lieu, en
} |
Aout 1918
419
1883, la distribution des prix du lycée Louis-le-Grand,
présidée par Renan. A cette occasion, |’éminent académicien prononga un discours dont nous extrayons les lignes suivantes « On se plaint souvent que la force devienne l’unique reine du monde. II faudrait ajouter que la grande force de nos jours, c’est la culture de l’esprit 4 tous ses degrés. La barbarie est vaincue sans retour parce que tout aspire a devenir scientifique. La barbarie n’aura jamais d’artillerie et, si elle en avait, elle ne saurait
pas la manier. La barbarie n’aura jamais d’industrie savante, de forte organisation politique, car tout cela suppose une grande application intelle¢tuelle. » Certainement le grand philosophe ne prévoyait pas la « kultur» boche et la guerre de 1914.
Nous avons sous les yeux le palmarés qui contient ce
discours de Renan. Parmi les jeunes éléves qui Pécoutaient se trouvaient les lauréats suivants Classe de mathématiques spéciales, 1°* division: Paul Painlevé. Classe de philosophie, 1° division :; Marcel Bernés,
Léo Claretie.
—
3° division
: Paul Boyer.
Classe de rhétorique, 1° division : Joseph Bédier, André Chevrillon. — 2° division : Gabriel Syveton.
— 3° division : Vittor Bérard, Romain Rolland. Classe de seconde, 2° division : Léon Daudet, Jean Coquelin.
et moi, peut-étre étais-je en 3°1? 31 aout-4 sept{embre]. Excursion a Thérézopolis au
Campo dos Antes, la plus haute cime de la Serra dos Orgios (le Champ des Tapirs, ainsi nommé parce que ces animaux paissaient dans l’épaisse prairie parsemée de cycas nains que l’on trouve au sommet). Montée a cheval
dans
la Forét
vierge fraiche,
splendide
et
rayonnante. Comme si la trame du monde se desserrait? et qu’il ne restat plus que ces étoiles brillantes et ces filaments de lumiére. Campé a la Toca do Cagadores. Le grand feu allumé, lumiéres rouges sous les arbres et les faces de brigands de nos guides. Les
420
Cahier
IV
étoiles et le grand bruit du vent. Cette longue chevelure de lianes vert pale a fleurs roses éclairées par le feu. Le lendemain montée excessivement pénible. Pour gravir la derniére coupole de granit je me mets pieds nus. Je tombe sur le dos complétement €puiseé et comme évanoui. Sommeil d’une heure. Au réveil je vois un vautour et plus bas un papillon noir q[ui] tournent
autour
de ma
téte. Vétements
déchirés, je
perds un talon de soulier. Bain dans ce lac glacé sous la cascade. Retour au grand galop. Le lendemain promenade 4 la Quebra Frasco par ce temps de brume, plus épaisse encore que l’année derniére. Cette atmosphére assoupie, cet oiseau invisible comme dans le sommeil, ces deux villas au milieu des azalées et des
arbres en fleurs dans un bruit d’eau courante et cette solitude enchantée. La forét automnale’. Retour au triple galop. [30 v] Suis-je donc de fer ou de bois? Lundi 8 [septembre]. Déjeuner avec les Pfarr]. Confidences de M[argotine] qui va divorcer.
Cette grosse blonde large que haute.
fatiguée avec
sa figure plus
L’homme saisi tout 4a coup dune fureur divine, étrangére a la haine et a la colére, s’avance sur le champ de bataille sans savoir ce quwil veut, ni méme ce qu'il fait. Rien n’est plus contraire 4 sa nature, et
rien ne lui répugne moins : il fait avec entrain ce qu’il a en horreur. Avez-vous jamais remarqué que sur le champ de mort ?h[omme] ne désobéit jamais? ... Une révolte sur le champ
de bataille, un accord
pour s’embrasser en reniant le tyran, est un phénoméne q[ui] ne se présente point 4 ma mémoire. Rien ne résiste, rien ne peut résister a la force g[fuil traine l’hf[omme] au combat : innocent meurttrier, instrument passif d’une main redoutable. Ainsi s’accomplit sans cesse depuis le ciron jusqu’a Vh[omme] la g[{ran]de loi de la destinée violente des
Septembre 1918
421
étres vivants. La terre entiére, continuellement?
im-
bibée de sang, n’est qu’un autel immense ot tout ce qui vit doit étre immolé sans fin, sans mesure, sans relache, jusqu’a la consommation des choses, jusqu’a Pextin@ion du mal, jusqu’a la mort de la mort (I Cor., XV, 26). Mais l’anathéme doit frapper plus directement et plus visiblement ’homme: l’ange exterminateur tourne ~ comme
le soleil autour de ce malheureux globe, et ne
laisse respirer une nation que pour en frapper d’autres; mais lorsque les crimes d’un certain genre se sont accomplis? jusqu’a un point marqué, l’ange presse sans mesure son vol infini’. Il frappe au méme instant tous les peuples de la terre. N’attendez pas qu’ils fassent aucun effort pour ‘échapper a leur jugement ou pour labréger. On croit voir ces grands coupables, éclairés par leur conscience, qui demandent le supplice et l’acceptent pour trouver lexpiation. Tant qu'il leur restera du sang, ils viendront l’offrir (/es Sotrées de S.-Pétersbourg, t. I)4. Verbo Dlo|m|ini| coeli firmati sunt; et spiritu oris ejus omnis virtus eorum®.
La Foi (lotus ) existe également de Dieu 4 homme, sous la forme de fidélité, de confiance reposée, de bonne foi, de celui qui est digne de foi. La pistis est ce q[ui] unit surnaturellement l’>homme et Dieu, une confiance et une fidélité réciproques, basées sur la bonté, la véracité et Vimmutabilité divines, q[ui] sont devenues sensibles 4 nf[otre] coeur et a nfotre] intelligence (R.P. B. Allo, /a Foi d’aprés 1’ Ev[angile], ap[ud] Rev[ue] des jeunes).
Proy[erbe] portugais : « L’h[omme] qui est embété, il a mis sa chemise de onze varas.
de onze
meétres.»
Botar camisa
[31] In bocca chiusa non entra moscha®.
Nous avons eu la peine de perdre Teddy au Champ
422
Cahier IV
d’honneur. En sortant de Fontainebleau, aspirant d’artillerie, il a servi au 246® R.A.C. II] est retourné au
front rejoindre son régiment le 26, veille de l’attaque. Pendant la retraite il a dai étre blessé dans les environs de Villers-Cotterets. Il est mort le 8 juin, trois jours aprés, 4 la suite de sa blessure. Nous n’avons que de trés rares détails. Papa espére en avoir d’autres par l’Auménier. Cimetiére du Fayel! (lettre de Henry V[...]2, suivie de quelques mots de F. V. datés du 13 aout).
Coincidences : lettre de R. du 19 juin ot elle me d[eman]de de prier beaucoup pour elle; 17 com[munion] de notre petite L., le 29 juin. Tué 4 quelques lieues de Villeneuve qu'il a contribué a défendre. 19/9. — Lettre de Maman me disant que Villeneuve et spécialement notre maison sont beaucoup moins maltraités que nous ne pouvions le craindre. Le presbytére serait détruit. Les Boches auraient fait un « choix » parmi les livres de la bibliothéque. 114 habf[itants] étaient restés. 17. — Stigmates de S. Frangois d’Assise. Le vieux couvent de S, Antonio’, avec ses deux nefs juxtaposées,
Pune en bois doré, un peu comme
S. Bento. Vieilles
Statues de saintes, couvertes de robes de toiles a sac,
étonnamment de la confrérie, et les écritoires nes, d’ot ’on basse.
austéres et nobles. La salle de réunion avec les grands fauteuils des présidents, et sonnettes d’argent. Galeries 4 colondomine la ville. Sacristie pompeuse et
Folkestone, 6 aotit. Aprés la mort de Teddy. Recue lexzr. « ... de me laisser pour une fois m’appuyer contre toi, au lieu de mettre tout le fardeau de notre détresse
sur moi. Sois fort et ne me fais plus de mal » (derniére lettre — 30 sept[embre] 204). The Pleasanner.
—
Worldingham,
Surrey.
Septembre-Ottobre
1918
423
26/9. Grande pluie. Départ de M[argotine] sur le Léon XII. Tr. J. de S. Dépfart] de Bartholomé. Grande froideur et indifférence!. [33]. Quand on a renoncé 4 tous les plaisirs de la vie, il reste encore celui de se lever de table aprés un
diner ennuyeux.
29/9. Télégramme de Berthelot m’annongant mon envoi a N[ew] York auprés de Tardieu pour discuter les affaires Brésiliennes?. 1€T octobre. Ez a te numquam separari permittas® | Mélancolie.
Remuement
de
vieilles
lettres
et de
' vieilles photographies. Cinq batailles a la fois livrées en ce moment notte front. Prise de S.-Quentin.
sur
5-7 octobre. Voyage a Campos‘ sur le Parahyba, ville du Sucre, avec Milhaud, les 2 Hoppenot, les 2 Guerra et le grand de Lagotellerie. La vieille place entourée de palmiers avec ses maisons coloriées rose et vert. Effet charmant a la messe (vert et rouge) de toutes [sic] ces vétements diaprés des négresses. Concert le soir au théatre. Réception des Syriens. Promenade au Lagon da Cima. J’apprends le 6 la d[eman|de d’armistice de |’Allemagne. — 8, photos de la petite modéle de Perrier®. Je reste ici au moins jusqu’au 15 novembre. Dans la nuit qui tombe sur le parapet du quai cette petite femme assise avec son haut paquet de cheveux teints chantant d’une voix suraigué et serrant un petit chien sur son cceur.
Affaire d’Espirito Santo. Rachat du Brazil Railway. Ce chemin, comme ne m’est pas inconnu. CLAUDEL
V - 17
il est sombre et triste! mais i] 17
424
Cahier I~
13, o€tobre. — L’Allemagne accepte conditions du Président Wilson'.
toutes
les
Orgueil : techn[ique], appui d’un levier*.
Court, comme quand on parle 4 un homme qui a froid, ou qu’on va se noyer. Circonlocutions et trainées de paroles (et grandes traines de paroles). [33 v] Le beau langage ressemble 4 une eau pure et nette q[ui] n’a point de gout (Bouhouts)’, Nouvelle Horribles
déception; je ne pars plus. cauchemars,
et
me
réveillant
je vois
2 chauves-souris q{ui] voltigent autour de ma moustiquaire. —
Plus tard Angkor‘.
13/10. Le Prés[ident] Wilson repousse la demande d’armistice de l Allemagne’.
Cest une erreur de dire que la mémoire est plus développée chez les enfants que chez les adultes, pourquoi le serait-elle, seule de toutes les facultés? II
n’y a qu’A voir la peine qu’ont les enfants 4 apprendre quelques lignes d’un texte écrit, ce qu’un adulte peut faire en q[uel]ques secondes (v{oir] les acteurs, les prédicateurs*). De méme pour la mémoire des figures, des lieux, le champ de leur intérét étant beaucoup
moindre et aussi le nombre de leurs points de repéte. Ce qu’on peut dire peut-étre c’est que c’est l’époque ot. se forme dans ses lignes essenticlles le réceptacle, le souvenir agit sur eux dune maniére formatrice. On n’y saurait marcher que sur de belles choses. Ce sont petits chemins tout parsemés de roses. Mol[iére], Mzs[anthrope}’.
La grippe espagnole fait de grands ravages 4 Rio. Mes domestiques étant malades je monte 4 Therezo-
Odtobre 1918
425
polis. 17/10. Cheval. Pluie. Cheeur des grenouilles. Joli effet des boutiques éclairées a l’intérieur avec ces entassements d’objets disparates, sacs, étoffes, cuvettes
de métal, boites de conserves or et argent comme le dos d’un hareng saur. Bandes d’enfants déguenillés. Promenade 4 cheval 4 Quebra Frasco. Nouvelle de la mort subite d’Antonio et Jorge Lage (21).
Les femmes se mettent de la poudre de riz sur la figure parce qu’elles veulent bien briller, mais non pas luire. 25[octobre]. — Je pars décidément pour N[ew]| Y [ork]. — Casenave est déja en route pour me remplacer. — Milhaud a la grippe. — 47 R. Cambon. ‘Note Wilson'. [34 v] 23° Dim[anche]
aprés la Pent[ecdte]?.
Et quand il vit les joueurs de flate et la foule tumultuante (un bal ou quelque thé tango), il dit : Retirezvous, cette jeune fille n’est pas morte, mais elle dort.
Et ils se riaient de lui. Et aprés qu’on etit fait sortir tout ce monde, il entra et il tint sa main. Et la jeune
fille se leva. Turpis est omnis pars universo suo non congruens (S. Aug., CO 53").
5-7 nov[embre]. Voyage a S.-Paul pour voir Prado et mettre sur pied mon plan d’achats au Brésil. Descendu a la ROtisserie Sportsman. Voyage de jour, avec Platon. Vaste plaine entre de beaux horizons de montagnes. La grippe sévit a S.-Paul. Le soir énormes fourgons 4 trolley remplis de cercueils. S. Bento. Retour la nuit. Affreusement secoué'.
Mort musique demande Sa fille,
de sainte de la femme du vieux professeur de Leao Velloso®, en soignant les pauvres. Elle qu’on leur donne le prix de tous ses bijoux. la pauvre petite perruche morte de phtisic
426
Cahier
IV
galopante 4 Paris en 19217, a le délire, elle se croit en enfer, et voit tout son corps pourri, ses organes jetés ca et 14. Le corps de sa mére au contraire, elle le voit « comme un amas de pétales de roses ». « Il n’y a que la Vérité qui blesse », au sens le plus profond. Précisement parce qu’elle est extérieure a nous, et que c’est nous q[ui] avons a nous y adapter. Ce grand négre qui balaye ma pelouse. Per hoc'et sacerdos est, Ipse offerens, Ipse et oblatio. Cujus rei sacramentum quotidianum esse voluit Ecclesiae Sacrificium : q|uae], cum Ipsius Capitis Corpus sit, seipsam per Ipsum discit offerre (S. Aug[ustin], De Civ[itate] Dei, lib. X, chap. xx)?. 9 nfovembre]. Arrivée de Domicio Conversation a l’H[6tel] Central.
da
Gama.
Arrivée de Rodriguez Alves 4 Rio. 11 nov[embrel. (Décommandée — il est malade). — C’est le V[ice]Président? Moreira q[ui] prend le pouv[oir].
Lu les fragments de prose et le Journal d’un poéte d Alfred de Vigny; c’est étonnamment mal écrit. Prétentieux et triste. Esprit rongé par l’ennui et par Pimpuissance. Rien de plus triste que le speétacle dun homme qui voudrait tellement étre un poéte et qui ne lest pas.
[35] LA PAIX 7 novembre
1918
Un télégramme affiché sur Avenida 4 6 heures du soit annonce la conclusion de |’Armistice, !’Allemagne acceptant toutes nos conditions et la fin des hostilités (au journal Pazz*) (Canard).
Novembre
1918
427
8 novembre
Abdication Révolution
de ’Empereur
et du Kronprinz
—
a Kiel et en Baviére?.
10
novembre
L’Empereur et le Kronprinz s’enfuient en Hollande.
Il
novembre
L’Amirauté Anglaise télégraphie a |’Attaché naval anglais la nouvelle de l’Armistice. La nouvelle est confirmée : L’ Armistice a été signé le 11 Novembre a 5 heures du matin (Jour de la S. Martin)?. Manifestations
sur |’Avenida’.
Le 12 novembre est déclaré jour férié. L’Allemagne
devient
une
république
socialiste.
Abdication et fuite de tous les souverains!.
[35 v] 16/11. Casenave me télégraphie de Santiago son départ pour B[uenos]-Ayres. 20/11. Je recois l’autorisation de partir le 23. Le 22, réceptions a4 l’Association Cle, a la Société d’agriculture [Lauro Mulle et Miguel Calena] et le soir au Cercle francais, trés enthousiaste : 3 discours. Le 23, Te Deum en uniforme 4 la Candelaria® pour la victoire de la France. Embarquement a |’Arsenal*. Domicio de Gama, Min[istre] des Relations] Ext[étieures], Régis de Oliveira, s[ous]-secr[étaire] d’Etat, Amaro Cavalcanti, Min[istre] de la Guerre, sont 1a pour me faire leurs souhaits de départ. Départ a 2h. % sur le vapeur de la Costeira Itageba’. Le
428
Cahier
IV.
lendemain un peu de mal de mer. A 3 h. sous la pluie la jolie petite baie et la jolie petite ville délicatement coloriée de Victoria d’Espirito Santo’. Départ a 6 h. A midi, le 26, arrivée
4 Bahia.
Promenade
en
auto a travers la ville. Vu 3 magnifiques églises: la 17@ comme une grande grotte dorée, la seconde (Tertiaires franciscains) avec son petit cloitre bleu et ses azulejos* représentant une quantité de scénes populaires (peintures), la 3° la cathédrale, superbe sacristie,
crédences
incrustées
d’écailles,
azulejos
bleus et jaunes. Le Chfemin] de C[roix] avec ses barres de porcelaine et ses médaillons 4 vignettes. Nous nous embarquons sur le Leopoldina, exBlicher,
bateau
de
12 350
tonnes,
un
des
30
ba-
teaux ex-Allemands que j’ai affrétés pour le Gouvernement F[ranclais par le « Convenio» du 3 décembre 1917. Tout le style boche sombre, confortable et massif d’avant la guerre. On me donne une superbe cabine de luxe avec salon et salle de bains. — 26-27. Promenade dans les églises avec le Consul Bizel. Délicieuses
statues
dorées
et coloriées,
entre
autres
une Sainte Thérése et une Vierge aux robes rouges ressemblant aux ailes d’un papillon. Petits cloitres azut et chaux. Vue des grands vieux toits de tuiles. Visite au Gouverneur. Causé du « funding ». Eglise avec des fenétres en forme de navette® s’évasant vets
Vintérieur.
—
Morars,
marchand
de _ tabac.
Déjeuner a l’Hotel S. Am. avec Bfizel] et sa femme. — 28. Malade, resté 4 bord. Conversation avec le Dr Pamphilo, Président de la Ch[{ambre] de Bahia. Cacaos, Lavino de Philadelphie. — 28. Promenade au pélerinage de N.-D. de Bonfim‘. Puissantes négresses de Bahia dans leurs plus beaux atours. Larges jupes empesées,
camisole
émergent
ces
corps
ou
chemise
chocolat,
de
dentelle
turban,
colliers
d’ou
de
grains ou de plaques d’or, et ce gros bras marron, le
poignet entouré d’un bracelet de gros grelots d’or', et la main retournée qui tient un fruit bizarre et tellement vert! Echouage dans ce faubourg désolé, le tramway ne marchant plus et retour dans une auto de rencontre, Larges maisons Bahianaises 4 pignons
Novembre-Décembre
1918
429
aussi ouverts q[ue] ceux des fermes allemandes ou vosgiennes. — 30 n[ovembre]. Recu les Clommer¢jants Bah[ianais] pour les encourager 4 souscrire 4 P’Emprunt. En [36] tout jai recueilli 550 000 f. L’aprés-midi, visite au savant Pére Torrend s. j. q[ui] s’occupe d’histoire naturelle. L’étude des organismes inférieurs plus incapables q[ue] tous autres de variations l’a rendu absolument fixiste. Fruit pareil 4 une -grosse boite de ciment dont le fond se détache, laissant tomber toute une pile de chataignes. La vie religieuse éminemment favorable a la science et a l’étude (peut-étre plus qu’a l’art? Je ne sais). — Dimanche matin i[¢™ décembre], pluie torrentielle. Messe a S.-Frangois, la grande grotte dorée, effet de ces plantes vertes a la lumiére des lampes poussant sur cette paroi dorée comme des orchidées. Priére avant de quitter le Brésil et revue de ces 2 années. — Départ a 5h. \%, le pont grouillant de monde, un matelot juché en haut d’un treuil. Feu a éclats bleus et rouges de S. Antonio. N[ous] doublons le cap. La mer. Fin du Brésil
2 décembre. — Brise fraiche du N. O. — La viande est pourrie, on s’apercoit que le frigo ne marche pas. 142 milles.
3. — N[ous] marchons avec des chaudiéres plus ou moins détraquées. La céte est voilée par la fumée des incendies de foréts. Petites «jangadas»? de pécheurs. A 8 h. n[ous] passons au large de Recife... Hair quelqu’un, en tant qu’existant, c’est vouloir si
possible® qu’il ne soit pas. Or en Dieu vouloir et pouvoir sont identiques. On ne peut donc dire quwil hait méme Satan en tant qu’existant. I] lui conserve son amour puisqu’il lui conserve l’existence, car il serait également faux de dire que Dieu peut étre a Pégard de ses créatures dans un état d’indifférence. I] ne hait que ce qui n’est pas de lui, mais de Satan, c’[est]-a-
430
Cahier
IV
d{ire] le mal, le péché, et sur lequel il n’a point prise (v[oir] p. 17)}. 3... Mais 4 6 h. le mécanicien arrive déclarant que les condenseurs sont détraqués et qu'il faut relacher. A quoi nious] obtempérons. Mouillage en rade a plusieurs k[ilo]m[étres] de la céte?.
4. — Visite 4 Béraud. Promenade 4 Boa Viagem’, Déjeuner chez B[éraud] dans sa charmante villa sous les cocotiers. Le dommage du L[eopo/dina] peut étre
Leparel
on
5. Journée a bord. 6. Visite aux Fonseca. — 7. Olinda‘. Toutes les cloches sonnant a cette heure de midi parmi les palmiers et la mer. En tramway 4 Irmaos®. Dispute avec le capitaine. — 8. Dimanche. Priére 4’Eglise du Carmel’, Restaurant Manoel Leite. En auto a Boa Viagem. L’Eglise da Pazeres construite en souvenir de la victoire des Portugais sur les Hollandais quand ils leur ont repris Pernambouc, entiérement tapissée de porcelaines bleues. 2 vieux tableaux représentant la bataille. Les Hollandais coifiés de chapeaux hauts de forme [36 v] auquel leur général ajoute une plume d’autruche bleuatre et une rondache a son bras. En haut 3 Indiens ceinturés de plumes’. — Ce mécanicien américain au menton énorme : de l'état d’inertie 4 celui d’animation; par exemple quand on lui parle il y a une période de mise en train. — Je recois un t[é|l[é]g[ramme] des Hoppenot m’annongant ma nomination probable 4 Varsovie. — Je dessine un projet pour lArc-deTriomphe des Alliés®.
S. Thérése dit de lEnfer que c’est un lieu ot il pue et ot lon n’aime pas (Et cependant le Mauvais Riche reste attaché a ses parents)®. 1o déc{embre]. — Nous] sommes partis a 5 h. du matin. A minuit nfous] perdons de vue le C[ap] S.-Roque, dernier point du Brésil.
Décembre
1918
431
11 déc[embre]. N[ous] cassons une marchons plus qu’avec une machine. A midi? nfous] avons fait 275 milles. Toute la mer prise dans ce courant q[ui] vets le Nord, commencement Les Bacchantes
pompe et ne Réparation’. Vent d’Est. nous] dirige
du Gulf Stream.
en traversant la mer, ce sont elles
qui] y ont laissé ces larges peaux de léopard. Aleternitas igitur est interminabilis vitae tota simul et perfeda possessio (Boéce)’. 12 déc{[embre]. Midi. 258 milles. A 3 h. du matin je vois pour la 17 fois depuis 2 ans la Gr[ande] Outse, renversée, — et de lautre cdté du ciel la Croix‘du-Sud. — 13 déc[embre]. 257 milles. N[ous] avons passé la ligne a 1 h. du matin. La coupole du ciel rond : cette nuit de l’Equateur ot les plus grandes constellations de Vun et Vautre hémisphére sont affichées, suspendues comme de grandes panoplies‘.
Dio vede tuo ¢ tuo veder s’inluia. S’io mintuassi como tu m immit (Dante, Par., TX)®.
14 déc[embre]. 278 milles (malgré de nouvelles avaties et grace 4 un courant de 2 nceuds). On retrouve toute une armoire remplie de livres anglais, espagnols et allemands, entre autres le récit du voyage en Amférique] du s[ous]-marin Deutschland. Le Blicher,
4 son
arrivée
4 Pernambouc
en
1914,
fut le théatre dune terrible révolte d’émigrants ot beaucoup de monde fut tué. On a le sentiment de la montée et de la courbure de la planéte. — 15 [décembre]. 142 milles. A 9 h. % nfous] sommes obligés de stopper pour réparation des chaudiéres et des machines. N[ous] repartons a petite vitesse 4 10 h, 20. [37] Dante dit que Satan du Ciel « tomba vert» (comme un fruit vert)*.
16 déc[embre]. —
17 décembre.
64 milles. Nouvel
arrét
de 2 h.
145 milles. On marche mieux.
432
Cahier
18 décembre. 175 milles. petit cargo anglais Assonan.
IV A 2 h. rencontré
un
19 déc[embre]. 184 mfilles]. Ayant épuisé charbon et eau douce nfous] sommes obligés de relacher a la Barbade. Lu
/’Evolution
des forces de
Gustave
Le
Bon}.
Livre intéressant, plein de faits curieux, mais faible-
ment raisonné, comme la Peo des ouvrages dits scientifiques. I] se résume dans les quatre conclusions suivantes: 1° Toute matiére est destructible, ou plutdt susceptible de se perdre sans retour dans un état indéfini appelé éther; 2° Toute matiére est en voie? de destruction lente; 3° Cette destruction lente peut
étre fortement accélérée dans certains cas par des causes harmoniquement approprié¢es, l’effet ayant alors pour résultat d’étre absolument disproportionné a la cause; 4° Tous les corps sont le résultat d’équilibres entre certains mouvements intérieurs qui constituent le sujet et l'ensemble des mouyements extérieurs. —En d’autres termes :1° Tout résulte dun équilibre; 2° Cet équilibre est soumis 4 une destru@tion ou a une usure® constante, universelle et inégale. C’est bien singulier. — Ajouter que dans ce cas le monde n’a pu étre créé que par des forces qui sont ‘exacétement l’1nverse de ce procédé de destruction par lequel il se maintient. Ce serait un peu mon idée de la montre remontées ? 20 déc[embre]. 186 milles. A 7 h. [du] s[oir] nfous] arrivons en vue de la Barbade. — 21 déc[embre]. Barbades Bridgetown. Négresses au marché. Promenade en auto dans la campagne admirablement cultivée. Cannes 4 sucre et arachides. Moulin 4 vent. Marine Hotel. Au retour a moitié empoisonné avec une espéce de pomme brilant horriblement la bouche. Malade t[ou]te la nuit®, 22 décf[embre]. Départ a minuit. Vue de Ste-Lucie. La Soufriére*. Arrivée A la Martinique 4 10 h. Y%, aprés nouvelle avarie des machines (Fort-de-France). Séjour a la Martinique ot trés bien recus par le
|
Décembre
1918
433
| Gouverneur, M. Camille Guy, sa femme et sa niéce Mlle L.t. Pas de clommunijon le jour de Noél. Promenade a S.-Pierre détruit par la route des Pitons du Carbet, retour par la route du Nord, le Lorrain, le Marigot, Trinité, le Gros-Morne, Lamentin
(veille de Noél). Le lendemain, en bateau jusqu’a S.-Pierre. Regu au Morne-Rouge par le Gouverneur dans la maison des Clerc. Promenade 4 Basse-Pointe et a Macouba. Vue de la Montagne Pelée, villages - engloutis. L’Océan sauvage sur cette cdte q[uil ressemble un peu a la céte bretonne. J’apprends que le Pérou
va
nous
mener
4 Porto
Rico,
d’ot
un
bateau part le 8 pour N[ew] York. Pluie torrentielle dans la nuit. Retour le 27 par bateau. La« Martinique »,
c’est la province sous les Tropiques. Petite nature assez [37 v] médiocre quand on la compare au Brésil. Mais pays trés riche. Vaste culture de cannes. Forte organisation des vieilles familles blanches créoles (les Hayot, les Clerc) q[ui] s’arrangent malgré le Code Civil pour laisser le bien de famille intact. Costume des femmes de couleur trés élégant de forme et de ton, le madras et la robe longue et souple q[ui] leur donne cette allure élancée*. Pas de port sérieux® ni de chemin de fer dans Vile, tandis que n[ous] avons dépensé des milliards pour construire ceux du Brésil*. L’ile est trés prospére et en pleine voie de progrés malgré la politique. Langage du peuple a peu prés incompréhensible. Bétes-ailes = otseau. Insectes : cabri de bois, cheval bon Dieu, ma-toutou
falaise. « Comparaison» est une grosse injure. Bagage = chose. Désordre = bruit. « Au contraire » est une affirmation, assentiment. Insignifiant est trés injurieux, de méme blasé. Capidaler marcher®. Trés peu d’oiseaux. Les serpents ont été détruits par la mangouste introduite de Inde. La viande vient du Vénézuela. L’ile exporte 25 coo tonnes de sucre. Elle a souscrit
15 millions au dernier emprunt. Prés
de 800 autos (américaines). Toute Vile matériaux hétérogénes et sans grande rente, déjeGtion volcanique. Toutes les nent autour des 2 axes que constituent
est formée de solidité appavallées rayonla Montagne
Cahier IV 434 Pelée et le Piton du Carbet. La Pointe de Fort-deFrance semble occuper emplacement d’un cratére écroulé. Gréves de sable volcanique noir. Beaucoup d’arbres 4 pain. Légumes : le yam, le chou de Chine, | toute la feuille ressemble a celle de ’arum. Presque — toute la population est métissée, quelques Indiens | dans le Nord. On disait autrefois : les Seigneurs de S. Domingue, ces Messieurs de la Martinique et les braves gens de la Guadeloupe. — 28 déc[embre]. Promenade en auto avec M. Fernand Clerc. Bal a bord du Pérou. — 29 déc[embre]. Dimanche soir. Départ pour Pointe-a-Pitre, Guadeloupe, ot n[ous] arrivons le matin du 301. Visite d’un fondtionnaire du Gouv{fernement] q[ui] se met a ma disposition. Promenade en auto au Gosier (fontaine Poncette) et le soit 4 Moule sur le rivage de l Atlantique. Gréve couverte d’épaves, éponges. Canal des R.*. Retour par le jardin d’essai. Glang-glang, cacaos, rose de Cayenne. Le lendemain 31 [décembre], grande promenade en auto jusqu’a Basse-Terre, siége du Gouvernement. Vu
au
Camp
Jacob,
S.
Claude,
le
Gouverneur
M. Gourbil, q[ui] venait de perdre sa femme. La gréve de limaille de fer. Les foréts, cascades
du Gourbet,
bain a la fontaine. Doli. Sur ce quai pas plus qu’a la Martinique, aucune installation; pas une grue. Odeur épouvantable q[ui] vous assaillit a une g[{ran]de distance. Pas d’égouts ni de fosses d’aisance. Allocations ridicules données aux femmes et méres de mobilisés, qui en profitent [38] pour entretenir des quantités d’amants cannelle,
ainsi soustraits au travail. Au marché, sel, tabac, vanille, encens, café, cacao. Grande
richesse et variété de production de ce pays. Chemins de fer qui ne demanderaient qu’a se faire arréter par Pinertie
de
ladmuinistration.
Au
Musée
Leminier,
collections d’insectes et de papillons de la Guyane.
ee) ret janvier. En rade de la Pointe-a-Pitre. C’est la premiére fois que je commence l’année en voyage. Puisse Dieu me soutenir et me donner plus de force! 3 janvier. — Martinique de nouveau. — Samedi 4 j[anvier], arrivée 4 San Juan de Porto Rico. Le V[ice]-Consul de Courthial et sa femme, russe : Hotel Malatrasi. Départ le 8 sur le [...]!. Arrivée le 14 au matin 4 N[ew] York par un temps trés froid. Les Sky Scrapers dans le brouillard. Copeau*, Farquhar, Hippodrome, les affiches lumineuses. Départ le 16 au matin pour Washington. Hétel Lafayette. Lettres®. Négociations avec Polk, Stabler, Whitmarsh, Woolley,
Ely, Lay. Résultat plutot négatif. Le Jardin botanique et ’énorme ours de Alaska. Chambrun, de Billy, le commandant
Grimprel, de Sartiges, Moreira. Le 27,
départ de Washington et retour 4 N[ew] York. Percival Farquhar. N[ew] York City Bank. Grace & Co. Succés sauf la question de légalité. Départ de N[ew] York le 5/2 sur le Lorraine. Lorraine. Les Grimprel, Gabrielle
Gills‘, Madame
Monahan, de Créquy Montfort. Enorme tempéte le 11. Atrivée le 14 au matin au Havre ot Reine m’attend. A minuit® 4 Paris, 8, rue Clément-Marot. Bartholomé, Chevalier. Visite de Henri et de Robert V., le 1&7 en aspirant d’artillerie; il est a@tuellement 4 Strasbourg, le second
436
Cahier IV
en abbé; il est entré chez les Salésiens et doit recevoir
les ordres dans 4 ans. Il a passé le temps de la guerre 4 Bruxelles. Cette grande maison sceuts.
ot je devais trouver tant de
Gillouin! m’objeéte qu’en anglais les mots pour naitre et connaitre n’ont pas de parenté. Mais précisément les vieux mots saxons: /o ken (connaitre), kn, race.
—
En
allemand,
ennen,
—
kind,
enfant
(au
neutre). Visite 4 la C[omt]lesse de Noailles, [38 v] qui me parlent [sic] de ces 5 enfants « qui forment la constellation dansante du printemps », Gigette, ma préférée, « couleur de saule et de soleil de mars »?. 2 avril. Thé chez le Comte de Beaumont, 2 rue Duroc, dans un magnifique hétel, en ’honneur de la
Reine de Roumanie. Vers récités par Francis*. Grand succes.
4-8 avril. Voyage a Lyon. 11 [avril]. Rep[résentation] de /’Enfantement du Mort*. Brouille q[ui] s’accentue avec F. Diaghilev et Miassine, pour le ballet. Travaillé aux dessins de S. Geneviéve avec Margotine’, 13 avril. Revu L. Massignon. Conversation trés intéressante. L’aprés-midi concert de musique brésilienne. Le soir, chez Monségur, Pitt et Charles Albert*. Vers récités par Henriette Sauret.
Pensées vaisseau,
de Dominique converti,
ami
Dupouey
de Gide,
(lieutenant
tué sur
l’Yser)
de :
L’imagination est la vertu q[ui] nous empéche de nfous] arréter au mal. — Sans entrer dans cette maison pleine de putréfaction et indigne de votre présence, levez votre main toute-puissante devant la
porte entr’ouverte’.
Aoril 1919
437
Mardi-Saint 15 avril. C[on]f[essé] longuement a Pabbé Dfaniel] Fontaine avec beaucoup de consolation’. Mes meubles reviennent d’Allemagne en 2 wagons. Je vais les chercher a Bercy. Conférences avec les Havrais pour les Affaires Brésiliennes. Diné avec Missia et Sert?. Il paratt que Gheusi serait désireux de faire jouer a la Renaissance mes 3 drames et méme Profée*. Vendredi-Saint au matin 4 N. D. de Paris. Le bedeau 4 ma grande surprise vient me chercher pour porter un des batons du dais. Profondément touché et honoré. J’accomplis toute la procession 4 la droite du Cardinal Amette, mon flanc touchant presque le bras qui porte le ciboire. N[ous] quittons le 8 rue Clément Marot et nf[ous] emménageons au 12 quai de Passy, en face de la Tour Eiffel. Mes meubles sont assez peu endommagés et je retrouve tous mes papiers. Je vois Daragnés pour une édition illustrée de Protée*. Vu les marionnettes de Gabriel [39] Thomas au Musée Grévin, pas trés intéressantes®. Concert de Gabrielle Gills. Vendredi-Saint, Passy, 3° étage.
Vendredi
18 avril, emménagé au 12 quai de
25 avril. Voyage au Havre. Déjeuné a
Honfleur avec Georges Ancel, député, et l’amiral Didelot. Conférence 4 la Bourse, puis conversation
au Syndicat des cafés. Magnifique journée de fleurs et de soleil. La vallée de la Seine. Le Havre avec ses toits d’ardoises. Pris entre la Seine et la falaise.
Médiocre
développement
de tous
nos
ports, tous
sans industries.
Je veux toujours faire la description ou la définition de lobjet q[ui] se présente 4 ma pensée, afin de voir, distinctement et a nu, ce qu’il est dans sa substance, considéré dans son tout, et, séparément dans ses patties, et afin de pouvoir me dire a moi-méme son vrat nom,
ainsi
que
le vrai nom
des
parties
dont
il se
compose et dans lesquelles il doit se résoudre. Car rien n’est si propre a élever l’4me que d’analyser
438 autant
Cahier IV. que possible, avec méthode
et justesse, tout
ce qui se rencontre dans la vie, et que d’examiner toujours chaque objet de facgon 4 pouvoir aussitdt connaitre 4 quel ordre de chose il appartient, de quelle utilité il y est, quelle importance il a dans lunivers et relativement 4 l?-homme (Marc-Auréle)}. Chaque fois qu’on te dira : « Vous n’étes pas ’homme de vos paroles », pense en souriant : « Pas encore, sans doute mais je sens qu’un jour mes paroles, c’[est]a-d[ire] mes pensées, auront raison de mes errements» (G. Duhamel)?. Se servir dune
seule
ame
pour
étre deux’.
28 [avril]. Visite 4 Exposition des artistes yougoslaves : Mestrovi¢, Destovieé.
29 [avril]. Déjeuner chez les Beaumont. La petite ptincesse de Broglie amie de Margotine, la fée noire avec ses pieds minuscules*. Le roulement rythmique des pieds des six hommes qui apportent un cercueil.
[39 v] 1&" mai. Les rues de Paris complétement désertes et vides sous la pluie. Je me rappelle ce q[ue] jai écrit autrefois dans /a Ville: « Rien ne roule dans les rues immenses®.» L’aprés-midi 4 /a Revue des Jeunes. On me montre un article d’ Antoine Lesira, qui m’émeut beaucoup, sur le poéte Jean-Marc Bernard, de Valence, tué 4 la guerre, dont mes livres ont, parait-il, déterminé de H.?.
la conversion’.
Mme
7 mai. Sylvain Pitt® est mort ce matin a l’HételDieu ot il avait été transporté pour lopérer d’une hernie et ot il avait été atteint d’une phlébite. Au moment d’y entrer il m’avait écrit aprés avoir prié a Notre-Dame, me disant : « Si je meurs, vous serez un bon témoin de moi.» J’étais allé le voir 4 ’Hétel-
Abpril-Mai 1919
439
Dieu ot, se plaignant de ne pas dormir, il me disait
qwil récitait les vépres toute la nuit, en écoutant les cloches de la cathédrale voisine. Il avait 4 cdté de lui sa femme et la petite Sylvie. Ma visite avait eu lair de lui faire grand plaisir. Encore une 4me que j’ai manquée! Puisse Dieu lui faire miséricorde! pauvre faune! Aujourd’hui 4 4 h. je recois de Charles-Albert Cingria la lettre suivante : « Le pauvre Pitt est mort ce matin. J’en suis tout secoué. On m/’a expliqué cela séchement (J’étais allé le voir en passant) devant son matelas renversé et la chambre vide. C’est absolument affreux. Et puis que penser — surtout une journée comme celle-ct — de cette chose vraiment inexplicable? Mon cher ami, je sais que vous en serez affe€té autant, sinon plus que moi. Alors entou,tez-le de vos priéres et de vos pensées. Personne ‘nest encore prévenu, ni Fontaine, ni méme
Madame
Pitt. — C.» Je me souviens de notre radieuse journée de Saclay en aotit 1916, au milieu des champs juste moissonnés. Il était grimpé presqu’en haut d’un grand arbre isolé, et n[ous] avions chanté ensemble de vieux noéls bourguignons. — Je me souviens aussi de notre journée de Beauvais. Comme sa bonne figure amicale va me manquer! [40] 5 mai. Je vais voir Mlle Monnier On parle d’organiser une matinée Claudel.
avec
F.
8 [mai]. — Arrivée de Régis? et de sa femme. Déj[euner] au Pavillon d’Armenonville. Lu le livre ot Ghéon raconte sa conversion opérée par le lieutenant de v[aisseau] Dom[inique] Dupouey, aprés sa mort. I] avait, parait-il, beaucoup d’admiration p[our] moi*.
[mai]. Enterrement du pauvre Pitt a N[otre]D{ame]. La veille de sa mort il avait eu une discussion violente avec sa femme. II laisse 2 filles en Algérie d’un premier mariage, un fils d’un second, et une fille du 3°. Retour avec Cingria qui me raconte son drame sacré des SS. Gervais et Protais (Vjoir] sur Pitt et sa mort plus tard les détails donnés par sa femme. 1931).
440
Cahier
IV
Salvum me fac, Deus, quoniam intraverunt aquae usque ad animam meam. La macération des tranchées. 12 mai. Suis appelé 4 Villeneuve pour le transport des objets q[ue] j’y ai laissés. Départ le 13. Arrivée a Chateau-Thierry par un temps radieux. La ville n’est pas trop abimée, sauf un paté de maisons écroulées autour de la place. Déjeuné a Hotel du Cygne avec des Américains. Départ en auto par Verdilly, Epieds (la haute tour carrée de son église), Beuvardes, Préaut. Arrivée a notre maison ou loge le vieux ménage Leblond. Elle est en somme moins abimée que je ne craignais. Il y a un grand trou dans le toit au-dessus de la chambre de Madame Régnier. Beaucoup d’ardoises sont tombées et les charpentes et platres ont été détrempés par les pluies; il y a eu de plus un incendie dans 2 des chambres du haut. Mais Partonneau, Agent chargé des reconstructions, un Limousin q[ui] a sous ses ordres un groupe de magons et 19 prisonniers boches, m’affirme que tout peut é€tre assez facilement réparé. Je retrouve tous mes objets chinois chez Moitié (Félix) et chez Chodron. Je visite les réparations effectuées par |’Agent, tous les beaux vieux toits de petites tuiles vont céder la place de plus en plus 4 Vhorrible tuile mécanique et au fibro-ciment! On a découvert de la pierre meuliére sur la route de Préau[t]. Tout le versant de la colline vers le [...]? est composé d’une couche de pierre meuliére,
une
couche
d’alluvions,
une
de silex
et
enfin du platre. Ce dernier peut étre exploité en galerie. Le soir aprés diner promenade [40 v] silencieuse sur la route de la Réserve. Plus d’oiseaux. Quelques gros obus rouillés parmi les bulles des pissenlits. Le lendemain 14, j’emballe mes objets. Nouvelle promenade a la Sablonniére ot I’on extrait des pavés de grés. Bellefontaine ot je suis allé la veille est trés peu abimé. Les paysans sont tous revenus et travaillent courageusement. Plusieurs ont acheté des vaches a 2600 francs. Ils me demandent d’acheter ou de louer des terres. Dans un campement de boches
Mai 1979
_
441
abandonné derriére la Sablonniére, parmi les balles pointues et dorées des mitrailleuses, des bouteilles _cassées, des casques rouillés, etc., je trouve quelques pages du livre de Stirner Der Einzige und sein Eigentum. L’église a eu un trou dans la votte du cheeur et, beaucoup d’ardoises étant parties, la charpente est
endommagée. Partonneau m’a promis de la réparer. Les 3 cloches, entre autres Marie-Jeanne, dont ma _cousine Jeanne Thierry était marraine, sont restées. Je vais prier sur la tombe de mes parents. Dans le grand silence et le soleil de 11 heures, un pied sur la
tombe de mon pére, j’éprouve une grande émotion. Le lierre sur la tombe de mon oncle lAbbé s’est beaucoup développé. Sur la tombe de mes arriéregrands-parents Cerveau [sic] et Cent je lis cette inscription qui me frappe particuliérement : « Goudelancourt en Picardie fut le lieu de leur naissance. Tous deux sont morts pleins de foi et d’espérance entre les bras de leurs enfants.» Magnificence incomparable et solennelle de la nature sous le grand soleil de mai, verdoyante et fleurie. Jamais je n’avais eu a Villeneuve
une
telle impression
de beauté,
mélée
a ce
grand spectacle tragique, quelque chose de sacré. A 1 h. arrive le camion militaire, conduit par un ancien maitre d’hétel d’une adtrice de l’Odéon. Route vers Paris par Bruyéres, Nampteuil, [41] Armentiéres et son église terriblement ébréchée. Le village tragique et effondré de Choisy, en haut d’une colline, avec la masse énorme et terrible de son église entaillée de trous énormes. On suit avec émotion la bataille, la route est parsemée de tombes, de tas d’obus, de
bobines de fil de fer. On voit chaque effort, chaque progrés dans cette marche sacrée. Le moulin sur POurcq, dont il ne reste plus que la roue parmi des pans de murs. La Ferté-Milon peu endommagée. Puis la grande route 4 travers immense plaine qui fut l’aréne de la 17 bataille de la Marne, Mareuil-surOurcq, May-en-Multien, Vareddes, enfin Meaux.
La route nationale Paris-Metz, les gros bourgs en [fétes] parmi les feuillages et les lilas, Pantin enfin et la barriére de Paris. Je décharge le camion.
442
Cahier
IV
Ne dis pas car Ne dis pas mais dis Ne dis pas : Il vit, Car il est mort?. Conversation avec Massignon : Nous souffrons du peuple Juif, parce qu’il est expulsé de nous, de méme que nous souffrons d’un membre qui nous manque. ‘ Pour les musulmans comme pour les Juifs, Esati est la figure du Christ (le poil roux, ’agneau qu’il offre a son pére a manger). Ouis est Isfe q|uz| venit de Bosra?? Le nom méme en arabe est celui du Christ : Ica. 18 [mai]. — Conversation chez Misia avec Gheusi q[ui] accepte de jouer Profée et les 3 Drames’. Blanche‘. Mad[ame] Muhlfeld®. Manifestation Jeanne d’ Arc. Nijinski, malade, « surmené»,
a Heiden
(Appen-
zell), ne peut pas jouer dans le ballet. Le 30 mai, matinée Paul Claudel au Gymnase, 4 3 h. de Vaprés-midi, organisée par Mlle Adrienne Monnier, direétrice de la [41 v] Maison des Livres. Au programme : rte Partie
Introduction par Paul Claudel® Sainte-Geneviéve, poéme, dit par Paul Claudel. 2 Partie
Le Pain dur (scéne Lumir : Eve Francis Si pourtant par S. Thomas — Ténébres — Sainte Cécile = Strasbourg — S. Franc.-Xavier — Ballade —
m1, de |’A&e IIT) — Louis : Jean Hervé Yonnel Marguerite Moreno 9 do de de Jean Hervé
Scéne finale de Téte d’?Or — Mort de Téte d’Or. Téte d’Or : de Max —
La Princesse : Eve Francis.
Mat- Juin 1919
443
Succés. Salle assez remplie et impression générale q[ui] parait excellente. Recette : 2 800 francs, insuffisante étant donné les énormes frais. 1[€T] juin. — Thé chez les Riviére avec Mmes Mancini et Du Paty de Clam.
3 juin, chez moi. — On me propose la Légation de Copenhague, Conty étant nommé a |’Ambassade de Rio. J’accepte. Promenade avec la petite princesse Jean de Broglie a ’Imprimerie Nationale pour voir les Chevaux du Soleil. Elle a un poumon attaqué. Je lui fais remarquer Padmirable
position
des
ombres,
la masse
centrale
, étant formée par le bras de l’homme et le dessous de la conque. Elle tousse. Daisy Fellowes}. Fabre,
Administrateur
du
Théatre-Francgais,
me
fait venir et me dit qu’il est tout disposé a jouer le 3° atte de Téte d’Or en gala vers le mois d’otobre avec de Max’.
L’homme est fait de deux sens perpendiculaires et entrecroisés, un peu comme une suspension a la Cardan : les yeux qui regardent en avant, et les oreilles profondes ménagées de chaque cété de la terre [svc]. Les uns voient le but et les autres écoutent l’harmonie. C’est de leur accord qu’est fait l’équilibre de la sensibilité et de l’intelligence.
42] 6 juin. Je pose
pour
mon
portrait
chez
J[acques]-Eml[ile] Blanche’, Lorsque, ainsi chantants, ces ardents soleils autour de nous eurent tourné 3 fois, comme des étoiles
voisines d’un pdéle fixe, ils me parurent tels que des dames
qui,
suspendant
leurs
danses,
silencieuses
s’arrétent pour écouter jusqu’A ce qu’elles recueilli les notes nouvelles (Par., c. x1)‘.
aient
444
Cahier
I
Je suis 4 qui me prend.
« Y a de quoi rire », dit le croquemott. Conversation animée au bout d’une table a laquelle prennent part Mad[ame] Muhlfeld, la C[omt]esse Anna de Noailles et Paul Adam sur la situation diplomatique. « Il n’y a qu’a se rappeler histoire de la Macédoine depuis 50 ans... » dit Paul Adam}. Gala 4 l’Opéra pour la réception des Etudiants de Strasbourg. Gilda Darthy dit le « Cantique du Rhone». Audax dum Vegae irrumpit scarabaeus in hortos. Fragrantis periit vittus odore rosae. Inscription sur les ccuvres de Lope de Vega’. Exécution au concert Gaveau (FP. Delgrange) de quatre des Cheeurs des Choéphores de Milhaud (trad[uits] par moi) : Vocifération funébre, Libation, Présages (batterie). La Justice et la Lumiére. Grand effet du cheeur déclamé avec batterie’.
On lit dans le Phikebe de Platon : Voulez-v{ous] comprendre la nature du bien, autant qu’il nfous] est donné d’y parvenir? Renoncez a vous le représenter au moyen d’une notion unique; mais plutét concevez une union intime de plusieurs idées, logiquement irrédudtibles, telles que : beauté, proportion, vérité. Ainsi v[ous] saisirez jusqu’a un certain point au moyen de ces mariages d’idées q[ue] sait opérer la raison proprement dite, ce q[ue] v[otre] intelligence discursive ne peut concevoir. Cozncidentia oppositorum, dit Nicolas de Cusa, c’est le mur q[ui] enclét le paradis ot Dieu habite. Ap[ud] Hans Larsen‘. [42 v] Mort de Geneviéve Bonniot, fille de Mallarmé. Prouhéze, nom de femme:.
Une phrase monstrueuse de Spinoza, bien d’accord
Juin 1919
445
avec ce que Massignon me dit de l’Islamisme : Deus neminem amat*.
On me
raconte que dans un coin de la Vendée
subsiste un jeu de cartes, la luette, absolument
sem-
blable aux tarots égyptiens, avec les antiques symboles, batons, glaives, coupes, deniers (pas de couleurs). A
ce propos mon interlocuteur me cite cette légende que la sagesse antique, pour assurer la perpétuité de ses symboles, avait trouvé plus str de les confier, non pas ala Vertu, mais au Vice (chez Mme A. Daudet)?. Place Saint-Sulpice je rencontre un gros bonhomme court au nez camard, avec un chapeau de feutre en forme de chausse entouré d’un ruban bleu outremer, /un veston tabac, bordé d’une large ganse havane, la rosette violette d’Officier de l’Instruction Publique, et
des calecons déliés* dépassant le pantalon trop court. Il entre dans une pissotiére. Une main de femme chargée de pierreries (diamants et émeraudes) qui fouille parmi les perles.
Dimanche 22 [juin], je vais voir Variot! a Versailles par une magnifique aprés-midi d’été. Il demeure dans Pancienne Rue des Ministéres en face de la maison ot Louvois
est mort.
Promenade
avec lui, sa mére,
sa
femme (en noir et blanc, l’air vague et faible) et mes Beremtants
Martie,
Pierre
et
Reine,
et Pératé®,
aux
2 Trianons, que je n’avais pas revus depuis 30 ans. Le petit avec l’admirable facade de Gabriel, aussi pure que Dart grec, ces 3 colonnes, ces 3 fenétres carrées délicieusement encadrées, ces moulures
en retrait, cette pro-
portion de l’avancement de la facade. Puis le sublime
grand Trianon Rond de Mansart avec son portique ouvert du milieu, par lequel on voit des masses de feuillages. Principe [43] que j’avais déja noté a Rome (S. Marie-Majeure) non pas symétrie, mais équilibre. Alignement rompu par des avancements irréguliers. Tantot
2 colonnes,
tantét
1, tantot
des pilastres
doubles chapiteaux. Le palais qui s’éléve comme
a
un
446
Cahier
IV
réve 4 mesure qu’on monte les escaliers. Les 2 beaux calices blancs des vases purs comme des lys, les lys de France. Les 6 colonnes fabuleuses de porphyre rouge, vert et blanc, qui encadrent les ouvertures du portique central. La disposition en équerre avec ouverture du cété des jardins, des étangs et du soleil couchant. — Plus loin ces immenses escaliers! Quelle beauté! En rentrant j’apprends la grave maladie de mon cher Philippe, atteint subitement d’une angine de poitrine. Je vais le voir. Il est étendu sur sa chaise-longue toujours fort, joyeux et courageux, et parlant de tout avec
un admirable bon sens. Un caprice quasi féminin de Clemenceau l’a écarté du rdle en vue dans la Conférence de la Paix en lui en laissant tout le poids?. — Ce méme lundi chez lui un coup de téléphone nous apprend que les Allemands consentent a signer le traité.
Au foyer de l’Opéra-Comique, 4 la représentation de Pelléas et Mélisande, une espéce de géant 4 barbe énorme avec un vaste chapeau de feutre noir tenant a la main un tout petit parapluie d’enfant. Les riches ont exclu la Providence (D. Dupouey).
La paix est signée a la Galerie des Glaces de Versailles le Samedi 28 Juin, lendemain de la Féte du Sacré-Coeur, et veille de celle de S. Pierre et S. Paul.
2 [juillet]*. Une lettre tonchante de Madame Yvonne Victor Segalen, m’a annoncé la mort du Dr Viator Segalen, médecin de la marine, que j’avais connu en Chine et q[ui] était ?auteur de l’édition chinoise de Connaissance de I’ Es. J’avais eu avec lui de longues conversations sur la religion 4 Bordeaux en 1914, puis a Paris, 4 ?Hotel Mirabeau, en décembre 1916, au moment ot il partait pour la Chine et moi pour le Brésil. Je le croyais sur le point de se convertir. En rentrant a Paris j’apprends qu’il est [43 v] malade, profondément neurasthénique, 4 Alger, et en méme temps je recois de lui une lettre navrante, une espéce
Juin- Juillet 1919
447
d’appel désespéré qu’il m’avait adressé en octobre A Rio et [qui] avait mis tout ce temps pour me rejoindre. Je lui offre d’aller le voir 4 Brest ot il est en ce moment, il me répond qu’il se sent mieux et qu’il viendra sans doute lui-méme prochainement 4 Paris. Un mois plus tard sa femme m’écrit qu’on l’a trouvé mort au pied d’un arbre dans la forét de... prés de Brest. Il se serait coupé le pied sur un rocher (En réalité suicidé*), et aurait en vain essayé d’arréter le sang avec un mouchoir. Dans sa lettre il me suppliait de ne pas arriver trop tard, comme jadis pour Charles-Louis Philippe?.
9-10 juillet. Voyage 4 Laon ov je vais voir le Préfet de 1’Aisne pour lui parler de la situation de maman. Entre Soissons et Laon 17@ vue du pays dévasté, ‘complétement désert. Marécages formés par les trous d’obus. La terre elle-méme a été rebroyée et remalaxée. Laon. La belle cathédrale aux tours ajourées. La ville et la préfecture complétement pillées. J’obtiens 1 Goo francs. Le « Kriegerfriedhof ». Je suis avec Milhaud et mon petit Pierre. Couché 4 l’Hétel de |’Ecu et de la Hure réunis. Le lendemain départ en auto, Corbeny, Craonne, rouge de coquelicots, Rheims en ruines.
L’admirable cathédrale, maintenant rose, ayant passé par la flamme. Fisme, Fére-en-Tardenois, assez démoli.
Villeneuve ot tous trois nous allons cueillir des cerises sur un arbre du clos. Chateau-Thierry. Retour a Paris arrh. Le 12 avec Margotine, je travaille a Pillustration de la S. Geneviéve. Danemark.
—
L’Offcie/ publie ma nomination
au
Le Soviet de la ville de Tambof a décidé d’élever une Statue 4 Judas Iscariote (Nouvelle de journal). Il est décidé
que je pars pour
Copenhague
sur le
croiseur Marseillaise que j’irai prendre 4 Dunkerque. [44] 28 juillet. — Conversation avec la femme de Segalen qui me raconte les derniers jours de son mati,
448
Cahier
TV
Depuis de nombreux mois (cest en octobre qu'il m’adressait cette lettre d’appel déchirant) il était la proie de l’angoisse métaphysique. C’était une 4me en peine. A la suite de ma lettre il s’était mis en route pour me rejoindre, puis s’était arrété au Mans et avait rebroussé chemin. Le jour de sa mort il était parti avec des bottines de chasse, puis était rentré 4 ?hotel pour prendre des souliers bas : c’est juste une ligne audessus de ses souliers qu’une pierre tranchante, lui coupant lartére, détermina sa mort'. Sa trouva étendu a cet endroit qu’il aimait et venu souvent visiter avec elle?. Pendant avaient vécu dans l’union la plus complete
femme le qu’il était 14 ans ils et la plus
étroite. Maintenant elle reste seule et sans ressources avec la charge de 3 enfants. Longue conversation avec elle. Elle me promet d’aller voir labbé Fontaine. L’ainé de ses enfants qui a 5 ans avait déclaré qu’il
voulait étre catholique, lui faisant des reproches de ne pas aller 4 la messe. Remariée q[uel]q{ue] temps aprés’. Le 14 juillet jai assisté au Défilé triomphal du balcon du 422 de la r[ue] S.-Honoré (coin de la rue Royale). Foch et Joffre. Les troupes défilant devant ce magnifique mur vivant de foule que faisait le public étagé devant la Madeleine. Les flammes des lances, les drapeaux, les tanks, défilant devant ce fond mouvant,
avec les mouchoirs agités. Le soir illumination de la Seine. Sortis avec les enfants.
Les enfants partent pour Hostel le 19. La princesse Daisy de Broglie va se marier 4 Londres avec un nommé Fellowes‘.
Départ pour Copenhague Nous partons pour le matin a 7 h. dans pour la Commission Compiégne, ot arrét
Copenhague, ma femme et moi, 2 des autos qui ont été fournies du Slesvig’. Ecouen, Chantilly, pour une panne. Je n’avais pas
Juillet 1919
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revu la ville depuis 1890, quand mon pére y était Conservateur des hypothéques! et que je faisais de grandes promenades a pied dans la forét (mon souvenir est surtout des bords de |’Aisne, de la Forét de Laigne, de lAronde et du Canal vers Ribecourt, qui me sem-
blait dans la note de Rimbaud). C’était l’époque ot je lisais Dante et ou j’accomplissais mon travail de conversion (Vépres a S. Jacques et a S. Antoine). Souvenirs aussi de printemps (les grands hétres couverts d’une écume [44 v] vineuse). La pauvre ville est pas mal démolie par les bombes d’avions. Notre maison 32, rue des Domeliers, avec sa grande cour et sa haute muraille, a été remplacée par d’horribles bureaux de commerce. Mais les grands hétres touffus en face au coin d’une espéce de rempart, que j’aimais ‘tant a regarder, sont restés les mémes?. Déjeuner a lH6tel de la Cloche. N[ous] sommes accompagnés par mon Attaché militaire adjoint, le Capitaine Heérig, qui s’occupe spécialement des questions du Slesvig, et par sa mére. Le pére du Capitaine (q[ui] avait donné sa démission au moment des inventaires) avait repris du service en 1914, 4 61 ans, et a été tué a Beaucourt sur
PAncre. Nious] allons tacher tout a Vheure de retrouver sa tombe. Départ a1 h. Roye, Lassigny. Commencement du désert de la bataille, vaste steppe patsemée de ruines. Bray-sur-Somme avec sa grande
église. Champ de bataille de la Somme. Arrét 4 Beaucourt, dont la seule trace n’est plus qu’un nom sur une planche. Le dernier habitant du pays habite avec sa femme dans une roulotte. On essaye de retrouver des traces du Commandant qui parait avoir été tué devant Beaucourt au moment ou il enlevait sa troupe, pour une attaque. Paysage extraordinairement tragique et désolé, une petite pluie intermittente, le soir qui tombe,
le fond de cette vallée de l’Ancre tout planté de grands arbres morts et tout blancs. De l’arbre il ne reste plus que la ligne indiquant toutes les variétés de la stature,
tourmentée, telle que la résistance au vent l’a imposée 4 la plante. Route droite d’Arras. N[ous] dinons dans les ruines d’Arras. Comme on ne peut pas nous loger nous repartons aprés-diner pour S.-Pol. Route en auto
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Cahier
IV
la nuit sous un magnifique tunnel de feuilles fraiches. Les grandes portes fermiéres sous le feu du phare, les longues maisons blanches de la Flandre. Couché a S.-Pol 4 ’Hétel du Trocadéro, piétre auberge. Départ le lendemain par une route ravissante. Fraiches campagnes, vastes panoramas du Boulonnais, S.-Omer. Commencement
du canal, moulins 4 vent, la Flandre.
Ce pays aussi est trés dans le sentiment de Rimbaud. N{ous] arrivons 4 Bergues, puis 4 Dunkerque, ot n{ous] trouvons la Marsec//laise amarrée [45] dans le bassin militaire. Commandant Loyet, beau-frére des 4 O’Neill. I louche. Petite visite 4 Dunkerque avec ses 2 beffrois. Seul port frangais avec cette jonétion des canaux. N[ous] partons a 4h. Mer belle. Le soir n[ous] sommes en vue des cotes d’Angleterre ot n{ous] laissons le pilote. Le commandant me parle de Segalen et me dit qu’il n’y a pas de doute qu’il se soit suicidé. Les 2 jours suivants, Mer du Nord assez clapoteuse. Vue de la cote du Danemark le lundi a 5 h. Skagerrak. Le mardi 5, Cattegat, Le Sund, Elseneur vue des cétes
assez verdoyantes de la Suéde et du Danemark. Je débarque a 5 h. et je me rends immédiatement 4 un autre point du port pour saluer mon prédécesseur, M. Conty, q[ui] s*embarque pour |’ Angleterre. Installation ala Légation, espéce de grand appartement compliqué assez mal meublé. Le lendemain 6, mon jour de naissance, présentation de mon personnel de fortune : outre l’Attaché militaire, le Comm|andant] du Boucher?, un tas de gens amenés par les hasards de la guerre. Bertrand (de Séville), Lublin (Danois), Mickiewicz (Russe), Hansen (Danois) (lui seul est de fondation). — Le lendemain visite de mon collégue d’ Angleterre, Sir Charles Marling, q[ui] vient me parler des uestions du Slesvig et visite au Ministre des Affaires] tr[angéres], M. de Scavenius. Promenade en auto par la route qui suit la mer vers Klampenborg, au milieu de jolies petites villas. — Préoccupation.
Je ne puis vous donner ce que j’ai de meilleur qu’a condition de vous refuser ce que j’ai de plus mauvais.
Aott 1919
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_C’est comme les Rois Mages dont l’étoile condu€trice disparaissait dés qu’ils étaient entrés dans une ville. Vobis datum est nosse mySteria regni coclorum (Matth., XII, 11), nous pouvons donc les connaitre.
De ces femmes dont on dit : Elle est toujours jolie? comme on dirait : il est toujours bossu? Je suis obligé de prendre les mots dans le sens qu’ils ont aujourd’hui, et non pas toujours dans celui qu’ils pourraient ou devraient avoir. — « J’ai abimé mes affaires », tellement vitupéré par mon professeur de rhétorique. — Adorable. ?
Mouvement
adorable des anémones
de mer
qui se
déplacent en respirant, en s’épanouissant et se refermant comme des corolles. Reporté 4 mes préoccupations habituelles. Les 4mes et les corps dans le Ciel?®. [45 v] Sur la nécessité que le péché aussi soit complet, quil ait son extension et sa forme completes,
qu’il réalise toute sa chance, qu'il montre totalement ce qu'il est, afin qu’il soit consommeé’. Nondum completa sunt peccata Amorrhoeorum (Gen., XV, 16). Appone iniquitatem
super iniquitatem
ipsorum
ut non
intrent in judicium tuum (Ps. LX XVIII, 25). Maledittum et mendacium et homicidinm et furtum et adulterium inundaverunt, et sanguis sanguinem tetigit (Os., EN ogo): (Sanguis enim sanguinem tetigit quando peccatum peccato additur, ut ante Dei oculos adjunttis iniquitatibus anima cruentetur ). Ut impleat peccata sua semper (1 Thess., 11, 16). Oui nocet, noceat adhuc. Et qui in sor dibus edt,sordescat adhuc (Apoc., XXII, 11). Ego indurabo cor ejus (Pharaon) (Ex., VII, 3). S7 conversus justus a justitia sua fecerit tniquitatem, ponam offendiculum coram eo (Fz.).
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Cahier
IV
(Puisqu’il n’a pas vu son péché une 17 fois, je ferai qu’il le voie une seconde.) Textes cités par S. Grégoire, Homil. in Ex., 1, 11-257. g Quem Cee ? e Jesum Nazarenum. oann., pal)?
—
Ego Sum
16 aout. — Présentation de mes lettres de créances. Un vieux gentilhomme sourd en costume de hussard bleu avec un petit manteau nacarat sur le coin de
’épaule et un casque a plumet vient me chercher dans mon bel’ uniforme doré. Laquais a habit rouge et culotte jonquille. Voitures de cour. Un des jolis palais
de |’Amaliengad.
Majordomes
et maréchal
de cour
avec leurs hautes cannes. La série multicolore des dignitaires de la Cour. Puis le roi haut et mince, interminable, avec une petite téte aimable et béte. Il me
parle gentiment, aprés que j’ai fait mon petit compliment, du Slesvig et de son amour pour la France. II fera la-bas un voyage solennel. Sortie, puis rentrée
pour présenter mon attaché militaire, le Commandant Du Boucher. Puis [46] la Reine et d’abord la grandemaitresse de cour, une nabote avec un affreux chapeau, qu’on dirait ramassé sous un comptoir, avec une sorte de piquet de plumes sur le cété. La reine, fille de la
G[rande]-Duchesse de Mecklenbourg et sceur de la Princesse Cécile, dans une espéce de robe de femme de chambre en satinette bleue a pois. Elle me parle du
retour des troupes 4 Paris le 14 Juillet. Le soir diner a Marienlust 4 Helsenor.
Retour au milieu des feuilles
avec des échappées de mer. Henry Cochin me demande de faire partie du Comité qui doit célébrer le centenaire de la mort de Dante’.
Lundi 18 aout 19194.
Déjeuné a bord du yacht royal Danebrog avec le Roi et la Reine. 19 [aott]. Féte battante. — 20,
& bord
de la Marseilaise.
Pluie
Aott-Septembre
1919
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22 [aout]. — Visite 4 Egelund a la Reine Mére qui njous] regoit trés aimablement, nous présente toute sa famille, nous fait promener dans le jardin et nfous] invite a prendre le thé. Joli parc plein de fleurs avec cette échappée sur le lac entouré de foréts. Une immense femme en cheveux blancs habillée 4 l’ancienne mode. Des gants blancs. 24 [aot]. — Départ de la Marsez/laise pour sa mission au Slesvig. Visite aux sceurs de S.-Joseph de Chambéry. 25 [aout]. Hambourg.
Nfous]
recevons
notre
argenterie
de
» 1 septembre. Départ de ma femme par la Marsei//aise. Je Paccompagne jusqu’a Elseneur. 31 aout. Promenade Helsingor.
en auto
a Frederiksborg
et
6 septembre. Promenade au-dessus de Copenhague dans le grand aéroplane Farman Goliath,
Fern im weiten tiefen Meer. Schlaft mein Schatz so lang, so schwer, Ach,
ware
Ich bet thu!
(Chant de matelots allemands?.)
10 septembre. Fini « S, Martin »! Il ne m’a pas fallu moins d’un an pour venir a bout de ce poéme, concu au moment de |’ Armistice’. [46 v] Samedi 13 s[eptembre]. Promenade jusqu’a Skodsborg. — Dimanche, Malmé. — Lundi : la savane, récit. — Mardi, Commandant — Mercredi, thé, récit?.
Brisson, la nuit.
Mes pensées ne se suivent pas logiquement, elles se provoquent harmoniquement*,
454
Cahier
IV
« Je n’ai pas de remords, puisque je me repens », dit un personnage de comédie. Japprends 4 monter a bicyclette.
Les singes dans leurs cages de verre par cette triste fin de journée du Nord. Toutes ces obscures formes velues grimpantes. Ce singe qui se balance continuellement de droite 4 gauche (le mouvement de toutes les bétes enfermées, ’H[omme] et son Désir)!. Tout a coup, il se dresse, sa face bestiale levée vers le ciel, et
tenant
son
membre
4 pleine
main,
en
un
geste
horrible désespoir. Lundi 13 o€tobre 1919°. 15 [octobre]. Je sais monter a bicyclette. Et je renverse contente.
une
vieille
dame
qui n’est
pas
Pour un tableau : une femme secouant violemment
un arbre d’ou tombent des fruits de toute espéce. Et je me souviens et je pleure et je me tiens moiméme par le poignet.
... atteinte 4 cette détestable intégrité. Je suis obligé d’aller chercher mes idées 4 une plus grande profondeur.
En Sibérie autrefois on vendait le gibier au métre cube. Remerciement pour mes cing enfants. Certains hommes ou femmes vieillissent comme des
feuillages en devenant luisant.
jaune et rouge.
Un
certain
Je lis Calderon oi il n’y a ni caraGére ni poésie de
Oédfobre-Novembre
1919
455
Style, mais qui est comme Lope de Vega un prodigieux inventeur de scénarios?. [47 v] La femme aux sept maris au chap. xx de S. Luc. Neque nubent, neque ducent uxores. Donc le lien marital n’existera plus. Les termes employés ici sont des expressions juridiques : Nubent, de nubis, nuage. _ Hoc etenim verbum de sola muliere dicebatur, quam flammeo - velamine nuptam, id est velatam, vir in domum
dAucebat
(Glose). Et cependant il est a penser que le lien de charité existe toujours. Le texte continue : Neque enim ultra mori poterunt. 11 y a donc un lien dans le sacrement entre la mort de lindividu et la perpétuation de Pespéce : aequales enim angelis sunt, et filii Dei, cum sint filia resurrettionis?. Ego enim dabo vobis os et sapientiam (Luc, chap. xx)’. La bouche et la saveur
Alttendite ne forte graventur corda vestra in crapula et ebrietate, et curis hujus saeculi (zbid.)*. L’excés de préoccupations et de travail, un vice comme la débauche et de méme engourdit le cceur. Et omnis populus manicabat ad eum in templo audire eum> — De bon matin. Deum nemo vidit unquam: unigenitus Filius qui est in sinu Patris, ipse enarravit (S. Jean)*. La parole vient donc de plus loin que 14 ot pénétre la vision. Eh quoi, vous ne me connaissez pas assez? Vous ne m’avez pas éprouvé assez? je ne vous ai pas encore assez trahi’.
Je coucherai sur tes positions. Pardonne-moi, si — j’ai vraiment besoin. Je n’ai pas trouvé d’autre moyen d’étre avec toi que de prendre tout’. CLAUDEL V - 18
18
456
Cahier IV
Confusion. Je ne t’écoute que trop. Cette mortelle inclination. Ah, quel est cet état nouveau? ? Ah, je me réjouis tellement de la joie que je te donne’.
Ce matin 4 7 h. dans le ciel admirablement pur, au-dessus de la lune a sondernier quartier une guirlande formée des quatre Planétes, Vénus, Mars, Saturne et
Jupiter. [48] Ainsi pour éternellement je te servirai de nourriture! Je ne sais pas si... Ici ils peuvent exister l'un sans l’autre4.
Toute l’astrologie se résume 4 ceci que les mouvements particuliers se rattechent tous 4 des mouvements généraux. Les grands corbeaux danois, ailes noires et manteaux gris. Cette littérature semi-liquide qu’on vous administre a la cuiller.
19/11. Arrivée de l’Amiral Groult et du Député O’Grady* q[ui] vient traiter avec Litvinoff. Conversation. Cette Juive trés décolletée montrant sa graisse jaune et vétue d’une robe grise pareille 4 une toile d’araignée poussiéreuse. Du catéchisme du P. Pégues : — Dieu existe-t-il? — Oui, Dieu existe.
— Pourquoi dites-vous que Dieu existe? — Parce que, si Dieu n’existait pas, rien n’existerait.
Novembre 1919
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— Comment montrez-vous que, si Dieu n’existait pas, rien n’existerait? — On le montre pat ce raisonnement : — Ce qui n’existe que par Dieu n’existerait pas si Dieu n’existait pas. Or tout ce qui existe et qui n’est pas Dieu n’existe que par Dieu. Donc, si Dieu n’existait pas, rien n’existerait.
|
— Mai comment montrez-vous que ce qui existe et - n’est pas Dieu, n’existe que par Dieu? — Par ce raisonnement :— Ce qui existe et n’existe point par soi, n’existe en derniére analyse que par un autre, qui est pat soi et que nous appelons Dieu. Or ce qui existe et n’est Pee Dieu, n’existe point par soi. Donc ce qui existe et n’est pas Dieu, n’existe en derniére
analyse que par Dieu. ' — Et comment montrez-vous que ce qui existe et n’est pas Dieu, n’existe point par soi? — Par ce raisonnement : — Rien de ce quia besoin de quelque chose n’existe par soi. Or tout ce qui existe et n’est pas Dieu a besoin de quelque chose. Donc ce qui existe et n’est pas Dieu n’existe point par soit, 30 nov[embre]. Le professeur M[...] chez Nyrop?.
Non est occultatum os meum a te quod fecisti in occulto Os CXXXVI). Ainsi ce visage méme qui nous rend visibles, qui nous manifeste, qui nous signifie, il a été fait en secret
et son dessein est occulte. Arrivée de la baronne de Sternburg, sceur de M. Elle boite, appuyée sur une canne 4 crosse d’or. Son marti était autrefois Ambassadeur d’Allemagne 4 Washington.
Oleum autem peccatoris non impinguet caput meum (Ps.
CXL).
[48 v] Lettre de Mireille Dupouey disant que j’ai beaucoup contribué a la conversion de son mari, qui
458
Cahier
IV
faisait sa leGture principale de mes livres. Brest, 5, rue Neptune. Aller a la chasse aux Nymphes avec un fusil chargé de turquoises.
La vision panoramique du passé (au moment de la mort) est donc due 4 un brusque désintéressement de la vie, né de la conviétion soudaine qu’on va mourir a Pinstant. Et c’était a fixer l’attention sur la vie, a
rétrécir utilement le champ de la conscience, que le cerveau ‘était occupé jusque-la comme organe de mémoire (Bergson, /’ Energie spirituelle, p. 82)}.
La baronne me raconte était malade d’un cancer, tapis dans le cabinet de souffrir avec lui. Elle part pour N[ew] Y[ork].
que pendant que son mari elle passait la nuit sur un toilette pour |’écouter et le 9 sur le Frédérick-V III
Je ne veux pas prévoir les difficultés de peur de les provoquer. La lune ce matin déja rongée par le mois ainsi qu’une énorme oreille avec son pavillon. Enorme présidente dune population? de becs de gaz.
Saint Sebald se chauffe les pieds 4 un feu fait de morceaux de glace. Hier promenade dans les bois de Klampenborg. Les grands hétres ot beaucoup de feuilles mortes sont restées attachées, tout rutilants brun et vert, dans le
soleil hivernal. La mer blanche au dela des cimes?. Le lézard, animal timide, qui 4 la moindre alerte croit plus prudent de se séparer 4 tout hasard de sa queue. Le vieux prunier qui 4 la moindre provocation donne tous ses fruits en masse et d’un seul coup :
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aprés quoi il ne lui reste qu’une seule reine-glaude [sec] qu’aucune secousse ne peut plus détacher. 4 lettres
bleues
4 la fois
Alice, Margotine, Pippa.
sur
ma
table. Francis,
[49] Dormir, Cest se désintéresser (Bergson)}. ~
13 décembre. — Sainte-Lucie, dont le nom est percant dans les ténébres comme un cri de souris ou puce.
Le libéral Russe en est arrivé au point de renier la Russie elle-méme. Ces mots : amour de la patrie, on est venu a en avoir honte comme d’une chose dangereuse et béte. Pour ’homme russe, ’honneur n’est qu’un inutile fardeau. — II l’a toujours été, durant toute son histoire.
— Donnez-lui ouvertement le droit au déshonneur et vous l’entrainerez o vous voudrez (Dostoievsky, /es Possédés)*. Un général russe, chez Madame Narischkine Witte, me dit que la crise actuelle ressemble absolument a ce
qu’on appelle « les Temps obscurs » qui ont duré en Russie de 1606 4 1613, exactement avec les mémes symptomes®.
Visite a la Glyptothéque, musée de sculpture fondé par le brasseur Jacobsen. Au centre un hall élevé et vitré formant jardin d’hiver sur lequel s’ouvrent des loggias. Rodin, Carpeaux. Science des ombres particuliére aux sculpteurs francais et que j’avais admirée dans les Chevaux du Soleil de ’Imprimerie Nationale‘. Ainsi dans VPUgolin les noirs fondamentaux sont réservés aux deux orbites et a la bouche distendue par les doigts, puis 4 la cavité de la votte formée par la poitrine et l’épaule. Au premier, admirables bustes de Rodin (les petites figures de marbre au contraire sont tellement molles et cotonneuses). Dans le Hugo l’intérét (et le noir) principal pour moi est loreille, large,
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Cahier
IV
ourlée, un peu pointue, profonde, caverneuse. Mais sous le front magnifique la partie médiane a quelque chose d’étonnamment sec, mesquin, dur, comprimé. Le nez gros et rond sans cara¢tére a l’air d’un bec et le bas se perd dans la barbe. C'est le nez qui exprime le désir, l’ampleur de laspiration et de Pinspiration. Sur cette face on ne voit pas le sourire. Les yeux trés noirs, durs, défiants. Front de constructeur dont les quatre
portes sont obscures’. Falguiére téte de jouisseur inquiet, galvaudeur de ses dons d’artiste, rappelant un peu Jean Lorrain par [49 v] V’aftaissement des chairs et cet ceil chargé de remords et de dégottt. Puvis de Chavannes, noble et dominateur. Dalou, étonnamment
fin, subtil, « pneumatique », respiratoire’. (I] manquerait ’admirable buste de Rodin lui-méme par ma sceur?,
Falguiére en a fait une espéce de concierge satisfait.) — Carpeaux : bustes étonnants de Géréme, de Garnier,
du diplomate Tissot, spirituel et sceptique, et surtout du notaire Beauvais, téte de sanglier hirsute avec les oteilles pleines de poils, fréquents en France il y a 2 générations (Veuillot, Dufaure, Berryer, Daumier). Puts la merveille, qui est la salle des bustes féminins, @une douceur, d’un modelé, d’un attendrissement amourfeux, vraiment admirable — et tellement dis-
tingués. Des femmes de tous les ages et de tous les types et toutes presque également belles. Ces bustes sont faits pour le platre [s7c]* et quelques-uns sont admirablement patinés, se détachant sur le fond lie de vin. Le platre n’aurait pas ce gras et ce moelleux. — Plusieurs Gauguin. Un saisissant et dramatique Théodore Rousseau (le Mont-Blanc). — L’autre jour chez Vilhelm Hansen, les Gauguin et particuliérement Palbum de reproduétions édité 4 Munich. Seul peintre issu de ’impressionnisme ayant de la grandeur, de la composition et du style. Au lieu d’éparpiller la couleur, la répartir en taches unies, en cloisons homogénes, se faisant équilibre non seulement par le ton, mais par Pétendue et par la forme. Caraétére des formes et signification de chacune, appropriée d’avance 4 telle couleur. C’est bien les tropiques qu’il lui fallait, pays des formes larges et des cloisons spacieuses au lieu du
Décembre
1919
461
papillottement brouillé de nos climats, si bien rendu
par les gens du plein air. — Un beau buveur d’absinthe de Manet, le peintre qui a vraiment compris le chapeau haut-de-forme. Voir le tube gris du Musée Vilhelm Hansen. Un charmant Tiepolo. — Mais quelle triste lumiére! — Au cinéma les montagnes de neige de I’Alaska et qui s’écroulent et se dissolvent [50] en torrents.
Modes modernes : Les gens qui n’ont jamais vu un dos de femme s’en font une opinion bien exagérée. Les Gluckstadt : diner avec le prince Valdemar (un peu gateux) et la princesse Margrethe. Qu’il a ruiné. Depuis mis en prison ot il meurt (1923)!. Et caro mea immutata e& propter oleum (Ps. CVIII)?. — A cause de l’onétion. Les Rois, les Evéques. ... pour un moment ce vase de vetre.
dans un paysage menacé avec
Clemenceau dans son dernier voyage 4 Londres est parti avec un livre de Claudel, que Philippe* a juré de lui faire comprendre.
Les catholiques
4 qui l’univers revient de droit.
Seuls ils sont les enfants de Dieu et ils ont hérité la terre en vertu de l’un et de l’autre Testament. Les hérétiques n’en possédent que les morceaux déformeés.
— Lettre a J. Galzy, 21-X*.
Sous les couches de terre accumulées et derriére les murailles épaisses un prisonnier dans les casemates de ame qui meurt de faim et qui pousse des hurlements de désespoir®. La grille q[ui] sépare. Je vous ennuie? Cela v[ous] ennuie d’étre un moment avec moi*? Les derniers moments
de Bismarck (cf. avec ceux
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Cahier
IV
de Luther) et ses derniéres paroles d’aprés une relation publiée en 7903. « Le Comte Bismarck eut une agonie pénible. Il criait : Au secours! au secours! Dans son délire il nommait la Serbie, Angleterre, la Turquie, la Russie. Puis il criait de nouveau. Mais ah, l’Allemagne, |’Alle-
magne, |’Allemagne?! »
Je regois le programme d’une représentation de la Verkiindigung qui a eu lieu au Kammerspiel de Munich le 19 novembre 1919. Hegner a traduit Tauche et die Ruhestag. Le programme est rempli d’articles louangeurs sur moi et mon ceuvre sans aucune allusion 4 mon rdle durant la guerre’. « Faire de la musique avec un peintre » (Proverbe). [50 v] Un gros enfant lourd et rond comme un pain de six livres. Clair comme le souterrain du Métro quand il s’illumine d’un seul coup. Noél. Messe de Minuit chez les sceurs de |’Assomption.
Il est vraiment curieux de voir lirritation et l’acharnement
de Clemenceau
contre les bolcheviks,
quand
on se rappelle que c’est lui qui a déclaré que la Révolution dans son ensemble avec tous ses crimes ne faisait qwun d/oc dont il fallait tout prendre ou tout laisser. Quand on lit le récit des grandes journées (10 aoftt, etc.) et celui des séances de la Commune avec Hébert et Chaumette, on voit que nous n’avons rien 4 reprocher aux Soviets. De méme la bande de Lénine eét Pexacét pendant du Comité de Salut Public. — Les derniéres élections (18 oftobre) marquent une date importante dans Vhistoire de France*. La mystique républicaine représentée par le parti radical, et que j’ai tant haie, achéve de s’effacer. Elle est remplacée par un parti venant de divers cétés détaché de tout idéal
Décembre 1919 quelconque et attaché 4 boutiquier, comprendre
463
mais férocement et étroitement nationaliste ses intéréts, L’esprit petit-bourgeois, petit petit commergant, le dernier 4 pouvoir le phénoméne russe.
Grand froid, grand vent, grande neige, grand soleil. Les gens en luge déboulant a toute vitesse dans le bois de Klampenborg.
Le vieux professeur quia su se procurer pour gendre le dire€teur d’un asyle [sic] d’aliénés. — Il raconte Phistoire de l’Assyrie d’aprés ses souvenirs personnels. Lettre de Robert. — 26 décembre. — VJ[ous] serez touché d’apprendre que Teddy, jusque dans le délire ow le jetait le coma aprés sa blessure mortelle, s’écriait toujours : Mon doux Jésus, miséricorde! C’est un compagnon de souffrance qui a rapporté ce trait au prétre qui bénit mon frére quand il fut blessé. Serezvous surpris si je vous confie tout bas que notre pauvre chére Maman a vu Teddy, oui, elle l’'a vu une demiseconde la regardant tendrement. C’est elle-méme qui m/’a raconté cette courte apparition et elle ajoute qu’elle s’eSt sentie toute heureuse.
1920 [51] 1&7 janvier. — Temps humide et assez doux. A
11 h. réception des Frangais. Discours d’Ehlus et de Lacroix.
Un vieux
Francais,
M. Mounet, me
lit un
compliment en vers :
Nous savons qu’en tout temps cette Légation A pris les intéréts de notre nation Et le poste est bien loin d’étre une sinécure... Tout a fait ce qui plairait a /2 Minerve Francaise}.
Ludovic Naudeau disait de ancien Empire Russe que c’était « un pot de chambre plein de m... sur lequel le Czar était assis »?. Oui, mais il vaut mieux que la m... soit dedans que dehors. Ph[ilippe] [Berthelot] me fait demander ce que je penserais de mon transfert a Varsovie. Enchanté, naturellement. Mes enfants ont la coqueluche. Ce désir, est-ce que v[ous] le savez? est-ce que v[ous] le connaissez? Quoi, c’est vraiment cela q[ui] est la cause? q[ui] n’a pas pu v[ous] empécher?? Dans la belle fleur blanche de la parnassie des marais les étamines s’allongent chacune 4 son tour et viennent
successivement se placer sur le pistil pour y déposer leur pollen, puis se redressent (Edmond Perrier)‘.
Janvier 1920
465
Cest la vanité qui tue..., qui ronge Lamartine, etc. Hugo aun crane de fou. Ce qu’il y a de plus dangereux, c’est de se laisser adorer (lettres de Balzac)!. Io
janvier,
4 4 h. 15, au
Ministére
des Affaires
Etrangéres, échange des ratifications. La Paix entre en vigueur! Nfous] partons dimanche. Arrivée de la Marseillaise q{ui] repart le 13 4 midi. Le 14, diner chez - le Roi. Le dimanche 25 janvier, 4 minuit, par train spécial départ, enfin, de la Commission
Internationale pour
Flensburg, composée de Sir Charles Marling, Ministre anglais, Président, de moi, de M. Heftye, représentant
norvégien, de M. Von Sydow, représentant Suédois et de personnel divers. Arrivée 4 Vamddrup, derniére ville frontiére, que j’avais été si heureux de trouver lors de ma sortie de Hambourg en 1914 avec ma femme et mon petit Henri. Temps froid et radieux. Musique. Arrivée 4 Flensburg 4 minuit. Réception par lAmiral et les p[rinci]pales autorités. Les marins francais font la haie d’un coté, les Anglais de autre. La fanfare des
chasseuts a pied nous précédent [sic]. Nous nous [51 v] organisons en cortége : en téte Sir Charles, Lady M[arling], ?Amiral et moi. La commission s’installe au Flensburger Hof, médiocre hétel dominant la gare. Elle est installée dans une vallée encaissée qui domine le Fjord de Flensburg. Le soir, réception des Landraths et p[rinci]pales autorités installées par nous. Toute la nuit bataille contre les draps allemands que je réduis aux étroites dimensions d’une cravate. Pas de lumiére dans les rues. La ville a l’air trés allemand. Misérables étalages. La population dans des vétements minables, mais qui n’a pas l’air d’avoir trop souffert. — Le lendemain promenade en auto 4 Mumik?, au chateau de Glucksburg et a travers les grands bois qui dominent le fjord. Beau soleil. La Russie flotte dans le vide, hors de l’espace et du
temps.
Elle n’appartient
4 aucune
famille; elle est
restée en dehors du mouvement de la civilation euro-
466
Cahier
IV
péenne; elle n’a pas fait ses humanités. Le peuple russe est encore dans la préhistoire... Les Russes sont étrangers
a eux-mémes,
nomades
dans
leurs villes,
passagers dans leurs maisons, inconnus dans leurs familles... Qui peut prévoir les épreuves réservées a la Russie avant qu’elle [ne] remplisse sa destinée pour se retrouver au sein de ’humanité? (Tchedaeff, cité par Serge de Chessin1.) Le méme remarque que toute la littérature russe nest qu’une glorification de laboulique et de l’impuissant. Corpus autem non fornicationi sed D{omi\no ; et Dominus corpori (I Cor., vi, 13).
An nescitis quoniam qui adhaeret meritrici, unum corpus eficitur?Erunt enim (inquit) duo in carne una. Qui autem adhaeret Domino unus spiritus est. Fugite fornicationem.
Omne peccatum quodcumque fecerit homo, extra corpus est: qui autem fornicatur in suum corpus peccat. An nescitis quoniam membra vestra templum sunt Spiritus sandi, q\ui| in vobis est, quem habetis a Deo, et non estis vestri? Empti
enim estis pretio magno. Glorificate les Deum in corpore vestro (ibid. )*. In dans le sens de dans avec mouvement, jusqu’a Vintérieur, jusqu’au plus intime de*. Promenade sur les routes dans le brouillard 4 l’Est de Flensburg. Les alouettes dans le brouillard. Beaucoup de fougéres toutes vertes 4 l’ombre des haies. Trouvé un vieux gant de cuir noir détrempé auquel j’attache une importance superstitieuse’®. [52] S2 quis autem diligit Deum, hic cognitus est ab eo (Corl, -vrimi3)*.
Fratres, nolite pueri effici sensibus, sed malitia parvuli eStote; sensibus autem perfecti eftote (ibid., x1v, 20)’. — Une sensibilité parfaite. 5 février. — Promenade a Sonderborg. Je visite le champ de bataille de Dybbohl. En visitant le fameux
Janvier-Février 1920
467
moulin je suis jeté par terre et presque assommé par une aile de moulin. A Sonderborg les gamins agitant des « dunchogs » envahissent mon auto et nous faisons ensemble une promenade triomphale 4 travers la ville. to février. Plébiscite de la Premiére Zone. 75 000 voix pour le Danemark, 25 ooo pour I|’Allemagne. Majorité de 75 p. 100. — Un individu passant par le toit de la a monte sur celui du Flensburger Hof, s’empare des drapeaux frangais et anglais et les remplace par les pavillons de l’Allemagne et du SlesvigHolstein. 11 février. Arrivée de ma femme.
17 février. Promenade en auto avec Verrier? dans la seconde zone du Plébiciste. Valsb6ll, Skov lund, Leeck.
La triste lande slesvigoise. Le Marais a peine émergé ou se déversent toutes les eaux de ce morceau de péninsule. Grosses fermes frisonnes au toit moussu avec le petit pignon étroit en ogive au milieu de la facade. Déjeuné chez le Comte Schaek. Curieux plafond de stuc avec ces figures des quatre parties du monde presque détachées et pointant des armes vers le lancher. La cour d’honneur plantée d’arbres énormes. Dake la bibliothéque 17¢ édition de Spinosa [sic]. Hojer’. Panne. Retour la nuit en auto découverte. Continuation des inspections en auto. Le champ de bataille de Sangelmarkt* entre un grand lac et une etite butte stérile. Le centre du Slesvig, landes désertes 4 l’infini sur lequel se couche un soleil plein d’appels. — Les dieux de ancien monde scandinave. Imaginations assez récentes en grande partie littéraires. Odin, dieu du vent, de la guerre, des morts et de la
poésie (du radical germanique wehm, souffle, wath. Cf. en gtec Ode). Substitué a l’antique Tsiu, Zeus, adoré par les Souabes. Les Sagas, rédigées par des prétres catholiques, fils et successeurs des anciens guertiers et Skaldes.
468
Cahier
IV
Les critiques n’aiment pas a parler de moi parce que c’est trop compliqué et qu’ils risquent de dire des bétises. Ce n’est pas toujours le méme trait du corps qui indique telle faculté : par exemple ce n’est pas toujours le nez ou le menton qui indique [52 v] l’énergie, mais ce peut étre la carrure des épaules et la forme de la tétel. Dimanche 23 [février], excursion dans la région frisonne avec Verrier]. Déjeuné avec Cornelius Petersen, un Frison a énorme téte rousse, matrchand de chevaux,
trés intelligent. I] m’explique le régime du marais avec son émissaire débouchant 4a Hojer?. Départ en auto. Chaussée de briques serpentant a travers le marais d’ou émergent sur des iles les villages et les fermes avec leurs énormes toits de chaume. Dagbdll. Vue de Fohr dans le lointain®. La ferme frisonne avec des quantités d’assiettes et de vases de porcelaine hollandaise. Autrefois il y avait un grand port sur la cdte Gansbdll qui faisait beaucoup de commerce avec la Hollande et la Norvége. En 1780 ce port fut détruit et tout sili emporté par une grande tempéte. Les enfants découvrent encore des débris de porcelaine dans les sables. M. Jensen en a fait 2 colonnes en mosaiques agglomérées pour ses vases. Retour par Nibbdll et Leeck. Un mot de Cfornelius ]P[etersen]: « Pour les Allemands le sentiment national est une véritable religion. — Qu’entendez-vous par 14? — J’entends qu'il n’a aucune importance dans la vie pratique. »
25 [février]. Voyage de Flensburg 4 Copenhague en auto par un brouillard épais. Les iles Danoises parmi le paturage de la mer comme d’énormes bouses rondes. La-bas est-ce une vache dans le brouillard? Non,
c’est le cri de M. Kloppenborg-Skrumsager qui appelle sa famille!
Février-Mars 1920
469
1 mars. Retour a Flensburg en auto avec Reine. Nombreuses pannes. 5-7 mars. Voyage a Sylt, Westerland. Une longue
ile sablonneuse. Paysage comme celui d’Agar et dIsmaél sous un ciel du nord. Montagnes de sable blanc. Rude bourre noire rousse des bruyéres. Comm[andant] du Bouché, de S[...], T[...]!, ma femme, le - professeur Verrier. L’économie est le sens et le besoin du juste.
[53] Grimaces d’un homme qui est borgne de l’ceil droit et sourd de loreille gauche. Le chateau des Schack?. Le pélican onocrotale.
A droite, 4 gauche sur cette immense et triste plaine les clochers protestants comme le mensonge de toutes parts qui monte la garde. 14 mars. Plébiscite de la deuxiéme zone. 51 000 voix allemandes contre 13 ooo danoises. Dans la grande Rue la foule compaéte et disciplinée des manifestants, avec des chants qui s’éloignent et d’autres qui arrivent, nous rappelant dans la nuit ces masses qui montaient vers Verdun, il ya 4 ans! Le coup d’Etat militaire de Kapp’.
La route de |’Allemagne étant barrée, ma femme revient 4 Copenhague pour essayer de prendre /’ Ancre. Je Paccompagne (17 mars). Arrivée a 8 h. Les deux corbeaux d’Odin, Hugin et Munin. Les Esquimaux blonds du Nord du Canada, descendants d’Erik le Rouge. Ma femme part pour France [sic] par /’Ancre samedi zo 4 3 h. du soir. Je rentre le lendemain
470
Cahier
IV
dimanche 4 Flensburg par auto aprés m’étre c[on]f[essé]. Arrivée mardi 4 Cherbourg a 8 h. m[atin].
Sous un ciel d’orages, a la lueur d’un couchant plein de menaces qui projette sur les champs nus l’ombre de cing peupliers, ce mouton unique prés d’un patre chargé d’années. 22 [mars]. Promenade 42 Logum Kloster, ancien monastére cistercien au milieu de la triste lande Slesvigoise. Statues de bois peint des 12 apdétres. Crucifix remarquable polychromé. Montée au clocheton. Tristesse de cette église abandonnée au milieu d’un pays hérétique. L’immense effort religieux du Moyen Age dont n[ous] vivons encore. Une fois au moins l’énorme poids de la matiére avait été soulevé'.
Je te connais assez pour que... si je... 24 [mars]. Cérémonie en ’honneur des prisonniers francais morts 4 Flensburg. Messe le matin. Ereétion dune croix au cimetiére en présence des troupes. Je prononce un discours.
On ne s’unit que par les parties les plus hautes. A quoi cela sert-il si je ne réussis 4 lui donner mon Ame? De méme [53 v] que deux couleurs composées en se réunissant, par ex[emple] orange et le violet, produisent le rouge pur et simple’. The mellow ouzel fluting in the elm (Tennyson)s. Barbarorum agris quasi attexta ora Graeciae (Cicéron sur l’Asie Mineure)‘.
Le dents
gros rite rustique du mais (ses grains comme des blanches).
Rimbaud est le premier qui ait employé le langage et la poésie, non plus seulement 4 l’expression des
choses connues mais a une tache de découverte.
Mars-Abril 1920
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Essaye pour voir...?.
Dimanche 28 [mars]. — Excursion 4 Ribe par Middelby et les Chlund. La cathédrale en pierres roses et grises apportées d’Andernach prés de Cologne. Tympan, sculptures gothiques d’ailleurs assez mauvaises, Dieu le Pére et Dieu le Fils assis cOte 4 cdte Pun de face, autre de profil, chacun ayant un homme entre les genoux. L’un d’eux tourne le dos au Fils et tient la main du Pére dans la sienne. En rentrant, chez les Schack 4 Mogel Tonder?. L’église. Grand retable du xv siécle. Peintures contenant toutes les histoires de la Bible, commengant par une affreuse Eve 4 croupe rebondie. Charmantes petites figures en culs-de-lampe au-dessous
de la tribune du Comte, représentant les
'Vertus assises. Au milieu la Justice et la Paix, conformément au Psaume, la joue contre la joue. Excursions pour la régularisation de la frontiére : Krusa, Shilbock, Ladelund, Sdder Logum, Kalun, Brarup. Le Roi renvoie le ministére Zahl (29 mars)*.
[54] 2 avril. — Vendredi-Saint. Evangile de S. Jean. A la demande* deux fois répétée du Christ : Qui cherchez-vous? Et la réponse : Jésus de Nazareth (car c’est bien lui qu’ils cherchent) les « poursuiveurs » ou « persécuteuts » tombent confusément 4 la renverse avec désordre et indécence. Spectacle qui n[ous] est offert encore aujourd’hui. — Dialogue tragique entre les Juifs et Pilate, représentant les Gentils. Aprés la « trahison» de Judas, c’est la « tradition» presque juridique entre les mains de la Gentilité. « Tu es Rex Judaeorum ? Gens tua et pontifices tradiderunt te mihi.» Ni les Juifs ni les Gentils ne veulent l’accepter. Ils se le renvoient les uns aux autres comme dans un assaut de politesse. « Tuez-le. — Mais non, je vous en prie,
tuez-le vous-mémes! » « Ecce Rex Vester» — « Tolle ! Tolle! Crucifige eum» — « Vultis ergo dimittam vobis Regem Judacorum? — Non hunc, sed Barabbam. Erat autem Barabbas latro®’.» C’est donc un larron que les Juifs veulent désormais pour roi. Quant aux gentils et
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Cahier
IV
aux paiens, ils ne l’accepteront qu’aprés l’avoir tourmenté de toutes maniéres. Comme aujourd’hui encore les savants du siécle passé ont « tourmenté » les Ecritures, tourmenté le Verbe (Torturer un texte!). — Les vétements divisés en IV parties et tirés au sort par les soldats. IV indique toujours les parties du monde (les IV fleuves). Est-ce un symbole? Ce qui sert 4 manifester, 4 amplifier le Christ, mais qui sert aussi a le
cachet? Une espéce de répartition des vertus et des hérésies ? — Dans les priéres pour les Juifs : Aufer velamen a corde eorum’. Le voile d’Aaron et du Pontife quand il éntrait dans le Lieu Saint. En
Allemagne
les médiocrités
s’additionnent,
en
France les supériorités se neutralisent. Chemin de croix — 17 St[ation]. Jésus perdu dans la cohue, poussé, bousculé, maltraité, ainsi qu’il lest
au milieu de nos instinéts brutaux, pervers et aveugles. — 5€ St[ation]. Jésus relevé par Simon le Cyrénéen, presque défaillant, presque abandonné, les yeux a demi fermés, la téte roulant sur les épaules. — 7° St[ation]. Jésus au passage retire une de ses mains de la Croix pour la poser sur la téte de cette femme q[ui] pleure entourée de ses petits enfants. M. de la Martine a fait sans doute de beaux vers;
mais il veut toujours paraitre avoir révé sur une autre [54 v] planéte que la nétre. Pourquoi s’attacher 4 ne rien dire comme tout le monde, faire des idées les plus
communes des énigmes inintelligibles, les envelopper pour déguiser leur nullité de nuages métaphysiques, de vapeurs mystiques et de brouillards mélancoliques, qui ne laissent plus voir que le vide de la pensée, quand un rayon de bon sens les dissipe? le néologisme romantique n’est pas de la poésie... (Dupaty sur Lamartine, précisément dans /a Minerve littéraire (!) 1821). Ne dirait-on pas un article de Pierre Lasserre sur moi précisément dans /a Minerve francaise. Le nom méme n’a pas changé. — L’école de I’Intelligence?!
Abril 1920
473
Il y a des moments ot a la moindre provocation on se met a penser tout haut : il ne faut pas prendre cela pour des confidences. La journée entiére pour une personne ordinaire ne donne Voccasion que d’exercer les plus mauvaises parties de notre nature. Vanité, frivolité, bavardage, gourmandise, lubricité, égoisme, malveillance, etc. La
»— messe matinale nous donne l’occasion d’exercer un peu |
les bonnes, au moins de les empécher de mourir : foi, espérance, amour, souvenir du prochain, repentir, bonnes résolutions, examen de conscience.
Siger de Brabant, hérétique notoire et condamné par ’Eelise, adversaire de S. Thomas d’Aquin, Averroiste, ‘négateur de l’immortalité de ame, placé par Dante au Paradis présenté par S. Th[omas] lui-méme?!
L’art imite la nature non pas dans ses effets tels quels, mais dans ses causes, dans sa « maniére», dans ses procédés, « qui ne sont qu’une participation et une dérivation dans les choses de l’Art divin lui-méme ».
Ars imitatur naturam in sua operatione?.
Voltaire parle du « galimatias du bon Platon »*. La honte n’est pas de la fumée : elle ne fait pas mal aux yeux (Prov[erbe] russe).
[55] Une lettre de M. Philippe Berthelot. M. Léon Bourgeois, président de la Cour de Justice, a recu de M. Philippe Berthelot la lettre que voici : « Londres, 27 mars « Monsieur le Président,
« Les journaux m’ont apporté l’écho d’une déposition qui me met en cause, dans des termes qui appellent une rectification, en raison du caraétére tendancieux
des affirmations produites en mon absence. « J’ai rencontré 4 deux ou trois reprises M. Paix-
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Cahier
IV
Séailles et n’ai jamais eu avec lui de conversation politique; je ne connaissais son nom qu’a l’occasion dun journal qu’il dirigeait, et dont la subvention avait été supprimée par le cabinet du ministre, en raison des tendances qui s’y manifestaient. M. Paix-Séailles avait déclaré fort honnétement qu'il préférait renoncer a la subvention plutét qu’a son indépendance. « Je me souviens d’avoir rencontré M. Paix-Séailles par hasard, dans un déjeuner chez mon ami Pierre Mille; je suppose que ce sont des paroles prononcées dans la confiance de l’intimité qu’il aura mal comprises,
travesties et dramatisées; intentions
sont
je suis persuadé que ses
excellentes,
mais
que
sa
passion
pacifiste déforme et systématise ses souvenirs, et se nourrit de lillusion de jouer un role, qui est 4 Porigine de tant de défaillances. « Cest un travers dans lequel il ne m’est pas, quant a moi, permis de tomber, car en 1911 et 1912, j’étais sous-directeur d’ Asie. Je n’ai été mélé en quoi que ce soit au débat d’Agadir, qui ne concernait que le directeur politique M. Bapst, le sous-directeur d’Europe, M. Conty, et le chef du cabinet du ministre, M. Her-
bette. Je n’étais 4 aucun degré consulté dans ces négociations; j’étais méme absent de Paris pendant Pautomne de 1911, qui se termina par la démission du ministére Caillaux. « Il faut une singuliére méconnaissance des conditions de travail d’un fondtionnaire pour lui attribuer le pouvoir de déchainer une crise et de provoquer une rupture avec |’Allemagne, et beaucoup de puérilité pour lui préter une pareille infatuation. La conception de l’entité “le Quai d’Orsay” et la formule “le Quai d’Orsay voulait la guerre”, qui sont en réalité vides de tout contenu réel, préteraient 4 sourire, si elles navaient si souvent servi 4 inquiéter et 4 tromper Popinion des gens les plus honorables. « En ce qui me concerne, j’ai connu dire€tement des difficultés entre la France et lAllemagne en 1905, lorsque j’étais chef adjoint du cabinet de M. Rouvier. Ce que j’ai vu a cette Epoque et ce que je n’ai cessé de vérifier depuis, m’a convaincu que |’Allemagne voulait
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475
la guerre et s’y préparait méthodiquement, se réservant de la provoquer 4 son heure, quand elle se sentirait assez forte pour écraser ’’armée francaise, dont l’existence la séparait encore de la domination du monde. Nulle concession de notre part ne pouvait modifier les plans des pangermanistes, maitres du pouvoir. Dans les deux années qui ont précédé la guerre, le prétexte _méme en avait été trouvé, et ne cessait d’étre mis en avant : c’était la légion étrangére; une campagne systématique, alimentée par la Wilhemstrasse, maintenait cette question a l’ordre du jour. Si, au dernier moment, le meurtre de larchiduc Frangois-Ferdinand a été choisi, c’est que ce prétexte a paru préférable, comme de nature 4 écarter tout risque d’intervention anglaise. « Pas un Frangais aimant son pays, avec le profond amour que j’ai toujours porté a la France, et qui est ma seule religion, ne pouvait souhaiter l’épouvantable aléa d’une guerre avec |’Allemagne, et encore moins agir pour hater ’heure fatale de la catastrophe. Mais pas un esprit clair ne pouvait se faire illusion sur lavenir, ni
commettre ce crime d’endormir la vigilance frangaise. « Je n’ai jamais caché mon sentiment a cet égard, et je reconnais que les germanophiles m’honoraient d’une hostilité spéciale, sachant que j’ai toujours regardé un rapprochement avec l’Allemagne comme une duperie, de nature 4 nous exposer aux pires dangers. Je n’ai sans doute pas dissimulé a M. Paix-Séailles que j’avais un autre sentiment que lui des intéréts supérieurs et de la dignité de la France. « J’ai la conscience d’avoir servi mon pays, beaucoup moins que je ne l’aurais voulu, mais cependant de toutes mes forces, depuis que je suis entré au ministére des affaires étrangéres. On dit qu’il y a dans la vie ceux qui commandent et ceux qui servent; j’ai
choisi de servir.
« Je me suis toujours préoccupé exclusivement de mon service et de la défense des intéréts extérieurs de la France, en restant totalement a l’écart des questions de politique intérieure et des querelles de partis ou de personnes. « Ceux qui me connaissent savent que je n’ai jamais
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Cahier
IV
fui aucune responsabilité, méme celles qui ne m’incombaient pas dire&tement. Mais je ne puis accepter que l’on travestisse mes paroles et ma pensée. « Veuillez agréer, etc... « Philippe Berthelot?. »
Qui veut se faire entendre, plutdét que de faire du bruit, il vaut mieux faire du silence. — II fait trop de
bruit pour qu’on l’entende.
Le 16 avril, la Commission établit ses propositions pour la nouvelle frontiére entre le Danemark et PAllfemagne]. Heftye, le délégué Norvégien, et moi, proposons une ligne passant plus au sud. 20 [avril]. Départ p[our] Copenhague en auto. J’envoie mon autre auto a Paris avec Héry et Bertrand. Tulipes rouges.
« Est-ce que tu crois donc que c’était possible sans souftrance? ? » Un gros moulin 4 vent qui tourne mollement dans le brouillard’.
Sous la forét une profusion prodigieuse d’anémones blanches, premier lait de la terre, jeunes dents de veau.
Quasi modo geniti pueri'.
Ne fais pas attention. — Fais-toi une place de force. Une alliance solennelle et muette.
[55 v] Un gros homme de 55 ans, maigre barbe noire, chauve, le visage entouré d’une margoulette, il
pédale entassé sur sa bicyclette. _
Jaime mieux ton malheur par moi qu’un bonheur dont je serais absent. Moi seul, je t’ai trouvée.
Le coeur qui d’abord résiste — comme un vase qu’on enfonce dans |’eau et qui se remplit tout 4 coup.
Abril-Mai 1920
477
Au lieu @une Allemagne intellectuelle on vit une association
de profiteurs,
brutale,
stupide,
avide
de
pouvoir, se faire passer pour |’A[llemagne] dont elle était le contraire (? — bien mal écrit). N’ayant a se réclamer ni d’une réalisation ni d’une idée, ne connais-
sant que rancune, pathos et servilité, c’est de cela q[ue] sous le nom de Kw/tur elle prétendait faire le bonheur de la terre (Rathenau, Die neue Gesellschaft). Nationalisme détestables.
et démocratie,
jumeaux
également
Devant l’auto le premier pli de la terre qui monte et le second par derriére qui descend.
Ex his enim sunt qui penetrant domos, et captivas ducunt mulierculas oneratas peccatis, quae ducuntur varits desideriis, semper discentes, et nunquam ad scientiam veritatis pervenientes (II Tim., 111, 6-7)?
Vendredi 7 mai. Départ pour France, via Hambourg. Bruxelles. Arrivé a Paris dimanche a 4 h. par Hambourg®. Erit enim tempus cum sanam dottrinam non sustinebunt; sed ad sua desideria coacervabunt sibi magistros, pruriente auribus (tbid., 1v)*. La fameuse hypothése du hasard d’aprés laquelle, avec
l’éternité
pour
tirer
les mots
au
sort, /’I/ade
finirait par sortir du sac. Mais ce n’est pas les mots qui existent d’abord, c’est /’I/ade. Et si par hasard les mots sortaient dans l’ordre voulu, ce ne serait pas l’Iliade, mais
une
ressemblance
morte,
comme
une
figure de cire ressemble 4 un étre vivant’. Revu Hambourg, repromené dans mes souvenirs. Les Allemands autrefois si bruyants et volumineux, maintenant diminués, silencieux, ahuris, aplatis. ; Eros maladroit q qui manque le cceur et n’atteint Pestomac.
que
478
Cahier
IV
[56] Les gens généreux sont rarement délicats.
Le Mal, selon la métaphysique allemande, non seulement est éternel et efficace, mais est proprement le générateur et le seul générateur du Bien. C’est par lui seul que Dieu peut faire le Bien. Que dis-je? Au fond, selon Hegel, c’est le diable qui crée Dieu. Dieu ne saurait se réaliser si le diable ne déployait en pleine liberté toutes ses puissances de négation, d’antagonisme, de destruction. Qui veut fonder doit renverser. De la mort seule peut jaillir la vie. Qu’est-ce que la paix sinon une fatigue momentanée des lutteurs? Qu’est-ce que le droit sinon la constatation d’un équilibre temporaire entre des forces antagonistes ?Qu’estce que le bien, sinon la forme d’existence qui, a travers le conflit des appétits et des passions, a provisoirement triomphé? (article de Boutroux, Figaro, 16 mai 1920). Tout a fait ce que j’ai dit dans mon Saint Martin’.
Slesvig. — Conférence des Ambassadeurs. V[ieux]-C[olombier]?.
—
Le
Jolies citations de Geethe (Fauft) :
Uns ist ganz kannibalisch wohl, Als wie ftinfhundert S auen. Man hat Gewalt, so hat man Recht.
Man fragt ums Was und nicht ums Wie. Krieg, Handel und Piraterie Dreteinig sind sie, nicht xu trennen®,
La question du Slesvig est réglée contre moi suivant les vues anglaises. L’auto. Lady F[ellowes], Margotine, Ballets russes. Promenade avec les enfants a Versailles et 4 Fontainebleau pendant les fétes de la Pentecéte.
Madame Segalen. L[ouis] M[assignon]. L’humilité est une source non seulement de vertu, mais de bonne humeur. Dans les tunnels du Métro, c’est comme passait le cerveau a la meule.
si on se
Mai- Juin 1920
479
Cromedeyre le Vieil, Astuce féminine. Je donne mes 3 piéces au V[ieux]-C[olombier]'.
|
« Celui qui m’aime, qu'il prenne sa croix et me suive. » Qwil prenne sa croix et non pas qu’il la jette par terre, afin de se trouver plus dégagé, méme s'il s’agit de suivre le X[rist]. S@ croix particuliére, et non pas celle d’un autre, l’instrument spécialement fabriqué en vue de son propre salut. Le jeune cheval noir q[ui] ne porte encore qu’un diadéme doré sur le front. A cette heure ov la nuit se résout en une seule étoile accumulée...
Quand toutes les étoiles une par une ont testé en faveur de cette unique survivante... [56 v] Jeudi 3 juin. — Voyage en auto a Villeneuve avec Jacques, Chouchette et Gigette. Splendeur de la terre couverte de moissons surabondantes, inondée de
larges taches jaunes. La vallée de la Marne, rainure profonde ot l’invasion est venue s’arréter. Villeneuve réparé. Seule notre maison reste en ruines. Profonde carriére de platre. Les animaux revenus. Fére, Parisot. Retour par La Ferté-Milon. Le soir pique-nique chez Alix?. La superbe cathédrale de Meaux élégante et lumineuse. Le singe dans la nervure des piliers. |
Petite bouche aux lévres minces qui n’exprime rien aussi facilement que le mépris (faire la petite bouche). Histoire racontée par Braunerova®. Un poéte tchéque écrit une tragédie appelée Phaéton qui obtient un grand succés. Ses amis lui offrent une couronne de lauriers. Plein de joie il se met en mesure de la suspendre audessus de la porte de sa chambre. L’échelle glisse, il tombe et se tue.
480
Cahier
IV
Danseuse espagnole chez la duchesse de ClermontTonnerre, rue Raynouard. Le corps portant a faux sur le vide et ne reposant plus sur les et Comme dans toutes les danses de |’Asie, les pieds ne quittent pas la terre, c’est le corps qui danse, spécialement le centre musculaite ou croupe. Les bras dans leur dessin de cercle ou de spirale sont un commentaire perpétuel de sa révolution!. A leur extrémité ces doigts fins et comme pétillants. La se trouvait Abbé Altermann, alors laic?. Départ.de Paris en auto avec Douence?® le 17 [juin] au
matin
: Milhaud,
Mlle
Copeau‘.
Soissons,
le
Chemin des Dames, Laon, vu le Préfet, M. Saint, q[ui] me promet de faire tout le possible pour Villeneuve. Maubeuge, Bruxelles, la Place Royale toute dorée a la
tombée du jour. Brouhaha musical des estaminets, Porgue mécanique, cette voix suraigiie et presque délirante. Le lendemain Anvers, Breda, Dordrecht, la
digue de la Meuse, Amerongen, ce tunnel de verdure d’Arnhein a la frontiére, ces masses de feuillages, ces
petites maisons
a vérandahs
avec
de [lents] Euro-
péens, rappelant l’Equateur, Oldenzaal. 19 [juin]. La [57] Westphalie, paysage, cirque de sable et de foréts entourant Hambourg. La nuit en auto jusqu’a Flensburg. Perdus dans les foréts du Holstein, les lapins bondissant de toutes parts devant les phares de notre auto.
Arrivée a 2 h. du matin. Le lendemain Kollund. A travers le Danemark 4 toute vitesse, 100 k. 4 l’hfeure]. Arrivé a C[openhague] a 7 h. Le lendemain grand cordon du Danebrog, diné en gala chez le Roi, on ne peut plus aimable. Visite a l’énorme cuirassé Hood. Le lendemain Scavenius. Diné en cérémonie a la Légation d’ Angleterre. Départ de Milhaud, 26 [juin]. Il va monter /e Bexf sur le toit & Londres’. Un de mes derniers jours 4 Paris rencontre d’Henry V., qui revient de Pologne et qui demain termine son service dans l’artillerie. Il renonce 4 continuer ses
Juin- Juillet 1920
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études afin de gagner de l’argent le plus t6t possible et ainsi de fournir 4 sa mére le moyen de quitter L. II hésite a aller dans les Seychelles ou en Chine avec son pére. Gaston malade s’occupe d’une ferme de volailles. 3° acte. Java. Il y est allé?. Regu 36 000 couronnes pour mon traitement de Commissaire pendant 10 mois. C[ommuni]é le 27 [juin].
I] blouse — intr[ansitif] — dix jeunes filles dans le soleil d’été. Les yeux a la fenétre de l’express 4 toute vitesse dans la nuit, c’est bien cela que j’attendais, cette irruption de cinquante arbres frénétiques 4 la file, puis rien, ou seulement cette faible étoile dans la nuit de la terre,
maison basse, barge qui attend l’écluse. Singuliére coupe de l’Hymne des SS. Pierre et Paul, vers de 12 pieds avec la césure sur le 5°.
Heureuse cité / qui as mérité de Dieu’.
L’Equateur et l’Equinoxe. Nee jam amphus ullae — Apparent terrae, Maria undique et undique coelum. — Un des Sortes Virgilianae cité par R. A. Knox, A spiritual aeneid’.
These men are like immense things written all legible, the handwriting being clear, but the significance immeasurable. (Alice Meynell, parlant des personnages de /’Otage dans un article du Dublin Review, sept. 1918'.) 12 juillet. Promenade en auto au N[ord] de Sjaelland sur les bords du Cattegat®. Sable blanc, herbes décolorées. Nous péchons des perches dans un étang. Poisson épineux avec 2 nageoires oranges sous le ventre. [57 v] Claude Bernard disant q[ue] toute découverte
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Cahier
IV
était inspirée et guidée par un sentiment, une appréciation? instinétive du probable.
9 juillet. — Fétes du « Genforening », réunion du Slesvig au Danemark. Un Chemin de Croix owt les bourreaux et satellites seraient comme dans les danses macabres des espéces de cadavres décharnés et tout nus, toutes les variétés
du vice représentées par les déformations et maladies symboliques correspondantes.
N[ous] connaissons la vérité non seulement par la raison, mais encore par le cceur : c’est de cette derniére sorte q[ue] n[ous] connaissons les premiers principes
et C’est en vain que le raisonnement, q[ui] n’y a point de part, essaye de les combattre. — C’est sur ces connaissances du cceur et de linstiné qu’il faut q[ue] la raison s’appuie... Le cceur sent qu’il y a 3 dimensions dans l’espace. Les principes se sentent, les propositions se concluent. — Plat 4 Dieu q[ue] n[ous] connussions toute chose par instinét et par sentiment! Mais la nature n[ous] a refusé ce bien (Pascal)?. Il y a deux espéces de poésies : la poésie ouverte et purement expressive, suite de sentiments, de notions
et d’interjections, et la poésie fermée : ou composée, a Pintérieur de laquelle on peut vivre, constituant un milieu propre?. Nous savons peut-étre plus de choses sur un astre que n’en sauraient ses habitants. Il y a peut-étre cettaines ch[oses] qu’on ne peut savoir qu’a une distance équivalente 4 Vinfini.
18 juillet. Promenade a Drager, plage suburbaine, dénuée de tout intérét?. Une mer bordée de choux.
L’esprit poétique, — cette faculté la plus sublime de toutes, nous savons cela maintenant,
—
puisque des
vérités de la plus haute importance ne pouvaient n[ous]
Juillet 1920
483
étre révélées que par cette analogie dont |’éloquence, irrécusable pour limagination, ne dit rien a la raison infirme et solitaire (Edgar Poe, Co/loque entre Monos et Una)}. Mardi 20 au soir, arrivée de Reine et de mes enfants.
Osculum non dedisti mihi (Ev[angile] de Ste Madeleine)?. [58 v] Le moyen pour obtenir la charité est de la faire Us., chap. Lv1ir). — Tune erumpet quasi mane lumen tuum ; et sanitas tua citius orietur, et anteibit faciem tuam juStitia tua, et gloria Domini colliget te. Tunc invocabis, et Dominus exandiet ; clamabis, et dicet: Ecce adsum. Si abSstuleris de medio tui catenam, ef desieris extendere digitum, et loqui
quod non prodest: cum effuderis esurienti animam tuam, et animam afflittam repleveris, orietur in tenebris lux tua, et tenebrae tuae erunt sicut meridies. Et requiem tibi dabit Dominus semper, et implebit splendoribus animam tuam, et ossa tua liberabit; e¢ eris quasi hortus irriguus et sicut fons aquarum cujus non deficient aquae*. Tous les moyens pour obtenir la grace, et d’abord nous débarrasser de cette chaine secréte qui nous garrotte et nous opprime par le milieu de l’4me et du corps, la chaine du moi, de l’égoisme. II libérera tes os
du péché originel, les os, ce qui représente la fondation héréditaire. On reconstruit n[otre] maison de Villeneuve. Maman et Louise y passent le mois de septembre‘.
30 juillet. Installation a Hotel de Marienlust prés d’Elseneur avec toute ma famille®. Bains, bicyclette. En wagon cet homme 4 figure basanée presque chinoise 4 lunettes de fer roulant avec férocité un bout de cigare entre des lévres épaisses. I] commence 4 lire son journal par la derniére page qu’il étudie avec minutie. -— Défaites polonaises*. La C[omt]esse Dzfieduszicka].
484
Cahier
IV.
Mes cing enfants couchés ou accroupis sur le lit autour de ma femme. J.-B. L’Assomption. — N[ous] rentrons a Copenhague le 17, Pierre et Ch[ouchette] a bicyclette depuis Elseneur. Virga tua et baculus tuus ipsa me consolata sunt...
Priéres de toute la chrétienté pour la Pologne dont la situation s’améliore. Non il.ne faut plus que je vous quitte?. Ruysbroeck. — L’Alpha béant a sa base et q[ui] aspire 4 son sommet l’immensité des étres jaillis de son sein prés de ce point éternel ot toutes nos lignes commencent et viennent aboutir, ce point ot elles perdent leur nom et toute distin@tion, devenant un avec le point lui-méme et cet un méme qu’est le point, mais demeurant toujours en elles-mémes des lignes q[ui] aboutissent. Hérésie analogue au bouddhisme et au hegelianisme [59] du temps de R[uysbroeck] d’aprés laquelle toutes créatures raisonnables, bonnes ou mauvaises, anges ou démons, deviendront au dernier jour une seule essence
sans modes; et que cette essence sera Dieu, de nature bienheureuse, sans connaissance ni volonté’. Dévorer et étre dévorés, c’est en Dieu notre vie a
jamais‘. V[ous] m’avez promis, Seigneur, que nous mangerions ensemble. Depuis ce jour, ma bouche est béante et ma faim me bridle, car je ne peux pas vous épuiser. L’existence essentielle de esprit est si noble que les damnés ne peuvent pas vouloir étre anéantis. Mais le péché forme un intermédiaire et des ténébres et une dissemblance si grande entre la force et essence ot Dieu vit, que Vesprit ne peut s’unir a sa propre essence. Qui connait la douceur de son baiser? Celle-la qui
le regoit. L’olivier du déluge et celui du jardin de Gethsémani. (Art[icle] d’Emile Baumann dans la R[evue] des Jeunes, 10 aout 1920.)
Aout
1920
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Vidtoires polonaises. C[ommuni]é 3 enfants}.
le 22 [aodt] avec
ma femme
et mes
Le Juif toujours pressé. Dans les priéres pascales « Vite, vite, tout de suite, aujourd’hui méme » (tiré de
la Tribune juive). Ed essi (les yeux) qui nei et quindi aven parete di non caler (Purg., XXXII, 2). Pour ceux qui me reprochent mon obscurité?. Congédier le poids?. Si vous ne voulez pas que je vous dise, ... je ne sais... L’envie. In/videre — voir dans — voir contre.
Les simoniaques littéraires. Ceux qui exploitent la Grace, donnée gratis, le génie, le talent, pour en tirer un profit personnel. L’argent, l’Académie. De 1a le mépris féroce et juste de la jeunesse pour les Académiciens‘. Comme
ils s’entendent 4 étre sourds®!
Mes 2 filles vont au couvent de l’Assomption Ordrup.
a
Le poil de horrible ver q[ui] perce le monde. — Al pel del vermo reo che’l mondo fora (Dante, Enfer, XXXIV, 36)°. Une église ot lon descende au lieu de monter. Se laisser aller avec la complicité de son poids a l’appel profond. Les porches qu’elle vous tend pour vous abriter déja avant de vous engloutir. Une seule petite flamme dans la nuit intérieure, un reflet d’or’.
Les 2 fléches du Tyn a Prague. Pourquoi ai-je été ainsi porté d’un lieu a lautre®?
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Cahier
IV
[59 v] Pourquoi me résister quand tu sais bien que tu finiras toujours par obéir?P
Ces masses de feuillage en qui déja un feu intérieur précéde l’automne. La Sagesse. Vas spirituale. Vapor virtutis Dei et emanatio quaedam claritatis omnipotentis Dei sincera (Sap., chap. vit)}.
L’angelica farfalla. — Parlar visibile (D[ante], Purg.)?. Videte fumum superbiae similem, ascendentem, tumescentem, vanescentem (S. Aug.)*. R.P. Surin, Lettres spirituelles. Ap[ud] Bremond. Je n’eusse jamais pensé, écrivait-il en 1634, c’est-adire au lendemain de son initiation, en quelle nudité Dieu veut nous réduire, en quel désert il nous veut mener, pour nous faire arriver a la pureté de sa grace. En un mot, il faut que l’4me ne sente rien des choses de cette vie, ni de ses propres opérations, et qu’elle ne se sente pas elle-méme. II faut qu’elle vive dans une obéissance qui lui renverse tous les mouvements, bons, indifférents et mauvais; dans une pauvreté qui ne lui laisse pas méme l’usage de ses facultés libres; dans une pureté qui ne lui permette pas de prendre plaisir en aucune chose créée; qu’ainsi dénuée de tout et devenue comme sauvage dans ce désert... elle puisse s’apptivoiser 4 Dieu et se rendre familiére avec lui; que, revenue dans la simplicité de cette nouvelle origine, ayant pris une nouvelle naissance, elle soit méconnaissable a elle-méme et aux autres, n’ayant plus de vie ni de mouvement que pour servir un Homme-Dieu. L’oraison. C’est pourquoi ce saint exercice, étant un des points qui sont de nécessité de bienséance... il importe extrémement de se le rendre aisé. Et puisque c’est la nourriture de Ame, il faut que l’usage ne nous en soit pas plus difficile que celui de la nourriture du corps.
Aoit-Septembre
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Dieu, par une sage disposition de sa Providence, a mis de la facilité et du plaisir en tout ce qui est nécessaire 4 l’entretien de la vie et IL N’EST POINT DE LA DOUCEUR DE SA CONDUITE QU’UNE CHOSE DE LAQUELLE ON NE SE PEUT PASSER DEVIENNE LABORIEUSE ET PENIBLE. _
On doit aller 4 Poraison comme 4 un repas. Quel~ ques ames ferventes y vont avec la méme ardeur et le méme plaisir que les mauvaises vont a un festin, ou a un bal : ce qui est une grace fort singuliére. On trouve l’oraison aisée quand on la regarde, non comme... un travail d’esprit, mais plutét comme un divertissement agréable. Pour cela, il faut approcher de Dieu familiérement, et user de la sainte liberté que nous donne la qualité d’enfants de Dieu. II est notre créateur, il est notre pére. Nous pouvons
donc, sans
choquer la bienséance, aller 4 lui avec la méme franchise et la méme simplicité que les enfants vont 4 leur pére et a leur mére... Pourquoi donc nous rendre |’abord et la conversation de Dieu difficile, comme font ceux qui apportent a Poraison tant d’artifice et tant de travail? On s’y géne et on s’y tourmente. On en fait une étude ou du moins une affaire. I] est vrai que les enfants ont quelquefois des affaires a traiter avec leur pére; mais quand ils sont petits et dans la simplicité de leurs premiéres années, leur principale affaire est le plaisir qu’ils prennent a voir leur bon pére, 4 demeurer auprés de leur bonne mére. Cela fait une partie de leur vie et de leur contentement. Nous devrions aller 4 Dieu de la méme fagon, simplement, amoureusement, avec une confiance filiale,
ne troublant point par de fausses idées la paix et la douceur qui se rencontrent. ... [60] D. — Quelle préparation faut-il apporter a L’oraison ? R. — On peut réduire 4 deux... points la préparation éloignée... Le premier est de se garder de s’appliquer fortement 4 quoi que ce soit, mais procéder en toutes ses actions sans presser son intérieur : car telle CLAUDEL
V - 19
19
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Cahier
IV
occupation véhémente met et laisse... une obscurité dans l’Ame, qui émousse la pointe du Saint-Esprit. La seconde est de se garder de multiplicité ou connaissances distinétes et particuliéres des choses, autant qu’il est possible... Par exemple, quand on converse avec des personnes, ne s’arréter qu’aux raisons générales de leur état chrétien... sans considérer leur humeur, |’4ge, le sexe...; porter une pensée élevée... aux objets généraux et universels, ne discernant pas beaucoup les circonstances menues et individuelles des choses... touchant et appréhendant seulement les notions confuses. D’autant que telles distinétes notions charrient force fatras d’images, de fantOmes, et cause un abaissement, lassitude, langueur
et impureté dans esprit, qui préjudicie a la vigueur qui lui est nécessaire, et a la simplicité qu’il doit apporter a la conversation divine. ... Quand lame a été longtemps dans les peines... Dieu la fonde dans la paix... Cette paix vient comme un fleuve dont le cours allait dans un pays, et qui est détourné dans l’autre, comme par la rupture d’une chaussée. Cette paix entrant fait ce qui ne lui est pas propre, c’est-a-dire des impétuosités trés grandes, et il n’appartient qu’a la paix de Dieu de faire cela. C’est elle seule qui peut marcher en cet équipage, comme le bruit de la mer qui vient, non pour ravager la terre,
mais pour remplir espace du lit que Dieu lui a donné. Cette mer vient comme farouche avec rugissement, quoiqu’elle soit tranquille; ’abondance des eaux fait seule ce bruit et non pas leur fureur... La mer en sa plénitude vient visiter la terre et baiser les bords que Dieu lui a donnés pour limite. Cette mer vient en majesté et en magnificence. Ainsi vient la paix dans Pame, quand la grandeur de la paix la vient visiter aprés les souffrances, sans qu'il y ait un seul souffle de vent qui puisse faire sur elle une ride. Cette divine paix qui porte avec soi les biens de Dieu et les richesses de son royaume, a aussi ses avant-coureurs, qui sont
les alcyons et les oiseaux qui marquent sa venue : ce sont les visites des anges qui la précédent. Elle vient
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comme un élément de l’autre vie, avec un son de VPharmonie céleste, et avec une telle raideur que l’ame
méme en est toute renversée, non par aucune opposition 4 son bien, mais par abondance. Cette abondance ne fait aucune violence, sinon contre les obstacles de
son bien, et tous les animaux qui ne sont pas pacifiques fuient les abords de cette paix, et avec elle viennent tous les biens qui sont promis 4 Jérusalem... comme la casse, ’'ambre et d’autres raretés sur son rivage; ainsi cette divine paix vient avec abondance et opulence de biens et de richesses précieuses de la grace?.
On peut mériter aussi l’injustice. Hélas, toutes ces faces sans lumiére. Non aemulari in malis, sed vincere in bono malum?.
Je suis a Vous, je suis en Vous, je suis pour Vous. Adoration de la Cause.
Te souviens-tu de cette sombre aprés-midi d’hiver (Phiver des tropiques), de ce ciel bouleversé, de ce pont de pierre ot le fleuve impétueux s’engouffrait en bouillonnant? Et de notre montée vers Kuchang pendant que nos ames en silence étaient occupées a tisser entre elles un pacte pour l’éternité, guidés par Peau qui courait dans cette rigole de pierre et par la cloche au timbre de bronze et d’or la-haut sous les arbres séculaires, la cloche qui disait Non? T’en souviens-tu, mon
Ame, ou I’as-tu oublié?
+ Epitaphe : Ici reposent les restes et la semence de Paul Claudel!.
22 septembre. — Promenade au vieux chateau de Tordenfeld. Vie plantureuse de ces grands gentilhommes [sic] campagnards, [60 v] les deux colosses fréres au milieu de ces montagnes de gerbes. Le chateau de Dramholm au bord de la mer sur une rive désolée
ot mourut
fou Bothwell,
l’amant
de Marie
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Cahier
IV
Stuart. Dans l’église plus loin sous une lame de verre nous avons vu son corps momifié. Il semble gue la face encore par ses proportions indique l’ancienne beauté. — Pendant ce temps mes enfants en équipage de marins ont fait une expédition en mer.
La derniére minute change tout l’ensemble de l’histoire. Erreur de quelqu’un qui aurait écrit I’Histoire de France en 1811 ou celle d’Allemagne en 1913. 5® Station : Le premier compagnonnage avec le Christ dans un méme travail, la premiére confrérie, la croix qu’on empoigne 4 deux. Vous vous plaignez d’étre de bois, mais la croix était de bois aussi, rien de plus sec et de plus rigide.
Hello d’aprés un art[icle] de la Revwe des jeunes parait avoir été frappé de ces « étonnantes eaux supérieures »?. On n’a aucune preuve que les nébuleuses deviennent des étoiles, tandis qu’on a vu nettement des étoiles (novae) devenir des nébuleuses. Ses rayons q[ui] sont devenus poils. Sa queue. Blafard comme
une vessie. —
des cornes
et des
Audience.
Départ du Commandant du Boucher et de Puech. Arrivée de Lowenbruck. — Départ de ma femme et de Pierre avec Lagrenée* le 2 o@[obre]. A propos des novae, ces flamméches ou bluettes en avance sur incendie cosmique : Montes sicut cera fluxerunt a facie D{lomi\ni (Ps. XCVI). La cire qu’on fait flamber pour faire un sceaut.
Heureux ceux qui partent parce qu’ils ne reviendront pas. Ils n’arriveront pas non plus®.
Septembre-Odtobre 1920
491
Il faut du néant pour expliquer toute séparation entre les étres. Sans le néant il n’y aurait pas de nombre. Entre 1 et 2 il faut que le néant intervienne — une certaine cessation. Différence immense entre la Bible et les livres des
plus grands entre les génies humains. Je n’ouvre jamais la Bible sans une impression de révérence et de terreur. Sentiment de solennité, de majesté, d’immensité comme ~ devant le Ciel étoilé.
S’il y a des limites Lui seul les connait?. [G1] J’ai modifié mon sentiment d’autrefois en ce qui concerne I’Infini. Autrefois cela me paraissait une idée horrible et absurde (surtout a cause de l’affreux spoéme de V[ictor] H[ugo], P/ezn cie/). Maintenant je trouve qu’il n’y aura jamais assez de mondes, assez d’étres, assez de flammes au ciel pour la gloire de Dieu. Encore! I] m’en faut encore et encore et toujours lus! Les 2 idées ne sont peut-étre pas inconciiables?.
Vous croyiez peut-étre que cela était perdu parce que je suis si petit, que je ne vous voyais pas. Je suis petit, mais vous étes grand?. Il ne faut pas beaucoup de temps... Pour la féte du S. Rosaite 30 o[obre] je dis pour la 17€ fois le chapelet avec mes 2 filles. Viens étre rien avec moi!.
ie tempéte d’hiver. Petrae sicut cera liquescent ante faciem tuam (Jud., XVI, 78)% Dante au 34° Chant de l’Exfer prétend que Lucifer est tombé sur la terre par ’hémisphére austral, qui dés lors est demeuré vide et recouvert par les eaux. La
he tl i
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Cahier
IV
terre qui formait le Paradis Terrestre s’est accumulée
en une haute montagne qui forme le Purgatoire.
Jata super Dominum curam tuam, et ipse te enutriet; non dabit in aeternum fluttnationem justo (Ps. LIV)}. Ad nihilum devenient tanquam aqua decurrens ; — Sicut cera q|uae| fiuit auferentur. Supercecidit ignis (Ps. LVII)?.
Une assez bonne description du Danemark au mois de nov[embre] et déc[embre] se trouve au Chant VI del Byer 3 ; ... da piova Eterna, maledetta, fredda e grave Regula e qualita mai non I’e nova. Grandine grossa, e aqua tinta, e neve Per l’aer tenebrosa si riversa: Pute la terra che queSta riceve®.
16 o¢t[obre]. — Passage de 34 Francais de Russie rentrés de Russie, entre autres les Attachés de Chancellerie Rosset et Fort q[ui] reviennent en France. — L’ Aisne‘. 17 o€t{obre].
Question de ront-ils briler corps, réponse a sentir, autre fonctionner.
mes enfants, comment les morts pourdans Venfer, puisqu’ils n’ont plus de : Autre chose sont les sens ou appareils chose la sensibilité qui leur permet de
Les
uns
sont
du
domaine
de leffet,
approprié a une certaine situation physique donnée, Yautre est du domaine de la cause, elle est la possession constante et compléte de ce qui constitue notre domaine, notre intégrité personnelle. Quand leffet approprié 4 une certaine situation aura disparu, la cause subsistera. Le corps disparait, mais ce qui est la cause du corps sera maintenu, ce qui était [61 v] la cause de tel membre, ce qui était la cause de notre sensibilité, la possession de notre identité> substan-
tielle. Or nous sommes ici dans un monde d’images, de dégradations matérielles de certaines réalités supérieures. Images, c’[est]-a-d[ire] réalités et non pas illusions, se distinguant de la supréme existence, simplement
Odfobre 1920
493
en ce qu’elles sont affaiblies, moins pures, moins com-
pléetes. Ainsi ce que nous appelons le feu ici-bas n’est que |’zmage d’un autre feu, ou état intense de la matiére libérée. Quand nous disons que nous brilons, cela veut dire que nous sommes soumis 4 un état extérieur intense auquel notre état intérieur n’est plus accommode. I] n’y a plus équilibre entre notre milieu intérieur et notre milieu extérieur. Le premier est donc soumis a une attaque, a un ébranlement violent qui le secoue jusque dans ses racines. (Toujours lidée de la dette, de la chose 4 rendre dont le daw est une autre
forme.) On congoit donc parfaitement qu’il puisse y avoir un few pour lesprit, comme pour le corps, — une demeure a laquelle il ne peut s’accommoder et qui le torture. Amittus lumine, quel supplice! On voit bien comment un corps contrefait torture l’Ame'. Les
mots
n’ont
pas
seulement
un
timbre,
une
couleur, une odeur, ils ont aussi un certain potentiel,
une tension, une valeur dynamique. C’est méme 1’élément le plus important?.
Au commencement du déluge. — Tous les hommes allaient joyeux se disant les uns aux autres : — Quelle bonne année sera celle-ci? (Chanson espagnole). Le Danemark
pertuis,
est
avec toutes ses files, barbes?, étroits
comme
le cadenas
compliqué
de la
Baltique?. La Tour Ronde jusqu’au sommet'.
ot lon
peut
monter
en
voiture
Départ sur /’ Ancre le 20 [o€tobre] a 7 h. du matin. Magnifique traversée. Le Canal de Kiel comme une immense avenue bordée de 2 lignes de feux. Solennité magnifique de la mer calme et de la nuit. Le pied sur le rivage de la mer des nombres. Je retrouve avec une immense joie la grande constellation d’Orion, le comagnon de tant de mes nuits d’exil*. Arrivé a Dieppe fs22 411 h. du mfatin]. La céte dans la brume et le
494
Cahier
IV
soleil. Le chateau. Arrivé 4 10 h. du soir. Margotine va a Copenhague. [62] Le prétre éclairé par une lanterne et tenant un livre 4 la main, il bénit dans la nuit cette foule
d’hommes armés qui font le signe de la croix. Dimanche 24 o€t[obre]. Musique de Protée aux concerts Pierné, pleine de vie et de rudesse. Une partie du public s’indigne?. Avec M[ilhaud]. A 5 h., Philippe me parle de Varsovie ou de Tokyo. Lundi déjeuner chez Mad[ame] de Jouvenel. Mardi Elisabeth, conversation avec Copeau et Adrienne?. Maman. Camille dans sa maison de fous d’Avignon, maigre, toute grise, sans dents, ne mangeant que la nourriture
qu’elle cuit elle-méme. I] m’est permis de vous rendre graces, mon
Dieu,
parce que je ne laisserai point de ces livres qui exhalent la peste et la mort, comme un sépulcre impossible 4 fermer (Louis Veuillot)®. Orion comme
un immense
sémaphore lumineux‘.
Retour 1-2 nov[embre] par Cologne et Hambourg. Tant de sang que le cceur est venu avec! Cette fraiche haleine, ces souffles purs.
Mon cceur est déchiré de cette joie qu’il faut que je te refuse’. Per l’orazion della Terra devota — Quando fu Giove arcanamente giusto (Purg., XXIX)*. Une barrique de vin dans la mer, ce n’est pas eau qui entre, c’est le vin qui sort’. Le protestantisme dit que le salut est assuré sans les ceuvres et par un don de Dieu purement gratuit.
Oéfobre- Novembre 1920
495
D’ot deux conséquences : 1°/ Les ceuvres étant complétement inutiles au salut, la vie est partagée en deux parts radicalement séparées : d’un cété la vie du sentiment qui s’entretient de la le€ture de la Bible, des prédications, du chant, etc., de l’autre la vie pratique
qui, ne pouvant avoir plus Dieu pour fin, puisqu’elle est complétement inutile au salut, ne peut plus avoir pour but que l’argent, le bien-étre, etc., des fins pure_ment humaines!; 2°/ Réponse a l’objetion, si les ceuvres sont inutiles au salut pourquoi les protestants ne font-ils pas tout ce qui leur plait et sont-ils au contraire si préoccupés de conscience et de moralité? Cest que le protestant sincére vit dans un état constant d’épouvante a l’égard de la damnation. Or les ceuvres mauvaises ne sont pas la cause de la damnation, mais elles en sont le signe. De 1a l’obsession de les éviter ‘et surtout d’en éviter la manifestation 4 soi-méme .
Toi,
Dieu,
léve-toi,
tu as Vhéritage
de
toutes les idoles a recueillir chez toutes les Nations.
Le 1€t déc{embre], inauguration des nouveaux bureaux de l’ambassade et démolition des anciens‘®.
Dimanche
10 [décembre], Takao-San’.
L’eau se compose de frozs parties : deux d’hydrogéne et une d’oxygéne. — Elle forme prés de 90% du corps humain. (V[oir] la tirade de James Joyce sur l’eau dans U/ysses®.) Omnia q\uae| scripta sunt ad noftram dottrinam scripta sunt (S. Paul)’. On décide de représenter /a Femme et son ombre au Théatre Impérial.
[89 v] Révélation de la Transcendance de Dieu".
566
Cahier
IV
Israél. — Aussitdt aprés la Vocation d’Abraham, il est arraché a sa patrie, transplanté en Mizraim out il n’a plus pour patrie que Dieu et sa promesse. C’est la dans les ténébres de la Foi qu’il devient un peuple. —
Ensuite
l’Espérance,
l’épreuve,
dire@ement par Dieu, de manne
le désert, nourri
tombée
du ciel et
deau jaillie de la pierre, la tentation, murmutres, dissension, désespoir, idolatrie, voracité charnelle. La Loi. — Puis la Terre Promise, mais il faut la
disputer 4 un tas de tribus tenaces et pillardes, les exterminer et les réexterminer. Entre la Mer Morte et la Mer Vivante dont il ne parait pas avoir jamais atteint les bords d’une maniére durable. II] se consolide,
s’unifie. Un bref moment il posséde la Terre Promise. David, Salomon (caractéristiques de la Loi: Dieu toujours présent avec son peuple, sacrifice de la Terre, communion dans le Christ futur). Puis il veut en
jouir comme si elle était 4 lui, par un essai de patte et de transaction, soit avec les puissances mauvaises, soit avec les puissances de ce monde. Assyrie, Egypte. La Terre Promise, placée sur le passage forcé et le plus étroit entre les deux grands Empires de meer (Assyrie qui a pour embléme le Chérubin et Egypte le Sphinx sans ailes), Israél sécularisé, infidéle a sa mission de ne vivre qu’en Dieu et par Dieu, est amené en captivité. Il revient, mais ila di abdiquer son indépendance temporelle. Il ne conserve que le droit au culte. Et la intervient la seconde infidélité, d’or-
gueil comme la premiére avait été de prostitution. Comme si Dieu existait pour lui et non pas lui pour Dieu. Orgueil des pharisiens et fourberie d’Hérode.
Un homme beaucoup plus spirituel qu’intelligent et beaucoup plus intelligent qu’artiste, c’est un Francais (Baudelaire)? Magnifice etenim Sapientiam trattabat (Salomon).
—
II Mach., 11, 9°.
A propos de ma conférence sur Ch. L. Philippe, je suis frappé du caractére bourgeois de la littérature
/
Décembre 1922
567
francaise, de sa dureté, de sa sécheresse de cceur, de
sa haine pour le peuple, de son manque de sympathie, de son affectation de dureté et de détachement?.
Platon dit qu’il y a entre le Juste et lInjuste un rapport mathématique déterminé qu’il évalue par le chiffre 720 (Danfiel] Berthelot, Déscours sur les ondes invisibles)?., [90] Le 17 [décembre] arrivée de mon le Comte de Béarn et sa famille.
Conseiller,
Le propre des théories erronées est de ne pouvoir jamais pressentir des faits nouveaux : et toutes les fois qu’un fait de cette nature est découvert, ces ‘théories,
pour
en rendre
compte,
sont
obligées
de
greffer une hypothése nouvelle sur des hypothéses anciennes... Le propre des théories vraies au contraire est d’étre l’expression des faits, d’étre commandées et dominées par eux, de pouvoir prévoir sGrement des faits nouveaux, parce que ceux-ci sont par la nature enchainés aux premiers: en un mot le propre de ces théories est la fécondité. Pasteur. A citer contre PEvolution’.
Quelle est la situation? sérieuse.
—
Désespérée,
mais pas
Le chat bondissant sur ses pattes [beurrées]. Momini
siate e non pecore
matte
—
Si che il giudeo
fra voi di voi non rida (Dante, Par., c. V, v. 80-81).
Le poéme chinois dit T’ichigon Zekku, soit « Quatre lignes avec sept mots dans chacune». La premiére ligne est le commencement du sujet, la seconde ligne « pour recevoir et développer», la troisiéme ligne « pour changer», la quatriéme est la conclusion (Yoni Noguchi, Hiroshige, p. 13). 23 [décembre].
Lettre de L. et de Henrion
q[ui]
568
Cahier IV
m’annonce son intention de se faire ermite en Afrique, H[enrion] me dit dans sa lettre : « L’exil est votre véritable patrie?. »
On appelle images dissymétriques celles qui ne peuvent se superposer. Par ex[emple] une chaise, un escalier droit produisent une image symétrique, superposable. Mais un escalier tournant est dissymétrique. Pasteur voyait dans la dissymétrie explication du monde et de la vie’. 24 [décembre]. Promenade a Atami. 25, Noél. Messe de Minuit. Grand’Messe du Jour a Sekiguchi. Souvenir de toutes les miséricordes de Dieu. Que sont devenus M. Lucien Hot et le vieux monsieur de Conflans-Sainte-Honorine* que je retrouvais a tous les offices de N[otre]-D[ame] pendant les années de ma conversion? Lettre amusante de L. q[ui] va beaucoup mieux.
Le mal n’est pas un enrichissement. Le mal nous prive du bien tandis que le bien ne nfous] prive que du mal. Quand la main de Dieu nous frappe, ne bougeons pas de peur de gater le coup q[ui] nous est destiné®.
Se) [90 v] L’année 1923 est celle du sanglier; était celle du chien'.
rf janvier. — Gr[ave] pensée.
Temps
radieux.
1922
Soleil splendide.
3 janvier. — P. F.S. Un grand front n’exprime pas toujours l’intelligence, il peut signifier le vide, le désert, abandon, la page blanche, le champ ouvert a Pinconnu, le déséquilibre, la mise en page nécessaire pour le reste du visage. Fronts de Baudelaire et d’Edgar Poe. Chez Bfaudelaire] Vintelligence est surtout exprimée par la grande bouche désabusée et savante?. un: doigt page nouvelle pasequ’il a déja ; Le sage, ag & 4 la pag ) détachée pas encore nee du ade livre, , des yeyeux cependant pene n’a pas
quitté ancien texte qu’il explique a son disciple.
Promenade a Narita* par un froid intense et un soleil superbe, en plein pélerinage. Temple juché entre de grandes rocailles garnies de dieux de bronze en haut de deux escaliers roides que monte et descend la foule, donnant cette joyeuse impression de cascade. Panneaux de bois sculpté représentant les 500 rakans*, toutes les occupations d’un concile de moines, priant, lisant, préchant, lavant le linge, nourrissant les ani-
maux, évangélisant les singes et les oiseaux. (Celui qui
570
Cahier
IV
de la main caresse la téte d’un dragon qui sort de l’eau.) Dans un pavillon a cété énorme bibliothéque tournante 48 pans soutenue par huit démons de toutes couleurs (ainsi on est loyalement prévenu q[ue] c’est la bibliothéque du Diable!). Jeux d’enfants Chinois sculptés dans la pierre (charmants). Distractions
des
Sages
Chinois,
échec,
dessin,
[musique],
etc., sur le premier pavillon, donnant une impression de bonhomie et d’hilarité. Ex-votos : grandes ancres incrustées de coquilles!. En haut une baraque de saltimbanque ot l’on montre un serpent a téte de femme. Du haut de la colline ravissant tableau de la petite ville gracieusement répandue dans cette vallée étoilée avec au milieu cette espéce d’ile dans les sombres ctyptomérias. Petit cimetiére campagnard avec les bols et les assiettes pour le mort. On a méme eu la précaution de [91] mettre a cété une boite de cure-dents! Cette campagne
japonaise avec ses cuvettes culti-
vées au milieu des collines boisées présente une série de bols, de soupiéres, de plateaux.
A Ventrée du hameau cette cloche de bronze qu’on a suspendue au cou de |’Arbre municipal. L’hiver au Japon est un été ot il fait froid. — Le soleil couchant met sa lévre a l’Océan Pacifique. Joli style de Renan : « L’humanité v[ous] devra la suppression d’un mal horrible et aussi d’une triste anomalie, je veux parler de la défiance q[ui] se méle toujours un peu pour nous aux caresses de l’animal dans lequel la nature nf{ous] montre le mieux son sourire bienveillant» — A Pasteur. (Il s’agit du chien?!)
11 janvier. — Diner chez M. Heitaho Okada, « le dernier Grec», q[ui] a conservé la tradition de tous les raffinements Japonais. Charmant petit jardin
Janvier 1923
571
planté d’arbres et de pieux formant un décor qu’on change suivant la saison. A€tuellement Vhiver. Tout le sol est feutré d’aiguilles de pin desséchées, roses, qu’on a cueillies vertes pour en former ce tapis. La bordure 1a ot le jardin fini [sé] est indiquée par une grosse corde de paille. M. Okada nous dit qu’au Japon tout se divise en trois styles, shin ou officiel et solennel,
_
yo ou dignifié dans le profane et l’usager (l’architecture civile), so Vhumble et rustique. Tout le décor de Pappartement (arbres nains, objets d’art dans le tokonoma)*, les mets q[ue] n[ous] mangeons, etc., seront changés suivant le style employé. Magnifiques laques dor, porcelaine des Ming: Chin. [sc]. Il nous montre une espéce de sac ot un poéte du vieux temps conservait son bréviaire Chinois. Au dos une inscription en vers libres, disant q[ue] tout passe, mais q[ue] le poéte assaisonne tout avec les pensées qu’il conserve disponibles dans le derriére de sa téte. 12-14 [janvier]. Promenade 4 Nikk6 par la neige et le grand
soleil.
Les
temples,
Chuzenji,
Urami?.
La
cuirasse de glace sur la poitrine de Minerve, comme la peau
d’un
poisson
d’argent,
toute
ruisselante
de
gouttes d’eau. Avec Béarn et Chvalkovsky. Derriére la ligne des pins, un paysage a 3 dimensions comme un assemblage d’énormes cristaux. Occupation de la Ruhr. [91 v] Dans les drames historiques de Shakespeare, méme dans Antoine et Cléopdtre, il n’y a pas de vedettes. Tous les personnages ont la méme importance. C’est une grande fresque historique, il fait ruisseler histoire sur les escaliers du drame?.
15 [janvier]. Arrivée de Sylvain Lévy’. Au théatre Yamanouchi
me
dit : Regardez cette
actrice, c’est le pére de Monsieur
Au théatre Shintomiza.
Nakamura’.
Le vieil acteur grimé en
572
Cahier
IV
femme, la scéne tournante, sous la scéne la marmite sur un feu de braise, comme un feu de bivouac. Le
drame du sabre, le guerrier qui se lave les mains avant d’y toucher, et se met dans la bouche un papier de soie pour ne pas le ternir de son haleine. Le ze francais n’est pas une négation, mais une inhibition : c’est le pas qui ferme en claquant la porte?. Belles paroles de M.
Frédéric
Masson,
Secrétaire
perpétuel de l’Académie Frangaise, flanqué de Mgr Baudrillart, direCteur, et de M. René Bazin, Chancelier,
a la Séance des Prix littéraires et de vertu du 8 septembre 1922: « Les Chapelles littéraires forment un autre volume qu’on voudrait louer tout entier, car on s’attendait que l’auteur démolit les oratoires ot le mauvais gout, lineptie prétentieuse et Pignorance arrogante triomphent, au milieu des prosternements et des litanies des fidéles. Claudel, Jammes et Péguy (celui-ci mis 4 part a cause de sa mort), ce sont, peut-on dire,
des cibles singuliérement tentantes pour un tireur de concours et l’on aurait pu s’attendre que M. Lasserre, usant ici ses cartouches, ferait mouche
a tout coup;
mais il a semblé vouloir ménager ses chances, et l’on en a des regrets. » Les idées du bon vieillard ne sont pas trés claires. Il n’y a pas beaucoup de mérite pour un tireur de concours
4 faire
« mouche»
sur
une
chapelle,
au
moins sur Claudel et sur Jammes, car Péguy constituant une cible mise a part 4 cause de sa mort, était en effet plus difficile 4 atteindre?. S’attendre que, répété deux fois, une fois* avec l’indicatif, est une faute de francais; il ne comporte le subjonaif qu’avec la négation. Quae retro sunt obliviscens, in propositum prosequor'. Marie
de l’Incarnation
se voit toute entourée
du
sang purifiant de J.-C. Le sang est l’eau appropriée
Janvier 1923
573
et utilisée par un milieu vivant. Etre pris dans la circulation de Jésus-Christ'. Avec le baron Fumitchi et M. Sugiyama, le dimanche 20, au théatre de N6 de Asakusa?. (Au bout de la petite rue, dans une échappée, la coulée terne du fleuve Sumida).
[92] Arrivée a 9 h. du matin. O&7na, ou le Vieillard, espéce de danse ou de cérémonie postérieure au Bugaku et intermédiaire avec le N6*. On voit arriver solennellement un cortége composé d’un serviteur portant la boite de laque noire ot se trouve le Masque. Puis le 1¢ Vieillard, ou Vieillard blanc (en bleu et blanc), puis le Vieillard ou prétre (Okina), tunique a ‘longues
manches,
gris
verdatre,
puis
le Vieillard
noir, puis les musiciens en costumes spéciaux (deux de plus que d’habitude). Le serviteur remet le masque au prétre qui se retire pour se l’adapter. Pendant ce temps le Vieillard blanc exécute une courte danse dune magnifique fierté. Grands coups de pied par terre comme pour s’afirmer en face de univers. Puis Okina, priére pour la paix, promenade lente avec des arréts contemplatifs, embrassement et béné-
diction, il disparait lentement derriére ses grandes manches et l’éventail flamboyant. Danse du Vieillard noir, rapide, précipitée, parcourant de tous cétés la scéne (avec des arréts) — pas alternativement
frappés (scandés) et muets. Comme s’il n’en avait jamais assez de voir, de regarder, de parcourir. Embarrassé et éperdu au milieu de immense programme. Puis il va au fond de la scéne et met un masque noir. Le serviteur lui remet solennellement une espéce de goupillon [ou] rameau aux fruits d’argent qui, parait-il, est un embléme de la fécondité. Le Vieillard
penché vers la terre fait le geste de semer avec soin. Puis il secoue rythmiquement son goupillon sur toute la terre. De plus en plus vite, la mesure se double, se multiplie, s’accélére, comme si les choses sacrées recevaient croissance et multiplication de toutes parts. — Profonde et solennelle salutation pour le ciel et la
574
Cahier
IV.
terre, il s’en va. Les deux autres Vieillards se sont déja retirés. — J’oubliais, au commencement la profonde et solennelle inclination d’Okina A genoux q[ui| salue le Ciel et la Terre — le n6 a un caraétére rituel et sacré. Ses exécutants se purifient pendant 8 jours. Ils habitent une maison ot les femmes n’entrent pas. Ils mangent des aliments cuits avec un feu allumé d’une maniére spéciale. La baron a lui-méme dansé le rdle d’Okina. Parmi les musiciens le second tambour est un Vicomte, membre de la Chambre des Pairs. Okina se joue au commencement de l’année : bénédi@tion, dédicace. Les acteurs de N6 avaient le rang de gentilhommes [sic] et n’avaient pas le droit de communiquer avec les ateurs!. Ce qui me frappe dans cet art est utilisation de la /enteur. Magnifique domaine. Par exemple un pére q[ui] ouvre les bras 4 son fils, au lieu de le faire vite, si cela durait un quart Pheure?, Déjeuner a Ueno au restaurant Seiyoken. Le Broresecue Sylvain Lévy est avec nous’. Aprés déjeuner, 4 2 h., fin d’un nd représentant la danse d’un magnifique général dans de prodigieuses étoffes dorées (une épaule rouge). [92 v] — Ensuite le fameux no de la « Robe de plumes » (toujours l’idée de bénédiétion, de bon augure). C’est un ange qui a voulu se baigner dans la mer et qui a laissé sur le tivage sa robe de plumes. Trois pécheurs l’ont trouvée et il vient la leur redemander sans quoi il ne pourra plus remonter au ciel. Majesté des grands vers syllabisés lentement, pareils 4 la récitation d’un texte solennel et douloureux (un vers gtave, un vers aigu). On entend Ange qui parle avant qu’on ne le voie. Il s’arréte longuement dans le couloir qui méne 4 la scéne. Masque. Auréole dor. Flite et tambour, espéce de sanglots ou d’interjections des musiciens. L’Ange promet de danser, mais le fera-t-il? « Sur la terre on trompe, mais au ciel on ne ment pas.» La robe est pareil [sic] 4 un grand nuage de couleur un peu bise. Danse extrémement lente, plutdt pareille a un grand nuage d’été qui prend différentes formes dans le ciel bleu, 4 un bloc d’encens qui ne peut atriver a se dissoudre. Posture de Ange au milieu
Janvier 1923
575
de la scéme avec son bras recouvert de la vaste manche d’un geste sublime. Plusieurs fois il s’en va, comme
s’il voulait montrer le chemin a ses auditeurs,
les prendre, les amener avec lui. Une derniére fois dans la galerie, le geste vers le ciel. Il s’en va et les pécheurs le suivent!. Okina a également ce geste vers le ciel qui est reproduit par la statue dorée placée sur le faite du Théatre Impérial. La scéne est faite d’un bois gris verdatre admirablement poli et élastique. On a impression de marcher sur une substance merveilleuse et surnaturelle. — Brilé le 1¢T septembre 19237. Amor nescit reverentiam (S. Bernard)*. And it is our instinétive protection of the subconscious arrangement that makes us so passionately resentful at raw religion, at crude spiritual realities, at people who come at us saying harsh understandable things about these awful matters. — They may wake the tiger — We like to think of religion as some thing specialized, codified and put away (H. G. Wells, Boon,p. 166). Repr[ésentation] 25 déc[embre] 22°.
de /’ Annonce
a N[ew]
Y [ork],
Certains défauts se signalent par des actes isolés et déterminés, p[ar] ex[emple] la gourmandise, la luxure, la colére. Mais Porgueil est une espéce d’état continu et permanent, un habitus, se manifestant soit par la peine de ce qui lui est contraire, soit par la joie de ce qui lui est favorable. I] tient a Vinstiné de la conservation. Antireligieux et antisocial.
[93] Malade. Evanouie avec une lampe brisée a la main. 17/12.
La langue frangaise violentent (Marivaux)®.
n’obéit
qu’a
ceux
q[ui] la
Au coucher du soleil les mille points des lampes
576
Cahier
IV
éle&triques qfui] s’allument dans une ville couverte de neige. Sic curro, non quasi in incertum. Sic pugno, non quasi aerem verberans (épfitre] de la Septuagésime). Contre la morale sportive et esthétique, callisthénique, sans? but extérieur. Encore aux arénes de Ryogoku?. Atmosphere grisbleu cendré. Les rayons de soleil faisant briller les tétes et les visages des spectateurs. D’une poétesse japonaise moderne : Voici plus de quarante ans que j’erre dans ce pays inconnu qu’on appelle la femme’.
Captivus, cramponne. 30/1. Réunion pieces.
des acteurs
p[our]
parler de ma
Dimanche de la Sexagésime, 4 février —
Evangile
du semeur. Semen ef Verbum Dei*. L’Ame d’un méme homme contient tous les terrains qui sont décrits, les mauyais,
les bons et les excellents.
Semé
partout le
grain ne léve pas partout. — Le Verbe Christ qui est tombé secus viam (le chemin de croix) — et conculcatum eff — la foule dans la rue et dans les salons — les oiseaux, le tourbillon des pensées légéres et frivoles. Il faut le garder soigneusement. [93 v] Il faut faire pour lui un carré, une planche, dans son ceeur, l’arroser. — Vivre de Parole, la parole vivifiante, embrasant,
allumant notre sang rouge, pénétrant par les canaux
les plus ténus jusqu’aux derniers recoins de notre corps, nous pénetrant de vie et de lumiére. — Dans le Christ comme un poisson dans |’Eau et le Verbe qui lui entre par les Ovies. — L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de la Parole q[ui] sort de la bouche de Dieu. — Conculcatum : cf. les sauvages q[uil lachent
les bufHles
dans un
champ
ensemencé,
le moyen d’enfoncer le grain dans la terre.
c’est
Janvier-Février 1923
Sil
4 f[évrier]. Vu le N6 /’Aveugle. L’Aveugle est -dabord invisible dans une guérite. Inversion trés saisissante. Pour faire comprendre qu’il ne voit pas, c’est lui qu’on ne voit pas. I] appartient aux ténébres. | Sa fille. Le paysan qui le frappe pour le forcer a répondre. Ils se séparent, il met le bras sur son épaule, | 2 pas ensemble et il reste en arriére. Magnifique. | Avec les S[ylvain] L[évy].
Dans Téte d’Or on s’est moqué de mon dieu de la Marmite « bienveillant, clignant des yeux dans la vapeur de la viande et du chou », — mais dans le Kojiki japonais on voit les divinités de la Cuisine « que tous | révérent »}, Les dieux tiennent conseil dans le lit desséché de la
Tranquille — Riviére — Céleste (Kojiki). « N[ous] Pavons vu, ce Verbe incarné, dit S. Jean, de nos propres yeux et n[ous] l’avons touché de n[os] propres mains.» C’est donc par Vhumanité sainte q[ue] le Verbe s’est rendu visible et palpable. Et Yattouchement dont parle ici S. Jean n’est point Vattouchement d’une chair vivant seulement d’une vie sensitive et animale, mais d’une vie divine. Et comme
on dit q{ue] n[ous] touchons une personne en touchant seulement son corps et q[ue] n[ous] voyons le soleil quoique souvent nous ne voyions quwun air illuminé ou une nuée rayonnante, de méme en touchant
cette chair divine n[ous] touchons le Verbe de vie q[ui] fait un composé admirable avec elle. La nuée n’est pas toujours interposée pour n[{ous] dérober le soleil, mais elle est nécessaire pour modeérer le trop grand éclat de ses rayons. C’est ainsi q[ue] cette chair a servi a nfous] rendre palpable le Verbe » (Jeanne de Matel)?. GuSstate et videte quoniam suavis ef D{o|m{znuls. — Ps.*. — Une apologétique basée [94] sur une éducation progressive du gout, le sens de la saveur,
578
Cahier
IV
sapientia, dans l’eau le sel (H[enri] Br[emond]). Gottez et voyez. Gotter d’abord et voir ensuite. Eplitre] et ex parte touche le Plus tard,
de la Quinquagésime. — Ex parte cognoscimus prophetamus. Pars, le point par ot le général particulier, non pas l’ensemble de la Cause. cognoscam sicut cognitus sum.
Secus viam. Il ne faut pas recevoir le Verbe par la voie commune et publique, ot passent les bruits et les paroles du monde. Sous peine qu'il soit conculqué. Il faut lui ouvrir la Porte Royale, la Porte de l’ Est. Ce prophéte sré par les cheveux porter la nourriture 4 Daniel?. 15
février.
est achevée.
Bonkotsu
L’impression Dessins
de ma
de Tomita
(Habacuc) Sainte
Keissen.
pour
Geneviéve
Gravure
de
Igami*.
Jaca cogitatum tuum in D\omi|no*. Prendre sa pensée, Varracher a ces choses communes dont elle fait partie pour la jeter en Dieu comme une semence q[ui] .
.
4
fructifie.
16 [février]. Un nd a Kudan® chez le marquis Hosakawa. Le pantalon trainant sous les pieds des acteurs de N6, comme s’ils étaient enveloppés dans un lambeau de voile ou de matiére qui les dépasse de toutes parts*. Une femme qui a perdu son enfant et qui retrouve son tombeau sur la rive du fleuve Sumida’. La lenteur du geste qui permet toutes les interprétations. Par ex[emple] elle porte les mains 4 ses yeux pour pleurer. Mais cela peut signifier aussi Pimage de sa douleur qu’elle approche pour mieux voir, Peau des larmes qu’elle puise, le poids de la peine,
puis ’éloignement du calice qu’on a bu, l’abdication de la vie, etc.s. — Magnifique mouvement quand elle s’accroupit et que lentement les vastes vétements pli sur pli s’arrangent dans un ordre nouveau. Quand elle prie petits coups de temps en temps sur un timbre
Février 1923
579
de métal, comme les brusques élancements de la douleur. Les sanglots des musiciens qui donnent une impression de désespoir, d’une nuit d’été absolument ténébreuse et bouchée. Le chceur énonciation calme et Stoique de la destinée. Le marchand qui représente le passage de la vie ordinaire et funébre dans le méme bateau de front avec la mére. Les protestants et les bourgeois ne croient pas aux miracles non pas a cause de leur impossibilité, mais a cause de leur pittoresque. [94 v] 16/2. Entendu la musique de /a Femme et son ombre chez le musicien, M. Kineya?. Les cloisons qu’on enléve et 5 orchestres qui apparaissent lun aprés l’autre. Musique pleine d’animation et de poésie. La harpe de bois. Au Club des Nobles, danse des enfants
de Shikoku’,
battant
du tambour,
avec
des
tétes de cerfs. Os Dfo|m|ini] locutum est (s.) — Aedificaverunt deserta saeculorum (id.)*. Les déserts des siécles ont été construits, — expliqués — rendus habitables pour notre pensée.
Le crime d’Israél fut Pavarice. Garder la grace de Dieu, la parole de Dieu pour lui, comme les eaux de la Mer Morte. Et qu’est-ce que l’argent que de la
miséricorde pétrifiée? du pain qui s’est changé en pierre. Dic ut fiant panes lapides 15ii°. Obtinere abstinendo C[aréme]).
(Or[aison]
1°* D[imanche]
du
Au Théatre Impérial drame étrange et émouvant, un moine retiré dans une hutte au milieu d’une forét couverte de neige. Sa maitresse qu’on lui apporte dans une boite : bataille. Son agresseur tout entortillé dans les écritures bouddhistes qu’il lui lance. II saute dans le cimetiére et se défend avec une inscription funébre. On le tue et aussitét son spectre apparait.
580
Cahier
IV
Illusion de la double personnalité comparable a celle de la boule de pain qu’on touche avec les deux doigts entrecroisés et q[ui] parait double. Les amis regardent v[otre] visage, les ennemis regardent vos pieds (Proverbe arménien). 17 [février]. Parution de S. Geneviéve. Féte donnée en mon honneur a l’Hétel Impérial. Photographies. Discours?. Apprends a préférer. — Innova mirabilia (Ecclés., XX XVI)?.
signa et immuta
25 [février]. Déjeuner chez Jl’auteur [Utamon]. Danse de Nakamura Fukusuki®. La piéce d’étoffe qu’on examine en
la pliant, comme
si c’était
toute la vie
passée.
28 [février]. Répétition des danses de /a Femme et son ombre. — 3 mars. Arrivée des croiseurs Michelet et
Vidor-Hugo.
Amiral
Gilly.
5 mars. — HE? transiens per medium illorum, ibat*. Et passant au milieu d’eux sans qu’ils s’en apercoivent, mélé a eux, a leurs affaires, 4 leurs conversations,
il
s’en allait. 8 mars.
Bal travesti
a l’Ambassade.
Ego sum. — Tu, quis es? — Ego sum Lux Mundi. Ego Sum Vita, [95| e¢ Veritas et Via. Ego sum A et QQ. Nolite timere, Ego sum’. La prudence est basée sur ’humilité.
12-3.
Départ des 3 croiseurs le 15. Arrivée des députés Maitre et Pineau-Pradier.
In the Vedas we find an idea that the world substance is fluid or semi-material and that the worshipper may satisfy his religions longings by partaking of a finid akin to this fundamental reality®.
Février-Mars
1923
581
Le Commandant EH. me dit qu’en T.S.F. pour entendre, il faut mettre l’appareil en état d’émission dondes. — V[oir] ma théorie que la sensation n’est pas un phénoméne purement passif?. Discerne causam raison d’étre.
meam.
—
Discerne
ma
cause,
ma
La carmélite Marie de lEnfant-Jésus morte le 15 décembre 1922 a Bui-chu dans le Tonkin Central. Une nouvelle proteétrice au ciel?.
Secréte du Jeudi de la Passion. — D[omine] D[eus] nloster| q\ui| in creaturis tribue, quaesumus, ut et vitae nobis praesentis auxilium et aeternitatis eficiant sacra-
mentum’. Le grimage blanc des a¢teurs japonais fait pour ne laisser d’importance qu’aux yeux et a la bouche. 26 mars. Représentation de /a Femme et son ombre au Théatre Impérial. — Lettre de Henrion qui va se faire prétre (v[oir] plus bas). Explication de l’alphabet lue dans un jo urnal anglais A(leph), l’éléphant — B, la maison (coupe des étages) — C, le chameau (son cou) — D, la porte triangulaire — E, la persienne — F, ’Phamecgon — H, la barriére — K, l’eau dans la main — L, le fouet — M, l’Eau —N, le poisson avalant Phamecgon — O, Veil — P,
la téte sur le cou — Q, la téte avec |’épine vue de dos — S, les dents broyant — T, la croix — Y, le partage des voies‘. Nakamura Fukusuki jouait la Femme
—
Koshiro,
le Guerrier, — Shikaku, ’OQmbre — Musique de Kineya. La Lune en haut derriére les pins. Les reflets en bas derriére les lotus. Grand succés. Joué jusqu’au ret avrils. Les graveurs sur bois de Tokyo font célébrer un
582
Cahier
IV
service au temple bouddhiste en |’honneur des cerisiers sacrifiés pour fournir les planches nécessaires 4 leur art}.
« Qui ne rassemble pas avec moi dissipe.» Le procédé de division et de séparation de l’hérésie ne s’arréte pas jusqu’a ce qu’il arrive a4 la pulvérisation. Dissiper la substance. [95 v] L’Enfant Prodigue qui dissipe sa substance — Os non comminuetis ex eo — Comminutae sunt veritates a filis hominum. — Ps. XVII. Et comminuam eos, ut pulverem ante faciem venti; ut lutum
platearum ‘delebo eos?. Les vérités diminuées, pour les rendre
soi-disant
plus pratiques,
devenues
banales,
méprisées, foulées aux pieds de la foule, n’ayant plus de forme, écrasées et délayées. [eT] avril. Paques. Miyanoshita. Caze. Les cerisiers en fleurs.
La baronne
La
Il faut que J[ésus] croisse et que je diminue. Sciunt ut sciantur®.
Kineya me donne un shamisen décoré de dessins q[ui] rappellent ma piéce, un pont, des papillons, un éventail, une branche de pécher en fleurs. Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa Justice et le reste vous sera donné par surcroit. — Cela est dit aussi aux artistes et aux écrivains. — Justice : 4 chacun ce qui lui est di. Toute parole ou expression est un jugement, une explication. L’histoire, dans son sens le plus étendu (tout ce qui arrive), nous parait informe et incompréhensible, comme 4 qui regardait les hiéroglyphes avant Champollion,
ce mélange
hétéroclite
de faucons,
de
poingons, de tétes de chiens. Mais une fois imprimé qui sait si ce texte vécu ne fait pas aux yeux de Dieu pour l’éternité un texte magnifique, une sublime épopée. — Nous ne voyons et ne connaissons qu’une
Mars-Aboril 1923
583
toute petite partie de ce qui arrive 4 chaque minute sur ensemble du globe. Départ de Kyoto le 11 [avril] au soir!. Voyagé seul. Arrivé par une pluie battante. Sylvain Lévy. Déjeuné au Manuyoken. L’aprés-midi chez Tomita Keisen dans sa petite maison de |’Arashiyama?. Le petit pavillon avec la fenétre juste pour que I’ceil passe et --voie la riviére rapide, au-dessus l’autre fleuve que fait Pair d’avril, les foréts qui, dit-on, sont remplies de
singes, les cerisiers 4 peine défleuris. N[ous] buvons avec les cérémonies rituelles un thé qui est une espéce de mousse verte, comme de la séve, le sang vert et plein d’esprit de la nouvelle année , Dans des tuniques couleur de jeune feuille.
Monter au ciel par un pont de corail rose*. De moi détachée, une surface immatérielle, pelliculaire, se colle a celle de l’eau‘.
Service funébre célébré par un marchand de mortaux-rats pour les rongeurs que son invention a mis a mals.
[96] dans* d’épaisses tasses de vieille poterie. A cété le temple de Daikakuji, ot une exposition de vieilles peintures admirables, surtout un cerisier monstrueux chargé de fleurs roses, pareilles 4 des ventouses, boutons d’un rose presque violet et comme virulent, émergeant d’une vapeur d’or, réunissant les idées d’une antiquité immémoriale, de la joie nouvelle
et de Véternelle splendeur. L’Arbre de la chair’. Paysages d’hiver immenses par Kané Motonobu et une prodigieuse branche de vigne par Kérin’. Les peintres Japonais pensaient que la divinité était mieux exprimée par ces étres anonymes que sont les plantes qui tiennent directement a l’éternité. Dans les salles une quantité d’hommes et de femmes q[ui] faisaient des bouquets®. Le soir danses du Miyako Odori exéCLAUDEL V - 22
a4
584
Cahier
IV
cutées par une cinquantaine de petites mousmés gentiment costumées. Pour les globe-trotters. Cérémonie du thé. Terminé la journée au restaurant des 47 Roénin.
Le lendemain 12 [avril] pluie battante. Départ avec
Kita. Passant mystérieusement par une petite cour que remplissent un poulet maigre et un ceuf cassé et un petit domestique bleu, on me présente dans une vaste cour au plus vieux cerisier de Kyotd, tout mutilé et soutenu de toutes parts par des béquilles, comme a un vieillard branlant dont la bénédiétion était sans doute indispensable?. Le Musée. Kobé. Hauchecorne. Colonie francaise. Déjeuner Société Franco-Japonaise. A lAir liquide. Un cylindre de porcelaine ot bout et fume une espéce de liquide bleu-pale qui est de ’oxygéne. Tout y durcit. On y met deux poissons vivants qui deviennent instantanément
Sur l’étang devant les foréts ténébreuses un deélicieux pont rose’. Ces vertus qui rendent le pauvre respectable et le riche respecté (Samuel Butler). De méme « les sept Vertus capitales »%, Au Théatre-Frangais, cette piéce idiote de Dumas fils, un spectateur qui se promenait avec un pardessus fait de peaux de poulain, le poil dehors*. [96 v] comme de Vlargile cuite. On casse Pun a coups de marteau, lautre est placé dans de l’eau ordinaire et se remet 4 frétiller et 4 vivre. Les Melchior,
les Nogaret. Diner avec 2 vieillards anciens Samurai dont lun a assisté 4 la bataille de Ueno®, ot l’on se battait encore avec des lances et des sabres. Coucher chez H[auchecorne] dans une chambre q[ui] me rappelle les logis de Pagoda jadis*. — Le 14 [avril], départ pour Osaka. L’Ecole de l’Etoile Brillante. Discours. Déjeuner. Les sceurs. Cercle admirable des Huit sceurs de Nevers. Ces huit paires de beaux yeux pleins d’innocence et d’une gaieté ineffable. En
Abril 1923
tramway
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(bondé) jusqu’a Nara. Promenade
le soir,
délicieuse, par une petite venelle! bordée d’un mur de
terre en ruines, la pagode 4 3 étages dans le lointain. Pont de corail rose sur l’étang’. — Trois énormes arbres entourés d’un cable de paille?. Dimanche 15 [avril]. Départ avec un employé de la préfeture pour Yoshino*. Trains combles. Une petite auto a 3 places. Yoshino dans la montagne, foule immense pareille a d’énormes essaims qu’attire une fleur spéciale. Petits cercles de merry makers mangeant et buvant sous les cerisiers en fleurs. Les cerisiers un peu défleuris,
mais tout rouges
et dorés,
comme
vernis
avant qu’on y mette l’or, la feuille collante comme de la peinture fraiche. Lundi 16 [avril]. Revu le magnifique temple de Dai-Butsu®. Ses fondations dans le ciel, essor® du vert perpétuel de ces deux énormes toits. Le triangle antique des pyramides, plein de calculs et de mystéres, formant le toit en se rejoignant, maintenant courbé, relevé, animé, vivant. Les arétes du
toit retenues
et relevées
par ces énormes
muscles
formés de couches superposées, épaissies par le bout.
Contraste de angle aigu et mince. Effet obtenu non par une exagération indiredte du détail, mais par une transposition dans un ordre différent. Variation dans Pépaisseur des lignes aussi délicate que celle du calibre des colonnes du Parthénon. Comme Vhélice a la place de l’ceil. — Les fondations non sur la base mais dans le ciel, dans l’énorme envol caverneux. — Temple de Kwanon. Humilité
: amour
de la vérité; aor
de
ce
monstre
veri’.
[97|* Un prétre par derriére, jaune a toge violette, 2 assistants prosternés, il allume quelque chose et Yon voit tout 4 coup une flamme qui se refléte dans le miroir circulaire d’argent®. I] purifie ses instruments rituels dans la flamme. — Les arbres paraboles. T7un tout tordu, mutilé, desséché et tout 4 coup un
rameau de la jeunesse la plus fraiche et la plus ingénue qui jaillit de ’écorce morte. Mais voici la chose saisissante, les deux arbres que j’appellerai male et
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Cahier
IV
femelle, sexe reporté sur le plan des dieux. IIs jaillissent d’entre les pierres tellement serrés et écrasés ’un contre l’autre qu’on croirait qu’ils sortent des mémes racines. Le premier a le tronc vert tout tacheté de blanc, il a aspect d’un tigre ou d’un dragon et il se jette sur son partenaire avec une espéce d’impuissance et de fureur. Avec son tronc, avec ses branches,
il lui entre dans le corps au moins 4 une douzaine d’endroits
différents.
I! l’enfourche,
il lenveloppe
comme une pieuvre avec une touffe de bras. Ses branches: frénétiquement retournées et contournées se mélent, s’enlacent aux siennes. Il a lair de tomber sur elle de tout son poids. L’autre au contraire dont le beau tronc lisse et rond pousse d’un seul jet a Pair de subir cet amour furibond et presque écumant avec une espéce de superbe indifférence. A ses pieds on entend le bruit éternel de l’eau qui tombe. — Départ a 6h. 18 [avril] pour Kyoto et Tokyo.
Lvouvrier principal de la Réy[olution] Fr[ancaise] fut Philippe-Egalité issu de la réunion de la race maudite des Orléanais avec les batards scandaleux de Louis XIV et de son double adultére.
1/5. Quae ignorabam interrogabant me — Les choses que je ne connais pas, les difficultés purement artificielles qui sont uniquement l’ceuvre de homme et auxquelles Dieu n’a rien a voir. Cf. Nescio vos. — Plus loin
sferilitatem
animae
meae,
Dieu
Sstérile pour
tant
d’ames?. Pleni rimarum diffivimus undequaque. —
S. Bernard?.
Passage de Jean Brunhes. [97 v] Francis me t[é]l[é]g[raphie] qu’on joue /’Ozage a Paris le 29%. R. malade mais mieux. Dieu est partout. Il est donc dans tous les phénoménes naturels, qui tous signifient quelque chose de lui, Il est aussi
dans
tous
les sentiments
humains,
April-Mai 1923
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dans tous les aétes humains. Il n’y en a pas un seul dans lequel il ne soit intéressé, qui ne le regarde, qui nait rapport a lui, et cela aussi bien les bons que les mauvais. Tout est parabole, tout signifie l’infinie complexité des rapports des créatures avec leur Créateur. C’est cette idée q[ui] pénétre toute mon ceuvre!. Il n’y a rien sur la terre qui ne soit comme la traduction concréte ou déformée du sens qui est - dans le ciel?.
Medius vestrum Stetit quem vos nescitis®. Tais-toi. Laisse Dieu exister. Le Christ a dit qwil ne priait pas pour le monde, c[est]-a-dlire] pour aucune organisation humaine, pour aucun ordre temporel confortable, pour un équivalent du salut dés ce monde. La priére non exaucée : Petimus mala, petimus male, petimus malt. Ut sugeret mel de petra et oleum de saxo (Deutér.)°.
durissimo
Le nez est dans l’embryologie chinoise, le commencement de ’homme, le pivot de sa genése. Chez les Japonais, quand on veut dire : c’est moi, on montre son nez, comme chez nous son ceeur. C’est le nez qui aspire le souffle, qui fait index.
Le caraétére 57, res-
pirer, est fait d’un nez superposé a un cceur. C’est par le nez que le souffle du cceur entre et sort. La voyante juive Sussmann qui a donné a Henrion le sens de sa vocation et q[ui] forme une espéce de congrégation pour la conversion du Japon’. Jésus se fait ouvrir les portes de Enfer’, au-dessous du cceur cette région des désirs charnels.
Oratio
humiliantis se penetrabit nubes... donec Domi-
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IV
[nus] respiciat (Eccli.)*. Les nuées, Vincertitude fait qu’on ne sait si on voit ou ne voit pas.
qui
Surgite, eamus! Léve-toi et aussitét n[ous] serons deux 4 matcher.
Proust. Analyse ou plutét décomposition?. 7/5. Cérémonie du thé chez le Baron Mitsui. N[ous] attendons devant une petite porte rustique, pendant que le gong tonne mystérieusement au fond de l’enclos. On entre par un trou dans une toute petite piéce. Apparition d’un vieux sage 4 longue barbe blanche qui prépare le breuvage de séve avec les gestes rituels dans des vases précieux*. Hutte d’ermite ou repaire de conspirateurs?
[98] Une phrase épouvantable de Renan a propos de Marc-Auréle : « Le mouvement de la vie dans cette ame était presque aussi doux que les petits bruits de l’atmosphére infime dun cercueil*.» Cela pourrait lui étre appliqué. Rogations. Parabole des Trois Pains dans S. Luc. S. Luc est ’Evangéliste des paraboles. L’hdte a qui un ami arrive, en pleine nuit (media node) et qui n’a rien a poser devant lui. Il court aussitét chez un autre ami pour lui emprunter quelque chose. Cet ami dort solidement enfermé avec les siens au fond de sa maison impénétrable. Il frappe a coups redoublés (comme dans le silence des petites villes la nuit® on entend quelquw’un qui tape sur les volets et q[ui] appelle) — le méme bruit qu’ont dd faire les Vierges folles quand elles sont allées acheter de Vhuile, trop tard®. La voix qui répond de Vintérieur (de intus respondens). La porte est fermée, jam oftinm clausum est (cette porte par laquelle passe la grace), je me suis déja arrangé sans ce pécheur, je n’ai pas besoin de lui, mes enfants me suffisent que j’ai comptés et qui sont avec moi dans le bercail. Je ne puis pas me lever, (non possum surgere, tessusciter de la mort, du sépulcre
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qu’est le coeur de ce pauvre homme), pas moyen de me lever comme quand on est assoupi et q[ue] les forces manquent, et dare sbi, et te donner ce qui est nécessaire. Et cependant s’il persévére, dico vobis, moi, le
Verbe, esd non dabit ei surgens 4 cause de son amitié, cependant il le fera 4 cause de son importunité, de son indiscrétion,
de sa ma/honnéteté,
de son obstination,
__ propter improbitatem ejus surget (répété pour la 3° fois). Cf. Labor
improbus omnia
vineit, un
travail acharné,
mais aussi un travail en dehors des régles, du schedule time. Le mot malhonnéte en francais couvre presque le méme double sens (deshonnéte et injurieux, contraire a Phabitude, a la routine). Ecce Sto ad ostium et pulso, a mon tour. — Pourquoi trois pains Pen Vhonneur de la Trinité ?Cet ami q[ui] arrive dans la nuit et qui n’a tien pu manger que ce qu’on peut trouver sur une route sans voir clair, des mtres dans la ronce, une pomme sur la route, une tartine jetée, des nourritures sauvages, crues, hasardeuses, clandestines, q[ui] ne
sont pas faites pour lui. Donc voila du pain qu’on pose pour lui sur la table. Mais il faut que ce pain lui soit approprié, qu’il fasse appel a son estomac. A quoi bon les enseignements les plus sublimes du Christ et de l’Eglise, s’ils ne sont pas assimilables et méme s’ils lui font du mal. Il demande du pain, lui donnerai-je
une
pierre
Christ) tortillé?
indigestible?
lui donnerai-je un
ceuf, germe
un
un
poisson
serpent
(iyvs,
le
insaisissable
et
de vie et d’infini,
le zéro
séminal, un scorpion, l’animal venimeux qui se retourne sur lui-méme et se blesse de son propre dard empoisonné? [98 v] — Non, il me faut pour lui 3 pains, un pour chacune de ses différentes facultés. Un qui répond a son gofit, a son attrait intérieur, et qui par comparaison lui fasse mépriser les nourritures antérieures. S’il n’aime pas Dieu a cause de sa vérité, il ne peut s’empécher de l’aimer 4 cause de son gott. Union de saveur. — Le second pain est la foi qui nourrit l’4me et donne la vie. — Le troisiéme pain est ?Amour q[ui] crée union. Le pain est ce q[ui] unit. Cet ami q[ui] arrive la nuit ainsi il a trouvé son chemin malgré les ténébres il sait que c’est 1a quwil
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doit s’adresser. Il est blessé, souillé, blessé, meurtri,
effaré. Il a échappé aux voleurs, aux bétes et aux fantomes. Et le voila q[ui] arrive dans cette maison vide ov il n’y a rien pour lui. — Priére pour P[hilippe] B[erthelot] en ce temps des Rogations. Justement Pépitre de S. Jacques parle de importance d’obtenir la conversion de ses amis}. Tokyo Ii mai 1923
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1S [1] 12 mai. Départ de Chvalkowsky par Empress o Australia’. Vado parare vobis locum (S. Jean)?. 13 mai. Représentation Médiocre.
de nd a Yokohama.
—
Celui qui est prisonnier de murailles peut s’échapper,
mais non pas celui qui est prisonnier d’un triangle. — L’éternité, la béatitude parfaite, consistera dans une
cettaine correspondance exquise et incommutable de notre nombre essentiel. Quelles que soient les choses différentes auxquelles il s’applique, il y a toujours un rapport entre les nombres’. Nune coepi (Ps.
LX XVI)‘.
A propos des calculs de temps appliqués aux indulgences, 40 jours, etc. N[ous] évaluons les choses de Péternité avec nos mesures personnelles. Ainsi du temps du Direétoire on évaluait les traitements des fonctionnaires en myriagrammes de froment. Dans le gouffre de l’Rternité n[ous] versons avec la priére notre goutte de temps. Expelto donec immutatio mea veniat (Job) — Vita mutatur, non tollitur’, Elle change de forme, de rythme. Elle ne puise plus 4 la méme source. Elle ne fabrique
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Cahier V
plus la méme chose. — Si elle n’est pas enlevée, c’est peels continue. Il y a quelque chose q[ui] est capable e continuer immortel. Observation des gens qui ont été vittimes dun jf accident, chloroforme!, etc., anéantissement complet de la conscience, comme chaque jour dans le sommeil } d’ailleurs. La conscience n’existe que quand elle a un | objet sur lequel presser, fourni par la mémoire, l’imagination ou la réalité. Elle exige un effort. C’est la volonté qui s’arcboute sur l’étre et qui presse sur Pobjet. A létat de réverie il n’y a presque pas conscience. Quoi d’étonnant? nous sommes faits de néant, cest l’étoffe méme de notre vie, qui est composée d’une série indéfinie d’étre et de néant, ’un a chaque instant interrompu par l’autre. [2] Le travail d’une manufacture, d’une filature par ex[emple], donne une impression trés différente de celle de notre Gouvernement moderne qui est un café ot les gens se réunissent pour discuter des événements et des imaginations. Le tout en dehors d’eux se traduit au moyen des bureaucrates et de l’écriture. La parole devient papier et le papier devient fait. Dans une usine toutes les forces sont réparties a l’intérieur d’une tache: les ouvriers, les ingénieurs, les comptables,
les voyageurs de commerce, les interprétes, la publicité, le contentieux, et au-dessus de tout un monarque
absolu : le patron, qui nourrit les gens et dont l’autorité ne peut étre contredite que par |’émeute ou Pabstention, bien difficile 4 celui qui gagne son pain au jour le jour. Appropriation par un seul de toutes les richesses naturelles. Néanmoins c’est une société plus parfaite que la démocratie en ce sens que tous les membres qui la composent ont absolument besoin les uns des autres et sont liés organiquement par des services réciproques. En dépit de ’horreur apparente une filature réalise donc un étre social supérieur, un groupe d’hommes associé pour une transformation utile de la nature. Un ouvrier fait partie de q[uel|qfue] ch[ose] @utile et d’organisé?.
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Ego veni ut vitam habeant, et abundantius habeant -(S. Jean). — Le Christ est venu augmenter la vie. Question de la « Colére de Dieu». Si Dieu a des passions ou s’il est ce que les philosophes grecs appellent aa67s. [1d0os a 4 la fois un sens passif et un sens actif. Dans ce dernier sens il cara€térise |’état _ intense d’un désir ou d’un besoin sous une provocation “venue du dehors. Peut-on dire que Dieu qui est continuellement a l’état d’adte soit capable d’une modification? 29/ sous une provocation venue du dehors? 3°/ Quel désir ou quel besoin peut-il éprouver? — D’autre part on ne peut caractériser Dieu par une simple négation, puisqu’il n’y a rien qui lui ressemble moins que le néant ou labsence de quoi que ce soit. ‘La passion peut étre un état de désordre mais non pas un état d’imperfection. Elle tend l’étre, elle augmente en nous une certaine existence, dans l’homme que la passion informe il y a plus d’étre, plus de ressemblance avec l’acte parfait. Sa passion est donc une ressemblance désordonnée avec une certaine [3] qualité divine, une caricature, —
et en effet les dessins des
artistes montrent que l’effet physique d’une passion est toujours caricatural. — D’autre part Dieu est toujours le méme et il est tout-puissant, mais en créant les étres il s’est volontairement limité lui-méme, il a créé quelque chose q[ui] ne le recoit pas (Ez tenebrae eum non comprehenderunt). 11 y a donc entre |’étre absolu et
Pétre limité une multitude de réaGtions et de variations possibles. C’est comme la faculté de sentir reste la méme [sic], mais la sensation est infiniment variée suivant son objet. Dieu sent quelque chose qui varie et qui comprend plus ou moins sa lumiére, qui en est
plus ou moins capable. I fait du mal a ce qui lui résiste et du bien a ce qui l’admet. Tout se passe comme s’il désirait, comme
comme
s’il luttait, comme
s’il se repentait,
s’il se pamait de joie. C’est ainsi que nous
disons: le soleil est triste, caressant, implacable. I] est
tout cela suivant le genre de résistance ou de voile qui s’interpose. Nous sommes en Dieu et par conséquent il nous sent. Tout ce qui varie en nous répond de sa
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Cahier V
part 4 une connaissance qui est en méme temps un aéte. Chacun de nous agit sur son abime comme une espéce de révélateur particulier. Il est donc littéralement vrai que nous l’attristons, que n[ous] le réjouissons, q[ue] n[ous] le mettons en colére. Nous génons son expansion ou au contraire nous l’amplifions de notre acquiescement?, 13 682 suicides au Japon en 1gz2tr.
Hello et lathéisme renanien. « Dieu ‘c’est Etre. Or la personnalité étant une condition essentielle de |’Etre absolu, admettre VEtre
et lui refuser la personnalité, c’est dire : ’Ktre n’est pas. Si PEtre n’est pas, tous les étres sont impossibles, et le néant est nécessaire.
Le Dieu
de M. Renan, le Dieu
abstrait, n’est pas l’Etre, puisque lidée de |’Etre absolu implique nécessaitement vie, personne, conscience. Donec, si le vrai Dieu était ce Dieu, l’Etre ne serait pas.» Mais quoi! « ’homme ne peut nier |’Etre sans Vafirmer au méme moment, puisque son nom, qu'il faut prononcer avant de le nier, implique et contient déja son affirmation. Dieu n’est pas; traduisez : Etre n’est pas, ou : Etre est n’étant pas; ou bien encore :
Celui qui est n’est pas. Tachez donc, pour nier Dieu réellement, de fuir dans un monde ot vous puissiez parler et échapper au verbe : étre. » La religion est une belle chose, mais il n’y a pas de Dieu. Le Christ ne vivra qu’en tant qu’-homme. Jusqu’a ce qu’d soit remplacé par un idéal supérieur, 1 humanité continuera, en le contemplant, de s’enivrer de sa propre image. Voila le Dieu vivant, voila celui qu’il faut adorer.
I] nous reste donc 4 adorer ’humanité. Seulement la société humaine est fondée sur ignorance générale. Si Pabrutissement universel diminuait, on comprendrait ’égalité de létre et du néant, et la société serait impossible. Il ne faut pas que les recherches du savant pénétrent dans les régions ou les illusions sont nécessaires. L’humanité n’a donc de valeur qu’en tant qu’elle est représentée par les savants.
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Il nous reste donc la science 4 adorer. La science est divine. Elle est le seul but de l’homme. Seulement /a philosophie est peut-étre condamnée a n étre jamais quun vain et éternel effort pour définir Vinfini. Il n’est accordé a Phomme de posséder qu’une bien ' faible lueur de science (il ne peut savoir s’il a une ame). La philosophie ne peut atteindre l’indubitable.
|
Mais Dart est infini. Il nous reste donc l’art 4 adorer.
- Seulement il n’est qu’une des formes de la critique. | Tl est réduit a la satire, a la caricature, ou, si je lis une autre page, a la forme plastique, ou, si je lis une autre
page, il est Pauxiliaire d’une religion qui n’existe pas. Que nous reste-t-il donc a adorer ? Le néant (résumé de la doétrine de Renan d’aprés Hello)!.
[4] Chuzenji pour les réparations avec Tétu®. La forét remplie d’azalées rouges, blanches et violettes. Lettre de Philippe [Berthelot].
L’escargot qui se retite pour prier Dieu au fond de son petit presbytére’. L’escargot se retite, s’empile, s’accumule au fond de
sa coquille contournée comme Vargent dans les combinaisons!
d’un avare et la haine
dans le cceur
d’un
hypocrite.
Cette belle oculus solis®.
tulipe persane
qu’on
appelle
Tupa
Oui adorant sculptilia’. — Sculptilia, la pierre qu’on travaille du dehors et qui change de forme sous le ciseau et le marteau, Arelaisane d’une maniére durable
un étre contingent et périssable. Par opposition a cette pierre immuable sur laquelle est écrite la Loi de Dieu et A celle sur laquelle se dresse l’Eglise. A comparer les théories scientifiques, explication apportée du dehors 4 un ensemble de faits, le ciseau retranchant arbitrairement ce qu’il veut.
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Une demeure qui ne serait meublée que de proportions}. Dans |’Enfer avec toutes les variétés de la tristesse,
pourquoi n’existerait pas aussi la Mélancolie, l’Inutilité finale, ce quia cessé de pouvoir étre? Pour les paiens. La cloche bouddhiste. Cela aussi est le ver. Une forme crépusculaire de l’Exil. Déja le bouddhisme est une préparation de cet enfer. Sa résignation, la résignation au mal. — Méme en enfer il y a un état d’équilibre. (A développer?.) Epulaberis in omnibus bonis quae D{omi\nus D{eus| tuus dedit tibi (Deutéronome pour la Pentecdte)*. Il y a donc un festoiement saint dans toutes les bonnes choses que Dieu nous a données. O sanéttissima Trinitas ! 0 beatissima Unitas* !
[5] Amour, Résolutions.
remerciement,
demande,
offrande.
Mort du vieux bété®, Kangé.
3 juin. — Passage de Philippe Langlois, fils de la secur de P{hilippe B[erthelot]’. Procés d’André B[erthelot]®. Le Sacré-Ceur,
La supréme
enveloppe
rompue.
Non seulement le Christ, mais ce qui fait le Christ, le
ressort essenticl, la forge, l’atelier, le réceptacle ot toute la matiére liquide est alternativement recue, vivifiée, et renvoyée, le centre de notre ciel intérieur.
Le Royaume est en nous. Le pur mouvement, 4 nu. Succés de /’O¢age 4 Paris. Francis, Froment, Dhurtal,
Lugné-Poé, Roger Weber*.
L’ Annonce jouée a San]
Francisco et a Seattle. Freud voit dans l’aéte de l’enfant qui suce ses doigts
la premiére manifestation de l’instin@ érotique. J’y
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vois plutdét un geste pacifiant, l’enfant qui entre en conscience de lui-méme d’une maniére continue, qui communie avec lui-méme}. L’Enfer. Le Feu qui ne meurt point. Tout briélement est une décomposition, le procédé de destruction @une chose existante. Comment le concilier avec Pintégrité dun étre immortel qui aurait incessamment a fournir de quoi étre détruit et ne pourrait ainsi « braler» que superficiellement? Toute éternité suppose un équilibre quelconque. Ne peut-on imaginer que le feu signifie un état purement de décomposition, un équilibre obtenu sur une espéce de porte-a-faux, comme un homme qui se tiendrait debout sur un pied foulé, un nouvel équilibre violent et en quelque sorte ‘caricatural,
Vhomme
assis
sur
le défaut
qu’il s’est
choisi, une véritable décomposition (en prenant composition au sens pictural). — Question : si le damné ne peut trouver une satisfaction, ou plutdt un équilibre, dans le sentiment que son supplice est conforme 4 la Justice,
et quwil aide
a la manifester,
que
lui aussi
somme toute rend gloire 4 Dieu [6] 4 sa maniére? Comme les déformations et monstruosités rendent témoignage aux grandes lois naturelles et sont souvent le meilleur moyen de les expliquer et de les manifester — Ace point de vue une source d’instruction et de plaisir pour les savants. « Je rends gloire a Dieu par mon supplice. » Il sert 4 faire éclater tel aspect de la Jastice de Dieu : éternellement — il brille de cette lumiére qu’il repousse®. Autre question : en admettant une espéce de bonheur naturel — de paradis naturel (les Limbes) — pour les ames naturellement justes, n’y aurait-il pas lieu d’admettre une espéce de souspurgatoire préparatoire? — Opera enim ejus sequentur lum. Donc les bonnes ceuvres méme des méchants les suivront, ils en recevront la récompense mélée a
leur supplice, du bien mélé a ce mal. Origine des nations et du nationalisme : Ab his divisae sunt insulae gentium in regionibus suis, unusquisque
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secundum linguam suam et familias suas in nationibus suis (Gen.)}. Toto certatum armée,
es corpore regni (Virg.)®.
La nation
En Angleterre la propreté (relative) s’explique a la fois pat le besoin de se nettoyer (poussiére de charbon partout) et par labondance de l’eau chaude. Les sports par Vabondance des prairies et des petites cuvettes qui font autant d’arénes naturelles ot le village peut se grouper.
Le nom de Barrabas signifie : fils du pére*. Au Fils de Homme les foules préférent sa caricature, sa contrefacon,
La Colombe en hébreuIEmOnA, les quatres voyelles de Jéhovah IEOA, dont la seule articulation causait la mort. Freud prétend que le chiffre 3 est le symbole de Pappareil masculin.
Ce recueil de pensées, de souvenirs et de citations ressemble assez aux journaux de la poétesse Sei Shénogon et du bonze Bennkd'. [7] Je suis allé remercier le graveur de mon sceau de
S. Geneviéve, le plus célébre graveur du Japon, M. Kawai Sanbé, dans sa petite maison dont la cour contient un kiri et une touffe de bambous’. EXTRAIT
DU « LYS DANS
LA VALLEE )»» DE BALZAC
Le souffle de son ame se déployait dans les replis des syllabes, comme le son se divise sous les clefs d’une flite. Sa fagon de dire les terminaisons en 7 faisait croire 4 quelque chant d’oiseau; le ch prononcé par elle, était comme une caresse, et la maniére dont elle attaquait les ¢ accusait le despotisme du cceur. Elle étendait ainsi sans le savoir le sens des mots et vous
Juin 1923
Gor
entrainait dans un monde surhumain. Combien de fois n’ai-je pas laissé continuer une discussion que je pouvais finir ?combien de fois ne me suis-je pas laissé injustement gronder pour écouter ces concerts de voix humaine? pour aspirer l’air qui sortait de sa lévre chargée de son Ame, pour étreindre cette lumiére parlée... Quel chant d’hirondelle joyeuse, quand elle pouvait rire! mais quelle voix de cygne appelant ses compagnons, quand elle parlait de ses chagrins?! Nom d’un parfum insinuant et modeste mettez-moi.» « Il y a quelqu’un! »
: « Per-
Défaut de toutes les Gluvres d’art occidentales, c’est
trop rempli, trop bourré, on en veut trop. On a voulu ‘tout dire sans rien passer, tout exprimer. Pas seulement les peintures, mais les dissertations philosophiques, les ceuvres d’art. Pas une transition, pas une conséquence n’est omise. Dans les piéces de théatre, abondance d’explications, de récits, de préparations, de détails de toute espéce, de [8] dénouements, tandis qu’au fond il n’y a d’intéressant que 2 ou 3 situations dramatiques trés courtes, les seules q{ue] conserve le nd japonais?. 24 juin. — Exposition des dessins de Tomita Keissen pour mon édition de luxe de la Sainte Genevieve®. S. Jean. Celui qui enléve les pierres, prépare la route, etc. Travail profane et rationnel dans les ames avant la venue du Christ. Enlever les pierres, enlever les objections, aplanir les routes, calmer les passions, les rectifier, reCtifier le jugement, assainir l’imagination, supprimer les détours, paresse, frivolités, complaisance dans Vinutile, combler les fissures, établit
des ponts et des passages, permettre a la volonté droite de passer sans étre arrétée par de prétendues impossibilités matérielles. The greater part of the United States of America (says Mr. Theodore Dreiser in the New York Independent ) 7s
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Cahier V
not able to think. It has material prosperity, beautiful homes, machinery galore, and yet the majority of its people have the mentality of a European or Asiatic peasant. They are concerned with their little marriages, their little deaths. National or artistic problems have no place in their lives. Take any large, successful organisation. Listen to them talk. When they donot talk business, their conversation 1s like that of children boys of nine or ten ? They know nothing of art, of science, of religion. Literature is the least thing they know anything about. Make an intelligent remark to them and they look like a pancake because it happened that you did not tell them a funny Story. This country has wealth and leisure that is,as H.G.Wells says, Staggering. But its people simply do not think. They are carried away by nuts and fool ideas. You can slam its young people into universities, with their classrooms and laboratories, and when they come out all they can talk about is Babe Ruth. Itis a hopeless country for intellettuals and thinking people. The only thing they can do is to make an existence among themselves, to have a Jreemasonry of their own from which the rest are excluded’. A. savourless people, gulping tasteless food, and sitting afterwards, coatless and thoughtless rocking chairs prickly with inane decorations, listening to mechanical music, saying mechanical things about the excellence of Ford automobiles, and viewing themselves the greatest race in the world (Main Street — Sinclair Lewis)?.
Au moment des négociations pour le rétablissement de ’Empire, les représentants des deux clans opposés aux Tokugawa, Takasagi [sic] pour Choshiu et le fameux Saigo pour Satsuma, convinrent d’avoir une entrevue chez une poétesse célébre de l’époque, Madame Botoni Marano, C’était ’automne, le moment
des arbres aux feuillages enflammés et des journées sereines. Les deux hommes d’Etat ne dirent pas un mot de politique. Ils [9] passérent la journée comme les anciens Sages 4 se promener dans la montagne, a ramasser des champignons et 4 les faire cuire sur un feu de branches séches. Mais l’entente était conclue. Et la seule allusion qui y fut faite fut un poéme de
| |
Juin- Juillet 1923
603
31 syllabes improvisé par Botoni Marano : Pour faire un beau brocart il ne suffit pas d’un seul fil’. Innumerable of Stains and splendid dyes as are the tiger — moth’s deep — damasked wings (Keats)?. D/’aprés les récentes découvertes Américaines (Russell, Mount Wilson)* les nébuleuses seraient faites d’une poussiére ténue sans cesse émise par les étoiles chaudes (bleues). Ainsi les nébuleuses viendraient des étoiles et non pas les étoiles des nébuleuses. L’assassinat est le plus grand des crimes que puisse commettre un honnéte homme (G. K. Ch.) ?
Le cocktail avant le déjeuner est un raccourci vers la sympathie comme le viol vers ’amour’. Du 2 au 13 j[uille]t,
/
4 Chuzenji, pluie et brouillard ,
glacé continuels. La forét dans l’eau. Les orchidées roses sur le chemin plein de feuilles mortes. Descente
le 13. Arrivée
de M. Jean Boyer®, le délégué
du
Ministére des Finances, le 14. Diné le soir a ?Hotel Oriental.
Le petit ménage Glycérine.
de M. Glycérin et de Madame
Insanis, Paule (AGtes, XXVI, ad insaniam convertunts.
24), multae
te litterae
Paroles de Dieu 4 Abraham : « Sors de ta patrie, abandonne tes amitiés et ta maison paternelle’. »
Paroles derniéres de Dostoievsky citées par Persky : Je parle, disait-il, « du socialisme dont la fin et le but sera l’Eglise universelle des peuples, réalisée sur la terre pour autant qu’elle y trouvera place. Je parle de l’éternelle soif d’amour du peuple russe, de ce besoin @union
générale,
complete,
au
nom
du Christ.
Et
tant que cette union ne sera pas réalisée, l’Eglise ne
604
Cahier V
sera pas complétement
édifiée,
la priére, mais
dans
encore
non seulement dans
la réalité.
Néanmoins,
Pinstin& de cette Eglise, le besoin parfois presque inconscient mais vivace de cette Eglise, existent 4 n’en pas douter dans des millions de cceurs russes. Le socialisme
des Russes n’est ni le communisme,
ni la
possession des forces mécaniques. Ce peuple croit qu'il n’aura le salut que par union universelle en Christ?. » A Asakusa grand dans sa petite cage.
orchestre
de grillons, chacun
D[imanche] 22 [juillet]. — Promenade 4 Miyanoshita avec le célébre as Italien Locabelli, ami de d’?Annunzio?.
Henrion® 4 la nouvelle uvre — 37 rue Boulard — Paris (XIV®).
[10] Contre lantiquité immémoriale de Phomme. — Si le taux a€tuel d’accroissement de l’espéce humaine continuait, la population totale du globe serait exprimée par le chiffre 18 suivi de 80 zéros. Chaque étre humain aurait a sa disposition un espace d’un pied et demi. Si Phumanité, comme on le prétend, date
de millions d’années, ot sont passées les myriades qui nous ont précédé [sic]? Si lon dit que lhumanité pendant cette période n’a compté qu’un petit nombre de représentants, comment expliquer la survivance de ce petit nombre, spécialement handicapé par sa faiblesse physique, puisque l’intelligence rudimentaire possédée ne lui servait 4 peu prés a rien? d’autant plus que les conditions devaient étre plus adverses ?— Comment expliquer cette transition brusque entre la sauvagerie et une civilisation développée? — L’intelligence ne se développe pas par degrés, il n’y a pas de plus ou de moins. Qu’est-ce qu’une intelligence qui ne comprendrait que certaines choses? elle serait plus inutile que linstin@. Le propre de Vintelligence est de comprendre le général. En auto. — Un coup de vent emporte mon chapeau.
Juillet-Septembre 1923
605
— Trois Japonais dans une boutique instantanément congelés dans une espéce d’extase et ne reprenant vie, mouvement, souvenir, sentiment? et respiration qu’au moment ou je démarre de nouveau. Promenade sur le bord de la mer, 4 Chiba?. Effroyables quartiers ouvriers, tanneries, produits chimiques,
puanteurs de chair corrompue et de soufre, dans le brilement de la canicule et l’étouffement de la poussiére.
Post parietem (Cant.). Et in nomine tuo transgrediar murum (Ps. XVII). Tolle quod tuum est et vade (Matth.)*.
Quand mon corps en résistant a la lumiére produira de la musique.
La nuit. La pleine lune éclairant le bas de ma moustiquaire. Dans le vers alexandrin le Francais montre sait compter*.
qu’il
Une pensée et sa réflexion. '
[11] Deux pages de notes prises en aott a Chuzenji ont disparu dans V’incendie de l’Ambassade’.
|
Le 1€" septembre, a midi, violent tremblement de terre (V[oir] mes notes dans les Ledures pour tous,
| ) _.
demandées par René Doumic!)*. A 5 h. départ pour Yokohama avec le C[ommandan]t Tétu. A 9 h. arrivée devant Y[okohama]. Nuit sur le talus du chfemin]
| defer. Le 2,4 5h.,entrée 4 Yokohama. Pateck. L’ André| Lebon. Déjardin. Sauvetage des Frangais du Id//anez. Le 3, départ a pied pour Dzoushi. Ma fille a failli étre |
'
enlevée par un raz-de-marée.
Le 4, Dz[oushi]. Le 5,
Yokosouka, retour par un destroyer 4 Yokohama. Le 6, V André-Lebon ; scéne avec le Prince de Béarn’. Le 7, retour 4 Tokyo. Le 8, Voruz’. Le 9, les 2 vieilles
606
Cahier V
sceuts envoyées 4 Y[okohama], l’orpheline Russe. Le 15, Chuzenji, dans le cycléne. Le 16, Chuzenji, mes
enfants q[ui] vont partir. [12] Le 1[€7] [septembre], 4 8 h. du soir,
Ambassade
a bralé avec tout ce que j’avais, meubles, vétements,
bibelots, gravures, livres, etc. J’ai perdu le 3° Acte du Soulier de Satin que j’étais en train de recopier, 2 études préparatoires sur les Eaux, un grand poéme en prose sur Angkor (du genre de la Connaissance), les poémes d’amour qui formaient le théme du Partage de Midi, reg
5 Volumes
annotés
de S. Thomas,
etc.
F.V.T.1. Beaucoup de notes et de brouillons. Melior est causa causae quam causa causati. Les causes secondes. Mais elles ne travaillent pas seules. C’est Perreur de Descartes. Dieu 4 aucun moment ne cesse jamais d’étre cause.
Il est éternellement
Ate,
étant
éternellement actif. Les causes secondes ne travaillent que dans un contaé et dans un rapport continuels avec Lui. Virgo potens. Sedes sapientiae*. Dimanche
23
[septembre].
Visite
a2 Yokohama.
Un ciel gris, le vent qui soufle sur cette cendre et cette poussiére, cette ville affreusement secouée et détruite, Podeur, les tas de charbon qui brilent depuis
3 semaines. Visite a2 bord Schlisher et Moscycki.
de |’Algo/ avec Madame
Le 25 septembre, départ de mes 3 filles, Marie, Reine
et Renée, pour la France a bord de /a Cordilliére. Commandant Poggi, Dr Béchamp. Je m/’installe avec ma femme al’ Impérial Hotel. Sut la chance et le calcul des probabilités. En fait le geste du croupier qui lance la bille n’est pas soumis au hasard, bientdt i est assujetti a2 une espéce de rythme, de série*, de récurrence. Celui qui a la chance se trouve dans une espéce d’état hypnotique dans lequel il communique avec |’état moteur du croupier
Septembre 1923
607
ou du donneur de cartes. La chance serait une espéce @hypnose. L’hypothése mathématique du hasard est fausse. En réalité toute combinaison a toujours une cause. Une combinaison qui n’aurait aucune cause ne se produira jamais en dépit de sa possibilité mathématique. [13] Louis XV et les saisissante, un exemple Dieu racontée par des quwils écrivent (les G.)1. nuit de débauche,
sceurs de Nesle, une histoire terrible des jugements de gens qui ne savent pas ce Louis XV, ivre, aprés une
assistant a la messe avant d’aller se
coucher. Le cadavre nu de la Vintimille insulté par la populace de Versailles. La Chateauroux frappée a Pinstant méme ot elle vient d’obtenir le parjure et Papostasie de son amant. C’est aussi beau que la Bible. {
Ensuite Dieu se détourne
de Louis XV.
I] l’oublie,
jusqu’au moment ot il tombe vivant en putréfaction. A Honjo, les 34 000 victimes de l’incendie avant de
périr se levent sur leurs pieds trois fois de suite pour pousser une grande clameur?. « Domine, quid me vis facere’?» dit a peine jeté par
terre l’impétueux S. Paul. Mais ce n’est pas si facile dobtenir une réponse. Peut-étre avant de faire quelque chose faut-il étre refait soi-méme. simplement laisse faire.
Ceux
que Dieu
[14] Tant d’occupations vaines. Peut-étre simplement le voile laissé a la Grace qui fuit si on la recherche directement. Ou ces choses qui épuisent et amusent* homme vain. — Un travail se passe par derriére.
Rien désirer, rien demander, rien refuser (S. Fr[ancois| de Sales)°. Ce qu’il y a a faire, c’est uniquement de cultiver les livres traditionnels pour s’exercer aux Poésies, aux Annales, au Livre des Mutations, aux Rites; de se garder de contrevenir par un excés de liberté aux
608
Cahier WV
régles des anciens Sages; de se garder de faire injure aux enseignements des maitres antérieurs, de maniére 4 ce que de nos lettrés et de nos fonétionnaires en un seul corps émane en toute pureté la loi éternelle de la vertu et des principes du ciel; alors notre doétrine sera maintenue sans qu’on pense 4 la maintenir et la doétrine étrangére sera réfutée sans qu’on pense 4 la réfuter (Edit du Roi de Corée 1837 contre les Chrétiens). Medius autem vestrum Stetit quem vos nescitis (S. J[ean]). Au milieu de vous, dans la rue, au bureau, a |’hétel, dans ce wagon encombré, au bal, au théatre. Et aussi au milieu de vous-mémes, au milieu de vos passions, de vos ambitions, de vos idées, de vos souvenirs, heurté, coudoyé, bousculé. Medius, au centre. Stefzt,
toujours debout avec la croix — D[om|ne, tuus est locus iste et nesciebam (Jacob dans la Genése). Locus iffe, c’est mon coeur. — Pourquoi ne le vois-je pas? Fac ut videam. Pour lentendre il faut que j’apprenne peu a peu son langage qui est le silence. S. Th[omas] d’Ag[uin] [aprés] S. Augustin dit que les plantes n’ont pu étre créées le troisiéme jour que causaliter, in ratione seminali?.
[15] Pendant que j’ «amuse» a genoux écoute Dieu?.
le diable, mon
Ame
Pour se justifier me suffira-t-il de dire : je n’ai rien fait? Une clairiére dans la forét. C’est un cimetiére. Deux
lanternes blanches au-dessus d’une tombe, qu’éclaire le soleil couchant.
Chuzenji du 13 au 19 octobre. Yumoto 2 D[oéteu|rs Motais et Laurence.
avec les
Odfobre 1923
609
Non pas aux vertus par le Christ, mais au Christ par les vertus. Les vertus ne sont pas des fins en soi; elles ne sont que des moyens. Pater, imple quod fecisti. Ce vase q[ue] t[u] as fait.
_
Pater, dit PEnfant Prodigue, peccavi in coelum et coram te. — Contre la création tout entiére et spécialement contre le monde des Causes (le Ciel, ce qui meut et ce qui regarde) — Declinaverunt oculos suos ne viderent coelum (Dan. les Vieillards)! — (V[oir] p. 46). 4 préceptes envers le Prochain : Orate — Amate — Benedicite — Benefacite. — Pourquoi les catholiques, spécialement les laics, ont-ils si peu de charité envers le prochain? — D/’abord parce que placés dans un état de lutte continuelle,
entre les
2 mondes,
et ne
possédant ni l'un ni lautre, ils sont dans un état de souffrance et, par conséquent, d’énervement.
Ils sont
déja désacclimatés de celui-ci et par conséquent on ne peut pas leur demander d’y étre heureux « comme un poisson dans l’eau». Un milieu continuellement [16] irrespirable. Rien que des gens qui ne vous comprennent pas et qfue] l’on a cessé de comprendre! — Impuissance de leur faire du bien q[ui] devient trop facilement de la bouderie et de l’irritation. — Sentiment de ses propres faiblesses comme un homme qui martcherait continuellement dans un chemin difficile et plein de pierres (la pierre de scandale). — Soudaineté des tentations contre la charité. — Entrainement continuel. — La est la cause profonde de toutes mes fautes, méme de celles de ch[asteté]. Il n’y avait ni Vétre ni le non-étre, il n’y avait ni Vatmosphére ni le ciel au-dessus. Qu’est-ce qui se meut? En quel sens? Sous la garde de qui? Y avait-il les Eaux et le profond abime?r — Ni la mort n’était alors, ni ’immortalité. Le jour n’était pas séparé de la nuit. Seul Un respirait, sans souffle étranger, de
lui-méme, et il n’y avait rien d’autre que lui. — Alors s’éveilla en lui pour la premiére fois le désir, et ce fut
610
Cahier V
le premier germe de !’esprit. Le lieu de l’étre, les Sages le découvrirent dans le non-étre, les sages s’efforgant pleins d’intelligence en leur coeur (Hymne védique). On ne peut le désigner que par : Non! Non! — Sat : Celui qui Est — Tat : Cela — L’Etre Antique, inaccessible 4 tous les sens, Etre
Etre
enveloppé
d’ombre,
enfoncé dans Vinconnu,
habitant
de
l’Abime
(Kathaka Upanishad ).
L’Enfer n’est pas occupé a autre chose qu’a vérifier la formule de l’Islam : Il n’y a pas d’autre Dieu que Dieu sf[ous]-e[ntendu] qui est séparé radicalement de tout le reste. L’Islam a proclamé un Dieu infranchissable. L’Enfer est une vérification du Non-Etre (un peu comme IlArt). Une expérience indéfiniment conduite sur ce qui n’est pas Dieu. Elle peut avoir une beauté désespérée. Ainsi se réconcilierait le dogme du supplice de ?Enfer et de la Justice qui réclame une récompense pour les vertus naturelles. L’4me éternellement arrétée sur une création dont elle ne cesse d’expliquer 2 Dieu l’insuffisance. Turbae te comprimunt et affligunt (S. Luc)}. [17] Plus ultra. Devise de Charles-Quint
—
Nee
plus ultra: L[ouis] XIV.
Maladie de Reine : 20-31 o€tobre* — 14 nov[embre].
Audi, filia, et inclina aurem tuam — Auditam mihi mane fac misericordiam tuam — Auditui meo dabis gaudium et laetitiam®. J. Benoist-Méchin! m’écrit qu’il s’est converti, qu’il s’est confessé et quwil a communié pour obtenir de Dieu mon salut pendant les jours du tremblement de terre. Gaston Paraire® dans le méme but a fait le sacrifice de sa petite fille mourante.
Le 31 oétobre, inauguration du dispensaire, distri-
Odfobre-Novembre 1923 bution
611
de vivres, garderie, élevés! sur le terrain de
? Ambassade (tennis) sur les fonds de l’Indo-Chine, en présence de la Princesse Kuni et du Minfistre] des A[ffaires] Etr[angéres] baron Ijuin. Les Sceurs de S.-Paul de Chartres dont l’établissement de Kanda a été brilé sont établies sur la terrasse devant mon Ambassade brilée. Elles y ont une petite chapelle. C’est une sanctification de tout ce terrain. Tous les jours pres de 500 pauvres, surtout des femmes, des enfants et des vieillards viennent recevoir leur pitance. 50 malades regoivent des soins et des remédes. Une douzaine d’enfants déja a la garderie. Je suis touché de l’émotion et de la sollicitude que la nouvelle de ma mort a éveillées en France et en
; Rurope. Il y a beaucoup plus de gens q[ui] m’aiment et me sont reconnaissants que je croyais. Ingratitude?.
Entreprise de transports en commun de M. Obscur Infelix Faible Boyau’.
—
Pensées
« Dés les premiéres nouvelles regues du Japon j’ai été affreusement tourmenté sur v[otre] sort. Je me disais bien q[ue] Dieu ne pouvait vous retirer de nous avant q[ue] v[ous] ayez terminé v[otre] tache. Mais... Alors il m’est arrivé une chose étrange et bien simple : jai fait le voeu de me confesser et de communier si v[ous] étiez sauvé. Je Vai fait. Et ma foi q[ui] était suttout jusqu’ici une adhésion de l’esprit, [18] un gout esthétique, s’est transformée soudain en quelque chose de si miraculeux, de si admirable, de si puissant.
Oh! comment exprimer ce que je ressens ?V[ous] n’en avez pas besoin, v[ous] me comprendrez sans doute. Et ce sentiment est aussi beau q[ue] P’idée q[ue] v[ous] vivez. Je vais maintenant en tout chercher 4 le perfeétionner et a l’approfondir! » (16 septembre)*.
Chapitre des incorrections des perfectionnistes : Si tu ne savais la conduire se refroidir (P. V., Epalinos)*. Mes enfants arrivent en France le dimanche vembre,
18 no-
612
Cahier WV
[19] En détruisant la statue le tremblement de terre n’a laissé du grand homme sur le piédestal qu’une paire de jolies bottines en bronze’. 2 cotrespondants me citent le psaume XC?. Oui respicit terram et facit eam tremere (Ps. CIII, 32)°. Du 29 novembre au ro déc[embre], tournée dans les villes de Ouest,
Kyoto,
Osaka, Kobe, Nagoya,
Shidzuoka avec Roger, VAttaché Commercial. Le cimetiére forestier ou repose le P. Amientis. Visite de manufactures. Travail de nuit des femmes. Les petites filles passant la nuit la téte entre une broche et une lampe éleGtrique. Les femmes marchant toute la nuit comme
des somnambules
en
avant,
en
arriére,
au
rythme des renvideuses. Distribution de décorations. Madame
André, la grosse matouchka.
Shidzuoka, la
tombe en laque noire de Ieyasu’, un nid d’aigle®, ot Yon parvient par un escalier en zig-zag (kumo-san). Le site de la Robe de plumes, une forét de pins dans le sable prés de la mer. Une stéle marque V’endroit ot Pange est apparu’. Tout le monde est édifié de la piété de mon petit Henri qui ne doute pas un moment que son infirmité ne soit pour le bien de toute la famille.
[20] L-homme qui produit un aéte impur obscurcit peut-étre des milliers de cceurs qu’il ne connait pas, qui correspondent mystérieusement a lui et qui ont besoin que cet homme soit pur comme un voyageur mourant de soif a besoin du verre d’eau de ’Evangile’. — Tout homme accomplit librement un atte nécessaire (Léon Bloy, ap[ud] S. Fumet)s. L’Esprit Saint, captif, exilé chez les hommes et recherchant le Pére avec des cris inénarrables?. Le caractére de la distinction théologique entre le Fils et le Saint-Esprit regoit en bas le témoignage obscur de Vantagonisme qui subsiste jusqu’A la consommation des siécles entre la Sagesse et l’Amour
(ibid. )»®.
Novembre-Décembre
1923
613
9 déc[embre], mort de Barrés — 4 déc.
Arrivée de Mons[ieur] et Madame Toublet. Cyprius Ballet — Gérard Vasseur.
Non est respiratio mihi (Oratio Manassae regis Juda)!. Du Merle de retour de Foutcheou m’apprend que Lin Fan (Vinterpréte Chinois étroitement mélé a ma vie la-bas et a toutes mes aventures de 1900-1905) s’est fait moine taoiste et porte le petit chignon?. Curieux que toutes les personnes mélées 4 ce drame « have got religion »?’. L’esprit anglais : « Je ne suis jamais satisfait tant que je n’ai pu faire un modéle mécanique de l’objet; si je puis faire un modéle mécanique, je comprends; tant que je ne puis pas faire un modéle mécanique, je ne comprends pas.» Une représentation concréte et mécanique. I] faut que ca marche (Lord Kelvin ap[ud] B. Brunhes, /¢ Dégradation de énergie)’. Energie est un mot tout récent, usité seulement depuis une cinquante d’années et inventé en Angleterre pour exprimer un fait purement scientifique, une certaine capacité de travail (zbid.)°. j
\
{ 4
La charge éleCtrique toute seule, sans matiére, posséde une certaine inertie, l’inertie électro-magnétique... Des expériences nombreuses sur les corpuscules négatifs que transportent les rayons cathodiques et sur des corpuscules pareils émis par les corps radio-attifs conduisent 4 la conclusion que toute Vinertie de ces corpuscules est de linertie électro-magnétique [21] due a leur charge électrique, sans aucune addition d’une énergie complémentaire. Donc il n’y a pas de matiére ordinaire associée dans ces corpuscules a Pélectricité. Et par conséquent de lélectricité toute seule peut donner lieu 4 ces effets d’inertie par lesquels on définit d’ordinaire la masse ou la guantité de matitre dun corps. — Si l’on admet que l’atome matériel se
614
Cahier V
résout en une multitude de ces corpuscules élémentaires qui ne sont que de l’éle@tricité, on raménerait la matiére elle-méme 4 étre expliquée par l’éleétricité, et les propriétés de la matiére 4 des propriétés électriques (zbid.). Or éleétricité = mouvement. Dans un monde ot tout est mouvement, ou plut6t mouvements divers, il faut que tout soit calcul, rapport, nombre, harmonie,
c[’est]-a-d[ire] raison et volonté?.
L’inertie életro-magnétique résulte de la résistance que rencontre la création du champ électro-magnétique pat le mouvement d’une charge életrique?. 28 déc[embre]. — Attentat contre le Prince Régent.
Les fleuves ne remontent pas vers leur source, mais ils y descendent (la mer)*. Propositions de Thomson : 19/ Il y a adtuellement dans le monde matériel une tendance universelle 4 la dissipation de lénergie mécanique ; 2°/ Toute restauration de énergie mécanique qui ne serait pas plus que compensée par son équivalent de dissipation est impossible dans les phénoménes que présente la matiére inanimée et probablement n’est jamais effectuée non plus par le moyen de la matiére organisée, q[ue] celle-ci soit enfermée dans la vie végétale ou soumise a la volonté d’une créature animeée. 39/ La terre doit avoir été dans le passé, a une époque [22] séparée de nous par un temps fini, et sera dans Vavenir, a une époque séparée de nous par un temps fini, impropre a l’habitation de ’?homme tel qu'il est constitué a présent, a moins qfue] des opérations n’aient eu lieu ou ne soient destinées a étre accomplies, qui sont impossibles sous l’empire des lois auxquelles sont soumises les opérations connues q[ui] ont lieu actuellement dans le monde matériel‘. Tout va vers un état de chaleur homogéne'.
Décembre
1923
615
Réflexions de fin d’année. Le monde a un sens, va dans un sens}. Il est impossible qu’il aille indifféremment dans les deux sens. Le mouvement ne peut se remonter lui-méme. Le monde a été initialement remonté par une force étrangére a toutes les lois dont n[ous] contemplons aCtuellement Popération. Toutes les parties du monde ayant achevé |.
de descendre
la cataracte,
ayant
achevé
leur tache,
~ entrent dans un état de danse éternelle. « Nous allons a PEsprit (Rimbaud)*.» Il n’y a pas de phénoménes réversibles. C’est une négation aussi importante que celle de la génération spontanée par Pasteur. L’Evéque avec sa grande barbe au milieu des petits
enfants qui se poussent contre lui : Exercent balatum. ?
Le 25, Arbre de Noél pour les enfants pauvres aux ceuvres de |’Amb[assade]*.
L’ordre parle 4 la raison, mais le désordre parle a Pimagination!. Le secret de la sainteté est de laisser faire Dieu et de cesser d’étre a sa sainte volonté aucun obstacle’. Une confiance naive.
CLAUDEL
V - 23
23
1924 1€f janvier. — Temps froid et couvert. Pas de réception. Une simple inclination devant le Prince Régent. Le soir diner 4 tous les Frangais présents a Tokyo. Cette année est l’année du Rat, animal de bon augure d’aprés les idées japonaises, a partir de laquelle recommence le cycle des XII animaux. Le matin tout un paquet de lettres de nos enfants. [23] La nature est symbole et histoire est parabole?.
Je regarde mes mains ridées. Le Saint Nom de Jésus. Le nom sert a signifier, a résumer,
a personnifier,
4 évoquer,
a proclamer,
a
acclamer, a attester, 4 appeler, a supplier, a posséder, a communier. Quand je dis Jésus, ;’émets le Verbe, je partage le pouvoir du Pére. Je posséde en moi le pouvoir de produire Jésus, je posséde Jésus. Il se dissout dans mon cceur sous les espéces de la sonorité?.
Uniquement occupé 4 ne pas mourir. Le bien est plus intéressant que le mal parce qu’il est plus difficile.
Entre le pouce et le doigt de pied il saisit un charbon ardent. Le 6, représentation de Nd: Okina. La priére du vieillard, lente prosternation majestueuse, le masque
Janvier 1924
617
apporté solennellement dans une boite de laque d’or; trés beau, il date de roo ans, les 6 plis confluents des muscles de la joue énergiquement Sstylisés. La seconde
pattie, ’occupation de la terre travaillée de toutes parts par la pluie: tiaou (un cri de la gorge) ouakan — ouakan — tantan! L’homme allant regarder et examiner de toutes parts. 3° partie. Le travail des champs. L’esprit noir avec un sistre d’or qui est un goupillon et un semoir, les gouttes d’eau q[ui] se détachent remplacées par le son. Les 2 masques des vieux [puis] dans le NO suivant, la vieille avec ses yeux fermés. Tout cela conservé pieusement dans des enveloppes de soiel. Ij janvier, 4 6 h. du matin. Violent tremblement de kerie, Voyez s’afine.
lor, plus v[ous] le faites fondre,
plus il
Quand il est purifié a 24 carats, il ne se réduit
plus a quelque chaleur qu’on le soumette, car il n’a plus @alliage impur qui se puisse consumer. Ainsi en va-t-il de l’4me q[ui] se purifie au feu divin. Dieu l’y retient jusqu’a ce que le feu ait consumé en elle toute imperfe€tion, jusqu’a la pureté de 24 carats. Alors lame devient impassible parce qu’elle n’a plus rien a fournir au feu. Et si elle était retenue dans les flammes, une fois qu’elle est ainsi purifiée, le feu ne lui serait plus une peine. Ce lui serait, au contraire, un feu damour divin, comme celui de la vie éternelle sans
aucune souffrance (S. Catherine de Génes)?. [24] Aucune langue ne peut comprendre la rigueur du purgatoire. Il est ’égal de l’enfer quant a la peine
(id.)®.
Lorsque l’4me se trouve en chemin pour retourner a ce premier état dans lequel Dieu l’avait créée, elle éprouve un désir si ardent de se transformer en Dieu que son purgatoire est proprement ce désir. Le purgatoire en tant que purgatoire la fait souffrir, mais il n’est tien si on le compare 4 cet instinct sans cesse contrarié
618
Cahier V
dans son élan vers Dieu. Voila pour elle la souffrance des souffrances, son vrai purgatoire. — ... Cette faim croitrait toujours, car le désir de manger ne peut diminuer. Or le pain existe. II le sait, le malheureux, il ne peut le voir. Plus il en approche, plus sa faim est irritée, plus son jetine devient intolérable. S’il était certain de ne jamais l’atteindre, alors ce serait lenfer... mais les Ames du purgatoire ont l’espérance de voir ce pain qui est N.-S. J.-C., notre vrai Dieu, n[otre] sauveur et n[otre] amour. — La peine ne diminue pas : ce qui diminue uniquement, c’est le temps (?) de sa durée. — Le feu consume cette rouille et de cette maniére l’4me se découvre de plus en plus 4 la lumiére divine. Un objet recouvert ne peut étre frappé par le soleil. Ce nest point la faute du soleil qui luit toujours, mais celle de VPobjet qui intercepte ses rayons. Ainsi la rouille du péché recouvre ame q[ui] se consume au feu du Purgatoire. Plus ce voile braile, plus l’4me refléte le vrai soleil q[ui] est Dieu. — Leur allégresse
croit d’autant plus qu’elles s’approchent davantage de Dieu. Or, voyant tout en Dieu elles sont plus attentives ason amour q[ue] non pas a leurs peines. Que dis-je? les peines ne leur sont rien en comparaison de l’estime qu’elles font de Dieu. Car la moindre petite vue q[ui] se puisse avoir de Dieu surpasse toute peine et toute joie q[ue] Phomme puisse concevoir. Et cependant la joie en elle n’enléve rien 4 la peine, ni la peine 4 la
joie (id.)».
Tete d’Or. A 20 ans du haut de Chinchy regardant derriére le Géyn cette large vallée qui s’ouvre vers Paris et le soleil couchant. Ce désir de la possession de Univers que j’ai réalisé’. [25] Cette résistance par quoi la lumiére devient en moi sonore’,
Les noces de Cana. Non habent vinum. Le froid prosaisme du ménage. Ah ils se plaignent de n’avoir pas de vin, qu’on leur en flanque dix tonneaux! Le vin, le feu
porté sur l’eau, l’élément qui pénétre, qui dilate, qui
Janvier 1924 vivifie,
qui échauffe,
qui ouvre
619 le coeur,
qui rend
sociable, qui donne des idées!. L’esprit. Le sucre fermenté, La belle couleur rouge. Qui inspire l’héroisme. Le vin qui germe les vierges. Les protestants q[ui| boivent de la glace. Mardi 22/1. — Par un froid radieux visite a la léproserie de Kéyama prés de Gotemba. L’immense Fuji dans sa tunique de neige aux franges d’argent que nous mesurons de la base au faite ressemble 4 Dieu. Tous les lépreux en colonne viennent 4 la porte de Pétablissement 4 ma rencontre. En avant la musique, grosse caisse, tambour, cymbales, clarinette, cornet a
piston, violon estropiant /a Marsei/laise. Les instruments de musique sortant de toutes ces figures 'gonflées, eflacées, ou hideusement déformées (le mufle
léonin). Ce n’est pas le chceur des Anges Musiciens de Botticelli. Tout cela m’accompagne en triomphe jusqu’a la maison du P. Drouént de Lézey. C’est un vigoureux vieillard de 76 ans 4 barbe blanche, Lorrain, avec la physionomie caractéristique du pays. II est la depuis 6 ans. Auparavant 30 ans a Kchigo dans la région la plus sauvage du Japon sans avoir vu un Européen. Il me parle avec horreur et épouvante des tentations des missionnaires au Japon en raison de la facilité des femmes. Jamais eu autant de consolations qu’avec ses chers lépreux, tous saints et innocents. « Ils sont gentils! ils sont charmants! » Aprés le déjeuner visite de |’établissement. Le pourrissoir 14 ou sont les malades le plus gravement atteints qui attendent la mort. La un professeur de 25 ans qui n’a plus aucun age. Plus de visage, plus de cheveux, plus de traits, ni yeux ni nez ni bouche, une masse de chair informe remplie d’ulcéres purulents. D’autres 4 peu prés dans le méme état. La figure n’est plus qu’une espéce de vague omelette
boursouflée.
D’un
cdté
les
hommes,
de
Vautre les femmes, la chapelle au milieu. Le mendiant devenu pharmacien. De temps en temps ils donnent des représentations théatrales. Les aveugles travaillent dans la grange. On me photographie au milieu d’eux. [26] Atmosphére de surnaturel, immense émotion,
620
Cahier V
L’4me qui se réfugie bien loin au-dessous de cette chair détruite comme une taupe sous la terre remuée. Ils recoivent tous le Bon Dieu tous les matins. Le Pére les caresse,
les serre dans ses bras. Une
jeune
fille faussement crue lépreuse amenée ici et y restant par dévouement. II l’appelle ma famillet. — En revenant en auto a toute vitesse. Une auto les roues en Pair dans le fossé. Danjobu! Et allez donc! On ne meurt qu’une fois. Orangers. Avec moi les Doéteurs Bellet et Laurence. chartreux.
Le P[ére] D[rouént]
a 2 fréres
Christus sibi non placuit (Rom.)?. Contre les égotistes. Le néant peut ne pas étre pris seulement dans un sens négatif. Il peut avoir une valeur positive, constructive. Comme le vide qui est /’déme d’un canon’.
Veritas liberabit vost. Vous ne serez délivré qu’en comprenant. La vérité comprise qui au lieu de vous faire l’esclave des étres et des choses vous en fait le dominateur. La liberté, c'est d’étre maitre, et non pas de choisir entre des maitres différents.
S. Francois de Sales. Importance des devoirs d’état. L’instrument de notre expression et de notre sanctification tel qu’il a été choisi par Dieu et non par nous. La meilleure croix est toujours celle qui nous est imposée.
26 J{anvier]. — Mariage du P[rin]ce Régent q[ui] n{ous] recoit le 29. Etudions quelques strophes de ce poéme législatif (le Code Civil)5.
Des yeux humains q[ui] me regardent a travers ces vieilles boutonniéres éraillées. Alors je finissais d’étre commencé d’étre vieux®,
jeune et maintenant
j’ai
Janvier-Février 1924
621
Ut omnibus evacuatis et licentiatis solus cum solo uniaris
- (Imit.)+.
Le fils du Président du Tribunal de Lyon 4gé de 9 ans réunissait ses petits camarades dans la salle du tribunal pour leur faire des conférences sur l’affaire Dreyfus. [27] Dans les derniers drames de Shakespeare le principal instrument prosodique est l’enjambement, la rupture de la phrase au milieu d’un membre logique, Pintroduction de blancs, comme pour laisser passer un autre sens a travers le discours disjoint. La satisfaction a une mesure invisible’. Fuit homo missus a Deo cui nomen erat Joannes® (Don ?| Juan d’Autriche, — Jean Sobieski, — Jeanne d’Arc — Jean Arthur Rimbaud).
Non point la culture du Moi, mais le culte de Dieu. Non pas « la Terre et les Morts », mais « la Mer et les Vivants »'. 16 février. —
On commence
4a construire mon Am-
bassade provisoire (en bois). Sic curro, non quasi in incertum, sic pugno, non quasi aerem verberans (S. Paul)® — Contre le sport et la morale esthétique — H. de Montherland [sic]. Curro ut comprehendam’.
Res frudificat Domino’. A propos d’un vieux ministre chauve on® dit qu’on ne distingue d’avec son crane sa figure que c’est parce que c’est 14 que s’arréte l’intelligence. Un petit vent de vinaigre.
Une pauvre petite fille intimidée. Les premiéres notes d’un trés jeune rossignol (Lettre de L.).
622
Cahier V
Comprendre dans le sens de posséder entiérement, se rendre maitre. Le 29 février, 4 2 h. du matin, incendie de la maison
de Chayet?. Ils se sauvent en sautant par la fenétre. Je recois le livre de lettres et de souvenirs de Bernhard Von Marwitz que j’ai connu en 1914 avec Seckendorff*. Je les revois encore dans ce petit café prés de l’Alster pendant q[ue] la foule hurlait la guerre. C’est une haute et pure figure que celle de ce pale Junker. Il témoigne partout pour moi d’une admiration dont je suis un peu interloqué. Publié par Otto Groutoff et imprimé chez Jakob Hegner*. Il n’y a peut-étre pas de pays ou j’aurais eu plus d’influence qu’en Allemagne. [28] The white silence of truth. Le grand silence blanc de la vérité>. Le Christ vu du dehors*. Un illuminé Juif dont ne nous reste aucun écrit, préchant pendant quelques années,
crucifié
par les Romains
sur
linitiative
et
aprés la condamnation des autorités doétrinales juives et a qui se rattache le plus grand mouvement religieux qui ait jamais agité l’humanité. — Le premier trait a remarquer c’est que l’agitation intelleCtuelle et morale puissante dont il a été l’origine ne s’est jamais traduite par une agitation matérielle et politique. Il n’y a pas trace
d’une
émeute,
d’une
révolution
chrétienne.
L’histoire profane ne fait aucune mention du Christ et de ses disciples. Le fait quia motivé sa condamnation est donc un fait purement do@rinal et ce fait a da étre extrémement grave vu la gravité de la condamnation et son exécution par les Romains, bien que l’ordre public ne fat pas intéressé. Un autre témoignage de cette gravité est la haine vouée par les Juifs 4 la mémoire du Christ (Talmud), de méme que la vertu ou si l’on veut la [29] virulence de sa dorine révolutionnaire est confirmée par la conversion de S. Paul, un pharisien entre les pharisiens. C’est notre second
Février 1924
623
point. — Troisiéme point : quel renseignement les faits a eux seuls peuvent-ils nous donner sur cette doétrine : 19/ ne s’étant traduite par aucun mouvement politique ou économique, c’est donc qu’elle avait uniquement rapport au monde des idées et de la conscience. Elle séparait radicalement le monde du fait, matériel, et le monde moral. 2°/ elle ne s’est pas | posée comme la destruction de Vancienne religion mais comme son explication et son développement. Le Christ préche partout dans les synagogues, du
haut des chaires officielles. 3°/ Cependant sa doétrine cause un scandale énorme parmi les autorités chargées officiellement de Pinterprétation et de l’administration de l’ancienne religion. Il y a donc eu de la part du Christ doétrine, et doétrine indiquée par lui comme la suite et le développement de l’ancienne révélation, mais scandaleusement nouvelle aux yeux des détenteurs de la Loi. — Quatriéme point : le fait reproché au Christ était un blasphéme, c[’est]-a-d[ire] un attentat contre la divinité, ’attribution 4 la divinité d’un caraftére
qui en avilissait la majesté. — Or le fait de S. Paul nous apprend de trés bonne heure quel était ce blasphéme et que dés qu’il y a une trace historique d’un chrétien, dés la premiére conversion authentiquement constatée [30] ce chrétien croyait que le Christ était le Fils de Dieu. — Cinquiéme point : C’était la en effet aux yeux des Juifs un scandale inoui, qui n’osaient méme plus prononcer « le nom incommunicable ». Bien plus dans toute Vhistoire humaine jamais un révolutionnaire religieux n’a osé se proclamer le Fils de Dieu (Dieu dans la plénitude de sens q[{ue] lui donnaient les Juifs) et cela pour des raisons bien simples, car il manquait évidemment et de la perfection morale et la puissance matérielle pour justifier un pareil titre. C’est encore plus vrai chez les Juifs q[ui] se faisaient une idée tellement haute de la Divinité. Il a donc fallu absojument que le Christ donne des marques frappantes et de l’une et de lautre, c[’est]-a-d[ire] sainteté et miracle. Cette nécessité était d’autant plus grande que tout en engageant ses disciples dans une voie nouvelle qui mettait contre eux toute l’autorité off-
624
Cahier V
cielle et traditionnelle du judaisme, il ne leur promettait cependant aucun avantage matériel. — Sixiéme point: Or cet homme qui le seul entre tous les étres créés a jamais osé se dire le Fils de Dieu nfous] le voyons périr dans les conditions les plus basses, les plus cruelles, les plus humiliantes, dans ?abandon le
plus complet. N’est-il pas manifeste que sa doctrine ne pouvait rester sous le coup d’une pareille défaite de son auteur? car 4 la différence des autres religions elle [31] consistait non pas dans un corps d’affirmations mais principalement dans la personne méme de homme q[ui] était venu les apporter. Il fallait donc une revanche, ila di y avoir une preuve quelconque que cet homme qui se disait le Fils de Dieu n’avait pas été vaincu. En fait nous ne voyons pas que la mort du Christ ait été suivie d’une dépression par ses disciples, il n’y a pas eu d’explication plus ou moins pénible, de consolation, d’interprétation. Elle est au contraire comme une confirmation, comme le signal d’un esprit nouveau d’entreprise. Or n[ous] voyons historiquement par S. Paul que tout de suite ce fait a été tout de suite [s/c] aux yeux des chrétiens, le phénoméne formidable, inoui de la Résurreétion. — Mais la question de la
Résurrection doit étre discutée, a part. — Ces principes posés, le probléme ainsi situé extérieurement, n[ous] pouvons aborder|’étude direéte des Evangiles (25/2/24). Ajouter : trés important : la do€trine du Christ ne s’adressait pas seulement aux Juifs mais a l’univers entier. Prouvé par sa diffusion immeédiate aprés sa mort. Elle a tout de suite été catholique. Ainsi : 1° La doétrine de Jésus engage ses disciples dans une lutte terrible (de conscience et de fait) contre Pancienne religion qui la déclare hérétique et blasphématoire (et de méme contre les religions paiennes). Mon royaume n’est pas de ce monde. 2° Dans cette lutte ils seront désarmés temporellement, sans promesse d’un triomphe temporelle [sie] — les moyens violents! leur sont interdits. 3° Le fondateur de la religion qui s’était dit le Fils de Dieu meurt crucifié et renié de tous.
Février-Mars 1924
625
Voila les conditions dans lesquelles le christianisme s’est fondé. Le bon sens n’indique-t-il pas qu’il fallait qwil y ait quelque chose dans l’autre plateau de la balance ?Comment expliquer autrement l’atmosphére énergie, de décision, d’exhilaration, qui succéde immédiatement a la Crucifixion? (Actes des Apétres.) Engager des gens qu’on nous dépeint comme laches _et grossiers dans une entreprise qu’on nous représente comme
paradoxale,
blasphématoire,
dénuée
de toute
espérance humaine, cela ne devait pourtant pas étre chose facile. Il a fallu que quelque chose se passe}. Conversion de S. Paul A.D. 34 c[’est]-a-d[ire] 1 an aprés la mort du Christ. ’ Quand on veut le faire roi il s’enfuit.
La philosophie Zen dit que les vérités suprémes ne s’enseignent pas, elles se communiquent?. Sapientia sapor boni (S. Bernard)’.
Le bouddhisme Japonais appelle ce monde-ci le monde de la couleur. Il y a la méme différence entre Barrés et un grand écrivain qu’entre un cheval et le portrait d’un chevalt.
Nirvana, en jap[onais] Nehan. Le re? mars, promenade 4 Nebukawa pour voir les montagnes démolies par le tremblement de terre. Par la vallée sinueuse un fleuve de matériaux est descendu vers la mer laissant de chaque cété de la vallée une épaisse emplatre de terre et de rochers... Avec Toublet et [de Muh.] Je ne puis aller jusqu’au bout. Signe de vieillesse. Les orangers, la mer, les pécheurs, un grand cercle de filets, la [ferme] démolie et abandonnée,
c’est tout noir dedans, le petit temple fait d’une pierre, de 4 branches de bambous
1 planche.
et d’un torii, 2 pieux et
626
Cahier WV
[32] Chaque phrase est une secousse et le tout fait comme une danse de Saint-Guy (Michelet, Hello, Carlyle). J’apprends que le Gouv[erneur] G[énérJal l’I[ndo]ch[ine] a décidé sa visite au Japon.
de
Le corps est une chose sainte, c’est pourquoi il faut le voiler. Je dois éviter de me placer dans toute situation qui rendrait ‘nécessaire l’exercice des qualités que je n’ai
pas. Se débarrasser
en faisant une
promesse
de l’envie
qu’on a de la tenir?.
6 mars, Mito? dans le Nord pour les pruniers. Un musée de vieux pruniers, dans un clos planté par les Tokugawa, chacun avec sa personnalité, sa torsion, ses mutilations, sa floraison personnelle. Les uns en
petits boutons rouges comme une chair avivée par le froid, les autres avec quelques fleurs blanches ga et la. En haut, au centre du bois de cryptomérias et de bambous, un magnifiquement réussi et épanoui, un grand bouquet de fleurs blanches dans une vapeur rose. Sur la colline dans langle formé par les hauts cryptomérias de velours tout roussis par Phiver un pavillon féerique avec le zig-zag en retrait de ses toits perpendiculaires et sur le dernier un étage supplémentaire ouvrant sur tout l’horizon le large regard de ses auvents. En avant toute une série de petits arbres taillés en boule jusqu’a la pelouse plate et au vaste paysage ensoleillé comme un premier plan de nuages devant Vhabitation d’un dieu. Dans le soleil radieux et les fleurs cris aigus des enfants de toutes parts. Les champs de riz, chacun formant une cloison irréguliére? de boue, font l’effet du craquelé des vases, donnant plus de valeur au dessin.
Le soir diner avec le peintre Yokoyama et sa femme et le poéte Yoni Noguchi.
Mars 1924
627
Le « sabbatum delicatum» d’Isaie. La plénitude exquise de ce Repos du Septiéme Jour’. A Mito (prés de Numazu) dimanche 9 et 10 m[ars]. Une petite baie au fond de rivages délicieux qui avec leurs camélias et leurs orangers rappellent la Riviera. Les vieux pins penchés sur la mer. [33] Dans le fond Yimmense Fuji neigeux entre deux iles. Par le jour ~brumeux, mystérieux et virginal. Promenades. Les 2 femmes, la belle-mére et la jeune bru, qui tapaient
avec de gros maillets dans un mortier de bois pour piler le riz. Quelle vie simple et innocente!
Les marrons, symbole de la vie érémitique.
Et facta facies ejus, dum orabat, velut altera (S. Luc)’. La face du Christ nous apparait autre quand nous prions. Le 24/3, visite du croiseur Ju/es-Ferry avec l Amiral Frochot. Le 30 [mars] 4 10 h. 4%, messe a bord du JulesFerry. Les journaux annoncent que je suis rappelé et remplacé par M. Sarraut, ancien Ministre des Colonies. Avertissement 4 la messe du matin. Contre l’ésotérisme. La croix est engin méme qui sert 4 montrer Dieu, 4 le hausser au-dessus de toutes les tétes, 4 le déployer, 4 l’éclairer, 4 Pexpliquer. Rien
de lui n’est refusé au- regard. Nu et le coeur méme
ouvert. Ecartelé. Epinglé*. Fixé 4 jamais comme pour un examen scientifique. Vous pouvez prendre votre temps, v[ous] pouvez le regarder. I] est 14 en pleine lumiére.
La nouvelle de Sarraut est démentie. Le journal dit que je suis a Paris highly appreciated’. Manifestation des étudiants et des journalistes en ma faveur. Chez le baron Mitsui décoration des soshi* repré-
628
Cahier V
sentant un champ d’herbes d’automne chassées par le vent. Les paysages, les plantes, les animaux, expriment
des idées et des sentiments plus généraux, plus poétiques, plus musicaux q[ue] les figures humaines. Desideria occidunt pigrum (Prov.)}. L’auméne par excellence, un verre d’eau. La chose absolument
simple,
pure,
transparente,
sans
aucun
mélange de notre saleté personnelle. Petrus autem sequebatur a longe (S. Luc)?.
Dimanche. Bonne petite pluie douce du printemps sur l’herbe jeune et les arbres en fleurs, tiéde, triste, pénétrante.
Une lampe élefrique, la lumiére pure par excellence, née [34] de l’eau des torrents et de la neige des montagnes, brillant dans l’épaisseur des fleurs de cerisier.
Mardi-Saint. Promenade a la vallée de la Tumegawa part une délicieuse journée d’avril. Toute la vallée est remplie d’un lac rose qui sont des champs de péchers en fleurs. La colline est couverte de cerisiers. Grands camélias au-dessus du rapide canal chargé de fleurs rouges. L’eau rapide et trouble entrainant un courant de pétales. Les colzas dorés au milieu de la belle moisson verte. Longues barques étroites parmi les cailloux descendant et remontant 4 voile la Tumegawa. Ce papillon q[ui] palpite avec une aile noire et une aile blanche. 17 avr[il]. Diner avec Okada. Réunion de peintres q[ui] choisissent des dessins pour les kimonos d’été. Tout sert de theme décoratif: la pluie, le vent?, la cascade, le ciel étoilé entre les nuages, les mouches a feu, une barriére de bambous, etc.
Abril 1924
|
629
Vendredi-Saint. Considérer la grande simplicité de -N.-S. Un pauvre enfant au milieu des méchants q[ui] fait ce qu’il peut en pleurant 4 chaudes larmes. I va a la croix parce qu’on le luia commandé, avec courage et de tout son cceur.
Super enim omnem sgloriam protettio (Is., 1V)!. Cest pourquoi il y a toujours un dais au-dessus de la mon~ trance? ou « gloire».
20/21. Paques. Miyanoshita.
Par un
Cerisiers,
soleil radieux en auto
péchers,
colzas,
les
a
riviéres
bleues. La vallée de M[iyanoshita] dévastée par le tremblement de terre. Les cerisiers [doubles] en fleur.
Le Japon comme une truie noire au milieu des flots tendant vers le ciel ses rangées de mamelles volcaniques. Il y a des opérations de l’esprit, des compositions du ceeur, si délicates qu’elles ne peuvent réussir si nous les regardons. I] faut qu’elles se fassent toutes seules, et que pendant ce temps lesprit soit distrait, occupé a autre chose, qui ne lui prenne pas ses forces mais qui suffise a le retenir. De 1a ces rengaines, ces vers privés de sens que l’on trouve dans Arthur Rimbaud, et a [35] Vabri desquelles l’esprit peut lentement « virer ». La madeleine de Marcel Proust. Les conversations insignifiantes au travers desquelles on étreint tragiquement un paysage. C’est aussi en partie le rdle de musique [sé] qui réduit en captivité la partie indiscréte et critique de notre esprit®.
R. et sa fille malades 4 qui le vieux curé va porter la communion. 28 avril. — Je vais voir le Baron Ijuin sur son lit de mort. Vado parare vobis locum‘. Je suis la racine de votre lierre. Pour quw’il y ait un lieu il faut qu’il y ait un
630
Cahier V
centre. Les membres n’existent que par le cceur et les satments que par le cep. 3 mai. Départ pour Kyoto (Exposition). Nara, la forét emplie d’avalanches de grappes violettes (glycines). Les hautes tours sombres! des cryptomérias en sont escaladées. Horyugi?. Les poingons offerts en ex-votos, que ce soit pour percer la téte du dieu ou celle des fidéles de maniére 4 mieux s’entendre réciproquement. 6, Kobé. 7, arrivée du Gouv{erneur] G[énér]al Merlin sur le Jules-Ferry avec Messlieurs] Chatel, Jean Bréau, Cap. Bernard, Madame Merlin et son fils André, 12 ans, Dupuch, Kircher, les 3 Prés[idents] des Ch[ambres] de Cfommerce] de Saigon, Hanoi et Haiphong. [La Pommeraye, Grawitz et Pinhot] 8, voyage, enrouement. 9, grande réception par moi a PH[6tel] I[mpérial]. Visites aux Princes. — 10, diner des Amis de l’Indo-Chine. 11, Honjo. [36] 12, Yokohama.
13, le 1&7 ministre. 14, le G/ouverneur]
G[éné-
ral]. EleGtions au Japon et en France. La marmite politique et diplomatique toute bouillonnante.
15 [mai]. Séance de jiujitsu. Les guerriers avec des cris terribles bondissant ’un sur Pautre comme des coqs noirs, comme de grands coléoptéres furieux. — 16, 17, Nikko. Le sanétuaire intérieur du temple de Ieyasu’. Le prétre solennel qui nous précéde avec son sceptre de bois. Au pied des grands panneaux de bois sculptés dans ’ombre les prétres verts accroupis. Le délicieux jardin bouddhique. 18. Féte chez Iwagaki. Le jardin profondément dans un creux. Au-dessus de lui dés qu’on sort la téte la mer et le grand port. Sous une immense glycine la foule en féte réunie. Le diner chez le Marquis de Mayeda. Exhibition de chefsdeuvre. Les grands plateaux de laque d’or. Les 2 paravents de Sesshiu. Intention de la nature. Avec son propre langage dont le vocabulaire est 1a en caraétéres nouveaux. La chronique des Mayeda comme un fleuve entre mes mains d’images et de caraétéres. Les kabuto chapeaux démesurés!. Les barar (insignes). Jades, coraux, céladons. Le 19, féte magnifique chez
Mai 1924
631
les Mitsui. Le no dans le jardin, la scéne séparée par ~ce
morceau
de jardin nocturne,
Benkei!.
Le
20 en
chemin de fer. Le vieux genrd? Saionji dans le train avec son masque de bonze, la “ele femme qui Paccompagne. Il est en train de faire un ministére, va-et-vient de politiciens dans son compartiment. Le 21, Osaka, ovation populaire. 22-23, Kyoto, dans la
~
maison du narikin Murai. Féte splendide de Mitsui (17 000 yen). La vieille geisha qui consent a ne danser que pour moi, les marionnettes de « bounroku » qu’on a fait venir d’Osaka, les 2 groupes d’animateurs de ses poupées, absorbant chacun la vie complexe de 3 personnes. Pendant que les visiteurs 4 Nara [sic]*, je passe la journée a Kobé chez le dentiste. Le 25, départ sut le Jules-Ferry. Le 26 Miyajima, le vieux portique rose [37] dans la mer®. Les quatre prétres Shinto avec des armes de bronze exécutant une danse guerriére. La mer pénétrant dans l’intérieur méme entre les parvis du temple. Peinture : soleil rouge auprés du tronc dun pin. Le 27 en mer, au soir arrivée 4 Fusan. Air délicieusement frais et léger de la Corée, « le pays du matin frais».
Le
28, Séoul,
le temple
des anciens
souverains 4 moitié démoli et envahi par d’énormes constructions modernes. Le petit étang prés duquel la reine de Corée fut assassinée en 1898, je me souviens. On dit que ’Evéque Mer Mutel avait converti la femme méme de l’ancien Prince Régent persécuteur et lui avait administré subrepticement les derniers sacrements. Au Musée Statue saisissante et mystérieuse de Maitreya®,
le bouddha
dhique. Les orphelines digieusement sur un découvert un nouveau téres (4 Chuzenji) qui unique. 3 beaux enfants
de l’Ouest, le Messie
boud-
coréennes qui bondissent protremplin. Gallois le Consul a genre d’insettes, les noptopne comportent qu’une espéce q[ui] me font penser aux chers
miens. Conversations politiques avec Matsuoka. Le 29,
en chfemin] de fer jusqu’a Fusan. La mer par une nuit magnifique. Le 30, en ch[emin] de fer le long de la Mer Intérieure par un temps d’une splendeur inouie. Toute la terre semble 4 demi liquéfiée dans la lumiére, dans les délices et dans l’azur. Il n’en reste plus que des
634
Cahier V
La féte du T[rés] S[aint]-S[acrement]. Accipzte — Prenez, avec la nuance d’acceptez, non seulement avec
le corps mais avec l’esprit. I] dit : « Prenez et mangez » avant « Ceci est mon corps». Le besoin existe avant la satisfaction.
Beatitudo eS gaudium de veritate (S. Aug., Conf., X, 27M 19 juin. A Canton une bombe est lancée contre le G[ouverneur] G[énér]al Merlin. Quantité de morts et de blessés.
Plenitudo Dei est sacra Trinitas (Théoph. CEcon.)?. L’entendement est la descente de l’idée en nous avec ce qui s’y méle d’émotion : c’est ce q[ui] donne la conviction et la force. Le bon sens est linstiné& du vrai. — Le discernement est l’application consciente de cet instin¢ét. — Le conseil est le choix des moyens pour [40] Paction. — La sagesse est le choix des maximes et des résolutions propres a la vie (Max Jacob)*. La défiance est une forme de la timidité.
29 juin, S.-Paul. Je m/’installe maison de l’Ambassade.
dans ma nouvelle
Le P. Flynn, ancien curé de Suresnes, q[ue] je suis allé voir en 1921, est nommé curé de la Madeleine. Maria, complementum SS. Trinitatis — Maria, triclinium
Trinitatis nobile (Anciennes litanies)*.
Ad feminam causa revertitur (S. Aug.)°. 29/6; CeiSaj.”. Saint Frangois,
de
Chesterton.
—
La
période
du
premier Moyen Age fut un temps de jedine, de mortification, de pénitence, de nettoiement aprés la baccha-
Juin- Juillet 1924
635
nale paienne. Celui q[ui] suit la nature c’est comme s’il ~suivait le bout de son nez, fiit-ce un nez grec. Le culte de la nature a mené la Gréce 4 la contre-nature. — Les h[ommes] ont été rendus esclaves par la crainte de lEnfer, non pas, c’est la crainte de l’Enfer q[ui] les a délivrés. — Sans Dieu les choses perdent leur signification, elles deviennent énsignifiantes. — La _ bonne nouvelle apportée par l’Evangile fut la nouvelle ~ du péché originel. — Rome sobre, austére et juridique aboutit aux folies de Caligula et de Néron. Le jardin innocent est gardé par Priape. Le démon paien ne pouvait étre exorcisé q[ue] par la priére et le jetine. — Ce n’est pas Dieu q[ui] est le symbole de la Bonté. C'est la Bonté q[ui] est le symbole de Dieu. ; Vendredi 4, dimanche 6 juillet. Excursion au Fujiyama avec Patek, Ministre de Pologne. Départ de
Yoshida, a cheval jusqu’a la 5® station a travers la forét déserte q[ui] couvre les bases de la montagne. De la 5€ a la 8¢ a grand effort, j’y trouve la neige, dont je mange des poignées, pareille 4 de gros grains de glace.
A la 8€ un couli [séc] me donne la main (Comme Dante et Stace®) et je monte en m/’arrétant tous les 300 m. avec le mal des montagnes. Le cratére est superbe avec ses sept tours qui le flanquent, comme une malebolge gigantesque, comme un fourneau fait pour calciner quelque quadripéde monstrueux. A quelques endroits la terre est brilante. [41] Couché avec des ouvtiers 4 la 8¢ station. Le matin immense ligne de feu de Vhorizon pareille 4 un fil incandescent. La grande ligne droite du Fuji comme une toiture de glace, comme
l’aile d’un grand ange, sur laquelle les volutes
des nuages viennent se promener. Descendu violemment jusqu’au bas en 2 h. de marche encore par un chemin [desséché] sous un soleil de plomb jusqu’a Subashiri. Délice de 2 seaux d’eau glacée que l’on me jette sut le corps. En auto par une campagne délicieuse jusqu’a Gotemba. La lune prisonniére dans une bouteille.
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Cahier V
Bouddha assis ou couché. — Saint Siméon Stylite et ses imitateurs restent jour et nuit debout’.
le
Crescamus in illo qui est caput nostrum Christus (Eph.)?. C’est la téte qui fait croitre tout le reste. — C'est dans la téte que nous devenons conscients de tout le corps. « Vierge Sainte au millieu [sic] de vos jours glorieux, n’oubliez pas les tristesses de la terre. Jetez un regard de bonté sur ceux qui sont dans la souffrance, qui luttent contre les difficultés et qui ne cessent de tremper leurs lévres aux amertumes de la vie. Ayez pitié de ceux qui s’aiment et qui ont été® séparés. Ayez pitié de Pisolement du cceur. Ayez pitié de la faiblesse de notre fol. Ayez pitié des objets de notre tendresse. Ayez pitié de ceux qui pleurent, de ceux qui prient, de ceux qui tremblent. Donnez a tous l’espérance et la paix. Jereste songeuse quand je pense al’abbé Pereyve [sic]. Cest-il M. Paul qui au lieu de ce [sic] marier est retourné a sa soutane? On le dirait, n’est-ce pas ?— On la dirait écrit [sic] pour nous deux cette petite priére, pas vrait? »
[42] Matonoka donne sa démission. —Le 12 [juillet], enterrement du Prince Matsukata.
Scéne pour découragement®. — Un chemin sablonneux sous un soleil de plomb. Des taillis bas sous lesquels des quantités de petites fraises pas mares. Au loin le Fuji dans une lumiére invraisemblable. Toutes choses magnifiques 4 un degré d’intensité accablant®. 1887-[18]88. Mes promenades par la Tournelle et le tu de la S[...], faisant des vers et lisant tout haut Salammbo". Le coucher de soleil derriére le Géyn, sur la vallée de ’Ourg. C’est 1a que j’ai congu Téte d’Or et que j’ai eu conscience de ma vocation, la vocation de PUnivers.
Juillet 1924
637
Blake? de Chesterton — The old eaStern initiations. And in many of these temples, both ancient and modern, the final reward of serving the god through vigils and purifications, is that one 7s at last worthy to be told that the god does not exist. — That only that which is lovable can be adorable, — that the more we know of higher things the more palpable and incarnate we shall find them. — Coventry Patmore. The wise man _ will follow a Star, low and large and fierce in the heaven ; but ~ the nearer he comes to it the smaller and the smaller it will grow, till he finds it the humble lantern over some little inn or Stable. God does a human finer display — To those that dwell in the realm of day?. — Le résultat de la proximité n’est pas le vague et le brouillard, mais la précision de formes définies. 14 juillet. Journée splendide 4 Miyanoshita. Jai désiré de désirer. — ficationes tuas (Ps.)°.
Concupivi desiderare justi-
La Lune qui nfous] regarde avec sa face cicatrisée. Une assiette d’or. Asscensiones in corde disposuit*. Paliers. Les Anglais — sortant de la classe des tailleurs et des calicos [sc] — ont souvent des tétes de lapins. La pompe a sous.
Le vice ne conduit nulle part. Culs-de-sac obscurs ov les saletés et les détritus s’accumulent.
Une libellule atterrit sur une tige de plantain. Les populations sauvages du Canada et des EtatsU[nis]. — Les [43] missionnaires arrivant pour les administrer avant qu’elles ne disparaissent.
Chuzenji du petite église®,
19 au
31 juillet. Commf[unié]
a la
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Cahier V
Puis du 3 au 13 et du 16 au 281.
Pietas, omnia pacata mente tueri”. In qua mensura mensi fueritis, remetietur vobis (Matth.)*. Le 18 aout, magnifique promenade de Yumoto aux trois lacs par le Kansaitoje*. Il y a un jour qui est le sommet de l’année®. Ces trois profondes coupes d’azur et de lumiére
au
sein de la forét, dominées
par la
cattouche calcinée du Shirané. Un autre lac désert au-dessus de Yumoto. Un cratére plein d’herbe. Dans l’eau oisive le diable pond. Les eaux stagnantes q[ui] se putréfient et donnent naissance a des nuées de démons. Le moustique inoculateur de pestilence, le diable q[ui] préléve un échantillon de nfotre] sang (Pame jointe a Veau), q[ui] communie avec nfotre] sang et se sert de sa chaleur pour mirit sa ponte’®.
La nourri d’une poignée de cresson et d’une gorgée d’eau claire’. Il n’y aura plus de temps. Le temps s’arréte et le barrage une fois établi tout s’arréte, tout est [44] soli-
difié et le passé devient le présent, simultané
d’un
seul morceau
avec
avec lui, devient le présent. II
n’y a plus de place pour s’écouler®. Les Anges puts esprits, c[’est]-a-d[ire] en rapport avec tout ce q[ue] nous désignons de ce nom et gfui] nous aidera le plus 4 nfous] en faire une idée, mouvement, €manation, odeur, pénétration, initiation, phrase,
musique, q{uel]g[ue] ch[ose] @entiérement intelligible. Un d’essentiel s’il perd ses cheveux chez l’Ange tout est nécessaire,
d’entiérement utile et homme ne perd rien ou méme sa main. Mais tout est Ange’.
La S. Vierge a-t-elle contemplé Gabriel sous forme visible et officielle d’un jeune homme
sa
ailé, —
ou plutot tel qu’il est, esprit annonciateur du Verbe?
Aout 1924
639
20 aout Tt Curé de Villeneuve. Les marins retraités, les « exafaitort». A Lorient il
y avait un groupe inséparable de trois amiraux qu’on appelait la frégate, le grand mat, la misaine et l’artimon. Tous trois d’une seule piéce a midi juste allaient régler leurs montres sur la boule du sémaphore. Les Oupanishad. C’est beaucoup plus simple et plus humain que les ouvrages modernes ne |’indiquent, plus sympathique et plus puérilt. Madhou, miel, se dit de ce qui est a la fois cause et effet, des choses q[ui] dépendent Pune de l’autre pour leur existence, q[ui] ne peuvent exister l’une sans autre, comme le miel et les abeilles. Madhwvidya, science du miel. D°. Le Brahman ou l’Atman ne peut étre décrit q[ue] par non, non, car il n’y a rien de plus haut q[ue] cette désignation : ce n’est pas ga (maintes fois répété) — (V.L.P. Le nom, ou non, ce qu’une chose n’est pas en étant ce qu’elle est). Le 28,en ch[emin] de fer a Sendai. Amusant spectacle d’un wagon Japonais. Les enfants en croix contre la vitre comme de [45] brillants papillons. Les 2 bons vieux avec force salamalecs qui se partagent une bouteille de saké. Le monsieur distingué q[ui] mange son diner entre ses pieds dans une petite boite. Les 2 petites bonnes femmes qui changent de robe devant nous sans qu’on y voie rien?. En été tout le monde enléve non seulement sa veste mais sa culotte. Sendai. Couché dans un hétel immonde. Vu les sceurs, la mission
avec
son
vieux curé, le vieux chien
qui se
fait gratter voluptueusement avec un tire-botte, le vieil Evéque qui attend la mort. Les peupliers. Matsushima. Une baie d’eau morte et remplie d’herbes grasses?, toute parsemée de petites iles funébres. Dans la brume et dans la pluie. Promenade en bateau sous une pluie torrentielle. Retour a Tokyo le 30 avec de temps en temps des échappées sur un immense et magnifique paysage, les montagnes 4 ma gauche comme trois
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Cahier V
bandes qui s’enlacent, comme des portées de musique, de bleus plus ou moins clairs. Villette de Ch[arlotte] Bronté?.
1e€f sept[embre]. Anniversaire du tremblement de terre. Office au Hitugishu (Magasin d’habillement). Les fleurs consetvées dans un bloc de glace. La foule arrivant sur nous en un fleuve, en une colonne profonde, et faisant pleuvoir une gréle serrée de fleurs, de batons d’encens et de sous. A 11 h. 58 4 Yokohama.
Toutes les sirenes pendant 2 minutes comme un orgue gigantesque*. Ps. XC, 5. Départ du C[ommandan]t Tétu.
Le soleil du matin est beaucoup plus dur, il épuise beaucoup plus les forces que celles [szc] de ’aprés-midi. Ainsi je suppose q[ue] pour la jeunesse d’un saint il doit y avoir q[uel]qjues] années terribles, accablantes. 10 h. du matin et le soleil impitoyable sans rien pour le dissimuler. En Dieu il n’y a pas de temps. Tout est acte, tout est éternité. I] n’y a rien qui ne soit étant, qui cesse d’étre pour n’étre plus. Mais en la personne du Christ se fait une espéce d’articulation ineflable du temps sur ’Eternité, en cette espéce d’horloge ineffable que Jean a entendu et q{ui] est le Sacré-Coeur. Chaque coup marque la méme heure, il n’y a pas succession, mais résurrection, [46] l’Eternité interrompue par la mort, comme le cceur percé par la lance’. Le 28 aout pour la premiére fois j’ai senti S. Augustin‘.
V [oir] p. 15. — En péchant je fais pécher mes causes. Je commets un détournement. Yemploi des fonds pour un usage q[ui| n’était pas le leur. R. m’écrit qu’a Paris a ?Hotel Ritz elle voit par Vescalier descendte un monsieur inconnu accompagné @une
dame
d’aspe&t commun
et colonial,
le visage
assez noir. Ils la saluent et s’assoient 4 sa table et
A
Septembre 1924
641
échangent des banalités, R. se creusant la téte pour savoir qui c’est. Tout a coup elle s’apercoit que c’est son mari Lintner défiguré par la maladie et arrivé le matin méme! — « You can all go to hell’. » — Il part a Utrecht p[our] se faire soigner. Gaston congédié injustement de la Ligue des Nations pour faire place a M. Pierre de Lanux. Appartement a Paris’. ~
Si Judas a été témoin du reniement de S. Pierre, quel scandale n’a pas di étre le sien®!
Un écrivain anglais prétend que le cancer physique ou anarchie de la cellule par rapport au corps individuel a pour cause l’anarchie sociale ou révolte de individu contre la société. '
,
Ronsard est le Béranger du xvi® siécle?. [47] Un de ces pins comme ceux de la route de Tokkaido que Hiroshigé a dessinés transporté a toute vitesse sur un camion automobile’.
Maria humilitate concepit (S. Bern.)*. Le Ministre de Pologne Patek me raconte q[ue] quand il était en prison les exécutions se faisaient en général 4 minuit. Un jour il fut appelé a cette heure-la et il sentit une telle faiblesse dans les genoux que sans le vouloir il fit un tour complet sur lui-méme et tomba sur l’épaule du gardien. Malgré tous les ordres on connaissait toujours le détail des exécutions. Il y a des secrets que l’esprit humain n’a absolument pas la force de conserver (Applic[ation] a la Passion). Le crime d’Eve est d’avoir détaché la pomme,
de
Pavoir séparée? de son arbre, de s’étre approprié ce globe, la premiére hérésie. Melior eft una dies in atriis tuis super millia. Quam dileta tabernacula tua, D{omi\ne! concupiscit et deficit anima mea in atria D{omi\ni!
Habitavi in tabernaculis
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Cedar, multum incola fuit anima mea! toujours a état d’habitante chez les autres. Intra in lutum et calea(Nahum)? (Les Riziéres, le buffle). Caro concupiscit contra spiritum et spiritus contra carnem, ut non quaecumque vultis, illa faciatis? (S. Paul). Une machine compensatrice faite d’efforts qui se contrarient. L’esprit se met en travers de la chair naive et bestiale,
mais la chair aussi se met en travers de l’esprit orgueilleux, chimérique et présomptueux.
Baptismo habeo baptizari et quomodo coarttor usquedum perficiatur (S. Luc). Etre baptisé, se perdre, s’engloutir. Exinanivit semetipsum formam servi accipiens®, le levain dans la farine. Perdre son nom pour en recevoir un autre. Le Christ sur les bords de ce fleuve de ’humanité (Aguae gentis) ot il se prépare a se plonger. Coarétor, étre a la géne, a l’étroit, 11 souftre limitation,
jusqu’a ce quw’il soit parachevé. L’obstacle qfue] n[ous] lui opposons. — Baptisé, les eaux par-dessus la téte, ce Chef q[ui] est le Christ. 19 sept[embre]. Départ de ma femme pour la France a5 h. 30 par l André-Lebon. Du haut du 3° Pont.
[48] Dans le monde Stellaire les étoiles doubles sont la régle et les simples ’exception. Chacune est souvent dune couleur différente, vert et bleu, Béta du Cygne’, jaune et bleu, orange et pourpre, orange et vert, jaune
et émeraude pale, orange et lilas (la Chevelure de Bérénice). — Toutes les orbites des étoiles binaires sont extrémement allongées, ainsi au lieu de décrire comme
nos planétes des courbes presque citculaires, |’étoile satellite suit une trajectoire ressemblant a celles de nos cométes. Certaines ne passent qu’une fois en 3 siécles non loin de leur soleil central (ces 2 soleils q[ui] se recherchent et se reséparent!). Un satellite de ce genre méme refroidi serait un bien mauvais séjour pour le développement dune cellule; celle-ci soumise dés sa naissance a un été trés court mais torride subirait
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bientét le froid intersidéral d’un hiver tellement prolongé que toute vie organique deviendrait impossible. L’excentricité moyenne dans les étoiles doubles est plus de douze fois l’exc[entricité] trouvée dans le systeme planétaire et ce résultat extraordinaire est manifestement l’expression d’une loi fondamentale de la nature. Les étoiles doubles sont incompatibles avec la présence de planétes circulant autour d’elles. — - Notre systéme solaire avec ses orbites presque rondes ' est un cas trés particulier de la condensation d’un lambeau nébuleux. Il provient d’un amas nébulaire presque sphérique au début. Des cas analogues ont dai se produire trés rarement (Abbé Moreux, /es Autres mondes sont-ils habités ?). La thése de la pluralité des mondes n’est pas contraire a l’orthodoxie et a été soutenue par le P. Secchi! (Abbé Moreux). Livres g[ui] ont influé sur ma formation littéraire : les romans de V[{ictor] H[ugo] (12 ans). Je n’ai jamais aimé ses vers. 14 ans : Goethe — un peu*, — 16 ans: Flaubert, Leconte de Lisle et surtout Baudelaire. —
18 ans : juin 1886, les nfuméros] de /z Vogue, rencontre foudroyante avec Rimbaud qui cause en moi un bouleversement complet et indirectement ma conversion. — En automne la Saison en Enfer. Pendant plusieurs années je n’ai cessé de lire et méditer Rimbaud q[ui] a influé ainsi profondément sur mon caraétére, désir de fuite et de voyages, etc. A ce moment mon éveil littéraire commence en méme temps que mon éveil religieux et je fais réellement mes classes avec les maitres suivants : Shakespeare, j’apprends l’anglais pour le lire et le traduis mot 4 mot, — Eschyle, et les autres tragiques — Dante qui me conduit a Virgile, le plus grand des poétes (c’est sous Vinfluence de Virgile q[ue] j’ai écrit la 17 version de /a@ Vi//e) et les autres classiques latins — (Usage de la métonymie, usage constant du détail concret pour le tout). J’admire surtout [49] Horace et Sénéque le tragique*. — Enfin Pinfluence profonde de Dostoievsky, que personne appréciait 4 sa valeur 4 ce moment (complete indifférence 4 Tolstoi). — Aucun auteur frangais n’a
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eu d’influence sur moi a l’exception peut-étre de Bossuet dont j’ai lu avec grande admiration les Variations et q[uel]q[ues] traités. — En 1893, au moment de mon départ pour l’Amérique mon apprentissage littéraire est terminé. Plus tard en 1900 Suarés me révéle Pindare. — Ma formation religieuse doétrinale commencée par la lecture de la Métaphysique d’ Aristote se termine avec celle des deux Sommes que j’annote d’un bout a l’autre (livres bralés en 1923). — Mallarmé que j’ai fréquenté assez souvent a partir de 1887 m’intéressait mais n’a eu aucune action sur moi. Aucun rapport avec les jeunes gens qui |’écoutaient. J’ai toujours détesté les camarades et les hommes de lettres. J’ai hérité de l’orgueil et de linsociabilité de mon pére. J’ai vu 2 fois Verlaine et 1 fois Villiers de PIsle-Adam qui m’ont donné VPhorreur de la bohéme — 2 ou 3 fois Huysmans dans Pété de 1900 a Ligugé quand je voulais me faire bénédiétin (Louis Le Cardonnel). — Ma derniére année de Paris, 1892, j’ai fréquenté assez réguliérement Marcel Schwob, si gentil et si généreux 4 mon égard, Pottecher, Byvanck et Jules Renard, Léon Daudet?. N[ous] avons méme eu q[{uel]q[ue] temps un déjeuner régulier au Café d’Harcourt. Je me suis brouillé avec ces 2 derniers? au moment de l’Affaire Dreyfus. M. S[chwob] est resté mon ami jusqu’a la fin quand il se mourut de cette maladie d’entrailles. Je lui ai adressé plusieurs lettres t[rés] importantes. — Toute ma vie a Paris avant mon départ dominée par N[otre]-D[ame] que je ne quittais pas et qui était pour moi une espéce de couveuse, la rentrée au sein de la Mére. Merveilleux commerce que je n’ai plus retrouvé! — Patronage de la rue Planchat avec PAbbé Lucas-Championniére. — Je lisais /e Monde et je vivais pour 3 fr. par jour. — Boulevard] Port-Royal — puis Quai Bourbon. Mes parents 4 Compiégne. Grandes promenades dans la forét de C[ompiégne] avec Barbillon’.
Lidée dune nation ce n’est pas ce qu’elle pense delle dans le temps mais ce q[ue] Dieu pense sur elle dans l’éternité (Soloviey)!.
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Le territoire d’Israél passage, trait d’union entre
PAssytie et ’Egypte. In die illa erit via de Aegypto in _ Assyrios et intrabit Assyrius Aegyptum et Aegyptins in Assyrios. Et erit Israel tertins Aegyptio et Assyrio: benedittio in medio terrae cui benedixit D{omi\nus exercituum dicens: Benedittus populus meus Aegypti et opus manuum mearum Assyrio; haereditas autem mea Israel (Is., XIX, 23-251, Cité par Soloviev). Un trés petit papillon tout en argent. Le Christ sanctionne l’existence des nations. Allez et
enseignez les Nations (Matth., XXVIII). [50] Ainsi la vérité chrétienne affirme l’existence permanente des nations et les droits de la nationalité, tout en condamnant le nationalisme q[ui] est pour un
peuple ce q[ue] ?égoisme est pour l’individu(Solovievy). Cette nouvelle idolatrie, cette folie épidémique q[ui] pousse les peuples a adorer leur propre image au lieu de la Divinité supréme et universelle (zd. )*. L’intelligence n’est pas plus la qualité essentielle dun artiste que celle d’un militaire n’est la prudence.
En japonais le nom de la pomme est nashi, c[’est]-adire] néant. Au
lieu de sacrifier
sa réalité
paienne,
l’Empire
Byzantin essaya pour se justifier d’altérer la pureté de Vidée chrétienne. De 1a résulte la faveur presque continue du pouvoir impérial pour toutes les hérésies. Le rapport intime de l’Etat avec l’Eglise suppose la primauté de celle-ci, puisque le divin est antérieur et supérieur 4 V’humain. L’hérésie attaquait précisément Punité parfaite du divin et de ?humain dans J.-C. pour saper par la base le lien organique de lEglise avec Pitat et pour attribuer 4 celui-ci une indépendance absolue. Cette tendance impérialiste et paienne vers la séparation se signale dans chacune des hétésies
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arienne, nestorienne, monophysite, iconoclaste. Vain-
cue par la résistance pontificale, Byzance s’attaqua enfin 4 ce qui est enfin [s7c] la base terrestre du divin, le Siége apostolique de Rome, icone miraculeuse du Christianisme universel. Depuis Photius (842) il n’y eut plus un seul Empereur hérétique ou hérésiarque 4 Constantinople (Soloviev). Le dernier continent que l’Europe ait découvert est une vessie. L’ Australie. En bas de tout, recueillant les
déchets. Un continent désert et vide par le milieu comme une vessie. Il en a méme la forme. V[oir] le livre de Lawrence, Kangaroo’. La bonté et la générosité sont des vertus différentes et q[ui] souvent s’excluent. La bonté souvent ne va pas sans petitesse d’esprit et la générosité sans une certaine insouciance du cceur. 28 sept[embre]. Pique-niqueau bord de la Tumegawa avec le Vicomte Goto. Herbes d’automne. Ot sont passées les eaux du Déluge? Peut-étre les affaissements
de |’Asie
médiane,
la Mer
Noire,
la
Caspienne, |’Aral (au-dessous du niveau de la mer) qui sont en [51] train de se dessécher. Posuit flumina in desertum et exitus aquarum in sitim (Ps. CVI, 33)? L’arche s’arréte au s[ud] de la Mer Noire. Le Caucase (montagne récente ?), Sombre, ventral — La bulle « Inexpressibili toedio »*.
Dans ma cheminée parmi les herbes d’automne il y a un humble petit grillon qui joue du shamisen : Justin est son nom. Adhémar est celui de l’énorme corbeau qui venait se poser sur mon mt de pavillon‘. Et je me souviens d’avoir eu la compagnie d’un saint homme de chat qui s’appelait Timothée.
La couronne d’épines. Les ronces dont la fleur est la croix (l’églantine, la rose-croix) sont le symbole de
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VPinutilité, ce qui blesse, déchire, embarrasse, cache. Le
bélier d’ Abraham qui est pris dans les ronces. Le rire de _ Pinsensé comparé 4 un feu d’épines. Le lys entre les épines. L’entrelacement des ronces signifie ce fouillis Wimaginations, de désirs, de pensées vaines, qui nous
cache la téte du Christ, que nous mettons autour de lui. La semence qui est étouffée entre les épines?.
_-Mittet omnia peccata nostra in profundum maris (Michée) — Judicia tua abyssus multa (Ps.)* Le jardinier répond au maitre qui lui dit de couper le figuier stérile : Mittam Stercora, et forsitan faciet Jruétus’. Jemploierai
les excréments.
Mitiere,
mettre.
Quand le soleil disparait aussitét les témoins appataissent. Quand le temps s’éteint aussitét l’éternité. Tout ce peuple d’assistants muets qui ne vivent que par les yeux‘. 18-20 o@[obre]. grand vent glacé d’Haruna Jiusha. menthe japonaise; du Mont Omi®.
— Magnifique promenade par un a Ikao, Lac Haruna et le temple Les chrysanthémes sauvages, la écrit 18 petits poémes /e Vrei//lard
L’heure depuis longtemps cesse d’étre sonore® Je dors Le sommeil est d’argent et le silence est d’or.
Pierre regu 4 son bachot le 17 [oétobre]. Cérémonie solennelle du Concile le 19.
22 ottobre. Je mets l Explicit Opus au bas du Soulier de satin commencé en 1919 4 la suite d’une conversation avec Sert’. C’était 4 ce moment une espéce de saynéte marine destinée 4 servir de prologue a Profée. [52] A.B.8 cornichon confit dans le vinaigre. La Revue des 2 M[ondes| notre plus belle planche a cornichons. CLAUDEL
V - 24
24
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22 o€tobre. Féte pour le Baron Okina. Mei lan fan, Vateur Chinois fréle et charmant dans son costume de
fée fantastique?. 26-28 o€t[obre]. — A Nikko en auto avec Mlle Solf?. Magnifique floraison de la forét automnale. Le Nantai dans le fond de la vallée d’une prodigieuse couleur rose. Le sylphe Mei lan fan. 31 octobre. Féte de l’Empereur. Pour la 17¢ fois les danseurs et Chanteurs de la Cour se montrent en public 4 Hibiya Park. Ils descendent tous d’exécutants Chinois et Coréens importés par un moine bouddhiste en 727. Instruments de l’époque. Au centre un gros tambour colorié suspendu 4 lintérieur d’un cercle. Aux extrémités petits groupes. Ligne d’arriére, petites flites et orgues 4 bouche. En avant Kotos et biwas‘, 3 OU 4 petits tambours a percussion. La musique se compose de tenues indéfinies d’une verdeur et aigreur végétales sur les flites et orgues, accélérées par le roulement des petits tambours, et sur le fond de quoi se détachent de temps en temps 3 notes des Kotos et une seule de biwas, et au milieu le boum profond
du tambour qui est le centre ventral de tout l’orchestre. Impression de gargouillements et ruissellements d’eaux au printemps aprés le dégel. Horizons indéfinis. L’enchantement du Vendredi-Saint®. Rien que des tenues, pas de mélodies. Une ligne sonore qui cesse fait tout 4 coup entendre l’autre par-dessous. Puis tout revient au silence peu a peu. Danses. L’orchestre avec de grands casques coloriés rouges et verts formant sur la nuque une grosse volute de coquilles. Le prétre avec une lance 4 la main qui avec elle et son pied mesure le ciel et la terre. Les joueurs de golf avec des crosses a la main (Quatre aux quatre points cardinaux) faisant le geste de prendre la balle sur son pivot et de la lancer au loin. Il y a de la place. Une partie jouée entre les dieux. La balle renvoyée de l’un
Odtobre-Novembre
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4 autre. Puis la danse coréenne. — V[oir] p[age] 81, _ 4° Cahier! — Musique de l’époque des Tang. Au théatre les 47 Rénin?. Scéne finale. L’hiver, Yedo. Sous la neige, le pont, la téte qui apparait, puis Yhomme q[ui] la porte au bout d’une lance, puis le Chef des Rénin en grand costume [53] d’une allure triomphale,
puis
les
rénin,
blessés,
éclopés,
l’un
_soutenant l’autre qui vont s’ouvrir le ventre sur la _ tombe de leur seigneur®. 3-5 nov[embre]. Promenade avec Patek autour du Fuji. Tout a coup cette énorme masse devant nous dans la splendeur de laprés-midi, immatérielle, spectrale, inconsistante, a peine plus foncée q[ue] la lumiére. Lac de Kawaguchi. Le lendemain lever de soleil sur le lac dans les brumes lentement agitées. Dans les trous apparaissent un temple blanc, un groupe d’arbres noirs ou des masses de fruits longs jaunes et rouges. Ce mélange de feu et de neige. Puts le second lac. La forét et le 3° lac Shoji. A cheval sur les bords du 4 lact et marche fatigante jusqu’a DJ...]®. De 1a en bateau sur les rapides jusqu’a Minobu, le temple. Puis en chemin de fer tortillard jusqu’a Fuji. La montagne énorme et légére couverte de neige au bout de Pimmense plaine de moissons dorées. Retour.
« Il est dans la lune.» La lune n’est pas un mauvais point de vue. Il y a des choses qu’on voit de la lune et won ne voit pas de la terre, par ex[emple] la terre elle-méme. II faut ?avoir quittée pour constater qu’elle est ronde, pour embrasser d’un seul coup d’ceil toutes les parties du monde. Le point de vue de Sirius. A la lueur d’un éclair redoublé
un tas de paons
splendides réfugiés sous le feuillage d’un manguier. Cette jeune fille visitée la nuit par un dieu quand il s’en va lui attache dans le dos le bout d’un long écheveau de fil. Quand il ne lui en reste plus que trois tours autour du poignet elle le suit 4 travers la forét et
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Cahier V
les montagnes et voit qu’il aboutit a travers le trou de la serrure au sanCtuaire du dieu. Conversation sur ma vie et mon ceuvre avec le poéte anglais Raymond Bantock?. 14 nfovembre], 7 h. soir. Départ pour Nara avec Royer et mon domestique Shimoda. N{ara] — le Shésdin*. Collection d’objets hétéroclites du rx® siécle sans grand intérét. Modéle de charrue rituelle ressemblant 4 une rame, 4 une longue godille trainante. Le lendemain dimanche Kobé. Départ sur le Chicago Maru. La Mer Intérieure d’une admirable limpidité bleu pale, le soleil couchant tout rouge. Nagasaki le 18 au matin. [54] Hdtel du Japon. L’ag[ent] C[onsulaire] Vachin. La mission. L’église, un petit bijou attendrissant d’archite€&ture gothico-romantique, dans le style coco et louisphilippard des reliures r[oman]t[ique]s. A la cathédrale ot le P. Petitjean recut devant la statue de la Vierge toute petite les 3 pauvres femmes qui venaient lui apporter le salut des 60 000 catholiques submergés. Les fourmis blanches la dévorent. Les écoles. Ourakami et sa chrétienté compactte, on voit derriére un mort des longues files de chrétiens et de chrétiennes voilées récitant le chapelet. Une grande cathédrale. Fukuoka. Le P. Joly. L’Ecole de médecine, 2 heures de piéces anatomiques et de portraits de maladies de peau en cire. Dans un cadre un derriére verdatre constellé de bubons sanguinolents! Portrait de Marie-Madeleine Lefort, hermaphrodite et député! Le P. Martin. Omouta. On fait venir des geishas, probablement pour nos menus plaisirs. Ces enfants seront désappointées! Produits chimiques, coke, zinc, descente au fond de la
mine. En bateau vers Unzen. Superbe promenade autour de ce cratére démantelé et tout pavoisé par Pautomne (les arbres a [cite]) d’ot lon domine la met. En haut de la montagne dans un vent glacé. Les sources sulfureuses. Retour 4 Omouta. Kumamoto. Le P. Bois. Les Sceurs de l’E[nfant]-Jésus de Chauffailles. La léproserie avec les sceurs franciscaines de
Novembre
1924
651
Marie, ces anges blancs. La supérieure, une Polonaise,
Madame Zaborovska, avec ses beaux yeux bleu foncé _ au regard profond, lent et lourd, comme
s’ils avaient
de la peine a faire autre chose q[ue] contempler. Affreux lépreux, une malheureuse créature sans doigts aux mains ou aux pieds qui se traine sur ses moignons, un étre tout noir, sans visage, pareil 4 une souche calcinée;
on me
dit qu’il a 16 ans! Le P. Balteau.
_ Yatsuchiro. Autre pensionnat. Le P. Lemarié. La campagne superbe, champs moissonnés, les bois rouges
et noirs, torrents,
petites vallées,
admirable
soleil d’automne. Kagoshima. La villa Shimadzu}. Le volcan de Sakurajima et son champ de laves fantastiques. Je mets une couronne de fleurs sur la tombe de Saigo?. Toute la journée en ch[emin] de fer le long du Pacifique (toute sorte de baies, fiords, petits estuaires ‘charmants) bleu foncé jusqu’a Beppu®. 1300 sources sulfureuses, boues et lacs bouillonnants, un vert, un autre tout rouge. En bateau par le Kurenai Maru
jusqu’a
Kobé.
Sungatsui.
Lettres.
R. malade
en
Egypte.
[55] Il ne faut pas juger les hommes. Cela empéche de les étudier (Tristan Bernard).
De la coutume du sara kiri les Japonais ont gardé la manie du cure-dent. Le manche 4a balai des sorciéres. Le « manche 4 balai », invention d’Esnault-Pelterie, est maintenant
un des organes essentiels de l’aéroplane. 30 noviembre].
J’achéve de recopier /e Souhter de
satin.
La téte du Christ entourée de rayons interrompus pareils 4 des épines. L’agneau du sacrifice d’Abraham ris dans les épines. Le Buisson ardent, rayons (V[oir] p. 51).
Pour
comprendre
la grandeur
de S. Fr[ancois|-
652
Cahier V
Xavier il faut avoir soi-méme beaucoup voyagé et compris la difficulté du recueillement, de lesprit religieux et de la mortification dans ces déplacements continuels. S, Fr[ancois]-Xavier ne recevait aucun secouts
de son
milieu,
ordre,
recueillement,
paix,
entrainement des autres. Outre les obstacles habituels il avait 4 lutter contre la dissipation, contre la fatigue, contre les tentations résultant de la solitude, contre les
habitudes et nourritures étrangéres, contre les dangers, contre les préoccupations résultant des affaires dont il était surchargé, contre l’hostilité de ces terres ingrates et jamais encore défrichées. Mortifications volontaires d’un homme affamé et fatigué qui arrive le soir dans une auberge glacée et q[ui] trouve le moyen de se mortifier et de prier! Il se réservait la partie la plus dure, le défrichage, et passait aussitét ailleurs. Un prospecteur. C’est le patron des voyageurs. Le ménage d’Animus et Anima, l’esprit et l’ame, parabole pour expliquer certaines poésies de Rimbaud. — Animus est 4 la fois un tyran et un pédant, rempli d’idées toutes faites, de réminiscences, de connaissances
livresques et de théories. Anima est une simple femme, mais qui fait marcher le ménage et qui a apporté tout Pargent. A peine Anima a-t-elle exprimé une idée qu’Animus s’en empare et la travestit 4 sa mode, la raccrochant tant bien que mal 4 son accoutrement tout fait. Cela ne ’empéche pas de s’en faire gloire dans le monde et auprés de ses amis. Finalement il finit par la réduire en esclavage et l’enferme 4 la cuisine, la condamnant a un service régulier et a lui préparer toujours les mémes plats. Cependant, il lui est arrivé, rentrant a Vimproviste, ou quand il travaille sans s’occuper d’elle, ou qu’il est avec ses amis, d’entendre
[56] derriére la porte fermée, d’étranges et merveilleuses chansons. Elle se tait dés qu’elle voit qu’il la regarde. L’Ame se tait dés qu’elle s’apergoit que l’esprit la regarde. Animus imagine de la rassurer, de lui faire croire qu’il n’est pas la. II siffle, il touche du luth?, il scie du bois, il chante des refrains niais. Peu a peu Anima se rassure, elle regarde, elle écoute, elle se croit
Novembre-Décembre
1924
653
seule et elle va ouvrir la porte a son amant divin. Mais
Animus comme on dit a les yeux derriére la téte?. Maxime cynique pour réussir dans Fermer les yeux et ouvrir la bouche. Un
calvaire avec le bon
Larron
l’existence :
crucifié face a la
croix (vu de dos) et essayant désespérément de voir le _ Christ. Le mauvais
Larron au contraire largement et
confortablement étalé et blasphémant tout 4 son aise, énorme, gras et blanc, avec un bandage herniaire moitié défait et qui pend.
a
Marie, toute remplie d’une nomination ineffable. _ Mf[arie] dit 4 Jésus qu’elle contient dans son sein : ‘C'est moi qui vais te donner de quoi souffrir, ce visage pour recevoir des soufflets, ces mains pour étre garrotté, de quoi étre nié et renié?.
Autre idée pour un calvaire. Au milieu d’une foire, tirs, chevaux de bois, voitures de camelots avec des
lanternes, par derriére un grand ciel d’orage et les arbres couverts de la poudre verte du printemps. Grosse pluie au loin sur la gauche sur un paysage semi-agricole et urbain dessiné a la maniére des anciennes gravures.
Une voile qui disparait derriére le cap Moulachique’. |}
Non in commotione Deus (Reg., III)‘. 20 déc[embre]. Arrivée de mon chargé d’affaires M. Gentil, venant de Suéde a Tokyo. Le Prince Yamayata est nommé Chef de la mission allant en Indochine. Fin d’une année sans événements mais remplie de Pégale et uniforme bonté de Dieu a mon égard comme d’une douce lumiére voilée. Et moi si faible, si inerte,
si mou. Non pas 4 travers un voile mais a travers une épaisse vitre peinte en blanc. Progrés en moi d’un
654
Cahier V
détachement de tout de plus en plus complet. Pendant tout ce séjour au Japon Dieu a été pour moi un fidéle collaborateur a dextris et a sinistris, 4 droite pour faire et a gauche pour éviter, malgré mon humiliante gaucherie, sottise, paresse et incapacité,
1925
[57] L’année commence dans le brouillard et le joli temps. C’est année du Boeuf dont limage est associée par les poétes a la Péche de longévité. — ‘Pendant la nuit les cloches bouddhistes ont sonné 108 coups en symbole des 108 classes entre lesquelles se divisent les 821000 désirs charnels. Nom de J[ésus]. Totus in usus nostros expensus (la drachme)}. Quand je dis Jésus, je deviens cette sonorité par quoi Jésus est nommeé. Pendant qu’on écrit un cara¢tére chinois il ne faut pas respirer?.
3 janvier. Début d’une année qui comme 1921 sera une année de dénouements et de liquidations. Un énorme poisson bleu et blanc avec sur la téte un cimier de plumes?.
C’est vrai, je crois. Je vous crois. Oui*. Ridete quidquid est domi cachinnorum (Catulle)>. Les Rois Mages ont vu l’étoile en Orient et cependant ils se dirigent vers l’}Occident au rebours de ce que leurs yeux leur ont montré. Ou Il’Occident du temps n’est-il pas l’Orient de l’Eternité? Ils étaient derriére Orient.
656
Cahier V
Je suis Toi. Les deux termes ont une égale importance. C’est en étant Toi que je deviens davantage Je. Les Mages, l’Astrologie. Impossible de regarder le Ciel sans apprendre q[uel]q[ue] chose. II] est arrivé q{uel]q[ue] ch[ose] de nouveau dans le royaume de VEternité.
Chaque matin le Seigneur dit 4 l’Ame en état de grace : Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis. Formes dorées dans le brouillard d’avril. Des yeux plus noirs que le vin. Je vous ai regu d’un cceur distrait comme un visiteur parmi d’autres auquel on ne fait pas attention, un de ceux dont on dit : Décidément il n’y a rien 4 en tirer. Lhumilité nait du besoin.
Kyoto-Osaka, 10-13 janvier. Chez le peintre Seiho Takahashi! que j’ai fait décorer de la Légion d’Honneur. Ses cinquante éléves m/offrent une réception solennelle suivie d’un banquet et d’une longue féte. Il me donne une merveilleuse peinture de Chine. Le soit Inabata q[ui] me donne un vieux vase Satsuma. Jardin de sable et des 15 roches de Rydanji (Secte Zen). Etang, arbres marron, pont. Jardin mousse et or de [...] (Tanyu)*®. Déjeuner (tortue) avec Seiho et Kita‘. Salle décorée avec un gigantesque caractére : Un exécuté par [58] un moine du Daitokuji. Le lendemain Osaka. Ch{ambre]
de C[ommerce]. En revenant,
par
la fenétre du wagon la campagne sous la pleine lune de janvier. Le Fuji tout rose de la base au faite dans le soleil levant. Rt sur cette image je termine les notes de mon séjour au Japon du 19 novembre 1921 au 22 janvier 1925. Le mot détachement ne serait pas exact, ce serait plutét un écartement des choses de moi, la création
Wun espace vide de plus en plus large. J’ai beaucoup de peine a trouver ma place exacte dans ce monde qui
Janvier 1925
657
n’est plus fait pour moi. De la ce penchant a la bouffonnerie!. Fin du Japon 23 janvier 1925 a bord de l Amboise. Soulagement de me trouver seul enfin aprés une quantité de visites et de réceptions et de toutes sortes d’occupations et de ~ préparatifs ot il m’est arrivé de perdre la téte. L’ile de Oshima toute fumante. — Le Fuji presque invisible dans le lointain. Lourd sommeil.
D’antico amor senti la grave potenza — D.*. |
The wide grey lampless deep unpeopled world’.
Cependant qu’au fumoir derriére la vitre un jeune homme et une jeune femme lun en face de l’autre causent sans son, 4 ma gauche le dieu noir de la mer
me confie des secrets qu’il ne se laisserait pas lever par un jeune homme. Intimité croissante avec indiciblement omelike*.
l’informe
et le noir mais
Smooth sliding Mincius crowned with vocal reeds (Milton). Nobis, quum semel occidit brevis lux Nox est perpetua una dormienda (Catulle)®. Mardi 27 a1 h, Arrivée a Sh[anghali. Je reste a bord par crainte des assassins Coréens. Meyrier et sa femme. Cette ville méconnaissable aprés 30 ans ou je reviens comme un autre Rip Van Winkle’. Ces arbres qui ne grandissent qu’en se rétrécissant. 28 [janvier]. Bruit de la canonnade dant la nuit.
eee
4 Woosung pen-
658
Cahier V
Plaine de neige décorée d’arbres transparents.
Jeudi 29 a 1h. 30. Départ de Sh[angha]i par le froid et la pluie. 1 février 7 b. matin. H[ong]-Kong. Le P. Robert et le Consul M. de Cointhial, viennent a ma rencontre.
Journée avec le P. Robert. As[sistant] de Mgr Rey. Déjeuner avec le Gouverneur.
2 [février]. — Le détroit de Hainan a midi. Le C[ommandant] Schwabe. J’ai acheté une machine a écrire portative Remington avec laquelle je copie le Soulier. 3 [février]. A 10 h. Arrivée a Haiphong par un temps superbe. P[...]' [59] Jean Bréau. Le Gouverneur G[énér]al. Mauvaises nouvelles de l’arrangement avec le Jap[on]. O@ave Homberg.
Préoccupation presque exclusive de toute la littérature francaise d’imagination de amour et de l'amour sexuel qui en effet est le mystére des mystéres, allié aux plus profonds mystéres religieux : la génération, la création, la communion de 2 étres. Quelque chose d’analogue au culte des organes sexuels chez les primitifs?. 5 [février]. Aurousseau®. Dandolo. En auto au village de Yen-son. Procession parmi les Annamites ensoutane rouge tenant au bout d’une perche des insignes dorés et des parasols. La musique, les notables en simarres de soie, les vieillards avec des chapeaux rouges de cardinaux et tenant des batons rouges courbes. 10 000 cocotiers. Le temple de ’Empereur qui naquit dans le village. A coté un cheval de plomb peint en blanc dans son caparagon de cérémonie. Le soir banquet et bal, le Petit-Lac illuminé! Sontay dans le soir en auto. Bal au G[ouvernement] G[énéra]].
A la votte des tombes était suspendu un miroir de métal, ceil, éle€trode,
santes.
orifice des influences
bienfai-
Janvier-Février 1925
659
Dimanche 8 [février]. La Pagode des Manguiers sous les masses étagées de ces édifices végétaux. Le Tonkin noir et brun sourd est le pays des larmes et de la componétion!. Toussaint et le poéme diabolique thibétain du Padmavatangui. Les idoles thibétaines a tétes de vache et de cochon, et leurs bras sans nombre,
leurs pyramides de tétes, accouplées 4 leurs cakiis?. Conversations religieuses avec Aurousseau. Au Carmel dans l’aprés-midi de dimanche, conversation derriére la grille de fer et le rideau noir avec la Mére Prieure, une voix joyeuse d’oiseau céleste. Au théatre la Tosca. Les Jean Bréau. Poiyanne et ses Kebatis. Départ le 11 au matin. Than hoa. Vinh. Chatel?. Montpezat, Cucherousset. Procession de lanternes. Le lendemain Dongha, la Porte d’Annam, Hué. M. Pierre Pasquier’. Les tombes des Empereurs. Les Annamites misérables ayant perdu lhabitude de manger. Il faut les faire manger de forces [sic]. Dans cettaines régions impossible de trouver un homme qui pése 4o kilos, Lettre du Dr Tribouillet de Haiphong me disant son admiration pour Sainte Gen|evitve]. La sceur d’Aurousseau avec ses grands yeux et son marti M. Nicolas. Le Roi Khaidinh. Son tombeau décoré de mosaiques ravissantes faites de tessons de porcelaine cassée et de morceaux hétéroclites de vieilles bouteilles. Le Cavalier du Roi. Départ le 15 au matin. [60] 15 [février]. Quinhon V{ille]. 16, Nhatrang. La route a toute vitesse sous le grand soleil dans le sable et les cannes 4 sucre. Les bacs. Le Col des Nuages. Le Cap Varella [sic]. Saigon. Le Gouv[erneu]r Cognacq. Le soit au Jardin Botanique gotiter a une table chargée de fruits tropicaux, le carosol comme un ros hérisson vert rempli d’une créme deélicieuse, les sapotilles, le cay-mit d’un violet magnifique’, la catambole (trés acide), le loucouma d’un orange vif, compact et farineux comme une pomme de terre, la papaie succulente couleur de melon, remplie de grains transparents. — La veille paysage de Nhatrang, les rochers au milieu du fleuve, la tour tiam* de Ponagar
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Cahier V
d’une architeture si intéressante. Au-dessus du sanctuaire cette espéce d’immense cheminée obstruée du cété du ciel pour en faire tomber non pas de la lumiére mais de la nuit. — Le réveil dans la fraicheur et la forét vierge éclairée par un grand soleil couleur d’aurore, plus grand et d’une autre couleur que celui qui nous sert d’habitude. Abondance et générosité paradisiaques de la nature tropicale (les fruits, les immenses fleuves parsemés d’herbes flottantes). — Le 18, discours a la Chlambre] de C[ommer]ce, visite des riziéres. — Le 19, Plantation de Suzannah, M. Girard, hévéas, cocotiers, palmiers! 4 huile, cannes
a sucre. Les Européens en Coch[inchine] maintenant se portent mieux parce quils n’ont plus peur du soleil. Les anophéles porteurs de fiévre craignent la lumiére,
la chaleur
et l’eau claire. Le soir diner au
Cap S.-Jacques (avec M. C[ognacq], Madame Devi, Madame Fontaine, Madame Lout, Madame Cognacq, Madame Tholance). Retour a toute vitesse dans la nuit, Pestomac brilé et torturé par tous ces diners. Aurousseau m’envoie /e Soulier de satin copié par lui’.
Lettres. Ch[ouchette] malade. Mar[gotine] malade.
[...]®.
Le 21 [février], départ du Prince et d’une partie de la mission pour Angkor. Le journaliste Tudesq mort a Saigon disait q[{uel]q[ues] heures avant sa mort qu’il y a 4 ans Commailles, Maurice Long, Lord Northcliffe et lui étaient entrés dans un temple d’Angkor malgré l’avis du gardien‘. Le gardien leur dit qu’ils seraient tous morts dans [61] 4 ans, ce qui se réalisa. Angkor est bien un des endroits les plus maudits, les plus maléfiques que je connaisse®. J’en étais revenu malade et la relation que javais faite de mon voyage a péri dans un incendie’. Amis inconnus d’Indochine.
Haiphong,
un
polytechnicien
Le Dr Tribouillet
directeur
de
de l’Usine
Février 1925
Fontaine,
le jeune
Phiilippe]
661
Langlois,
neveu
de
Berthelot}.
A Hué portrait du P. de Roddes, un des premiers évangélistes de la Cochinchine qui 4 78 ans se mit en marche de Rome 4 pied pour rejoindre sa mission et mourut aprés avoir atteint la Perse. Les gens gris et les gens pales dont il y a encore moins a retirer. Le gris était tout de méme encore une couleur. 22.3° [février]. Promenade a Quang Loi dans plantation de caoutchouc de Phfilippe] Langlois. forét vierge. [Budge]. L’arbre 4 poison utilisé par ‘Mois pour leurs fléches. Le chasseur Cugnac. dire@eur de plantation qui ne veut boire que dans
la La les Le un
quart. Diner avec les Girard.
Le 24 [février]. Embarquement sur l Amazone. Le soir diner chez Cognacq. A bord entre Madame Tholance et Madame Fontaine. Départ le 25 4 5 h. du matin. A 3 h. traversé Poulo-Condor. Un bateau
chargé de tout ce que la race francaise a de plus corpulent’. Le 27 [février] une ile prés de Singapore pour le pétrole, 2 carmélites en 3° classe, couvent de Hué. Les carmélites d’Indochine ne se servent pas de moustiquaires! et conservent leurs vétements épais d’Europe’. Un tout petit papillon d’argent se pose sur loreille délicate.
L’ame est le plus exaétement figurée par le souffle. Elle est ce qui est capable d’attirer en soi une gorgée de la matiére extérieure, puis de l’expirer aprés l’avoir unie 4 elle pour en faire une espéce de corps ou d’enveloppe en lui donnant figure et disposition.
662
Cahier V
Stellas ad ornamentum noétis» : cormme les lampions du 14 juillet. — La Croix-du-Sud d’abord horizontale qui prend peu 4 peu la position verticale. Les Deux Cavaliers. 1[@t] mars. Pinang. Messe. — 2. La Téte d’Achem. La mer couleur d’or. Mousson du nord.
6 mars. Colombo. En auto 4 Kandy. Jardin de Paradeniga. Madame Ch. sur l’éléphant. — Le 7, conversation avec la sceur Jeanne de l’Enfant-Jésus. 2 mots de carmélites. L’une prés de mourir se plaignant a N.-S. de ne pas souffrir assez : Eh bien, mon Jésus, on ne s’aime [62] donc plus, nous deux? — L/’autre un mot substantiel adressé par N.-S. a une Carmélite : Ote-toi de 14, tu me génes. — J[ésus]-C[hrist] n’ésait pas une personnalité, c’était une Personne.
Parmi les étoiles pareilles 4 des fleurs de frangipane (a cause de ce mélange parfumé de jaune et de blanc, de feu et de lumiére) la messagére resplendissante du matin comme une vierge au visage ovale. Une
Ame
est venue
vers
moi
comme
un
mélange
de feu et de lumiére. Cet instant délicat ot ’ombre sans cesser d’étre ombre eét devenue claire : toutes les étoiles encore au
complet. L’atmosphére visible.
Il y a 2 parties dans l’Océan Indien, Pune plus pure, plus légére, plus lumineuse, contenue par les rives séches et brtilantes de |’Arabie et de l’Afrique, terminée par Ceylan*, Lakshmi®; l’autre humide, épaisse,
épicée, communiquant a toutes les séves végétales et animales : la Malaisie, l’Indo-Chine et que termine la Chine dans d’énormes épanchements terreux. Les iles Océaniennes ne sont que les derniéres miettes et graines de l’Asie éparpillées sur le sein des Faux.
Mars 1925
663
A cette heure ov les étoiles s’éteignent ensemble par milliers comme une génération de vieillards, seules deux ou trois survivent quelques secondes dans la lumieére. A Vaube une immense aile rose dans le ciel.
La S[ceur] Jeanne me dit qu’elle se sent continuellement en présence de Dieu — en oraison continuelle.
Dans les vapeurs menagantes se couche un soleil difforme. (A Paube) L’azur nouveau de ce ciel sans piqires. Coucher de soleil. — La lune a Vhorizon opposé apercue tout 4 coup comme une présence indistinGe.
11 fév. [mars]. — Au large de Socotora. — 6h. du matin. Sublime lever de soleil. Le ciel parfaitement pur sans
aucun
nuage,
c’est vraiment
la Mer
d’Arabie.
Devant le bateau dans le ciel la lune parfaitement ronde et pale. Le monde vide. Il n’existe plus que des éléments presque immatériels. Le ciel, l’eau, [63] et ces deux astres qui se correspondent. Jamais je n’ai vu Punivers réduit 4 aussi peu de choses}. 12 fév. [mars]. — Coucher de soleil sous Sokotora. — La mer couverte d’étangs. Citron et chocolat.
Djibouti, le 13 fév. [mars]. N[ous] restons en quarantaine?.
Samedi de la 2 semaine du Caréme. Comme la veille entre Joseph assassiné par ses fréres et le fils du Maitre assassiné par les vignerons pervers il y a
aujourd’hui parallélisme entre l’Epitre et l’Evangile.
L’Bpitre relate la fraude pat laquelle Jacob « le supplantateur » se substitua 4 son ainé Esati dans la bénédition du patriarche aveugle Isaac, et ’Evangile est la parabole de l’Enfant Prodigue. Ces 2 textes donnent
664
Cahier V
lieu 4 d’infinies réflexions. Isaac était l’héritier, [64] le bénéficiaire et Voccasion de la bénédiétion sacramentelle et fécondante dont fut investi le Pere Abraham aprés son consentement solennel sur le Mont de la Vision jusqu’a ce qu’elle s’épanouit dans le Messie’. A ce moment un bouc ou chevreau (Hedus) fut subStitué au fils de la Foi et de la Promesse (Sara vieille et stérile). Le premier fruit de cette bénédiction fut double, Esaii et Jacob le supplantateur, qui tenait dans sa main le talon de son ainé. Est-il téméraire de voir dans cette gémination une sorte d’image du plan de clivage qui depuis ne cesse de diviser la race d’Isaac? Esati le velu comme le bouc dont le sacrifice permit sa naissance représenterait les prémisses purificatrices, les effets en quelque sorte matériels, sauvages, bruts, que la bénédiétion ne peut s’empécher de produire. Son élimination vient en quelque sorte la circoncire. On retrouve cette division dans la haine des fréres de Joseph, dans la scission d’Israél et de Juda, dans la persécution des prophétes, dans la parabole des vignerons, celle des Deux Fils, celle de Lazare et du Mauvais Riche, etc. Esai représente VEsprit Juif littéral, matériel, pharisien, qui demande le triomphe du Messie en ce monde méme. Jacob au contraire représente la bénédidtion obtenue dans la nuit obscure (« la voix, la voix est celle de Jacob», celle du Verbe si puissant sur le coeur du Pére, malgré le démenti de ces mains animales et esclaves) et conservée, noutrie dans l’obscurité et le silence. Esaii avait le droit pour lui [65] (les Juifs ’ont encore), mais la Chrétienté avait la voix, le Verbe irrésigtible, la
supplication? dissimulée, sous le poil des prophétes et de la terre. Esaii obtient en somme ce qu’il demandait, une bénédiGtion matérielle, celle des biens de la terre
(partem subffantiae meae, comme dit |’Enfant Prodigue). Mais son frére jumeau qui lui tiendra le talon pendant toute son histoire temporelle, l’empéchant ainsi de marcher et d’errer et de devenir le Juif Errant, recoit non pas une partie mais la moelle. — La Parabole de PEntant Prodigue montre prophétiquement un renvetsement surprenant de cette situation. Cette fois
Mars 1925
665
le Frére ainé ce sont les chrétiens qui ont recu l’anneau, tandis que le Juif chassé de son héritage qu’il a vendu pour un plat de lentilles erre dans la solitude et se nourrit de glands au milieu des cochons. Et son retour est celui qui aura lieu a la fin des temps, |’engagement de l’ouvrier de la onziéme heure. Alors se consommetra le supréme sacrifice, on tuera le Veau longuement engraissé du Ps. L. Le Bouc ou le Chevreau — celui du sacrifice d’Abraham, — celui de la Paques [sic] — celui dont Jacob met la peau sur ses mains, — celui qu’il offre en noutriture mystérieuse 4 son pére aveugle, — celui que le Fils ainé se plaint que le Pére n’ait pas voulu lui donner pour se réjouir avec ses amis, sans doute parce qu'il ne voulait lui donner que la priére, le labeur et la foi. ' Le P[ére] dit 4 Esati : Osculum non deditti mihi®. Rebecca — La Sagesse — La Sainte Vierge’. Manus, manus autem sunt Esaut — Les mains bestiales,
cupides et avares qui ne savent que prendre, retenir®, compter. Dans ce méme Océan Indien ot jadis la splendide créature paienne avec ses grands cheveux blonds emportés dans le clair de lune*, 4 présent le retour au cété de cette carmélite. [66] Non plus des cheveux blonds mais ce voile noir. N’est-ce pas étrange que je aie rencontrée aprés la scéne finale du Souler de satin ? —
Elle est Alsacienne, longue, les yeux verts, pareille
a la Synagogue de la Cathédrale de Strasbourg. « La grande femme folle et vague avec son visage de fée’. » Isaac donne naissance 4 la fois aux Deux Testaments dont l'un supplantera l’autre.
Credere enim oportet accedentem ad Deum quia ES et inquirentibus se remunerator sit (Hébr., XI, 6)°. Golfe
de Suez.
pointes. Mardi
L’Horeb;
le Sinai avec
ses
trois
17 mars. Conversation avec la Sceur
666
Cahier V
Jeanne qui me dit avoir expérimenté elle-méme tous les états décrits par S. Angéle de Foligno. Union compléte avec la Trinité, avec ?A&e
Pur, spécialement
dans |’état de médiation et de donation a l’universalité des créatures q[ui] est le propre du S.-Esprit. Elle me cite ce mot yi Consommata [sic] : Expropriée pour cause d’utilité publique. Elle me fait remarquer ce mot du Pére de Famille adressée [sic] aux chrétiens confirmés, aux Ames contemplatives : Fiii, tu semper mecum es et omnia mea tua sunt?, Oraison continuelle. Elle a compris que ce mot du Deutéronome s’adressait 4 elle : Voici le temps ot la moisson rejoindra la vendange. La S[ceur] J[eanne] en priére dans la nuit sur le
clocher de son Eglise du Carmel de Hué. Aprés le Veau d’or le Veau gras. 18 [mars]. Tempéte de sable dans le canal de Suez. Le [...]? Ministre de l’Intérieur d’Ethiopie et sa famille qui vont en pélerinage a Jérusalem. 21 [mars]. Nuit de tempéte. Une pauvre femme des 3© accouche prés de ma cabine. J’entends ses cris toute la nuit. 22. Le Stromboli. La messe — Les gens q[ui] sortent de la petite église et q[ui] n[ous] regardent. Le javelot de ce grand lys pur!. Pour me Jeanne me ceints et la Celui q[ui]
faire comprendre loraison de foi la sceur cite la parabole du veilleur q[ui] les reins lampe [67] allumée se tient prét 4 recevoir #’ef pas (as.
Mort du pauvre Jacques Riviére q[ue] j’espérais autrefois avoir converti et q[ui] m’a été pris par Gide®.
La sceur Jeanne attache beaucoup d’importance au mot asseoir, Le Christ fait asseoir ses amis. II les fait participer a son étre, 4 sa session a la droite du Pére.
Mars- Abril 1925
667
24 mars. 6 h. du matin. Fin du voyage. Arrivée a Marseille. Bréal. Antibes. Les B[erthelot] chez les Wilden. Pluie battante. Avignon. Mondevergnes. Ma pauvre sceur Camille édentée, délabrée, lair d’une trés
vieille femme sous ses cheveux gris. Elle se jette sur ma poitrine en sanglotant'. Lyon. Les S[ainte-M[arie]Pferrin]. Paris 4 7 h. du soir le 26. 80, rue de Passy. Conversations
au
Ministére.
Mes
chers
enfants.
3 avril. Visite de Jean Paulhan? q[ui] me parle de Riviére, mort d’une typhoide mal soignée le 14 fév[rier] a 7h. du matin. Riviere dans les derniers temps de sa vie me revenait, il était trés préoccupé de moi. II avait écrit une introduction 4 mes CEwvres choisies*® et était en train de la réécrire. Il recut l’Extr[éme]-O[nction] 4 jours avant sa mort et aussitdt il dit: Les portes me sont ouvertes, vous ne savez pas ce que c’est quand les portes sont fermées. Et un instant aprés : Je suis sauvé miraculeusement. I] répéta cette phrase plusieurs fois et spécialement une fois avant sa mort. Ce fut sa derniére parole’.
Visites A G. Doumergue Président de la République q[ui] me fait la meilleure impression et a Briand. Front charmant, presque naif — long nez recourbé de renard — Grande et grosse bouche d’orateur. Le tout mélé a des poils jaunatres’. [68] Vendredi-Saint. — Visite 4 Madame J[acques] R[iviére]®, 36, rue Boulart, dans la chambre méme ou est mort son mari. I] avait sa pleine conscience pendant les 2 derniers jours mais n’était pas maitre de sa langue. Elle me confirma les étonnantes paroles. Elle me dit qu’a son avis c’était bien ainsi, que J[acques] Rfiviére] était complétement mir pour le ciel. I] avait fait la « répétition » pendant la guerre et la captivité. Pendant la derniére année il était détaché de tout. I] lui arrivait de dire: « C’est curieux, je ne suis plus vivant.» Son dernier roman était une chose dont il devait se débarrasser, ce n’est pas une image, mais un
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Cahier V
cathédrale, cette sublime page nue avec les fenétres matronales deux par deux. L’élan des minces! contreforts superposés se levant de toutes parts avec une puissance aérienne?. — Solesmes, citadelle imposante montant sa garde sur le bord de la Sarthe. L’hétellerie de la Rose. Extase de l’Office divin récité avec grandeur et respect. Toute la terre, tout ce que raconte le Cantique des Trois Enfants et les Psaumes suprémes, je !’ai vu, les (Euvres
de Dieu sur la face de l’Univers. Mon
Dieu, que Vous étes grand! 80 moines.Et 4 Sainte-Marguerite pour 100000 habitants 7 prétres! Les 3/4 de la paroisse ne sont pas baptisés! Le R[évérendissi]me P. Abbé Dom Cozier. Le charmant P. Hételier Dom Agaiss. Conférence sur la prosodie. Promenade le long de la Sarthe par ces prairies délicieuses et remplies de fleurs. Chartres par un temps gris et froid. Splendeur inouie des vitraux. La bande rouge médiane du cheeur et l’étonnante bande 4 droite, les bleus de chaque cété,
et le dernier vitrail 4 droite 4 peine apercu. Les 2 petites notes jaune citron en bas qui vous inondent de délices. Crest le pays de la Trinité dont le soleil de toutes parts envahit ce vaisseau de Gloire! La lumiére du pays des Psaumes! Plus bas tout ce que la lumiére est capable de faire avec du noir, ces rouges énormes, ces bleus de Création du monde’, avec des pétillements de feu et d’or, des couleurs de groseille et de [71] coing, des chairs de suie sourde,
des confitures
de prune 4 faire
mourir, des verts de cédre*, qui pénétrent par ces formidables sabords, par ces plaques de merveille® et de paradis. Et les arrangements chaotiques de blanc et de rouge des deux grandes murailles de lumiére placées sous les roses. Les misérables chanoines du xvir® siécle ont supprimé des verriéres remplacées par du blanc! Descente lente du Cheeur vers la Porte et les trois vitraux bleus ot: nait le gémissement auroral de ? Erudavit! En haut gestes de Puissances Ceélestes dans le Vert et le Brun. Cette lumiére qui est une espéce de fusion spirituelle entre l’Ame et Dieu. Les lampes allumées de ’Immense Vierge Sage! L’élan noble et pur du clocher de droite serré dans son fourreau gris, dans sa robe de cendre, avec ¢a et 14 ces délicieuses
Abril 1925
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petites touffes de fleurs jaunes. Le chceur par derriére, ces roues dans le ciel!, ces escaliers formidables, cette
~ poussée cyclopéenne, cette bousculade? vers le Ciel. Je n’ai pas eu le temps de bien étudier les entonnoirs des porches. Orgue. Trompette. L’orgue en haut suspendu comme
un ruissellement de froides stalatites?.
Dimanche le long de la Sarthe. Un citoyen frangais s’avance faisant appel par sa démarche incertaine a ~ Pattendrissement public. I] brandit un chou-fleur et chante d’une voix doucereuse : Quand tu vas voir ta cousine — N’oublie pas ton... — Ton quoi? Impossible de le savoir. Réglisse. Brun de giroflée. Grenat. Euphrate’. , Lu a Solesmes
les 3 essais de R{iviére] écrits en
captivité. Extrémement
remarquables’.
De [hauts] réglisses. [Poires.] Diaprure. La couleur est lintérieur de la lumiére, qui apparait dés qu’on la rompt. Ce qui est visible et sensible sans image. La joie en dehors de toute représentation créée’,
Quand je me suis donné moi-méme, que suis-je en état de te refuser? [72] Trop de frontiéres, trop de divisions. La patrie est bonne en ce qu’elle réunit, et mauvaise en ce qu’elle sépare’. 28 avril. Philippe [Berthelot], Léger, Chef de Cabinet’.
Secrétaire Général,
30 avril. Départ p[our] Aix-en-Provence ou je vais servir de témoin 4 Darius Milhaud q[ui] épouse sa cousine [...]®. Petite ville de pierres jaunes aux rues courbes. Fontaines, platanes. Beaucoup de longs vieillards maigres, pareils 4 des tiges d’angéliques, a des pruneaux 4 moitié confits cherchant un coin de soleillade appropriée pour y achever leur dessication”’.
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Cahier V
[La] perspective diminuante sur le pavé quadrilleé. Coup de mistral sur la place du marché enlevant les peaux de lapins et les plateaux de cuivre des balances. [...]!. Petite tribu juive du Comtat Venaissin a part abritée des persécutions sous la proteétion du Pape. Une vingtaine de familles, Milhaud, Carcassonne, Narbonne, Lunel?, Bédarrieux. Yiddisch provengal. — Charles Henrion m’écrit qu’il arrive 4 Marseille le 13 mai. En auto jusqu’au couvent Dominicain de S.-Maximin (époque de S. Louis) ot je le retrouve. Dans la crypte on me montre a la lumiére d’une torche éleétrique la téte de la Madeleine. Emotion immense q[ui] me terrasse. Ce crane tout noir, impression saisissante de beauté et de sainteté*, Pendant la messe H[enrion] me disait q[ue] ces 2 orbites vides regardaient ce Christ qu’il leur montrait et qu’elle avait
tant
aimé.
Henrion,
jadis converti
par
moi,
immense impression. N[ous] sommes tous si composites, une mosaique, un fromage de téte de cochon. Lui est fondu des pieds a la téte comme un bloc d’acier. Immense impression de force, du cceur de chéne. N[ous] montons ensemble a la Sainte-Baume. L’hétellerie. Récit extraordinaire de la conversion d’Eve Lavalliére, de sa fille Jean-Jean‘t. Le curé de la Courneuve, plein de miracles. — Gide m’a adressé par P. B.5 une espéce d’appel supréme me renvoyant le Partage de Midi avant de partir [73] pour lAfrique Equatoriale. La S.-Baume. Montée a travers la forét miraculeuse, toute pareille a celles du Japon. La grotte. Méditation. Les gouttes d’eau gq[ui] tombent. Le lendemain la messe. Servi la messe d’H[enrion]. H[enrion] va s’établir dans le désert. Etat de néant et de dépouillement complet. Il attend l’ordre de Dieu. Ordonné par Mgr Lemaitre avec |’Amiral Malcor dans ’habit du P. de Foucauld. Les 4 infirmiéres de Tunisie, admirables. — De nouveau Aix. Le mariage, le chapeau sur la téte sous le dais de velours rouge’. Les mariés et leurs parents sur 2 rangs, le chapeau sur la téte, départ de Montagnes Russes, un compartiment de 17¢ classe. Ils boivent dans le méme
casse. —
verre, on le
Types d’Aix, cartes postales, colle@ion X
Mai 1925
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n° 27. Le Poéte, suave, les yeux au ciel, une petite barbe noire en pointe, on en mangerait sur du pain comme de la graisse d’oie, le Communiste énorme barbe noire frisée jusqu’aux yeux, frisée avec une multitude de petits trous comme
un corail, le feutre
sur les yeux, plein de la poussiére du forum, la Folle, les jambes nues dans des bottines a tirants extérieurs, qui, le jour du mariage, vient déposer dans un trou du mur de la Mairie une lettre mystérieuse en nfous] _ regardant avec un sourire espiégle. — Le Pavillon de Vendéme. — Idées sur le rdle de la Petite Ville ot tout le monde se connait!. Battage chaque soir sur le Forum de la mayonnaise sociale’. Le Francais, rdle essentiellement juridique et social’. La piscine, le Casino. Francis Poulenc. Départ sur Grenoble par la route des Alpes. Grande pluie. Lyon. Discussions pour Hostel. Belley. Marie S[ainte]-M[arie]-P[errin]*. En auto
4 Hostel puis 4 Béon.
La baronne
Pierlot,
Mad[ame] de Castelbajac. Péroré pendant 2 h. La Baronne a une cuisiniére janséniste dont la femme de chambre dit : Madame, Perrone va 4 la messe, comme elle fait la cuisine, sans gourmandise. — Un
mot des paysans de Belmont. [74] Quand on entend le coucou pour la 1? fois, il faut se rouler dans lherbe,
c’est comme si on avait fait ses Paques! — Relu /a Chlartreuse] de Parme avec un plaisir médiocre’. — Paris le 7 au soir. Dans une goutte de vin il y a plus de ro alcools différents, plus de 15 éthers, plus de 30 acides, accompagnés de sucres, de tannins, d’albumines, de gommes,
de composés, tant organiques q[ue] minéraux, a base de fer, de chaux, de soude, de potasse, et de métaux libres ou combinés.
Jeudi 15 mai. Entrevue avec Gide qui part pour Afrique Equatoriale. Il me dit que son anxiété religieuse est finie, que le cété goethéen de sa nature I’a emporté sur le cdté chrétien®, qu’il ne vit plus que par le travail et la « sympathie» et qu’il est dans un état
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Cahier V
de « félicité». Alors pourquoi est-il venu me voir? pourquoi s’expose-t-il aux mortels dangers de P Afrique? Je lui parle de Poraison d’anéantissement, du mot de la carmélite, de la question du« maintenant » qui détruit le futur et introduit l’éternité. Tout cela a lair de le frapper beaucoup. Accolade supréme. G[ide] parle de cette entrevue dans son journal d’un petit ton dégagé (Journal). Contra p. 791. Lundi 18 mfai]. Départ pour Florence avec Chouchette. Journée magnifique. Le 20, Hétel Baglioni, San
Miniato, les Cascines,
Fiesole.
Conférence
dans
une serre. Au beau milieu vacarme de la pluie a flots?. Rome remplie de pélerins de toutes nations, surtout de boches au crane rasé pélerinant en chantant derriére des croix de bois. A Vambassade sur invitation de R. Besnard. Je remplis les obligations du Jubilé. Pardon de toutes mes fautes du passé. Visite des 3 basiliques S.-Marie-Majeure, S.-Croix de Jérusalem, S.-Jean de Latran. Le lendemain S.-Paul hors les Murs et S.-P[aul] 3 Fontaines. S.-Pierre pavoisé et illuminé pour les Saintes Frangaises. Ste Thérése de |’EnfantJésus dans les roses*, les Bienheureuses Barat et Postel. Leurs banniéres triomphales claquant sur le portique de Paul V. —
Vu le Comte Primoli mourant, serein
et noble. Il meurt en gentilhomme. Quand je pars il demande 4 m’embrasser. Entouré des portraits de tous ses amis morts q[ui] Pont précédé. Ne parlant pas de lui mais uniquement des autres. Pris une bonne legon dagonie. — Grande impression [75] de la majesté romaine,
de limmense
richesse
et
cecuménicat
’Eglise dans le temps et dans l’espace. — jour : Caracalla,
le Colysée,
S.-Pierre.
de
Dernier
2 diners
au
Castello dei Cesari avec Paul Petit®, Un diner avec Max Jacob, fin, rasé et gris*. — Retour a Paris le 27. 28 [mai]. Journée émouvante et dramatique. Le matin a léglise. R. Conférence aux Conseillers du C[ommerc]e ext[érieur]. Déj[euner] 4 l’H[6tel] Crillon. Au Min[istére] vu Léger avec qui discuté mon avenir. Le soir Hétel de Normandie.
Mai- Juin 1925
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Ab altitudine diei timebo (Ps. LV, 4). La grande lumiére et chaleur écrasante de 11 [h.] du matin dans une maigre forét sablonneuse, comme ce qui tombe de haut.
Ne pas confondre la lucidité qui peut s’exercer dans un domaine trés étroit et l’intelligence. 1€T juin. Lundi de la Pentecdte. A Lutaines [sic]?. Emittent imbres (Ps.)’. — La gouttiére aprés une grande pluie qui dégorge a gros bouillons.
L’Evolution du Dogme. — Cum aliquo experimento eorum, aperitur quod clausum erat, et cognoscitur quod latebat (S. Aug., De baptismo, II, 4)‘. Caractére érudit, de seconde main, qu’a toujours eu la littérature italienne et latine. Virgile, Dante, Carducci, Pascoli, etc. Des morceaux ramassés de toute
part et arrangés. Chez Virgile, c’est de la mosaique et chez d’Annunzio c’est de la mortadelle.
Enterrement de l’atteur Lucien Guitry raconté par une dame. Les aéteurs avaient pris le deuil en se privant® de fard et en mettant du noir tout autour de leurs yeux. Foule énorme au balcon, c[’est]-a-dl[ire] au pont de fer qui enjambe le Cimetiére Montmartre. Une téte sortant [dans] chaque losange entre les croisillons comme celles qui émergent des quintefeuilles gothiques. 31 mai. Sur la tombe de l’abbé Fontaine au cimetiére de Clichy, avec Massignon®. Chacun de nous y dépose 3 lys, la fleur sacerdotale, en aube.
Madame R[iviére] me remet le livre admirable de son mari, A /a trace de Dien, auquel je vais mettre une préface’. [76] Le 8 au Cimetiére National de Rémy (Oise)
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Cahier V
avec R. sur la tombe de Teddy. Anniversaire mort. Le petit ane.
de sa
Livre de l’Américain Hobbs disant que la théorie de la nébuleuse de Laplace est aujourd’hui completement abandonnée. De méme le « feu central» de la terre. Pauvres saints, au lieu d’auréoles, dont on a mis la téte dans ce triste rond de moutarde!
Soirée*assommante chez le comte B. de C. Tous les plus beaux noms de France. Ces gens-la me rappellent les chiens d’appartement, obéses, gloated', hargneux. Tous ces gens-la sont matinés de Juifs et d’Américains. On n’entend parler qu’anglais. Au bout de 2 ou 3 phrases ils sont essoufflés et v[ous] demandent de parler anglais. Fin d’une chose q[ui], je crois, n’a jamais été bien brillante. Sur les planches des théatres les femmes exhibées au public comme des guenons.
nues
Dim[anche] 14 juin. A Villeneuve dans notre nouvel [szc] auto. Erré toute la matinée autour de Paris sur la rive gauche de la Marne. Les grands chateaux rouges abandonnés la-bas de l’autre cété des grilles. Les immenses horizons entre la Marne et l’Ourcq. Journée
de mélancolie,
le soleil 4 travers la brume.
A DI...]® Péglise effondrée, coupée en deux, et au bas ce carrousel pavoisé de drapeaux et le vacarme criard dune toute petite féte populaire. Neuilly-S.-Front. Villeneuve a 4 heures, sans aucune émotion. Sentiment
que tout cela est complétement fini. Maman trés vieille, la figure presque ossifiée. La maison rebatie. Priére sur la tombe des miens. A Paul Petit. L’esprit® critique n’est pas l’esprit du chrétien. Le premier peut étre bon pour trouver la vérité catholique mais non pas pour y rester.
Juin 1925
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Le 17 juin, départ pour le Chateau de Lutaines [s7c] par Cellettes (Loir-et-Cher) appartenant 4 la Comtesse de Chevigné. Le 19 retour a Paris pour déj[euner] chez Philfippe] avec Briand. L’atelier de Sert. Le lendemain départ pour L[utaine] par Chartres en auto avec Henri’. Impression immense de la cathédrale avec ses deux fléches q[ui] se dessine [77] tout 4 coup au bout de la Beauce. Visite de la crypte x _ a N.-D. sous terre. Sculptures ravissantes du jubé, ce qwil en reste, détruit par des chanoines classiques. La Vierge couchée sur le cété écartant des 2 doigts le maillot de ’Enfant-Jésus. La Vierge avec quel air de naive fierté! apportant son enfant a Siméon, et derriére Joseph qui la tient et qui la pousse, qui la présente elle-méme,
les deux
mains
4 sa
taille.
A
travers
immense désert de la Beauce par Chateaudun jusqu’a Blois?. A Chartres rencontré Tepoéte Brochet, émule de Ghéon’. Apprenez de moi que je suis doux et humble de cour.
—
Ne
pas
s’énerver,
s’irriter,
s’impatienter,
ruminer des choses mauvaises. Ne pas interrompre cette séance aux pieds du Christ ou il n[ous] enseigne sa douceur. Ne pas gater le Christ intérieur. Rester dans sa présence et sa bénédiction. Celui qui écoute un ruisseau converse a la fois avec tous les moments de la durée d’une méme chose, son
passé, son présent et son avenir*.
Prés du Beuvron le grand ane en velours noir appelé Charlotte. Fin juin. Promenades en auto a tous les chateaux du Loir-et-Cher. Trés frappé des superbes ensembles de vie collective que constituaient ces édifices. La beauté en architecture est la conséquence d’un ensemble social puissant et multiple. Dans les hétels trop V@uniformité, pas de variété de relations. Amboise, les 2 tours par ou montent les chevaux et les voitures’. Terrasse
—
Falaise sur la Loire.
—
Blois, ensemble
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Cahier V
architectural de 5 époques : Vescalier tournant. La coupole de Mansard. Chambord, ensemble de couronnes superposées!, tirant les tours hors du sol, jardin de fumées et de lys, les hautes cheminées, la lanterne comme une fleur supréme. Au milieu d’un paysage rond de foréts. La vitre de Fr[angois] let. La salle du Bourgeois Gentilhomme. Cheverny, chateau Louis XIII, 2 énormes pavillons comprimant 2 corps de batiments et enfin 1 pignon central tout étroit et serré. 2 belles salles aux plafonds fleuris et diaprés, 1 ch{ambre] 4 coucher avec une broderie persane et de belles tapisseries 4 tons vers [sic]? du Faubourg S.-Germain avant les Gobelins. — A Chambord escalier 4 double révolution®?. — L’église de Fontaine en Sologne avec sa coupole en ombrelle. [78] Une de ces femmes qui rajeunissent dés qu’elles lévent les yeux. Le 25 [juin], Conférence sur le Japon‘ au Cercle d’Etudes de S.-Jean de Montmartre. Le curé faisait partie des séminaristes q[ui] chantaient le Magnificat a N[otre]-D[ame] quand je me suis converti. I] a connu l’abbé Villaume. — Toutes ces figures honnétes autour de moi.
Les mortifications des Saints. Pour éperonner l’4me, pour qu’elle vive, pour qu’elle ne s’engloutisse pas dans cette léthargie mortelle, comme quelqu’un qui s’endort dans la neige. II faut la tenir éveillée, il faut la pincer jusqu’au sang. La P[rinc]lesse Marthe Bibesco’. Cimetiére De lumiére! Vaste Loire ! Ceur comblé
Par /a gloire Ensablé! Cor Christi, Cor Pauli.
Juin- Juillet 1925
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Le 30 [juin] a 8 h. départ pour l’Espagne. Retard d@une heure dans le tunnel d’Orsay par suite d’un déraillement. Le lendemain 4 Irun pas de train. A I[run] et Fontarabie jusqu’a 4 h. Le lendemain 7 h., Madrid. L’Ambassade. Legendre. La Résidencia avec M. Jimenez F[...]1. Le Prado. Les Titien. Le Pardo. Le couvent franciscain. Sublime paysage de Castille jusqu’a la Guadarrama. Le lendemain |’Escurial avec - Bergamini, Maréchal et un jeune Anglais. Austérité sépulcrale. Vent, froid, espace, altitude. Le jardin de buis. Vue sur immense désert. Conférence 4 7 h.
Une
promenade
a travers
la littérature
japonaise?.
Le 4 la Granja, la Sierra Guadarrama, Ségovie, PAqueduc Romain, la Cathédrale, les orgues a tuyaux
horizontaux et verticaux, les autels dorés. Banquet a Hotel Savoia, discours aux h[ommes] de lf{ettres] esp[agnols|*. Dimanche 5, Toléde. 4 pannes en route.
A pied vers Toléde. La cathédrale. Le cloitre, jardin. L’auberge de la Sangu (Cervantés). Le style « Bets resque» rejoignant le style portugais manoélitain (plus tard le baroque). Les 2 délicieuses synagogues. Les Greco. La « grille», élément essentiel de l’architecture espagnole, la colonnette encore amenuisée, le voile, la mantille.
Romafiones.
La maison
du Greco.
Chez les
Les ponts. Le soir départ pour Avila.
Le 6, Avila. La cathédrale le matin, toute tachetée rouge
et blanc. A la porte les 2 petits lions attachés a l’édifice par des chaines. L’enceinte de murs crénelés (bien faibles) et de tours. Le couvent de |’Incarnation. Transverbération ou « descorazonacion » de S. Thérése. S. Vincent. Vue des remparts d’Avila, le petit jardin public, S. Pierre. L’aprés-midi a la recherche de S. Thérése. Je la trouve enfin. Le petit oratoire doré, fournaise d’or et de lumiére. Statue splendide de la [79] Sainte en bois peint « estofado» (mélé d’or). Seuls les Espagnols, [leurs] sculptures en bois polychrome, ont vraiment su rendre l’expression de Pamour religieux et le pathétique de la dévotion. 2 autres trés belles statues dans |’église : le Christ a la colonne, S. Thférése] transverbérée. Je passe une heure délicieuse 4\ regarder ma mére Thérése, a lui CLAUDEL
|
V - 25
225
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Cahier V
parler, 4 la prier pour tous ceux q[ue] j’aime et pour tous mes clients. Grande émotion'. A minuit départ. J’attends le train 2 h. Lever de soleil d’une splendeur inouie sur la Castille (Venta de Bafios). Burgos. Cathédrale que je trouve trés laide (dentelles, ornements). Style rond et mollet de la statuaire espagnole. Journée d’ennui 4 errer. Départ 4 4. Arrivée a Blois le lendemain 10 h. Toute la maison remplie d’enfants. Parabole du Semeur. Beati q[ui| audiunt Verbum Dei et accipiunt illud. Trois étages : les oreilles, la bouche q[ui] apprécie la saveur, Vestomac qui recgoit et conserve. Zachaee, festinans descende, oportet me hodie manere
tecum. Les entrailles enfin ou se consomme la communion, l’échange nutritif. Ma nourriture est de faire la volonté de mon pére, d’y parfaire son ceuvre créatrice?.
Lettre d’Isabelle Riviére : « J’ai vu Gide hier q[ui] m/’a semblé tout transformé depuis son entrevue avec vous et comme entamé enfin®. »
Bergamini me dit qu'il a lu /e Pére humilié a l’Escurial et que ce livre lui a fait beaucoup de bien. La Princesse Marthe Bibesco m’écrit de quelques vers q[ue] je lui ai envoyés qu’ils sont comme des diamants dont l’eau ne se repose jamais. Le 12, visite 4 Lutaine de Philippe et Héléne, Léger et Mélanie de Vilmorin‘.
La plus belle vie pour un homme
est celle ot se
rencontrent la liberté et la nécessité.
A Toléde élément archite@tural intéressant, l’ceil de beeuf, Pentonnoir lumineux, entouré de sculptures,
2 aes direéte sur la lumiére. — A Avila les 2 rayons umineux intenses entrant dans le transept. — Le cheeur et le sanétuaire tous deux entourés de grilles et réunis par un passage.
Juillet 1925
|
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Dans les conseils : Si on te frappe sur la joue droite, tends la joue gauche, si on veut t’amener pendant une lieue, vas en deux! — pourquoi voir uniquement la résignation, et non pas le courage et peut-étre bien le défi? En tous cas on ne nous dit pas de fuir. Ma figure te déplait, eh bien, je vais t’en montrer encore davantage. Tu veux m’amener une lieue? c’est toi quil’as voulu! et moi, je vais ten donner deux, je ten donnerai [80] plus que tu n’en demandes! Tant pis pour toi, il ne fallait pas me provoquer! — Un ennemi qui vous frappe il faut en profiter, il ne faut pas le laisser se débarrasser de vous si facilement, soit par la fuite, soit par les coups qu’on lui rend. « Frappez, et on vous ouyrira. » Les coups ne sont souvent que le besoin d’une étreinte. Fais attention a moi. 16 juillet. — En auto avec Gigette, Pierre et Henri a S.-Benoit-s[ur]-L[oire] en passant par Cléry, Orléans, Jargeau; Chateauneuf-s[ur]-L[oire]. Visite a Max Jacob qui n[ous] raconte sa conversion. En rentrant chez lui il voit se dessiner sur une tenture rouge Pimage du Christ en robe jaune a revers bleus, de dos d’abord puis se tournant vers lui (dans un paysage qu’il avait peint)!. Une seconde fois au cinéma pendant une
représentation de /es Messieurs en habits noirs de Paul Féval, le méme en plus petit donnant la main aux 2 enfants de sa concierge, 4 qui il avait fait du bien’. Vieille église du xr® et xm® siécle. Les chapiteaux. La chasse de S. Benoit. Le cerisier poussé dans un coin de Véglise. La tombe de Philippe I®™ Roi de France. Germigny, la mosaique faite par des artistes de Ravenne. Retour par Sully-s[ur]-Loire et la vallée du Beuvron, la Sologne, prés, bruyéres, lapins.
Dés que la vie apparait chez la plante : unité, forme, cléture, subordination des parties au tout, échanges, développement, c[’est]-a-d[ire] le présent qui n’est pas seulement la condition mais la conséquence du futur’, Avec Vanimal apparait le mouvement et le choix, Vunité directement affectée et agissante, la personnalité,
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Cahier V
La V[énus] du Titien. — Terrible comme une armée rangée en bataille. Il est plus raisonnable d’aller du connu a Vinconnu et du particulier au général que Vinverse. Pour les scolastiques contre Descartes et ses disciples. N[ous] connaissons d’abord une montagne, un arbre, une béte, et non pas un espace dans lequel ces étres sont découpés. C’est d’eux que nous extrayons par l’esprit cet espace. De méme dynamiquement pour la force qui les fait mouvoir. L’homme extérieur savoure les créatures comme créatures, comme du pain, du vin, de la viande, mais
VPhomme intérieur ne les savoure pas comme créatures, il les savoure comme don de Dieu. Mais Phomme qui est au plus profond de moi-méme ne les savoure pas comme don de Dieu, [81] il les savoure comme étant de tout temps (Maitre Eckart)1. Dans cette derniére phase commence Vhérésie. Elles ne sont pas de tout temps. Dieu seul qu’elles reflétent est de tout temps ou plutdt avant (dans le sens de cause) tout temps.
Par ce jour d’été I’S a plat au travers des moissons W@une grande route blanche sous le soleil encore cuisant de cing heures. Djami disait a son disciple : si tu vis en pensant a la rose tu deviendras rose, et si tu songes au rossignol éperdu tu seras rossignol. L’Amour divin m/’a tellement envahi de la téte aux pieds qu’il n’a plus laissé en moi de place pour moi-méme (cité par la Prfincesse] Bibesco, /es Huit Paradis).
Un chrétien qui dit du mal d’un pécheur est comme un homme riche qui volerait un pauvre. A Paris 28-31 juillet. Francis, Gualdo Rocha.
Juillet-Aott 1925
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En auto avec [...]! toute la bande a S.-Aignan, superbe église romane, Valengay, Villentrois. Grand - ciel lavé aprés la pluie. Superbe barriére de nuages. Sur le seuil de l'amour, |’4me courte, embarrassée,
murmurant des moitiés de priére, des commencements de paroles aussitét arrétées.
La priére bouddhique « Om Mané Padmi Aum »? ' imprimée sur les pneumatiques d’une automobile de maniére 4 ce que tout le chemin en soit semé. 6 aoit —
57 ans
—
Beau tem maps: Promenade
auto dans la Sologne couverte S.-Viatre. Selles-s[ur]-Cher.
bruyére
en
rouge.
' Sfur] PIslam. There is no God but God doesn’t carry us far through the complexities of matter and spirit; it is only
a game with words, really, a religious pun, not a religious truth (BE. M. Forster, A passage to India)®.
Le Pére fournit
4 lVenfant la partie blanche
yeux, les os, les veines
et le cerveau.
des
Et la femme
fournit la partie noire des yeux, la chair et la peau. — Lesez2 lettres de Valphabet sont [82] imprimées sur chaque 4ame et celle-ci 4 son tour les imprime au corps quelle anime. Zohar* (une prodigieuse collection d’extravagances). Vinea mea coram me. — nimis (démesurée)’.
Ego ero merces tua magna
Dis que ces pierres deviennent des pains — Socialisme — I] lui montra tous les Royaumes monde — Le cinéma — Jette-toi du haut en bas temple — La science, la curiosité, conditions posées miracle par Renan.
Jourdaine de Clénor’®. Tant de maladies qu’il embarrassait la mort.
Le du du au
684
Cahier V
Tulit ergo Dominus Deus hominem et posuit eum in paradiso voluptatis ut operaretur et cuStodiret illud. Tulit — ainsi VPhomme a été enlevé a q[uel]q{ue] chose — sa place est un paradis de volupté — mais son rdle est d’y travailler (avant la chute), d’en faire une ceuvre et un chef-d’ceuvre, un rdéle d’artiste et de
poéte, et non pas de le changer, mais de le garder, de le maintenir, de le conserver fidéle a l’intention et au
sens que lui a donné le Créateur. Bains dans le Beuvron au milieu des nénuphars. A Paris superbe cathédrale de peinture par Sert pour Vich en Catalogne’. Psaumes de vépres. — Gloria et divitiae in domo ejus. Generatio rettorum benedicetur. — Omnia quaecumque faciet prosperabuntur®. 17 aout. Antoine, Elisabetht. — Départ de Reine, Chouchette et Henri p[our] Lourdes. Ve station. Le Christ pour arriver jusqu’a la fin demande un coup de main du premier venu. — IX® station. Le Christ a fini son chemin terrestre. Tout ce qui était de lui il la fait. Désormais le voici entre les mains de ses ministres. Le Chemin du salut. Tantét je me le représente comme un 4pre escalier dont il faut scander chaque marche une a une, et tantdt [83] comme une écluse que la grace sans que nous le sachions remplit silencleusement jusqu’a ce qu’elle nous mette de niveau avec les miséricordes divines.
La Vénus du Titien. Non, ce n’est plus la Vénus paienne, méme en oubliant l’artiste q[ui] joue de Porgue. Quelque chose de maternel dans ce beau corps, pareil tout entier 4 ce sein que la mére découvre pour allaiter. Titien a eu toute sa vie ce sentiment de l’union de Amour sacré et de Amour profane (Rome)*,
|
Aout
1925
685
18-19 [aout]. Grande randonnée en auto avec ma fille Gigette a travers les affuents de la Loire. Montrichard, Loches, Loudun, Cholet, ou je vais voir mes
2 carmélites qui y ont fondé le Couvent de JésusEmmanuel quit fut érigé le jour méme de mon arrivée. N[ous] le visitons malgré la cléture. Revu avec émotion le visage angélique de la Sceur Jeanne. Elle et la sceur Aimée embrassent ma fille Reine. Puis Angers. La Rangeardiére. René Bazin. Une famille chrétienne. Les beaux yeux noits de Madame Bazin?. Retour par Saumur (le superbe chateau), Chinon, déjeuner, ruines du chateau, la vallée de l’Indre, Montrésor. Je suis émerveillé et étourdi de tout ce
merveilleux pays. L’église de S.-Martin-de-Candes avec la délicieuse colonnette du porche. ' 21 aoat’. S. Jeanne-Chantal. Messe au S[acré]-Cceur dite par Robert, servie par Gaston, entre R. et L.
|
Mirabilis in aequitate Deus*. — Merveilles de la justice de Dieu toujours en accord avec sa miséricorde. Retour de Lourdes.
Pas de miracles.
Jésus entre januis clausis® et dit Ego sum. vient sans qu’on sache comment.
La fot
La croix chargée sur notre dos, invisible, de sorte
q[ue] nous n’en connaissions pas la forme ni les dimensions. — Véronique voile la face sacrée du Christ avant d’appuyer en sanglotant sa joue contre la sienne. L’immense
regard
Vitraux. lavoirs.
du
Beauce
Pére
couverte
Eternel.
Jour de marché.
de gerbes
Venddme.
sous
le
Saint-Martin.
Le Loir bordé de petits
[84] Charron en gros sabots, pantalon bleu, chemise jaune, faisant rouler une roue de charrette aussi grande que lui.
686
Cahier V
Le beau sel blanc de la Sagesse de Dieu qu’on met sur la langue des nouveau-baptisés [s/c] pour les initier a toute saveur. Sur un homme versatile, inconstant et peut-étre possédé. Ce n’est pas un acteur, c’est un théatre. 31 aout. Le magnifique chateau de Villandry appartenant au « génial» dodteur Carvallo. Tableaux de Velasquez, Ribera, Zurbaran, statues de bois d’Alonzo
Cano (un moine, une Pieta). Le D[oéteur] n[ous] fait remarquer q[ue] les peintres espagnols cherchent la lumiére, tandis q[ue] les Vénitiens cherchent la couleur. Chez eux la couleur et la forme ne viennent pas du dehors,
elles viennent
du dedans,
elles sont la ren-
contre avec la lumiére de la construction et des puissances intérieures. Le guerrier mort et renversé de Velasquez avec son thorax ot se dessine étonnamment la forme des poumons. Les trucs par lesquels Velasquez fait tourner ses figures, fonds mouchetés (toile 4 peine couverte), glacis pour les ombres et tons mats pour les lumiéres. Un étonnant Greco. Sur les statues toile marouflée. On voit toujours la forme des corps. La Pieta coloriée et /ayée pour éviter les brillants et les reflets. — Le jardin avec ses trois terrasses superposées. Merveilleuse harmonie avec la grosse église au fond. Construction en profondeur, établissement d’une cuve. Le donjon comme une piéce osseuse formant la base et articulation de Varchitecture. — Copeau sur mon conseil a été voir Pabbé Flynn qui a ajourné sa confession. Pourquoi? Je ne comprends pas!. — Madame Gide a q[ui] j’avais proposé d’aller la voir élude aimablement?. 1€T sept[embre]. Henri.
Départ pour
Berck
de mon
fils
Copeau a organisé une compagnie q{ui] donne des représentations dans les villages. [85] Jamais encore jusqu’a présent on n’a trouvé le
Aott-Septembre
moyen papier.
1925
687
de défendre un pays avec des murailles. de
Januis clausis. Ah si ces portes fermées n’ont pu vous empécher d’entrer, du moins qu’elles vous empéchent de sortir?!
Jesus autem tacebat. Les savants et les philosophes _discourent, les politiciens vociférent, la foule bavarde, insulte, chante. Jésus se tait. Ce n’est qu’en faisant silence que nous lVentendrons. Le silence est lenveloppe du Verbe. « N’as-tu rien a répondre 4 tous ces témoignages, a toutes ces choses qu’ils te reprochent? » Et fatius sum sicut homo non audiens et non habens in ore suo redargutiones*. « J’ai offert mon visage comme la pierre la plus dure. » Ve station.
Siméon
[sc] participe par la croix a
chaque mouvement du Christ, a chacun de ses tressaillements, 4 chaque battement de son cceur.
r€f sept[embre]. Voyage a Villandry voir Copeau. Le Dr Carvallo me montre son admirable chateau. La belle pierre blanche pleine du donjon féodal a l’articulation des deux ailes, comme un grand os, comme un sternum qui soutient tout l’édifice. Les jardins superposés,
comme
des
cuves
carrées,
avec
leurs
mosaiques de buis et de plantes aromatiques comme des tapis. A Vhorizon le vieux village de Villandry avec sa grosse vieille église volumineuse comme une mére-nourrice. I] m’explique...?. Le 3 sept[embre] chez
lui 4 déjeuner avec les B. et mes enfants, 7 personnes. — La veille conversation avec Madame B.‘ trés frappée de mes lettres 4 Riviére. — Ramené Copeau. Sa troupe foraine en Bourgogne. Les Hoppenot. [86] Oxia inflammatum eS cor meum commutati sunt et ego ad nihilum redattus (Ps. LXXII, 21-22). Cité par S. Jean comme résumé de sa doétrine. Et j’ai néant et je n’ai plus rien su’.
et sum de été
renes met et nescivi la Croix réduit a
688
Cahier V
Cor Jesu et Mariae, fornax Amoris, in Te cor meum demergatur in aeternum (Priére de S. Jean Eudes)!. 7 sept[embre]. En auto au Plessis-Macé prés d’Angers?, avec Chouchette, chateau des Langlois® ou se trouvent les Berthelot]. Ancien poste avanceé contre la Bretagne. Le jardin d’arbres de M. Allart actuellement conservé par M. Blaringhem, gendre de M. Langlois. Dans la nature on dirait qu’un theme général est proposé que chacune des plantes s’efforce de réaliser au moyen d’un certain nombre d’éléments qui sont mis a sa disposition’. Collection de coniféres bleus et verts. Retour le long de la Loire éclairé [szc] at un gros morceau de lune. Morts de froid. Arrivée 4 2h. du matin. Le Plessis, vieux mot qui signifie fascines, branchages entrelacés. Les premiers chateaux sont mentionnés au x1e siécle. — En allant, pensé avec un peu de terreur et de vertige 4 Dieu et a l’éternité. Par ex[emple] que serai-je dans 10 000 ans, dans 100 000 ans? Il est vrai qu'il n’y aura plus d’années comme nfous] les comptons, nous puliserons notre rythme en Dieu. Aznos aeternos in mente habui®. Départ de Gigette p[our] Chalons-s[ur|-Sadne [sic]. 2® chute — et de douleur.
Affaissement dans une extase d’amour
« Pourquoi dans les miracles de Lourdes ne voit-on jamais un membre qui repousse?» Aucun miracle ne doit étre tel qu’il exclue complétement l’exercice de la foi, chez celui qui en est le témoin comme chez celui qui en est le sujet. Il y a une certaine pudeur. Il faut qwil y ait une certaine enveloppe de mystére. Le miracle se produit du dedans au dehors 4 l’intérieur dune
certaine
forme
qu’il corrige,
rectifie, nettoie,
mais n’augmente pas. Le Christ sur la croix ineffablement uni 4 l’Homme pécheur. On détache de la croix les Saintes Espéces. Le 9, 29 h. 45, départ du chateau de Lutaine ot j’ai
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689
vécu [87] des mois de bonheur au milieu de mes gentils et chers enfants. Au
restaurant
en
face
de moi
une
vieille
dame
mangeant avec beaucoup d’ardeur et de courage. Elle coupe sa viande avec force!, regarde attentivement chaque morceau
et l’avale avec la rapidité de I’éclair.
Villeneuve, 11-14 sept[embre]. — Cette nuit de pluie présence des morts presque palpable, Papa, Grand-papa, Victoire. Ce pays qu’en auto on traverserait sans méme le voir, pour moi il avait ses quatre points cardinaux, chacun avec son versant et son horizon particulier, VEst, le plateau, 4Apre, triste,
désert, le Sud, la forét ténébreuse, le Nord, l’immense plaine ouverte vers la mer, I’Ouest, la route vers Paris, vers l’avenir, la tristesse ensoleillée des sables, des bruyéres® et des bouleaux'. Chaque coin est plein de réves, de pensées, de figures, de mystéres, d’histoires et de ‘légendes. Il y avait méme un accent spécial, une langue spéciale. Ce tournant jaune de la route comme une gravure familiére au milieu d’un texte que jadis on ne se lassait pas de relire. Tout cela est 4 peu prés fini et épuisé. Je le regarde du dehors. Jacques et Cécile®. La petite bonne Doftémont.
de la famille
s’appelle
Juliette
Une bonne femme s’apercoit q[ue] sa bru est enceinte pour la 4° fois: « J’y eux ai dit : Je parie que v[ous] avez encore fait un de vos coups! »
Sur ces passions brilantes comme une poignée de neige.
Le S.-Cceur au-dessus de l’autel de Péglise :Expandi manus meas tota die ad populum i:on credentem et contradicentem®. A Villeneuve, 23 ivrognes se sont pendus en 3 ans.
690
Cahier V
Au milieu du cheeur le vieux prétre, ses cheveux blancs et sa simple figure illuminés par un rayon de soleil, célébrant les louanges de la S. Vierge.
Ernest de Massary pareil 4 un vieux général. On voit son age sur la figure de ses contemporains. Pour une comédie
: un doéteur malade affichant le
scepticisme le plus cynique p[our] ses propres ordonnances et suivant avec confréte.
une
foi enfantine
celles d’un
[88] « Qu’avons-nous encore besoin de témoins ?» dit Caiphe congédiant ainsi toutes les prophéties et toutes les figures de l’Ancien Testament (Léon Bloy, le Symbolisme de l’apparition)?. Un ouvrier haineux dit 4 un pére de famille en auto : En voila un qui est assez riche pour avoir des enfants. Le 15 [septembre]. Bourges. La cathédrale : assez médiocre impression, sauf les porches. En auto par Moulins jusqu’a Paray-le-Monial ot passé la nuit. Communié dans la chapelle avec beaucoup d’émotion pour R. trouvée malade a Paris (je crains un cancer des intestins). La superbe masse aux cing volumes superposés de Paray (jaune). Le clocher hexagon[al]. Cluny a travers la petite Suisse de paturages de Saone-etLoire. Bourg, excellent déjeuner. Nantua par la vallée de Ain. Le col de Neyrolles. Hostel. Alix du Paty de Clam malade.
Les Sept-Douleurs de la S. Vierge. — Vision des douleurs physiques — Vision des douleurs morales (vision de la viston) — Douleur venant des incroyants — Douleur venant des croyants — Sentiment de sa solidarité envers les pécheurs et spécialement envers les Juifs — Sentiment de sa responsabilité envers Dieu (C'est par elle que l’Incarnation est devenue possible) — Privation de ][ésus]-Ch[rist]§.
Septembre 1925
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Bétise de Michelet disant que le Sacré-Cceur est une dévotion grossiére et charnelle. C’est au contraire la dévotion la plus intime, la plus cachée aux sens, le sanctuaire le plus réservé. Paray est surtout un pélerinage sacerdotal.
~
S. Augustin dit q[ue] ceux q[ui] n’ont pas leur intérieur bien réglé sont semblables a ces maris q[ui] ont des femmes facheuses et de mauvaise humeur. Ils sortent du logis de bon matin et y rentrent le plus tard ious peuvent, parce qu’ils appréhendent la persécution omestique : de méme ceux q[ui] n’ont point la paix dans leur intérieur, et n’y trouvent q[ue] des remords et des reproches
de leur conscience,
ils évitent tant
quils peuvent de rentrer en eux-mémes (R. P. Lallemant, /es Degrés de la vie spirituelle)*.
L’Eglise Romane est une superposition de volumes. Une trés ancienne relation relative 4 Shakespeare porte cette inscription de la main du Rév[érend] Davies : He died papis?*. [89] A Véglise de Belmont* comme 4 celle de Villeneuve plus un paysan (il y en avait beaucoup il y a 20 ans encore) par suite de linertie du clergé. De plus en plus les Frangais se divisent en deux catégories : les bourgeois g[ui] vont de plus en plus a léglise et les paysans aig y vont de moins en moins.
Un romantique du Bugey, M. Pochet-Dassin, a écrit un roman intitulé : Paida ou de la Rage en amour. Fourier reproche 4 Dieu de n’avoir pas créé un certain nombre d’animaux utilitaires et perfectionnés tels que les anti-baleines, ou remorqueurs
de navires
par les temps calmes, les anti-crocodiles, ou coopérateurs mer.
de riviéres, les anti-phoques,
ou montures
de
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Cahier V
L’Invention de la Croix — et la croix de invention. Les inventions, les industries de la croix. Ces croix qui sont des inventions, des calomnies. La découverte de la croix. Et la croix 4 son tour qui va a notre rencontre
et 4 nfotre] découverte'.
Robert m’écrit qu’il a été accepté pour les Missions Salésiennes. Il part pour l’Italie. 17 sept[embre]. Les 7 Douleurs.
Au dire des incroyants les Evangiles sont faux quand ils s’accordent et vrais quand ils se contredisent.
Couchoud imagine que toute Vhistoire de J.-C. est un roman. En effet quelle fiction tentante que celle de ce crucifié qui ne promet 4 ses élus qu’un traitement pareil au sien, 4 exclusion de tout triomphe humain,
aux savants et aux prétres que le scandale de l’absurdité dun dieu-homme, aux Juifs que leur réprobation définitive! On peut dire que c’est bien inventé! Je ne parle pas des impossibilités pratiques qui s’opposent a la confection et a la diffusion d’une imposture de cette taille. Comment se fait-il que les antichrétiens presque contemporains comme Celse ou Lucien n’aient jamais contesté l’existence du Christ? De méme Pline et Trajan 4 méme détre bien renseignés. Retenons simplement ce double aveu : 19/ que l’apparition du Messie a cette date était appelée par les prophétes et aes pears par Daniel; 2°/ qu’il est impossible de €pouiller les Evangiles de leur cdté surnaturel et d’en tirer simplement histoire d’un agitateur religieux, ce q[ui] est la thése de Renan et de Loisy?. [90] Vénus dans la nuit q[ui] célébre les louanges du soleil. Villeneuve. 27 sept{embre]. — 30 sept[embre]. Crise de t©
N.-D. des Viétoires. A travers les fumées suffocantes du péché j’ai vu briller deux diamants 4 la couronne de la Sainte Vierge.
Septembre-Oltobre
1925
693
4 ottobre. — Deépart pour |’Anglfeterre] avec E[ve] Fr[ancis] pour faire une série de conférences?. Je fais le voyage avec les Fleuriau*. Je descends a lAmbf[assade] prés de Hyde Park. La clairvoyance surtout chez les femmes parfaitement s’allier avec la Sstupidité.
La chose VPoraison ne plutot q[ue] les Degres de
~
peut
qui n[ous] aura le plus frappés hors de manquera pas de nous revenir 4 l’oraison dans un autre moment (R. P. Lallemant, la vie spirit(uelle|)°.
Charité des pauvres*, des infirmes et des malades q[ui] permettent aux personnes q[ui] s’occupent d’elles de faire tant de bonnes actions. , ,
|
C[onférence] a L[ondres] le 5 avec succés — Chesterton. Richard de S.-Victor distingue 4 états de la charité : caritas vulnerans, caritas ligans, caritas languens, caritas deficiens?. 6-7 ottobre. Oxford. Impression d’un péle-méle incongru et hétéroclite. Ces magnifiques jardins et au milieu ces vieilles murailles noires, mesquines, pelées, galeuses sous leur manteau rouge de vignevierge, ces monastéres sans religion, ces écoles ot Von n’apprend rien, ces cloitres fréquentés pat des étudiants 4 60 000 francs par an, ces réfectoires ot |’on fait des festins pantagruéliques. ‘Atmosphere d’oppression, de complication, de mesquinerie et de cant. Désordre général, un tas d’enclos sans communication, des petites* églises sans foi, une république de coteries
ictade chapelles. Un ravissant soleil d’automne sur tout
cela. En arrivant n[otre] voiture verse. Me voici sur le pavé agitant les bras et les jambes comme un gros coléoptére. Conférence a 60 vieilles dames q[ui] m’écoutent d’un air sévére. — A Londres la « National
Gallery ». The Unfaith fulness de Véronése’.
—
La
694
Cahier V
Venise avec un coucher de soleil jaune-vert de Turner. A Oxford les ravissants vitraux de Joshua Reynolds, a New College. Fin du xvuité siécle : Reynolds, Keats, Proud@’hon [sic], [91] André Chénier. Aucun souvenir de Newman. 8 [o&obre]. Les docks. L’ivoire, la laine, les écorces odoriférantes, le bassin de mercure, la Tour de Lon-
dres. Déjeuner avec Simon et Mlle de Casalis qfui] a joué /’ Annonce a N[ew] York. L’aprés-mfidi] a Ealing vu Alice Borgia et son bébé. Le soir banquet a Hyde Park. Des amateurs jouent la 17¢ scéne de l’Ours et la Lune et le 2° atte de /’Ozage. Galsworthy, Frazer. Le 9, départ p[our] Liverpool. Le P. Cabrol! me dit que dans /’Ofage il n’y a absolument rien théologiquement d’erroné. 9 [octobre]. Liverpool. Eggli. Le grand estuaire de la Mersey dans le soleil couchant. Les 2 paquebots q[ui] partent pour le Canada. Le 10, Londres de nouveau. Le P. Dams.
Une vieille dame q[ui] me tend son appareil acoustique. On a l’impression de communiquer avec q[uel]q[ue] ch[ose] en elle de plus organique g[ue] loreille : une espéce de drain ou d’irrigateur auditif?. Dimanche. En auto a Cambridge avec les Lévy, retour par S. Albans. Merveilleux parc 4 Cambridge dans la lumiére d’automne au sortir de ces vieux colléges ot résonne lorgue avec la petite riviére ot glissent des barques silencieuses. Impression de la musique de Gluck. S. Albans, le donjon de brique. Tous ces villages anglais merveilleusement soignés. Diner a PAmbassade avec les A[mbassadeurs] de Belgique et d’Italie. Lundi 12 [octobre]. Manchester dans le brouillard et les ténébres.
Gariel.
Le lendemain
Newcastle,
Sir
Theodore Morrison. Je parle au lieu de lire. Le 14, Londres. Reading chez Mlle Salmon.
Odtobre-Novembre
1925
695
15 [octobre]. — Retour en France. — 19. B.1 revient de Locarno.
Cella continuata dulcescit®. Cela est vrai non seulement de la cellule monastique, mais de tout ce qui nous tient enfermés et emprisonnés, le mariage par exemple. Il faut marcher dans cette négociation semelles de laine et de plomb (Richelieu). Ginguet. ginguet®.
De peu de valeur.
avec
des
Vin ginguet. Habit
2 novfembre]. A Villeneuve pour la Toussaint. Conseils a Jacques* pour ?aménagement des anciens batiments de la Dome ow se passe le prologue de L?? Annonce.
[92] Imago. Imitari, Ipse -me ? Le samedi 7 nov[embre] en auto avec Mélanie® et Gigette a Chartres par la pluie. N[ous] montons dans les galeries q[ui] font le tour de l’édifice et nfous] voyons les vitraux de prés. Au-dessous de nous les scénes de la vie de l’Eglise se dessinent avec une précision liliputienne, les tas de chaises, les fidéles en priére devant la Vierge Noire, un prétre en surplis penché sur un enfant qu'il confesse®. Sur les toits et au clocher ot nfous] entendons sonner avec le pied VP Angelus. Histoire du marchand de vin Donnadieu, rue de la Chaise, q[ui] se convertit en entendant l’Abbé Mugnier catéchiser Huysmans’.
Du 25 o@f{obre] au 13 nov[embre] je préside le jury d’examen du Concours des A[ffaires] E[trangéres] ou se présente [...]®. Il s’est fait refuser.
En regardant les vitraux de Chartres beaucoup dimages nutritives. Ces tons frais de fruits font appel 4 la saveur®. De ce ciel pluvieux et dormant ils extraient ces braises et ce feu. Le jour de la réalité qui rend visible ces réves.
696 Mon
Cahier V Dieu, permettez-moi
de vous
vivre.
Si vous ne devenez comme des petits enfants, vous n’entrerez pas dans le Royaume de Dieu — Cela s’entend aussi du Royaume
actuel, immédiat, celui de la
priére. 12 nov[embre]. Concert Arthur Rubinstein. Impression trés forte de l’influence de la colonne vertébrale sur la musique. Cette téte vertébre elle-méme au haut de la pile de [l’axe] vertébral d’ow jaillissaient des mains. Harpe humaine, table d’harmonie. Le squelette servant d’armature a une multitude de /i/s sonores. 14-18 nov[embre]. A Lyon pour une conf[érence] sur la litt[érature] jap[onaise]!. Dijon. Le P. Vérel?. Un cercle d’étudiants catholiques. Le matin promenade
délicieuse dans cette vieille ville Frangaise. Ta bouche est meilleure que le vin. — La bouche du Verbe d’ou sort toute sagesse. — I] m’a baisé d’un baiser de sa bouche — Introduxit me in cellam vinariam. 4
R. va bien. Espéce de miracle depuis que son fils est parti en mission le 7 novembre.
[93] Chouchette a appendicite. Vu L. M[assignon] qui me rappelle ce q[ue] je luiai écrit des coufis arabes. Non pas l’amour, mais le désir, une espéce de désir sans charité, un désir « onto-
logique ». Adieu. Tu veux un souvenir? Prends ce timbreposte. Tu penseras a moi la prochaine fois que tu le lécheras.
La nature qui devient si facilement contre-nature. Quaecumque autem naturaliter, tanquam muta animalia norunt, in his corrumpuntur (S. Jud[e], 10)'.
s
Novembre-Décembre
1925
697
Le 28 nov[embre] départ p[our] Luxembourg avec Gigette. L[uxembourg] sous la neige avec le profond ravin q[ui] l’entoure. La messe chez les Fréres Capucins au milieu de vieilles dames. Conférence le soir,
M. Reuter. Hugues Le Gallais. Madame Maymisch de S.-Hubert et son beau chateau de Colpach. Bruxelles. Francqui! et son masque de vieux tigre. Avenue Louise. Réception Carton de Wiart?. Le lendemain déjeuner de la Revue G[énérJale, Davignon®. Confé“rence a 5 h. sur la Poésie japonaise. Le 3, Malines, le Cardinal Mercier q[ui] n’est plus qu’une ombre, un énorme nez trés rouge, avec Abbé Van den Hurt. Anvers, chez M. Laurent F[...]. Conférence au Collége S.-Jean Berchmans. Le lendemain le port, réception a ’H[6tel] de V[ille] par le Bourgmestre Van Cauwelant, flamingant, la fléche si pure et si légére de la Cathédrale par la fenétre du Rathhaus, le Musée Plantin, le Gr[and] Musée, Jordaens, Snyders, /
Christ a la paille*, Bruxelles, Francqui. Liége. Visite du fort de Loncin sous la neige et le grand froid, ce tas de béton cassé sous le linceul de la neige. Retour a 7h. 30 4 Paris. Chez Adrienne Monnier® chceurs magnifiques de J. Benoist-Méchin*. La terre a la forme
d’un cceur.
La touchante figure de Marie-Adélaide, Gr[ande]D[uchesse] de Lfuxembourg] morte le 24 janvier 1924 aprés avoir essayé en vain d’étre princesse, carmélite et sceur des Pauvres’. Igitur constitue une espéce de talon, aprés que toutes les ceuvres détachées’®.
de Stéphane Mallarmé
en auraient été
7 décembre. Vu Philippe [Berthelot]. Je retourne décidément au Japon’. [94] Chemin de croix — Cette croix dont le Christ est chargé, c’est a la fois une route et un carrefour — Autour du Christ garrotté nos péchés armés jusqu’aux dents font bonne garde.
698
Cabier V
Calderon! — Ed. Excelsior, 27, quai de la Tournelle. 13-15 déc[embre]. Conf[érence] en Suisse, Zurich, au Polytechnicum Martin Bodmer. Genéve. Sacré-Cceur. Athénée. L’Abbé Journet?. Grand succés. Poémes commentés*. Dijon. Visité le chateau de Montmoyen. Pris billets pour Japon. Parution de mes 2 livres : Feuz/les de Saints et Morceaux choisis.
R. me dit que ce sont probablement les grands achats de café q[ue] j’ai faits au Brésil et la baisse q[ui] s’en est suivie q[ui] ont déterminé la ruine de son mari.
Une vieille femme pareille 4 une petite mie séche. Quand les Anges adorent le Christ descendu en moi par la Communion, ils ?adorent par rapport a moi, pat rapport a ce mystére spécial d’amour, a ce trone spécial d’ignominie que je lui ai préparé, dans son rapport en ce moment spécial avec cette 4me spéciale. Vers 60 ans tous ces énormes visages charnus et tuméfiés. 22 déc{embre]. Visite de Cocteau converti. Figure inquiéte, sensible et fine, des yeux maintenant pleins de
lumiére. Emploi continuel de comparaisons que je ne peux
pas suivre. I] me parle de Paul Morand, de son
trouble d’entrailles, de cette épouvante au Siam au milieu de cette nature tropicale. Jules Renard dans son Journal intime dit a peu prés a propos dune lecture de ma traduction d’ Agamemnon qu’aux images vaguement belles il faut préférer les images exactes*. C’est une remarque tout 4 fait appropriée a sa nature de visuel et de calligraphe. On peut répondre: qu’est-ce [95] qu’une image exatte?
Décembre 1925
699
une image est toujours forcément un a-peu-prés, une analogie partielle. Diflérentes sortes d’images. On peut par une chose matérielle suggérer une autre chose matérielle, par ex[emple] je compare la lune a une navette. Toutes les images de Renard sont de ce genre. Ou bien l’on peut par une image matérielle suggérer une chose spirituelle : ]’étendue de son intelligence, la tempéte des Révolutions. L’intérét de l’image n’est plus son exactitude mais la force, l’envergure qu’elle apporte 4 Vidée, en la rendant perceptible aux sens. Il y a plus en nous qui est ébranlé, qui est sensible a Vidée. L’image réunit 3 avantages : une idée si complexe qu’il serait sans doute difficile de la faire entendre directement, une émotion plus grande,
s’'adressant a un domaine perceptif plus étendu, Putilisation comme par référence a un dictionnaire de ce monde physique qui nous entoure. Dans le dictionnaire aussi aucun mot ne répond exactement a ce qu’il signifie. C’est un signe et non pas une réduction. L’image peut avoir pour but d’échauffer, d’émouvoir Pauditeur, de le faire sentir et penser davantage. Le Pape établit la féte du Christ-Roi (dernier dim{anche] d’oétobre). Noél, visite chez Maritain a2 Meudon
ot je vois le
jeune Juif converti par Copeau, Sachs, qui va entrer au séminaire (!!)}. Sert me dit q[ue] la peinture doit étre 4 ’architecture comme le pelage au corps pour un animal. Un panneau par sa forme et ses dimensions fournit toutes les lignes de la composition’. Il me propose d’illustrer Soulier de Satin®. Les petits arbres en verroterie de Misia [sc].
Un homme qui posséde toutes les formes de la foi, y compris la mauvaise foi. Le poéte ne regarde rien et il voit tout.
Joo
Cahier V
Il y a des choses qu’on ne peut pas expliquer avec des paroles, mais qu’on peut expliquer avec de la musiquel. [96] Filiae eorum compositae, circumornatae sicut similitudo templi (Ps. CXLIII, 12)?.
Une femme n’est intelligente qu’au détriment de son mystére. J’ai toujours détesté par-dessus tout le type de femmes intelligentes du xviir® s[iécle], la Francaise piquante. La collection des Latour au Louvre m’a causé une véritable horreur. Chfemin] endroits
de croix. Les 3 chutes du Christ a des
inattendus,
arréts, insistances, collaboration
avec le hasard. — Un Ch[emin] de croix ot le Christ aurait une taille gigantesque jugé et crucifié par des nains. — Un ch[emin] de croix tout entier dans le rouge-violet. — A la 8¢ St[ation] le Christ apparait tout 4 coup harnaché de l’immense croix de |’Eglise future qui va remplir toute la terre, devant les femmes et les enfants q[ui] représentent l’avenir. La f[emme] représente le mystére de ce qui sera plus tard’. C’est son cceur et son ventre qui savent.
a)
ats
A la trace de Dien a une grosse vente'. La baronne P. se nourrit des ceufs d’une dinde vierge. 31 d[écembre]. Voyage avec le banquier Dormoy, b[eau]-frére de Léger, p[our] voir prés de Tours une p[ro]priété q[ui] ne nf[ous] convient pas. Une demoiselle A. Widerhorn demeurant a cédté de la maison de Riviére m’écrit qu’elle a été convertie par ma correspondance’. Mon fils Henri me parle d’un jeune homme, Henri Parisot, mort saintement le 2 janvier 1925, auprés duquel il a vécu et q[ui] avait été converti par mes ceuvres. Ce sont des choses auxquelle j’ai besoin de penser de temps en temps pour
OE pe
a
t
||
Décembre
1925
Jol
me réconforter. D[eo S{z¢] G[/oria] / — Regu une lettre assez touchante du pauvre Suarés!. Les enfants & [...]2 donnent un grand réveillon pour célébrer la i_ fin de Vannée, q[ui] a été marquée pour moi par _ beaucoup de graces. Une année de jubilé.
1926 ref janv[ier]. Assez beau temps. La Sf{cur] Thlérése] de PEnf[ant]- Jésus a eu sa « conversion» définitive le méme jour q[ue] moi : Noél 18861.
Pour Paul Souday Mais la science seule, 6 grand homme, |Jésus| a ce don De nous fournir des lois réelles, absolues,
Que l’intuition, hélas, n'a jamais eues ! Strada?.
[97] Vu mon vieil ami Paraire® frappé d’une hémiplégie au milieu de ses 15 enfants, sur son lit‘, un peu
comme un général sur son champ de bataille! Partout des dortoirs. Une maison pleine d’anges. Delteil : je m’attendais a voir un gaillard entripaillé et truculent, je vois un jeune homme mince et fréle comme un cure-dent ou comme ces employés dans les mairies q[ui] sont préposés aux décés®. 3 [janvier]. S. Geneviéve. 17¢ communion petite Renée a la Chapelle des Oiseaux.
de ma
Visite de Dimitri Merejkovsky*, un petit vieillard gris fer aux yeux pales et durs. Le 12, revu A. Suarés, tres doux et affable.
Janvier 1926
703
Le 14 [janvier] a 7 h. du mfatin] c[ommuni]é avec R. a mon cote. Il fait un froid terrible, mais
« quand
_ on aime on a toujours chaud». Déjeuné a l’Hotel Meurice avec les Sert et les Bferthelot]. Je pars a la gare de Lyon a9 h. 4% avec ma fille Gigette (Reine). Arrivé a Marseille 4 11 h. L’H6tel du Louvre. Le Porthos. Départ a 4h. % par un froid et un vent terrible, Marseille et toute la région couverte de neige. En route vers le Japon. Le 16 [janvier]. Le vent souffle en tempéte. La mer toute blanche sous le grand soleil profondément travaillée par le vent. Le Cap Corse, Bastia.
A bord
3 évéques, les 2 év[éques] de Corée. Remerciements a Dieu pour cette année comblée de graces. ?
A Argentan la nouvelle mariée doit apporter en offrande une belle chandelle et /’ume de ses chaussures (Herriot)}.
Tout se rapporte dans le monde q[ue] n[ous] voyons a un monde q[ue] nfous] n[e] voyons pas. N[ous] vivons au milieu d’un systéme de choses invisibles manifestées visiblement (J. de Maistre)’.
Le 17, arrivée 4 Naples par une pluie battante. En auto a Pompéi. Rues étroites avec des pierres pour traverser comme un ruisseau. Groupement des institutions juxtaposées, la basilique et le forum, avec le temple de Jupiter au bout, et derriére le Vésuve couvert de neige, les théatres, tragique, opéra, gladiateurs, palestre et le petit marché triangulaire, et la vue des montagnes d’Amalfi, tout cela serré étroitement. Petites maisons, petites chambres comme des cellules d’abeilles. Un seul pain, un seul gateau avec quelques raies. Beaucoup de cuisines en plein vent, donc alimentation collective, de méme les lupanars. La religion est une espéce de présentation [98] de la nature, d’introduétion au site’. Les morts du musée rappelant tout a fait les cadavres de Yokohama et de Tokyo. Emotion de penser q[ue] n[ous] touchons des contemporains de S. Jean. On voit leurs figures. Promenade
706
Cahier V
La lune toute ronde se refléte sur le verre et le cuivre
du compas. Opération de Chfouchette] aujourd’hui vier].
18 [28 jan-
S. Brandan et ses compagnons célébrent la Paques sut le dos du poisson Jasconius?. Fréquenté par les mouettes et ces hirondelles aux pieds palmés qu’on appelle des « capitaines au long cours ». 29 [janvier]. Ciel bouché. Vent chaud. Pluie chaude.
Le temps infini ne serait pas l’éternité : celle-ci est par rapport a lui comme [indivisible par rapport au contraire. Le temps est l’image mobile de |’Eternité (Platon)?. Quis nos separabit a charitate Christi? Tribulatio, etc.,
et tous les autres obstacles et oppositions mateérielles. Mais voici les grands obstacles permanents : Certus sum q|uia| neque mors neque vita, soit la mort, soit la vie, neque Angeli, les faux dieux, [100] les faux annonciateurs, comme celui q[ui] a apporté le Coran 4 Mahomet,
neque principatus, les lois du monde physique, neque virtutes, les forces de la nature (comme cela est prouvé par les miracles), neque instantia, la pression des choses présentes, neque futura, la préoccupation et Vinquiétude de avenir, neque fortitudo, Vétalage de la puissance matérielle, neque] a/titudo, le vertige des grandeurs de Dieu, n[eque| profundum, ou de notre propre abime et néant, n[eque] creatura alia, pat ex[emple] la femme, poterit nos separare a caritate Dei q{uae| eS in Christo Jesu Domino Nostro (Rom., VIII, 35-39)*. Porthos, cab[ine] 15. Hier pendant le bal formidable nuage comme un géant noir q[{ui] s’élevait tout droit de la mer au ciel,
Janvier-Feévrier 1926
éclairé par la pleine _ vétement de vapeur. vastes éclairs. — A toute droite dans un
707
lune q[ui] ¢a et la pénétrait son Un géant borgne!. A Vhorizon 3 h. du matin la Croix-du-Sud azur indiciblement pur et rayon-
nant.
Purification. Cierges. La cire du cierge représente la chair virginale du divin enfant, la méche son Ame et _- la flamme sa divinité (S. Anselme)?.
2-3 fév[rier]. Colombo. Diner Winzer. Couché au Mont Lavinia.
avec
le peintre
Aujourd’hui c’est Freud q[ui] interpréte les réves comme jadis son ancétre Joseph, Ministre du Pharaon. '
Bitoile terne dans le ciel crasseux.
Protegunt umbrae umbram ejus (Lucifer) — Job’.
Sexagésime. 1°/ La parabole des Semeurs — 29°/ Le déluge— 3°/ S, Paul au péril de la mer. Dans la parabole 3 espéces de mauvais terrains, route, pierres, épines; 3 especes de bons, 30, 60, 100. Dans l’arche 3 étages
(S. Aug.)*. S. Paul, patron des colons, des navigateurs et de tous les évangélisateurs, aussi de tous ceux q[ui] souffrent tentation dans leur chair. Vrtus in infirmitate perficitur’. N[ous] avons p[our] compagnon de voyage M. Judah, planteur a Singapour. Tirage de la tombola. 26.
[ror] 8 fév[rier]. — Singapour. [Raffles h.] En auto dans la nuit tropicale.
9 [février]. Les 16 ans de ma fille’. 11 fév[rier]. Saigon. Aurousseau’ vient a ma rencontre au Cap S.-Jacques. Au Gouv[ernement] G[énérjal. Cognacq’. Les singes dans le banyan et tous ces petits lutins noirs suspendus a ses fils et cordages. Les locataires et l’ascenseur. L’orang-outang femelle
708
Cahier V
au pied, comme un concierge}, se lavant dans un baquet avec un petit torchon. Départ le 14 au matin, dimanche. T[ou]te la j[ournée] cette cote désertique. Pierre Benoist [szc]?.
Sur un bateau un tigre malade a qui on arrachait les vers du nez avec une tenaille. Un petit éléphant harnaché et sanglé de liens fabriqués avec des pelures d’ognons.
. . sans forme et sans habit, L’esprit veille parmi ses gardes assoupis’. Quinquagésime — Il y a une langue des Anges, il y en a méme plusieurs d’aprés S. Paul. Sz Angus hominum loquar, et Angelorum*, plusieurs modes d’expression et de communication des natures intellectuelles. Tradetur gentibus. Le Peuple élu n’en veut pas et le
—_
>
—
livre aux gentils pour en faire ce qu’ils veulent, avec
la nuance de la trahison, comme si un pacte avait été violé. Dieu a donné sa parole, son Verbe, et Israél le
livre. Livrer : en latin libérer. Israél atteste et teste. —L’Aveugle-né représentant le genre humain (S. Gr[égoire]®, — Les G[entils] en la personne de Pilate se lavent les mains de sa mort. « Je suis innocent du sang de ce Juste. » — Hier a la 1T€ Chute J[ésus] tombant comme ivre d’amour la téte sur le sein de ?h[omme] q[ui] le frappe. A la 17 chute on le renverse, a la 2® ch[ute] on le franchit, a la 3¢ on le piétine. Trahison et tradition’.
S. Scriptura — (SS, Gey
Dum gestum narrat, mySterium tradit
Loreille a la forme d’un point d’interrogation? et le trou. La nature rend gloire 4 son créateur, non seulement et le faon, mais avec le tigre et le
avec la violette cactus,
AOISAO AT IR I2 R T
Février 1926
709
Jatta cogitatum tuum in D{omi|no et Ipse te enutriet _ (Ps. LIV)}. La méditat[ion] passive. Le Centurion (S. Matth., VIII). Le C[enturion] dit au Christ : Ce n’est pas la peine q[ue] tu te déranges, q[ue] tu interviennes toi-méme directement. Fais marcher tes serviteurs, et qui mérite mieux ce nom q[ue] les lois physiques q[ui] ne sont si exactes q[ue| _- pour mieux te servir, et q[ui] elles-mémes obéissent a tes
Anges.
[102] Le liquide séminal quand il ne sert pas 4 la procréation devient un simple excrément, comme le sang menstruel?. De la l’idée d’ordure attachée aux choses érotiques.
' Dans le N6 la musique et les vociférations établissent autour du drame une espéce d’enceinte sonore’. Lamock, Dodd Island, Chapel Island, Ocksen, Turnabout, les Chiens blancs, je réentends les noms
de tous ces phares que j’ai si souvent remontés pendant mes années de passion et de désespoir. 18-2. Une passion d’amour, de remords et de désespoir‘. Le mot d’argot des soldats anglais pour « morts pendant la guerre » était gone wes.
Bacon compare les mots qu’on n’a pas définis a des guerriers laissés pour morts et q[ui] se relévent pour vous poignarder dans le dos. Faire le bien en secret 7m abscondito 4 la maniére
de
Dieu g[ui] voit 7” abscondito’. Isaie, LVIII, 9-14 : St abstuleris de medio tui catenam, du milieu de toi la
chaine de fautes et d’habitudes qui attache ton cceur
aux créatures et t?empéche de t’ouvrir et de te déployer. Et desieris extendere digitum — attention et contac aux choses particuliéres, si tu replies en toi ton attention
10
Cahier WV
4 toucher, orietur in tenebris lux tua, ta propre aurore A toi enfin, et tenebrae tuae erunt sicut meridies, il ne dit
pas qu’elles seront transformées dans la clarté de midi mais qu’elle seront pour moi la méme chose que cette clarté de midi. E¢ ossa tua liberabit, ce qui est la base, ce
qui dans ta matiére [est] le plus dur et le plus réfradtaire, associé au péché originel. Et aedificabuntur in te deserta saeculorum, pat toi les étendues inexplicables des siécles seront transformées en un édifice compréhensible, fundamenta (les raisons d’étre) generationis et generationis suscitabis, elles deviendront vivantes et agissantes en toi. Tout ceci s’adresse au Christ, mais aussi a tout
chrétien quien se rangeant 4 l’ordre devient en quelque mesure la fin et assume le mérite de cet ordre. Sz averteris a sabbato pedem tuum, facere voluntatem tuam in die sanéto meo et vocaveris sabbatum delicatum (ce repos en Dieu pour lequel il faut infiniment de pureté et de délicatesse) et glorificaveris eum, dum non ia vias tuas et non invenitur voluntas tua ut loquaris sermonem. "Tout ceci se rapporte a l’oraison de paix dans laquelle abdiquant nfotre] volonté, nfous] laissons tout faire a Dieu. Tune deletaberis super D{omi\no et sustollam te super altitudinem terrae [103] (toutes les hauteurs et grandeurs des choses créées — V[oir] l’Ev[angile] de demain)! et cibabo te haereditate Jacob patris tu. — Non pas de choses étrangéres, mais qui te sont en fuetlanel sorte
connaturelles,
son Pére. — (les murailles
héritées,
par
droit
de fils sur
Auparavant : vocaberis aedificator sepium du
cloitre
intérieur),
avertens
semitas,
in quietem, disposant sous nos pas mille sentiers détournés q[ui] nfous] conduisent a la paix?. Le doigt : replier ’organe de curiosité et de contaé. Shanghai, 20-23 février — Hangtchéou 22 février’. De nouveau le Japon. Le 24 au soir les iles Goté. — Le 25, la Mer Inté-
rieure par un temps radieux. Le 26, Kobé. Le 27, 4 7 h. du soir, Yokohama.
Février-Mars
1926
711
Une femme presque sans corps mais avec des yeux _de feu qui a la force d’un piment ou d’un cornichon.
J'ai pour X. des sentiments dispute a lindifférence.
ot admiration
le
Les incroyants ricanent du « Peuple élu», de cette longue élaboration q[ue] le choix divin lui a appliquée. _. Mais ils trouvent tout simple que pendant 200 000 ans une Providence anonyme ait conduit peu a peu, en la démunissant de ses défenses extérieures et de toute adaptation particuliére, une classe d’étres vivants de Pétat de singe a l'état d’homme pensant. Et cependant que d’obstacles et de déviations, de distra€tions! pos-
sibles sur la route! — La différence spécifique de homme corporel, c’est qu’il n’a pas été construit pour du particulier.
Curd of ass’milk (Pope)? — Le vers blanc consiste daprés Milton « in apt members, fit quantity of syllables, and the sense variously drawn out from one verse into another (V[oir] ce que je dis de ’enjambement). Le Christ dans la parabole de Jacob et d’Isaac prend pour se faire bénir de son pére aveugle les poils de Panimal.
Vox,
vox
est Jacob, sed manus,
manus
sunt
Esau. — Voix du Verbe et poils de ’homme animal. — C’est seulement alors que le Pére lui dit : Da mihi osculum, fili mi, — et odor filii mei sicut odor agri pleni. La plénitude de laccomplissement complet, toute la terre réconciliée. — De pinguedine terrae, ‘Tintoret, Rubens, Jordaens, Titien. D’aprés certains mystiques les poils signifient les rayons de lumiére’. La pendaison est une expression du Kant [sic] Anglais. Le massacre de la guillotine, cette explosion de gros sang rouge, tout cela est choquant®, malpropre et inconvenant. La corde au [104] contraire n’est que Paccentuation du faux-col et la pomme d’Adam si prononcée chez nos voisins indique une espéce de vocation naturelle. La pendaison bouche homme CLAUDEL
V - 26
20
712
Cahier VV
définitivement, l’enferme dans son for intime. II ravale son souffle et sa vie, comme il était habitué a ravaler
ses péchés. Les
vendeurs
de
colombes
—
les
simoniaques
q[ui] vendent le S.-Esprit'.
Le Chapitre vit de S. Jean est étonnant de vie et de réalisme. Avec ses sinuosités, ses sautes brusques didées, ses contradictions (On veut le tuer — on ne veut pas le tuer), ca a lair d’un compte rendu sténographique. On voit N.-S. au milieu de la meute se défendant a la maniére des hommes de génie non seulement par la logique mais par des explosions de vues complétement nouvelles et par des offensives foudroyantes. L’accusation des Juifs qu’ils formulent avec tage c’est toujours leur cliché : il n’a pas étudié,
il n’a pas le cachet officiel, il va contre la tradition. La réponse du Christ est ’évidence qu’il vient de Dieu. Crest son enscignement méme qui est sa caution. Et s’adressant 4 ce qu’il y a en eux de plus profond, il leur crie : Vous le savez bien vous-mémes?! Au fond de vous-mémes vous me savez, vous savez d’ou je viens et q[ue] celui-la est vrai qui m’a envoyé, et q[ue] v[ous] méconnaissez! — La circoncision q[ui] guérit en partie : l’organe de la concupiscence, dépouillé de sa peau, et q[ui] dans le sang a regu le cachet de la Loi. — La situation est grave pour les Juifs. Il y va de leur situation, de leur peau. S’ils laissent vivre
Jésus, devant le peuple c’est qu’ils le reconnaissent pour le Christ. C’est une sommation. Il n’y a plus moyen de tergiverser. La Passion est décidée. C’est @un tragique immense. (Numquid vere cognoverunt principes, quia hic est Christus ?) — Quaerebant ergo eum apprehendere et memo misit in illum manus. Les incrédules cherchent a ?appréhender, mais ils ne savent par ou le prendre, comment s’y prendre, comment mettre la main sur lui, que faire de lui (Renan, Loisy, Couchoud)?. Les deux devises inscrites sur la banniére de Satan :
Mars
1926
713
Eritis sicut di et Non serviam*. Théosophes, protestants, _libres-penseurs, démocrates, anarchistes. Adolescens, tibi dico, surge? ! — Rimbaud et moi. [105] Vide comme autre glace. —
le reflet d’une glace dans une
Il descend dans la cale au bout d’un fil un informe
conglomérat de caisses tout ruisselant de vermouth —
Une mer de vermouth.
Le bonheur n’est pas le but mais le moyen de la vie. Squelettes chassis*. 28 [mars]. — Promenade 4 Takao san avec G[igette].
Madeleine aux pieds de Jésus ne brise pas, ne répand pas seulement ce petit vase de parfum précieux, mais son cceur généreux et son ame aimante. C’est d’elle et non pas seulement du parfum q[ue] le monde imbécile ne cesse de répéter, comme
des carmélites :
Ut quid perditio haect ? Le doute est l’état le plus pénible pour l’intelligence
parce que Dieu a voulu q[ue] ’homme souffrit quand il s’écarte
de la vérité
comme
quand
il s’écarte
du
devoir (A.-M. Ampére)°. Si Judas donne comme signe qu’il embrassera Jésus, ce n’est évidemment pas pour le faire reconnaitre, car les Pharisiens n’étaient pas en peine d’envoyer q{uel]qu’un qui le connit. C’est qu’on se défiait de lui. On avait peur qu'il ne trahit et qu’il fit tomber la troupe des satellites dans un guet-apens. II fallait qu’il se compromit. — Sa colére contre Madeleine doit provenir d’un désappointement financier. I] comptait évidemment sur cet argent pour q[uel]q[ue] combinaison, peut-étre pour la réparation de ses malversations*®, pour le réglement d’une mauvaise
714
Cahier V
dette. De 14 plus tard la séduétion des 30 deniers. Ainsi cette merveilleuse odeur du parfum répandu marque le commencement de la tragédie?.
Un gras ange fait de sacs jaunes. 4 avril. Paques. Promenade a Atami avec le C[ommandan]t Tétu et Gigette. Les cerisiers, la merveilleuse route en corniche le long du Pacifique. Shuzenji®. Un froid cru. .
Baptisma — non carnis depositio sordium sed consctentiae bonae interrogatio in Deum per resurrettionem Jesu Christi (S, Pierre s1l))2: Le w anglais n’est nullement traduit par notre ou, qui est une voyelle tandis que le w est une consonne. Jésus apparait januis clausis, les portes des sens, mais aussi celles du présent, du passé et de l’avenir. Tout a coup im medio noStri il est 1a, il est Phote de ces forces par lesquelles nous existons*. les
Ce qui nous rend différents, c’est Phabit, la peau, connaissances acquises, Vesprit, les différentes
modes de conjonétion avec l’extérieur. Ce qui nous rend semblables, c’est le coeur, cela par quoi n{ous] existons. C’est par le coeur que n[ous] ressemblons au Créateur et q[{ue] n[ous] donnons accés au Rédempteur.
[106] Cognosco oves meas et cognoscunt me meae — Cela imite un peu le bélement des ouailles. — Cette phrase a une douceur mystérieuse indépendante de son sens superficiel®, 17-28
avril. —
Séjour
de lAmiral
Bazin
sur
le
Jules-Michelet. Quasi liberi, et non habentes velamen tatem (S. Pierre)*.
malitiae
liber-
Aboril-Mai 1926
715
In imagine pertransit homo (Ps. XXXVIII). Pas de _ réalité, rien q[ue] des imaginations, le vain fantasme qu'il se fabrique de lui-méme et q[ue] les autres apercoivent. Seule ma substance est auprés de Dieu substantia mea apud Te eS. S’habituer a sa nouvelle figure de vieillard. -
Un poéte n’a pas besoin de regarder pour voir. The inward eye (Wordsworth)?. La [f.m] Une longue fouine lubrique. Départ le 28 avril au soir sur le Jules-Michelet avec PAmiral Bazin pour Miyajima. 29. Petit cyclone, mal de mer. 30. Mer Intérieure par un temps superbe. Conversation avec René Schwob q[ui] me parle de conversion’. 1[¢? mai]. Miyajima radieux jusqu’au 3. Kobé Toi hotel. Le jardin de pivoines de Kawasaki‘. Diner Melchior. Le pont courbe de Iwakuni avec le vieux pin’. Causer avec Dieu comme avec un sage conseiller, avec un ami infiniment bon, patient et expérimenté, qui ne prend scandale ou étonnement de rien. Les traités de dévotion, spécialement en ce q[ui] concerne le péché, sont écrits sur un ton faché, exagéré et mena-
cant qui ne fait pas de bien. La détestable rhétorique du xvue siécle. Il y aurait a écrire un « Guide du Chrétien en état de péché mortel » par un clinicien de lame plein de charité et de ressources, qui ne se facherait pas, q[ui] aurait pitié et sympathie, q[ui] nous montrerait la grace coulant toujours 4 |’état souterrain, q{ui] nfous] dirait q[ue] le pécheur est encore en état de faire q[uel]q[uJe bien, q[ui] montrerait ses humbles possibilités immédiates, un petit pas a faire et puis un autre tout petit pas. Le ton simple, humble et pénétré de |’Imztation. 5 [mai]. Osaka. Bunrakou®. Marionnettes. Le chateau, le temple de Tennoji, ’énorme cloche dont on
716
Cahier V
voit le bas. La rue des Théatres, Dotombori avec son
grouillement formique. Le canal entre les restaurants. Ganjur6'. Le restaurant avec Inabata. A minuit Nara, la forét avec les cerisiers. Le temple de Hasé dans Vaprés-midi, les pivoines?. Le lendemain pluie torrentielle, Yakushiji, les 3 bouddhas de bronze noir luisant,
les plus anciens du Japon. Le soir le Préfet Shintasi Suzeski q[ui] n[ous] fait de petits dessins. Le 8, Yamada Isé, le temple avec ses cédres et ses camphriers gigantesques, la riviére mystérieuse?. A Nara Jimmo Teuno. — Un noir Japon primitif et forestiert. — Monté a PAsama par le funiculaire, le [107] temple. Le lendemain aux 2 rochers réunis par une corde de paille. Une mer matinale, radieuse, inouie, golfe découvert par
la marée basse avec un vieux pont de bois dans le fond’. Nagoya’.
Le démon dont la figure ressemble 4 un paquet de boyaux. Une cravate bleue aussi inopinée q[ue] la petite vérole’. Rogations. — Petite, quaerite, pulsate. La priére, la recherche, action directe. Deintus respondens. Si q{uel]qu’un... au lieu d’un pain, une pierre. Au lieu d’un ceuf un serpent. La pierre, c[e] q[ui] n[ous] demeure dur et étranger, inassimilable, dont l’intérieur n’existe pas pour nous, qui est tout extérieur, ot la dent ne pénétre
pas, q[ui] ne se mélange pas 4 nos sucs. Au lieu de Poeuf, q[uel]q[ue] ch[ose] de pur et simple et de tout rond,
lVceuf qui contient
toute
chose,
un
serpent
élusif et fuyant, quelque chose qui se tortille, qui nous ronge et qui nous empoisonne — embléme des réponses philosophiques. Ou un scorpion, q[ui] en se retournant, en essayant de faire l’ceuf, nous communi-
que démangeaison et gonflement, les 2 signes de Vempoisonnement, orgueil et inquiétude, grattement continuel’, Retour 4 Tokyo le ro [mai]. — le 16.
Chuzenji en auto
Mai 1926
F17,
Pas plus que la goutte d’eau ne tient sur une feuille _ de lotus, pas plus le mal sur une 4me qui le connait (K. Upanishad)?. Accroupie respectueusement tu répétes ton poéme, grenouille!
Lettre de Henry V. qui dégoité par son pére est _. devenu bolchevik et incroyant. 18/52.
[108] Libera me de sanguinibus, Deus, Deus, salutis meae (Ps. L)* — Les sangs, au pluriel, l’impureté périodique de la femme, limpureté purifiante? — Dieu répété 2 fois. Un prophéte compare les souillures répétées d’Israél Sicut pannus menstruatae’. — Le flux de sang de ’hémorroisse®. 23 [mai]. Pentecdte. Visite 4 ’Abbé Totsuka qui dirige une espéce de petit hdpital 4 Shinagawa’. Il vit la avec la fameuse Violette Sussmann et une espéce de sceur anglaise, tous les trois effroyablement sales dans une maison qui ne l’est pas moins. V[iolette] est une petite femme grande comme un enfant de 12 ans, mais avec un sourire trés agréable et un magnétisme particulier. Convertie subitement en regardant le T. S.-Sacrement, puis 20 ans malade et il y a 2 ans guérie miraculeusement du mal de Pott. T[otsuka] avec ce je ne sais quoi sur la figure a quoi l’on reconnait immédiatement chez tous les peuples un catholique, un prétre et un saint. Le S[aint]-Sacr[ement] conservé dans ce taudis.
Le commencement de tout est le sentiment parfaitement sincére, exact et positif de mon néant, et Pabsence en moi de tout mérite. Profond mystére! ce n’est que dans ce néant que le Christ viendra 4 nous. Le sentiment le plus général dans toute |’Asie depuis l’Inde jusqu’au Japon, c’est la faim. Toute Asie a faim.
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Cahier V
O-tsuki-san (la lune) qui s’essuie le coin de lceil avec un petit mouchoir de soie}. Passage des Vildrac. Madame, sceur de Duhamel’. [109] TWO POEMS DISCOVERED
Believed the Work of the Late Tsar’s Daughter® Two poems have been discovered, which the late Grand | Duchess Olga Nicolaevna, daughter of the late Tsar of Russia, is believed to have written when the whole Royal
Family was facing death at the hands of Bolschevist executioners. Both are prayers in verse, one for « country» and one for « enemies». The originals, as reported in the New York Evening World, were found in Ekaterinburg in a copybook and were published in the late N.A. Sokoloff’s report, entitled « The Murder of the Imperial Family». Two similar views of critics concerning the moral quality of pee verses accompany their publication, and we are told : « Maurice Baring, English dramatist, who translated the poems into English and sent them to the London ‘Times for publication, made the following comment: « The original is obviously the work of a cultured mind, but an inexperienced writer, who has nevertheless studied the best models. The interest of these poems is other and more, than literary.» In a Russian newspaper, \es Derniéres Nouvelles, published in Paris, a Russian critic, M. Hadasevitch,
writes : « In reading these inexperienced verses which are truly prayers, hidden, perhaps, from her nearest and dearest, it is tmpossible not to bow down before the astonishing moral loftiness which they express:
Before The Ikon of Our Lady Queen of Heaven and earth, Solace of the afflited, Hear the prayer of sinners To Thee — our hope and our salvation. We are sunk in the slough of passion,
Mai 1926
719
Lost in the darkness of sin, But ... our country, O upon her Look down with Thy all-seeing eye. Holy Russia, Thy bright dwelling, Has almost perished. We call out to Thee, the Interceder,
We know of no other. Abandon not Thy children, Hope of the desolate, Turn not away, From our sorrow and our suffering. Prayer Send us, Lord, endurance,
In the day of darkness and Storm. To bear the persecution of the people, And the pains of our Tormentors. Give us Strength, God of Justice, To forgive our brother’s trespass, And with Thy meekness to bear The heavy, bloody Cross. And in the day of tumult, When our enemies despoil us, Help us, Christ, our Saviour,
To bear the shame and the affront. Lord of the world, God of the Universe,
Hear our prayer, Give peace to our soul In the dreadful, unbearable hour. And on the threshold of the grave, Breathe on the lips of Thy srevants [sic] The more than mortal Strength To pray meekly for their enemies.
Apprehendet tritura messium vindemiam et vindemia occupabit sementem (Lév. lu a la Pentecdte). Tritura messinm, signifie étude, Pexégése, la méditation discursive. — Vindemia, c’est le sang du Christ, l’ivresse
bue 4 sa source. — L’un conduit 4 lautre comme la main q[ui] appréhende le sein. — Et enfin cette douce ivresse ne cesse pas au milieu méme de lattion,
720
Cahier V
pendant qu’ notre tour nous ressemons ce que n[ous] avons récolté.
La charité immanente au monde. Deus caritas eft : et qui manet in caritate in Deo manet et Deus in eo (Ilya dans la charité une certaine vertu de durée, de perma-
nence). In hoc perfetta est caritas Det nobiscum... quia stcut ille est et nos sumus in hoc mundo (S. Jean)+. C[’est]-adfire] q[ue] par la charité, nous sommes non plus extérieurs, mais intérieurs au monde, n[ous] le comprenons par le dedans, a la maniére de celui q[ui] l’a fait, n[ous] sommes reliés a lui par une certaine qualité d’adhésion, de pénétration et de permanence, a la maniére dont [110] l’éternel pénétre le passager. Dim[anche] N6 Kinuta?.
30 mai. Grande pluie. Aprés-midi aux
No more, no more, the moon is dead
And all the people in it; The poppy maidens Strew the bed, Well come in half a minute®. Viscosité. Caritas — pas la méme chose que l’amour, pas une modification de l’étre, mais l’étre lui-méme en temps que possédant, connaissant et se rfeconnaissant.
Deus es caritas (S. Jean, répété 2 fois). Non pas une fonction de Dieu, mais Dieu lui-méme possédant sa création.
Le Palais Gradinigo 4 Venise. — La jeune fille qui s’échappe par une nuit de carnaval en culotte rose et gilet fleur-de-soufre. — Un homme noyé flotte sur le grand canal et dans cette gondole furieusement poussée par ses rameurs* une femme qui hurle. Croire, Cest vivre. C’est une force qui informe tout l’étre.
Mai- Juin 1926
721
6 juin. — Chuzenji avec le Commfandant] Rosati. Azalées et cerisiers. Les iris en groupes bleus et jaunes qui sont venus me chercher depuis ma sortie de Toky6}. La radieuse matinée du lundi. Cent poémes pour éventail*. Lettre de Reine [...]*.
Le bouquet j[aponais] est un bouquet de lignes’. — Nomenclature des 5 lignes d’aprés l’école En shiu : _ The Heart, Help, The Gust, Skill, the finishing Touch. This school maintains that there are three secrets of arranging flowers. First, the art of giving expression and feeling to compositions. Second, the art of showing the charaGer of the materials, whether plants or trees (personnalité).
hird,
the art of keeping in mind the season and occasion of the arrangment by avoiding incongruous combinations (Conder, — The floral art of Japan). Erreurs a éviter : interseCtion, obstruction, parallélisme, fenétres, treillis®.
13 [juin]. N6, [...]’. Le Prince aveugle dans son ermitage visité par sa sceur folle. — Dans une ile au milieu du lac sous immense clair de lune j’entends jouer de la biwa’. — J’entends une flute dans {2brouillard. J’entends un éclat de rire dans le brouillard. Exclamations. Ah! votre visite est si rare! Je suis un homme grossier et je n’entends rien a vos distinctions. Puisque je suis un h[omme] grossier, laissezmoi me réjouir grossiérement. Le corps, les [111] sens, légoisme et pas seulement la fine pointe de lesprit, mais tout Vesprit et tout le corps, tout cela m’est bon pour recevoir celui q[ue] j’aime. Ah! sa visite est si rare! Ce n’est pas le moment de faire le difficile. Je lui donne ce q[ue] j’ai, je le regois avec ce q{ue] je peux. La présence de cet hdte supprime toutes les cloisons.
Thé chez la Princesse Higashi Fujimi q[ui] dans une hideuse maison moderne nous montre ses superbes vétements de cour, des épaisseurs de soie comme des calices superposés.
722
Cahier V
La vérité est non seulement du pain mais du sel. L’eau du baptéme nous initie au sel.
Les souffrances physiques! du Christ. — Avant la croix, les souffrances extérieures, les s[ouffrances] de la chair, les coups au hasard, l’ordure, le déshonneur. —
Aprés la croix les s[ouffrances] intérieures, s[ouffrances] fondamentales, s[ouffrances] des os. Le percement des membres,
la dislocation
et l’écartélement,
le corps
prenant son assiette non plus sur la colonne vertébrale, mais sur ses extrémités, mains et pieds, tout entier travaillé par le poids (m[ains] et pieds, mouvement et atte, lé fardeau de la preuve), los rapant le clou,
Pimpossibilité de bouger et d’agir (le Christ crucifié sur Pimpossibilité d’aller 4 nous), n[ous] adorons un dieu impossible, la Soif. Le Christ éternellement suspendu et dépendant, pesant sur les pieds et tirant sur les mains. Sa souffrance est en rapport mathématique entre son poids et la résistance des matériaux, une cathédrale de douleur. Au moment
de l’absoute le prétre fait le tour du
cercueil, 4 l’inverse de ce qui se passe dans les autres
cérémonies, de gauche a droite, de maniére 4 avoir le cercueil 4 gauche. C’est un rite immémorial qu’on retrouve dans l’Inde védique.
Une figure qui rayonne de bétise. Ruisseler de lui comme
une soutce.
Un orgueilleux ne peut pas étre un chef, il y faut une sociabilité, une sympathie, un godt de la chair et du contact comme a un maquignon. 20 [juin] dimfanche]. Délicieuse promenade 4 Omiya, dans la campagne ruisselante ot |’on vient de planter le riz. A la fois, la semence et la moisson, les 2 rivieres rapides et troubles, les bois, les pécheurs dans les petits étangs.
Juin 1926
723
Lady Ravensdal, fille de Lord Curzon. 2° St[ation]. La croix. Association épouvantable de E J.-C. et du péché. Plus une riviére est profonde et plus elle recrute d’afHluents.
Congrés Eucharistique 4 Chicago devant un million de fidéles. L’Amérique et Chicago en particulier au ~ milieu entre les deux Océans, entre I’Asie et Europe. Les lacs, une [fente marquée]}. [112] Nativité de S. Jean. — I] nait quand les jours commencent a décroitre. Le Christ q[uand] ils commencent a augmenter. « Pour qu'il croisse il faut que je diminue » (S. Aug.)*,
Le caractére Wang en chinois Empereur = est une verticale qui réunit les trois horizontales paralléles, le ciel, ’humanité et la terre. — Le caractére pére
est une main avec un baton.
Il voit du soir dans interrogation.
le ciel disparaitre
la lente
27 [juin]. Promenade 2 Hayama avec Raymond. Projet @une église souterraine® en forme de bénitier pour Chicago‘.
Naissance de Philippe de Massary’. Le parfum qualifie ce souffle par quoi n[ous] sommes vivants. Jér., chap. XIII. Dieu compare son union avec Israél avec ce linge que les h[ommes] se mettent autour des reins et entre les jambes. Longtemps il reste 14 et le prophéte a regu défense de le laver. Puis il va le cacher aux bords de |’Euphrate (l’exil) dans un trou de la pierre (la dureté du coeur). Quand il va le rechercher il est pourri et n’est plus bon a aucun usage.
724
Cahier V
Israél ne s’est servi de Valliance de Dieu que pour cacher ses parties honteuses, il a fait pourrir par son
contact la parole de Dieu. Ps. LXIM.
Accedet homo ad cor altum:. Le S.-Ceeur,
le coeur haut (ou profond). Le Ps. LX VII dit de la Colombe q[ui] est ’image du S.-Esprit :Penna ejus deargentatae et posteriora dorsi ejus in pallore auri®. La pureté peu a peu q[ui] devient la gloire? La spécialité des Chinois « zs to make the best from the most». La multitude des hommes parait heureuse et satisfaite, comme les gens qui sont assis 4 un grand repas, comme ceux q[ui] regardent le printemps par leur fenétre. Moi seul je suis silencieux et distrait, mes désirs ne m’ayant pas encore donné indication de leur présence. Je suis comme un enfant q[ui] n’a pas encore souri. Je parais éperdu et accablé comme si je n’avais nulle part ot aller. La multitude des hommes a assez et davantage. Moi seul j’ai lair d’avoir tout perdu. Mon esprit est celui d’un homme stupide. Je suis dans un état de chaos. Les hommes ordinaires ont lair vif et intelligent, et moi seulj’ai lair d’étre dans la nuit. Ils sont pleins de raisonnements et de distinctions, et moi je suis lourd et confus. Je suis emporté comme par la mer, dérivant comme s’il n’y avait pas de repos. Tous les hommes ont leur sphére d’action, moi seul je suis [113] incapable. Et ainsi je suis différent des autres hommes, mais la chose que j’apprécie est la Mére (le Tao) (Tao Te King, partie I, chap. xx, 2)4. Jonquille de Pleeur.
C’est en moi seul que tu puises le droit et idée et le pouvoir de dire Je. 4 juillet. — Voyage 4 Kyoto. Madame Blanche caeiene Miyako hotel. 5 j[uillet] 4 Chion-in®. Peintures
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de Kano Naonobu, sur fond de petits carrés d’or, chacun différemment obscurci de maniére 4 faire un fond de brume tout traversé de lumiére. Le délicieux jardin devant la montagne de verdure massive, étang d’ot: s’élévent des roches et des lanternes de pierre. Kiyomitzu. Le soir diner chez le peintre Shunkyé au bord du lac Biwa. Les corbeilles remplies de bois enflammées au bord du lac. Les peintres qui nous dessinent des cartons. Shunky6 en q[uel]q[ues] traits _ @un large pinceau nous fait un cheval et un poisson pour lesquels j’écris des poémes. La fenétre ronde donnant sur le feuillage vert faisant l’effet du vitrail le plus violent. — 6. Visite au Palais de Niji. Les grands pins des salles de réception, celle ot le shdgun a abdiqué entre les mains de l’Empereur?, démonstration
de la loi du triangle (reCtangle) et de la base latérale. Katsura. Arashiyama chez Tomita Keisen, promenade
en bateau. Diner avec les 3 au M[iyako Hfotel]. — Le 7. Promenade au Mont Hiei. Vue de tout le lac Biwa. Le temple entre les palissades verticales des cédres. En bas du funiculaire dans la vallée le vieux temple de San-jen-in avec les peintures de Seihio
(clairiére dans une forét de cryptomérias avec des effets vaporeux 4 la Corot au moyen d’encre de Chine) et d’autres peintures modernes. Encore un autre vieux temple au chaud sous les arbres. Départ le soir 4 8 h. 4%. A déj[euner], Matsuoka. Sapless pout exprimer la caradtéristique américaine. Absence de séve, de suc, de saveur. II ne reste que de
la fibre, de la bagasse. Mon temps est venu, dit le Seigneur Dieu. A votre injustice envers moi il est temps que je réponde par une autre injustice, et la aussi je ne me laisserai pas vaincre par vous. L’éternité seule peut suffire 4 mon injustice et 4 ma miséricorde. Dimanche 18 j[uillet]. Je monte 4 Chuzenji avec le Cfommandant] Tétu. Mad[ame] Herriot part le 19.
726
Cahier V
Le lendemain
20,
4 Yumoto
et le second lac sous la
pluie. Tenui eum nec dimittam- —
S. Madeleine.
Démonétisation du franc. — On a 6té la devise « Dieu protége la France » de la tranche des écus et aussitdt ils ont commencé a fondre, Dieu ne protége plus la France. Le Francais parcimonieux qui se faisait un Dieu de la piéce de cent sous, |’idole fond. La monnaie démonétisée, la disparition du crédit suit celle du Credo. Tout ce [114] q[ui] dans la société moderne
servait de lien aux hommes
entre eux, tout
ce qui permettait de donner et de recevoir, tout ce qui nous donnait une prise sur les autres hommes, tout ce qui garantissait ’avenir, tout ce que le passé n[ous] léguait, toute la matiére de notre commerce
et toute
war de notre espérance?. Une grande [lettre] vue de dos qui ressemble 4 une oreille d’éléphant. La monnaie q[ui] perd sa valeur et le sel q[ui] perd sa saveur. Un papier aussi vain que les livres des philosophes. Accroché 4 cette lente toue sur le Styx.
Au matin le Nantai-san décoche une grande fléche d’or 4 son rival le Shirane’®,
26 [juillet]. Mort de Claude Laroche emportée par une pneumonie a lage de 16 ans, a la suite des troubles
de Varsovie ow sa famille fut obligée de passer la nuit dans la cave. Elle était belle comme un ange*. — Retour d’ André Gide. Lettres®. Celui q[ui] se plaint des limitations du dogme et de la morale, c’est comme s’il se plaignait des limitations de la patrie q[ui] nous mettent 4 l’abri du chaos et de
Pétranger destructeur®,
Juillet- Aout 1926
727
30 [juillet]. Nuit en bateau sur la Sumida avec des geishas. L’une d’elles chante un air de pécheur plein d’étendue, la voix et l’eau.
« Nila hauteur, nila profondeur ne pourront n[ous] séparer de amour du Christ". » Les dimensions. Les gouffres infinis de l’Espace. I] faut donc trouver ce pourquoi la distance elle-méme non seulement ne nuit _-pas mais sert a n[otre] rapprochement avec le Christ. L’eau. — Nous ne voulons pas étre dépouillés, mais étre revétus par-dessus (supervestiri ). Les intervalles musicaux?.
:
And what if all of animated nature Be but organic harps diversely formed That tremble into thought as 0° er them sweeps Plastic and vast, one intellettual breeze Alt once the soul of each and God of all! (Coleridge).
Le Tout-puissant, Tout parfait et Tout saint Verbe du Pére descendant sur t[ou]tes choses et sur elles étendant son [115] énergie et amenant a la lumiére t[ou]tes choses visibles et invisibles, les unit et les fond dans son propre Etre, ne laissant rien dénué de son
opération. Et une certaine merveilleuse et divine harmonie est ainsi amenée par lui a l’existence (S. Athanase)‘.
2 aout. Ascension du Shirané. Le lac de Chuzenji a travers le brouillard d’un bleu ardent. Massage. Conv[ersation] rel[igieuse] av[ec] le Clommandan]t Tétu. Photographies du Ciel. Prodigieuses richesses de Dieu. Plonger mes bras dans ces trésors vivants, faire ruisseler les soleils entre mes doigts. Circulation de torrents. « Le silence éternel de ces Espaces infinis m’effraie.» Ce n’est pas le silence, c'est un hymne formidable. Les étoiles doubles colorées. E¢ nox
illuminatio mea in deliciis meis*.
728
Cahier V
Placarder un soleil blafard dans le ciel fatigué de septembre}. Couronnement de la T[rés] S[ainte] V[ierge]. Boire Jésus a4 longs traits.
Les Nébuleuses sont froides. — L’existence de ces corps froids q[ui] absorbent au passage la chaleur rayonnée par les soleils incandescents est d’ailleurs dune utilité absolue. Sans eux aucun rayon émis par les étoiles ou les voies laétées lointaines ne serait arrété. Le ciel entier aurait l’aspe@ d’une voite de feu continue et le rayonnement calorifique et ultra-violet q[ui] en résulterait anéantirait sur la surface de la Terre t[ou]te la vie organique (A. Berget, /e Cze/). Noémi Pernessin (Mad[ame] Raymond, femme de mon archite¢cte’, calviniste) me demande des lecons de catéchisme afin de devenir catholique comme son fils Claude dont je dois étre le parrain. Beaucoup de gens disent : Qu’est-ce que la musique des mots? si on veut de la musique adressons-n[ous]| aux musiciens. Ils ne comprennent pas la vertu de ce son qui porte avec lui Pintelligence, le mot est un son créateur. Quelle musique vaut 4 Voreille d’une femme ce mot : je t'aime. Quand Dieu dit : Fiat ux. Quand nous nous entendons nous-mémes qui disons : Oui! Quand le Pére dit : Mon fils! [116] En examinant cette végétation de demipensées que je produis sans cesse spontanément et qui somme toute sont la vie latente de lesprit, quel effroi de voir que la plupart sont des pensées d’orgueil et de détraction du prochain? Au-dessous du péché formel une espéce de température continuelle de péché. Nemo potest dicere, D{omi\nus, Jesus, nisi in Spiritu Santto (I Cor., x11)8. Contra: Tous ceux q[ui] disent : Pére! pére, etc.
Aodt
1926
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Les Oupanishad disent q[ue] celui g[ui] économise __ un mot fait une aussi bonne action q[ue] celui q[ui] produit un enfant male.
Oubliez le théatre et regardez le Nd. Oubliez le N6 et regardez l’acteur. Oubliez l’acteur et regardez l’idée (le coeur, kokor6). Oubliez Pidée et alors v[ous] comprendrez le N6 (Seami). La déesse de |’Aurore Indienne arrive sur un char
trainé par des petits cochons (Maritchi). Dieu ne pouvait se rassasier de l’Ame de S. Thérése. Promenade vett. ,
dans
une
rainure
sinueuse
de velours
12-15 [aout]. Par la Kansaitogi et les quatre lacs, profonde vallée forestiére avec son torrent d’écume blanche au fond, fleurs de toute espéce, la grande chaleur d’aott, Kamata, Okadi. De 1a en auto par
Numata jusqu’a Ikao, de tous cdétés dans le soir au bruit des torrents se dressent des batteries de volcans. Le lendemain par une route sinueuse Kamizawa. Le lendemain, par l Asama, Kusatsu. Les bains, le village
lépreux, le ruisseau de soufre et de vitriol qui sort du flanc d’un volcan. Le 15 Assomption, retour 4 Nikko par Maabashi en contournant la base de tout le massif montagneux. Grande chaleur’. Un vieux fossé sec.
Membres du Christ, quand nous commettons un péché, il a mal 4 moi. Quand n[ous] faisons le mal, nf{ous] lui faisons du mal. Toute ma famille en France au Prieuré de S.-Martin-
de-Lavardin sur le Loir prés Vendome. [117] Fin d’aott. Le clapotis du lac, lair obscur rayé de milliers de libellules parmi lesquelles trois papillons blancs, il tonne faiblement dans le brouillard?.
730
Cahier V
Par amour d’une femme mon interpréte Japonais Waichiro Imamona se fait délivrer frauduleusement une dizaine de milliers de yen. On vient de retrouver leurs corps dans la mer 4 Kobé attachés un a l’autre par la ceinture rouge de la femme.
A la porte de ?Amour je laisserai mes bonnes actions. Souffrez que je laisse également les mauvaises. Je ne veux garder avec moi que mon néant.
De regarder le soleil cela ’empéche chaud.
de me faire
12 et 13© dim[anches]. — Le Samaritain de la parabole q[ui] s’arrange pour ne pas étre remercié et celui de l’autre, le lépreux, q[ui] est le seul a penser a remercier N.-S. — La Samaritaine. N[ous] sommes le corps du Christ et Pun avec l’autre membres de membres.
Il y a des secrets qu’un pays ne révéle étranger. Dans le brouillard Vintense bleu tianes, les pourpres grenats d’herbes gréles, comme de légéres pyramides roses, d’autres serrées comme des ventouses. 27 aotit.
Promenade
aux
Mines
d’or.
qu’a un des gences fleurs blanches Route
en
corniche au-dessus d’un admirable paysage forestier. 28 [aott]. S. Augustin, patron de n[otre] coopérative. A PEvangile paroles bien appropriées 4 n[otre] association de convertis et d’écrivains. Vos estis sal terrae, — Vart q[ui] rend toutes choses désirables et sapides — Vos estis lux mundi — Vart q{ui] fait voir, et qui explique, qui n[ous] permet de tourner autour. — Mais devoir spécial de fidélité scrupuleuse 4 l’Eglise jusque dans ses moindres préceptes?.
toit. Rien ne manque a image méme les deux cheminées: lo est lceuf, la bouche, l’i est ’A4me du foyer, la vie enclose’.
|
Aott-Septembre
1926
7h
Prodigieuse variété des inseétes au Japon, tout ce | qui la nuit papillons, coléoptéres, libellules, miettes
_ animées, vient se jeter sur ma lampe. Ce petit monderee}. [118] Les 2 cascades 4 Nikk6 : l’une faite pour étre vue de loin, se partageant incessamment en deux, soit
| dans le sens — soit dans le sens|. L’autre faite pour étre vue de prés, une abside, un cabinet de verdure et d’eau vivante,
la fraicheur
quand
on
entre
dans
ce
couloir, cascades jaillissant directement de la verdure.
S. Rose de Lima. — S. Raymond Nonnat. Délivrance des captifs. 3 genres de captivité : Retenus de force dans un lieu étranger avec lequel on n’a aucun rapport. La chaine, servitude des sens. Le cachot, servitude de lesprit. Le travail, servitude active des membres?. Pauline Jaricot par ma _ belle-sceur Elisabeth’. 3 choses. La Propagation de la Foi et ’Giuvre du Rosaire, argent et priére. La préparation de Fourviére. Le martyre par l’argent, par la dette qu’on ne peut payer,
la forme
moderne,
la plus humiliante
de la
torture. La passerelle pour] aller 4 Fourviére qu’on établit par-dessus son droit, il faut la fouler aux pieds.
Le mendiant,
q[ui] Pinjurie du haut de la Montée des
Chazeaux, eat quelle gravit lentement et pénible-
ment ce calvaite Lyonnais. Le souterrain en croix de Fourviére ot on la dépose pendant une maladie. « Si les h[ommes] avaient la foi, je ferais fréquemment des miracles pour les guérir de leurs maladies, mais ils ont
décidé q[ue] je ne dois plus en faire et ils ne m’en d{eman]dent méme pas. » (Paroles de N.-S. a P[auline] J{aricot].) « Il est doux de mourir vierge parmi des vierges. » Le Cfommandan]t Daubé et Victor Point 4 Chuzenji. Retour 4 Tokyo le 8 sept[embre]. Le Chemin de croix — hominum'.
Ef deliciae meae esse cum filiis
732
Cahier V
Il y a un certain rapport de vert 4 vert tellement intolérable qu’il produit une protestation désordonnée de fleurs au hasard rouges et blanches. Un livre bien écrit qui vient 4 bout de nous moins
par la conviction que par le sommeil. Je suis en pourparlers avec la mort, je pése ses propositions.
Un matin d’orage. Cigales dans l’insomnie, dans le néant de tout. T. S. Nom de Marie. — Mer, mére, mira, mort, ame, amour, ami, amor. M: La Trinité, Dieu incarné, homme enclos dans le sein
mo = Vh[omme] dans le cercueil o la consommation t la croix
[119] 14 sept[embre], diner avec le P[rin]ce et la P[rin]cesse R[oyales] de Suéde. 15, le petit port de Shimoda ot les tombes des 31 marins f[ran¢]ais du Ni des M[essageries] M[aritimes] naufragé en 1874. Cérémonie bouddhique, les moines marchant en rond,
puis priére cath[olique] devant la pyramide, puis danse des villageoises avec des chapeaux plats couverts de fleurs, p[our] rafraichir l’4me des vivants et des morts, en rond, lancement
des bras
a droite et 4 gauche,
tapements de mains, cortége, tout le village n[ous] suit, on le voit garnir le sentier sinueux de la montagne, pompiers, boy-scouts, police, etc. 17, Kobé. Southern
songs. Peintures chez Kawasaki. Une de Mokki, un arbre
avec
une
maculation
noire
en haut, puis une
autre, [noir fat d’érable], gorgée de cris, ces petits oiseaux insubstantiels, le typhon, tourbillon de pluie
et de lumiére, le b[ateau], moteur soulevant 2 gerbes d’eau, Ange de Dante?. — 19. Okayama. La riviére basse. Le chateau. Maisons 4 cheval lune sur l’autre. Les cycas, jardin @hydres*. Le pay{illon] d’été du
Septembre-Ottobre
1926
733
P[rin]ce Imp[érial]. La salle des bambous. 20-21, Takamatzu. Le temple de Kompiré-Korohita. Fraicheur lustrale du matin. Le grand cédre q[ui] laisse tomber sur nous de longues gouttes de nuit et de lumiére?. Cérémonie Shinté. La branche d’arbre. La goutte de saké dans une coupe?. Vue de la prairie. Les 3 pyramides rondes dans la riziére verte*. Le musée. Personnages chinois tout droits, bambous
verticaux gréles,
q{uel]q[ue] ch[ose] de pur et de spacieux. Le jardin de ~ Ritsurin. Yashima, vue sur la Mer Intérieure, les Iles.
Diner japonais avec le Préfet. Les iles réfractées dont les bords ont Vair de se soulever*. 22. Hitozaki. Onomichi en ch[emin] de fer. Senkoji au bout d’un long ruban d’escaliers. Seikokuji. Merveilleuses peintures
a l’encre
de Chine.
Grues,
aigles sur la mer,
dragon, fourré avec des oiseaux. En chaloupe. Petit ‘temple d’Ahito Tomonotsu. Ravissant petit port avec les iles cailloux®. Temple de Gyon yu. Danse d’une bande de paysans dans la rue. Le pin. L’autre pin avec le cerisier. Poémes improvisés sur des carrés de soie. Retour. Pluie catastrophique dans la nuit. 23, Miyajima. Chemins
détruits
barricadés
d’arbres,
comblés
de
sable’. [120] 24-25-26 [septembre], Beppu. Randonnée en auto dans la vallée de Gabokei. 27-29, Kobé, Osaka. Le 30, Tokyo.
Dieu envoie ses messagers ad exitus viarum' — Rue des Martyrs, la Rue de Richelieu.
la
Confitebor tibi in populis, Diomi\ne, et psallam tibi in nationibus (Ps. CVII)*; z# dans un sens instrumental, avec des peuples et des nations, comme on dirait avec cheeurs et orchestre.
5 octobre]. Départ du Commf[andant] ? Amérique.
Tétu pour
Paratum cor meum, Deus, paratum cor meum — et alors
734
Cahier V
— cantabo, psallam in gloria mea! Exsurge, gloria mea, exsurge, psalterium ! exsurgem diluculo (Ps. CVI}.
The friendly cow all red and white I love with all my heart. She gives me cream with all her might To eat with apple tart. Marie, pleine de graces. — Les choses gratuites qu’elle a regues et toutes celles qu’elle est préte 4 donner. They are yours for the asking?. Dans une musique’.
piéce
de joruri, Vinterrogatoire
Monsieur et Madame Blackasdeath —
par
la
Poésies com-
plétes de M. A.O. Douilloudou. Il y a un sommeil mince et un sommeil profond. La zone limbaire entre le sommeil et la veille est hantée de fantémes. L’imagination moins contrdlée par la volonté se donne carriére.
8 o&{obre]. — A 6 h. du soir Bommarchand m/’apporte ? Asahi qui annonce q[ue] je vais étre nommé Berlin. Démenti le lendemain‘.
a
10-12 od[obre]. Prom[enade] 4 Shoji au pied du Fuji par un temps assez maussade. Le Fuji comme PAnge dans Haguromo laissant tomber a ses pieds sa robe de plumes*. Panorama. Les 4 lacs. Le lac bleu Motosu avec sa frange de laves aussi précieuses que Vaméthyste. Montée a Nagao 4 travers la forét sur la cendre. Les gros chardons roses. Miyanoshita.
La derniére guerre. Aprés chaque accouchement pas de femme qui ne dise qu’elle n’aura plus d’enfant. [121] D’aprés Casenave le terrain de l’Ambassade de France actuelle avait été acheté par le Comte Okuma
Odfobre 1926
735
au takuminokami ou Grand-Ecuyer du Shdgun. L’allée de cerisiers était l’endroit ot l'on promenait les chevaux. Or parmi les anciens écuyers figure au xvu® siécle Asano takuminokami qui fut le Seigneur des 47 Rénin, celui dont ils se liguérent pour venger la mort. Le petit temple au fond du jardin a pu honorer ses Manes}.
Du commencement 4a la fin toutes les paroles de ~ chaque N6 s’arrangent sur une mesure 4 8 temps et un exécutant qui assis dans l’obscurité frapperait la mesure en y adaptant étroitement les paroles donnerait a lauditoire l’élément essentiel de son plaisir... I] est trés rare que chaque temps sur les 8 soit marqué par le tambour. Je ne pense pas que cela arrive sauf dans ces pieces ot le Zazko (le vrai tambour frappé avec des baguettes) prend part, généralement une danse importante ou agitée. Ordinairement, certains seulement des 8 temps sont marqués par les exécutants sur le tzusumi (Pun tenu sur le genou, l’autre sur l’épaule). Les Japonais tirent beaucoup plus des subtilités de rythme (ou plutdét de jouer 4 cache-cache avec un simple rythme) q[ue] nous ne le faisons et sont par voie de conséquence larges sur lintervalle entre une note et une autre. Je ne pense pas qu’un Européen aurait eu lidée de diviser les coups de tambour entre deux instruments. Cela doit étre horriblement compliqué. La division donne de la variété, donne un c/ac, tandis que le petit donne quelque chose entre un « whop » et un « thud » (Lettre de M. Oswald Sickert ap[ud] A. Waley. The No Plays of Japan. G. Allar & Unwin, Lond[on])?. D’autres Saintes ont connu autant que S. Thérése les plus hautes formes de |’Amour divin. Mais S. Thérése est une espéce de professeur de l’Amour et les Carmels en sont les Ecoles Normales. Ils ont pourvu |’Eglise de son organe contemplatif régulier, de sa méthode contemplative. Le seul moyen de ne plus me voir, c’est d’entrer dans mon cceur.
736
Cahier WV
Pendant q{ue] S. Ignace facilitait ?accés des premiers degrés de loraison, S. Th[érése] et S. Jean de la Croix construisaient les derniers. L’escalier q[ui] va permettre |’édifice?. « Ce récit aigrement incisif comme un tranchant de hache » — « Emilio glissa et disparut dans la chambre de la Tinti comme une anguille dans la vase. » « Ce paysage (les marais salants) 4crement sombre »? — Et Yon dit q[ue] Balzac ne sait pas écrire!
Talking of luxuriousness this moment I am writing with one hand |122] and with the other holding to my mouth a nettarine. Good Lord! how fine! It went down soft and pulpy, slushy, ooxy — all its delicious embopoint melted down my throat like a large beatifield strawberry (John Keats)’. Une malade Line Beillans m’écrit. Réponse. 174.
Man should not dispute or assert but whisper results to his neighbour (id.). The imagination may be compared to Adam’s dream. He awoke and found it truth (id.)°. zo [octobre]. En auto 4 la vallée de marbre de Chichibu. Conversation religieuse avec ma fille Reine. — Le prochain. Mon manque de sympathie provient dun manque d’intelligence. Je suis comme les enfants qui n’aiment que les romans et sont incapables de faire effort
nécessaire
4 la leéture
de la poésie.
Sentir,
deviner ces histoires dont les visages et les démarches q[ui] m’entourent sont les témoignages. Comprendre leur message. Compassion et camaraderie avec tous ces compagnons de bagne. Ecouter l’4me profondément ensevelie sous le visage le plus aride et le plus €pais, son soupir dans chaque parole. Se dire que chacun d’eux m’a été envoyé par Dieu, qu’il n’en est pas un a qui je ne sois capable de faire du bien. Connivence avec tout ce qui en eux est enfant de Dieu’. Le pont prés de ma maison s’appelait le Pont-des-
Offobre 1926
737
faisans. Quand le C[omte] Okuma y habitait il y eut une échauffourée militaire qu’on appelle la bataille du Pont-des-faisans?.
21 [octobre]. Je vais chez un entrepreneur de disques réciter dans un profond cornet de cuivre comme si je
les versais dans la postérité de lautre cété du mur. Ch.-L. Philippe, ma conférence sur le mime, les 2 Verlaine et Odfobre?. Odfobre m’a ému. Ce serait une ~ chose 4 lire sur ma tombe.
Un souffle de l’éventail, juste de quoi détacher cette goutte d’eau (cette larme a v[otre] cil). 23 [octobre]. Conférence a la Maison F[ranco]J[aponaise] sur les « idéogrammes occidentaux »*.
M dans Messager : un ange avec 2 ailes. Mettre Pobjet pincé avec deux doigts. Monument = un aqueduc — comme mouvement — 2 processions en matche vers la croix. Dieu : le triangle, lui, les bras
levés!.
24 [octobre]. Chuzenji. — Les feuilles d’automne.
Les Ecuries du Soleil’. —
S. Raphaél, patron des
voyageurs, celui q[ui] conduit et q[ui] explique. Il offre les priéres. — Ainsi rattachées a leurs causes, a leur ambiance
éternelle, et a leurs effets. Encadrées.
Comme on dit en Style d’artiste « bien présentées ». Celui qui emméne et q[ui] raméne. — Er guia acceptus eras Deo necesse fuit ut tentatio probaret te (Tob.)°.
— Il présente les priéres dans un encensoir d’or : il les fait briler, il en dégage l’intention et le parfum, il les explique a Dieu, il les lui fait sentir’. Soixante
ans!
redressons-nous
et rections
notre
tenue avant de pénétrer dans cette froide et solennelle enceinte.
Le poisson = le Christ. Le fiel du poisson = Christ souffrant, sa capacité de souffrir — organe.
le
738
Cahier V
[123] Jacob aveugle. Tobie aveugle 4 qui le poisson rend la vuet. Le poéte Beddoes, espéce de prototype anglais de Rimbaud, auteur de The oviparous Tailor — Like the red outline of beginning Adam — Here’s the blue violet like Pandora’s eye — When first it darkened with immortal life. Une toute petite oreille presque ronde et fortement ourlée. Les dons merveilleux des poétes anglais sont vraiment gatés par leur manque de mesure et de goit. Dans The Eve of S. Agnés, 30 Strophes insipides enchassent les 2 couplets ravissants sur les vitraux. Dans |’Ode to the Skylark d’un rythme et d’un mouvement adorables, dix strophes qui alourdissent et abiment le poéme. La « cervelle» d’une alouette! C’est Pinconvénient de se placer en face d’une chose pour lexprimer au lieu de la laisser intervenir par voie d’allusion. — Le style d’Henry James insupportablement maniéré et futile, pareil 4 une série de boules a
Pintérieur Pune de l’autre idiotement ciselées. Le cété sadique et démoniaque anglais. Comment Shelley a-t-il pu vivre et penser? dans une atmosphére comme celle des Cenci? C’est celle des dramaturges Elisabéthains. On ne trouve pas cela en France. Nos livres infernaux, c’est Candide ou les Liaisons Dangereuses ou /es Flaux| M{onnayeurs] de Gide, tout aussi sulfureux, il est vrai‘. Coeteris oftriosior oris (Catulle)°. Pline le Jeune dit 4 son fils en lui parlant de ses ancétres : qu’il voie Quibus imaginibus oneretur, quae numina et quanta sustineat®. On = une bouche derriére un mur. NON entre deux muts.
=
un oul
Offobre 1926
739
Et Ego reducam vos de captivitate in omnibus locis! — N[ous] promenons n[otre] captivité dans les lieux les plus divers, gorges étroites, fourrés, sables, marais, iles, usines, bureaux, casernes, écoles, bagnes, neige,
brouillard, tempéte, canicule. Tout y sert.
Ce n’est pas seulement mes épines qui me défendent, dit la rose, c’est mon parfum?.
L’évolution. Le jour ot la Girafe réussit 4 se procurer quatorze vertébres de plus, je suppose que ce fut un enthousiasme général dans le monde des animaux! Tout le monde fut davis d’offrir un banquet a notre sympathique camarade. Mais chacun de son cété répétait son petit stunt. ' La nature en un moment d’inspiration qui n’a pas duré plus de 10 ou 15 000 ans jette l’ébauche de quelques montagnes®.
Clara e§t et q\uae| nunquam marcescit sapientia: et facile videtur ab his qui diligunt eam, et invenitur ab his qui quaerunt illam.
Praeoccupat
qui se concupiscunt,
ut illis se prior
oStendat. Oui de luce vigilaverit ad illam non laborabit ; assidentem enim illam foribus suis inveniet (Sap., c. VI)‘. Le jardin Fujita, un pin plein yang et un autre avec ses branches mortes vide yéng>. Au banquet des P.P. une vieille dame me parle en californien. Eyentail : c’est espace en repliant q[ui] absorbe cet Oiseau a tire-d’ailes®! [124] Au pied du Christ je vois tout l’amas de mes anciennes confessions, comme un ignoble tas de linges souillés de sang, d’excréments et de pus.
L’ceil du peintre se reportant du modeéle 4 la toile, y reportant une série de petites empreintes humides. Passe-cerf Roland’.
: nom
d’un
cheval
dans /z Chanson
de
740
Cahier V
2 nov[embre]. Ma femme subit une opération [...]*.
Th. Gautier conseille le sujet suivant pour un concours de Prix de Rome : « Hippolyte étendu sans forme et sans couleure » [s7c]. Sub umbra illius quem desiderabam, sedi» — L’ombre de la foi meilleure que les fausses clartés de l’évidence quotidienne. 18 nov[embre]. — Visite de Abbé Totsuka et de V[iolette].S[ussmann]*. Elle me dit qu’elle me connait depuis longtemps « in God» et qu’elle a réparé pour mes péchés passés qui maintenant sont effacés. Elle me
dit que je dois quitter la carriére diplomatique aussitét que ce sera possible, qu’elle a regu mission de me dire cela depuis plusieurs mois et que cela ne lui laissait pas de repos. Est-ce pour étre religieux ou pour écrire, elle ne sait. Elle pense qu’il va m’arriver quelque chose de nouveau et que je dois me tenir prét. Elle parlait d’une maniére si faible et si indistinéte que j’avais beaucoup de peine a la comprendre. « De méme ceux q[ui] souffrant d’une ignorance invincible touchant nfotre] sainte religion, suivant fidélement les préceptes de la loi naturelle gravée par Dieu dans le cceur de tous, et préts a obéir 4 Dieu, ménent une vie honnéte et droite, peuvent par la vertu
de la lumiére divine et de la grace (qwils ignorent) acquérir /a vie éternelle. Car Dieu q[ui] voit, scrute et pénétre jusqu’au fond les esprits, l’ame, les pensées et les habitudes de tous les hommes, Dieu infiniment bon
et clément, ne souffre nullement qu’aucun (adulte) soit puni des peines éternelles q[ui] n’ait pas 4 répondre dune faute volontaire » (Pie 1X, Encycllique] Quanta conficiamur, ap[ud|] Denzinger Bannwart, Enchiridion, n° 1677). Cela pose une foule de questions théologiques trés délicates. En ce cas quelle est Putilité du baptéme, est-ce
seulement
une
aide,
une
canalisation
de
la
Grace? quid des enfants? Vencyclique dit bien la vie
Novembre
1926
741
éternelle, et l’obtention de la Grace, pas seulement les Waabes:
[125] La matiére aussi est capable de salut (S. Irénée)!.
Jésus dit des méchants qu’ils sont les fils du diable (S. Jean, VIII, 44), c[’est]-a-d[ire] qu’ils ont une nature diabolique. Harnack
appelle le christianisme complexio opposito-
TUM".
Le Seigneur est proche, dit S. Paul (Phil., IV, 6).
Il est tout prés de nous.
Le P. Drouent de Lézey, Papdtre des lépreux, m’a dit il y a six mois : Vous étes trop heureux’.
Rtre vraiment Grec
(ro axpiBws E)Anva ctvac),
cest savoir converser avec les hommes (Synesius)‘. Dim [anche] 21 nov[embre]. Déjeuner et cérémonie du thé chez le baron Fujita. Ravissante journée d’automne, le petit enclos qui traverse un ruisseau clair. La petite maison ot ’on entre par une chatiére. Tous les gestes réglés, ’attention 4 soi-méme. Le baron nous sert lui-méme le déjeuner 4 quatre pattes. Le petit vase infiniment précieux ot l’on puise le thé. On le conserve sous une masse d’enveloppes q[ui] finissent par remplir une grosse malle. Les anciens daimyos l’emportaient avec eux dans leurs expéditions. Une lumiére pure et douce se répand autour du corps de ces h[ommes] justes... C’est plutdt une gloire céleste qu’une lumiére... C’est d’elle seule q[ue] ces h{ommes] bienheureux sont nourris; elle sort d’eux et elle y entre; elle les pénétre et s’incorpore 4 eux comme les aliments s’incorporent a nous. Is la voient, ils la sentent, ils la respirent, 7/s sont plongés dans cet abime de Joie comme les poissons dans la mer... Je ne sais quoi de divin coule sans cesse au travers de leurs cceurs, comme un torrent de la divinité q[ui] s’unit a eux (Fénelon, Télémaque, \[ivre] XIV)’.
742
Cahier V
Au Japon pour construire une maison on apporte les poutres précieusement ea a de papier comme des fleurs ou de la viande de boucherie! Ouia montis nomine nonnunquam diabolus significatur (Béde [le] Vén[érable] sup[er]). « Montes transferentur in
mare.» M{ontes| signifie exultation violente en présence de Dieu?. Isaie cité par S. Paul, Rom.: Inventus sum a non quaerentibus me: palam apparui tis qui me non interrogabant. . Tchou hi compare les 4mes humaines aux godets dune noria [126] q[ui] s’élévent remplis dune eau puisée puis la reversent au grand Tout. 29 novembre].
—
Je supprime le petit déjeuner.
Automne. Sur le ruisseau d’eau vive se penchent des touffes de chrysanthémes jaune pale*. Récolte des grands navets blancs. rer décembre. — A 1o h. du matin je recois un tél[é]gr[amme] annoncant ma nomination 4 Washington. — Le peintre Ishi fait mon portrait.
Dans le ciel Océanique |’étoile mexicaine Quetzalcoats. Chesterton 4 propos des fleurs : ¢he finality of Flowers. It is a world of crowns (The Everlasting Man )*. La lettre Chinoise est vue de face, la lettre latine est
vue de profil.
Crane chauve polyédrique comme terre pelée.
une pomme
de
Chesterton 4 propos de ce texte disant que Moise voyait Dieu from behind: comme s’il tournait le dos au monde®.
Novembre-Décembre
1926
743
5-8 déc[embre]. Voyage 4 Osaka et Kyoto. Adieu. L’Arashiyama, chez Tomita Keissen, diner avec Kita
et Seiho Takahashi, vers et dessins. Au retour pure et splendide journée d’hiver. Le Fuji couvert de neige dans une incomparable magnificence. [Rullan], Matsuoka, Yamanouchi Inabata. Discours pour le nouvel Institut Franco-Japonais, qui sera placé dans un col entre Kyoto et le Lac Biwa.
Comprendre la pensée de quelqu’un en imitant Pexpression de sa figure. — Comme si, rien qu’en me taisant, j’arriverais a comprendre sa pensée (W. de la Mare)'. Ils se regardaient, faisant silencieusement échange de leurs présences. _ L’attention, comme une nappe de neige fraiche?. ?
L’Immaculée-Conception pose une foule de problémes théologiques et physiologiques délicats (il faudra q[ue] je consulte 4 ce sujet). Les théol[ogiens] admettent q[ue] l’ame intelligible n’est pas présente dés le premier moment de la conception puisqu’on ne baptise pas les foetus de q[uel]ques semaines ou méme de q[uel]ques mois. Ce qui est immaculé chez Marie, ce n’est donc pas immédiatement l’ame, mais le phénoméne physiologique qui est la condition de cette 4me et qui dés ce premier moment lui a été rattaché par un lien séminal en une certaine mesure® et substantiel. La conception comporte : un atte du [127] pére — un acte de la mére — et la transcription (ou l’inscription) de cet acte double dans le germe d’un nouvel étre vivant. Amalgame en Vunité de Venfant futur d’un double aéte a la fois moral et physique. Ils partagent tous en une seconde unique 4 la fois l’étre et la faute. (Faute avec le sens de manque, de défe€tuosité.) 12 d[écembre]. Ecrit 4 Henri V. a Pékin. Le matérialisme, c’est machina. Ex machina Deus. CLAUDEL V - 27
———— eee
littéralement
le
deus
ex 27
744
Cahier V
Extréme bassesse et grossiéreté des « pensées » de P[aul] V[aléry]. « La musique est un massage.» Les larmes, secrétion des glandes. — Pascal qui en regardant les étoiles devrait penser 4 un pont! — Quelque chose de pauvre et d’ingrat. — Des pensées séches, péniblement
fabriquées?.
With a heart offurious fancies Whereof I am commander With a burning spear And a horse of air - To the wilderness I wander
(W. de la M.)?.
Keats trop souvent précieux et maniéré. Chez Virgile seul art supréme s’unit avec une divine simplicité?, En anglais j’ai horreur des adjectifs mis aprés le substantif. Loguetur pacem in gentibus et potestas Ejus a mari usque ad mare’
—
Toujours
lidée
des
deux
Mers,
des
2 Océans.
Anima mea desideravit te in notte: sed et spiritu meo in proecordiis meis de mane vigilabo ad te (Is.)°. Projicerit in profondum maris omnia peccata nostra (Is.)*. Nous feront-ils couler ou au contraire n[ous] soutiendront-ils conformément au principe d’Archiméde P Aegypte, noli flere; quia Dominator tuus veniet tibi, aut cujus conspettum movebuntur abyssi (3° Dim[anche] Av[ent])’. Le scandale des Chrétiens au x1x® siécle devant les découvertes de la Science vient de ce qu’ils ne pouvaient se représenter Dieu aussi immense et aussi éternel qu’Il Pest.
12
d[écembre],
Inokashira.
Procession
funébre
Décembre 1926
745
bouddhiste. Lotus. La femme qui porte la nourriture funébre. L’homme qui porte le poteau épitaphe. — Marécage. Le sentier dégelé sous le pied dans les roseaux saupoudrés de sucre blanc. Soleil, passage dans les herbes lumineuses. Il y a des belles femmes dont l’4me ressemble a la concierge d’un chateau historique. Elle se contente d’un tout petit coin malpropre mais montre avec fierté < aux visiteurs le superbe édifice. [128] Ave, ber incomprehensus quae Verbum et Filium Patris mundo legendum exhibuisti (S. Epiphane)}.
$$Le $$$
Samedi 18 déc{embre] 10 h. matin. Nouvelle de la mort de ma pauvre belle-sceur Elisabeth S[ainte]Mf[arie]-P[errin], E[lisabeth] aux beaux yeux bruns?. Marie des Vallées : « Les Saints voient Dieu et sont dans Dieu comme dans un feu d’amour qui les pénétre et les anime et les enivre d’un torrent de délices. Les damnés Le voient et sont en Lui comme dans un feu
dire et de courroux q[ui] les pénétre et anime et enivre de tourments inconcevables. » C’est ce q[ue] j’ai dit dans /e Repos du Septieme Jour®. Emitte Agnum'. Un astronome avec Je tour des yeux rouge.
Son esprit qu’elle appelait comme S. Augustin le « mari de l’Ame» (Animus et Anima) — Marie des Vallées. Mfarie] des V{allées] se voit unie 4 N.-S. dans le T[rés] S[aint]-S[acrement]. Unus panis sumus omnes qui de uno pane participamus. — Transformamur in eamdem imaginem (Cor., VIII)°. Noél, 1 h. 25 du matin. Mort de S. M. Yoshi hito,
Empereur du Japon.
746
Cahier V
Quare id facio, si fortasse requiris, Nescio, sed fieri sentio, et excrucior —
Térence?
Du
Dostoievsky avant la lettre}.
Mer Rey me fait remarquer que chez tous les peuples paiens les femmes portent leurs enfants dans le dos. Au Japon, dés qu’elles deviennent chrétiennes, elles commencent a les porter dans les bras. Un seul chien aboie 4 un fantéme : dix mille chiens en aboyant en font une réalité (Prov[erbe] chinois).
Le derhier point de amour de Dieu est de vouloir plutét étre anéanti que de donner 4 qui que ce soit la moindre étincelle de ?amour qui est di a Dieu (Marie des V[allées]). [129] Nzhil innovetur nisi quod traditum est.
Quarante ans depuis ma conversion. Que sont devenus mes compagnons de N[otre]-D[ame], Lucien Hot et le vieux chantre de Conflans-S.-Honorine?? Visite 4 Pabbé Totsuka. Violette Sussmann gémissante et dolente parlant d’une voix a peine compréhensible. Curieuse nature morte que la chambre de ce prétre médecin. Une bouteille de chartreuse, un microscope, un confessionnal avec une étole, des boites
a Sstérilisation, un bréviaire, 2 fenétres tendus [sic] de rideaux de coton a travers lesquelles on apercoit la baie de Tokyo. L’Abbé me dit que V{iolette] S[ussmann] est en ce moment trés tracassée par le diablet.
Lu la correspondance de Jacques Riviére et d’ Al[ain]Fournier. Quelles belles ames! quels gentils garcons! et en méme temps que de sottises naives q[ui] font sourire! L’amoralisme dil y a 20 ans. La morale n’est pas la négation de la liberté, elle en est la garantie.
Résolution Pun probléme et résolution de la volonté, comme si la certitude volition.
était
la méme
chose
que
la
Décembre 1926
747
27 déc[embre]. — L’Empereur mort est ramené la nuit dans son palais par des rues bordées d’un million d’hommes en silence. On descend lentement le cercueil enveloppé de soie blanche et on le dépose sur une espéce de traineau que par des cordes blanches les fonctionnaires du Palais tirent sur les tapis jusqu’a la Chambre funébre. S. Jean pour mourir attend la fin du siécle. Sic eum volo manere donec veniam’. Il reste sur le cceur de JésusChrist. I] passe moins qu’il ne reste encore davantage. La mort est une accentuation de son immobilité. Voir
dans le bréviaire le beau paralléle de S. Augustin entre Pierre et Jean. Morne vie de cet Empereur a l’intérieur /palais pareille a la teigne des tapis.
de son
La morale n’est pas la négation de la liberté, elle en est la garantie (contre le brigandage et l’esclavage des passions). De méme elle n’est pas l’art, mais elle est une condition de l’art. 31 déc[embre]. Que Dieu me pardonne toutes les fautes que j’ai commises au cours de cette année 1926!
1927 [130] 1°? janvier. — Beau et froid. Incipit ’année du lapin. Nomina debent rerum naturis congruere (S. Th. Aq.)}.
O fiévre, tu ne m’échapperas pas, je te connais par ton nom (L’Atharda Veda). La petite maman Japonaise 4 petits pas pressés courant pour enlever un cerf-volant?. Sur la face du Christ souffrant il y a du sang frais. N[otre]-D[ame] regarde avec horreur ce que nous venons de faire 4 son fils. La 2° chute est ce noir péché que l’on peut appeler la communion avec l’ordure. Faites que nous ne regardions pas la croix d’un ceil abruti. Mélange, harnachement, étreinte.
« A Paris, en ce jour du 11 novembre,
huitiéme
anniversaire de l Armistice, ’Armée Frangaise incline ses étendards devant la Tombe du Soldat Inconnu qui repose sous l’Arc de Triomphe. Et vous aussi, mes chers compatriotes de Tokyo et de Yokohama, vous n’avez pas voulu laisser passer ce grand jour sans apporter a nos morts et a la Cause qu’ils ont défendue, votre souvenir et votre témoignage, et c’est pourquoi vous €tes tous venus saluer ce monument représentatif qui non seulement honore, sur une terre encore bouleversée par un récent cataclysme, la mémoire de
Janvier 1927
749
quelques-uns de nos braves marins, mais qui est aussi parmi nous le drapeau de la Patrie confié a la garde - inviolable des morts. Tout 4 ’heure, suivant usage Ge s’est établi dans tous les pays du monde, je vais vous emander une minute de silence. Et pendant cette minute, ou se tairont les soucis et les préoccupations de notre vie quotidienne, ce n’est pas seulement le sombre écho du canon qui parviendra a notre oreille, le canon de la Marne, de Salonique, de la Somme et de Verdun,
le cri des blessés, l’adieu d’un disparu, la derniére recommandation
d’un
camarade
ou
d’un
fils, c’est
Pattestation commune, plus forte que toutes les ironies et tous les découragements, la voix d’un peuple immense associé désormais a |’éternité de cette terre qu’ils ont sauvée, la réponse de la terre natale 4 notre interrogation solennelle de chaque année, et cette ‘réponse qui dans son unanimité réunit la plénitude de nos générations francaises, c’est que de 1914 a 1918 ce quia été fait est ce qui devait étre fait et que c’était bien}. » Ses facultés Stationnaire.
se développent
mais lui-méme
reste
Napoléon était excessivement bavard (Mémoires de la Reine Hortense)’.
Les exécrables cultes du paganisme primitif : le phallus, les enfants brilés des Phéniciens, les prostitutions rituelles de Babylone, expliquent les ordres d’extermination compléte donnés par I’Eternel pour les populations de Chanaan.
CAHIER
VI
| |
1927 [1] Il est incontestable! que les explications données parla géologie officielle (Termier) pour la formation des couches carboniféres, séparées par des couches de sables et de graviers, ces périodes semblables qui se teproduisent exactement pareilles aprés engloutissement et mise en confiture de leurs récoltes végétales, me sont pas vraisemblables. Je lis dans l’ouvrage dun missionnaire protestant une explication qui me semble trés attirante. Un déluge unique, le déluge de la Bible, causé a la fois par des effondrements et des soulévements de montagnes et par le déplacement de l’axe de la terre (actuellement admis, je crois) qui aurait causé un mouvement centrifuge et un brassage des Océans, d’énormes raz de marée, se succédant a la surface de la toupie terrestre a des intervalles de 150
jours,
chacun
entrainant
d’énormes
masses
de
détritus végétaux et animaux qui se seraient accumulés sur certains points favorables. A l’appui le less, qui trés certainement n’a pas eu le vent pour orfigine, mais qui est de la boue solidifiée. De méme toutes les périodes géologiques seraient de putes inventions (?). Avant le déplacement de l’axe il n’y aurait eu qu’un seul climat partout uniforme et invariable. Le Livre Chinois Shiki — par Izé Matsien? (2 siécles avant J[ésus]-C[hrist]) — parle d’un certain Nuwa qui . Plus loin il parle des artistes : sculpteurs, archite¢tes, potiers, etc. — qui ne seront pas ceci et cela, des sages,
des juges, des interprétes de la loi mais — sine his omnibus non aedificatur civitas — et plus loin — creaturam aevi confirmabunt, et deprecatio illorum in operatione artis, accommodantes animam suam et conquirentes in lege Altissimi (SX XTX)?. Il y a en Amérique deux villages qui portent mon nom:
Claudell, ’un au Kansas, l’autre au Nouveau-
Mexique. Mon fils Pierre soldat au Petit Etat-Major de Ecole
d’appllicatiJon d’artillerie —
Fontainebleau.
Dans le nom de Jahweh, il y a le Christ. « Je suis Celui qui Est.» Le qui indique la relation des deux Personnes, en qui existence fournit de quoi étre.
Inexprimable galimatias et nullité des écrivains Irlandais modernes, tous plus nuls et plus vains les uns q[ue] les autres : Yeats, A[rthur] S[ymons], Joyce, Moore. Tous des apostats naturellement. Comment peut-on écrire pareilles idioties$? Lettre du P[ére] Charles Henrion sur la mort d@Eve Lavalliére. Elle est morte prédestinée aprés plusieurs mois d’atroces souffrances. On peut dire q[ue] toutes les parties de son corps ont été douloureusement purifiées. Dans les derniers temps, il avait fallu lui coudre les paupiéres d’un ceil, qu’on lui aurait ensuite enlevé.
—
La derniére nuit, elle subit
la lutte décisive. Elle q[ui] ne pouvait plus se mouvoir depuis longtemps, elle se dressa sur son lit et se jeta avec une angoisse indicible dans [115] les bras de la personne la plus proche. Sa mére, q[ui] était 1a, commenga les Litanies de la Sainte Vierge. A mesure que montait cette priére, le visage de l’agonisante se
Novembre 1929
889
détendait, s’apaisait. A « Regina Pacis », elle mourait. | — Elle repose maintenant au petit cimetiére de Thuil'diéres,
contre
le mur
de l’église, sous
une
humble
croix de bois qui, selon sa volonté, ne porte que la priére de Sainte Thais}.
Explication de mes troubles d’oreilles. Rétrécisse| ment de la trompe d’ Eustache causée par une infection. On me la débouche tous les matins avec un fil de fer.
“Les osselets en appuyant sur loreille interne causent une inflammation?.
20 nov[embre]. Blanchetais
pour
Voyage a Charlottesville avec La commémorer
l’anniversaire
de la
derniére rencontre de Jefferson et Lafayette. Inauguration d’une salle avec les peintures, fresques* de La Montagne S.-Hubert. L’Université. Profusion de colonnes (la forét). Trés beaux arbres. La chambre de Poe. Photographie de Poe 4 19 ans avec d’admirables yeux noirs brillants. On se rend compte quelle chose fragile et dangereuse est le génie. Sa maison de planches 4 Fordham. La mer est internationale.
G. Aéstruc me df[eman]de de jouer /’Axnonce Sous le Rempart d’ Athénes aa Thiéatre] Pigallet.
et
Quomodo in aquis resplendent vultus prospicientium, | sie corda hominum manifesta sunt prudentibus (Prov., XXVII, 19)5.
[116] Luna
= lu (c) na —
moon —- monde — mensura — Mens ?
se
de lux. Le radical de
tetrouve
dans
mensis
d’ou
Rageot, Fabre-Luce’®.
L’église de Santa Margherita ante porcos’. Ce qu’il y a d’essentiel dans un organisme, c’est
890
Cahier VI
la forme. On en arrive ainsi 4 la conception aristotélicienne que la forme est a la fois Porganisatrice et la conservatrice de l’étre vivant (L. Vialleton, /’Origine des étres vivants). MEME = La trinité de l’esprit (étre — intelligence — vouloir) représentée deux fois dans son identité a elle-méme, une fois horizontalement et Vautre verticalement. Le & couronné comme dans ETRE.
29 nov[embre]. — Voyage a Philadelphie. Inauguration du Musée Rodin donné par les Mastbaum. La Porte dé l’Enfer. Grand froid. Désillusion de tout cet att en grande partie périmé, violent et faible, plutédt mesquin et tortillé. Tout cela s’effrange et s’effume. La grandeur manque}. Diner chez les Sherrill. L’Opéra, Don Giovanni. Incroyable qu’on ait pu faire des choses pareilles. Cependant si artificiel q[ue] cela soit, la piéce se sauve par la conviftion. Je pars au moment ou elle commengait a m/’intéresser?. 30. Déjeuner avec Misia?. Remise de décoration a Peter Van Veen. Grand banquet et féte pour Pierre Cartier. Officier de la Légion] d’H[onneur]!. 1¢7 déc[embre]. Avent. En auto a M[ount] Kisko. Sur la route un h[omme] la téte ruisselante de sang q[ui] vient d’étre tué par une auto. Jacques de Sieyés. Grand froid. Diner chez Mad[ame] Cornelius Vanderbilt. Mad[ame] Lindsuy, f[emme] de |’Amb[assadeur] d’ Angleterre. 2 déc[embre]. Temps de neige, verglas. Lettre de Klaus Dohrn me racontant sa conversion’. 3, verglas général dans le grand soleil. Toutes les herbes et branches étincelantes de glace. Arraché 2 dents.
A droite et 4 gauche au milieu d’un brasier de glace.
A intercaler dans les Plaies d’Egypie : La joie de Dieu est dans ton cceur et tu traverses la vie en joie jusqu’a ce q[ue] tu atteignes a la béatitude. Ta lévre est saine, tes membres sont verts, ton ceil
apercoit bien loin. Ta bouche se remplit de vin, de
Novembre-Décembre 1929
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biére, de pain, de viande, de gateaux; des beeufs sont
sacrifiés, des [117] amphores de vin sont ouvertes et on entonne devant toi de doux chants. Ton parfumeur en chef t’oint d’essence; ton direfteur des eaux est la
avec des guirlandes; ton intendant des gens de campagne t’apporte des oies. Tes galéres q[ui] vont en Syrie sont chargées de toutes sortes de bonnes choses; tes étables sont pleines de vaches, tes femmes esclaves sont florissantes. Tu es Stable et ton ennemi est ~ renversé (Tabouis, /’Inguiétude égyptienne). Pour voir nfous] avons les yeux. Pour entendre les oreilles. Pour connaitre Dieu qui est l’Etre, n[ous] avons notre existence. Or quel est le caraétére propre de notre maniére d’exister, c’est que n[ous] sommes créés. C’est donc en tant que créatures que n[ous| connaissons notre Créateur. Cette connaissance n’est pas chez nous une réponse fixée dans une forme numérique, géométrique, immobile? comme dans les minéraux, ni le développement d’une courte phrase mélodique comme dans les régnes végétal et animal. L’idée de cause chez l’homme se traduit par l’idée de filiation. C’est en effet qu’effet® que l’étre brut connait sa cause. C’est en tant que fils que nous connaissons le pere. Palpebrae ejus interrogant filios hominum*, L’écran des paupiéres — ce qui limite et dirige le regard sur nous. Il y a en nous un esprit qui dit : Abba ! c[est]-ad[ire] pére! « Les impies m’ont raconté toutes sortes d’histoires, mais rien qui soit comme /a /oi ! » Loi = le rapport de cause a effet, aussi sacré et inviolable que les lois physiques®.
8 déc[embre]. — Il y avait un manque dans la Création. La prodigieuse bonté et générosité de Dieu Créateur, la nature était privée d’un moyen adéquat de la reconnaitre et de rendre ce qu’on lui avait donné. C’est la Vierge seule qui a rendu possible ce grand acte d’amour et de justice. C’est elle qui a permis a la nature de se servir de Dieu pour l’offrir 4 lui-méme en un sacrifice d’égalité et de satisfaction. C’est elle, en disant : Oui, qui a mis Dieu entre nos mains, a la
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disposition de toute la nature, pour remercier notre Créateur. De 14 ce q[ue] dit l’épitre [118] d’aujourWhui : Quando praeparabat coelos et terram, aderam. C'est pourquoi dans /e Soulier et dans Christophe Colomb jai dressé image de l’Immaculée au milieu du ciel étoilé. Byrd découvre la Couronne du Péle Sud, un cercle immense de hautes montagnes retenant une vaste masse de neige et de glace, peut-étre une mer intérieure. Jupiter, au lieu de foudre, brandissant un trou [s7c] de chou.
Job, I. — Le diable n’est jamais 4 court. Job, riche, selon lui, n’avait aucun mérite a étre pieux. Pauvre et malade, il n’en aurait pas eu davantage, car alors quel autre recours lui serait resté? Un homme vieux se convertit, c’est la faiblesse de Age. Un homme jeune,
c’est Pexaltation de la jeunesse. Un homme mir, c’est Pintérét. Un homme simple, c’est la bétise. Un h[omme] intelligent, cest le paradoxe. Etc. Etc. Voir Paul Souday.
Il y a bien des choses q[ue] j’ai en horreur dans le caractére francais par ex[emple] chez les hommes le coté caressant et polisson, les f[emmes] spirituelles et piquantes, genre xvimi® siécle, etc. PEs
PAR. Ge:
Deus ex machina’.
Errare humanum eff. — La machine q[ui] a pour essence de ne pas se tromper est donc q[uel]qfue] ch[ose] de pas humain.
Cuntta fecit bona in tempore suo et mundum tradidit disputationi eorum ut non inveniat homo opus quod operatus eff D\eus| ab initio usque ad finem. — Didici quod omnia
Décembre 1929
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opera q|uae| fecit Deus perseverent in perpetuum : non possumus eis quidquam addere nec auferre — Sapientia... recessit a me multo longius quam erat; et alta profunditas, quis inveniet eam ? LuStravi universa... et invent amariorem morte mulierem, q\uae| laqueus venatorum eft et sagena cor ejus, vincula sunt manus illius (Eccl., passim). Cunttae res difficiles, non potest eas homo explicare sermone : non saturatur oculus visu nec auris auditu imple-
tur (id.)?.
[119] Donec det D{omi\nus requiem fratribus vestris sicut et vobis dedit et possideant ipsi quoque terram quam Dominus Deus vester daturus est eis : et sic revertemini in terram possessionis vestrae, et habitabitis in ea, quam dedit
vobis Moyses famulus D\omi|ni solis ortum (Jos[ué], III, 15)°.
trans
Jordanem
contra
Ego Sapientia effudi flumina — Ego quasi trames aquae immensae de fluvio, ego quasi fluvit dioryx et sicut aquaeduttus exivi de paradiso — A mari enim abundavit cogitatio ejus et consilium illins ab abysso magno (Eccles., XXIV, 40)4. L’Antéchrist
—
Ne
quid vos seducat ullo modo
quoniam nisi venerit discessio primum (il faut q[ue] ’enve-
loppe s’écarte pour que lintérieur apparaisse) e¢ revelatus fuerit homo peccati (pour que le péché arrive a toutes ses conséquences, pour q[ue] ?h[ommie] tel q[ue] le péché l’a fait arrive 4 son plein développement), filins perditionis qui adversatur et extollitur supra omne quod dicitur Deus aut quod colitur : ita ut in templo Dei sedeat ostendens se tanquam sit Deus. Et nunc quid detineat scitis ut reveletur in suo tempore’. — C’est 1a toute l Apocalypse, la révélation graduelle de ’homme de péché, répondant a la révélation graduelle de Jésus-Christ, l’ceuvre de Dieu dans le temps.
Miss Barney raconte une conversation avec Proust en habit noir « comme de cadavre.
un mort»
et avec une barbe
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Joseph. Ecce somniator venif', Voila le réveur qui s’améne. Neige — verglas — et au dedans gachis causé pat Pinsomnie. [x20] Le soir du 24 déc[embre] représentation effroyable de The Tidings brought to Mary pat des amateurs. Incendie 4 la Maison Blanche.
Liturgie babylonienne : L’agneau est le substitut pour ’humanité : il a donné un agneau pour sa vie : ila donné une téte d’agneau pour une téte d’homme. 31 décembre. temps.
Lettre
4 Emmanuel
Berl*.
Beau
Fouilles a Ur. On retrouve dans un puits* un dépdét de huit pieds de limon et au-dessous les traces d’une civilisation entiérement différente. C’est le Déluge.
1930 rf janvier. Temps
couvert
et doux.
72 enfants
bralés vifs en Ecosse. — BAtoN — Le r polichinelle et le B les 2 fesses pour leur donner la [cadouille] ! (en anglais : Bottom — buttock). — L’ Amérique avec ses grandes villes 4 l’extérieur, comme une cité avec ses 70 portes. — Le Président serre 6 348 mains.
Diner du personnel. 2 j[anvier]. Diner chez M. Stimson. Lettre a Madame M[eyer]. N[ous] adorons Dieu qui respire. Le Pere inspire, le Fils respire et [Esprit expire. I] est mouvement vers le dehors. Il est a la place de la mort. I] est ce qui briile en une splendeur éternellement approvisionnée toute possibilité de temps. I] est la flamme qui tire et qui maintient union substantielle du Pére et du Fils}.
Jesus spes poenitentibus — Quam pius es petentibus — Quam bonus te quaerentibus — Sed quid invenientibus*| langue = elle est bien visible. n, u: les 2 machoires.
Ce ne sont point vos sabbats q[ui] me plaisent mais celui q[ue] j’ai fait et dans lequel mettant fin a Punivers, j’inaugurerai le 8 jour, c[’est]-a-d[ire] un autre monde (Ep[itre] Barnabé, XV, 4)°. [121] 7-8 [janvier]. — Vu Margotine qui revient de
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Chine et du Japon. Elle a divorcé et va se remarier avec uneespéce de salesmanameéricain appelé Franz Redeker. Elle a beaucoup maigri, sa figure a durci, mais ce sont toujours les mémes beaux yeux étincelants et cette large bouche rouge. Pauvre fille!
Entremos mas adentro en la espesura (S. Jean de la Croix)}. Le vieux Fére-en-Tardenois. Les anes qui nous menaient au marché, l’épicier Barberousse, les plaques, les pains anisés, le grand pompier en osier qui servait d’enseigne a la quincaillerie, le moulin a tan, le cimetiére ot une partie de ma famille est enterrée, le
retour par Villemoyenne et le cété lugubre et désolé. Plus tard mon pére trés vieux dans sa petite voiture avec le petit cheval gris, la maison Bonnefoy maintenant détruite, le Musée Gallo-Romain de M. Frédéric Moreau.
La sauterelle s’épaissit et la capre a perdu son feu (Eccl.). La fantaisie primesautiére s’est alourdie, le condiment intérieur s’est affadi. Dans la parabole du Semeur, c’est en nous-mémes que se trouvent les différentes emblavures. Une part est du roc et Peau ne peut rien dessus, une part est étouffée par les ronces (épines et roses frivoles), ce sont les passions, une part est enlevée par les oiseaux, ce sont les occupations mondaines et les pensées futiles qui s’envolent de tous cétés. Espérons qu’une derniére part a trouvé une terre bonne et excellente. Le village mystérieux d’Isnorafé, caché sur une montagne conique. — La Morisque gigantesque, agée de 98 ans, qui conservait la doctrine d’ Al-Ghazal (Vie de S. Jean de la Croix). Ce dernier tout petit?. Avec Paide de la S. Vierge il s’échappe par la fenétre de son couvent. — La Mlére] Thérése, avec sa longue figure tout empourprée par l’amour. Tout un livre andalou a écrire.
Janvier 1930
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| _Toutes ces tristes lavasses protestantes : neat-beer, cider, ginger-ale, coca-cola, etc. La S. Vierge dit avec tristesse : Ils n’ont point de vin. 17-18 [janvier]. Voyage
4 N[ew] York. Les Cincin-
_ nati. L’Enfant. France’s Tavern. Charlot (exposition). Margotine. Décoré Cochran chez les Morgan. TETE = les 2 1 q[ui] supportent — le chapeau ou »-Pauréole suspendue q[ui] nous attend. [122] L’Anglais ou Américain veut autour de lui du confort et de Vaisance; le Francais veut autour de lui du raisonnable. 21 [janvier]. Voyage a N[ew] Y[ork]. Paris. Mal de gorge. 25. Bal de jeunes filles.
Mort de mon vieil ami, Michel Graillet, avec qui je m’étais lié autrefois 4 Shangai. Bourguignon, chasseur, ancien soldat d’Afrique. En revenant de Chine c’est chez lui autrefois 4 Morey q[ue] j’allais gotter le vin de Bourgogne. Le Souler de Satin parait en édition courante?. Proverbe américain
qwil pourrait
: Il se léve de si bonne heure
se rencontrer
lui-méme
au moment
ow il va se coucher.
Des communautés agricoles du genre de celles q[ue] je décris dans Mardi* ont existé en Auvergne depuis le v1re jusqu’au milieu du xrx® siécle. Elles avaient l’inconvénient d’étre limitées 4 un petit nombre de familles et d’étre exclusivement agricoles. I] faudrait q[uel]q[ue] ch[ose] de beaucoup plus riche et varié (Ch. R. Dupin, « Une communauté familiale en Auvergne : Les Quittard-Pinon», dans /’Awvergne hittéraire, o&tobre-nov[embre] 1929).
Desolatione desolata eft terra quia nemo est qui recovitet corde’. La terre a été désolée parce qwil n’y a plus
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personne qui pense avec le coeur — qui fasse descendre les choses dans son cceur par l’intermédiaire de la pensée — ou au contraire qui les fasse remonter de son cceur 4 sa pensée.
Note d’un livre sur Marie de l’Incarnation. —Toutes les Ames sont féminines devant Dieu. L’alliance du peuple Juif avec Dieu dans l’A[ncien] Testament] est figurée sous le symbole du mariage. De 1a les adjurations a la Vierge d’Istaél. Ainsi Sfaint] P[aul] (II Cor., x1, 2) : « J’ai congu pour vous une jalousie de Dieu : car je vous ai fiancée 4 un époux unique pour vous présenter au Christ comme une vierge pure?. » L’Amour plus terrible que la Justice. « J’aime la Justice d’un [123] amour tendre et je la trouve belle, douce, agréable. Mais
Amour est sévére, rigoureux,
terrible. [/ rit toujours, mais il frappe d’une facon terrible » (Marie des Vallées)?. Rodin était trés myope. Il travaillait littéralement le nez sur sa sculpture, une énorme trompe de sanglier. Sa terre glaise et son modeéle, il avait le nez dedans, les mains dedans. Sa sculpture est plus faite pour le toucher ue oe Peeil. De 1a le théme qu’il a souvent employé es larges mains créatrices. — De 1a aussi le cété chiffonné, malaxé et tripoté de sa sculpture’. 30-31 [janvier]. Grande neige. — Desiderinm panperum exaudivit D[omi|uus; praeparationem cordis eorum andivit auris tua (Ps, TX). Le petit garcon saint Guy de Fontgalland 1913janvier 1924 mort a 10 ans — Jésus a 7 ans lui demande s’il consent 4 mourir pour lui et plus tard la S[ainte] V[ierge] lui renouvelle la méme demande. Hléve de Sf[aint]-Lfouis] de Gonzague, comme mes fils’. M[arie]
de l’I[ncarnation]. —
Un
soir Jésus fait
semblant de se refuser a elle et elle est toute troublée
Janvier-Feévrier 1930
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et le matin’ sans aucun préliminaire ou explication il y a fusion compléte et immédiate?. 5-6 février. — N[ew] York. All[iance] F[ranc]aise. 8 féy[rier]. Lettre de Chouchette disant qu’elle attend un enfant. Mort du colonel Edgar Méquillet®.
The indifference of our public and the eo nature ~ of our exploiters have condemned us to an inferno. It would seem that we had all lost our senses, ... that a few selfish money
grabbers have ruined all Beauty of our landscape and polluted our once pure and delightful surroundings. — Lettre d’une Ameéricaine de Los Angeles‘. 11 février. — Inauguration d’une double rangée de fausses dents. Article d’André Thérive sur /e Soulier de Satin entiérement frue-fo-type, tel qu’aurait pu Pécrire
Lemaitre,
Sarcey,
Pierre
Lasserre,
Souday,
etc. 19 Je ne comprends pas; 2° les brumes de l’étranger; 3° petit canulage a la gentille maniére des professeuts?,
[124] Une lassitudes.
carte
indiquant
les longitudes
et les
Nfotre]-S[eigneur] interroge au pluriel : Que ditesvous du Fils de Homme? et c’est S[aint] Pierre seul qui répond.
14 [février]. La Croisiére noire. Le grand adcteur Chinois Mei Lan Fan’, 15 [février]. — Neige. Musique de l’éther. Appareils Thérémine. L’alto invisible. Le vent électrique.
Il n’y a que trois « grandes personnes » au monde : ce sont le Pére, le Fils et le Saint-Esprit (S. Th[érése] de Lis[ieux]). Au
Musée
Freer : une déesse ou boddhisat
assis,
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Cahier VI
ayant sur le genou un petit éléphant qui lui caresse les lévres avec sa trompe. La stigmatisée Thérése Neumann : « Les yeux collés par le sang s’entr’ouvrirent peu a peu presque entiérement et jetérent devant eux un long regard tellement passif et tellement douloureux... comme si au moment de sa mort il voulait en supporter le résultat et voir combien d’h{[ommes] il avait sauvés » (Dr E. Villemin, Rev[ue] des J[eunes|, 21 janvier 29). Voyage a4 New Haven (Yale) 18-20 fév[rier]. — Remise de décor[ations] au P[résiden]t Angell et au Dean Cross. M. Feuillerat. Superbe bibliothéque, avec un donjon central rappelant Avignon. Au Musée panneaux florentins du xv® siécle avec des bonshommes coiffés des plus amusants couvre-chefs. Conférence sur le Drame et la musique!. Le Pére Riggs. Parution de mon livre sur Chr[isfophe] Col[omb] avec les dessins de Jean Charlot?. Admirablement réussi.
Vir — Vis — Vita — Vitis — Via — Virgo — Virga — Vergue®? Virus — Viridis — Vitus — Vinum — Vitellus — Vitium — Vigor — Vegetari — Viburnus. 22-23 [février]. — Madame Radewa. Convjersation] avec G.‘. Un M. Ignon a fait mon portrait. 25 [février]. — Chant d’oiseau. Tip. tip.tip. tip-taritarri! Le second tari souligné avec 2 r°. — Un pauvre vieux négre marchant d’un pas délabré avec un gant vert. S’élever
au-dessus
de la souffrance ou se glisser
dessous (Elisabeth de la Trinité)*.
Le bon vieillard pareil a loiseau dans le matin de mars qui fait des remarques pures. [125] Chez Mellon un Goya ravissant, une jeune
Février-Mars 1930 femme
dans
un
chale brun
gor
4 carreaux,
avec
une
bouche délicieuse de fraicheur et de pulpe, comme un bouton de rose. Aussi un Sfaint] Martin de Greco, un grand homme nu continué par un chevalier noir et damasquiné. Aussi 3 petits Vermeer. Errare
humanum
eS.
VWerreur
est
essentielle
a
Phumanité, c’est un élément de progrés et de décou_ verte; qui élimine l’erreur élimine la recherche, cette ~ provocation 4 linconnu et Vinattendu, quelque chose d@étranger 4 qui nous fournissons le moyen d’intervenir. La petite Anne de Guigné morte 4 11 ans!. — 2 mars. La parole de N[otre]-S[eigneur] aux Sadducéens : Le Dieu
d’Abraham,
d’Isaac et de Jacob, eést-ce le
Dieu des morts ou des vivants? — s’adresse aux exégétes de la lettre pure, 4 ceux qui ne voient dans la Bible qu’une Histoire, qu’une allusion a des événements accomplis. La Bible reste éternellement actuelle. Elle n’a pas rapport seulement a des choses qui passent et q[ui] sont déja passés. Mes paroles ne passeront pas. Etrange contraste entre (Richelieu,
Charles
la génération Louis XIII
[¢T, Van
Dyck,
les Velasquez,
Pascal) suprémement aristocratique, élégante, raffinée et plutdt décadente, et la grosse santé charnelle, épaisse et sanguine de Louis XIV (Madame de Montespan, Vendédme — tous ces goinfres et toutes ces dondons). D’ailleurs L[ouis] XIII, pére de Louis XIV. La santé ressortant brusquement de |’épuisement. Non timebis a timore nollurno — les « angoisses noéturnes »?. A sagitta volante in die, a negotio perambulante in tenebris, ab incursu
et a daemonio
meridiano
(Ps[aume] de Complies)’. Eyv[angile] du 1° Dimanche de caréme. — 17€ tentation : Que ces pierres deviennent des pains. La foule q[ui] demande la nourriture, le bonheur social.
go2
Cahier VI
De méme aprés la multiplication des pains, ils veulent aussitot faire N.-S. Roi. Réponse : ’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole q[ui] sort de la bouche de Dieu. V7# : littéralement. L’>h[omme] ne vit, il ne forme une société, toutes les forces en lui ne forment une société, q[ue] dans l’ordre q[ue] la
parole de Dieu lui donne. — 2¢ tentation : Si tu es le fils de Dieu, jette-toi en bas — Cette génération perverse demande des signes et des miracles, mais il ne lui en sera accordé d’autre q[ue] [126] celui de Jonas : un engloutissement suivi de résurrection : lEglise éternellement ensevelie et éternellement renaissante. — 3° tentation : Tous les royaumes du monde et leur gloire, je te les donnerai si tu m’adores. — Mon royaume n’est pas de ce monde. Dieu a eu faim et soif : Pofea esurivit —
Sitio}.
Mort de Taft. 8 mfars].
Massacre 4 Sin Chow (ou est la mission de Robert) de ’évéque Mgr Versiglia, du P[ére] Caravario et de 3 sceurs Chinoises (2 mars). Une
dame
dit 4 Henri Bordeaux
: Ce que j’aime
dans vos livres, c’est que je peux les donner a mes enfants en toute confiance, sans avoir besoin de les lire!
Baltimore : 3 jours, 10-12 mf{ars].
Earth to earth — ashes to ashes — but also flame to flame, love to love — word] to word — breath to breath — word to breath — desire to spring — time to eternity. Moise dit : Je vais 4 Dieu pour un peu de temps. Habetis Aaron et Hur vobiscum : si quid natum fuerit quaeStionis, referetis ad eos (Rxode, XXIV)s. Contre les protestants. Article de Thibaudet
sur /e Soulier de Satin'.
« Quand se produira cette catastrophe? Nul ne peut le prédire. Mais elle est dans la logique des choses.
Mars 1930
Michelet,
dans
une
page
903
saisissante
la pressentait dés 1855 : “Tout homme, écrivait-il,
a en
de prophétie,
Occident
foi en
quelque chose; l’4me n’est jamais vide. Mais, dans cette Russie ignorante, barbare, qu’on maintient vide d’esprit, si ’homme descendait la pente du doute, rien ne larréterait. Nous aurions l’effroyable spectacle d’une démagogie sans idée, sans principe ni sentiment: un peuple qui marcherait vers l’Occident, d’un mouvement aveugle, comme un corps mort galvanisé qu frappe et peut tuer encore!... Qui sauvera la Russie e cette infernale perdition et Europe de la nécessité d’exterminer ce géant ivre et fou'?”» L’erreur des grammairiens de l’école de Lancelot est de vouloir trouver l’explication dans une logique superficielle d’expressions qui sont dues 4 un instin@ psychologique profond et constituent une espéce de geste linguistique. Par exemple la forme réfléchie ou déponente en frangais est exprimée en faisant précéder le verbe d’un pronom personnel qui exprime simplement
le retour
sur
soi-méme,
mais
sans
qu’aucune
déclinaison soit possible. Par ex[emple] ze dans je me rappelle est aussi indéclinable qu'il Vest dans je me souviens, je m’apergois, je me complais, etc. Mais trompés par l’apparence les grammairiens veulent
absolument faire de [127] me un datif et condamnent par suite avec énergie la forme : Je me rappelle de qui est cependant la seule vraiment correcte, et en méme
temps beaucoup plus élégante, car elle suggére par la liberté du me quia une simple valeur de préfixe que nous nous replacons, que nous nous reconstituons par un retour sur nous-mémes? dans l’état ot nous étions quand tel événement s’est produit®. Premiéres fleurs : buissons de Forsythia, arbustes jaunes, magnolias a fleurs roses.
19 mars. — S.-Joseph. Priéres pour la Russie. En ce méme mercredit priére déchirante de Mardochée a ’Epitre pour q[ue] la louange de Dieu ne s’éteigne pas CLAUDEL V - 32
32
906
Cahier VI
Madame Radewa.
On découvre une neuviéme planéte : Ultima. [129] Le Dire&teur du Staatsoper Unter den Linden de Berlin, M. Hoérth, me donne des nouvelles excel-
lentes de Christophe Colomb’. Nouvelles de Chine : 2 millions de morts de faim dans le Shensi, 2 autres millions condamnés. Pendant
ce temps les Htats-U[nis] et le Canada, le monde entier, souffrent d’une surabondance de récoltes qui est considérée comme un désastre. p, 4, q% 4, commencgant
les prépositions et pronoms
relatifs, autant de nceuds coulants.
Hobbes : Si toutes choses étaient toujours en repos ou en mouvement uniforme, il ne pourrait y avoir distinction d’aucune chose et conséquemment pas de perception,
His volant touch Instint through all proportions, low and high, Filed and pursued transverse the resonant fugue. (Milton, Paradise los, book XI)*. Gal., VI, 11. —
Vedete
qualibus litteris scripsi vobis
manu’, Un commentateur anglais prétend q[ue] cela veut dire : regardez en quelles lettres je vous ai écrit de ma main! V[ous] reconnaissez ma grosse écriture. Ou encore : voyez quelle écriture j’emploie, c’est donc q[ue] ce que je vais v[ous] dire est trés important*.
Kn hébreu il y a un pluriel intensif : Behemah la Béte. Pluriel = Béhémoth.
=
Auditu auris audivi te : nunc oculus meus videt te (Job.,
XLID>.
Mars- Avril 1930
907
Pierre a une petite pleurésie. — Nombreux articles sur /e Soulier de Satin». Je regois la permission de partir en congé. Quoniam dereliquerunt venam aquarum viventium D{omi\num. — Ubi est verbum Dlomi|ni? Veniat. Et ego
non sum turbatus, te pastorem sequens : et diem hominis
non desideravi, tu scis. Quod egressum est de labiis meis,
Y redlum in conspetiu tuo fuit (Jér., XVID?. Dans la proph[étie] de Caiphe : Il faut qu’un h[omme] meure pour le peuple il est bien spécifié = non tantum pro gente sed ut filios Dei q{wi| erant dispersi congregaret in unum (S. Jean)°. » [130] Dans la création, comme dans la poésie (c'est le méme mot), l’idée de fin est beaucoup plus importante q[ue] lidée de cause. On dirait qu’un rendez-vous est assigné sur un certain point a plusieurs lignes de causes convergentes. C’est comme la discipline des armées de Napoléon, ot le plan étant expliqué et le rendez-vous
donné, une certaine liberté de
moyens était laissée aux exécutants. I] ne s’agit pas de loi, il s’agit d’un ordre (dans les 2 sens de disposition et de commandement). Aucune loi ne peut lier et exclure son auteur. Absurdité de penser q[ue] Dieu n’est pas maitre chez lui et qu’il peut étre exclu de sa propre création. Avant tout il s’agit d’un effet a réaliser. L’analyse minutieuse des causes n’apprend rien, et bien souvent elle égare. Quand une cause rencontre une autre cause, alors il se produit tel effet, mais j’ai
insisté dans /’ Art Poésique sur le caractére gratuit de cette rencontre’.
Un vieux fou qui passe son temps a voltiger audessus des divers continents. Madame M[eyer] me dit que ce n’est pas ce qu’on demande a la vie g[ui] est important, c’est ce qu’on lui donne.
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Cahier VI
Robert L[acour]-G[ayet] nommé 4 la B[anque] de France a la place de Quesnay.
15 mars. — Je signe 4 la Trésorerie les 62 obligations (Goldbonds) de la Dette Frangaise. L’araignée patiente, sacrificatrice. [131] Le Comte de la Vaulx se tue en aéroplane le jour du Vendredi-Saint en heurtant un fil 4 haute tension dans le brouillard au-dessus de Jersey City?. Priére du Samedi-Saint : Deus incommutabilis virtus et lumen aeternum respice propitius ad totius Ecclesiae tuae mirabile sacramentum, et opus salutis humanae perpetuae dispositionis effettu tranquillins operare; totusque mundus experiatur et videat dejetta erigi, inveterata renovari, et per ipsum redire omnia
in integrum, a quo sumpsere principium, D\omi\num. Nlostrum| Jlesum| C{hristum| Fillium| T[aum| O[xi] tecum vivit et regnat*. Sublime éloge de la joie dans Isaie, LIV®. Ommnes sitientes, venite ad aquas : et q|ui| non habetis argentum
properate,
emite,
et
comedite.
Venite,
emite
absque argento et absque ulla commutatione vinum et lac. Quare appenditis argentum non in panibus et laborem vestrum non in saturitate? Audite, audientes me, comedite bonum, et delettabitur in crassitudine anima vestra. Inch-
nate aurem vestram et venite ad me : andite et vivet anima vefira : et feriam vobiscum pattum sempiternum, misericordias David fideles... Quaerite D\omi|\num du minveniri potest : invocate eum dum prope est. Baruch : éloge de la Sagesse. Disce ubi sit prudentia, ubi sit virtus, ubi sit intelleéus.
Moquerie des inventions modernes et de toute l’ingéniosité des Grecs. Non hos elegit D{omi\nus neque viam disciplinae invenerunt. Sapientiam. Quis transfretavit mare et invenit illam, et attulit illam super aurum eleltum 2 Non est q|ui] possit scire vias ejus neque q\ui| exquirat semitas ejus. Sed q|ui| scit universa novit eam. Post haec in ferris visus est et cum hominibus conversatus est,
Abril 1930
909
That divine Word which Platon desired as a safer guide through life than human reason’. Un paquet de grossiéres insultes dans /e Petit Bleu de M. Oulman. [132] Paques —
Conscidisti saccum meum et circumde-
ditti me laetitia (Ps. XXIX)*. §
Eddington dit q[ue] la science moderne a commencé en 1917%.
Il se frappe la poitrine d’une grosse main potelée.
Perroquets Vénézueliens : cataritas, catanas et carapucas. Un « cacique» au bec jaune va se réfugier sur un oranger. Blanc comme la neige avec les ailes couleur de sorbet 4 l’orange. Des oiseaux purs pareils a des sorbets ailés.
Jésus aprés sa résurrection partage avec ses disciples un rayon de miel. Signature de la Conférence
de Londres.
22 avril.
(Baptisma) Non carnis depositio sordium sed conscientiae bonae interrogatio in Deum per resurrettionem J{esu| Clbristi| Diomini| N{ostri] (S. Pierre)‘. Spiritus, aqua, sanguis, hi tres (au masc[ulin]) unum sunt.
Les choses s’étant toujours exprimées par une analogie réciproque, depuis le jour ot Dieu a proféré le monde comme une complexe et indivise totalité (Baudelaire, Tannhduser et R{ichard] W{agner] a Paris)’. De la putréfaction a l’insipidité par le chemin de la vidange aseptique (André Gide). L’Obélisque de Washington comme une grande fléche verticale indiquant le Ciel. Sens unique — C’est
g10
Cahier VI
Paiguille aimantée de Christophe Colomb redressée!
q[ui] s’est
Madame Radewa.
Le 29 avril départ de W[ashington] avec ma femme a 10 h. du matin. Réception des Frangais. Collection Havermeyre. Diner avec Morgan et Owen Young. Dr Carrel. Encore la coll{eétion] H[avermeyre], Manet, Goya, paysage de Greco et surtout : un paravent de Koun, une vague, peinte en blanc avec des arrangements d’éventails et 2 vitrines de porcelaines chinoises, 1 rose fleur de pécher Yung chang et une rouge (K. Hol), un vase rouge pareil a la flamme de la Pentecdte et un autre gros vase rond tout rose. [133] La chiquenaude de Descartes, les choses vues a Venvers. Il n’y a pas eu une chiquenaude, il y a eu un
appel produit par un vide, le vide causé par la tion de la chose. Dieu la nomme et en reprenant esprit, il crée un vide qui /’appel/e, qui la met vement vers la fin. Le vide laissé par le mot proféré est Porigine du mouvement. N[ous] les choses
juste 4 rebours, comme
nominahaleineen mouune fois prenons
dans un train, si
un autre train est en mouvement 4 cété, nous n[ous] figurons aller dans la direction inverse. Au
coin
dune
rue
deux
amoureux.
sans voir avec des yeux rayonnants
Elle regarde
et lui lui parle
dans la bouche.
(suite) Quelle extase!
tout l’étre paralysé devant
tant de beauté, inondé de miel. Le soir diner de ban-
quiers pendant q[ue] l’orage se déchaine tout autour de notre tour vertigineuse! R. t[é]l[é]gr[amme] de Vigo arrivée 1°T mai.
2 [mai]. Sur le Paris : cabine 49 — Mer belle. — Un P[ére] Franciscain d’Ottawa accompagné de 5 religieuses.
Aboril-Mai 1930
gil
Un homme qui lit avec son nez, lequel est avancé et proéminent, par derriére un ceil 4 demi caché sous ja paupiére et barré par un lorgnon : la bouche et le menton dessinés tout en retraits superposés indiquent toutes les nuances du dégotit, de la désapprobation, du refus d’accepter. Un autre q[ui] lit cette fois non pas avec son nez |. mais avec tous les plis de sa figure creusée de profonds ~sillons concentriques et au milieu les .. petits trous noirs du nez.
Madame
Youriévitch
—
pendant
la Révolution
elle fait le coup de fusil, arrétée, emprisonnée, un tas
de gens tués et pendus autour d’elle. Le Gr[and]Duc Alexandre grand, maigre, assoiffé de cognac — promoteur de la Religion de ’Amour1, — il fait des conférences mystagogiques aux E[tats]-U[nis]. Le Président des Gueules Cassées. Vingt-sept bonnetiers de Troyes en Champagne. Encore un autre lecteur : il lit de travers d’un air hargneux avec un petit nez triangulaire.
Bérose a compté 432 000 ans pour les 10 rois antédiluviens (36 000 X 12). L’4me — Le mouvement — La toupie si elle n’est pas animée d’un mouvement constant elle tombe. Un Péruvien [Biclovucic]? qui a obtenu le monopole des peaux de serpent. On s’est apergu q[ue] c’est excellent pour les souliers de femme. Encore une pauvre créature de Dieu condamneée. C’est la réalisation de la prophétie de la Genése : [134] Tu fouleras le serpent sous tes pieds! — Le fils du Président du Pérou Le Guia — Le ténor italien Tito Schipa — Le Rév[érend] Dickie 4gé de 86 ans. Arrivée au Havre le 9 [mai] 46h. du soir. Voyage en auto sous une pluie glacée. Arrivée a Paris 4 2 h. du matin. Journalistes, etc. Départ pour Berlin le 12 par le
912
Cahier VI
N[ord]-Express. Christophe Colomb Retour en avion le 14 par Cologne’.
au
Staatsoper.
Répétitions de /’Otage au Studio Elysées avec E[ve] F[rancis]?.
des Ch[amps]-
Conversation avec M. Chaigne. Ce/la continuata dulcescit®. Il ne s’agit pas seulement de la cellule du moine, il s’agit de cette place trés étroite et opprimante, de cet interstice* que nous font les conditions de vie actuelles, dans une besogne de prisonnier entre des voisins qui nous laissent a peine la place de respirer. Crest 14 la pressura gentium> dont parle l’Evangile. Mais cette étroitesse, cette pression, cette violence de
la nature qui nous fait mal (car le Royaume des cieux souftre violence), c’est 1a précisément la caractéristique et le symptéme de cette croix bienfaisante qui est chargée de nous refaire et de nous refigurer. L’indice que c’est la volonté de Dieu, c’est qu’elle n’est pas la ndtre. N[ous] devons donc accepter avec joie cette violence qui nous indique une autre volonté plus forte, et la présence de Dieu qui nous presse pour notre salut. Elle chante les yeux au ciel battant doucement la mesure avec la main droite. Ce n’est pas mon plaisir ou mon intérét ou moi qui ont une importance quelconque. Aucun regard la-dessus. Simplement Dieu, qu’il soit, son existence, sa gloire, son excellence infinie. A tout ce q[ui] est dans le temps je préfére son éternité. Toute mon attention portée 4 Dieu et rien a moi. J. nommé
a Durban.
Le 19 mai, représentation de /’Osage. Le méme jour voyage a Villeneuve ow j’arrive le jour de la Féte des Morts du village, dont la féte avait eu lieu la veille [135], 3° dimanche de mai. J’arrive
Mai 1930
913
en pleine messe des morts. Puis le curé sort en chappe [sz] et le goupillon a la main et bénit toutes les tombes du cimetiére et finalement me conduit devant celle de ma mére ot je m’agenouille et prie pendant que les trois cloches sonnent. Infini sentiment de confiance et de consolation. Louise malade des reins. La vieille maison transformée : surtout elle n’est plus habitée dans le méme esprit humble. Stokhowski! vient me voir avec Milhaud pour des représentations de CA[ristophe| Clolomb| en Amérique. « Ses paupiéres interrogent les enfants des hommes. » Alternatives, n[ous] sommes interrogés par un regard alternativement visible et voilé. Conv[ersation] avec Briand : 21 [mai].
Surgite posiquam sederitis. C’est 1a formule de la priére. S’asseoir, se recueillir, se composer, se lever a l’appel
de Dieu quand Marie a été appelée par Marthe, aussi prompte et vive qu’elle était silencieuse et immobile. Surge, amica mea, in foraminibus petrae, in cavernis mace-
riae*, C'est Ame
que Dieu pourchasse dans tous les
trous de la paresse, de la matiére et de habitude ot elle s’est réfugiée. I] faut qu’elle se serve de ses ailes.
Choublier, converti.
26 mai. Visite 4 Maria Blanchard, peintresse espagnole, effroyablement bossue, avec une tignasse étrange qui lui retombe sur les yeux. Peintures délicieuses de femmes et d’enfants aux yeux extasiés, utilisant les découvertes du cubisme. L’Enfant au bol de chocolat. Elle me dit q[ue] Jacqueline Riviére, la fille de Jacques, son éléve, avait beaucoup de talent. Etrange vieille petite maison dans un jardin. Disques
superbe?.
des
Choéphores
et
des
Euménides.
C'est
914 Visite
Cahier VI d’Astruc,
directeur
du théatre
Pigalle, qui
vient me demander Christophe Colomb et I’ Annonce. Idées de musique pour /’Annonce'. [136] Pour traduire ou manifester ’extréme variété des événements psychiques, nous ne disposons que de la parole et du geste : moyens bien matériels, bien limités et q[ue] les conventions de lieu et de temps limitent et matérialisent encore bien davantage. Des événements psychiques de nature pourtant trés diverse ont déja eux-mémes d’étranges ressemblances. Que sera-ce lorsqu’ils seront exprimés, c’est-a-dire matérialisés : la parole d’un mystique pourra ainsi avoir une analogie frappante avec celle dun érotique, comme dans le Cantique des C[antiques]; — son attitude
pourra étre en tous points semblable a celle d’une hystérique, comme dans la statue du Bernin reproduisant la scéne de la Transverbération. On a seulement tort de conclure d’une identité d’aspe& a une identité de nature (Rév. P. Hoornaert, Ste Thérése écrivain)?. Lettres 4 Milhaud*. Idées pour la musique de ’Annonce. Regu Mardi — Almanach des Champs — Jains. Tintoret de Fosca’®. A Villeneuve
en détruisant le mur
du jardin et en
y ajoutant ces horizons opulents on en a altéré le caractére d’humble et sévére modestie.
D{omi|nus Deus] locutus est et vocavit terram (Ps. XLIX, 1)*. Voir ce que j’ai écrit sur /’appe/ de Dieu.
Chez la duchesse de La Rochefoucauld photographies sublimes des nébuleuses et de tous ces amas de soleils par milliards. Joie de la grandeur de Dieu. Mars vert et rouge. Peut-étre des feuillages bleus. Eve Lavalligre? 4 Lourdes faisant des neuvaines d’eau glacée, se trempant chaque matin dans la source de la Vierge, par un besoin de pureté et de purification.
Mai- Juin 1930
915
| Autrefois on ne disait pas haricots, mais féves de _haricots, c’[est]-a-d[ire] destinées 4 accompagner un _haricot de mouton, Astruc me d[eman]de » Pigalle. _
Articles
c[ontre]
moi
/’Axnonce dans
pour le Théatre /e Figaro,
/’Ordre,
vd 1? Echo de Paris, le Journal, P Eclair, etc.?.
Dalat
lis Pde ©Bho eats) ao eleoseeDL socnh eae
2 juin. — fe eae Madame de F.‘. Le jeune peintre M. A. Frére qui vient me d[eman]der conseil. Développé cette idée :Nous connaissons les choses et les étres non pas seulement en les étudiant, mais en les interrogeant, en les obligeant 4 nous répondre. Mais qu’est-ce qui nous autorise a les interroger? qu’est-ce qui les force 4 nous répondre ?Nous les interrogeons au nom de leur Créateur, par le moyen de cette parole en nous _q[ui] est une délégation du Verbe. Et elles aussi nous _interrogent. La rose ou le fruit ou le paysage q[ue] n[ous] peignons nous posent des questions, elles nous obligent a sortir la couleur appropriée sur la palette | de notre ame et a lui chercher l’association d’autres tons. Tu quis es? quem facis teipsum®? — L’aprés-midi, visite A Madame Henry Cochin — Exp[ositiJon de Mlle Lafugie — Conférence chez la marquise de Roys, | dans un cercle dominicain sur Cér[ésophe] Collomb]. ' Soirée chez F argue.
Madame
de Fels
: Gillouin,
Durtain,
Le 18 mai sous une pluie torrentielle visite a | PAbbé Mary avec Massignon, Petit®, Jean Bernard. | Discours. Le 25 je lis chez Petit des fragments de Apocalypse’, en présence de Massignon, Schowb, Mad[ame] Riviére, les deux Fumet, mon fils, Bernard.
Le 5 juin discours aux Gold Star Mothers. La | danseuse Teresina. 6, a 8 1%, départ dans la Packard
916
Cahier VI
par une gt[osse] chaleur. Déjeuner 4 Avallon. Visite | au village de Montréal dominant un magnifique — paysage pastoral. Stalles de chceur sculptées, 2 chantres, 2 hommes qui chopinent se faisant pendant. Chateau de la Rochepot. Effroyable orage. Arrivée a 7 h. Le coucou dans le lointain.
Mon Dieu faites que je ne sois pas au large dans Votre volonté mais que je la sente toujours de tous | cétés sur moi pressant comme un vétement. Toutes ces 4mes anxieuses de jeunes gens a Paris q[ui] venaient me demander conseil. 7 [juin]. Visite du chateau avec Pierre Buisson. Arrivée de Pierre 4 3 h. Le bois est plein de rossignols et de toutes sortes d’oiseaux chanteurs.
Les Francs pour premier roi élurent Pharamond I] régne sur ce prince un silence profond Et de son successeur un voile épais et sombre Couvre les ations du secret de son ombre.
Le corbeau dit au rossignol : Comment fais-tu? Le rossignol répondit : J’ouvre le bec et je fais turlututu! [138] 8 [juin]. —Pentecdte. Jacqueline Riviere! prend le voile 4 Dourgne. Je vais 4 ’église 47 h. pour communier. Porte close. Je reste assis sur un banc sur la place municipale regardant les hirondelles qui s’ativent sur le toit du presbytére. Puis 2 gros chevaux maladroits qu’un vieux paysan méne boire. Puis le greffier q[ui] vient afficher quelque chose sous le grillage de la mairie. Le vieux curé, 72 ans, q{ui] ressemble a Berlioz et 4 André Berthelot. Il prendra sa retraite au mois de décembre prochain. La
demi-lune,
avec
ses
taches
noires,
A travers
les nuages dans le ciel, pareille 4 une oreille brillante et profonde. — L’Amérique pareille 4 deux cceurs
Juin 1930
917
_tattachés par le cordon. — En tas épais sur le chemin comme engourdies des punaises tachées de rouge. Vertus paiennes. Il n’y a pas de vertus paiennes. Toute vertu est un acte de candidature au christianisme.
8 [juin]. Visite a effroyable en revenant.
Mad[ame]
Pierlot'.
Voyage
Accipit orator quod meruit auditor (S. Pierre Chrysol)?. Totam faciem prostituere (Tertulllien])*.
(L’Eglise) prenant les petits de Babylone brisant contre la pierre (Bossuet)*.
et les
12 [juin]. Voyage a Grenoble. Déjeuner avec le Préfet M. Desmars. L’Evéque. Le Musée. Un beau Véronése. Un magnifique buste de Barnave par Houdon, éloquent et insolent. Les bustes ont toujours été Ja spécialité de la sculpture francaise. Imaginé de la musique pour /’Annonce. Superbe nature morte de | Fantin-Latour.
De quwils
1919 4 1927; 120000 Viennois ont déclaré quittaient l’Eglise Catholique. Pas plus de
200 ooo pratiquants
sur 2 millions
d’habitants.
Totus mundus in maligno est (S. J.) Nemo unquam | potuit swam carnem in odio habere (Eph.)}.
Napoléon III disait qu’il ne lisait pas les romans, « maimant que différait de son
les lectures oncle.
sérieuses».
En
cela
il
[139] Chez les impies criards et grossiers. Ecoutezles piailler, déblatérer contre la religion, l’accuser de ceci et de cela, c’est une foule intérieure qui clabaude et qui se déméne, avec un bruit de tous les diables. Et
cependant dans l’4me de beaucoup de ces pauvres gens, N[otre]-S[eigneur] n’est pas absent. I] est 14 dans un coin, oublié, silencieux et garrotté. Pendant que nos passions hurlent, Jésus se tait. Jesus autem tacebat.
918
Cahier VI
Le 15 [juin], départ par la Route des Alpes. — Quoniam ex ipso, et per ipsum et in ipso sunt omnia’. La S{ainte] Trinité. — Tout le midi embrassé et regardé comme dans un éclair. Randonnée 4 toute vitesse, La route des Alpes. Grenoble. Col de la Croix-Haute. Sisteron. Manosque. La Durance. Aix. Odeur délicieuse des pins, des tamaris et des lavandes. Le rossignol. Réveil dans la fraicheur et le soleil au son des belles cloches de tous cétés. Travaillé le matin avec M[ilhaud] a la musique de /’ Annonce. Départ dans l’a[prés]-m[idi]. Marseille. Roger et Chouchette dans leur appartement sur les jardins du Prado, 6, rue César-Franck. Le lendemain Martigue [sic], S{aint]-Louis-du-Rhéne, vue sur la Camargue et les Bouches du Rh[éne]. Retour par le vent et une chaleur accablante. Le lendemain 18 départ 4 8 h. Salon, S.-Rémy, la maison de santé de S.-Paul (cloitre), Les Baux, La Vieille-Guide, Tarascon, Avignon, a déjeuner au restaurant Hiély
Elsa Koeberlé et son amie Ginia Liubov. Je les raméne sous la pluie 4 leur splendide palais du Fort S.-André d’ot l’on domine la Barthelasse et Avignon. Montdevergne,
Camille,
vieille,
vieille,
vieille!
la
téte remplie de ses obsessions, elle ne pense plus a autre chose, me sifHant a l’oreille tout bas des choses
que je n’entends pas. Elle me donne un chapelet gris qu’une sceur a fait pour elle, fabriqué avec cette graine grise qu’on appelle des « larmes de Job». A toute vitesse sur les routes droites! 7o, 80, 90, Orange, [140] Pierrelatte, Montélimar, Romans, S.-Marcellin, Voiron! Orages,
eau,
grands lambeaux
de vapeur
100 km. Valence, trombes
sur les vallées.
Atrivée 4 8 h. a Brangues. Un tas de lettres sur ma table.
Un moustique me réveille en me disant a l’oreille : « Je suis le Haut-Commissaire du Gouvernement. » Sur la route rencontré de nombreux troupeaux de moutons en transhumance. Les bergers, en téte 5 ou 6 anes chargés de tentes et de provisions, les chiens, les béliers avec leur grosse cloche et leurs cornes recour-
Juin 1930
919
bées. Quelques moutons blessés avec une petite chaussure de cuir a la patte. — Aux Baux pour la Noél une petite voiture garnie de fleurs et de cierges. On y
attelle une brebis qui améne ainsi 4 la Messe de Minuit sur de la paille son petit agneau. Le Vén[érable] Pallottit dit qu’aux derniers jours est réservée une pestis discernens, un « chatiment avec des yeux ». Les révélations de Marie Lataste* disent que la Cité de son cceur sera assiégée pendant trois ans et un peu plus? (la durée de la Grande Guerre). Aott 1914novembre 1918. Rien ne m’a donné Vidée de la sainte pauvreté ,chrétienne comme la carmélite qui m’écrit se servant ‘pour enveloppe dune enveloppe jaune industricusement
retournée,
soit
une
économie
d’une
fraction
dun centime! [Bacon] meurt en emplissant de neige une poule morte. 21 juin. — Cette h[eure] q[ui] est entre le printemps et l’été. Une nuit magnifique. — La ligne suave de la montagne, le cours du Rh[dne] dans le ciel*. — Le grand fréne, courbe délicieuse de la branche. — Une cloche q[ui] sonne dans la nuit.
22-23
[juin]. Béon. Visite 4 la Baronne P{ierlot].
[141] Mot d’une dame de province : Je ne regrette pas de devenir vieille car cela me permet de voir la fin des histoires®.
| |
Grossauder = manipuler grossiérement — sauder une salade.
gros-
Le figuier stérile. Ce n’est pas la saison des fruits, mais N[otre]-S[eigneur] n’en a cure, La Grace se rit de
920
Cahier VI
la nature et la soumet aux sommations les plus injustifiées et les plus inattendues. Elle n’entend de ce cété aucune excuse?. Une demande surnaturelle exige en nous une réponse surnaturelle. La Grace ne s’adresse as en nous 4 la nature mais 4 ce qui fait la nature. — Cf. Parabole ot le Maitre dit qu’il est dur et exigeant et qu’il entend récolter 14 ot il n’a pas semé. La Reine Elisabeth a la fin de sa vie A moitié folle,
brandissant A Vagonie tomber sur sucant son
une épée et transpercant les tapisseries. elle reste quinze heures debout avant de des coussins par terre. Elle meurt en doigt (Lytton Strachey)’.
Les cieux faits les premiers (erant prius! II Petr., Ul, 5).
Aprés Vapparition du Christ les oracles cessent (Plutarque, Sur la cessation des oracles). Tibére® ordonne de les fermer*. De méme en Ext[réme]-Or[ient] et dans l’Inde dés l’arrivée des missionnaires, les philosophes et les myStiques sont frappés de mutisme’. Le Sacrifice du Soir au Temple s’offrait a la IX® hfeure] soit 3 h., heure ot N[otre]-S[eigneur]
rendit l’esprit. L’Ecriture —
Balthazar — Et rex aspiciebat articulos
manus scribentis (Dan{iel])*.
Le 25 [juin] arrivée de Reine et de Gigette q[ui] repart le lendemain pour Paris. Bal Rothschild. Inimicorum tuorum anima rotabitur quasi in impetu et circulo fundae’. Discours d’ Abigail, femme de Nabal i Reg.) xxvyizo).
Aqua erit pars descendentis ad praelinm et remanentis ad sarcinas (ibid., XXX, 24)°. Priére de Salomon.
L’h[omme]
au milieu de ses
Juin- Juillet 1930
921
penscées innombrables : Ev servus tuus in medio est populi infiniti q{ui\ numerari et supputari non potest pro multitudine. [142| Dabis ergo servo tuo cor docile ut populum tuum discernere possit et judicare populum tuum, populum tuum hune multum*?
Maudit ’hf[omme] qui espére en homme, dit le Prophéte*. Le Self reliance des Anglo-Saxons et des protestants.
27 [juin]. Voyage 4 Lyon — Arrivée de Chouchette et de Roger. Lyon rempli de gens communs, sales, mal habillés, j’y suis comme un poisson dans |’eau. Les vitraux magnifiques de la cathédrale. Femmes en deuil priant dans la nuit. Devant le Gr[and] Bazar un gros homme a puissante barbe grise, les yeux , globuleux derriére des carreaux verts causant indéfiniment avec un rigolo décoré q[ui] suce sa pipe d’un air de jubilation. En rentrant de tous cdtés le tableau classique des 4 buveurs en manche de chemise autour d’une table. Et replesti a6ONAL ESSaye
in
comparationibus
aenigmata
(Eccli,
29 juin-4 j[uille]t. Voyage a Paris. Palais d’Orsay. Diner 4 F[rance]-A[mérique] prés du Cardinal Verdier. Maritain a Meudon. Maxime Jacob, Is[abelle] Riviére, Altermann‘, Mauriac, le jeune Ishii, etc. 1¢" j[uillet], soirée au bois de Boulogne, le lac vaporeux et fumant, les canards. 2 j[uille]t, Théatre Pigalle, les Rothschild, l’ Annonce. 3. Retour d’Henri. 4. Retour a Br[angues], g[ran]de chaleur. A Paris le jeune Dickman’, long exposé de doétrine sur l’analogie. Increpa feras arundinis (Ps. LXVII) Adlegorica descriptio daemonum qui libenter versantur inter homines leves et vanos, et in locis humentibus ubi regnat luxuria®. Convfersation] avec Dickman. Le Poéte travaille sur de l’inspiré, c[’est]-a-d[ire] du donné, c’est la-dessus q{ue] V’intelligence et Phabileté artistique ont 4 s’exer-
922
Cahier VI
cet — L’analogie a—b
est un ingtrument
de décou-
¢—
verte beaucoup plus fécond q[ue] le syllogisme’.
La lune apparut en grand tourment déchiqueté. Les habitants Turripinois.
de La Tour-du-Pin
dans le ciel
s’appellent
[143] (L’Inde ou lEgypte) juxta ubertatem suae exuberavit simulacris (Osée, X, 1)?.
les _
terrae
Tu quoque in sanguine teStamenti tui emisisti vinétos tuos de lacn in quo non est aqua (Zach., IX, 11)*. 8 [juillet]. — Promenade a Hauteville avec Poucette, Gigette et Henri. Le Curé, les grandes foréts de mélézes du Jura, le pélerinage de M[...]* fondé par des biicherons.
Une petite fleur blanche tellement imperceptible qu’on lappelle « Désespoir du peintre ». 10 [juillet]. Promenade au milieu des prairies, des moissons et des peupliers. Deux !orages qui marchent en se canonnant a la rencontre l’un de l’autre et finissent par se rencontrer au-dessus de ma téte. Arrivée de Renée grandie et embellie. Mes cing enfants réunis autour de moi. Accepifti dona tua in hominibus (Ps.
LX VII)*.
Stabant et volabant® —Isaie parlant des esprits célestes. Dimanche 13 [juillet]. — Promenade 4 Lausanne par Bellegarde et Gex. La vallée du Rhéne. Le Léman. L. G. Hotel Beau-rivage.
L’ame angoissée avec de grands frissons proteste contre le sommeil qui l’envahit.
Juillet 1930
923
4. Is[aie], XX XIII. Et congregabuntur spolia vestra sicut colligitur bruchus (hannetons, cigales)!, velut cum fossae plenae fuerint de eo?. — Les tranchées de la Grande Guerre. 17 [juillet]. Pichon de Chateaufort tué en auto. Ses cheveux et son monocle dans un arbre. Chambéry. [144] Exsiccatus est vertex Carmel.
Les sécheresses mystiques? (Amos, I, 2)*. Siccavi vesligiis pedum (IV Reg., xix, 24).
meorum
omnes
aquas
clausas
Dimanche 20 [juillet]. Longue promenade dans la campagne et le long du Rhone. Gerbes entassées. Dans la haie ces baies rouges comme des gouttes translucides. Exposition déception.
de Delacroix
Evidemment
au
Louvre
beaucoup
—
Grande
de talent, surtout
dans les petits tableaux, les esquisses et les portraits. Mais que d’emphase creuse et mélodramatique, quelle limitation de procédés et de moyens, quels partis pris®, que de rhétorique insupportable! Jamais la sensation de la nature aimée pour elle-méme, mais seulement en tant que moyen de soulagement d’un artiste dévoré par son foie. I] y a des artistes chez qui tout est téte, d’autres ot tout est ceeur, chez Df[elacroix] tout est foie. Rien n’est plus désastreux que ces expositions consacrées a un seul artiste. Tous ses défauts et ses procédés éclatent. C’est comme un bon diner ot il faut varier les plats et les vins q[ui] se relévent l’un par l’autre. 22 [juillet]. Visite de Paul Petit.
La Sagesse. Inclinavi modice aurem meam et excepi iam (Eccli,; LI, 21)*: Et vespere perfodi parietem manu (Ez., XM, 7)’.
924
Cahier VI
Non dies neque nox et in tempore vesperi erit lux (Zach., XIV; 7)* Dimanche 27 juillet. A travers les Dombes. Le Monastére des Trappistes, tout en briques et pareil 4 une maison de détention. Messe. Sermon par le P[ére] a Pair jubilant et malicieux. Le petit novice en scapulaire noir qui poursuit les vaches. Ars. Le presbytére, la table, l’écuelle, le pichet, le pauvre lit, les instruments
de pénitence. Le S[aint] Curé repose dans une chapelle construite (en partie) par mon beau-pére et dans une chasse dessinée par mon beau-frére Antoine. Retour. Vue sur la vallée de l’Ain. [145] 25 [juillet]. G[ran]de-Chartreuse. 31. Lombard, Renondeau.
Grenoble.
1€f aotit. Le corps puni. Les Anges qui flagellent Héliodore. Quelle revanche, quel soulagement pour lame! a quels sévices ne s’est pas livré ce gros ventru! Regardez autour de vous ce qu’il a fait des enfants de Dieu, ces yeux éteints, ces bouches pareilles 4 d’immon-
des entonnoirs, ces nerfs de gorets et de rapaces, ces organes tuméfiés ou déformés. Tout ce tas de chair molle docile aux suggestions de la paresse et de la sensualité?. Maritain dit que la force du systéme de S. Thomas est qwil s’appuie sur les grandes vérités de sens commun que le coeur de Vhomme conserve obstinément méme quand la bouche les renie : existence du monde extérieur, finalité, liberté, providence, existence de Dieu, responsabilité, existence et immortalité de l’Ame.
Ps. LXXVII, 41. Sandum Israel limitaverunt (en hébr[eu])°. O Seigneur, que vos Ecritures fassent toujours mes
délices! que je ne me trompe pas, que je ne trompe personne en les expliquant! Vous a qui appartiennent le jour et la nuit, faites-moi trouver dans les temps
Juillet-Aont 1930
|. ~
925
q[ui] coulent par v[otre] ordre un espace pour méditer les secrets de votre loi. Ce n’est pas en vain q[ue] v[ous] cachez tant d’admirables secrets dans les pages sactées. Seigneur, découvrez-les-moi : car votre joie est ma joie et surpasse toutes les délices : donnez-moi ce que j’aime, car j’aime votre Ecriture et vous-méme m’avez donné cet amour : ne laissez pas vos dons imparfaits, ne méprisez pas cette herbe renaissante q[ui] a soif de v[otre] rosée : que je boive de v[os] Haux salutaires depuis le commencement de vfotre] Ecriture ou ’on voit la création du ciel et de la terre jusqu’a la fin, ot Pon voit la consommation du régne perpétuel de v[otre] cité sainte (S. Augustin, Conffesstons|, liv. XI?, trad[uit] par Boss[uet]). Du méme, liv. VII. — Je m’attachai avec ardeur et avidité au style vénérable de v{otre] Esprit-saint (avidissime arripui venerabilem Stylum spiritus tui); et v[os] saintes vérités s’incorporaient 4 mes entrailles quand je lisais les écrits du plus petit de vos apétres : et je regardais vos ouvrages avec frayeur?.
Quiconque donc veut devenir un habile théologien et un solide interpréte, qu’il lise et relise les Péres! S’il trouve dans les modernes q[uel]q[ue]fois plus de minuties, il trouvera
souvent
dans un seul livre des
Péres plus de principes, plus de cette premiére séve du christianisme q[ue] dans beaucoup [146] de volumes des interprétes nouveaux : et la substance qu'il y sucera des anciennes traditions le récompensera abondamment. Que s’il s’ennuie de trouver des choses, etc., qu’il se souvienne, etc., parce q[ue] aprés tout ces g[ran]ds h[ommes] sont nourris de ce froment des élus, de cette pure substance de la religion; et q[ue] pleins de cet esprit primitif qu’ils ont recu de plus prés et avec plus d’abondance de la source méme, souvent ce q[ui] leur échappe et q[ui] sort plus naturellement de leur plénitude est plus nourrissant q[ue] ce q[ui] a été médité depuis (Bossuet, Défense de la Tradition et des SS. Péres, II@ partie, liv. IX, chap. xvimz).
926
Cahier VI
Berthelot 1-5 [aott]. Excursion a la Gr[ande]Chartreuse et 4 Grenoble — 4 Chambéry et Annecy par le Col de Plaimpalais. Les conciles cecuméniques de Lyon sous Grégoire X et de Florence sous Eugéne IV décident comme de foi que « les 4mes de ceux qui meurent ou dans le péché mortel aétuel, ou dans le seul originel, descendent incontinent dans l’enfer, ad Infernum, pout
y étre toutefois punies par des peines inégales : Poenis disparibus puniendas' ». D’ot le cardinal Bellarmin et le P. Petau concluent la damnation éternelle des uns et des autres sans qu'il soit permis d’en douter. Les voila donc dans l’enfer, dans la peine, dans la punition,
dans les tourments perpétuels, selon S[aint] Grégoire, dans la géne, selon S[aint] Avit, dans la mort éternelle, dit le Pape Jean. Vfoir] plus haut Pencyclique de Pie [X?. Le chateau a ses douves gardées par un million de minuscules soldats dorés qui dansent dans le soleil au-dessus des eaux dormantes tenant leur petite lance. Au milieu deux passent des dragons de soie verte. Bourse = le portrait méme de la double poche avec ses cordons. 9 aout. — Féte de S. Jean-Marie-Baptiste Vianney. Beau temps. C[on]f[essé] a Belley.
Attraper un moustique sans lui faire de mal avec une pince a sucre. La grande nuit d’hiver criblée de sucre en poudre et de dragées. — P[aul] Petit me donne un Stylo avec mon nom et ma devise.
[147] Bénédiétions
de Moise sur les XII Tribus,
trés différentes de celles de Jacob : Lévi, Ruben, etc. Nephtali: Mare et meridiem possidebit.
Lundi 11-Mardi 12 [aofit]. Pélerinage 4 La Salette par un temps miraculeux, un azur ambiant comme une
Aout
1930
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liqueur d’extase et de joie ot trempent les hautes montagnes pareilles a des citadelles. La vallée de Grenoble, les 3 lacs de Laffrey, La Mure, Corps. En auto-
car 4 La Salette. L’église de pierre noire. Les Aniouta!, Jean de Menasce, Juif converti entrer au noviciat des Dominicains 4 Amiens?. voyons le lieu de PApparition, la Vierge assise
Fumet, qui va N[ous] en bas
avec sa coiffe de paysanne, son fichu, son tablier, tout cela glorifié avec des roses, une chaine d’or sur les
~ €paules (pourquoi la chaine?). Conversation bras croisés avec les 2 petits bergers Maximin et Mélanie. Henri et Gigette sont a cdté de moi comme ces enfants. Elle monte par un chemin sinueux jusqu’a l’endroit ou elle s’éléve vers le ciel, face 4 Rome. « Les p[ommes] de terre pourrissent », cela représente les Ames des morts, me dit Aniouta, ou peut-étre les Ames enterrées dans la matiére qui ne voient pas la lumiére et sont décomposées par le confort matériel ambiant. « Les rocs q[ui] deviendront des monceaux de blé. » Le blé dans la main quis’en va en poudre. « La piéce du coin », cela rappelle N[otre]-S[eigneur] qui est la pierre angulaire. « Les noix deviendront mauvaises. » Elles gardent a l’extérieur une apparence grace a leur dureté, a l’habitude qui les maintient, mais a l’intérieur tout est
sec et vide. Cf. « N[ous] vivons du parfum d’un vase vide» (Renan). La génération laique vertueuse suivant les anciennes générations croyantes. Berthelot, Proudhon, etc. — « Le raisin pourrira. » Tout ce qui est tendre, juteux, sucré, exposé sans
défense a lair
extérieur : les femmes. « Il y aura une grande famine. » Famine de la parole de Dieu que personne n’entendra plus et ne recevra plus, famine de n[otre] pain quotidien et supersubstantiel. « Les enfants seront saisis d’un tremblement et mourront dans les bras de leurs méres.» Tremblement, c’est lagitation nerveuse et inutile, les pauvres gens sans guides, anxieux, qui ne savent plus ot aller, ni que devenir. Leurs méres ont beau les tenir dans leurs bras, ce n’est pas d’elles qu’ils ont besoin. C’est létreinte purement animale, qui loin de suffire aux ames les étouffe (cf. Reg.). C’est Péducation
athée qui rend les 4mes
insatisfaites, les
928
Cahier VI
énerve, les désespére par ses direétions contradictoires'. — Le lendemain nuages, temps épouvantable. [148] Passif : manque de charité, paroles moqueuses et blessantes (le P. Lagrange), vanité, je fais la roue. A@if : joie des belles ames rencontrées, les 2 vieilles
dames noires de Roubaix, cette pélerine qui prie les bras en croix. La procession aux flambeaux, la fontaine au-dessous de |’endroit ot la Vierge a pleuré,
pure et froide. Bien prié la S{ainte] Vierge, quelle nostalgie ces 2 pauvres enfants ont di avoir, sentiment de détachement dans la hauteur. Prié pour la vocation de mes 2 enfants. L’Abbé Paturle.
Mort de Siegfried Wagner. L’horrible Cosima?, fille de Liszt, se convertit au protestantisme pour épouser W[agner] aprés lui avoir donné 3 enfants adultérins. L’attente 4 Cadesbarné devant le temple de Phogor. La vision de la Terre Promise 4 Phasgah’.
Dimanche
17 aotit. —
Temps
froid et radieux.
G[ran]de promenade en auto avec ma f[emme], Reine, Henri, Renée et Lacour-Gayet. La Dent du Chat, les montagnes
de la Maurienne,
Aix, Annec
(messe 4 11 h. a N[otre]-D[ame]), le col des Aravis, Megéve, l’hétel du Mont-d’Arbois, descente sur Cha-
monix, retour par Albertville et Chambéry, coucher de soleil, ’Alpengluh sur la Maurienne. Les routes encombrées d’autos et de grands bateaux roulants avec des cargaisons entassées d’hommes et de femmes. Comme des moucherons sans but 4 toute vitesse qui s’entrecroisent dans un rayon de soleil. Comme si par le mouvement ils essayaient de rendre un hommage confus a l’immobilité de la nature. Ces gorges étroites et sinueuses qu’on enfile de bout en bout, comme si la révélation d’un mystére en dépendait. 110 km. a Pheure. Qu’est-ce qu’il s’agit donc d’atteindre a tout prix? a quel rendez-vous sommes-n[ous] appelés? Une espéce de rite religieux, de danse sacrée‘.
Aout 1930
929
Mercredi 20 aodt. Départ en Packard avec Henri et _ Gigette. Grenoble, Gap, déjeuné. Devant l’hotel Punique curiosité du pays, 4 ce que je suppose, une _ €norme pierre, pourquoi pas un aérolithe q[ue] tous les chiens du pays viennent flairer et compisser. Route _ vers Avignon par les gorges de l’Aygues par un pays de roches sec et jaune. Vaison, le Ventoux, Carpentras. Regu au Fort S[{aint]-André par M[ademoislelle Elsa Koeberlé, un pain a la main, et Ginia Lioubov. Ancienne abbaye bénédictine peuplée d’ossements et de ruines superposées, entre [149] autres un crane préhistorique prognathe et un guerrier de taille gigantesque. Le jardinier le porte 4 Avignon, caché au milieu de ses salades, pour éviter l’oétroi! Soubassements gigantesques et au-dessus un bois de pins. Vaison, Avignon, le Rhone et le Ventoux. Un officier de Napoléon en demi-solde a fait construire en haut
une tour « pour voir la mer» ot il allait « sabler» du champagne. Grotte de Saint-Pont et Sainte-Casarie. Visitée par S. Catherine de Sienne. Villeneuve batie par Philippe le Bel pour surveiller Avignon, on se rend compte de la situation humiliante de la papauteé. — Un mot de citoyen d’Orange a une représentation de Jules César : il montre la louve romaine a un camarade : « Té! que tu vois la chienne avé les deux petits dessous qui tettent, eh bien, c’est Roméo et Juliette. » — M[{ademois]elle L[ioubov] prétend avoir retrouvé la couleur et les procédés des primitifs. Homard 4 l’armoricaine, canard aux figues. Sur ma table les Méditations poétiques de M. de Lamartine, un monsieur jouffu et ébouriffé! en escarpins, favoris,
pantalon clair et gilet noir, invoquant I’Eternel et tenant une Elvire éplorée et bien nourrie entre les bras. La cuisiniére trés lettrée me d[eman]de un autoeraphe. — Le lendemain Camille 4 Montdevergne, vieille, vieille. Le Musée Calvet, mon buste enfant?,
2 Breughel le Drdle, 2 Zurbaran. Collection de clefs et de serrurerie. L’aprés-midi en auto, le chateau du baron de Castille, colonnade renversée par le vent,
il repose au milieu de ses 2 maitresses, pour tombeau une réduétion du temple de Paestum au milieu de
930
Cahier VI
quoi un énorme cyprés. Groupe de trois colonnes soutenant un croissant (le baron s’était fait musulman). Uzés, le pavillon de Racine, vue des remparts
sur un paysage désolé, de garrigues, tel que celui ot l’Ange vint consoler Agar et Ismaél. Ville morte, personne dans tout un systéme de rues et de places désertes. Un enfant effrayé se montre au bout d’une rue sépulcrale et se sauve q{uan]d il nous voit. Hé¢e/ des Barons de Castille hermétiquement fermé, a vendre pour 50 ooo fr. Hétel Renaissance ou une trés vieille dame s’agite au milieu d’un capharnatim de livres, de meubles et de tableaux décrochés, dans des ténébres de souterrains. Au coin d’une rue, terreur, 12 maccha-
bées livides nous regardent a travers une vitre. Ce sont les mannequins d’un magasin de confection, ils n’ont pas de jambes et leur corps commence par un veston croisé. Des gens attablés nous regardent en ricanant! sortir tout tremblants de cette épreuve épouvantable. « Eh bien! qu’est-ce que vous dites de ca?» Toute cette ville rappelle le mot d’Edgar Poe : « Pour celui [150] qui est couché dans la tombe le ver est encore une compagnie, les heures corrosives une société’. » On sent tout son étre qui se pulvérise et s’en va grain par
grain. La
garrigue, le Pont
du
Gard
au-dessus du Gardon. Trés beau. Pas une arche de la méme largeur ou hauteur. Retour. Le lendemain 4 la fontaine de Vaucluse. Superbe église romane byzantine au Thor, toute dorée et bleue a L’Isle-sur-Sorgues. Toute la plaine couverte de légumes et de melons. Champs bordés de cannes et de cyprés. La fontaine au pied d’une conque immense de rochers. Les rochers tout couverts
de noms
d’imbéciles, comme
un écueil
par les fientes d’oiseaux de mer. Déjeuner au bord de la Sorgue prés dune roue ruisselante qui tourne. Kau
rapide,
indiciblement
verte,
fraiche
et
claire.
En route S[aint]-Pierre-3-chateaux, encore une église carolingienne, comme au Thor. Les colonnes enveloppées de dessins divers dont le but 4 ce que je suppose est de suggérer la mosaique absente. Partout on s’est ingénié a éviter la symétrie. S[aint]-Bernard de Romans, encore une é€glise romane, avec de magnifiques
Aott
1930
931
sculptures a l’entrée. Retour 48h. 1% sous une petite pluie.
Idées pour des fresques dans la chambre de la belle Judith: : la Création du Monde : une harde d’éléphants, le plus grand renverse de |’épaule un arbre immense qui s’écroule en diagonale, laissant tomber des noeuds de serpent, dessus un grand nid, des aigles et des hérons fantastiques s’envolent, dans Jl’étang au-dessous il y a des hippopotames et des crocodiles, on voit dans le lointain s’édifier des termitiéres. Dans le coin a gauche les arches d’un immense Pont sur lequel passe |’Eternel en costume de pontife (la tiare) sur un char tenant le S[aint]-Sacrement comme un soleil qu’il montre a toute la nature. — Autre idée : le Déluge. Le paysage des Alpes, longues bandes de tochers superposées, acropoles vertigineuses, de tous cotés des eaux ruisselantes et au-dessus un immense arc-en-ciel d’un bout a l’autre dominant toute la composition. Tout en bas et tout petit Noé et ses enfants sacrifiant, une toute petite note rouge vermillon, dans le vaste édifice des ocres,et des verts éteints. L’Arche 4 une grande hauteur accrochée entre deux montagnes. — Autre : L’Arche entre deux montagnes une quille monstrueuse dressée dans l’air, toute noire,
qu’on voit de par dessous. — Autre : Noé et ses enfants plantant le raisin (sur une croix). L’ Arche toute petite dans |’éloignement. [151] Gewaltsam und stiss — powerful and sweet. Chateau de Virieu ou résident les anciens propriétaires de Brangues. Admirable paysage circulaire tout vert comme une tapisserie. Vu les tapisseries de « la Belle Judith », avec son visage fin, futé et pervers. Temps admirable. Toujours
ladite chambre;
la Création. Des
mains
de tous les cétés dans les nuages, les unes faisant un neud, une autre du doigt mettant une pendule en branle, une autre maniant une roue, l’une allant
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Cahier VI
chercher de la matiére au coin 4 gauche et l’autre au coin 4 droite, etc., etc.
Infixus sum in limo profundi et non et substantia (Ps.)}. Je suis enfoncé dans la boue et je n’ai sous moi rien de solide qui résiste et sur quoi je puisse m’appuyer. 4h. du matin. Insondable douceur et consolation? de cette fin de nuit d’été et des étoiles toutes ensemble
presque
imperceptibles
qui déversent
sur moi
des
torrents de lait. — Au soir le 1? quartier de la lune ui se couche absolument semblable 4a une tranche e cantaloup.
30 [aout]. — Promenade a4 Evian. Diner a Seyssel. La maison des Giraud avec le lac devant, comme une
[lacune] de délices. Deux gros jumeaux dans leurs berceaux qu’on appelle ’un Monsieur le Maire et Pautre Adjoint. Le 4 septembre aprés une série de jours sur la vallée et le marais d’une lumiére étrange et merveilleuse, un soleil pur tout voilé de vapeurs, départ 4 9 h. du matin avec Gigette en Packard. La Guiche, Millylés-Buxy, Sadne-et-Loire. Puis la Pierre-qui-vire. Le monastére bénédictin au milieu des sapins avec le torrent au milieu, le Trinquelin qui continue tout seul infatigablement les oraisons des moines. Le P[ére] Muard. Levé 2 fois 4 2 h. 4% pour Matines. Puis M[ada]me Méquillet. Festigny. Clamecy avec ses vieilles maisons. Paris. Hdtel Continental. Le lendemain Bruges. Le Béguinage. Le curé Hoornaert. Profession d’Antoinette Widerhorn, Sceur Agnés, le 8 septembre. Procession, les [152] moniales en voile blanc. Offertoire 3 fois 4 Dieu les bras en croix. Diner avec le P. Lefévre. Puis conversation sous les arbres dans le petit jardin monacal avec les moniales. Impression de paradis. Conférence. Le soir? S.-André-deLophem prés de Bruges, immense ruche. Bruxelles. Francqui'. 11, départ pour Villeneuve, affaire succes-
Aoit-Septembre
1930
933
sion. Puis Nancy avec Knecht et Fanell. Pont-aMousson, l'Université des Jésuites. Magnifiques batiments Régence : les 3 superbes escaliers, la bibliothéque. Retour 4 minuit.
SS
Le 8 [septembre], a Nice ot. Chouchette se trouvait en déplacement, naissance de mon petit-fils JacquesPaul, 3 semaines trop t6t, mais c’était la Nativité de la T[rés] S[ainte] V[ierge].
Dieu, enseigne le Concile du Vatican, est infiniment heureux en lui-méme et par lui-méme (Sess[ion] 3, ch. 1)!. Entrez, dit Jésus, dans la joie de Votre Seigneur (Matth., XXV, 23). La grenouille au fond du puits : toutes les étoiles sont brouillées (Hai Kai)?.
Sicut unguentum q|uod|\dam descendit in barbam, barbam Aaron (Ps.)8. Style de S. Grégoire. Si la Barbe est a Pimage des rayons, la barbe autour de la bouche indique le rayonnement de la Sagesse. Maximes d’un prétre missionnaire dans les faubourgs : La bonté sacerdotale — Ne demander que le possible — Procéder par étapes — Supposer le bien. Déjeuné avec le Maréchal Lyautey. Malice impitoyable de Age qui s’attaque a un trait particulier de notre physionomie (dans l’espéce le nez), le dégage avec art, le ciséle, le colorie, le « monte », de maniére 4
en faire une espéce d’objet d’art monstrueux, bien exposé au milieu de la vitrine. De méme la moustache et les cheveux en brosse, [153] testes lamentables d’un
héritage dilapidé. I] en est de méme pour notre patrimoine
de souvenirs
et d’idées,
tous
ces
morts
que
déterrent les vieillards. Alas, poor Yorick'. Le 18 [septembre], voyage rapide 4 Brangues, toute la Bourgogne comme un corps avec ses muscles longs et pleins, ces masses musculaires a la fois élégantes et épaisses, dans la belle lumiére amortie de septembre.
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Cahier VI
Cela au moins restera quand la tuile mécanique et le ciment armé auront tout souillé. Traduit le poéme de Beddoes?. Arrivé 4 Minuit. Revu mes enfants pour un jour. Le lendemain, la vieille baronne Pierlot q[ui] me
serre les mains
avec
émotion.
Samedi,
Genéve.
Déjeuné avec Briand qui déballe ses souvenirs, autant d’innombrables petits bas-reliefs extrémement_ flatteurs pour lui servant de soubassements a4 sa future Statue. Retour le dimanche. Messe a Bourg. Les 2 pauvres f[emmes]. Situation allemande. Le 24, départ en auto 4 5 h. du matin. Je m’embarque sur |’I/e-deFrance, cabine 269. Départ a 1 h. 4.
Bacon : Men of age objet too much, consult too long, adventure too little, repent too soon, and seldom drive business
home to the full periode, but content themselves with a mediocrity of success*. Les gens dont on ne s’apergoit que par leur disparition. Non est hic. S. Luc, chap. XIII, 11-17. — Ef ecce mulier, q[uae] habebat spiritum infirmitatis annis decem et offo : et erat inclinata nec omnino poterat sursum respicere. Quam cum videret, Jesu vocavit eam ad se et ait illi : Mulier, dimissa es ab infirmitate tua. Et imposnit illi manus et confeStim erecta est et glorificabat D\omi|num. Respondens autem archisynagogus, indignans quia sabbato curasset Jesus], dicebat turbae : Sex dies sunt in quibus oportet operari : in his ergo venite et curamini, et non in die sabbati. Respondens autem ad illum D\omi\nus dixit : Hypocritae, unusquisque veStrum sabbato non solvit bovem suum aut asinum a praesepio et ducit adaquare ? Hane autem filiam Abrahae, quam alligavit Satanas, ecce decem et otto annis, non oportuit solvi a vinculo isto die sabbati® ?
La femme, c’est la Synagogue ou la race Juive (filia Abraham) ou Yame affligée dun esprit d’infirmité, c[’est]-a-d[ire] d’une infirmité du corps traduisant
celle
de esprit,
qui la courbe
vers
la terre,
c[’est]-a-d[ire] vers les intéréts matériels et l’empéche
Septembre 1930
935
complétement de regarder en [15 4] haut. Dieu l’appelle, est lui qui prend Vinitiative et il lui dit : Femme, tu es congédiée de ton infirmité. Il lui impose ses mains créatrices,
conservatrices,
libératrices,
et aussitdt
la
voici droite, elle n’est plus contrefaite, mais refaite dans son état primitif, elle a reconquis ce visage sublime qui regarde le ciel, au lieu de surveiller le sol, son corps difforme et ses propres pieds. Elle était liée ainsi depuis 18 ans. 18, c’est 3 fois la semaine sans sabbat. - Trois fois déja elle a mimé avec son corps misérable Poeuvre de la création découronnée, repassé le méme chemin?, trois fois elle a essayé de se passer de Dieu, trois fois elle a essayé de refaire le monde 4 sa propre image, ridiculement étudiée (par exemple les paiens — les pharisiens confiants dans leur propre privilége — la science moderne). Tout cela c’est le ba qui empéche de regarder en haut. Et maintenant c’est le Sabbat.
Mais les savants,
tous les gens qui ont fait
du monde, de la création, leur propre bien, prétendent défendre 4 Dieu d’y toucher désormais. Qu’il reste dans son repos! « Dieu n’agit pas par des volontés particuliéres » (Malebranche — Renan). Il ne lui est pas permis d’intervenir directement, de se méler a notre jeu, de réparer ce que nous avons abimé. D’un cété le monde laique, ouvrier, mécanique, réglé par des lois inexorables. De l’autre un Dieu confiné dans un repos semblable 4 l’impuissance. Dieu dit : Eh quoi! il est permis de détacher l’4ne et le boeuf (les animaux de Noél) de la créche (praesepio, le berceau de l’enfant Dieu) un jour de sabbat et de les mener boire — Détacher de la créche-berceau, c’est détacher de la nourriture, des éléments purement matériels, de la man-
geoire, et aussi de ces commencements obscurs ot la vérité est ligotée dans ses langes et de mener l’ane et le boeuf, le frére Ane et le frére boeuf, ce qui en nous
se distingue par les oreilles et par l’estomac, par les facultés d’entendre et de ruminer, de les mener boire, de les mener aux sources d’eau vive, qui, loin d’étre
taries un jour de sabbat, plongent leurs racines jaillissantes au sein de l’éternel repos. Comment donc serait-il interdit 4 Dieu de guérir au dehors comme CLAUDEL V - 33
33
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Cahier VI
il abreuve et refait (reficit) [155] au dedans? de soulager les bétes de somme de leur fardeau ouvrier comme il les fait boire, de les guérir de la terre en les
tournant vers le ciel? de consommer lceuvre du septiéme jour, comme I’a été celle des six précédents? En six jours il nous a faits, il nous associe 4 son jardin,
4 oeuvre de sa création, et le Septiéme il nous refast, nous q[{ui] étions contrefaits. Dieu s’arrache a son repos, comme le boulanger de l’Evangile, pour nous guérir, pour nous toucher et pour nous refoucher, pour rétablir! sur nous la ressemblance que n[{ous] avons déformée. C’est le miracle toujours possible. Non
seulement le cours
secret de la vie surnaturelle,
mais les coups de théatre quand il le faut. L’ane,
patience,
soumission,
sobriété,
oreilles
elles sont comme ces [sc] armoiries. C’est sur un ane que N[otre]-S[eigneur] entre 4 Jérusalem. Luc, méme chap. XIII, 23. Eece ejicio daemonia et sanitates perficio hodie et cras et tertia die consummor. Verumtamen oportet me hodie et cras et sequenti die ambulare: quia non capit (ody evdéxetar) prophetam perire extra Jerusalem.
Mer forte. Mais cela n’empéche pas a chaque repas les terribles vieilles femmes 4 gueules de requins de s’immerger dans la fosse 4 nourriture. Ministére des femmes dans l’Eglise, Luc, VIII, 2-3. Un certain nombre de piecuses femmes sont énumeérées g[ui| miniftrabant ei de facultatibus suis’, Arrivée a4 N[ew] Y[ork] le 30 7bre 410 h. du matin — 4 W[ashington] par l’auto 4 8 h. — Le 3 [o&obre], visite du Général Gouraud. Le Président trés fatigué.
Le cour. Le et qui nous sert ou rouge entre régnant comme
méme organe qui nous sert 4 vivre a aimer. Une espéce de soleil invisible le double ciel des poumons vides et sur un troéne au-dessus du diaphragme
Septembre-Offobre qui recouvre
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937
tout l’amas viscéral. On adore le cceur
de J[ésus], il ne viendrait pas 4 l’idée d’adorer sa cervelle.
La grand-route Américaine, un large fleuve de ciment noir dont le cours irrésistible est encore accentué par ce trait blanc au milieu, éclairé par le jour hagard de Véleétricité o& nous sautent aux yeux des bribes images et de textes pareilles 4 des cris de fous, au -- milieu d’un paysage avili et dévasté. C’est le Idiots Progress. [156] woo.! = les fibres, les pelotons, les flocons et le rouet — le fil qui sort. De méme dans laine et dans coton.
Si v[ous] vouliez indiquer tous peuvent étre mal interprétés dans les plus exacts, v[ous] y trouveriez qui ne peuvent passer (S. Alphonse
les passages q[ui] les auteurs méme mille propositions de Liguori).
Dieu n’est rien de ce qui est. Non qu'il ne soit d’aucune maniére mais parce qu’[l est au-dessus de ce qui est et au-dessus de l’Etre méme (S. Jean Damasceéne)?.
Dieu n’est ni 4me ni intelligence : il n’a opinion ni imagination ni raison ni entendement; il n’est point parole ni pensée, et il ne peut étre ni nommé ni compris; il n’est pas nombre ni ordre; grandeur ni petitesse; égalité ni inégalité, similitude ni dissemblance. I] n’est pas immobile, pas en mouvement, pas
en repos. Il n’a pas la puissance et n’est ni puissance ni lumiére. Il ne vit point, il n’est point la vie. Il n’est ni essence ni éternité ni temps. I] n’y a point en lui perception. I] n’est pas science, vérité, empire, sagesse, il n’est ni un, ni unité, ni divinité, ni bonté.
I] n’est pas esprit comme nous connaissons les esprits, il n’est pas filiation ou paternité; ni aucune des choses qui puissent étre comprises par nous ou par d’autres. Il n’est rien de ce qui n’est pas, rien méme de ce qui est. Nulle des choses qui existent ne le connait tel qu'il est.
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Cahier VI
Il n’y a en lui ni parole point ténébres ni lumiére, faire de lui ni affirmation affrmant ou en niant les
ni nom ni science; il n’est erreur ni vérité. On ne doit ni négation absolue; et en choses q[ui] lui sont infé-
rieures, nous ne saurions l’affirmer ou le nier lui-méme,
parce que cette unique et parfaite cause des €tres surpasse toutes les affirmations et q[ue] celui q[ui] est pleinement indépendant [157] et supérieur au reste des étres surpasse toutes nos négations (Denys |’Aréopagite, Théol/[ogie| mystique, chap. v). Il est au pouvoir de Dieu, dit S. Th{omas], d’employer 4 expression de q[uel]q[ue] vérité non seulement des mots, ce q[ue] peut faire aussi l’>h[omme], mais également des choses. Cette science (la science sacrée) a en propre que les choses mémes exprimées par les mots signifient a leur tour autre chose}. Puisque Punivers s’offrait 4 ses yeux comme un livre a lire et quwil voyait dans la nature une révélation sensible analogue 4 celle des Ecritures, les méthodes traditionnelles d’interprétation q[ui] s’étaient de tout temps appliquées aux Livres Saints devaient pouvoir s’appliquer au livre des créatures. En effet en méme temps qu'il y a un sens immédiat et littéral du texte? sacré, mais aussi un sens allégorique par lequel n[ous] découvrons un enseignement moral sous un récit d’apparence historique, et un sens anagogique par lequel notre ame se trouve élevée vers amour et le désit de Dieu, de méme il est nécessaire de ne pas s’en tenir au sens immédiat et littéral du livre des créatures,
mais d’en chercher le sens profond dans les enseignements théologiques, moraux et mystiques qu'il contient. Les termes employés par une science q[uel]conque ne désignent que des choses : ceux qu’emploie ’Ecriture désignent des choses, et ces choses a leur tour désignent des vérités d’ordre théologique, moral
ou mystique (E[tienne] Gilson, /a Philosophie de S{aint] Bonaventure, chap. « L’analogie universelle »)*. DistinG@ion du Soi et du Moi dans le Vedanta.
Odfobre 1930
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Les créatures ont en Dieu une existence plus vraie qu’en elles-mémes, car en elles-mémes elles ont un
_. €tre créé, alors qu’en Dieu elles ont une existence incréée (Sum. Theol. Ia Pars, q. 8, art. 4). Sur quoi Sertillanges : L’étre q[ue] les choses ont en Dieu et q[ui] est l’étre de Dfieu] est seul véritable, car seul, il est étre, Le ndétre n’est qu’un néant sans cesse corrigé, repéché par ce q[ue] n[ous] appelons la création continue. [158] Quod fattum in ipso vita erat et vita illa erat
lux hominum». Le texte de Denys l’Aréopagite cité plus haut ne saurait étre admis sans explications et qualifications. On ne peut admettre q[ue] n[ous] ne savons rien de Dieu sinon qu’ll Est et ce qu’Il n’ Est pas. Et la Trinité ? avec ont vous Pére
toutes les conséquences que les théologiens en tirée [szc]. Puis n’est-il pas écrit : Je veux que soyez un avec moi comme je suis Un avec mon — Tune cognoscam sicut cognitus sum. — Facie ad faciem?. Il faut donc que la racine au moins de cette faculté de connaissance (co-naissance) existe avec nous dés cette vie. Et de méme dés cette vie si nous ne connaissons pas Dieu dans son étre intime (et encore connaitre 1a cest souffrir, pati*) du moins nfous] le connaissons
dans
son
opération,
dans ses mceurs,
dans ses habitudes. — Mais ce qui reste, c’est que cette idée de la transcendance absolue de Dieu a q[uel]q[ue] ch[ose] d’infiniment satisfaisant, consolant et nourrissant pour l’Ame, qui n’est affamée de rien tant q[ue] de son propre néant*, Renan dans ses derniéres années comme un porc monstrueux et triomphant tout décoré de fleurs de papier et de jolis rubans roses’. 9 [octobre]. — Baltimore pour la visite de Costes et Bellonte.
| Surge, tolle puerum et | Agar) (Gen[ése], XXI,
tene manum 18)°.
illius (L? Ange a
940
Cahier VI
Voyage 4 Lewiston et 4 N[ew] Y[ork]. Hétel Sherry Netherlands.
Concert
Stokovski.
César Franck,
De-
bussy. Exposition Mexicaine, Charlot. L’adoration des Mages du Titien.
La Baronne Pierlot m’écrit pour m’annoncer la conversion de sa belle-fille May et me fait prévoir la sienne propre. Deo Gratias. Huit ans de travail, de lettres, de conversations et de petits traités théologiques! — Hélas, fausse nouvelle?!
A Baltimore. II parait que ma surdité s’est améliorée de 50 p[our] cent. Moi, je veux bien! [159] Mon petit-fils Jacques-Paul-Marie, baptisé le 2 ottobre 19307.
David est puni parce qu'il fait le recensement son peuple.
de
Et Ego reficiam vos. — Super aquas refettionis eduxisti me (Ps.)3.
La petite planéte Eros qui n’a pas plus de dix milles de diamétre et q[ui] vient se méler de temps en temps a Porbite de la Terre. Elles [servent] comme de petits serviteurs et de messagers entre les trois orbites de la Terre, de Mars et de Jupiter. Comme des tétes d’épingles. Le caviar des petites planétes. L’ Ange prenant la téte du prophéte entre ses mains soufHe sur sa bouche un soufHle doré mélé de lettres.
4 novembre. Ele@tions. Débacle du parti républicain et de Hoover. Genése, XIV. — Les quatre Rois q[ui] font la guerre contre cing. Laban. Genése,
X XIX, 13-15. Et in oscula
ruens... Num quia frater meus es, gratis servies. mihi 2? — La servitude de [160] sept ans parait peu 4 Jacob prae magnitudine amoris*,
Oéfobre-
Novembre 1930
941
Encore un jeune h[omme] q[ui] m’écrit q[ue] mes lettres 4 R[iviére] ont converti et me parle d’une femme de Columbus qui sous l’empire d’une ¢rance} fait des peintures de tous les grands hommes de l’antiquité, dont elle n’a, parait-il, jamais entendu parler.
(Agar) vocavit nomen D{omi\ni q{ui| loquebatur ad eam : Tu Deus qui vidisti me. Dixit enim : Profetto hic vidi posteriora videntis me. Propterea appellavit puteum illum viventis “et videntis inter Cades et Barad (Gen., XVI, 13-14)?.
1€f nov[embre]. Gigette va faire une retraite au couvent des Bénédiétines de Dourgne. 12 nov[embre]. — Arrivée de Pierre et Henri a 4h. 10. H[enri] commence ses fonétions a la National Metropolitan B[an]k le 16 nov[embre]. P[ierre] entre
ala Foreign Service School de Georgetown Univ[ersity], méme date.
Une sceur noire recoit la communion dans un paradis de marbre blanc (II est fait de flammes, de balustrades et d’escaliers).
Japprends la mort du P[ére] Droiient de Lézey, pére des lépreux de Koyama-Gotemba (3 noy[embre]). Le Cantique des Enfants dans la Fournaise — Bénissez, tette,mer, ciel, etc.) On’ peutyinterpréter, Ab! que pour te louer il y ait un ciel, une terre, des oiseaux,
des poissons, etc. Qu’on me donne tous ces moyens pour célébrer ta gloire! 22 [novembre]. Conférence de G. K. Chesterton a Trinity College. Il arrive avec son grand manteau de berger et parle avec une petite bouche enfantine, en s’épongeant continuellement avec un mouchoir. Volumineux et léger, pareil 4 un énorme échaudeé?. [161] Une des derniéres victoires de la guerre a été
942
Cahier VI
remportée 4 Armageddon (Megiddo) par le G[énér]al Allenby contre les Turcs. — De méme autrefois par Bonaparte et par le Pharaon Nechao contre Josias II roi de Judat. R[eine] malade Lafayette.
a Paris ne part que le ro par le
Et peccatum suum quasi Sodoma absconderunt (Is., I11)?.
praedicaverunt
nec
2 [décembre]. Magnifique exécution par Koussevitzki del’ Evoica et du concerto en G. min[eur] op. 58. Le dialogue entre le piano et le mystére. L’ Eroica,
Virruption du génie sur le monde, la conscience extasiée du génie.
En écoutant Beethoven : On ne réalise pas assez a quel point l’ancien Empire Autrichien qui, grace a la religion et 4a une certaine bonhomie paternelle, avait réussi 4 faire vivre paisiblement ensemble tant de langues et nationalités différentes était un délicat chefd’ceuvre. Un artiste y trouvait des inspirations venant de tous
les cétés, Allemagne,
Slavie, Italie. L’Em-
pereur présidait en paix 4 une sorte de grande table dhote. En somme |’Autriche a réussi 4 assurer a Europe Centrale plus de deux siécles de paix et de bonheur. Elle a été le centre et le foyer d’un art magnifique. Maintenant tout cela est dispersé. L’aristocratie aussi a pu jouer jusqu’a la fin du xrx® siécle un grand et beau role. L’ Autriche a été le chef-d’ceuvre des Jésuites. On comprendra cela un jour’. Je suis si amie de cet élément, dit S. Thérése, parlant
de Veau, que je lai regardé avec plus d’attention q[ue] d’autres choses. L’abeille est pourvue d’une espéce de phare olfactif, Cest un petit disque brillant qu’elle posséde entre le deuxiéme et le troisiéme anneau et qui lui sert 4 avertir ses sceurs. On suppose que chacune a une odeur spéciale qui permet de la reconnaitre.
Décembre
1930
943
6-9 [décembre]. — Voyage 4 N[ew] Y[ork]. Institut F[rang]ais de la Goe Rue. Le P. Pelletier « Hell’s Angels». Atrivée de Gigette sur |’I/e-de-France. R[eine] a eu une espéce de paralysie momentanée des deux bras.
Polysema sunt Sacra Biblia — par le P. Nicolas Assouad. — Sicut dicit Aug|ustinus] (Conf., XII), ad dignitatem Divinae Scripturae pertinet ut sub una littera multos sensus contineat, ut sic et dwversis intelletibus [162] hominum -— conventat, et unusquisque miretur se in divina Scriptura posse invenire veritatem quam mente conceperit (S. Thomas], DesPorlentia),. qa Vwawn)* Pour S. Th[omas], comme pfour] S. Aug[ustin], tout sens de |’Ecriture, acceptable 4 son esprit et prévu par Dieu, alors méme qu’il ne l’aurait pas été par auteur, peut étre admis comme sens littéral, pourvu q[ue] soit sauve la circonstance de la lettre, c[’est]-A-d[ire] Vaveu du contexte. Rév. P. Sertillanges?.
Le grand principe de Denys : Bonum ef diffusivum sur, . comparer la sfatique d’Aristote a la dynamique de Denys, le premier considérant l’immobilité comme ontologiquement supérieure au mouvement, tandis q[ue] le second considére l’activité comme le fond méme de l’étre et impute 4 bassesse et défaillance Pimmobilité des corps inertes (mais en réalité il n’y a pas de corps inertes). Pour ce philosophe tout ce qu'il y a de plus réel, c’est activité en atte, c’est le mouvement vital, vita in motu. Par conséquent au sommet des choses un aéte subsistant, une vie q[ui] s’épanouit, un aéte d’otl sortent par voie d’expansion toutes les perfections divines, et, si j’ose dire, l’étre méme (Th. de Régnon, Eudes de théologie positive sur la S\ainte| Trinité).
A very fine and refined Lady saw herself in a dream as Hercules between two roads, just as in the entrance of a theatre or music hall. One at left was a Steep narrow and rather
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Cahier VI
dirty Staircase, lighted by raw and vulgar gas jets, no doubt leading to the cheap places up in the « Paradis». The other at right hand was a wide, spacious and dignified porch, with thick carpets, flowers, tapestries and graceful Statues. All well dressed people, ladies and gentlemen, were going this way, laughing and chattering, all ready to enjoy themselves and to have a good time. [163] The very fine and refined lady had not the least hesitation to go down the same way. Smiles clad ushers went to meet all those charming people and took their tickets. The refined Lady showed hers, it had not the same colour as the others, but the ushers made
no observation and introduced her with a bow. Well after all it was not a theatre or music hall, it was a kind of huge watting-room, or something suggesting a Court. Thousands and thousands of men and women were there, all silent or talking quietly to each other. The refined lady looked through her « face a main» and was very satisfied to see there all of her friends and acquaintances, but all looked rather subdued and did not answer or only a few Strange words when she gaily talked to them, or asked their pardon to find her place. Many also were there whom she had not seen for a very long time. How jolly and pleasant ! but after all it was not dolly and pleasant at all! Rather there was a kind of dark and gloomy impression at every moment growing darker and Sloomier. On the other side of the room as much as you could see were all kind of impossible and vulgar people, the refined lady wondered how they received admittance, moreover they quite rude, noisy and boisterous, as her own side looked silent, Stiff, subtly hurt and congealed in a condition of injured dignity. The refined lady felt herself ill at ease and out of place. More so because her ticket bore readible number and she could not succeed to find an empty place. At that moment she heard an usher like a page in the hall of an hotel bawling her name.
« Here lam she shouted.
Yes,I am Madame so
and so.» — The usher took her ticket and looked surprised. « Well Madame I just looked for you, but how are you sitting at the left of His Lordship when you were expeted at the right?» — «I don’t know what lordship you are speaking off [sic] I saw two coming in at the entrance of that show, and of course I took the right one. I was accustomed all my life to do the right thing. I always was told that I
Décembre 1930
945
should be right, if I did the right thing, [164] if I took on the right way, if I insisted on my rights, if I kept the right direttion, if I followed what was written for all times in the Immortal Declaration of Rights.» — And the Usher said : « All right.» — And the refined Lady said : «If I am all right, where is my right and dutiful place in the show, for I cannot find it.» — And the Usher said: My dear Lady, the fatt is that in always doing in your life what seemed right to you, in always taking the right in always placing ~ confidence in your imm (incomplete) declaration of rights, the fact is that _you arrived not at the right of His Lordship but at His left. Ifyou had properly looked at your ticket, you should have seen that at the entrance you should have taken not at the right hand but at the left one, and so you should have arrived at the right of the Judge where a snug cosy little place was reserved for you.» — That does not matter, said the fine Lady and can be remedied very easily — I am sorry said the Usher, but you must Stay where you are until His Lordship cometh. — And what will happen, said the refined Lady, when His Lordship as you say cometh ! — I cannot tell you, said the Usher, but I can only promise
you you will certainly get the surprise of your life}. Et dabit vobis D\omi|nus panem aritum et aquam brevem (ane information resserrée et une consolation courte): e¢ non faciet avolare a te ultra dottorem tuum :
et erunt oculi tui videntes praeceptorem tuum (C. XXX)?. Mon Dieu, je suis tellement occupé a vous regarder que je crains d’en oublier de mourir! Sir James in The Mysterious Universe : To my mind the laws which nature obeys are less suggestive of [165] those which a machine obeys in its motion than of those which a musician obeys in writing a fugue or a poet in composing a sonnet. — The motions of electrons and atoms do not resemble those of the parts ie locomotive so much as those of the dancers in a cotilion. — To-day there is a wide measure of agreement, which on the physical side of science approaches almost to unanimity, that the Stream of knowledge is a heading towards a non-mechanical reality ; the Universe
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Cahier VI
begins to look more like a great thought than a great machine. Mind no longer appears as an accidental intruder into the realm of matter : we are beginning to suspect that we ought rather to hail it as the creator and governor of the realm of matter. We discover that the Universe shows evidence of a designing or controlling power that has something in common with our own individual minds. — Le physicien allemand Hausretter dit que s’il existe une loi bien constatée dans la nature, c’est qu’elle répugne a l’exactitude et a Puniformité minutieuse.
From ghoulies and ghosties and long-legged beasties and things that go flop in the night. Scotch Litany. Arrivée de Reine le 19 a 10 h. du soir. Dans
la fraicheur
de ce matin
auguste
qui est le
matin de Paques, tout la-bas lane qui brait. Une dame, femme du sculpteur Suisse Dirig, protestante convertie, vient me voir et me raconte que Vhistoire de /’Annonce lui est arrivée : un enfant
adoptif qu’elle a a peu prés ressuscité priéres pendant toute une nuit.
a force de
Article perfide c[ontre] moi dans /a Revue francaise, dirigée par le Dr Antoine Rédier, affilié 4 ?A@ion Francaise, et d’aprés les indiscrétions de [...]®. Cet article est reproduit avec empressement par la Presse « sentinelliste » de la N{ouvelle]-Angleterre.
Sit John Jeans la maniére d’une dune telle vitesse elles sont l’objet Le monde serait lived »* qu’on ne
dit que les nébuleuses « expand» a bulle de savon. Elles sont animées que les calculs astronomiques dont commencent 4 inspirer des doutes. une chose beaucoup plus « shortle croyait autrefois.
[166] Une dame nous offre des cocktails 4 base de jus de tomate, qui nous rappelle ce baume de Fier-a-
Deécembre 1930
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Bras dans Don Ouichotte qui fit rendre corps et 4me a ce pauvre gentilhomme. A little boy of Heavenly Birth But far from home to-day Comes down to find His ball, the Earth,
That sin has cast away. O Comrades, let us, one and all,
Join in to get Him back His ball*!
The spiritual element in our experience is the creative element and if we remove it, as we are trying to do in Physics on the ground that it always creates an illussion, we must reach what was in the beginning : Chaos. — It means a great deal to me to conceive of God as Him through whom comes power and guidance (Sit Arthur Eddington)’. Sir James Jeans after having explained that the whole material World is resolved to waves and that these waves are of two kinds — bottled-up waves which we called matter, and unbotiled waves which we call radiations or light — he adds: These concepts reduce the whole Universe to a world of light, potential or existent, so that the whole Story of its creation can be told with as accuracy and completeness in the six Words : God said : let there be Light. — This Creator is not so much an engineer as a mathematician z. c. one who lives in the realm of pure thought and, what is equally important, He is outside o ee and time — which are part of His Creation, just as the artist is outside his canvass : Non in tempore sed cum tempore finxit Deus mundum’.
[167] Non ha Pottimo artista alcun concetto Ch’un marmo solo in se non circoscriva Col suo soverchio, ¢ solo a quello arriva La man che obdisce all’intelletto Michel-Ange Buonarotti‘.
1931 ref janvier. Beau temps — Visites officielles. M[aison] Blanche, Cle, 3-4 [janvier]. Voyage 4 New York avec Pierre et Gig[ette]. Banquet Maurois, Ch[ambre] de C[ommer]|ce F[rangai]se‘ — Mort du Maréchal Joffre.
Il y a des livres qui sont comme des édifices. L’échafaudage tombe et chacun vient les visiter. Il y en a d’autres qui émanent silencieusement et dont la vertu se dégage d’eux sans que l’on sache d’ot elle
vient.
Non pas les propriétaires de la vérité, serviteurs [Le P[ére] d’Alzon)’.
mais
ses
La querelle biblique dans Lecanuet. — Evidemment il est par trop naif et simplet de prendre la Bible a la lettre, comme
si c’était un livre quelconque, 4 la ma-
niére des baptistes, méthodistes et autres fondamentalistes. C’est Phistoire du monde et de Phumanité vue du point de vue de Dieu. Les événements sont racontés, non point tels qu’ils se montrent aux yeux de l’homme, @une génération aprés l’autre, mais tels qu’ils sont aux yeux de Dieu, des témoignages et des monuments, en tant que porteurs de nouvelles et d’annonces non pas a4 un temps seulement mais a tous les temps l’un aprés l’autre. L’exactitude historique du fait? qui leur
Janvier 1931
949
‘sett de base et de la relation qui nous en est donnée (encyclique Providentissimus) eSt naturellement certaine, mais c’est 14 en somme un point de vue secondaire. Ils ne se sont produits dans histoire, ils ne sont intervenus dans le cours des choses, que comme interprétes des instructions de Dieu 4 légard de toute Phumanité. Ils ne sont [168] 14 que pour ¢a et non pas pour satisfaire notre curiosité et pour alimenter nos connaissances géographiques, linguistiques, archéolo_ giques. C’est ainsi qu’un prédicateur pour inculquer un enseignement se sert d’une comparaison, dont il importe assez peu que le second terme soit vrai ou faux ou plus ou moins exaét, pourvu qu’il dessine bien, qu'il transcrive dune maniére frappante une vérité morale. Les récits de la Bible sont donc éminemment inspirés puisqu’ils sont écrits de maniére a nous suggérer aussi exactement et complétement que possible la volonté de Dieu, en réparant ce que le fait concret et aujourd’hui invérifiable avait 4 ce point de vue de déficient. Non seulement le fait que? la Bible nous raconte est vrai, mais il est? éternel, il a revétu un
caractére d’éternité : Tel qu’en lui-méme enfin l’éternité le change. Par ex[emple] passer une riviére est un fait banal, puis un événement historique, puis prend un caractére proverbial et éferne/, quand cette Riviére s’'appelle le Rubicon. N[ous] croyons q[ue] César a effectivement passé le Rubicon, mais quand n[ous] employons cette expression dans la conversation la question de son exactitude historique, que n[ous] ne mettons d’ailleurs pas en doute, est pour nous a peu prés indifférente. — Il y a donc dans la Bible 2 catégories de faits : tout d’abord ceux q[ui] concernent directement Phistoire de notre rédemption, le péché originel, la loi du Sinai, le Christ, la résurrection, ete,
que nous devons prendre tels quels, parce qu’ils contiennent toute l’économie de notre salut. Et puis ceux qui servent en q[uel]q[ue] sorte d’illustrations. Par exfemple] quand N[otre]-S[eigneur] se sert de paraboles, il est parfaitement oiseux de se demander si® Vhistoire qu’il raconte est inventée ou se référe* a un fait réel. —- Ou encore dans la conversation n[ous]
950
Cahier VI
émettons! une idée sans y penser. Notre interlocuteur s’en empare et lui donne sa pleine valeur’. 10-11 [janvier]. Voyage a N[ew] Y[ork] en avion. Service funébre pour le Maréchal Joffre. Green Pastures*. Je remets Ja cravate de commf[andeur] 4 Lindbergh. 18/1/34.
The situation of Austria is hopeless, but not serious®. [169] 19 [janvier]. — Discours de Macdonald promettant 4 l’Inde le statut de Dominion. Un pays de plus pour boire a la coupe d’or de la Prostituée. Que les oiseaux se fassent signe l’un 4 autre pour le festin q[ui] se prépare! 24-26 [janvier]. N[ew] Y[ork] en aéroplane. Société] de bienfaisance francaise. — 28-29. Chez M. Lamont. Harvard,
Club
dinner.
—
Rothschild
me
fait dire
qwil ne veut plus monter /’Annonce au Théatre Pigalle’. — Ruth Draper, la f[emme] amoureuse, ’émigrant Dalmate. Ps. I, 1. Beatus vir q[ut] non abiit in consilo impiorum, et in via peccatorum non Stetit et in cathedra peStilentiae non sedit. — Tres hoc versu notantur gradus male viventinm, scilicet eorum q\ui| incipiunt, q\ui| perstant, et eorum q{ui| plane jam in mala via acquiescunt, abeunt, Stant, sedent. — Admirabilis gradatio qua per tres quasi gradus a malo receditur: nempe non abeundo, quod suggestionis est; non Stando, quod delettionis;
non
sedendo,
quod consensus.
In
consilio, quod principii est; in via quod progressionis, et in cathedra quod perfectionis. Impiorum q{ui| male de Deo sentiunt ;peccatorum, q\ui| male erga se agunt; et derisorum
q\ui| proximum laedunt (Joachim Hopper)’. Ad tui oris imperium cunttus populus obediet (Gen., XLI, 40). Hébr. : Ad os tuum cunttus populus osculabiturs. Labia deosculabitur q{ui| recta verba respondet (Prov.)?.
Janvier-Février 1931
951
Je mendie un morceau de pain a l’ombre de ma | propre statue.
En avion 4 N{ew] Y[ork]. 6-9 [février]. Discours a Fr[ance]-Amét[ique]. — Diner Monick — Diner _ Sherrill — Diner Eastman, discours. Retour le 10 en
avion. — L’4me de Léon Bloy!. — Elisabeth the Queen | au Théatre Guild. Charlie Chaplin dans City Lights: bien médiocre.
12 février. Le Pape pour la premiére fois pour le 9° anniversaire de son couronnement parle par la radio au monde entier wrbi e¢ orbi, A VEglise, a tous les peuples, 4 toutes les catégories sociales et leur envoie sa bénédiction. C’est magnifique. — Le soir diner chez le pasteur Stokes avec Madame La Farge. Gigette revient du Canada ow elle a passé 10 jours chez ses amis de Montréal. Sports d’hiver. Henri va entrer chez Morgan. — Le pape s’adresse : Ad omnem creaturam. [170] In omnem terram exivit sonus eorum et in fines orbis terrae verba eorum (Ps. XVIII, 5)%. Toute la fin du | discours est oblitérée par des siffements furieux comme | si le diable était en colére — (hétérodynes). La _ guillotine } |
Ouand Louis Seize vit parattre Ce sombre colifichet I/ se demanda peut-étre Ce gue son col y fichait®! Einstein’s previous cosmology. — Modern cosmologists are divided into three main groups, those who hold that the universe in its all-embracing sense — namely the space-time continuum of relativity, is Static and uniform; those who
| believe it to be uniform but non-Static, and those who hold
| that it is both non-static and non-uniform. By the term Static is meant that the universe always was and always, will remain the same in size, or in its occupancy of space;the term uniform means symmetrical distribution of the matter of the universe in the space it occuptes. The original Einstein cosmology, apart from his theory
952
Cahier VI
of relativity, held that space was not independent of matter; hence, Dr.
EinStein reasoned, matter,
the amount
of tt,
determined the size of the universe inspace. Further reasoning along the same lines to adopt the hypothesis that the universe and the space it occupied were both Static and uniform. De Sitter laid down the hypothesis that space was not dependent upon matter. Asa result he turned the Einstein cosmology upside down; inStead of matter determining space it was space that determined matter, and hence also the size
of the universe. That leads to a conclusion that while the universe was Static it was non-uniform. Dr. Tolman of the California Institute of Technology suggested a theory that the universe was non-Sstatic although uniformly distributedin space. Hewashelped in reaching these conclusions by the astronomical observations of Dr. Hubble,
who Studied the « red shift» in the spettrum of distant spiral nebulas, some
years away.
of which
are as
far as 300,000,000
light
It had been held that these spiral nebulas are uniformly distributed through space at average diftances apart of 1,500,000 light-years.
Dr. Hubble interpreted the red shift
to indicate that these nebulas are moving away from the earth at speeds up to 8,000 miles a second. The Universe « Running down». — Cosmologists have concluded that the universe is non-Static, namely, that
it keeps expanding further and further, and that eventually it will be completely lost in unfathomable emptiness. Aare woe ee UN SM promed that itben aniverse wastiPors non-Static and non-uniform ; that it was expanding into space, and, as far as was known now, would continue to expand endlessly. The latest observational proof Dr. Shapley said, gave a pitlure of the universe being very unevenly, non uniformly distributed. There were boundless Stretches of empty space, and here and there a supergalaxy millions of light years in diameter. As to the rate of this expression Dr. Shapley said that in the last 2,000,000,000 years, a time roughly corresponding to the age of the earth, the all-embracing universe had doubled in tts dimensions, or extension in space.
Fevrier 1931
953
(a moitié endormi) Je me rappelle, ingrates, La salade de cris que vous me vinaigrates! Le vieux poéte en avion dans la neige par la route du P[ére] Noél et des oies sauvages. Jatta cogitationem tuam D\omin\o et Ipse te enutriet (Ps. L, 23)!. Jeter sa pensée, c’est par un acte de volonté s’emparer de sa pensée, fermer dessus la main, l’ar-tacher de soi, la séparer de soi, la projeter hors de soi,
afin qu’elle ne vous appartienne plus. Ce qui nous sépare de Dieu, c’est la pensée propre, |’imagination vaine, la distraction. Jetons tout cela en Dieu comme dans un gouffre et lui-méme se chargera de nfous] alimenter intérieurement. Ps. XII. — Inutiles faci sunt? — En hébr[eu] : ils sont devenus rances. Ils ont de l’odeur. I se// you (aa sens américain) the Sea, I sell you the sky line, I sell you the Unknown® (Mais bientot sur la terre il n’y aura plus aucune réserve, aucune place pour I|’Inconnu). [171] Dies diec ernGat verbum (i lui livre d’un seul coup cette parole q[ue] la nuit avait emmagasinée) e¢ nox notti indicat scientiam (elle enchaine toute une suite de connaissance au moyen de ces signaux et sémaphores mystérieux) (Ps. XVIII)‘.
Le grabataire de la piscine de Bethesda : Joann., V, 5. Erat quidam homo ibi triginta et odo annos habens in infirmitate sua. C’est-a-dire qwil lui manque 2 pour atteindre 4o qui est un chiffre parfait. Ainsi Deutér., Il, 14. Tempus autem quo ambulavimus de Cadesbarne usque ad transitum torrentis Zared triginta et otto annorum fuit: donec consumeretur omnis generatio hominum bellatorum de castris sicut juraverat D\omilnus. 15. Cujus manus fuit adversum eos ut interirent de castrorum medio’. C’est-a-dire qwil y a un manque égal d’un cété et de l’autre. Manque de la force d’un cété, manque de la grace de l’autre.
954
Cahier
De maniére consommeéee.
VI
4 ce q[ue] toute
cette génération soit
Le mot passion est mal choisi pour exprimer un état essentiellement actif. Ce qui rend la passion vicieuse, ce n’est pas son intensité, c’est 19/ sa cause, qui est
Vabandon plus ou moins complet de nous-mémes a un état affectif, 2°/ le désordre qu’elle entraine dans notre état général, en donnant une importance absorbante 4 l'un des composants de notre psychologie. Mais si cette double imperfetion n’agit pas, la passion qui tend notre étre vers sa fin, qui l’informe, qui met avec intensité notre sentiment au niveau de la raison, est une vert“, virtus, ce qui fait ?homme.
La Transfiguration.
Matth.,
XVI,
7. Jesus autem
tetigit eos et dixit: surgite. — Ce toucher q[ui] guérit et qui purifie : Tetigit eum dicens: Volo, mundare — Tetigit eam manus ejus et dimisit eam febris. — Quis tetigit vestimenta mea? (Marc, V, 30) Iurbae te comprimunt et tu dicis: Quis tetigit veStimenta tua? Tetigit me aliquis — Expuens tetigit linguam ejus. — Omnis turba quaerebat eum tangere — Noli me tangere. — Quotquot tangebant eum salvi_fieban?. Judic., VI, 5. Innumera multitudo hominum — quidquid tetigerant devastantes?. La lapidation de l’adultére — Pour que la main ne touche pas ce qui est impur. [172] Corpus meum in servitutem redigo® — Le mien n’est plus qu’un vieux larbin désabusé dont tout le service consiste a faire de temps en temps l’argenterie en sifflotant.
Multa habeo de vobis loqui et judicare*. Le Verbe est occupé a dire et 4 juger beaucoup de choses de nous. Pour les juger il lui suffit de les faire passer par sa bouche. La soi-disant férocité de Jéhovah dans I’A[ncien]
Mars 1931
955
T[estament]! Celle de la mére qui imite le loup quand il dévore le petit Chaperon Rouge’.
Un repas de rats cuits. Jeans : The MySterious Universe. Les étoiles séparées par d’énormes distances — des millions de milles — qui rendent toute rencontre invraisemblable — et cependant d’aprés l’auteur c’est une de ces rencontres
~ q{ui] a donné naissance 4s\ notte univers planétaire — de caractére tout a fait exceptionnel. D/autre part la vie est un phénoméne délicat et rare q[ui] ne peut se produire que dans la zone planétaire tempérée. La matiére vivante et la composition des édifices moléculaires riches et compliqués ne devient possible que par ladjonétion d’un 4° atome, celui du carbone, aux 3 atomes d’hydrogéne, d’oxygéne et d’azote. L’atome de carbone consiste en 6 éleétrons tournant autour d’un noyau central. Un seul éleGtron fait une différence avec ses voisins le boron et l’azote. De méme le magnétisme dépend des atomes a 26, 27 et 28 électrons. La radioactivité apparait de 83 a 92°.
IIe Dim[anche] du Caréme. L’histoire de Joseph dans les répons. La tunique imprégnée de sang. Cf. le mélange du vin et de Vhostie 4 la messe. Le pain imprégné de sauce que N[otre]-S[eigneur] tend a Judas.
At
ili intinéfa tunica
Joseph in sanguine haedt,
miserunt q{ui| ferret eam ad patrem et diceret: Vide, si tunica Filii tui sit, an non® ?
Non alligabis os bovi triturantit — A celui qui triture la moisson de la sagesse, les Vérités acquises pour les rendre pratiquement assimilables, tu ne lieras pas la bouche, tu lui laisseras une certaine [173] liberté d’appréhension, de saveur, d’appréciation et d’expression.
Me enim insulae exspettant et naves maris in principio (Is. LXIX)*. Les astres dans leur navigation 4 travers Péther pendant tous ces millénaires et myriades de
956
Cahier VI
millénaires q[ui] ont précédé ’avénement du Christ — Omne
pecus
Cedar
congregabitur
tibi, arietes
Nabajoth
ministrabunt tibi. Argentum eorum et aurum eorum cum ets, nomini D{omi|ni Dei tui. Les étoiles (Is.). Ij mats. 25 ans de mariage. arrivée en Amét[ique]. S. Luc, XV,
14. L’Enfant
4 ans
depuis mon
Prodigue.
E+ postquam
omnia consummasset — Consummatum est — Faéta est fames valida®. Aprés q[ue] ?h[omme] eut tout consommé, toutes les apparences, aprés q[ue] la science a terminé son enquéte — et qu'il ne reste plus q[ue] la présence réelle.,.
19 mars. — S,-Joseph. Bénédictions mystérieuses (Gen., XLIX, 21-25, et Deutér., XXXIII, 13). Joseph signifie ce q[ui] ajoute, ce q[ui] accroit?(Gen., XXX, 24, et XLIX, 21). Addat mihi Dominus filium alterum. Filius accrescens Joseph. — Jacob engendra aussi le second Joseph (Matth., I, 16). Jacob autem genuit Joseph virum Mariae. Joseph d’Arimathie — Terra optima. Ce q{ui] se multiplie abondamment sous la bénédidtion. Super oculum. Au dela de Veil (decoris aspetiu )* — Ce q[ui] nourrit le Christ. Ce q[ui] donne a Jacob un autre fils. L7>homme de Marie. Ce q[ui] du cété de ’homme correspond a Marie. Ce q[ui] était capable d’épouser Marie, l’éternelle Sagesse, Sophia.
Le 19 [mars], jour de S.-Joseph. A Philadelphie voir Worxzeck, d’ Alban Berg. Stokovskit. Les Leidy. Retour avec Pierre. Théorie des quantum. L’énergie se dégage par paquets, par secousses successives, et non pas dans un flux continuel. — Théorie de lincertitude du physicien Heisenberg. Il n’est pas poli de s’ennuyer : mais il n’est pas poli non plus de faire remarquer aux gens combien ils ont Pair de s’ennuyer.
Mars-Aoril 1931
957
CIEL. — Cc. Lai votte. Le regard d’en haut: — E. L’échelle, le ciel du milieu. — 1. Le rapport de Phorizontale et de la verticale. — cozLum. L’horizon collé 4 l’échelle — u. Le compas. — m. Le ciel avec les nuages et la pluie. [174] 27 [mars]. Décoration de l’Amiral Byrd!, — 29. Déjeuner en VPhonneur du Dr Carrel q[ui] nfous] _ parle des miracles de Lourdes?. Cette sécurité, cette plénitude, cette certitude, cette
espéce d’incroyable majesté avec laquelle les femmes accomplissent les fonctions q[ui] leur appartiennent, Pamour et la maternité. Vers sur le commerce anglais.
|
‘The taste of hot Arabia's spice we know Free from the scorching sun which makes it grow. Without the worm in Persia’s silk we shine,
Without planting drink of every wine. To toil for wealth we weary not our limbs. Gold, though the heaviest metal hither swims. Ours is the harvest that the Indians mow,
We plow the deep and reap what the others sow. Henry ou Edmond Waller, il y a 200 ans’. Regu le S{aént] Tarcisius de Maria Blanchard.
Nonne deficiet de petra agri nix Libani ? Aut evelli possunt aquae erumpentes frigidae et defluentes ? (Jér., XVIII). — Mardi-Saint — a propos de Vingratitude d’Israél. — En hébr[eu] : Ax deseret viator agrum prae rupe ac nive Libani? aut deseret aquas fluentes prae corruptis gelu’ ? Dans la 1% version on voit un champ désolé, ces pierres, n’a-t-il pas autre chose 4 montrer, est-ce qu’il empéchera la neige du Liban de lui faire un voile d’innocence, de splendeur et de fécondité? et ces eaux fraiches entrainées par leur propre élan et par la loi de gravité, trouvera-t-il le moyen de les extirper jusqu’a la racine?
958
Cahier VI
Renvoyé
le cuisinier Emile
Neveu
—
5 avril,
Paques.
Naufragon m’é délu in questo mare’.
Dedit eum manifestum fieri non omni populo, sed testibus — [175] pracordinatis a Deo, nobis qui] manducavimus et bibimus cum illo postquam resurrexit a mortuis (Pet., X)?. Créer
—
croire
—
croitre
—
croix —
créche
—
(crime ?). S. Denys écrit q[ue] Amour
(chap. « Des noms
divins ») est unifique, unissant, ramassant, resserrant,
recueillant, et rapportant les ch[oses] 4 'unité (S[aint] Fr[angois] de Sales, Amf[our] de Dieu, chap. 1x). Solitaire — solidaire — 10-13 avril. Voyage a Niew] Y[ork] en avion pour la Fédération des Allfiances] F[rang]aisest. Exp[osition] Jean Charlot’. L’Empire building. Qui semel dicit suficit — periit (S. Aug[ustin])*. Le Dr Dumontet, médecin de maladies nerveuses a
Vevey, me dit qu’il emploie /e Soulier de satin pour le traitement de ses malades et m’envoie
la-dessus des
explications compliquées. Les enfants Pierre, Gigette, Henri avec Baudet font une tournée en auto 4 Asherville, Aiken et Charleston.
H[enri] commence a travailler chez Morgan.
14avril. Révolutionen Espagne. Find’ Alphonse XIII et des Bourbons. S. Frangois de Sales nous dit qu’il ne suffit pas de causer avec N[otre]-S[eigneur] sur le seuil de notre porte, mais pour qu'il faut [sic] le prendre par la main et introduire jusqu’au fond de notre maison afin qu’il y fasse sa demeute’.
}
Avril 1931
: Sa e 16,
959
avec les Aéteurs du Metropolitan Opera
Le printemps. Les magnolias pareils 4 d’énormes taches rouges, grenat. 18 [avril]. Conférence s[ur] moi du_professeur Fortunat Strovsky, mon ancien condisciple 4 Louis_le-Grand. I] montre des textes en fac-simile prouvant ~ q[ue] Pascal écrivait en vers libres.
Ta dileétion est entrée en moi comme
la dileétion
des femmes (S. Denys cité par F[rang]ois de Sales)?.
, 21-22 [avril]. — Philadelphie. Banquet de la Catholic Women’s Alliance. Discours*, le cardinal Dougherty. Le P[ére] Trappiste. L’abbé Legrain. [176] L’immense parc printanier autour de la ville. Un paradis de points de toutes couleurs. Un immense eau La collection Widener, les ineffables vases lancs et bleuatres de Chine, pures fioles de naissant
_ |
_ _ | }
azur. Les verts violents, si le mot de [pourpre] pouvait s’appliquer a cette quintessence de séve, moitié soleil et moitié végétal. Le moulin de Rembrandt. Le petit Adonis et Vénus de Titien. Stotesbury. Jardin. 2 ou 3 admirables tapisseries de Boucher. Toujours cette impression complétement morte, inanimée, des belles choses d’Europe en Amérique. Elles ont perdu toute vie, toute vibration, elles ne sont plus qu’une vibration intellectuelle. Seules les choses Chinoises subsistent avec la nudité sublime des concepts. Retour [...]*.
L’apparition du génie est accueillie par un silence désapprobateur. — Promenade en auto a Outlands chez Madame E. M. Eustis. — 27/4 — Le Roi de Siam. Presque une impertinence que de dire oui.
960 O
Cahier VI mon
Dieu,
bien
qu’il soit aussi facile
de se
noyer dans 3 seaux d’eau q[ue] dans 3 000 je suis content g[ue] v[otre] monde soit si grand. Animaeque magnae prodigum Paulum (Horace).
Ego apis Matinae More modoque Grata carpentis thyma per laborem Plurimum, circa nemus uvidique Tiburis ripas, operosa parvus _ Carmina fingo (id.)*. Je le tiens et ne le quitterai pas jusque je laie introduit dans la maison de ma mére et dans la chambre de celle gfui] m’a donné la vie (Cant., II, 4). [177] Il s’agit du principe méme de l’existence, de la cellule mére, de la couche parturitrice — le cceur.
The modern astronomer regards the Universe as a finite closed space as finite as the surface of the earth, and if he is not yet acquainted with the whole Univierse| he has good reason to hope that he will before very long. We of to day no longer think of vast unknown and unsounded depths of space (comme Kant, Théorie des Ciewx, 1775) Stretching interminably from us in every direction. We are beginning to think of the Universe as Columbus and Magellan and Drake thought of the earth, something enormously big but nevertheless not infinitely big: something whose limit we can fix: something capable of being imagined and Studied as a single complete whole: something capable of being circumnavigated, if you like (Jeans, The Stars in their course), L’Abbé Lemaitre a trouvé que l’Univers est essentiellement instable. Il se dilate comme une bulle de savon. Il est composé de galaxies, de nébuleuses, de Star-cities qui s’éloignent lune de l’autre avec une rapidité prodigieuse et tlou]jours croissante. Hinstein : Univers est courbe, chaque point lumineux envoie un rayon dans les 2 directions de maniére a ce q[ue] n[ous] puissions le voir en regardant dans
Mai 1931
2 dire€tions opposées comme la _ ot n[ous] pouvons arriver soit par L’Univers est en état continuel V[oir] tout cela déja dans mon
961
N[ouvelle]-Zélande l’est soit par l’ouest. d’explosion (ibid. ). Art poétique.
Loriot = en italien I/ rigogolo. Un coup de fusil, il y a la balle, la fumée, l’éclair, ' le bruit, la trace laissée dans le canon.
La Divinité s’appliquera et se joindra elle-méme a notre entendement, se rendant tellement présente a lui q[ue] cette intime présence tiendra lieu de représentation et d’espéce (S. Fr[angois] de Sales)}, [178] 8 mai. — La Ch[ambre] de C[ommer]ce Int[ernationale. Diner. Réception. Masson. Parmentier. Les Chinois et les Japonais appellent les cométes des balais. Et enfin ce sont des balais dans le ciel qui annoncent une période de nettoyages! Gig[ette] va a N[ew] Y{ork]. Les Livres de Sir Jeans établissent 3 choses : Le
monde a commencé (il a de 5 4 10 milliards d’années) — Il va toujours dans le méme sens — I] finira. — L’avénement de la vie sur une planéte est un événement presque miraculeux.
Portrait de Théodore Dreiser : le front trés beau, le
bas de la figure lourd, ignoble, bestial avec ses gtos bourtrelets de chair. Dans mies étudier le point ow les différentes contrent, la ligne autour de quoi elles pour s’y réunir ou pour s’y séparer.
: cette bouche les physionoparties se rense composent,
S. Frf[ancois] de Sales dit que l’A4me envahie par le péché mortel, c’est comme Absalon qui chasse son pére David : Dieu, avec tous les siens. II ne reste
plus que Sadoc le voyant (la foi) au fond du temple et Abiathar q[ui] est ’espérance®. Comme c’est vrai!
962
Cahier VI
Fraiche comme la rosée et jeune comme le matin.
Fvangile de l’Ascension. Commission des apétres. Signa autem eos qui crediderint haec sequentur, C{’est]-adjire] tous les fidéles et pas seulement les apétres. In nomine meo daemonia ejicient : les démons de lorgueil, de l’impureté, de la paresse, de l’avarice, de la coleére,
etc., q[ui] avaient leur habitation au fond de l’4me. Linguis loquentur novis. Chaque pays, chaque siécle a sa langue. L’apétre du Christ apprendra sans difficulté a la parler. Il aura le talent de se faire comprendre de tous, chacun dans son propre idiome. Serpentes tollent. Ils enléveront de l’4me tout ce qui est entortillé et venimeux, [179] tout ce qui est contraire 4 la droiture, tout ce qui est repli, nceud, sifflement, poison, tout ce
quia sa demeure dans les lieuxbas et obscurs, tout ce qui est capable d’un redressement meurtrier. E¢si mortiferum quid biberint, non eis nocebit. L’atmosphére empoisonnée autour d’eux, les livres, les mauvais exemples, les conversations, les scandales, rien de tout cela ne pourra
leur nuire, quand méme ils boiraient le péché comme de l’eau, quand cette amére gorgée ne cesserait pas de leur remplir la bouche et lestomac. Super aegros manus imponent et bene habebunit. Tous ceux q[ui] ne vont pas bien, ils imposeront sur eux des mains de commandement, de sagesse, de priére et de persuasion. Il leur sera donné de toucher, d’imprimer une attitude, de donner
une investiture, une forme.
Ils feront du
bien’. 10-13 mai. Jacquerie antireligieuse en Espagne. Couvents et églises bralés. La croix insultée et lapidée, les livres, les reliques, les objets saints, détruits
et jetés au vent. Parce, Domine. — Le 13, éleGtion de Paul Doumer contre Briand.
Le poéte obscur invoque l’assistance pour le précéder de Sainte Claire et Sainte Lucie. [180] Au jour du combat il s’apercoit non pas qu’il a perdu le courage mais qu’il a perdu la crainte.
Mai 1931
963
20 mai. A midi 14, départ de ma femme accompagnée de Reine et de Henri jusqu’A Nfew] Y{ork]. Elle s’embarque sur le Paris. A N[ew] Y[ork] le pauvre Ralph Barton, mari de Germaine Taillefer (sa 4° femme), se brile la cervelle. Atteint de mélancolie _et Ainstabilité profonde, incapable comme beaucoup d’Américains de se prendre et de se fixer 4 quoi que | ce soit. Une de ses filles convertie et religieuse. Caricaturiste, la vie ne lui a fait que des grimaces.
Mon ame magnifie le Seigneur. Elle lui fait place, elle agrandit de son acquiescement la place qu’ll se trouve. C’est ce q[ue] j’ai fait quand je me suis converti. Monsieur Feufollet, chef de rayon a la Samaritaine.
’ Pour la raison q[ui] empéchait Socrate de se nourrir de pommes de terre. 24 [mai]. — Pentecdte — Le matin S.-Anselme, le beau jardin plein de fleurs des Franciscains 4 Brookland, les abeilles
bien humbles
et comme
dédorées
q[ui] boivent a la rigole de la grotte de Lourdes. — L’aprés-midi lu avec admiration la grande encyclique du Pape contre le capitalisme et le socialisme?. Quelle sévérité! quel courage! quelle force de jugement! On sent la présence de |’Esprit-Saint!
| \ | i | f
A N[ew] Y[ork] il est défendu de s’approcher de la Banque Morgan et d’en toucher les murs.
|
Joél, chap. u. Et je vous rendrai les années qu’a dévorées la locuste, le ver blanc, la rouille et la chenille. Toutes les formes de la vanité, de la paresse,
} |
toutes les oxydations et toutes les lépres de l’orgueil et de la passion — Combien consolant! Je me mettrai moi-méme 4a la recherche du temps perdu et je te le rendrai intact. Mon influence rédemptrice [181] s’étendra non seulement a ton présent et 4 ton avenir mais a ton passé. Je trouverai moyen d’y prendre pied et de le coloniser.
| |
964
Cahier VI
Le sceau sur le cceur et sur le bras, affectif et effeCtif, sur la pensée et sur l’aétion.
Quand le prétre dit : Sursum corda, le diable a un haut-le-cceur. Prov[erbe] anglais: A watched kettle does not boil’. 11/6 [juin]. Visite d’Henri.
L’apologue de la soupe dans /es Questions de Milinda?. L’erreur des scolastiques est de vouloir trop compartimenter l’4me humaine. II n’y a pas de cloison étanche entre les*diverses facultés. Dans l’intelligence il entre beaucoup de volonté : l’attention. Dans la volonté beaucoup d’intelligence : le tennis. Dans la sensibilité, beaucoup de ces 2 facultés : intelligence q[ui] discerne les éléments composants d’un plaisir, volonté qui y applique tout l’étre ou tel ou tel organe. Et ces 3 facultés se retrouvent dans limagination. Peter Wust en arrivant 4 Paris va voir le « pilier historique » de N[otre]-D[ame] prés duquel je me suis converti et je suis devenu a mon tour une « colonne de l’ Eglise 3,
Sub te erit appetitus ejus et dominaberis illius (Gen., [Vas La bouche communiante dune poignée de feu.
q[ue] le Seigneur emplit
Memoria memor ero et tabescet in me anima mea (Thren., ELy.210)°,
Menochio (Giovanni Stephano), 1575-1655. — Jésuite, connu pour son exégése de la Bible basée sur le texte hébreu’.
Le
vieillard
en
juin frissonne
sous
un
prémoniteur. 10 [juin]. Degré a la C[atholic] U[niversity]?.
souffle
Juin- Juillet 1931
965
[183] 12-14 [juin]. Mfount] Kisko. La plénitude _de Juin. Les prairies mtres débordant de fleurs et de gtaines. Le grand soleil dans l’azur pur et frais. Musi_ciens. N[ew] Y{ork] lundi, en bateau sur le Sound, sous un ciel sombre et fumeux. Keynes et la Lopokova. — Retour le 16. A la lueur d’une immense aurore rouge au-dessus de la forét c’est la lune qui se léve, l’enfant se réveille _pour recevoir le baiser de Ange de la Nuit. Aimer
la volonté de Dieu pour elle-méme,
en ce
qu’elle n’est pas la ndétre. C’est en ce qu’elle n’est pas la notre qu’elle est la sienne. Quod fattum eft, ipsum permanet; quae futura sunt, jam fuerunt ; et Deus inStaurat quod abiit (Eccli., III, ah).
Vendredi 19 juin. — Stimson me fait venir pour proposer la rémission de toutes les dettes gouvernementales. Négociations toute la semaine. Conversation
avec
un
lapin
qui se
termine
en
| escargot,. \y
29 juin a 9 h. Départ en auto de mes 2 chers enfants, | Pierre et Gigette, sur le Paris.
| Boire a cette gourde noéturne — a grands coups de _ fouet fulgurants chassant le troupeau monstrueux des | muages qui montent |’un sur l’autre. — Accord sur _ les dettes le 7. | Visite de Henri, 4/5 [juillet]. — Au lever du soleil le | pélican qui fait claquer ses grandes ailes blanches _ comme du linge. — A moitié cuit — d’épais jus. La ot Amérique et l’Asie se rejoignent, entre le Grand et le Petit Dioméde, 1a ot le jour commence | et finit, au milieu d’immenses vols d’oiseaux, mouettes et guillemots (pigeons).
966
Cahier VI
Jehoshuah — in the midst of it as the Zohar says whom all creation
The tetragram — the Divine Name and an SH — the Hebrew Shin — The Shin [183 v] is one of the three Mothers from comes — Shin — four Strokes — A cross
has been inserted into the middle of God’s name in Hebrew,
which completes the name of the Messiah The Pure heart, p. 392).
(Dr. Werfel,
La Sainte Vierge descend au Purgatoire le Samedi et du milieu des flammes elle revient avec un gros bouuet de marguerites, de bluets, de clématites et méme de belles roses toutes fraiches. Méme des poignées toutes ruisselantes de cresson. Pie IX approuve cette théorie suivant laquelle lame est la forme du corps. « L’Ame rationnelle est la vraie, par soi et immédiate forme du corps. » L’ame humaine est intégralement simple et n’a pas de parties. Trés imp[ortant] et oublié par les philosophes. Par conséquent les facultés ne consistent pas en compartiments isolés, mais en des modes de l’ensemble, c’est le tout qui se détermine de telle ou telle maniére. Le Faune qui danse, avec une main sur les yeux. Les crédits pour la nouvelle Ambassade sont votés?, Mort de ma p[ro]priétaire, la vieille Madame Henderson, 92 ans.
Copeau m’écrit q[ue] sa fille et Jacqueline Riviére ont pris le voile et prononcé les vceux le méme jour’. Derniére lettre du P[ére] Drouent de Lézey,l Apétre des lépreux de Koyama, a la Mére S[aint] Francois Régis. Mort le 3 novembre 1930. « Révérende Mére — Quelle joie! Joie ineffablement douce! Le médecin ne me donne plus que 6 ou 8 jours de vie! Mais avant de mourir je désire v[ous] remercier une derniére fois de la haute bienveillance,
Juillet-Aont 1931
967
la délicate charité et la maternelle affection q[ue] vious] [184] avez témoignées 4 mes misérables _ lépreux. Je remercie toutes vos éléves de leur générosité envers eux. Merci, mille fois merci! — Je me permets de v[ous] adresser un dernier conseil : soyez joyeuses, toujours et partout, quoi qu’il arrive. Le moindre sentiment de tristesse envers Dieu m’a toujours déplu. Offrons-lui Phommage q[ui] lui est da : c’est ’enthousiaste hommage d’une 4me q[ui] sans cesse vibre sous le
sentiment
d’un
ardent,
confiant,
filial et surtout
joyeux amour. » Le Plére] de L[ézey] a été succédé 4 Koyama par le P[ére] Iwashita. Passage d’Henri 4 W[ashington].
II Cor., 1v, 17. Ce q[ui] 4 présent est momentané et léger de nfotre] tribulation opére en nous sans mesure en la sublimité un poids éternel de gloire — Voyez, de grace, ces merveilles : La tribulation produit la gloire, la légéreté donne le poids, et les moments opérent |’éternité (S. Fr[angois] de Sales, Amour de Dieu, liv. XI, chap. v1)}.
Mesure
de
l’Ange
gq[ui]
est celle
de
l’homme
(AD..n5X 2sL502).
Nascitur [sic] ridiculus mus?, — La Montagne grands cris enfante un rat minuscule — ridicule.
a
Accedit verbum ad elementum et fit sacramentum — Le baptéme d’aprés S. Aug[ustin]§. Abri contre les intempéries et refuge c[ontre] la chaleur (L’Eglise, Is.). La 1%@ partie signifie les épreuves dans le temps de l’adversité, le second ennui quand le ciel est pur et tranquille et q[uand] le temps pése sur nous de tout son poids.
Départ le 2 [aodt]. New Bedfort. Nantucket, le 3 : Pancienne ville des baleiniers et de Moby Dick. Le CLAUDEL V - 34
34
968
Cahier VI
Widows Walk, une espéce de passerelle sur le faite des maisons, ow les femmes des bfaleiniers] faisaient le guet pour surveiller le retour des bateaux avec une longue vue. Un bateau dans un jardin naviguant sur les roses trémiéres, les volubilis grimpant aux cordages. Bain
de mer. Golf. Coolidge sevré avec un cornichon. [184 v] 6 aodit. — 63 ans. 2 messes a l’église S.-Mary. Nantucket. Ressemblance de texture et de dessin entre les végétaux marins et ceux qui vont a leur rencontre de la terre sur cette plage sablonneuse, entre les graines de plantes charnues et épaisses ressemblant aux vessies du goémon. — Une nature comme décolorée par le sel et le chlore, ainsi ces gens de la N[ouvelle]-Angleterre, aussi secs q[ue] l’herbe des sables. Puis roulé brutalement par une vague}. Feuilles épaisses [esculentes], mousses craquantes, tiges rampantes ou ramantes. De méme ressemblance et comme répartition du travail entre toutes les plantes qui exploitent un site donné, par ex[emple] sable et vent, et travaillent 4 leur donner pleine expression. Toute cette jungle au ras du sol d’arbres, d’arbustes et de végétaux aplatis. Toute une nature aplatie, a l’ancre, agtippée 4 plat ventre au sable, produisant de tout petits grains bleus et rouges. Tapis, tapi. Plate-forme déserte. Au fond de lescargot vide il y a un petit miroir, juste assez grand pour qu’une fourmi puisse s’y regarder de pied en cap. — Le colimagon — est ce gros égoiste juteux qui remplit toute sa maison. — II est un peu terre a terre. — II] n’aime pas les courants d’air. L’escargot dit 4 Pescargote : — Cette rose est une gargote. — Je le trouve un peu alambiqué — II est tendre mais compliqué?. Une odeur comme celle q[ue] l’on obtient en mettant ensemble une rose blanche et une rose rouge.
Aout 1931
969
En se transformant de pensée en Verbe elle fit entendre un son q[ui] fait jaillir le point primordial, origine de la lumiére (Zohar)!. Aujourd’hui S. Fr[angois] de Sales tirerait un bien meilleur parti comme illustration de sa doétrine des faits naturels scientifiquement observés que des calembredaines et des fables empruntées 4 Pline et aux - bonnes femmes de son temps.
Retour le 13 [aout]. Les trottoirs de N[ew] Y[{ork]. Toute cette humanité incroyablement vulgaire. Pas une figure noble ou seulement pathétique. [185] L’esprit protestant embréne tout en Amérique, pareil a cette ignoble mayonnaise qui couvre tous les plats de sa masse insipide et gluante. Quelque chose de gras, de composite et de vaguement sucré. Une cochonnerie sans nom. 19 [aout]. — Diner a Lasburgh chez les Sablé. Le soir, l’Amérique — Champs jaunes de golden rods et d’Indian Corn. Dans le ciel obscur une longue lune mélancolique.
| Départ pour Friance] le 22 [aodt] sur le France. _ Cab[ine] de I[uxe] 61. — Louange du désordre. L’éty— mfologie] de trouver est troubler. Déranger un ordre pour voir ce que ca donnera. Pécher en eau trouble. Ne | pas intervenir trop tdt. Sauter sur l’idée a l’abri de ce tourbillon que l’on a créé.
Les
Russes
qu’on
fait manger
dans
d’énormes
_ étables a4 la maniére des bestiaux. Les enfants séparés | de leurs mértes.
Lu le Henry VIII de Francis Hackett. L’épouvantable verrat de qui par sa conjon¢tion avec Nan Bullen, the Whore?, est issue Pimmonde truie qu’est |’Eglise d’ Angleterre, mére du protestantisme anglais.
970
Cahier VI
Un jeune Belge rouge et or, 4 Vinverse de la maniére qu’aurait un Espagnol par ex[emple] d’étre noir et or. Une dame impassible dont le sourcil seul est mobile. Elle exprime tout avec cet accent circonflexe, ce dais minuscule qu’elle éléve ou abaisse. L’intérieur de la Chine en proie aux inondations se ramollit, se liquéfie et engloutit sa population. Tout ce peuple si attaché 4 la terre, la terre le prend entier. L’Allemagne, l’Angleterre, surpeuplées, rongées par leur population ouvriére comme par un cancer, une maladie pédiculaire. Arrivé 4 11 h. 4 Paris. Descendu
chez Paul Petit,
68, boulevard Malesherbes. A 6 h. % vu Arthur Fontaine! mourant, qui me dit qu'il s’est réconcilié avec l’Eglise (L’ Abbé Violet). Madame F[ontaine]. Diné avec les B[erthelot] au Fouquet’s bar. Puis [185 v] aux Ambassadeurs avec le roi Feigal, successeur de Nimroud, d’Assourbanipal et de Nabuchodonosor, Arrivée 4 Brangues le 1¢? septtembre] 4 4 h. du s[oir] par un temps radieux — hélas! bientét suivi de pluies torrentielles et glaciales. Le 6, excursion 4 Nantua, a S.-Claude et au
Col de la Faucille, les montagnes étroites et profondes du Jura, couvertes de noires foréts. Mon petit neveu? agé d’un an Jacques-Paul-Marie. Je lui écris des vers. Marion Cartier®. Dans le ciel entre deux nuages un large bout d’arcen-ciel, ainsi qu'un grand cordon dans |’échancrure dun gilet. — Carré — contrecarrer. Toute la conversation de Br[iand] une série de petits bas-reliefs tout autour de sa statue invisible et présente?,
Visite des Alphand — Visite des B[erthelot] 1215 sept[embre]. — Voyage 4 Genéve : 11 sept[embre].
Septembre 1931 Déjeuner Ponsot!.
avec
Briand,
Promenades
Albert
971 Thomas,
au Granier.
Jouhaux,
Inondations.
Th[omas] mange avec succés avec son chargé jusqu’a la garde de débris de paté?.
couteau
« Nesais-tu pas que cette femme est pécheresse ? » Les
objections lique
des
quils
Pharisiens
rendent
contre
responsable
l’Eglise des
fautes
Cathoet des
- souillures de ceux q[ui] en font profession, q[ui] constituent son corps, q{ui] lui donnent le baiser sacramentel, hélas, plus souvent a la maniére de Judas qu’a celle de Madeleine.
Bferthelot] malade, atteint de rhumatisme au cceur. Départ de Br[angues] le 17 au matin par Roanne, Nevers’, Orléans. Hotel Crillon, app[artement] 111. — N.-D.-des-Victoires. Le diamant q[ui] brille au poignet de la S[ainte] V[ierge]. En auto a Beauvais avec Gigette et Louis Walker. S[aint]-Etienne la Cathédrale avec ses arcs-boutants. Impression d’ambiance sans
aucune
cloture,
les parois
ont
été annihilées,
spiritualisées. Gisors, les colonnes torses, la derniére préparée par les 3 autres, 1 ornée, 1 Sstriée droit, 1 striée rudimentairement.
Evreux, la Chapelle avec
les délicieux vitraux du xvr® siécle. Superbe montée de tous ces édifices. Il y a une certaine allure grandiose dans la [186] montée, grace 4 la disposition et a l’aménagement des repéres comme dans la marche. Retour par la route Paris-Deauville. Pays et saison de moissons, herbages, feuillages, vallées. Le soleil léger et sans vigueur de septembre, chaud non pas comme une bralure, mais comme une haleine. Les arbres chargés de pommes. La pomme 4 quoi s’harmonisent briques et tuiles. L’air doux comme une réponse permanente a la pluie et au ciel gris.
Le 21 septembre, l’Angleterre abandonne létalon dor. Du
22
au
30 sept[embre].
Hotel
Crillon.
Crise
972
Cahier VI
financiére et affolement. Voyage de Pierre Laval et de Briand en All[emagne]. Récit de Léger. La foule q[ui] crie : Briand, sauvez-nous! Voyage décidé de Plierre] L{aval] aux Eftats]-U[nis]. Je le vois ainsi q[ue] Briand. Le 27 pélerinage a S[ainte] Th[érése] de Lisieux. Panzera. Ciampi. Le 30, départ. Hotel Frascati au Havre. Le 1° o@tobre n[ous] embarquons sur le Paris. Départ 4 1 h. avec ma f[emme] et Renée. R[eine] reste en arriére. Pierre 4 Fr[ancfort] GutluitStr[asse] 47. La P[rince]sse Bibesco. Evaporation de toutes les valeurs monétaires. Au moment de l’élévation, soulevé par la respiration de l’Océan, l’énorme bateau doucement et solennellement se balance comme un encensoir.
Atrivée 4 N[ew] Y[ork] le 8 o@[obre] matin. En auto Wash[ington] 4 h.
49h. 4 du
Je ne suis pas choqué de limitation en soie des vétements de carmélite de S. Thérése dans sa chasse. C’est une indication que la transfiguration a commencé},
Nos dispositions naturelles sont comme des positions militaires dont les anges ou les démons prennent avantage. Ils les complétent, ils les fortifient, ils s’y retranchent, ils y mettent garnison et en font des citadelles inexpugnables, — si la trahison ne s’y met pas! Livre dheures. J’envoie la bonne chez |’épicier chercher une livre d’heures — Ma vocation a été Vexil, un dépaysement continuel — Pas d’autre patrie que l’étoile polaire. [186 v] Le Dol — Ne v[ous] persuadez pas q[ue] Dieu ait abandonné le soin des pauvres. Il leur a assigné leur subsistance sur les biens q[ue] v[ous] possédez. Il a voulu q[ue] vous] eussiez l’honneur de faire vivre vos semblables, Ces pauvres q[ue] v[ous] méprisez tant, Dieu
les établit ses
trésoriers
et ses rece-
Septembre-Ofobre
1931
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veurts généraux : il veut quel lon consigne en leurs mains tout argent q[ui] doit rentrer dans ses coffres. _. — Dfieu] ne leur donne ici aucun droit qu’ils puissent exiger par une justice étroite : mais il leur permet de lever sur tous ceux qu’ila enrichis un impdt volontaire,
non par contrainte, mais par charité. — Leurs murmures justes. Pourquoi cette inégalité de conditions? Tous formés d’une méme boue. Description de cette différence. Nul moyen de justifier cette
— conduite, sinon en disant q/ue] Dieu a recommandé les pauvres aux riches et leur a assigné leur vie sur leur superflu : Ut fiat aequalitas, dit S[aint] Paul (Bossuet)!.
15 ot[obre]. Fétes de Yorktown’. A Old Point Confort en bateau. Arrivée de la Mission Frang[aise] avec le Duquesne et le Suffren. Le Maréchal Petain. Figure simple et noble. Trait caractéristique. L’accolade nettement et fortement gravée comme par un burin q[ui] part de la narine et contourne la bouche. Large et solide menton. Il me parle sans aménité de Joffre et de Foch, dont les Mémoires caractérisent le manque d’humanité.
C’est le matin de la Résurrection. Rien n’a changé en apparence. Personne ne s’apergoit que les gardes dorment et q[ue] le Christ est en liberté. 21 [octobre]. — N[ew] Y[ork]. Arrivée de Laval, de sa fille et de sa suite. Type de Gypsy, marchand de chevauxet maq[uignon]*. Un assez bel animal politique, force et séduction, mais ne sachant ni lire ni écrire. Négociations a la Maison Blanche. Ogden Mills. Diners, bals, réceptions, journalistes, etc.
[187] La Providence par lintermédiaire des banquiers nous met de temps en temps a l’amende. Et Spiritu principali confirma me’. Aprés® le péché nous cherchons un recours dans |’Esprit principal, c’est-a-d[ire] dans ce qui nous [a] appelé a l’existence,
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ce qu’il y a de plus profond et de plus essentiel en nous. Le péché est 4 la superficie. Pécher contre l’esprit. C’est 4 l’Esprit q[ui] nous a faits de nous refaire.
La myrtrhe délicieuse 4 lodorat et trés amére au coeur. Secundum multitudinem miserationum tuarum. Multus ad ignoscendum. Il s’agit non seulement du nombre de ses
miséricordes, mais de leur variété infinie, supé-
rieure 4 celle de nos péchés. Variété des mauvaises herbes, variété des fleurs et des plantes dans une prairie, les unes comme des étoiles, les autres comme des cloches, ou comme de petits systémes. Pétales, tiges, racines.
Ah reprenez avec moi un entretien si doux!
Ipsi peribunt?, dit le Ps. CI en parlant des Cieux. C’est 14 un texte essentiel. I] vaut
mieux
entrer
au ciel borgne
et manchot,
que d’étre jeté complet avec tous ses membres dans la géhenne de feu. Contre Gide. Sacrifice volontaire de tne chose. I] vaut mieux rester un enfant que de évelopper une idole. Petit retrouve 4 Wassy notre vieille bonne Eugénie Plé, q[{ui] avait succédé 4 Victoire Brunet, fille du gardechasse du Duc de Coigny, la Tournelle’, 30 [octobre]. Conversation] av[ec] G. sur D.1.
Quelle époque q[ue] celle ot les gens satisfaisaient leurs besoins de poésie en lisant /a Henriade ou Ja Pucelle, et en écoutant les tragédies de Voltaire! Penser
qlue] de pareilles choses ont pu avoir un public?! Q[uel]q[u’Jun a tourné Pune aprés l’autre les pages de /a Hlenriade| et de la Pucelle !
Oltobre- Novembre
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L’automne — II marche, les pieds dans un bruit de billets de banque. — En turc il n’y a pas de mot pour liberté et en roumain il n’y en a pas pour travail. Autrefois Jules Verne et 4 Docelle [sic]! mes lectures interminables du Tour du Monde et des récits de voyages. _
[187 v] Le Ps. CX VIII avec ses 176 versets répartis -par groupes de 8 sur les 22 initiales de l’Alphabet hébraique est comme un long chemin auquel succéde Pascension des 15 degrés des Psaumes graduels. — Dans Ezéchiel (XL, 26-37) on arrive aux portes du temple par 2 flights of Seps?, ’un de 7 et autre de 8 marches.
Beis
2st
223 ne et mcie
la mer qui vit Héléne
Et le bronze romain s’unit au marbre Helléne
Le moment du Sanéus a la messe est comme l’instant sous l’Ancienne Loi ot le Grand Prétre pénétrait dans le Saint des Saints et se tenait seul a seul avec Dieu. De 1a dans le rite grec le fait qu’a ce moment on ferme les portes de l’Iconostase. De 1a aussi le fait que pendant longtemps on a interdit de traduire les paroles latines du Canon. Le prétre devait étre laissé seul 4 seul avec Dieu. Telle est la raison de cette discipline contre laquelle Abbé Bremond a bien tort de s’élever et de chercher querelle 4 Dom Guéranger’®. L’abréviation pour chrysanthemums eSt mums, mms.
Je décfore] 2 Amér[icains].
11 nov[embre]. — « Bal » des légionnaires a |’Auditorium.
Une
masse
de
10 000
hommes
et femmes
en une sorte de danse épaisse traversée par des courants.
Au-dessus
le faisceau
espéce de pate humaine hilare.
Grundton und Ausklang'.
des
réflecteurs.
Une
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Cf. La Vache dans mon « Vieillard sur le Mont Omi»!. — « Rien de plus timide q[ue] la nature : Dés qu’elle se dit : J’ai été vue, elle se cache, et ne
s’expose plus aux regards de l’A4me» (Samkhya harika, 59° cloka). — Une honnéte femme par suite de q[uel]q[ue] inadvertance peut étre surprise sans toilette par les regards de q[uel]q[ue] étranger. Mais elle ne tombera pas deux fois dans cette faute et saura faire en sorte de ne plus étre livrée aux regards d’un indiscret. [188] De méme la nature, une fois qu’elle a été vue distin&tement par l’esprit de ’h[omme] se respecte trop pour se montrer de nouveau aux yeux de l’4me (cloka 61).
« Ne pouvez-vous moi?»
Il entend
rester éveillés une
éveillés
4 Dieu,
heure avec
éveillés
a la vie
réelle. Cf. Rimbaud : « C’est cette petite minute d’éveil... Si je restais éveillé a partir de ce moment-ci?. » Veillez et priez. La priére dans la connaissance. Livre de Jean de Menasce sur les mystiques Juifs (hasidim) et cabalistes. Le retrait ou contraction (zimzoun) de Dieu pour laisser place 4 la Création et a la créature, moralement et physiquement’. Lingua amoris coeteris barbara‘.
Ajouter a ce que jai écrit des verbes intransitifs absolument réfractaires 4 l’analyse : je m/’apercois, je me complais, je me souviens — je me suis passé de...5
Il y a des gens q[ui] mettent tant d’eau dans leur vin qu’a la fin il n’y a plus de vin (Jules Renard)*. Par un certain cété n[ous] sommes supérieurs aux Anges. Les A[nges] n[ous] envient n[otre] capacité de souffrir et de mériter. Quand j’étais 4 Louis-le-Grand, l’as imbattable de n{otre] classe était un fils de professeur, nommé Théodore Colardeau. Je n’en ai plus jamais entendu parler.
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Is[aie] (V[oir] S. Max., Comm. in Dion.) appelle Satan : Meéyas vodis, dvaé BaBvAwvis?. 21 [novembre]. — Un reporter du W[ashington| Ferald arrive 4 11 h, tout échauffé? pour me dire qfue] le bruit court a Paris q[ue] je suis remplacé par Franklin-Bouillon®. Mort de Loucheur.
Les hassidim distinguent la tristesse de l’amertume. La tristesse (mélancolie) froide est assimilée par eux 4 Pélément terre inerte et imperméable. Elle oppose un obstacle 4 la joie et 4 union. Au contraire l’amertume travaille contre l’obstacle : c’est un removens prohibens. | [188 v] 25-29 [novembre]. R[{eine] et les 2 enf[ants] a N{ew] Y[ork] — + L. P. A. sur X.
Le domestique de Cartier assailli sur la Cinquiéme Avenue par un meurt-de-faim q[ui] lui démolit la machoire et lui prend son argent. Vasubandhu — philosophe hierayanat — parle de la causalité des coexistants (saha bhuhetu) — La lampe est la cause de son éclat, Parbre est cause de son ombre et cependant ils coexistent. La pensée et les mentaux ont une causalité réciproque, sont causes les uns des autres en qualité d’associés. Ainsi le voyage des compagnons de caravane par l’appui mutuel quwils se conférent. Angelos vero qlui| non servaverunt suum plrinci| patum (apxi ) sed dereliquerunt suum domicilium, in judicium magni diei vinculis aeternis sub caligine reservavit (Jud.)>.
A[ndré] G[ide] se figure qu’il est simple parce qu’il est plat et qu’il est classique parce qu’il est blafard. C’est le clair de lune sur un dépdt de mendicité.
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Judith. Arphaxad, roi des Médes, construit Ecbatane, une
ville carrée avec
des pierres et des tours
carrées et des portes de la méme hauteur q[ue] les tours. Nab[uchodonosor] le vainc. Il a un conseil avec son état-major : mysterium consilii sui. Il veut soumettre toute la terre 4 son empire. Egredere adversus omne regnum occidentis, Tout se soumet a Holopherne. Veni nobis pacificus dominus et utere servitio nostro. Praeceperat N|abuchodonosor| ut omnes deos terrae exterminaret. — Quid de Israél qui résiste seul. Qui in montanis habitat. Holopherne coupe la fontaine, la v[oie] d’eau de la ville. Garder les f[ontaines] pour venir 4 bout de cette v{ille] construite sur la m[er]. Il n’y a plus d’eau dans la v[ille]. — Judith, veuve, riche, élégante, posséde de nombreux troupeaux. Ora pro nlobis| quoniam mulier sania es. Tu fecifti priora et illa post illa cogitasti. Capiatur laqueo oculorum suorum in me et percuties eum ex labiis charitatis meae. Da mihi conStantiam ut contemnam illum et virtutem ut evertam illum. Cum manus feminae dejecerit eum. Deus coelorum, creator aquarum, exandi me miseram. Elle se pare de toutes ses robes et ornements. [189] Cui Dlomi|nus contulit Splendorem quoniam omnis ifta compositio non ex libidine sed ex virtute pendebat et ideo Dl ominus| hane in illam pulchritudinem ampliavit. La Slagesse] fait semblant de quitter les Juifs et va vers Holopherne. Ut indicem illi secreta ipsorum. Quis contemnat populum Hebraeorum qui tam decoras mulieres habent. Jadith regarde fixement Holophferne]. E¢ cum in faciem ejus intendisset. Nab[uchodonosor].
Les
bétes
le servent.
Nuyuntiatur
animi
tui
industria omnibus gentibus. Plus de pain, plus d’eau. Je prierai et je t’am[énerai] 4 Jerus[alem]. Er bibit Holfopherne] enum plus qu’il n’en avait jamais bu de sa vie. I[pse caput omnium incredulorum incidit in manu mea. Ecce Holophernes| jacet in terra et caput ejus non est in illo. Tu gloria Jerusalem, tu laetitia Israel, tu honorificentia populi met. Non filii Titan... sed Judith filia Merari in specie facied suae dissolvit eum». L’esprit de Voltaire et de Gir[audoux]?. Il n’y a pas desprit contre le S[aint]-Esprit. Donnerez-vous du
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gout a votre cuisine avec ce sel quia perdu sa saveur? 8 [décembre]. Achevé de lire le Traité de S. Denys | sur la Hiérarchie Céleste.
10 [décembre]. Réception du Cforps] D[iplomatique] - ala Maison Blanche. Peut-étre dans q[uel]q{ues] années _y ajoutera-t-on les représentants des différentes unités du systéme planétaire, Mars, Vénus, Jupiter avec ses
-dominions lunaires, etc. On néglige les astéroides de 3 m 50 de diamétre ot ne vivent que des poux blancs.
Zimzoun!. Bien entendu je repousse avec énergie Pinterprétation panthéiste qu’il ne serait q[ue] trop facile, je le reconnais, de donner 4 cette idée. Mais une
interprétation orthodoxe est parfaitement possible. Dieu est partout méme en enfer (Ibi es — Ps.)?. Mais il | Mest pas toujours partout de la méme maniére. Par ex[emple] il cesse d’étre dans Satan suivant le mode de l’amour pour y étre suivant le mode de la Justice. Et dans le monde aprés le péché suivant le mode de Pévidence pour y étre suivant le mode de la suggestion. [189 v] Au téléphone une mére qui parle 4 son fils | avec une espéce de voix de gorge empreinte d’une \
tendresse animale.
Tous ces yeux par-dessus mon épaule qui regardent mes cartes. 14 [décembre]. Soirée a /a Chl amve]-Souris de Balief?.
Déj[euner] le 18. Judith‘. Les animaux symboliques du Quai d’Orsay — Le | beeuf sur la langue, l’ane q[ui] a tondu de ce pré et la vache espagnole sans parler de l’autruche qui fournit 4 la fois la politique du Gouvernement] et les plumes des Ambassadeurs’. Si vous le contredisez son ceil s’injecte de sang® et sa main se porte sur le pyrogéne (Souday).
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On s’apercoit de Dieu par le retrait. Par ex[emple] n[ous] n[ous] réveillons q[uand] le bruit et le mouve- | ment du train s’arrétent. N[ous] n[ous] apercevons de la main qui n[ous] tenait quand elle nous quitte, etc. — De méme les choses sensibles nous donnent le sentiment de Dieu, nous fournissent un élan et une impul- | sion vers lui quand nous les lachons comme du lest (S. D[enys], Des noms divins, I, 5)}. Le lendemain de Noél de Sert et de sa femme.
le froid commence.
Visite
Il y en a qui brillent par leur esprit, d’autres par leur vertu, mais le plus grand nombre qui brillent par leur absence.
The champion woman typist of the world, Miss Stella Willins, of Brooklyn, N. Y., typed 124 perfect words a minute for a solid hour, but if every man, woman and child
on the face of the globe could type as fast as Miss Willins, it wouldn't make any difference... that is if they were endeavoring to make all the possible combinations on a typewriter. If they all typed night and day for a quadrillion years, they would have hardly begun to write all the combinations. On a Standard
typewriter
there are no
less than 1,405,006,
1175752879 898,543 142) 606,2445,SII, $96, 936,384,000,
000,000 possible combinations, not counting the shift lever ! Huxley once Stated that if six monkeys were set to Strum unintelligently on typewriters for millions of years, they would be bound in time to write all the books in the British Museum. That is a sensational Statement, yet it does seem that it might be possible in limitless time. But the number of combinations of letters, words, spaces, etc.,
is also limitless. The editor of Science and Invention says that Hussley’s statement would be impossible to prove... it is a task of trying to solve an infinite problem in an infinite length of time. There are 403,291,461,126,60 5,635,584,000,000
com-
binations of the 26 letters of the alphabet alone. Suppose a monkey should decide to Strike the letter « a» or any other letter a million times before grouping it with some
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other letters. By chance, a whole page of history might be written, but one little slip would spoil it, and the chances of making that one slip are limitless. Mémoire. — Mé et Moi. C’est moi qui me souviens de moi-méme, qui compare et q[ui] constate mon identité avec moi-méme, le moi passé avec ce moi présent dont je constate a pleins poumons la réalité sonore. | En latin memini — le présent [190] a la forme du passé, How charming is divine philosophy ! Not harsh and crabbed as dull fools suppose, But musical as is Apollo’s lute, And a perpetual feast of nettared sweets.— (Milton, Comus)?. Tanta patet rerum
series atque omne futurum
Nititur in lucem’. Plutarque sur le Parthénon : For this cause therefore these works are more wonderful: because they were perfectly made in so short a time and have continued so long a season, For every one of those wilorks| were finished up at that time seemed then to be very ancient touching the beauty | thereof : and yet for the grace and continuance of the same, |it lookett at this day as if it were but newly born and finished, there is such a certain kind of flourishing fullness in it, which lettett that the injury of time cannot impair the sight thereof. As if every of those foresaid works had some living | spirit in it to make it seem young and fresh : and a soul ae lived ever, which kept them in this good continuing ate’,
Apparitions de la Vierge 4 Ezquinoza dans le pays _ basque. De nombreux assistants la voient. « Il régne | une atmosphére apocalyptique et oppressante. » Des | voyants la voient brandissant une épée vers les quatre | points cardinaux. Autour d’elle des anges armés | d’épées. Le Christ souvent avec elle, soit sous forme enfant, soit d’une colombe. II arrive comme une
|d’un
colombe et devient un enfant, puis il redevient une
|
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colombe (le S[aint]-Esprit). « Si v[ous] saviez, disentils, ce q{ue] la Vierge n[ous] dit, v[ous] seriez terrifiés. » [190 v] Naive et touchante Uke an imperfect rose — Imperfect but sweet smelling. Voyage a N[ew] Y[ork] le 29 [décembre]. Déj[euner] avec Charlot. Fresques de Diego Rivera. Sert. Chapelle du Duc d’Albe chez Wildenstein. L’Empire State building. Le News building avec la terre tournant sous une coupole de cristal noir. Le Messiah de Hendel avec Henri. 30. Le matin Altschul, visite des locaux pour le consulat. Déj[eune]r avec S. Lamont et Parker Gilbert. Décoré la basse Léon Rothier. 31. Visite avec Charlot et Sert de la colleétion Friedsam. Causé avec un h[omme] qui cherche Dieu et q[ue] mes livres ont éveillé. Le Symbole évangélique de Vermeer. Une femme assise en priére. A terre, jetée, une pomme dans laquelle on a mordu. Le globe terrestre sur lequel elle pose le pied, comme pour le fouler ou prendre son élan, au-dessus une sphére de cristal qu’elle regarde. Sur la table un crucifix et un calice. Par terre un serpent écrasé sous une dalle?. Derriére un tableau représentant la crucifixion. Passages délicieux d’une valeur a l’autre, d’un noir 4 un autre noir.
Tableau dune pureté et d’une dévotion angélique de Bellegambe*. Des moines blancs en priére devant la Vierge avec des figures d’anges. Déj[euner] au Times. Retour 4 W[ashington] 4 9 h. Fin d’année bien sombre au milieu de menaces effrayantes pour l’année qui s’ouvre'. Dies formabuntur et nemo in eis (Ps. CXX XVIII, 16) . ad excusandas excusationes in peccatis (Ps. CXL, 4). Filiae eorum compositae circumornatae ut similitudo templi. Qui numerat multitudinem Stellarum et omnibus eis nomina es — Et sapientiae ejus non est numerus (Ps. CXLVI,
4-5)°. La seconde Madame convertie,
Sert, musulmane
géorgienne
1932 [191] 1° janvier. — Grande pluie. D[iner] au personnel de l Amb[assade]. Nouvelle de R. Larsen.
2 [janvier]. — Gr[and] beau temps. Mad[ame] ‘M[eyer] me fait remarquer q[ue] romantiques et classiques ont toujours existé. En Chine ce sont les taoistes et les Confucianistes, le N[ord] et le Sud. Les uns appliqués, sévéres, minutieux, les autres fantaisistes, inventifs,
joyeux. D’un cété une rigide et délicate calligraphie, de l’autre de grands coups de pinceau hardis et généreux. Le classicisme se rabougrit rapidement si le romantisme ne vient le rajeunir. Les 2 sont indispensables ’un a Vautre. Le tao existait avant Laotzeu et la secte Zen s’y rattache!. Une haleine dans la nuit Le son de L’ombre sur l’ombre L’impression sur eau qui fuit De cette feuille qui tombe Sur les sept notes de la harpe
Vers notre source a tire d’aile Que notre jeunesse nouvelle Remonte comme la carpe Beelt.;
XXX Vill; 34-35; 36,37:
Leur aff[aire] n’est
pas d’habiter ni de vaquer de
cété et d’autre, ils ne
feront pas un saut dans la poli-
tique.
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C[’est]-a-d[ire] le réle de citoyen, la vie sociale affairée. Et pas davantage la politique q[ui] déja sans doute comme aujourd’hui était le domaine des sauteurs |!—N.B.— Le texte de la B[ible] est curieux! Sans eux [les artistes] la Cité ne peut étre édifiée (35)... Et cependant cette cité qui ne peut pas se passer d’eux,
ils sont incapables eux-mémes de l’habiter. Jesu in ore mel — (S. B[ernard])}.
in aure
melos, in corde jubilus
Dans le tableau de Sert (Chapelle du Duc d’Albe) les deux lignes d’ancétres pressés en file l’un derriére autre, convergent vers la Vierge qui lit dans un livre avec la main, et s’écroulant vers le spectateur, un ruissellement de livres un sur l’autre terminés par une draperie.
Dans l’enfer il peut rester de bons sentiments. Le Mauvais Riche désire le salut de ses descendants?.
[191 v] L’Allégorie du Nouveau Testament par Jean Vermeer (Coll[ection] Friedsam — N[ew] Y[ork] — v[oir] p. 190 verso). Le rideau 4 demi tiré est celui des illusions humaines — Le serpent par terre écrasé sous la pierre est le diable — Sur la table la Bible, la croix et le calice — Sert prétend q[ue] V[ermeer] avait l’ceil si
juste q[ue] physiquement il a les défauts de l’obje@tif photographique’. Mary Mary quite contrary How does your garden grow ? Silver bells and cockle shells And pretty girls all of a row,
O mon Jésus de lait, 6 mon petit enfant de lait pur! Repeating onions — La f[emme] d’un sénateur m’ex-
plique q[ue] pour éviter cet inconvénient, il faut les faire bouillir dans de la soude, puis jeter l’eau, etc.
Janvier 1932
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Pas une pierre dans toute la Russie de l’Oural 4 la
Finlande. Avec quoi lapiderons-nous la femme adultére P— Si quelqu’un se trouve pour jeter la premiére pierre, je réclame la seconde?!
Are all protestants to go to hell? — I am not sure but I hope so — Why ? — I am sure they will find heaven a very slow, dull and backward place. I am sure they will find in hell a much more congenial atmosphere, something more cosy, - ifyou allow me to say so, more familiar, to which all their [192] past experiences, ideas and feelings will fit wonderfully — all that fine preparation cannot be for nothing. Our sweet self will find a place which is entirely his own, which is entirely his work. and Stipend, complétement a l’abri de ce dieu génant et importun qui intervenait si désagréablement dans notre privacy®.
Une haleine dans la nuit Le son de l’ombre sur l’ombre L’impression sur Peau qui fuit De cette feuille qui tombe Sainte Agnes
Le matin du dernier dimanche Couronnée de neige et de houx, Que Sainte Agnes en robe® blanche Mette, ah, que ce sera doux!
Sa joue contre notre joue'. Les papillons comme sur leurs ailes®.
les séraphins
ont des yeux
La porte s’ouvre en coup de vent, et ce sont ces bras d’enfant autour de mon cou et cette joue contre ma joue, fraiche comme la neige.
[192 v] Chez certaines peuplades sauvages l’inceste et la sodomie sont considérées comme conférant des pouvoirs magiques. Elles [sic] mettent le titulaire en dehors de l’humanité. Ce sont les sacrements du diable.
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12 [janvier]. Concert Stokovsky*. Le Concerto pour percussions de Milhaud, le tambour lointain, écho des nuits de Ramadan. La fonderie d’acier de Molossov. Le concerto de Stravinsky, tortillé et exaspérant. Les Tableaux plour| une exposition de Mousecetshy2 les poussins, les 2 juifs, la cabane aux pattes de poule, étonnante justesse psychologique de la traduction musicale. 13 [janvier]. Démission Laval. Le 1° 2.
de Briand et du Cabinet
14 [janvier]. Diner, musique et gr[ande] farandole diplomatique 4 la W[hite] H[ouse].
Sainte Agnes prés de Marie La main doucement sur sa manche
Est comme Ll’agneau blane qui suit Une mére toute blanche®.
« Sur ce qu’on fabriquait dans l’atelier de Nazareth le P. Schwalm a donné des précisions trés vraisemblables : “Les commandes s’imaginent conformément aux travaux connus du menuisier-charpentier chez les juifs ;des poutres 4 équarrir pour le soutien des terrasses qui couronnaient les maisons : des jougs, des fléches d’attelage et d’aiguillon, pour les cultivateurs; des lits, des
coffres,
des huches;
des
pétrins
pour
les
ménagéres; des coffrets garde-notes pour les scribes, les commergants, les rabbins. Ce sont 1a, en effet, les ouvrages divers que la Mischna nous atteste exécutés par les charpentiers : sur ces données d’observations, il est permis d’esquisser le travail du charpentier Joseph, du charpentier Jésus” » (da Science Sociale de mars 1909, p. 30)4.
Polichinelle n’est autre q[ue] le Maccus latin — pullus gallinaceus — Chanteclair — un peu enroué — la pratique. Les nébuleuses q[ui] s’éloignent 4 toute vitesse pour échapper au regard des astronomes ne laissant derriére elles qu’une trace rouge’.
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16 [janvier]. Diner des correspondants étrangers — Le ciel q[ui] s’en va, qui fout le camp.
Le bleu du ciel de Janvier. M[ount] Vernon. Le Dr Jean Vieuchange m’envoie le journal de route dactylographié de son frére Michel q[ui] a fait Pexploration de Smara dans le Sahara insoumis et est mort au retour, a 25 ans, d’épuisement et de dysenterie.
Il avait lu /e Souler de satin avant de partir et en avait été frappé. Ses dern[iéres] paroles avant de mourir ont été : Il faut croire ce qu’enseigne |’Eglise Cathol[ique]. C’est Claudel q[ui] a raison (Lettre de Massignon)}. [193] 19 [janvier]. — A l’Observatoire. La gr[ande] lunette méridienne. Le plancher q[ui] monte et la coupole q[ui] roule. Sirius. Jupiter avec ses satellites et les raies rouges, un gros globe de feu. La lune, une énorme boule de platre, avec des endroits polis comme une glace par-ci par-la, ulcéres et dartres. La bibliothéque avec au milieu la fontaine et les poissons rouges. Ce poste de regard sur |’Infini. Ceux q[ui] sément avec la main et ceux q[ui] sément avec le sac.
Saint Joseph. Why call ye Me Lord, and do not the things which I say ? Luke V1, 46. Very impressive is the quaint inscription on an old slab
in the ancient cathedral of Lubeck
:
Ye call Me Master, and obey Me not;
Ye call Me Light, and see Me not; Ye Ye Ye Ye Ye Ye Ye
call call call call call call call
Me Me Me Me Me Me Me
Way, and walk Me not; Life, and desire Me not; Wise, and follow Me not; Fair, and love Me not; Rich, and ask Me not; Eternal, and seek Me not; Gracious, and trust Me not;
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Ye call Me Noble, and serve Me not,
Ye call Me Mighty, and honor Me not; Ye call Me Just, and fear Me not; If I condemn _you, blame Me not}. Voyage 4 N[ew] Y[ork] 29-1. — Diner chez les banquiers. Les femmes couvertes de chaines de diamants, d’émeraudes et de rubis. Une avec une énorme émeraude sur le ventre comme un cul-de-bouteille. Afffaires] Japonaises. Sh[angha]i?. Bombardement de Nankin, etc.
Je vous ai donné du pain et vous, me donnerezvous une pierre ?(Egerton Castle.)
. nous partage parcimonieusement toncles.
quelques pé-
Melir est finis orationis quam principium (Eccl., VU, 9.)°. Noli esse justus multum (id., VXI, 17)4. Lustravi universa animo meo ut scirem et considerarem et quaererem sapientiam et rationem (Ang[elorum] numerum) (7d., VII, 26)°.
Le P[ére] Francis Burke de Georgetown me signale le traité De Musica de S[aint] Augustin ot il trouve beaucoup d’idées analogues aux miennes. I] m’envoie un certain nombre de citations de ce traité et d’un autre [194] au titre trés suggestif De Ouantitate animae d’ot j’extrais les suivantes Oculi ... quorum quasi virga visus (De O. an., 43-44). S[aint] Augustin admet comme moi q[ue] le sens est une action de l’4me et pas seulement une passion®. Motus igitur animae, servans impetum suum... memoria et cum in alind intenditur.animus’. Numeros quos in atin esse animadvertimus etiam cum in silentio non recordans, agit aliquid anima per temporalia Spatia numerosum®. Différentes espéces de nombres: judiciales, progressores, occursores, recordabiles, sonantes (16)9.
Janvier-Février 1932
989
38. Sonus qui quasi lux est numerorum, cui sic eft contrarium silentium ut coloribus tenebrae?.
[ste autem animae appetitus est sub se habere alias animas ; non pecorum sed rationales, i. e. proximas suas, et sub eadem lege socias et consortes. Ex his autem numeris et motibus quibus animae ad animas agunt?, 48. Numeros quibus agimus corpora nulla inquietudine _sentiemus et gaudebimus®. Deus nulli invidet puchretudini |sic]. L’arbre croit et se développe suivant un rythme, il est Pceuvre du semps°. Conrationalitas quaedam (Co-naissance)*. 58. Cui superfunditur aquarum natura, nitens et ipsa ad unitatem, speciosior et perlucidior propter similitudinem partinm et custodiens locum ordinis et salutis suae’. ' Rationales
et intellettuales numeri
beatarum
animarum
atque santtarum legem ipsam Dei sine qua foliam de arbore non cadit et cui nostri capilli numerati sunt, nulla interposita natura excipientes usque ad terrena et inferna jura transmittnt.
L’Unité par le chemin du nombre. [194 v] Le 6 fév[rier] pour le 1o® annfiversaire] du couronnement du Pape, diner chez le Délégué Apostolique Mgr Fumasoni Biondi. Le cardinal de Philadelphie, une espéce de nain hideux, sgua/*, ceinturé de rouge et avec cela rayonnant d’autorité. Mgr Curley, Ryan, Fumasoni Biondi, onCtueux et prudent. Caractére essentiel
de
tous,
une
autorité
sire
d’elle-méme,
q[uel]q[ue] ch[ose] 4 la fois d’effrayant et de rassurant?”. Premier signe de printemps ces grappes de vers végétaux verdatres suspendues aux branches noires des arbustes.
Si aufers catenam de medio tui** — Situ supprimes le lien entre les distractions — si tu leur Otes la suite — si tu débrayes l’esprit d’avec la volonté.
990
Cahier VI
L’Ephod, vétement en forme de scapulaire qui recouvrait et cachait le Grand Prétre par devant et par derriére, retenu par 2 onyx sur les épaules qui portaient les noms des 12 tribus d’Israél. Avec ce vétement ne faisait qu’un le rational, avec ses 12 pierres portant les noms des tribus. Ce qui cache et ce qui montre ne font qu’un. Sur les épaules, ternes onyx’, nos péchés, sur le coeur nos noms incorruptibles et lumineux. Les 2 petites chaines d’or trés pur q[ui] retiennent le Rfational] sont [195] sans doute les 2 Testaments. Cum intrasset Jesus in Jerosolymam commota eft universa civitas dicens : Quis ef hic! (Matth., XXI, 10) Ainsi quand nfous] recevons J[ésus]-C[hrist] dans la communion’,
Le cété martial et viril dans la musique de Chopin, Lex — Lux. Ecce omnes animae meae sunt (Ez., XVII, 4). Dieu lui souffle dans la bouche.
Le monde maintenant fermé 4 limagination reste ouvert a l’anxiété. Tout est ouvert. Il n’y a plus rien qui nous protége. Le danger peut venir de partout. Lettre de 2 missionnaires ciant.
de Papouasie me remer-
La sceur Noblet q[ui] m’a rencontré en 1921 avec Mer de Boismenu‘.
_ 25-27 [février] 4 N[ew] Y[ork] chez Cartier. L’Egyptien mind reader®. Il écrit sans difficulté les vers de Casimir] D[elavigne]*® que j’avais lus la veille : Je veux tout expliquer ne pouvant rien connaitre. Ila méme reproduit mon hésitation entre Je ou I// Lettre de J[acques] de M[assary] le 23 — Fin,
Fevrier-Mars
1932
991
[195 v] Slow, slow, fresh fount, keep time with my [salt tears ; Yet slower, yet; O, faintly, gentle springs;
List to the heavy part the music bears, Woe weeps out her division, when she sings.
Droop herbs and flowers, Fall grief in showers,
Our beauties are not ours, O could I Still,
Like melting snow upon some craggy hill, Drop, drop, drop, drop, Since nature’s pride is now a withered daffodil». O rare Ben Johnson?!
Le point de Darwin a Vourlet supérieur de Voreille droite, soi-disant rappelant notre parenté avec le singe’®. good — 4 bouches = 2 béantes et 2 allant chercher Pune en bas lautre en haut ce qu’il leur faut = en all[emand] gut — le morceau suspendu en I’air, comme dans péche — 1a le e¢ c’est l’ceil ou le poisson lui-méme. Enlévement du bébé Lindbergh. Le bleu permis comme couleur liturgique dans cert[aines] églises par ex[emple] 4 Lourdes pour les fétes de l’Imm|[aculée] Conc[eption]. 7 mars 41 1%, mort d’Aristide Briand — 6 — Terrible blizzard.
L’Ouest. Les grandes fermes a l’ancre dans un océan de ble. Ex substantia tua fac eleemosynam (Tob., IV, 7)*.
De mére 4 fille l'éducation souvent espéce de complicité.
Dans
|’Amért[ique]
qués par des essaims
n’est qu’une
du Sud les explorateurs attade papillons carnivores.
99 2
Cahier
VI
[196] Las d’un libre destin, las de sa dignité,
L’homme sur ses autels placa la vanite, Le front chargé d’ennuis, pétude prit naissance Et Verreur a sa voix détrina lignorance. L’homme a dit : « Je sais tout et j'ai tout défini ; « J'ai pour loi la raison, pour borne L’infini. « L’étude me ravit a des hauteurs sublimes ;
« « « « « « «
De ce globe étonné jai sondé les abimes. Cet élément subtil dont il roule entouré, Ce fen, de tous les corps le principe sacré, L’onde qui les nourrit de ses flots salutaires N’ont pu contre mes yeux défendre leurs mySteres. Est-il q{uel\g|ues| secrets cachés au fond des cieux O[ue] n’ait point pénétré mon regard curieux ?»
Moins fier de sa raison, il ett mieux dit peut-étre.
« J'ai su tout expliquer ne pouvant rien connaitre.» Linsensé ! quel combat il s’épuise a livrer Pour détruire un mensonge ou pour le consacrer! Que d’efforts malheureux ! que de veilles Sériles| Qwil érige a glran\ds frais de syftémes fragiles| Ptolémée,
illustre par cent travaux
divers,
Dans un ciel de criftal fait tourner lunivers. D’ autres, soumettant tout aux lois de Polymnie,
Des cercles étoilés ont noté Il’harmonie. Si le temps nlous| éclaire et les a réfutés, Le temps de mille erreurs a fait des vérités. Tout le savoir humain n'est qu'un grand labyrinthe. L’étude n{ous| conduit dans cette obscure enceinte : De son fil embrouillé q{ui\ s’allonge toujours On suit péniblement les tortueux détours Le voyageur perdu marche de doute en doute Et sans se retrouver expire sur la route. (Casimir Delavigne?.) [196 v] Remarquer la forme spéciale du front et la dilatation de l’arcade sourciliére gauche. La lunette?? 16 mars. A 11 h., je pars en avion avec Pat Hurley, Secr[étaire] de la Guerre. Paysage monotone taché de
Mars 1932
993
neige. Arrivé 4 Chicago d’une traite 4 3 h. Promenade le long du Lac Michigan encombré de glacons. +17. Visite au Maire Insull". L’aquarium. Daily News?. Les crabes nichés dans des coquilles vides et se promenant avec leur maison. La queue admirable du requin aussi sublime que Vaile de Valbatros. Les poissons Chinois. L’exposition. Le Palais des transports comme une tente, soutenu du dehors par des cables. Diner avec Rufus Dawes et les organisateurs. 18. Visite a\ ~ Université Northwestern. Discours*. Déjeuner au Club. Musée, Planétarium. Ciel artificiel. Banquet des Soc[iétés] F[rang]aises et peuples amis. 20. L’Univ[ersité] de Chicago. La section Orientale, statuettes assyriennes. Déj[euner] MacCormick. Le matin. La bourse [197] des blés. Tous les gens q[ui] achétent
par un signe des bras et des mains. La corbeille. La tour du Palmolive. Diner chez Davey. Départ la nuit pour K[ansas] C[ity]. Arrivée le 20 — dimanche des R[ameaux] — 49 h. 45. Messe 4 N[otre]-D[ame] de Sion. Déj[euner] catholique. Vis[ite] 4 P?Untv[ersité] de Lawrence Kansas. La terre noire — épuisée. Trucks chargés de bétail. Le soir diner f[rang]ais. 21. Visites toute la journée dans le tonnerre et dans une tempéte de neige et de gréle €pouvantable. Déj[euner] a lArt Institution. Superbe musée. Un charmant Tiepolo. En haut de la Tour des Morts. Banquet. L’Allfemand] Conrad Mann. Dépfart] la nuit p[our] Columbia. Arr[ivée] le matin 22 par un temps pur et froid. Université] de Missouri. Jefferson City. S[aint]Louis. Discfours] en latin. Musées. Diner chez le Président. Gr[and] bang[uet] 4 ’hdtel. Le 24, retour en aéroplane par Indianapolis, Columbus et Pittsburgh. W[ashington] illuminé du haut de l’aéroplane. Art[ivée] a 8 h. V[endredi]-Saint chez les Bénédiétins de Sfaint]-Anselme. Messe de Paques. La baronne Pierlot me dit qu’elle s’est mise en régle. L[aus] D{eo] Jupiter chatrant son pére Chronos (le Temps) pour lui 6ter sa fécondité, pour Vempécher de continuer, pour le fixer lui-méme dans sa royauté,
994
Cahier VI
« Voila Adam devenu comme |’un de nous » (Gen., III, 21-22). « Il s’agit d’Adam et d’Eve expulsés du Paradis et q[ue] Dieu Lui-méme revét mystérieusement d’une tunique de peau. D’ou venaient ces vétements sinon d’animaux morts? Comment morts puis[ue] la terrible visiteuse n’avait p[as] encore pénétré diac le paradis? C’est ici q{ue] commence le mystére. Adam, ayant appris qfue] le Christ lui était substitué dans l’expiation du péché, se substitua
4 lui-méme,
peut-étre sur l’ordre de Dieu, une ébauche figurative du sacrifice futur, un agneau, dit Origéne, qu’il immola a Dieu, et dont la toison servit 4 couvrir ses mem-
bres, figurant de cette maniére le Christ, n[otre] vidtime, n[otre] rancon, q[ui] aprés avoir pris la ressemblance de la chair du péché, s’est offert pour nous revétir de lui-méme,
de ses mérites et de sa justice.
C'est ainsi q[ue] le Rédempteur a été représenté comme ‘‘l’Agneau immolé dés Porigine du monde” »
(Apoc., XIII, 8).
[197 v] Malgré sa sécheresse toute la littérature francaise a un caractére philosophique et religieux. Il n’y a presque pas un livre ot la religion et la métaphysique ne soient 4 larriére-plan. Au contraire la littérature anglaise est profondément paienne. Pour Shakespeare et les h[ommes] de son temps, pour Keats,
pour
Dickens,
Thackeray,
Conrad,
Kipling,
Th{omas] Hardy, on dirait q[ue] le Christ n’a jamais existé. On lui a fait sa part et on se passe de lui le mieux du monde. Aeternitas non est tempus sine fine sed nunc Stans (Adage scolfast]ique)?. 1-3 avril. Voyage
4 N[ew York] par gr[and] vent.
Ps. XXVIII — bien difficile 4 comprendre. Vox D{omi|ni confringentis cedros. 6. Et comminuet eas tanguam vitulum Libani®, Le veau, c’est essentiellement ce qui tette. Les cédres, leur forét, c’est le nourrisson qui tette cette mamelle. C'est au milieu de ce troupeau
Mars-Abril 1932
995
tout occupé a exploiter le lait de la terre q[ue] l’ouragan de Dieu fait ses ravages. Il met en morceaux, - il fait tout sauter de cdté et d’auttre.
Et dilettus quemadmodum corne,
c’est lintention
filius unicornium,
—
La
droite, le désir q[ui] sort de
intelligence comme la corne est associée a la téte. Le Bien-Aimé c’est le Christ ou le Fils par excellence, celui qui s’appelait lui-méme le Fils de l’?Homme. Crest a lui que Pouragan de Dieu fait place, comme la _cotde qui tournoyait 4 son poing quand il chassait les vendeurs du Temple. Se rappeler l’eau-forte de Rembrandt ot précisément on voit des veaux q[ui] se sauvent. On dit qu’il est le Fils des hommes 4 intention droite, des « vrais Israélites » parce q[ue] sa conception ne se réalise que dans les cceurs droits. Unum est necessarium, > Vox Dlomi\ni praeparantis cervos?. La voix du Sf[eigneur] comme quand II dit : Celui-ci est mon Fils bienaimé. Reve/abit condensa*. L’ouragan dans le taillis entremélé qui empéche de marcher et de passer pratique des [percées] des abatis (Sens adjoint : les gros nuages noirs au ciel, illuminés par la foudre intérieure). Les cerfs s’accumulent et se sauvent de tous cédtés. Le cerf — se rappeler le Ps[aume] QOxuemadmodum desiderat cervus’. Ce sont les Apdtres, les missionnaires. C’est la tempéte de la persécution q[ui] les chasse de leur asile et les oblige a disséminer |’Evangile. [198] D[omi|nus diluvium inhabitare facit. Le déluge® c’est l’eau q[ui] recouvre la terre. Dieu le fait habiter cette terre. Il fait cohabiter |’eau et la terre, la nature
et la Grace, de sorte q[ue] 1a ot le péché abonde la Grace surabonde. Habiter, c’est avoir trouvé quelque chose proportionné a sa persistance. Vox Dlomi|ni intercidentis flammam ignis — La révélation entrecoupant la flamme du feu (Feu : Feu de Pascal) — Le Sinai. Concutientis desertum. Et il en fait jaillir ?'eau. Précisément Cadés ot Marie meurt et est ensevelie. Apert eis thesaurum fontem aquae vivae. L’eau q[ui] jaillit précédée par le bouleversement de ce coeur aride’.
996
Cahier VI
Et peut-on vraiment entrer dans |’épistémologie Vedanta sans au moins se souvenir qu’en sanscrit comme en grec connaissance est proche de naissance — de co-naissance — et q[ue] les Indiens ont poussé avec une telle intrépidité jusqu’a ses derniéres conséquences ce principe dont le Lycée devait tirer la formule « ’étre devient ce quwil connait» qu’ils en ont fait le point de départ de Vindivision supréme (Avibhaga), d’autant plus affirmée q[ue] la connaissance devient plus effective? (R. P. Dandoy, S. J., /’Oxtologie du Vedanta, Avertissement du tradutteur, L.-M. Gauthier, p. 10). 6 avril. —
Maria Blanchard meurt subitement?.
Modulatrices aquae (Yertull{ien] S.-Beuve, ap[ud] Bremond):.
—
Cité par J. de
Puissance — potentia — a la fois le sens aétif et passif. Il peut tout, il est en puissance de tout. Geethe sur son lit de mort tout nu et entouré de blocs de glace (pour assurer sa conservation)‘. G[cethe] der Damonische — Un _ surhomme, c[’est]-a-d[ire] wn pauvre diable. Article grotesque sur G[cethe] du triste Suarés. Gribouillans gribouillabit®.
Exorcismes du prétre au baptéme. Pour chasser le diable, pour démolir ses constructions il suffit de souffler dessus. Devant léglise un h[omme] en costume de macon q[ui] plie le genou et dte son chapeau. La connaissance
est la notion
fidéle, la naissance
4 Pobjet tel qu'il est ( Vasthuyathatmyajnanam ) (Dandoy,
P- 94). [198 v] Le Fils dans le Pére épuise tout commencement et Esprit dans leur relation réciproque toute la fin.
Avril 1932
997
(Le Crucifix) — Vous étes dans ma main et je suis dans la votre.
Lettre de Jammes m/’annongant g[ue] son fils Michel, agé de 17 ans, filleul du P[ére] Michel de Caillava, va entrer chez les Bénédictins?.
L’histoire du Jansénisme montre comment une erreur longtemps diffuse finit par devenir une hérésie - formulée. Ainsi la Fr[équente] Comm[union] ap[ud] Br[emond]. Erreur du « respect» partagée par S{aint] Fr[ancois] de Sales?.
Le sophisme janséniste des dispositions convenables pour la Fr[équente] C[ommunion] (que parait partager Brfemond]*) est Vanalogue des_ purifications Beane q[ue] blame N[otre] -S[eigneur] — quand es Phfarisiens] reprochaient a ses disciples de ne pas se laver les mains avant le repas. Annus — annulus — agnus? — animus — anima — An? non. La neige — gr[ande] Exposition de Blanc — les montagnes un grand étalage de linge. Huguenots — D. A. R. — Alden. 19 avrilt.
sur
Décoration Mad[ame]
[199] Ladies and gentlemen, I will introduce you into a paradise of hard faéts°. Tant de fautes sur moi que je n’ose pas mourir. La littérature classique est le résultat d’un effort commencé au xvI® siécle pour créer un monde fictif purement humain ov la Révélation n’ait jamais pénétré. Méme dans les piéces ou romans de cette €poque ou intervient le christianisme il ne joue qu’un réle accessoire et en q{uel]q[ue] sorte décoratif. C’est cela qui m’en a donné lhorreur, cette sécheresse infernale
998
Cahier VI
dans Moliére q[ui] annonce déja Voltaire. Comment peut-on faire vivre les enfants q[ui] viennent de faire leur 17 communion, dans cette atmosphére de passions déchainées,
d’avarice,
de mensonge,
de trom-
perie, etc., comme si Dieu n’existait pas, comme si la nature elle-méme n’existait pas? — Idée : Une éducation q[ui] serait tout entiére le développement du catéchisme. Une révélation appuyée sur la science, histoire, et partiellement l’art et la littérature (a leur place).
Job. L?Abime, la Mer, disent de la Sagesse : Non est in me. lenis devoravit abyssum multam (Os.)*.
Un démon qui flaire la merde avec un nez énorme comme la racine dune trompe, comme un groin de cochon (Rodin)°. Purple Patches‘ — pour un déc[or] de M. Ch. — Carrés de pourpre — Ombres bleues et carrés de pourpre — De la neige en été — Essais et tentatives. Le mot d’ordre — L’ordre de Dieu a la Nature — Q[uel]q[ue]fois elle a mal entendu, elle se trompe, elle fait des calembours, comme quand par exemple on luia dit cheva/, et elle a entendu hippocampe. Ou alors saisie
d’un
enthousiasme
déplacé®, elle exagére,
elle
produit des equisetums, queues de cheval, aussi grands que des sapins, des ichthyausores qui crévent, parce qu’on ne lui avait d[eman]dé que des lézards. Elle bousille, et bacle des monstres inconsistants et déme-
surés, dessinés comme avec un crayon d’enfant, bourrés d’épinards, et de [...] de cloporte* — des cloportes a ailes, des rossignols carnassiers découpés dans du cuit de vache. Ou au contraire, elle fait la
béte, elle fait semblant de ne pas [199 v] comprendte, elle boude, elle fait la sourde oreille’, elle s’entéte, elle fait des cocottes, elle se livre 4 des farces stupides,
elle digére mal, et tout a coup elle se met 4 faire les
Abril-Mai 1932
999
yeux blancs, elle a mal au coeur. — Ah 1a la! et si je vous montrais le rayon des laissés-pour-compte! des modeéles ratés et pour qui on n’a pas pu obtenir la patente S.G.D.G. Des projets compliqués et difficiles que lon a laissés en plan, ou certaines platitudes indéfiniment réalisées en séries interminables. — Des serres mal comprises, un carreau qui manque et tout avctevel,
Tempe = Templum = tempora. S[aint] Th{omas] touche Jésus et celui-ci dit : Quia vidisti me, Thlomas), credidifti (Joann., XX, 29)?.
D[ieu] vit en nous et nfous] en Lui. C’est une vie supérieure, et comme elle est en nous par nature il y ena q[ui] peuvent la percevoir en dehors de la grace, de la foi et de toute pratique de vertu; ces gens s’adonnent au recueillement naturel au-dessus des images sensibles dans la simplicité de leur essence. Ils croient alors étre saints et bienheureux (Ruysbroek, /e Miroir du salut éternel, chap. Xvit)*. S[aint]
e
Thf[omas]
croit
Penparce chqu’ilie
a touché,
P parce
qwil a été touché dans sa sensibilité. — I] a mis ses doigts dans le Cceur du Christ, il a enfoncé sa main dedans. 28 [avril]. Gig[ette] va a N[ew] Y[ork]* [200] Ira viri justitiam Dei non operatur (S. Jac|ques}). Tardus ad iram’. 1€T mai. Eleétions en France. Succés radical — 8 mai.
aussi sourd q[ue] peut l’étre une lanterne.
| Un journal italien m’appelle « le Gorille Catholique » | et dit q[ue] la Duse a été horrifiée par le caractére | « fiero e credule » de ma religion. |
| |
CLAUDEL
V - 35
35
1000
Cahier VI
Jai recu Vhostie et je ne suis plus qu’un sanglot de pourpre?. 4 [mai].
A Winchester
je couronne
miss
Helen
Washington reine des apple-blossoms?. 12 millions de pommiers en fleurs. Abondante consommation d’apple jack. Un cahot me lance la téte contre la ridelle. M. du Bos pénétre dans le grenier de Geethe ot il fait un foin énorme, ouvrant
les vieilles malles et
sortant les habits a la francaise et les pantalons de casimir 4 pont, le tout a Vétat de neuf et n’ayant jamais servi a rien*. Une poussiére suffocante. Jolie petite ode a la persénlichkeit. G[cethe] incapable de sourire, dénué de toute espéce d’humour ou d’esprit ou de fantaisie. C’est un ane‘.
Elle s’exprima ainsi en paroles lunaires. L’anglicanisme est la lune sinistre et glacée du catholicisme. « Poser un frein 4 sa langue.» Hélas! il y a q[uel]q[ue] chose en nous q[ui] parle tout seul. Lengua, universitas iniquitatis (S. Jac[ques])°.
Di rami fecemmo ala al follo vole (Dante)*. Monsieur Gethe Exes-vous poéte ! Je vous répondrai Quand j’aurai trouvé Ma personnalhité’.
Réve. De la rive gauche du Bosphore, je voyais Byzance q[ui] était en méme temps Pékin. Un pont sur la Mer Noire q[ui] était une université, formée de 12 bassins qualifies Déficiences. Déficience de la Logique, Déficience de la Grammaire, Déficience des Mathéma-
tiques, etc. Par derriére le port p[ro]prement dit. Puis la mer s’écoulait vers la terre en un courant impétueux
Mai 1932
1OO1
q[ui] se rétrécissait et formait le marché aux poissons. Tout au bout cela finissait sur un tunnel q[ui] donnait accés dans une cité souterraine extrémement brillante et animée dont un ingénieur q[ue] j’ai connu en Chine, Hugonnet, me faisait les honneurs. [200 v] 6 mai. — Un Russe fou nommé Gorguloft lui flanque 5 coups de revolver en criant : pour la | patrie! Claude Farrére arréte l’assassin. Le Président --meurt a 6 h. matin]. Mort le 7?.
Department of State The Under Secretary May 6, 1932 RE CE
Mr. Castle, Mr. MeDermott has another message that the Doétors announce that there is little chance for President Doumer. Les gens ne sont des héros q[ue] quand ils ne peuvent pas faire autrement. Vos teStimonium perhibebitis, quia ab initio mecum eftis? (Joann., XV, 27). Parce q[ue] v[ous] éves avec moi depuis le commencement, c[’est]-a-d[ire] de toute éternité. Idée d’une communauté religieuse q[ui] serait spécialement faite pour san@tifier la nuit dans une grande ville. Le S[aint]-Sacrement serait exposé et les offices et les priéres se succéderaient jusqu’au matin. Les messes 4 partir de minuit. L’église serait ouverte a tous. II pourrait y avoir une équipe de jour et de nuit q[ui] se reléveraient réciproquement, comme les quarts des marins.
Le P. Damien a Molokai pour se confesser obligé de hurler ses péchés a son évéque qui |’écoute du haut de son bateau. Superbe tableau.
1002
Cahier VI
Un Ave Maria dans la bouche d’un enfant malade,
cela suffit 4 dépeupler le Purgatoire. 13-14 [mai]. — Voyage a N[ew] Y[ork]. Ma femme part par le Paris. Messe p[our] Doumer 4 S.-V[incent]de-P[aul]. Déj[euner] avec Charlot. Retour en avion. — Le petit Lindbergh retrouvé assassiné.
La miséricorde de Dieu ot l’on ne puise qu’avec un vase brisé. [zor] V[oir] p. 199. — On dirait q[ue] Dieu met une idée au concours. Par ex[emple] la palme. Chacun apporte son idée. De tous cétés il y a des soumissions,
des propositions. Des ébauches et des chefs-d’ceuyre?. Myriam Harry nous décrit les derniers jours de Jules Lemaitre, frappé de cécité verbale, et q[ui] a ses derniers jours était incapable de lire et d’écrire. Il déchiffrait /e Petit Poucet et envoyait des lettres sans orthographe. Désarroi de ce malheureux qui serrait contre son cceur un Racine (comme Verlaine)?. Il aurait mieux fait d’avoir un Evangile. Ou Je suis Je veux q[ue] vous soyez avec Moi — Mais ov est le Christ sinon sur la croix? 16 mai. Inukai:.
Essai
de la Micheline.
—
Assassinat
de
Les Hsquimaux redoutent Takanakapsaluk, la Grande Femme qui réside au fond de la Mer et commande aux animaux marins. 18 [mai]. — Observatoire. Les cratéres sur le rebord de la Lune. Le Pythagore, le Posidonius, |’Agatharchide — Vega avec son faisceau de rayons bleus. Présence de Dieu — A sa position affirmée relativement a nous, nous répondons par une composition spécifique. Nous le traduisons a livre ouvert. C’est
Mai- Juin 1932
1003
notre réponse q[ui] n[ous] permet de comprendre sa question.
Ipse enim Spiritus testimonium reddit Spiritui nostro quod sumus fulli Dei (Rom., VIII, 16). Organum pulsatum a Spiritu Santo (S. Grégoire de Nazianze)?. In id quod est sibi praesens intelligibile sufficit praesentia rei quolibet modo (I Sent., 111, 4, 5)*. Unde, cum sit una anima in qua potentiae fundantur, unius et ejusdem ad omnium potentiarum cognoscitivarum totaliter anima intendat ad attum unius tur homo ab attu alterius potentiae.
omnes cognoscitivae intentio requiritur attus : et ideo cum potentiae, abStrahi-
Qui adhaeret D{omi\no unus spiritus est (1 Cor., xvi, 7.)8: 26 mai. Le Gouv[erneur] G[énér]al de Etat Libre dIrlande m’invite officiellement au Congrés Eucharistique 20-28 mal. [zor v] Le Gouvferneur] G[énér]al d’Irlande me ptie de séjourner 4 la Vice Royal Lodge. Mais M.
Tardieu
me
refuse
l’autorisation
nécessaire,
en
raison des affaires pressantes, parait-il®. Un vol de chauves-souris, la pipe 4 la bouche.
Pour le baptiser une goutte de rosée dans un pétale de rose. 30 mai. Bruning.
—
Hindenburg
renvoie
le Ml[inist]ére
1@t juin. — Chouchette m’annonce un bébé en janvier.
qu'elle attend
1004
Cahier V1
La nymphe de la philosophie, engloutie au milieu des chévrefeuilles. [202] Ph[ilippe] Bferthelot] pour cause de maladie.
demande
un
congé
Oui tangit montes et fumigant. C’est ce qu’on voit le matin par exemple au lever du soleil quand les vapeurs s’élévent du fond des vallées. N[otre]-S[eigneur] m’a montré qu’il n’y a qu’une seule question dans le monde et cette question est la gloire accidentelle q[ue] Jésus, roi de la Création, doit rapporter par la Création 4 Dieu] son pére... Nos questions d’intérét politique et social q[ui] agitent tant les h[ommes], et les empires croulant les uns sur les autres dans la succession des siécles et n[os] gr[andes] questions scientifiques, tout cela n’est rien q[ue] par la gloire q[ui] en résulte pour Dieu (Journal spirituel de Lucie Christine)?. B les seins ou la croupe — Breast, bosom, bottom, buttocks, womb, — les poumons, Breath, blew, breeze — En frangais : Bouche, baiser, boire, — Bain — Boule — Sein, ce sont les deux seins dans des directions différentes : S. — Woman, le cceur, les seins, le double V (ventre), Vallaitement. Water, Wander. Bases & bond.
Cony[ersation] avec G[igette]. Cette lumiére dans ses yeux. De Paris j’app[rends] q[ue] probablement on ne m/’accordera pas de congé. B[erthelot] malade, sombre, silencieux, diminué. Sauerwein, 31-6.
S. Aug[ustin]. Gen. ad litteram : Nova et Vetera — L’ Ancien et le N[ouveau] Testament.
In Libris Santis intueri oportet quae ibi aeterna intimentur, quae fatta narrentur, quae futura praenuntientur, quae agenda praecipiantur®.
Omnia haec in figuris contingebant illis (I Cor., x, 11).
Juin 1932
1005
Les Anges avant le ciel et la terre — Erat creatura quae motibus incorporeis tempus arguit tempus ipsum creaturam esse.
In signis et temporibus? (Gen.). — Tempus — semper — Le 1° jour. Le cygne noir attend la nuit.
Le cygne blanc, ambassadeur de la neige’. [202 v] Sur la naissance: Non est occultatum os meum a Te quod fectSti in occulto et substantia mea in inferioribus terrae — Imperfettum meum viderunt oculi tui et in libro tuo omnes scribentur, dies formabuntur et nemo in eis mes} CXX XVITE 5/16)%. Le paon, sultan de la forét — ceil vert de Juin. Judas laqueo se suspendit. — J{udas] est la figure de l’Ennemi de Dieu, de celui q[ui] n’a connu, fréquenté, étudié Jésus, que pour machiner sa ruine, pour
porter sur lui un faux témoignage, pour servir de guide a ses ennemis, pour leur indiquer le point et Pheure ov ils trouveront Son Eglise endormie. Faux respect, faux amour de ce misérable (Renan). II s’étrangle avec son propre lacet. Cette ficelle captieuse par lui-méme nouée autour de sa gorge, la voila q[ui] lempéche de vivre et de respirer. Il n’a plus aucun point d’appui, il est suspendu en lair, il est la vittime de son propre poids, il ne dépend plus que de luiméme, il repose sur lui-méme. Il est suspendu, il a sauvegardé définitivement son indépendance, il est loisible 4 qui le pousse de le faire osciller indéfiniment a droite et 4 gauche, il n’a d’attache avec la réalité que le systéme qu’il a lui-méme organisé®. Le dimanche 26 juin départ en auto avec Reine et Renée. Le Champlain. N[ew] Y[ork] 3 jours. Leur départ le 29 sur le Paris*. Je reste seul. M[ount] Kisko, le magnifique épanouissement de juin, roses, chévre-
1006
Cahier VI
feuilles, papillons. Le crapaud q[ui] me parle toute la nuit. Vers a la manfiére] de Verlaine. Steichen et le delphinium 4 mon nom qui s’efforce vers le bleu pur!. A Newport chez Mad[ame] Cornelius Vanderbilt. Discours aux Cincinnati. Le chemin le long de la mer. Le jardin de Madame Mose Taylor le long du Soconock. Boston. Le Musée. Les 9 dragons, les 13 empereurs — 3 étages, le soleil en haut. N{few] Y[ork]. Charlot. Le Plére] Pelletier. Déj[euner] au Herald Tribune — Retour 4 Washington en aéroplane. La maison vide. Un ranch d’étoiles.
[203] Poux rouges dans le ciment. Si je les regardais avec une loupe assez forte, peut-étre que je verrais un omnibus 4 deux étages, bourré d’hommes, de fem-
mes et d’enfants.
S. Clément dans sa seconde Epitre rapporte le propos suivant de N[otre]-S[eigneur] : « Quand ton royaume viendra-t-il ?>— Quand deux seront comme un et ce q[ui] est dehors comme ce q[ui] est dedans, et le male avec la femelle ni male ni femelle. » — S. Clément interpréte Punion des ames, l’assimilation des corps par l’ame, la colére et la concupiscence? — Animus et Anima ? [203 v] Paroles de N[otre]-S[eigneur] 4 S[ainte] Thérése : Cherche-moi en toi —
cherche-toi en moi.
Madame Renard de Nancy. Mad[emois]elle Tamisier. Portrait de Ruysbroeck — La joue autour de l’ceil dilaté du contemplateur,
comme
une espéce de vaste orbite — cratéres.
de sa bouche,
une
fait
juxtaposition de
Le Pasteur d’Hermas parle déja de ’Eglise comme dune femme. Il la décrit comme une tour bAtie de pierres choisies et dont le fondement eét sur les eaux?.
Juillet-Aoht 1932
1007
22 [juillet]. — Visite de Jean Charlot qui fait des études pour mon portrait. Dans la ville de Gawra les fouilles de l’Université de Pennsylvanie retrouvent un sceau datant de 4000 avant le Christ qui représente l’histoire d’Adam et Eve et du serpent. Will —
willow —
widow —
saule —
seule — waste
- — wilde (zigzag). 24 [juillet]. Promenade en auto 4 Pen Mar. Vue sur la forét et sur une immense vallée. Au retour la grande lumiére du soir sur les champs. Il croit étre sobre et il est pauvre : simple et il est plat : classique et il n’est que bourgeois?. Si le sel perd de sa saveur, qui la lui rendra? Le sucre malheureusement ne perd pas la sienne. A Lisieux S. Thérése conservée dans le sirop?. Epanouie comme
un énorme chou.
La parabole de Vivraie. Le bien, le mal, il faut q[ue] tout parvienne a sa maturité. Est-il téméraire d’appliquer cela aux vices, aux passions, aussi bien qu’aux sociétés humaines? n’y a-t-il pas des germes méme mauvais, qu’il serait dangereux d’arracher trop tdt? En tous cas l’Eglise ne s’est jamais posée en réformatrice sociale. Elle n’a jamais attaqué [204] de front les états sociaux, méme I’esclavage, méme la guerre civile. Elle s’est bornée a s’établir en silence au milieu d’elles,
a propager une incompatibilité®. Les 2 vieilles dames a la messe q[ui] causent passionnément comme si elles s’arrachaient littéralement les paroles de la bouche avec les dents, par lambeaux.
29 [juillet]. Bruits de Germain Martin nommé ici. ret aoat, Mettre sur pied d’un seul coup —
Barge.
1008
Cahier VI
Vla le soleil qui tire un coup de canon! Le négre a jambe de bois q[ui] vend des oranges. Verlaine raconte q[ue] Rimbaud exercait sur lui « une séduction démoniaque ». « Encore maintenant je réve de lui toutes les nuits. » Ce qu’il aimait, c’était ses vers. Ce qu’il dit prouve qu’il n’a jamais rien compris 4 sa prose, pas plus q[ue] Mallarmé.
L’aétion est un affaiblissement de la contemplation (Jewpia) — C'est exaétement [204 v] ce q[ue] dit R[imbaud] : L’aétion n’est pas la vie, mais un gachement de quelque chose, un énervement. Départ de W[ashington] en auto le 5 aotit 4a 9 h. avec Jules H[enry]. Nfew] York]. Les Cartier, Monick. Puis Greenwich
chez Fontnouvelle.
64 ans. Le La-
fayette part a midi. Cab[ine] 159. Dimanche 7, La Bl{anchetais], Salis. — Diner entre 2 femmes, arides comme le Sahara et l’Arabie Pétrée. — I] ouvre la bouche si grande que sa personnalité pourrait risquer un pied dehors. L’Arbre du Voyageur L’ye Arbre . toujours vert en vain. i\ . S’émerveille a ses pieds de voir L’homme ignorant qui meurt de faim Sans lui demander a boire. 9 [aott]. Féte de S. J.-B. Vianney — Far away et Priestley = irréalité du soleil 4 S[an] Francisco qui brille et ne chauffe pas. Effet depressing du paysage américain. Hollywood, royaume du make believe. Pays d’illusion. La superbe poire sans saveur. La lune suspendue n’importe comment a un endroit quelconque du ciel comme un haricot lumineux. Ces plaques jaunes des algues sur l’eau bleue. — Clac! on a tourné sans doute quelque chose, le soleil s’est éteint net et la Titane Occidera s’étend luxurieusement sur la mer dans une magnifique robe 4 fleurs rose et verte. — Ce dernier
Aout 1932
1009
chapitre q[ue] je viens de terminer de I’Apocalypse est comme un fleuve qui va vers la mer par une série de biefs,
—
chacune
des
divisions
Méduse, la Vague, comme
toute blonde, échevelée.
—
comme
un
seuil?.
une sorciére a la téte
Pour se regarder il faut
sortir de soi-méme, et dés qu’on en est sorti on n’y rentre plus. — Le P[ére] Pinson me parle de Miss Merrick, infirme, fondatrice de la Société] du Christ |; Child. Pendant longtemps elle a joui de la présence - continuelle et sensible de N[otre]-S[eigneur]. Elle y |) tenonce comme mortification en faveur des pauvres pécheurs. — Le 11, apparition des premiéres mouettes
d’Europe a n{otre] rencontre. — Au cinéma, courses dauto a Indianapolis, spectacle infernal, horrible voix des femmes screeching? comme des grincements Vessieu, trépidation du bateau pendant ce temps q[ui] sautait sous moi. — N[ouvelle]
année
Parmi la neige et la pluie La lune se trouve jolie. L’ année baise 1’autre année A\ travers la vitre glacée?. Le meilleur moyen de se faire écouter, ce n’est pas de parler haut, c’est de parler bas. A l’église de la MadeI[eine] le prétre q[ui] vient charitablement recueillir nos
miettes,
nos
bribes,
nos
petits sous
troués.
— Arrivée au Havre dimanche 14 4 5 h. Paris 7 h. — Le pauvre Victor] Point] s’est suicidé 4 Agay pour sa maitresse Cocéa. — Assomption. Le 16, Léger, le soir Paul Reynaud. [205] 17-18 [aodt]. Vu Bizot, Laboulaye, de nouveau Léger. Récits terrifiants sur B. et sur V. P. — Parti le 19 4 11 h. du sfoir]. Nuit lumineuse. Arrivée le 20 47 h. du matin 2 Ambérieu‘.
24 aott. — Voyage a Grenoble et Herbays chez Vignon. Le suaire du Christ®. Gr[and] ch[ateau]
IOIO
Cahier VI
ayant appartenu aux évéques. Immense salle théatrale. Les 5 vieilles dames. Panne d’auto. Retour dans la nuit. 26 [aotat]. Visite des Riviere. 27. Arrivée de Margotine! et de son fils Tony comp[létemen]t muet. 31 [aot]. Margotine. Ses aventures avec son second mari. Visite au chateau de Grammont. Affreuses nouvelles de la famille. Je fais le catéchisme a Marion Cartier qui veut se faire catholique’.
3 septembre. Magnifique journée. Le matin les rayons du soleil obliques dans la brume. Le soir Granier. Chateau de Grammont. 4. Départ de Margotine et d’Henri. — Je t’appellerai : Quaesita civitas*. Cité fouillée, perquisitionnée.
Pascal. Section X — Ed. Brunschwigg [sic] — Sur les figures. — Preuve des deux Testaments 4 la fois. In veteri Testamento est occultatio novi, in novo manifestatio veteris (S[aint] Aug[ustin])*. Si les proph[éties] ont 2 sens. Preuve par les Rabbins. La nature image de la Grace, elle-méme f[ille] de la Gloire. Q[ue] la Loi était figurative. 2 erreurs : prendre tout littéralement. Prendre tout spirituellement. Double loi, doubles tables, double temple, double captivité. A[ncien] T[estament] figuratif : biens temp[orels] fig[urant] b[iens] spirituels. Autrement : indigne de Dieu — Bien q[ue] leurs disc{ours] ind[iquent] clairement bliens] tempforels] disent q[wils] sont obscurs et q[ue] leur sens ne sera point entendu. On ne les entendra qu’a la fin des temps. Jér[émie], XXX. In novissimo dierum intelligetis ea. Discours contraires et q[ui] se détruisent q[uel]q[ue]f[ois] dans le méme chapitre. Tout ce qui_ne va point a la charité est figure. L’ unique objet de l’Ecr\iture| eft la charité. Chiffre. Contrai[res] dans le sens littér[al], indiquent qu’il faut chercher autre
chose.
Dés
qu’on
a ouvert
ce
secret,
il est
impossible de ne pas le voir. La lettre tue. P[ascal] entend l’Ecr[iture], il faut avoir un sens dans lequel
Aodt-Septembre
1932
IO1I
tous les passages contraires s’accordent. — Non seul[ement] q[uel]q[ues]-uns mars tous. Le V. T. est un chiftre}. In senettute uberi?.
[205 v] 4 sept[embre]. Départ d’ Henri et de M[argotine]. Uz sis longaevus super terram — Non seulement de maniére 4 nous solidariser avec toute la longue chaine de nos ancétres, mais aussi avec tous ceux qui nous
succéderont.
Generatio rettorum benedicetur.
Afin que
d’un bout a lautre, de la création au Jugement,
il
n’y ait pas d’obstacle ni de détour, que rien n’empéche la bénédiction de passer et que notre] existence soit en quelque sorte coextensive avec toute Vhistoire humaine. 8 [septembre]. Visite de M. Vignon. Saisissantes photos du Christ sur le Suaire de Turin. Les traces des coups, des clous, de la couronne d’épine, ce sang quia coulé pour nous. Ce corps soigneusement flagellé du sommet 4 la base a planta pedis usque ad verticem. Cette _ figure indiciblement majestueuse. Comment ai-je pu regarder tout cela autrement qu’a genoux? — Le soir arrivée de Massignon. Ils m’ont
proyoqué
en ces choses
point des dieux (Is., LXIX,
q[ui] ne sont
1)°*.
12-13 sept[embre]. Voyage a Aix pour voir D[arius] M[ilhaud]. La musique de /’Axnlonce] légére, spirituelle,
sonore,
aérienne,
diaphane*.
Avignon
par
| Cavaillon au Fort Sf{aint]-André, chez M[ademois]elle | Hflsa] K[oeberlé]. Exp[érience] de spiritisme. Qui _ est la? Indéfiniment méme réponse : Mort René Peyre. Comme qui dirait Commandant ou Doéteur. Avec des recherches on apprend que c’est un ancien officier de la L[égion] Eftrangére] — Vu Camille — Le Cardonnel presque aveugle toujours le méme air enfantin et naivement étonné. Retour par Valence.
1012
Cahier VI
S[aint]-Marcellin. Superbe coucher de soleil. L’aurore toute nue se léve dans un chiffonnement de feuilles de rose, Dans le ciel une éclipse de lune q[ui] ressemble a Vexécution de Gorguloff.
Dimanche 18 sept[embre]. Départ de Br[angues]. M[esse] a S[aint]-V[ictor]. Déj[euner] a Paray-le-
Mfonial]. Les Clarisses. La Loire. Sancerre. Cosne. Montargis. Paris 4 10 h. H[6tel] Crillon. Le lendemain Berthelot] malade. Louise. Poéme de Gaston V. [206] 24 [septembre]. Visite de Madame Psichari. La famille d’Ernest Renan. J’écris la préface quelle me demande?.
25 [septembre]. En auto avec Pierre et Marion a Beauvais, la cathédrale d’argent, Rouen — cath[édrale] vitraux — affreux tableaux du Musée — Jumiéges, les
ruines romanes, le pignon et le cintre A et 2. Vis[ite] de G.L. le 26. 28. Fiangailles de Pierre et de Marion?. Embarqué le 30 s[eptembre] a bord du Paris, Départ a 1h. Blum, Seligman, Goschman. Appf[arte-
men]t Etoile.
Gig[ette] rencontre L. 29. Visions diab[oliques]. Si vous avez la foi, vous pouvez dire 4 cette monta\
gene: Va-t’en et jette-toi dans la mer, et elle le fera.
Tout ce q[ue] v[ous] d{eman]dez priére, vous
avec foi dans la
le recevrez.
Paroles étonnantes et qui,au premier abord, semblent en contradiction non seulement avec les faits, mais avec
Pordre légitime? de la nature et de la Providence. Nous ne comprenons pas en effet comment le seul fait de croire en la toute-puissance de Dieu suffit en quelque sorte 4 en démunir 4 notre profit, en sorte que ce que Lui-méme ne juge pas 4 propos de faire, la foi nous suffise pour l’opérer a sa place et que la toute-puissance ne soit plus au service de la toute-connaissance,
mais au contraire d’un étre qui n’est qu ignorance,
Odlobre
1932
1013
imbécillité et péché. I] nous faut donc évidemment serrer ce texte de plus prés. Avoir la Foi, c’est croire en un Dieu qui peut tout et qui veut tout dans lordre de notre bien. Dans Yexemple dont se sert N[otre]-S[eigneur], il n’y a pas adistinguer un double semps, c[’est]-a-d[ire] un acte de foi en la toute-p[uissance] de Dieu, puis cela fait! un ordre que nous donnons nous-mémes 4 la nature substituant notre propre volonté au fait et a la loi. ~C’est lui seul qui agit 4 notre priére. Notre réle se borne a faire une proposition, nous lui exposons, comme il nous y engage, un désir, nous appelons son attention, nous introduisons le fait que nous désirons dans le domaine direét de sa toute-puis[sance]. Mais de méme qu’un instrument ne peut agir que conformément a sa nature et qu’on ne peut demander a un soldat ce qui est le propre d’un peintre, Dieu ne peut agir qu’en Dieu, c[’est]-a-dlire] pour sa plus grande gloire et pour le plus grand bien de l’ensemble de ses créatures. Dieu donc est toujours prét a accorder ce q[ue] n[ous] demandons, mais attention! ce q[ue] nfous] demandons en Son nom, c[’est|-a-d[ire], non seulement au nom de Sa Toute-P[uissance], mais au nom de Sa Toute Science et de Sa Toute Bonteé. Autrement nous n’avons pas la Foi, c[’est]-a-[dire] nous placons n[otre] confiance en autre ch[ose] q[ue] les termes par lesquels Dieu s’est défini! [206 v] Notre priére établit un rapport dire entre la Bonté de Dieu et tel objet que nous désirons. Elle les met en communication, en rapport. Quelque chose a passé et s’est passé. Le regard de Dieu se pose sur lobjet q[ue] nfous] Lui indiquons?. Elle lui permet de passer. Elle permet 4 l’amour de passer par le chemin de la causalité. Dieu épouse notre volonté dans la mesure ot nous épousons la sienne, c[’est]-a-d[ire] ot nous donnons la préférence aux motifs qui Le font Lui-méme agir. Autrement c’est pour nous d’une certaine maniére « assumer le nom de Dieu en vain» (comme le font les magiciens). Dieu nous exauce dans la mesure ot c’est Lui-méme en nous qui d[eman]de. C’est 4 Son propre désir, formulé par nous, qu’Il fait droit. Toute
IOI4
Cahier VI
priére est un essai d’adaptation, d’ajustement d’une volonté particuliére sur Sa Volonté générale, l’adhésion est la mesure de lefficacité. « La charité peut tout» dit S. Paul. Toutes les priéres accordées. Mais non pas celles q[ui] seraient nuisibles 4 nous-mémes ou aux prochains. Nous ne savons pas nous-mémes ce que n[ous] d[eman]dons, dit N[otre]-S[eigneur] a S. Jean et S. Jacques. Mais Dieu sait ce q[ue] n[ous] dfeman]dons sans le savoir et Il nous
l’accorde,
—
souvent
sans
q[ue] n[ous] le sachions. It is only in revealed religion that mistranslation improves the senses (Somerset Maugham, Of human bondage)'. — Pas du tout, cela arrive souvent avec les poétes, ou méme avec les auteurs les plus prosaiques. C’est comme un paysage qui prend des aspects différents suivant la position dans laquelle vous les regardez vous-mémes. Les éléments dont il est composé sont susceptibles de différentes interprétations.
Pour une histoire fantastique : la pleine lune a minuit dans un chateau en ruines q[ui] marque une heure fantaisiste sur le cadran solaire.
Puyn — Le psi c’est la lampe de Psyché allumée — ou le souffle q[ui] pénétre la capacité intérieure. — v, cest le vase offert et tendu. — x, c’est lesprit q[ui] regoit des informations des 4 points cardinaux, le point placé au centre des 2 lignes entrecroisées. S. André crucifié sur Pinitiale du Christ. — n, la
cavité et le rayon q[ui] pénétre. Par les narines n[ous] attirons l’esprit. Dieu insuffle dans les narines de I’h[omme] la vie spirituelle, l’Ame. C’est Podorat q[ui] n[ous] permet d’apprécier l’esprit. Au centre est le gout. Gwstate et videte quoniam suavis est Diomi\nus?.
[207] Les 5 sens. Les 5 mystéres du Rosaire. Annonciation
; odorat.
Visitation
: ouie.
Naissance
: vue,
Odfobre 1932
1015
_ Présentation : toucher. Invention : Sagesse. Pourquoi me chercher au dehors? Nowne sunt Patris mei oportet Me esse ?
sciebatis in his quae
Arrivée 4 N[ew] Y[ork] le 6 [o&obre] a 4 h. Les Cartier. A Washington le 7 en aéroplane, 5 h.
Voici le temps venu ot I’on peut doubler le plaisir dun bain froid simplement en y ajoutant de l’eau _ chaude. La maternité de Marie. Elle nous refait. Au dehors
par la forme forma Ch[riff|7. A Vintérieur le sang et le lait. Elle nous
recrée.
Cheveux : ceux de Samson ceux de Madeleine.
_
—
ceux
d’Absalon
—
18 [octobre]. Visite 4 Miss Mary Merrick a Ellicot City, fondatrice de ’CEuvre du Christ Child. Paralysie, la machoire soutenue par une mentonniére, l’air [gris], calme et saint.
19
[octobre]. Voyage a Albany par bateau. Le projec-
teur sur le mur des feuillages bariolés, en faisant ressortir
_ tous les détails avec une intensité magique. Fort Orange Club. Visite au Musée. Fossiles, poissons dévoniens, | crustacés, tout cela admirablement construit. Sque| lette d’un mammouth enfoui dans une fondriére d’ot il _ tYavait pu se dégager. Musée indien. Wampuns. Recu un degré le soir en méme temps q[ue] M. Bennett, Premier Ministre du Canada. Le 22, retour 4 N[ew] Y[ork] chez les Cartier. Madame de Faramond. Marion Cartier confirmée par Mgr Flynn, évéque de Nevers?. Diner chez Henri C = 15E 96 Rue — Pavensted | 10H 64th st[reet]. Retour en avion par un temps superbe. Le disque rouge du soleil devant nous. Serruys. Le 22 au soir coup de t[é]l[é]ph[one] de H de N[ew] Y[ork] de Henri [szc]. Ch. se retire. Une de ces tétes solidement ajustées dont on pense :
Comme ¢a ferme bien!
1016
Cahier VI
Comme les plaques photographiques, mon génie se développe dans l’obscurité! Bienheureux
assombrissement
du
samedi
soir.
— Dimanche 23. [207 v] Promenade le long du Potomac au milieu de masses énormes d’écarlate.
d’or, de bronze et
La tempe = Etymologie = sempus ? templum? Louise. On trouve qu’elle ressemble 4 Chopin’. Virga tua et baculus tuus ipsa me consolata sunt? — Virga, c’est la baguette souple et cinglante qui s’applique a la chair comme une vipére, c’est la peine morale — Le baton grossier dont on décharge des coups sur la croupe des bétes de somme pour les ice marcher droit, c’est la peine physique. Taper comme un sourd.
Le mammouth : a quoi pouvait servir sa trompe dans un climat arctique?®?
Les grandes porcelaines chinoises fabriquées 4 Ching tochen, détruit par les Tai pings. Le pape s’éléve avec véhémence contre l’art moderne et ne trouve rien de pire pour le blamer que de le comparer aux productions du Moyen Age! C’est rassurant! On ne voit pas q[{ue] lart de S.-Sulpice ait jamais été blamé. Pourquoi les prétres ont-ils si peu de gout!? [208] 30 o[obre]. Féte du Christ Roi. Rex es Tu? Fiece Rex tuus venit super pullum asinae. Regnum meum non est de hoc mundo’, Il n’en vient pas, il ne le concerne
pas, similitude du R[oyaume] de Dieu dans Matth[ieu] : un grain de moutarde, du levain, un trésor caché, un négociant, un filet jeté dans la mer, un roi q[ui] fait ses comptes, un viticulteur, des enfants, un roi q[ui] fait les noces 4 son fils, 10 vierges.
Odfobre-Novembre Porphyre symbolique —— Nymphes.
1932
1O17
consacre tout un traité 4 l’explication d’un chant d’Homére, De J’antre des
A VPombre de S[aint]-Merry Mollet et Pique-Vinaigre.
les rues Jean-Pain-
Tres imbris torti radios?. A. E. I. O. U. Aastriae eft imperare orbi universo®! et comment!
6 nov[embre]. A la Librairie du Congrés, au milieu des négres. Je suis étonné de ces physionomies fortes et intelligentes. (Celui prés de moi q[ui] écrivait avec la main gauche.) | Dixisti mibi, Diomi|ne, voce forti, in aurem interiorem quod nullius peccatum perturbat ordinem imperii tui vel in primo vel in imo (S. Augustin], Conf[essions], pole a XL).
8 nov[embre]. Election présidentielle. Arrivée du Paris avec les deux Reine®. Départ de Jules Henry. 9 [novembre]. Hoover englouti dans un « /ands/ide »® démocratique. Arrivée de ma f[emme] et de Reine. 11. Je commence la négociation des dettes. Remise d’une note a Stimson.
Et lumen oculorum meorum et ipsum non est mecum (Ouoniam Tu mecum es)’. Mes yeux ne me servent plus a voir 4 cause de mon
obscurcissement intérieur, ils
ne me conférent plus de regard. 12 [novembre]. Baltimore. Les larmes ont été mon régime jour et nuit tandis jentends cette question poignante qui] ne cesse e m’étre adressée : Ot est ton Dieu? (Ps. XLI, 4).
Dans le quartier négre une affiche lumineuse vio-
|
\ I
1018
Cahier VI
lemment encadrée de rouge et de bleu : Complete Funeral. $ 60. La caraétéristique de la pensée allemande est qu’elle se passe de définitions. — 2 lettres 4 Duhamel. Parabole}. Dans ma bible je trouve le passage suivant de I’Eccl{ésiaste], III, 14, souligné par mon gr[and]-pére [sec] S[ainte]-M[arie]-P[errin] avec la mention: esthétique. Didici quod omnia [208 v] opera q[uae] fecit Di eus] perseverent in perpetuum : non possumus eis quidquam addere, nec es g|uae| fecit Deus] ut timeatur?. 19-20 [novembre]. Voyage a N[ew] Y[ork], Tzes. Columbia. Hunter College (décoration Gray). Charlot, Adam et Eve, leurs deux pieds sur le serpent. Eve, la téte florissant 4 partir du ventre. — Moi: Idée du sommeil d’Adam : crucifié au milieu des grappes, une plaie énorme sous le cceur, chair, organes, cdtes 4 nu, une
Eve transparente en sortant comme une larme, seul le cceur rouge et les autres organes commengant a se dessiner.
Les poissons lumineux des grandes profondeurs. Q[uel]q[ues-Juns aveugles et ayant développé un systéme subtil de palpes et de narines. D’autres lumineux, décorés de sabords et de projecteurs, trainant des cordons de lampes. D’autres munis sur le front d’une canne a péche avec amorce et hamecon, ’hamegon décoré de lampes pour attirer le gibier. Contre Darwin. Ainsi l’étre animé dans un milieu obscur, soit lui obéit en renongant aux yeux, soit réagit au contraire en les développant et en créant de la lumiére. L’influence du milieu se traduit le plus souvent non pas par une obéissance mais par une réaction. Les s[avants] ne veulent pas tenir compte de ce principe vigoureux chez tous les étres d’invention et d’autonomie, de réponse a la parole créatrice®. A propos de la Fliancée] du Cant[ique] : in cellam
Novembre 1932
1019
vinariam — poculum vini conditi} — a remarquer q[ue] la premiére apparition publique de Nfotre]-S[eigneur] est 4 un mariage a Cana, par ou est figurée son union avec la nature humaine. L’eau est divinement changée en vin et le second vin est meilleur q[ue] le premier. La grosse maison bourgeoise bien chaude et toute pleine d’une odeur de bonne nourriture. Un ange prend les priéres avec une pelle (les grains de chapelets) [209] et les jette dans un tamis. Tout ce qui n’est pas retenu devient brouillard et sable du désert (Louise). 23 [novembre]. — Remise par Stimson 4 Woodley de la réponse sur les dettes.
L. malade. Adhérence du cecum de 10 cm. Explication
de
la connaissance
sur une longueur extatique
par
le
Dr Binet-Sanglé : Les auto-intoxications du jetine, de Vasphyxie, de la fatigue, de la puberté, de la continence,
etc., peuvent faire apparaitre la perceptivité directe de la pensée en faisant régresser les neurones amiboide. — Voila.
vers |’état
27 nov[embre]. — 1° dim[anche] del’ Avent. Visite de Marion et H[enri]. Toujours les dettes. Dans les Antilles les petites tles Almost et Nonsuch.
Although I am Picci IN OX).
merry —
I have much savoir feery?!
Une jolie idée dans un énorme roman comme un petit poisson tout seul au milieu du Lac Michigan. Une toute petite idée dans de l’eau claire’. Vocf[ation] de S. André. Quem quaeritis? — mi\ne, ubi habitas ? — Venite et videte.
D[o-
1022
Cahier VI
Ou la compresse, ’humidité maintenue par HI couches superposées. Au moment du dernier siége Jérusalem divisée en trois parties : Elzéar tenant le Temple; Simon, la Ville haute et Jean de Giocala la ville basse. . Le 8 [décembre] 4 6 h. Stimson me remet la réponse amér[icaine] a la 2€ note fr[anc]aise.
Note [4] la disproportion. Congratulamini mihi omnes q|ui| diligitis D\omi|\num, quia cum essem parvula, placui Altissimo et de meis visceribus genui Deum et hominem. Si quis et parvulus [210 v| veniat ad me. Et insipientibus locuta ef : Venite, comedite panem meum et bibite vinum quod miscui vobis (Prov., chap. VIII et TX). S. Thomas
patron non
seulement
de ceux q[ui]
doutent, mais de ceux q[ui] sont toujours en retard.
La souillure totale q[ui] du corps gagne l’esprit : Fili Mempheos conStupraverunt te usque ad verticem (Jét., I, 16)%,
Tenebrae et palpatio fattae sunt super speluncas (Is., XXXII, 14) (cf. Pauscultation des cavernes)*. L’Enfant Prodigue. Son pére lui remet non seulement
un anneau
mais des souliers aux pieds.
11 [décembre]. Neige. Verglas. 11 [décembre]. A Woodley 9 h. St[imson] me remet la 3® note anglaise et sa réponse. Au beau milieu de ce sec et impie xvuir® siécle, dans une Angleterre protestante et libre-penseuse, dans une inspiration céleste Handel‘ contemporain de Voltaire écrit The Messiah, en 21 jours’. Il me semblait, dit-il, que je voyais le ciel ouvert et Dieu
Lui-méme devant moi (1742).
Décembre
1932
1023
Dans le ciel les anges 4 corps perdu s’abandonnent A PAlleluia! 14 [décembre] au matin. Chute du Cabinet Herriot. | Défaut de la France}. Il faut se voir pour s’entendre.
15 [décembre]. Je porte 4 Stimson le défaut de la ~ France. 16. Négociations. 17. Gr[ande] neige.
L’eeil est un miroir actif et intelligent. Un de ces sommeils
d’ot: lon sort moins
comme
Wun anéantissement que d’une négociation laborieuse. ' S[aint] Th[omas] le premier q[ui] ait pénétré du | doigt le Ceeur Divin — Epfitre] — Lapis angularis | Chirist\us in quo omnis aedificatio construtia crescit in templum santtum in D{omi|no in quo et vos coaedificamini in habitaculum Det in Spiritu’. On dirait qu’on voit un _magon qui dispose les pierres et les briques l'une sur Yautre, le tout couronné par le Seigneur et |’Esprit. [211] Derniéres paroles de R. B.*. Tout s’en va mais | Jésus vient.
Monsieur Vertige qui habite rue Tournefort. Pecus — pecunia. Colin-maillard. Il s’apercoit q[ue] tous les vivants sont partis et qu’il n’y a plus que des morts pour lui toucher la main. 27-29 [décembre]. Voyage a N[{ew] Y{ork]. Radio City. Collection Bache. Le Botticelli 4 décor géométrique. Le petit Vermeer (cadre — chaise). Le Crivelli —la mouche et ’ombre de la mouche. Charlot, ses nouvelles peintures. Négociations.
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Notes
AVERTISSEMENT Les intentions qui nous ont guidés dans I’établissement de ces notes ayant été précisées en téte de ce volume, il nous reste a donner quelques indications techniques : Présentation du texte : /a disposition (séparation des notes, paragraphes, ponttuation...) a été maintenue telle que dans 1’original. La pagination des « Cahiers» a été indiquée, dans le texte, entre crochets droits. Seules certaines conventions ont été utilisées: italique pour les textes en langue étrangére, pour les titres, etc. Interventions des éditeurs : toute intervention de notre part (mot complété, letture conjecturale...) est signalée par des crochets droits. Couputes : d’assex rares coupures s’imposaient dans ce texte, toutes sont signalées par [...] ou par une ligne de points lorsqu’un paragraphe entier a été supprimé. Une note indique alors l’importance exatle du texte supprimé et les raisons de sa suppression. Traductions : nous avons tenu a traduire tous les textes cites dans Ze Journal. Pour les terctes souvent cités nous avons utilisées : Fillion, la Sainte Bible, Letouzey e¢ Ané, 8 vol.;
P. Hugueny, Bréviaire romain, Labergerie, Paris; Feder, Missel, Mame.
Pour tous les autres textes nous avons indiqué l’auteur de la traduétion. Nous avons traduit, ou fait traduire, ceux qui ne com portent aucune indication.
Abréviations : i/ nous est arrivé de simplifier certains titres longs de Claudel, d’une maniére toujours claire, par exemple : Loir-et-Cher, pour Conversations dans le Loir-et-Cher; Isaie, pour /’Evangile d’Isaie; Apocalypse, pour Paul Claudel interroge l’Apocalypse... Nous avons donné les références aux auvres de Claudel dans : O. C. : Guvres completes, Gallimard; Po. : GBuvre poétique, Bibliotheque de la Pléiade, éd. de 1967,
préface de Stanislas Fumet, textes établis et annotés par Jacques Petit ; Pr. : CGBuyvres en ptose, Bibliotheque de la Pleiade, préface de Gaétan Picon, textes établis par Jacques Petit et Charles Galpérine ;
Th. I ef Th. Il : Théattre, Bibliotheque de la Pleiade, textes et notices établis par Jacques Madaule et Jacques Petit, 1: 1968; 11: 1965;
Cah. Cl. I... Cahiers Claudel I... Editions Gallimard.
a
CAHIER
I
1904
Page 3. 1. Ces trois lignes sont écrites au bas d’une page blanche, au verso du premier feuillet. Elles font allusion 4 celle qui fut Vhéroine de Partage de Midi. La troisitme évidemment et peutétre la premiére paraissent d’une autre encre, postérieure. — Le 5 décembre 1905, Claudel écrita 4 Gide : « Je vous envoie un cahier de citations que j’ai prises dans les Kcritures et dans les Péres au moment de ma plus grande détresse morale» (p. 55). Cf. Odes, III (Po., p. 245) : « Et voici que comme quelqu’un qui se détourne, tu m/’as trahi, tu n’es plus nulle part, 6 rose! /
Rose, je ne verrai plus votre visage en cette vie! » Voit également Mémoires; P- 157, 158, 166, 180, 184-189.
2. Verset 8 : « Fils de Phomme, perce le mur. Et lorsque j’eus percé le mur, une porte apparut. » — 9 : « Et il me dit : “Entre et vois les abominations qu’ils font ici”. » — 10: « J’entrai et je regardai; et voici que des images de reptiles et d’animaux, abomination et toutes les idoles de la maison d’Israél, étaient peintes sur la muraille tout autour. » Sur le théme de la muraille et de la bréche (ou de la porte), voir Francois Varillon, « Repéres pour l’étude du symbolisme de la porte dans l’ceuvre de Paul Claudel », Cah. C/. I, p. 185-220. — Cf. Annonce (Th. II, p. 14) : « Mon office est [...] de fendre la paroi»; /e Pain dur (ibid., p. 474): «Il y a moyen de rompre la patoi»; Positions, 11 (O. C., XV, p. 265) : « Dieu ne cesse de nous ausculter. Et toujours, partout, il ne rencontre que cette paroi dure et inerte. » Isaie (O. C., XXIV, p. 18) : « L’ouverture d’une fenétre dans notre paroi, l’établissement d’un grand courant d’air qui chasse l’égoisme, l’avarice, la mollesse, toutes les complications de la vanité et de Pintérét », etc. — Voir également Henri Mondor, Claudel plus intime, p. 12 et 54, et
|
1030
Cahier I
Jacques Petit, « A propos d’une fantaisie du poéte : l’escargot, la coquille » (Revue des Lettres modernes, 1966/2). 3. L’ouvrage communément appelé ainsi a pour titre Expositio in librum Job, sive Moralium libri XXXV. La plupatt des textes bibliques cités ici par Claudel y ont été puisés (une centaine); nous en donnerons les références dans |’édition de Migne,
P.
L.
(Patrologie
latine).
Pour
Ezéchiel,
VIII,
8
P. L., LX XVI, 352. — Cf. Jammes, p. 53, 13 aout 1905 : « Je vous ai copié [...] de trés beaux passages de S. Grégoire et quelques autres que j’ai trouvés dans mon cahier de citations. » 4. Vulgate : computrescet. Claudel commente ainsi ce texte dans Isate (O. C., XXIV, p. 39) : « Le joug dont on voulait nous accabler, Dieu ne se donne pas la peine de le rompte, il le dissout... »» Trad. : « Et ce joug pourtira par Vhuile... » 5. Trad. : « Je les ai tirés par des cordes humaines, par les liens de amour. » 6. PLL, LXSeviy pr 116) Threny LV, 333 Les lamiesreliess
mémes ont découvert leurs mamelles, allaité leurs petits. » 7. Cf. Riviere, p. 54 : « Je trouve dans mon cahier quelques vetsets que je vous envoie : voir Job, chap. XXX, Lamentations de l’Eglise de nos jours. » En 1905, Claudel avait envoyé 4 Gide le présent cahier; celui-ci a copié quelques passages des textes cités : voit Gide, p. 262; noter un peu plus loin la variante : sangsues au lieu de rongeurs. — Peut-étre est-il nécessaire de rappeler que la loi interdisant lenseignement aux congtégations a été votée le 7 juillet 1904. 8. Job, XXX, 1: « Et maintenant je sers de jouet 4 de plus jeunes que moi, dont je ne daignais pas mettre les péres avec les chiens de mon troupeau.» Claudel avait écrit par distraction gregibus, raturé. Rétablir gregis mei et non meae. 9. Sous « théories » un mot raturé, « hérésies » semble-t-il.
Page 4.
1. P. 3-9 du manusctrit : le texte de Job est écrit sur la partie droite de chaque page, le commentaire sur la partie gauche. Les notes de Claudel sont inspirées du commentaire de S. Grégoire. a
ileteMor:s
XxCY
Img) retivr Gi, aap Le I NOX.Vilemnes 5046
Cf. Odes, V (Po., p. 291): « Nous ne sommes
ee
pas des fils de
chiens », et pour ces critiques, Art poétique et les commentaites bibliques, en particulier Apocalypse, O. C., XXV. 2. Job, XXX, 2: «Car la force de leurs mains ne m’eit
servi de rien et ils étaient méme regardés comme indignes de la vie; desséchés par la faim et la pauvreté, ils rongeaient le désert, défigurés par Pafflition et la misére. » 3. XXX, 3. Cf. Mor., ibid., col. 149 : « Ils mangeaient l’herbe,
Septembre-Novembre 1904
1031
et l’écorce des arbres, et se nourrissaient de la racine du genévtier.» « Les herbes désignent les paroles banales, l’écorce _ des arbres ce qu’il y a de superficiel dans les discours des Péres. [...] Ils se nourrissent d’herbes et de racines, car c’est de choses basses ou superficielles que vivent les esprits orgueilleux. » Col. 150 : « Que désigne la racine du genét, sinon l’avarice qui produit les épines que sont tous les péchés?» 4. XXX, 5: «Ils allaient ravir ces aliments dans les vallées et, quand ils les découvraient, ils y accouraient avec de grands cris. » —
Pour le début du commentaire,
voir Mor., ibid., col. 150 :
--« Tout ce quwils trouvent, ils s’efforcent de le faire connaitte, pat amout de la louange. » Page 5. 1. XXX, 6: «Ils habitaient dans les creux des torrents, dans les cavernes de la terre ou sut le gravier. » — Mor., ibid., col. 151 : « Les torrents ce sont les cours d’eau ot coulent les eaux en hiver ét qui a des époques déterminées sont a sec. Aussi désigne-t-on a bon droit pat ce mot les inventeuts de fausses doéttines : la chaleur d’un amour froid, compatable a l’engourdissement de Phiver, les fait croitre, ils n’ont pas un courts régulier, mais sous les répliques des catholiques ils dispataissent comme se desséche le torrent sous le soleil d’été. Dans les grottes habitent les hérétiques, parce que la plupart cachent leur erreur en préchant secrétement; ainsi ils ne se révelent pas aux gens savants et prudents et attitent avec plus de force les ignorants. [...] Les graviers, ce sont ces toutes petites pierres que roule l’eau des fleuves. Les maittes de fausses croyances habitent sur le gravier, patce qu’ils entrainent les esprits que nulle force ne rend stables et que le courts des erreuts conduit toujours de-ci de-la. » 2. XXX, 7:i. En réalité, LX VII, rr : « Vos animaux y habiteront. » 2. Mor., lib. XX XV, cap. xvi, n° 42; P. L., ibid., 773 : « Le nombre dix est parfait [...] car [...] selon que le dit la Vérité, les ouvriets de la vigne regoivent pour salaire un denier [dix as]. »
3. D’aprés les LXX, la Vulgate et S. Grégoire (Mor., P. L., 774). D’aprés ’hébreu : Tourterelle, Cinnamone, Corne 4 fard.
4. Mémoires et relations politiques, du baron de Vitrolles, Paris, Charpentier, 1884, 3 vol., t. III, p. 29 (a propos du refus de Vitrolles de lire en russe a l’empereur Alexandre [1815] la
lettre de Philippe a Aristote). 5. Ps. XXIV, 16: « Car je suis délaissé et pauvre.» — Cantique, II, 2: « Comme le lis entre les épines, telle est ma bienaimée parmi les jeunes filles. » 6. Vitrolles, op. cét., t. I, p. 206. Claudel cite de mémoire
« Je n’essayais
:
pas de faire comprendre [au comte d’Artois,
mats 1814] qu’on ne s’appuie que sur ce qui peut résister. » — La le&ture des Mémoires de Vitrolles pourrait étre la source la plus lointaine de /’Osage ; elle atteste en tout cas lintérét porté par Claudel 4 cette période de l’histoire; émigré, rallié ensuite a
VEmpire, Vitrolles participa aux manceuvres et négociations qui préparérent la ReStauration, sous laquelle il joua un certain rdle politique. 7. « Je suis un mur, et mes mamelles sont comme une tour, depuis que j’ai paru devant lui, comme ayant trouvé la paix. » 8. Cantique, VIII, 12 : « Ma vigne est devant moi. »
1052
Cahier I LOD)
Page 24. 1. La date du 14 février marque la fin des notes prises en matge des Moralia. Rien n’indique si Claudel a lu l’ceuvre entiére, ou seulement les commentaires sur les chapitres XX XXLII du Livre de Job. Il est sir du moins qu’il a lu ceux-ci de facon suivie et la plume a la main. — Le 13 aotit 1905, par exemple, il en parle a Frizeau; de méme a Riviere... Claudel a omis d’indiquer le changement d’année que nous situons arbitrairement ici, a la premiére mention de année 1905. 2. Confessions, X, 40. Rétablir : colligimur et redigimur ; trad. P. de Labriolle (Budé) : « La continence nous recompose, elle nous faméne a cette unité que nous avons perdue en nous
épatpillant. » 3. Ibid. Trad. : « Donnez-moi ce que vous commandez et commandez ce que vous voulez. » 4. Ibid., 65. Trad. : « Patfois vous m’initiez a une étrange plénitude intime de sentiment qui, si elle atteignait en moi son plus haut degré, deviendrait un je ne sais quoi qui n’aurait rien de commun avec cette vie. » 5. Ibid., 66. Texte cité dans une lettre du 23 mai 1907 (Riviere, p. 65). Trad.
: « Et moi dans mon
avarice, je voulais ne pas
vous petdre, mais je voulais aussi posséder en méme temps que vous le mensonge; ainsi personne ne veut mentir 4 ce point de ne plus savoir lui-méme ce qui est vrai.» 6. En 1905, le 24 février était le vendredi avant la Sexagésime. Or le samedi 25 février 1906, Claudel écrit 4 Suarés : « J’étais hier dans ma maison de campagne avec la nuit pleine d’horreur et de misére au dehots. Et c’était juste anniversaire de cette affreuse nuit de la Sexagésime 4 Fou-Tchéou, il y a un an. Je songeais en récitant mon chapelet au Christ venant sur la terre pat un acte ineffable de sa tendtesse, 4 Jésus suant le sang, flagellé, couronné d’épines. Avec quelle vivacité je sentais le gtand sérieux de tout cela, l’ineffable bonté du Sauveur, ses souffrances, sa simplicité, et de mon cdté la faiblesse, la vanité, la frivolité, les péchés honteux » (Svarés, p. 77). Les textes cités de S. Augustin font écho 4 cette crise de février 1905. — Voir infra (p. 821) les vestiges du poéme écrit pendant la nuit de la Sexagésime 1905, dont le manuscrit fut bralé dans le tremblement de terre 4 Tokyo en 1923. — Sous cette note, Claudel a tracé un trait horizontal sur toute la largeut de la page. 7. Eaux-Chaudes, station balnéaite 4 6 kilométres de Laruns, dans les Basses-Pyténées. Claudel s’y est rendu au début de
Feévrier- Aott 1905
1053
juillet, apres une semaine 4 Orthez, avec Jammes et Frizeau, puis de nouveau 4 la fin du méme mois, aprés un bref séjour a Paris. Voir Chaigne, Vie, p. 91. 8. S. Augustin, In Joannis Evangelium traétatus XXVII (P. L., XXXYV, col. 1617). A propos de Jean, VI, 64: « C’est esprit qui vivifie, la chair ne sert de rien», S. Augustin écrit : « Elle ne sett de rien, mais au sens ot V’entendaient les Juifs; car ils entendent par chair, la chair a l’état de corps dépecé ou telle qu’on la vend
au marché,
et non
animée
par l’esprit » (non
quomodo spiritu vegetatur ). — Cf. le Soulier de Satin, U1, 10 (Th. I,
. p. 837) : « PROUHEZE. — Bient6t, je n’aurai plus de corps. CAMILLE. — Mais votre religion dit que vous conservez avec vous tout ce qu'il faut pour le revégéter. » — Ces problémes préoccuperont beaucoup Claudel au moment ot il écrit Un Poéte regarde la croix. On sait aussi que dans Positions est repris un texte sur « la physique de l’Eucharistie », écrit en 1910. 9. Ce texte que Claudel attribue 4 Théodore de Khota, se trouve dans le Pratum spirituale de Jean Moschus, chap. ccxv1i (P. L., LX XIV, col. 238). Voit Pédition frangaise par M.-J. Rouét de Journel (éd. du Cerf, coll. Sources chrétiennes, 1946), p. 291 : « Un moine disait : “Mes enfants, le sel vient de l’eau, et s’il est en contaét avec l’eau il se dissout et disparait. De méme le moine vient de la femme, et s’il approche d’une femme il se dissout et finit évidemment par n’étre plus un moine’’.» Le Pré spirituel a été également édité par le Club du livre chrétien en 1960 (trad.
Rouét de Journel). Les Vitae Patrum, dont le Pratum spirituale eét le livre X, ont été largement diffusées a toutes les €poques et citées dans les manuels d’ascétique. L’attribution a Théodore de Khora vient sans doute d’un de ses ouvtages, reste de la bibliothéque du grand-oncle de Claudel, a Villeneuve, ot il est alors. I] ne peut s’agit que de Théodore Métochite (xiv® s.), qui fit exécuter les célébres mosaiques de l’église Saint-Sauveur de Khora (ou Chora) 4 Constantinople et passa ses derniéres années dans le monastére du méme nom en composant des poémes et des essais. ro. Ps.
XX XIII, 9, avec une etreur : « Gusfate... ». « Goutez
et voyez combien le Seigneur est doux. » Page 2). 1. Ps. XXXV, 10 : « Dans ta lumiére, nous verrons la lumiére. » 2. Claudel a lu ce commentaire de saint Léon dans l’Office de la féte de la Transfiguration (6 aott), au 2° noéturne : « Les
pages des deux testaments
se confirment
mutuellement.»
—
Pour le texte, II Cor., xm, 1 : « Tout sera décidé sur la déclara-
1054
Cahier I
tion de deux ou trois témoins. prophétie (O. C., XX, p. 307) et 3. Préciser : XX XIII, 7-9 : « amérement. Les chemins sont dans
les sentiers,
iln’a pas eu souillé... »
» — Cf. notamment Présence et Apocalypse (O. C., XXV, p. 67). Les messagets de paix pleureront abandonnés, personne ne passe
ila rompu
le paéte, il a rejeté les villes,
de regard pour les hommes.
4. Exaétement
Is.,
XX XIII,
14
: «
[...] Le Liban Qui de
vous
est
pourra
demeurer dans le feu dévorant, qui de vous habitera avec les atdeuts éternelles ?».— Cf. Po., p. 412, Corona, « Saint Paul» : « Mais Paul [...] / Vivant ne refusa point [...] /... d’étre cet homme-la dont s’émerveille le prophéte en sa parabole / Disant : Qui de vous habitera avec les ardeurs intolérables? » 5. XXXII, 18 : « Ton cceur s’occupera de ce qui faisait ta crainte. » 6. En fait XXXVI, 19: « Et que tous [ceux qui habitent la terre] sachent que vous étes le Dieu qui contemple les siécles. » 7. « Villeneuve», d’une encre différente, a été ajouté aprés coup. Page 26. 1. Claudel résume ici le P. d’Hautetive, Grand catéchisme de la persévérance chrétienne, t. XII (Paris, Vives, 1876), p. 97-99. Il appréciait cet ouvtage pour ses nombreuses citations de |’Ecti-
ture et des Péres. I] le cite notamment
dans Cantique, O. C.,
t. XXII, p. 317, n. 1, 341 et 343. Il le recommande
a Jammes
dans une lettre du 25 mai 1928 : « Si on a du temps, il y a un admirable ouvrage qui peut remplacer toute une bibliothéque, c’est le Grand catéchisme du P. d’Hauterive, tout rempli et bondé de textes inestimables. Malheureusement, il faut savoir le latin »
(Jammes, p. 321). — Il e&t difficile de traduire le premier texte de S. Augustin : « Ou bien vous demandez des choses mauvaises, ou vous
les demandez
dans une disposition mauvaise,
ou bien vous les demandez mal.» Le second : « Dieu dans sa bonté nous refuse certaines choses qu’il nous accorde dans sa coléte. » 2. «.,. il seta fait selon votre priére. » « Ainsi la priére est une semence et tu ignores le bien qui en nait. » 3. Cf. Ténebres, Corona (Po., p. 430), poeéme daté de 1905 :
« Sauvez-la du danger de la mort et de la gueule de la béte [...] / Il faut prier car c’est Pheure du Prince de ce monde. » — Pour les textes, Ps. CXLII, 7 : « Hatez-vous de m’exaucer.» — Ps. V, 5 : « Dés le matin, je me tiendrai devant vous et je ver-
rai...» Les deux suivants sont tirés du Pater et de l’Ave. 4. Cf. Partage de Midi (Th. I, p. 1052) : « Est-ce que je ne
Septembre-Odobre 1905
1055
suis pas un homme? Pourquoi est-ce que Vous faites le Dieu avec moi?» 5. Ces noms de villes, écrits d’une encre différente et en travers de la page, ont été ajoutés aprés coup. Une lettre a Frizeau, datée de Strasbourg, le 19 septembre 1905, permet de dater cette note : « Je vous écris de Strasbourg par ow je fais un petit tour en revenant des Vosges » (Jammes, p. 61). Le 29 septembre, au méme : « Me voici de retour a Villeneuve, aprés différents zigzags d’un voyage en Alsace et en Lorraine entrepris moins pour mon plaisir que par une impuissance de rester sur
|. ~~ place» (ibid., p. 62). Il écrit 4 cette Epoque Partage Frizeau le 19 septembre il parle de ce « drame qui que Vhistoire un peu arrangée de mon aventure»; il un atte et demi». Et le 19 o€tobre : « J’achéve mon
de Midi: a n’est autre en a « écrit drame qui
auta été écrit en entier en deux mois. » 6. Lu dans le Catéchisme d’Hauterive, t. XII, p. 88; la réfé-
rence exacte est II, 3. Trad. : « Souffre les retards de Dieu. » 7. Ibid., p. 8. ; 8. Cf. Odes, V (Po., p. 284): «... cette demeure bien fermée de la parabole / Ot le pére de famille 4 ’importun qui frappe dans la nuit pour demander trois pains /Répond qu’il repose avec ses enfants, profond et sourd.» — Les deux paraboles se trouvent dans Luc, XVIII et XI.
Page 27. 1. D’Hauterive,
tbid., p.
89, n.
1, « Sermo
II] de Verbo
Domini». Trad. : « Lorsque Dieu parfois tarde a donner, il remet ses dons, il ne les refuse pas. » 2. En réalité, Dan., 1X, 17: ... propter temetipsum. 18: Inclina Deus aurem tuam. Claudel fausse le sens en suggérant le rapprochement : « Pour toi-méme, Seigneur, écoute-moi... »
3. D’Hauterive, ibid., p. 12, n. 1. Citation de S. Jean Chrysostome, De Anna, Homilia 12. 4. Ibid., p. 10 : « Et nous
tous
qui, le visage découvert,
contemplons la gloire de Dieu, nous sommes transformés en la méme image, de clarté en clarté, comme par Esprit du Seigneur. » 5. Ibid., p. 13, n. 1. Hugues de Saint-Vidtor, De anima, lib. IL. Cf. t. Il, avril 1944. Trad. : « La méditation qui est une exploration, pleine de soin et d’amour, des choses; la contem-
plation qui est un regard sans discours. A leur propos, Hugues de Saint-Victor : “La réflexion erre de-ci de-la dans une marche sans but, mais la méditation est une matche en avant et tend toujours
vets
l’au-dela;
la contemplation,
elle, est un
libre
regard de l’esprit dans le miroir de la Sagesse avec une admita-
1056
Cahier I
tion contenue. La méditation est une étude des choses cachées,
la contemplation une vision des choses claires”’. » 6. Ibid., p. 14, n. 2. Scala claustralium, attribué a S. Bernard (P. L., t. CLXXXIV, col. 476). Cf. t. I, avril 1944. Trad. : « La leture pour ainsi dire apporte 4 la bouche une nourriture solide, la méditation mastique et broie, la priére fait découvrir la
saveur. » 7. Ste Thérése d’ Avila, Poésies, X.
8. Cf, Gide, p. 118: « Veuillot [...] est pour moi le type du héros. » Cantique (O. C., p. 442) : « Les vrais “pacifiques”’, ceux qui ne se contentent pas de jouir de la paix, mais qui la font, ce sont les combattants de l’espéce d’Athanase, pat exemple. — Et pourquoi pas de Louis Veuillot? » — Voir également les deux préfates 4 Veuillot, Pr., p. 481-487, et ibid., p. 639. 9. Dom Michel Caillava, bénédiétin de ’abbaye de Belloc-
sur-Joyeuse, Lauzun, arrondissement de Marmande. Membre de la « coopétative de priéres » (Jammes, p. 20). Claudel écrit a Frizeau, le 19 septembre : « A Gérardmetr, j’ai regu une lettre sévéte et bien appliquée du P. Caillava a qui j’avais écrit. Cela m/’a fait du bien. C’est assez de pleurnicher » (p. 61). Il le consulte, a propos de Partage de Midi, sur Vopportunité pour un chrétien de « peindre des passions coupables » et n’est « pas du tout tranquille sur la réponse » (ibid.). Claudelavaitrencontré le P. Caillavaavec Jammes (cf. Chaigne, Vie, p. 91). Frizeau écrit 4 Claudel le 28 novembre 1905 : «Vous avez fait au P. Michel une impression extraordinaire. Il a deviné qui vous étes » (Jammes, p. 72). Cf. Gide, p. 278, et Pr., p. 558, a propos de Jammes; celui-ci a dédié 4 dom Michel Caillava /e Livre de Saint Joseph, Plon, 1921. 10. Memra: « mot chaldaique qui signifie “‘parole, verbe’’. I est employé dans les Targums d’Onkelos et de Jonathan Ben Uziel, et dans les livres juifs postérieurs pour désigner une sorte de médiateur entre Dieu et l’homme» (Did. de Ja Bible, t. IV, col. 959). Targums: « Versions de ?Ancien Testament en langue ataméenne, qu’on appelle encore, dans le langage courant, pataphrases chaldaiques : paraphrases, parce que les targums les plus récents sont réellement de véritables paraphrases plutét que de simples traduétions; chaldaiques, parce que la langue dans laquelle elles ont été faites a été pendant longtemps nommée abusivement chaldaique » (Ibid., t. V, col. 1995). Page 28.
1. Cf. Edouard Herriot, Philon le Juif, essai sur V’école juive d’ Alexandrie, Hachette, 1898, p. 243 : « Parmi les Puissances de
|
Novembre 1905
1057
| Dieu, on distingue surtout la Puissance créatrice, la Puissance | royale, la Puissance prévoyante, la Puissance législative, la Sagesse. [...] La puissance prévoyante a elle-méme son origine dans deux Puissances élémentaires : ’évvova de Dieu, sa réflexion,
qui est Sermeée en gence en dx€E0d0s,
une vdnos evaroKepéevn, c’est-a-dire une pensée renelle-méme, et la diavdnors de Dieu, qui est son intellimouvement, en exercice, et que Philon appelle une c’est-a-dire une projection de sa pensée pure» (Onod
Deus sit immutabilis, 7). — Ibid., p. 247 : « homme sensible a été créé a Pimage d’un homme intelligible, incorporel, qui est le Verbe de Dieu » (Quaestiones in Genesim, I, 4). — Ibid., p. 253 : « Le logos est appelé Soleil intelligible » (De somniis, I, 15). 2. Claudel a lu ce texte dans Joseph de Maistre, De /’Eglise gallicane dans son rapport avec le Saint-Siége (CEuv. compl., Lyon, Vitte et Perrussel, 1888, t. III, p. 45): « Il n’y a rien de si connu
que la définition du verbe donnée dans la Grammaire générale d’Arnaud. C’est, dit Arnaud, un mot qui signifie affirmation (chap. x11, Du verbe). Des métaphysiciens francais du dernier siecle se sont extasiés sur la justesse de cette définition, sans se
douter qu’ils admiraient Aristote 4 qui elle appartient pleinement. « Aristote a dit avec son style unique, dans une langue unique : le verbe est un mot qui sursignifie le temps, et toujours il exprime ce qui est afirmé de quelque chose [en note : le texte grec, tel que l’a recopié Claudel et la référence : Arist., De interpret., cap. 111]. Que fait Arnaud? Il transcrit la seconde partie de cette définition; et comme il a observé que le verbe, outre sa signification essentielle, exprime encore trois accidents : la personne, le nombre et le temps, il charge sérieusement Aristote de s’étre arrété a cette troisiéme signification. Il se garde bien cependant de citer les paroles de ce philosophe, ni méme l’endroit de ses ceuvtes d’ot le passage est tiré. Il le donne seulement en passant, comme un homme qui n’a vu, pour ainsi dite, qu’wn tiers de la vérité. Il écrit lui-méme deux ou trois pages, et libre alors de ce petit Aristote qu’il croit avoir parfaitement oublié, il copie la définition entiére et se l’attribue sans fagon.» [En note: « Personne n’imaginera, je pense, qu’Aristote ait pu ignorer que le verbe exprime la personne et le nombre. Quand il dit donc que le verbe sursignifie le temps, cela signifie que ce mot ajoute lidée de temps
|
aux
autres
que
tenferme
le verbe;
ou,
en d’autres
termes, qu’étant destiné par essence 4 affirmer, comme tout le monde sait, il aura affirmé de plus le temps... »] Trad. de J. Tricot (Aristote, Organon, Vrin, 1936, p. 81) : « Le verbe est ce qui ajoute 4 sa propre signification celle du temps : aucune de ses parties ne signifie rien prise séparément, et il indique toujours quelque chose d’affirmé de quelque autre
1058
Cahier 1
chose.» Voir Paul Ricceur, Finitude et culpabilité, t. 1, 1!’Homme faillible, Aubier, 1960, p. 50.
3. De carne Christi, cap. v (P. L., Il, 760), contre Marcion qui niait la réalité de la crucifixion et de la mort du Christ.— Cf. Lettre 4 Suarés, ro février 1911 : « Mon seul roi est le Christ, c’est pour lui que je lutte, c’est a lui que j’ai donné mon gant, c’est lui que je veux défendre et glorifier, répétant a ses ennemis
aveugles le cri déchirant du vieux Tertullien : Parce unicae spet totius generis humant |» (p. 160). Voit aussi Jammes, p. 74 et 391,
et /’Evangile d’Isaie, O. C., t. XXIV, p. 445. Trad. : « Aie pitié de unique espérance de tout Punivers. » 4. Cf. Processionnal (Po., p. 298) : « Mais
pour
nous
nous
sommes vos enfants et un cettain commencement de votre créatute,.» La derniére partie du vers traduit trés exattement le texte. 5. Trad. : « La dévotion consiste 4 visiter les orphelins et les veuves dans leut tribulation et a se conserver pur du siécle présent. »
6. Trad. : « Je ne prie pas pour le monde. — Ils ne sont pas de ce monde comme moi je ne suis pas de ce monde. Comme tu m/’as envoyé dans le monde ainsi je les ai envoyés dans le monde. Pour que le monde sache que tu m’as envoyé, pour que le monde apprenne que tu m’as envoyé. — Pére juste, le monde ne t’a pas connu. » — Cf. /’Ofage (Th. II, p. 272): « ... le monde [...] pour qui le Christ n’a point prié. » 7. S. Paul, Rom., XIII, 11 : « Maintenant en effet notre salut
est plus proche qu’au temps ou nous avons ctu. » 8. En 1905, le 27 novembre était le lundi avant le premier dimanche de l’Avent. — « Nodurne » est en surcharge. 9. Compléter : Ps. LXXX, 10, 3° noGurne, et rétablir neque adorabis deum alienum. Claudel note de mémoite le verset médité pendant la nuit. Trad. : « Israél, il n’y aura pas pour toi de Dieu nouveau et tu n’adoretas pas un dieu étranger. » Loss Voitene7. Page 29.
1. Hymne pour le temps de |’Avent. Trad. : « Que la rosée tombe du ciel et la pluie sur le juste. Vois, Seigneur, l’affliGtion de ton peuple et envoie celui qui doit venir; envoie l’Agneau, dominateur de la terre, de la pierre du désert 4 la montagne des filles de Sion, pour qu’il nous éte lui-méme le joug de la captivité.... Console-toi, console-toi, mon peuple; votre salut viendra vite. Pourquoi te consumes-tu de tristesse ?pourquoi la douleur t’a-t-elle changé? Je te sauverai, ne crains pas : car je suis le
Seigneur ton Dieu, le Saint d’Israél, ton Rédempteur. »
Novembre 1905
1059
2. Au-dessus de cognac, Claudel a écrit en surcharge de /’esprit. 3. Luc, I, 30. Paroles de ’ange a la Vierge : « N’aie pas peut, Martie. » 4. La vie et les auvres de Marie Lataste, publiées par l’abbé Pascal Darbins (Paris, Bray et Retaux, 2 vol., 1872). Claudel ne
cite pas textuellement; il a noté, aprés avoir lu ceci (t. I, p. 102) : « La personne de Jésus est une Parole qui dit éternellement a Dieu le Pere les gloires de sa naissance éternelle.» Voir p. 386. Les historiens et théologiens du mysticisme rangent les ceuvres de Marie Lataste parmi les textes dont l’exa¢titude est contestée, % ~a cété des écrits de Catherine Emmerich, Marie d’Agreda, etc. 5. Marc, IX, 23; Job, XIII, 15; texte non identifié. Trad. : « Je crois, Seigneur, aide mon incrédulité », « Méme s’il me fait moutir, j’espérerai en lui», « Seigneur, incite-moi
Claudel enverra ces trois textes Riviére le 25 mai 1907.
4 Suarés
4 t’aimer. »
le 13 juin 1905, a
Page 30.
1. Nous février
savons
pat une
1906 (Jammes,
lettre
a Frizeau,
p. 82), que Claudel
de janvier ou
a lu Méditations et
priéres de Newman, traduites par Agnés Peraté, avec une étude sut la piété de Newman par Henri Bremond, Lecoffre, 1905. Mais le texte cité ici ne figure pas dans cette anthologie. Il se trouve par contre dans Henri Bremond, Newman, Essai de biographie psychologique, Bloud, 1906. C’est la, pensons-nous, que Claudel I’a lu. En effet, il introduit la note suivante par Ap|[ud] Bremond et il copie ensuite les vers de S. Jean de la Croix, par lesquels, trois pages plus loin (p. 328), Bremond termine le chapitre ot le sermon de Newman était cité (p. 322 sq.). Ily a une difficulté : Claudel a copié le texte avant le 21 décembre 1905 et ’ouvrage de Bremond ne parut qu’en 1906 (l’Avant-propos est daté de décembre 1905 et l’imprimatur est du 2 janvier 1906). Mais Bremond a pu publier un extrait de son livre dans un périodique. En copiant le texte, Claudel a commis quelques inexactitudes ; nous rétablissons les passages etronés : « ... Répétons-le-nous encote a nous-mémes... Ca, c’est /a soutce... Ainsi, disons, nous autres : Voici... Assez de fatigues, et de sécheresses, et d’inquié-
tudes... dont notre monde eSt capable... la voix discréte 4 peine sensible... » 2. En dépit des guillemets, ce texte n’est pas de Bremond (ni de Newman). Claudel médite sur lidée, trés newmanienne, qui affeure d’un bout a V’autre de |’Essai de biographie psychologique, par exemple dans ces lignes extraites du sermon Christ manifested in remembrance (p. 327) : « Au moment
méme
ou Dieu est en
1060
Cahier I
nous, nous ne discernons pas sa présence, mais aprés seulement, lorsque nous portons nos regards en arriére, sur cette grace qui nous est venue et qui n’est plus 14 »; ou encore dans cette réflexion de Bremond (p. 326) : « Aux inquiétudes, a la demi-insensibilité, aux déceptions chroniques du présent, il [Newman] oppose triomphalement la certitude, la plénitude, la joie de ces lointaines minutes ow il a vu Dieu» (chez Claudel : sensibilité languissante et souvent décue, mémoire, certitudes de la dévotion). Voir aussi Henri Bremond, Newman, la Vie chrétienne, Bloud, 1907, OW un autte texte de Christ manifested in remembrance est cité (p. 212) : « Sut le moment, nous ne pouvons téaliser que le Christ est avec vous, nous ne pouvons que le croitre; mais apres quelque temps, un souffle de douceur nous en vient, comme de ces vétements un parfum “de myrthe, d’aloés et de casse”’. » 3. Ces vets sont cités pat Bremond, Newman, Essai de biographie psychologique, p. 328. Au lieu de Quand méme ce soit la nuit... Claudel écrit Bien que... 1 remplace chose aussi belle pat chose si belle.
Page 31. 1. Préciser : 9-10. Trad. : « Si je prends des ailes dés l’aurore,
et que j’aille habiter a l’extrémité de la mer, c’est votre main qui me conduita, et votre droite me saisira. »
2. Ibid., 15 : « Mes os ne vous sont pas cachés, 4 vous qui les avez faits dans le secret. » 3. Ps. CXXXIX, 1 : « Délivre-moi de ’homme méchant. » — Les notes qui précédent ne peuvent étre exactement datées. Mais aucune ne fut écrite entre le 5 et le 17 décembre. Le mardi 5, Claudel envoya 4 Gide son « cahier de citations »; le samedi 16,
il le pria de le lui renvoyer; ce que fit Gide le 17 (Gide, p. 55). 4. Sur Reine Sainte-Marie-Perrin et sa famille, voir Chaigne, Vie, p. 92. Le 3 janvier 1906, Claudel écrit 4 Suarés : « Je dois vous apptendre que je suis fiancé avec Mademoiselle Reine Sainte-Marie-Perrin. C’est la fille de l’architeéte de Notre-Dame de Fourviére, une espéce de vieux saint admirable autour duquel a poussé une famille patriarcale. Et j’avais demandé 4 la Sainte Vierge de me choisit et de m’envoyer elle-méme |’épouse
dont j’avais besoin pour m/’aider dans la mission que j’ai a remplir. C’est elle qui m’a amené cette enfant qui m’est entiérement
et totalement dévouée»
(Suarés, p. 63). La décision des
fiangailles, nous a dit Mme Paul Claudel, fut prise lors d’une représentation au Théatre-Frangais, au foyer, pendant un entracte. 5. Cf. Odes, HII (Po., p. 256) : « Et je sais, et je me souviens, / Rt je revois cette forét, le lendemain de Noél, avant que le
soleil ne fat haut, / Tout était blanc, comme un prétre vétu de
Décembre 1905
1061
blanc, dont on ne voit que les mains qui ont la couleur de Paurore, / (Tout
le bois
comme
pris dans
l’épaisseur
et la
‘matiére d’un verre obscur), / Blanc depuis le trone jusqu’aux plus fines ramilles et la couleur méme / Du rose des feuilles mottes et le vert amande des pins, / (L’air pendant les longues heures de paix et nuit décantant comme un vin tranquille), / Et le long fil daraignée chargé de duvet rend témoignage a la récolleétion de V’orante. » Claudel traversa-t-il la forét de Fontainebleau le jour ou le lendemain de Noél? Ici, il écrit 25 décembre; dans 1’Ode, le lende%
main de Noél. Les fiancés avaient assisté a la messe de minuit a
Notre-Dame-des-Vittoires (Chaigne, Vie, p. 91). C’est en allant a Lyon, pour la démarche officielle auprés de M. Sainte-MariePerrin, qu’ils ont traversé la forét. — Voir lettre 4 Gide, 20 avril 1910: « Theme de la forét, theme du froid » (p. 132). 6. Trad. M.-A. Pératé (voir p. 30, n. 1), p. 314. Apres « séparation », Claudel a omis @ laquelle je ne puis résister. 7. Ibid., p. 319. « Le temps» n’est pas dans le texte. Aprés «les intervalles»,
Claudel a omis l’incise : dans leur succession.
Rétablir, aprés « propriété commune » : mais ce qui est long est court, ce qui est rapide est lent, ce qui est proche est distant, selon que le saisit tel esprit ou tel autre. Apres « chronologie », il a omis : La mémoire n'a pas tet ses points d’appui naturels des ans, des siécles et des périodes. Cf. Art poétique, att. 1V (Po., p. 184): « Intérieurs au monde, nous nous fessentons extérieuts a Dieu... », et art. V : « Quand un homme est mort [...] il ne produit plus cette énergie par quoi il était avec nous. »
Page 32.
1. Ibid., p. 331. Aprés « quand donc », rétablit Pincise : s7 ze/ esf ton lot, Au lieu de « un étte si vil que toi», lire aussi vil. Apres « il y a dans ses yeux», Claudel a omis pensifs. 2. Ibid., p. 336. « dit ame» a été ajouté par Claudel ainsi que « Fuge, du Cantique ». On peut relever des traces de l’influence de Newman,
en particulier du Songe de Gerontius, dans la pensée de
Claudel. Compater par exemple, op. ci#., p. 313 : « Suis-je mort ou vivant? Je ne suis pas mort, je suis encore dans ma chair » avec la derniére scéne de Partage de Midi, ou avec cettaines paroles du dialogue de Prouhéze et de l’Ange gardien (/e Soulier de Satin, Il, 8) : « Il est donc vrai que je vais mourit ?— Et qui sait si tu n’es pas morte déja?» « Légéreté inexprimable », dit Gerontius; « Impuissance au poids», dit PAnge. Cf. le theme claudélien du « suspens», de « Pheure qui est entre le printemps
et été», entre la nuit et le jour, entre le matin et l’aprés-midi.
1062
Cahier I
Compatet aussi, 0p. ci/., Pp. 314: « Je ne puis dire au juste de cette musique si jeatends, si je touche ou si je goute les sons », avec « O# dis-tu qu’est le parfum? O# diras-tu qu’est le son? Entre le parfum et le son ot e&t la frontiére commune? Ils existent en méme temps » (/e Soulier de Satin, Th. I, p. 815). Noter également la parenté entre le texte cité par Bremond (op. cit., Introdu€tion, p. xxm) sur la démarche de la grace comparable 4 l’inondation : « Rien ne l’annonce. On est endormi comme de coutume. Le matin au réveil on s’apergoit trop tard que de tous cétés les eaux nous assiégent. Promptitude, secret, victoire infaillible. Partout:le méme niveau», et les premiéres pages de l’Introduttion a la peinture hollandaise (Pr., p. 170)
« Quand sous les petits événements journaliers, nous sentons irrésistiblement s’accroitre en nous les chances de lun de ces raz de marée que l’on appelle un grand amour, ou une grande douleur, ou une conversion religieuse, quand nous nous apercevons que déja les premiéres barriéres ont fléchi, que le niveau de notre horizon a monté, que toutes les issues de notre Ame se trouvent bloquées, quand, nous retirant d’un champ hier intact et aujoutd’hui submergé, nous constatons qu’au fond des retraits les plus éloignés et les plus tortueux de notre personnalité Peau monte ligne a ligne et que les ressources suprémes de notte défense sont menacées par une itruption étrangére, comment ne pas penser...» En janvier ou février 1906, Claudel écrit 4 Frizeau : « Poeme psychagogique admirable, /e Songe de Gerontius. Il y a des tencontres sutprenantes entre certaines parties de ce poéme et telles de mes ptopres ceuvtes ou idées» (Jammes, p. 82). Et a Riviere, le 25 mai 1907 : « [Lisez] tout ce que vous pourtez trouver de Newman » (p. 49). 3. Voir Bremond, Newman, Essai de biographie psychologique,
IV® partie, chap. 1v: /es Réalités invisibles. L’influence de Newman eSt perceptible, a cdté de celles de S. Thomas et du pseudo-Denys dans le rdle de l’Ange gardien (/e Soulier de Satin), de Raphaél (Tobie) et dans Présence et prophétie.
1906 Page 33.
1. Sut Claudel a Lyon, entre ses fiangailles et son mariage, voit Chaigne, Vie, p. 93. Cf. lettre 4 Suarés du 3 janvier 1906: « Je vais étre obligé de quitter Paris pour quelques jours. Je vais a Lyon ov je reSterai une quinzaine » (p. 63). A Frizeau, le dimanche7 : « Je pars pour Lyon demain matin. »
Janvier 1906
1063
2. Ps. IX, 7 : « Leur mémoite a péri avec fracas. »
3. « Comme le Pére a aimé le Fils, moi je vous aime. » Citation approximative de S. Jean, XV, 9. 4. Newman,
op. cit., p. 152
: La premiére
et la troisiéme
phrases sont exactement transcrites. Rétablit la seconde : « C’est parce quwil m’a aimé comme un péte aime son fils, non pas simplement comme un pére humain, mais comme...» 5. Ibid., p. 155. Matth., XXVI, 8, paroles adressées 4 MarieMadeleine répandant le parfum : « A quoi bon cette perte?» Dans Mort de Judas (Pr., p. 905) Claudel fera de cet épisode le eZ point de départ de la trahison de Judas. 6. Odes, III (Po., p. 259) : « A dix heures lorsque le jardin embaume et que tous les oiseaux chantent en francais. » 7. Note inspirée sans doute pat Newman (op. ci7., p. 174) : «L’ame du Christ était plus sensible que toute autre ame dhomme, patce qu’elle était exaltée par l’union personnelle avec le Verbe de Dieu. » 8. La citation de Leibnitz quelques lignes plus bas semble indiquer que Claudel a lu ces mots d’Hippocrate dans la Monadologie (éd. Boutroux, Delagrave, 1881, p. 177). Une édition de la Monadologie se trouve dans la bibliothéque de Villeneuve, annotée pat M. E. Segond, Nouvelle collection de classiques, Paris, Société générale de Librairie catholique, 1883; sans doute eSt-ce celle que Claudel a lue. La méme citation se retrouve dans PAvant-propos des Nouveaux Essais (sur ’entendement humain), éd. Erdmann, p. 197 J, ainsi traduite par Leibnitz : « Tout est conspirant. » Sur le théme claudélien de la « composition», proche de celui de la « co-naissance», voir outre Arf poétique, « Prakriti» (Pr., p. 958) : « ... nous devons nous dire que la création apres tout [...] est une ceuvre, que toute ceuvre obéit a une raison qui est sa raison d’étte [...] qu’elle préte Voreille a des lois qui ne sont pas ces lois de compétence courte et subordonnée qu’on appelle lois scientifiques ou administratives, mais ces lois vraiment créatrices que tout artiste porte au fond de luiméme [...] et qu’il appelle /ois de composition. [...] Dieu ne fait tien autrement que tout 4 la fois...»; J’aime la Bible (O. C., XXI, p. 407), Loir-et-Cher (Pr., p. 702) : « ... composition au sens pictural. » 9. Claudel développe ce theme dans lOde II (Po., p. 243) : «... ’ame substantielle dans le rayon intelligible»; (p. 244): «... la nuit [désire] / D’étre dissoute dans la visibilité! » Cf. le theme voisin de la « clarification » (zbid., p. 243), Un poéte regarde la croix (O. C., XIX, p. 368-370), Apocalypse (O. C., XXV,
p. 260) : « C’est dans le regard de I’Etre absolu que nous puisons la solidité de cet étre qualifié que nous sommes. » CLAUDEL V - 37
37
1064
Cahier I
10. Psaume XX XVIII, 7 : « Ob irais-je pour me votre esprit? »
dérober a
Page 34.
1. Texte approximatif; le plus proche est dans Matthieu, VI, 9 : Quis est ex vobis homo, quem si petierit filius suus panem, numquid lapidem porriget ei? « Qui de vous, si son fils lui demande du pain, lui donnera une pierre?» 2. De notionibus juris et justitiae, édA. Erdmann, p. 115 2: « Sa beauté [de la musique] ne consiste que dans les convenances des nombres et dans le compte, dont nous ne nous apercevons pas et que |’Ame ne laisse pas de faire, des battements ou vibrations des corps sonnants. » 3. S. Paul, Rom., XII, 2 : « Ne vous conformez pas a ce siecle. » 4. Ceci rappelle certains passages des Odes, II (Po., p. 246) :
« Il y a eu le passé, mais il n’est plus. Je sens sur ma face un souffle plus froid. » HI (p. 249) : « Et maintenant je ne suis plus un nouveau-venu,
mais un homme
dans le milieu de sa vie,
sachant, / Qui s’arréte et qui se tient debout en grande force et patience et qui regarde de tous cdtés.»
Et encore
(p. 255) :
« Voici la rigueur de Vhiver, adieu, 6 bel été...»; et V (p. 280) : « Jadis j’ai connu la passion, mais maintenant je n’ai plus que celle de la patience et du désit / De connaitre Dieu... » — La date de la note est peut-étre « 2 mars», lecture douteuse. 5. Odes, Il (Po., p. 250) : « Comme le pesant encensoir d’or tout bourré d’encens et de braise, / Qui un instant volant au bout de sa chaine déployée / Redescend, laissant a sa place / Un gtand nuage dans le rayon de soleil d’épaisse fumée! / » 6. Paysage de Lyon. Le Rhéne, ou la Sane en période de ctue (Reine Sainte-Marie-Perrin habitait 25, quai Tilsitt) et la Croix-Rousse. Cf. Loir-et-Cher (Pr., p. 746) : « Une ville qui monte, c’est toujours beau, comme Lyon, par exemple. » 7. Inspiré sans doute par l’hymne de Laudes pout les féries de Caréme : Dies venit, dies tua | In quo reflorent omnia: « Le jour vient, ton jour auquel tout refleurit»; ou par Ps. XXVII, 7: Refloruit caro mea...: « Ma chair a refleuti... » 8. Claudel a fait un voyage en Palestine en 1899. Cf. Odes, III (Po., p. 249) : « Il est un moins nombreux ramage en Damas... » 9. Ibid., I (p. 240) : « O credo entier des choses visibles et invisibles, je vous accepte avec un cceur catholique!» Voir surtout « Religion et poésie » (Pr., p. 59) et les notes (p. 1416) : « Poésie catholique, c’est-a-dire une poésie réellement universelle, c’est-a-dire embrassant suivant l’expression du Credo les choses visibles et invisibles... »
Feévrier- Juin 1906
1065
to. Sur le « changement radical » comparable a un « changement de versant» introduit dans l’exigtence de Claudel par son mariage, voir Mémoires, p. 205, et Odes, IL (Po., p. 260) : « Soyez béni, mon Dieu, qui m’avez introduit dans cette terre de mon aprés-midi, / [...] comme aprés la longue et sévére montée un homme ayant trouvé le col redescend par |’autre versant. » 11. Dom Chautard, trappiste, auteur de /’Ame de tout apostolat, Téqui, et de les Cisterciens trappistes, l’dme ciftercienne, Sept-Fons, 1931. — Sans doute est-ce du nom de cette abbaye que vient celui de Cotfontaine, dans /’Osage; il est, en effet, dans le premier manuscrit « Séfontaine ». 12. Jean-Baptiste Terrien, jésuite, /a Grace et la gloire, ou la
filiation adoptive des enfants de Dien étudiée dans sa réalité, ses principes, son perfectionnement et son couronnement final, Lethielleux, 2 vol., 1897.
13. « Fait dincube» et « (Sourire d’avril, valse)» ont été ajoutés postérieurement : souvenirs de voyage en met. Cf. Dragon (O. C., IV, p. 60): « Les légendes [chinoises] sont pleines d’histoites de succubes et de vampires... » ’ 14. Claudel a été nommé
premier secrétaire a Pékin; c’est ce
poste qu’il rejoint. Il n’y restera que quelques semaines. I] arrive a Shanghai et remonte le Yang-tsé-kiang jusqu’a Hank’éou. Page 35. 1. Compléter
XI, 27. Claudel commet
une erreur, le texte
est : Invisibilem tanquam videns...: « comme s'il edt vu celui qui est invisible »; il se laisse prendre par l’opposition de mots. 2. Jean, I, 26 : « Quelqu’un se tient au milieu de vous, que vous ne reconnaissez pas. » 3. [lle Néméenne, v. 62-63. Trad. d’A. Puech (Bude, p. 45) : « Afin que [...] il s’obstinat 4 vouloir que ne revint plus en son pays leur chef, ’impétueux cousin d’Hélénos, Memnon. » — Pour des constructions semblables, voir Odes, Il (Po., p. 239) : « Afin que pas ce rayon de votre lumiére vie-créante qui m’était destiné n’échappe. / Et je tends les mains a gauche et a droite/ Afin qu’aucune pat moi/ Lacune dans la parfaite enceinte qui est de vos créatures existe!», ou (p. 258) : «... a qui pareil redevenir il faut». Dans Positions, Claudel note (Pr., p. 32) : « Virgile ou Pindare, grace aux facilités que leur donnait leur langage, peuvent délicieusement juxtaposer des mots qui n’ont aucun rapport logique. » 4. Newman, Méditations et priéres, éd. M.-A. Pératé, Le-
coffre, 1905, p. 229. Rétablir : « Ma Stabilité a moi, ici-bas, est la persévérance a changer » (a propos de l’immutabilité de Dieu). 5. Letexte est :« La plupatt des hommes meurent de chagrin. »
1066
Cahier I
6. Cf. Odes, II (Po., p. 244) : « O fortes étoiles sublimes et quel fruit entr’apergu dans le noit abime! 6 flexion sacrée du long rameau de la Petite-Ourse. » — « Incertain » est en sutcharge. 7. Cf. « Choses de Chine» fermet les yeux et me retrouve ma maison de Fou-Tchéou que [...] J?entends battre les larges
(Pr., p. 1020) : « Je nai qu’a tout de suite sous la véranda de ventile la brise de lapres-midi. Stores qui s’agitent d’un bout a
Pautre de la galerie. » 8. Claudel avait d’abord écrit /’imbécile Bergson; « Vimbécile » a
été biffé. Sur /e Rire, de Bergson, voit t. II, février 1942. — Sur le lien entte joie, sentiment de la liberté et ironie supérieure, voit Pierre Ganne,
« De ’humour
et de la foi», Cah. C/. II,
notamment : « Le myéstére métapsychique [des épousailles de la souffrance et de la joie] engendre humour parce qu’il crée dans ?ame du poéte une “distance intérieure’? qui mesure exactement le degré de libération auquel il est patvenu » (p. 248). Cest exactement ce que Claudel entend signifier par « autre chose »». 9. Comme gérant du consulat. Claudel sera ensuite nommé consul a Tien-Tsin et y restera jusqu’a sa nomination en Bohéme. Page 36.
1. Voir et la méme ot: Vimage ou la toile
« ?Automate créateur» (O. C., XVII, p. 323-325) idée dans /’I/iade (Pr., p. 403) et Positions (Pr., p. 3) est reprise : « ... pas plus que ce ne sont les couleurs qui font un tableau du Titien, c’est le Titien lui-
méme»; voit encore « Vitraux» (Pr., p. 328...). 2. Pour ce theme du «dimanche», souvent assimilé a Paques et a la Résurrection, voir A. Vachon, op. ¢if., p. 317 sq. Voir également « Priére pour le dimanche matin» (Po., p. 377) et Loir-et-Cher (Pr., p. 731 et 732).
3. Odes, II (Po., p. 244) : « Le monde d’un seul coup tout rempli pat un grand coup de foudre doré. » — Le 10 juin 1906, Claudel écrit de Pékin 4 Jammes : « J’ai tout le temps de travailler, et je me suis mis 4 écrire une deuxiéme Ode. Je commence 4 me rendre compte des possibilités du genre » (p. 89). 4. Ici Claudel avait écrit et a biffé : « 18 juillet, Wright renvoyé par V.» Wright était commissaire aux douanes a Pékin, voir Pp. 45, n. 11. 5. Ps.
LX XIII, 4: « Ils ont placé leurs étendards comme éten-
dards. » 6. De Haeresibus (P. L., XLII, col. 42) : Negant visibilem paradisum. Sur Séleucus, compagnon d’Hermias, voir Diftionnaire de Théologie catholique, t. V1, col. 2306, et t. XIV, col. 1790.
Juin-Septembre 1906
1067
7. Sagesse, 1,7: Quoniam spiritus Domini replevit orbem terrarum, et hoc, quod continet omnia, scientiam habet vocis: « Car Esprit du Seigneur remplit univers, et comme il contient tout il connait | “tout ce qui se dit. » 8. S. Paul, Co/., I, 17 : « Toutes choses subsigtent en lui. »
9. Claudel cite ces deux textes d’Albert le Grand 4 la suite dans une lettre a Frizeau du 26 décembre 1908 (Jammes, p. 143), dans un texte intitulé « Propositions sur les Anges»; ce texte, corrigé
en
1910,
sera publié dans
/’Amitié
de France, aout-
ottobre 1911, et repris dans Présence e¢ prophétie, sous le titre _« Premiére note sur les Anges». Trad. : « Quand on dit que Dieu est dans un lieu, il est référé au lieu non par mode local,
mais en tant que cause. » — « S’il est référé a tel ou tel lieu, c’est en taison de la force active de la puissance d’assistance et de soutien. » 10. Cf. entre autres nombreuses références, De Spiritu et Littera, cap. xxx (P. L., XLIV, col. 233): « La loi de Moise d’ot est venue non la guérison, mais la connaissance du péché. » , 11. Trad. : « Par qui il nous a donné les plus grandes et précieuses promesses, afin que par elles vous deveniez partticipants de la nature divine... » Page 37.
1. Le 21 juin 1909, Claudel écrit a Frizeau : « Aujourd’hui est Panniversaitre de deux sceurs de charité qui ont été massacrées a Tien-tsin en 1870. [...] J’ai présidé hier la cérémonie commeémofative qui était instituée pour la premiére fois.» L’erreur : deux, pour dix, semble étre dans la lettre, non dans le Journal.
2. Il est intéressant de relever la date de cette note : 1906. La « Parabole d’Animus et d’Anima : pour faire comprendre certaines poésies d’Arthur Rimbaud» (Pr., p. 27) seta publiée en 1925 dans la N.R.F. Voir p. 652. 3. Trad. : « Vous qui rendez vos commandements pénibles. » 4. Odes, Il (Po., p. 243) : « Que me parlez-vous de ce bleu de Pair que vous liquéfiez? O que lame humaine est un plus précieux élixir! » 5. Trad. : « Comme une ville ouverte et sans enceinte de mutailles, ainsi est celui qui ne peut en parlant dominer sa pensée.» — Claudel rappelle a plusieurs reprises dans ses | commentaires bibliques ce texte; pat exemple dans Apocalypse (O. C., XXV, p. 359) : « Une cité! mais le propre dune cité est | @étre fermée [...] sans quoi elle ressemblerait, nous dit la Sagesse, a ce discours des insensés qui se répand de toutes parts. » A Vinverse, Odes, I (Po., p. 222): « Voici soudain, quand le poéte nouveau comblé de l’explosion intelligible, / La clameur noire
1068
Cahier I
de toute la vie nouée par le nombril dans la commotion de la base, / S’ouvte, l’accés / Faisant sauter la cléture, le souffle de lui-méme / Violentant les machoires coupantes, / Le frémissant novenaite avec un Cri.» 6. On retrouve Vidée du texte biblique qui précéde dans plusieurs textes consacrés 4 Hugo; voir Pr., p. 19 sq. et surtout p. 467 sq. Voir par exemple, dans un texte de 1952 (p. 474), cette formule : « Un incontestable Inspiré, qui ne se méfiait pas assez de Vinspiration. » 7. Prov., XXV, 25. Trad. : « Comme de |’eau fraiche a celui qui a soif, ainsi est une bonne nouvelle qui vient d’un pays éloigné. » 8. Prov., XXVI,
16. Trad. : « Le patresseux se croit plus sage
que sept hommes qui disent des choses sensées. » 9. Cf. Odes, III (Po., p. 253) : « Derriére nous la mer confuse aux flots entrechoqués, / Mais votre peuple a pied sec la traverse pat le chemin le plus court derriére Moise et Aaron. » 10. L’Epée et /e miroir sera une méditation sut les sept douleurs de la Vierge; cf. le personnage de Sept-Epées, dans /e Soulier de Satin. Au bas de cette page, Claudel a collé une page de livre avec des silhouettes et signes chinois et le texte suivant : « A la méme époque (xvur® siécle) remonte probablement le fameux vase en bronze, le plus ancien antique chinois, dont ci-contre, en fac-similé, Vinscription parlante. En bas, dans le monde inférieur une [signe] main droite fait Voffrande. La flamme représente ce qui monte, musique et odeur des mets. La larme
figute ce qui tombe, les libations, liqueurs répandues. Voila Poffrande [signe]. La bartiére figure la séparation des deux mondes. Elle est entr’ouverte, pour exptimer la communication pat Voffrande... En haut, dans le monde supérieur, l’A4me du descendant transportée pat son désir [signe] est A genoux de profil et tend une main suppliante vers l’Ame de l’aieul placée de front. Voila la communication désirée [signe]. Le dessin est si expressif qu’il se passe de tout commentaire. La nudité des silhouettes exprime que la communication est idéale, non réelle. » On
sait combien
Claudel
s’intéressera
a l’éctiture chinoise,
dans Je livre du P. Wieger en particulier, « délicieux», dit-il, « soutce inépuisable d’intérét et d’amusement» et dont la le€ture a conduit a se « demander si dans notte écriture occidentale il n’y autait pas moyen de retrouver également une cettaine représentation des objets qu’elle signifie» (Pr., p. 81 et notes).
Septembre- Novembre 1906
1069
Page 38.
. Ps. CV, 14. Rétablir :« Et tentaverunt Deum in inaquoso. » | eerie « Ils tentérent Dieu dans la contrée sans eau. » 2. Rature : d’une. 3. L’ouvrage du P. Huc est : /’Empire chinois, faisant suite a _ Pouvrage intitulé Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie et le Thibet, _ pat M. Huc, ancien missionnaire apostolique en Chine, Paris, _ Gaume et Cie, 1879. Les proverbes cités par Claudel sont dans | te t. II, 5° éd., p. 451-453. |.
4. Versets 82, 85, 111 et 176. Trad. : « Mes yeux languissent
| apres votre parole, vous disant : “Quand me consoletez-vous 2” » —
«Les
méchants
m’ont entretenu
de choses vaines; mais ce
n’était pas comme votte loi. » — « J’ai acquis vos enseignements comme un éternel héritage. » — « Cherchez votre serviteur. » Page 39.
‘1. Trad. : « Les fleuves qui s’en vont vers l’est emportent des poissons des eaux occidentales.»» — Pour la seconde allusion, voit Dragon (O. C., IV, p. 50) : « Comme le dit avec profondeur Péctivain anglais Chesterton, le vrai courage n’est pas le mépris | de la vie, c’est le mépris de la mort. L’Oriental est toujours prét a accepter, a “rapetisser son cceut”’ (cependant cette expression _célebre
signifie
surtout
faire
attention.
Siao
sin,
crient
les
bateliers, “‘rétrécis ton esprit, prends garde”) et la ot il ne peut sufhsamment se tapetisser, plut6t que de lutter, il | disparait, il se tue.» — Cf. dans /e Soulier de Satin, 1, 7 (Th. I, p- 693): « [...] Rapetissez votre coeur! Ouvrez-vous a mes sages _ paroles raisonnables! » 2. S. Irénée, Adversus haereses, 11, 24, 1 (P. G., VII, col. 966 B).
Voir trad. Sagnard (éd. du Cerf, coll. « Sources chrétiennes », Paris--Lyon, 1952, p- 398) : « La foi, liqueur de prix [qui] rajeunit et fait méme rajeunir le vase qui la contient [l’Eglise].» — ee |S. Vincent
de Lérins, Commonitorium, I, 23 (P. L., L, col. 668):
| « [Le dogme] merveilleux, @une jeunesse toujours renouvelée et redonnant jeunesse au vase méme qui le contient. — Qwil ctoisse donc et ne cesse de prospéter. » 3. Trad. : « Assez grand pour étre Dieu, assez intime pour
| étre moi. » 4. Luc, XXIV, 26. Claudel 'semble ainsi donner au texte ‘rien, JE surs. » « C’est moi, ne cité, 5. Ps. CXXX, 2. Trad. : sevreé. »
inverse :Ego sum, nolite timere et un sens différent : « Ne ctaignez craignez pas», dit le Christ ressus-
« Comme
l’enfant
que sa mére a
1070
Cahier I
6. Corona, « Saint Wenceslas» (Po., p. 442) : «... le désert de blé immense et platitudineux. » 7. Débuts des versets 5 et 6. Dieu « qui fit les cieux avec sagesse [...] qui affermit la terre sur les eaux ». 8. CXXXV, 13: «Il sépara en deux parties la met Rouge. » 9. V, 15 : « Mes os ne vous sont point cachés, a vous qui les avez faits dans le secret. » 10. Etoiles des constellations de la Pléiade et de la Baleine. Page 40.
1. Voir début du Soulier de Satin (Th. IL, p. 666) : « Toutes les gtandes constellations [...] sont suspendues comme d’énormes gitandoles et comme de gigantesques panoplies...» Voir aussi note suivante. 2. Cf. Odes, III (Po., p. 252) : « Il est vrai! Vous nous avez donné la Grande nuit aprés le jour et la réalité du ciel nocturne. / Comme je suis 1a, il est la avec les milliards de sa présence, / Et il nous donne signature sur le papier photographique avec les 6 000 Pléiades, /Comme le criminel avec le dessin de son pouce enduit d’encre sur le procés-verbal. / Et ?observateur cherche
et trouve les pivots et les rubis, constellations/ Pareilles 4 Vagrafe a de grands ornements chargés de Et ¢a et la aux confins du monde
Hercule ou Alcyone, et les sur l’épaule d’un pontife et pietres de diverses couleurs / ow le travail de la création
s’achéve, les nébuleuses, / Comme, quand la mer violemment battue et remuée / Revient au calme, voici encore de tous cdtés
Vécume et de grandes plaques de sel trouble qui montent. » Remarquet deux lignes plus bas la date : 3 décembre, et tapprocher de la lettre a Arthur Fontaine, datée du 9 (Positions, O. C., XV, p. 227) : « Je suis dans le moment de grande paix et suspens de mon existence. Pour combien de temps, je ignore. Jen profite pout écrite des Odes, ce qui m’intéresse beaucoup et me délivre du cété affabulation des drames, un peu puéril toujours et conventionnel. Tandis que 1a c’est la poésie a l'état
pur, un mouvement seulement et une coordination des masses comme dans une belle symphonie. J’en ai écrit une sur “]’Esprit et Hau” et je viens de commencer un Magnificat.» Et a Gide, le jour de Noél : « Je n’ai point de drame en téte, et je suis las ailleurs du cété fictif et conventionnel du dtame. Je préfére pour le moment l’ode, qui est la poésie 4 l'état pur et un, ot Pon n’a dans Pesprit que des mouvements et des propositions. Jen ai écrit deux » (Gide, p. 69). 3. Odes, III (Po., p. 259) : « Au-dessus de l’église deux faibles étoiles pateilles aux vierges Patience et Evodie. » Il semble que Claudel ait féminisé pour le charme et l’euphonie les noms de
Décembre 1906
1071
deux martyrs : Patience (martyrologe romain, 1°° mai) et Evode (6 mai).
4. Cf. Dragon (O. C., IV, p. 61) : « N’oublions pas le dieu de la cuisine, qui chaque année doit rendre compte a la cour céleste de la conduite de la famille qui lui est confiée, et dont on a soin, au moment ou le terme fatal expire, d’enduite aégtucieuse-
ment les lévres de mélasse. » 5. Cf. Riviere, p. 171 : « Le ricanement, depuis Voltaire jusqu’a Anatole France, m’a toujours patu le signe des réprouvés. Dés qu’un homme est possédé de la haine de Dieu, il ne peut plus s’empécher de tite. » 6. Ce texte a servi d’épigraphe a Art poétique, Metcure de France, 1907. — Cf. Lettre a Gide, 9 février 1907 : « J’ai envoyé a Vallette le modéle du titre avec épigraphe de saint Augustin que voici : Sicut...» Ce texte est également cité fragmentairement dans A /a Trace de Dieu, Préface (Positions, Il, O. C., XV, p. 188).
— Trad. : « Lui le créateur... lui le modérateut... jusqu’a ce que [s’achéve] la beauté de tous les siécles... comme un gtand concert d’un artiste ineffable. » 7. Noté daprés Achille Luchaite, Innocent III, t. 1, Rome et Italie, Hachette, 1904, p. 8 : « Le pessimisme chrétien a inspiré le plus célébre des opuscules [d’Innocent III], le De contempin mundi ou De miseria conditionis humanae, ouvrage dont la vogue fut extraordinaire. [...] Ce traité s’ouvre par la description du mal physique aux différents ages de la vie. [...] L’enfant, par exemple. [...] Les douleurs de lenfantement, et les cris du misérable nouveau-né! Lothaite [Lothaire de Segni, nom d’Innocent III] nous apprend, en passant, que le gargon crie A, la
fille E et que le mot Eva n’est qu’une double interjection Heu ha. » 8. Ibid., p. 73 : « Quatre mois a peine aprés son élection, Innocent recommandait a ses contemporains, par une citculaire de quelques lignes, une ceuvre de charité que le Moyen Age trouvait trés simple : celle qui consistait a prendre en légitime matiage les femmes vouées 4 la prostitution. » 9. Ibid., p. 240 :« On consulte le pape méme sur des questions de grammaire, sur des définitions de mots: “Que faut-il entendre par le mot nova/e (la tetre nouvelle, la nouaille)? demande en 1207 Varchevéque de Saragosse. — La loi civile, r¢pond Voracle, a donné 4 ce mot plusieurs sens. Pour les uns, c’est une terre qu’on laisse en jachére pendant un an pour la teposer; pour d’auttes, c'est un motceau de forét nouvellement défriché. Nous pensons, nous, comme nos prédécesseuts, que novale est le champ qui n’a pas été cultivé de temps immémorial et qui est
pour la premiére fois livré 4 la charrue”. » — Cf. /’Osage, I, 2 (Th. II, p. 243) : «... les seigneuts épats de nos féres et de nos
1072
Cahier
I
villes mérovingiennes / Ils vivaient de la maigre nouaille vermineuse... »
10. Verset 7. Texte déja cité p. 33. « Leur mémoire a péri avec fracas. » 11. Vertset 16. Trad. : « Les nations se sont enfoncées dans la fosse qu’elles avaient faite. » 12. Ps, CXLVI, 17 : « Qui soutiendra le froid de sa face? » — Cf. Odes, III (Po., p. 255) : « Voici le froid inexorable, voici Dieu seul! »
1907 Page 42.
1. Claudel n’ayant pas indiqué le changement d’année, nous situons la premiére note de 1907 4 la date indiquée du 20 janvier. —«Chouchette», nom familier de Marie Claudel, est d’une encte différente, il a été ajouté aprés coup. A propos de cette naissance, voir Gide, p. 70: « Vous avez su que je suis pére d’une fort jolie petite fille, du moins c’est ce que je trouve. Voici une expérience nouvelle et des sentiments bien nouveaux et bien forts. » Voir également Swarés, p. 95, et Jammes, p. 97. 2. Ps. VIII, 3 : « ... de la bouche de ceux qui sont a la mamelle, vous avez tiré une louange parfaite. » 3. Cf. Dragon (O. C., IV, p. 61) : « Les Chinois, comme les Anciens et comme les Hindous, croient a la présence réelle de
la divinité dans Veffigie qui la représente : cette espece d’incarnation appelée K’ai kan (ouvertute des yeux) est censée avoir lieu au moment ot lon peint les yeux de Vidole. » 4. Méditations et priéres, éd. Pératé, p. 103. Epitaphe composée par Newman (23 juillet 1876). Trad. : « Des ombres et des images a la vérité...» Claudel a omis la fin: A[nno] S[alutis] 78... Requiescat in pace. — Pour son commentaire, cf. Du sens figuré de /’ Ecriture (O. C., t. XXI, p. 58) : « Nous passons et le Psaume dit que nous passons en image (image, oui, mais qui dans la vision de Dieu trace une empreinte inaltérable). » Cf. également « Introdu&ion a un poéme sur Dante» (Pr., p. 427). Ce commentaire est en marge, peut-étre ajouté postérieurement.
5. En marge, peut-étre ajouté postérieurement. Page 43. 1. Cf. Corona, « Chant de lEpiphanie » (Po., p. 383) :« L’aveugle et Pindifférent [...] / Espéces d’animaux manqués incapables du Oui et du Non! » — « Hymne de la Pentecéte » (Po., p. 395) :
Janvier-Mars 1907
1073
« Ils sont comme la béte brute qui ignore Oui et Non, est bien ou mal.» Voir ibid. le commentaire du mot haut : « Celui qui n’amasse pas avec Moi dissipe...», ment Riviere, p. 59 : « Qui retire le verbe de la phrase, son sens) (22 mai 1907).
et ce qui cité plus et égaleelle perd
2. «... des histoires, des faits, des images et des formes corpotelles. » Voir Calvin, CEwvres completes, 59 vol., Brunswick, Berlin, 1863-1900, t. IV, p. 420; t. VI, p. 170; t. XXVIII,
p. 32-38. —
Cf. Léon
Wencelius, /’Esthétique de Calvin, 1936,
_ critiqué par André Favre-Dorsaz,
Calvin et Loyola. —
Claudel,
qui applique cette définition a la peinture hollandaise, reviendra sur ce jugement en lui attribuant « une espéce de vocation profonde et de pente secréte» (Pr., p. 175). 3. Le théme de la mesure, au double sens du mot, est fondamental chez Claudel; voit pour les seules Odes: I, Po., p. 222 : « La tieuse Thalie du pouce de son pied rharque doucement la mesute»; p. 225 : «... 6 Muses modétatrices.» II, p. 247 : « Parce
que
seule
[la voix
du poéte]
soumise
4 une
divine! / Parce qu’elle n’est tout entiére que mesure
mesute
méme,/
La mesure sainte, libre, toute-puissante, créatrice! » IV, p. 264 :
« ... fentends une voix en moi et la mesure qui s’accéléte... »; «... le/ Transport de cette mesure sacrée!» p. 272 : « Jusque tu aies apptis la mesute que je veux, a quoi ne sett point de compter un et deux, tu l’apprendras, serait-ce avec le hoquet de Pagonie!» V, p. 283 : «... un semeut de la mesure de Dieu. » Cf. encore ibid., p. 284, 285, 287, 289, et Gide, p. 76: « Je suis tout a fait de votre avis sur la question de mesure. |...] Comme la natute d’un nombte change par l’addition ou la soustracétion @une seule unité, ainsi toute forme artistique est non seulement affaiblie, mais défigurée et anéantie par une main trop lourde. Une parfaite balance est seule créatrice. Cette ancienne vérité a été obscurcie pat invasion de sauvagerie qu’a été le Romantisme.» Et enfin Swarés, p. 129 : « Il est certain que l’alexandtin ptolongé engendre un insupportable ennui. Mais d’autte part la mesure a des vertus myStiques qui satisfont les parties les plus secretes de l’esprit. » 4. Cf. Connaissance de I’ Est, « Sut la cetvelle » (Po., p. 105). Page 44. 1. Shelley, Adonais, LII, trad. F. Rabbe : « La vie semblable
a4 un déme de verre aux mille couleurs, tache le blanc rayonnement de l’éternité. » 2. Ps. XXVIII,
4 : « La voix du Seigneur est puissante, la
voix du Seigneur est majestueuse. » 3. Ps. XXIII, 6. Cf. Odes, HI (Po., p. 253) : « Et la montagne
1074
Cahier I
dans l’éclair qui la montre et qui ’absorbe tour 4 tour a l’air de sauter comme un bélier... » Cf. Gide, p. 89 : « Montes exultaverunt ut arietes et colles sicut agni ovium,. C'est un vers admirable d’observation : d’abord la distin€tion des grands boucs et des longues lignes moutonnantes des collines; puis il est parfaitement vrai que dans les orages tropicaux, sur le fond incessant des éclairs, les montagnes ont lair de sauter » (4 aotit 1908). 4. Théététe, 144 b: « [Ce jeune homme] va dune allure si égale, si exempte de heurts, si efficace, vets les études et les ptoblémes, avec une douceur abondante, avec cette effusion
silencieuse de Vhuile qui’ s’épand, qu’on s’étonne de voir, en un si jeune 4ge, cette fagcon de réaliser de tels achévements. » — Cf. Odes, V (Po., p. 280) : « Et beaucoup d’agitation ne sert pas, mais l’esprit de V’homme qui avance dans la géométtie est comparable au progrés sans aucun son d’une tiviére dhuile. » 5. Verset 24 : « Lorsqu’il [le juste] tombera, il ne se brisera pas.» 6. Legon ancienne du Ps. CI, 4, que Claudel a trouvée dans
Fillion, Bible, t. IV, p. 300. — Il faudrait traduire : « Mes os ont été calcinés comme sur un gril. » 7. Ps. LXVIUI, 3: «... et il n’y a pas de consistance. » — Claudel traduit par « substance », voir son commentaire. 8. Cf. «le Point de vue de Ponce-Pilate» (Pr., p. 912) : « Barabbas (le Fils a Papa, comme lappelaient mes jeunes attachés)...» Voir la méme traduction dans Un poéte regarde la Croix (O. C., XIX, p. 211). Les manuscrits grecs donnant quatre otthographes différentes du mot, on en donne des étymologies diverses : Bar-rabba, « fils du docteur » (Langen), ou bat-rabban, « fils de notre doéteur» (Ewald); bar-abba, « fils du pére» (S. Jéréme, S. Hilaire, Théophylacte, Lightfoot), ou bar-abban, « fils de notre pére», et enfin bar-Abba, « fils d’Abba » (Did. de la Bible, t. 1, col. 1442).
Page 4).
1. En réalité, VI, 4: « Il y avait des géants sur la terre en ces temps-la, car depuis que les enfants de Dieu eurent épousé les filles des hommes, il en sortit des enfants qui furent des hommes puissants et des longtemps fameux. » — « Et des héros » est en sutchatge. 2. En réalité, LV, 2: « Pourquoi employez-vous votre argent a ce qui ne peut nourtir et votre travail 4 ce qui ne peut rassa-
sier. » 3. Verset 1 : « Sept femmes saisitont un méme homme. » 4. « Les Colombes»,
nom,
aujoutd’hui disparu, d’une villa
Mars- Abril 1907
1075
située a Anglet, dans le quartier Saint-Jean, en bordure de la route nationale ro, a 14 kilométres de Bayonne. 5. Cf. Odes, V (Po., p. 282) : « Je ne vous crains point, 6 gtandes créatures célestes...», et (p. 289) : « Ainsi le ciel n’a
plus pour nous de terreur... » 6. Leimage de Vaile avec l’épithéte grande est fréquente chez Claudel. Par exemple Odes, IV (Po., p. 265) : « Voici le dépliement de la grande Aile poétique», ou Positions (Pr., p. 39) : « ... la grande aile de l’incidente. » 7. Sur Piambe fondamental, voir Positions (Pr., p. 5 sq.). Sut « Phomme blessé au pied», voir Odes, [IV (Po., p. 272) : « Cat tu es trop lourd pour voler / Et le pied que tu poses 4 terre est blessé.» Cf. J.-P. Kempf, «le Boiteux», Paul Claudel 3, les Lettres modernes, 1966/2. 8. Versets 7-8 : « Oui, VPhomme passe comme un fantéme. [...] Tous mes biens sont en vous. »
9. I, 21: «... tecevez avec douceut la parole entée en vous. » 10. I, 22:« Mettez cette parole en pratique, ne vous contentez pas de Pécouter. » 11. Voit p. 36, n. 4.
Page 46. 1. Sap., I, 7: «... et comme
il contient tout, il connait tout
ce qui se dit. » 2. Il s’agit sans doute d’Horace Binney, homme d’Etat améticain (1780-1875). On peut traduire : « Tirer le meilleur parti de Pun et autre monde. » 3. Adéle Perrin, fille de Gabriel, avocat 4 Lyon (1837-1914), et de Genevieve Brac de La Perriére; elle était la troisitme de neuf enfants. — Claudel avait d’abord écrit bel/e-seur ; « cousine »
est en surcharge. 4. I, 4: « De tout étre il était la vie. »
5. Ce nom, celui du prétre de /’Osage — rencontré, lu ou inventé pat Claudel — s’apparente aux sobriquets qui signifient : niais, nigaud, sot, peu méfiant (badaire, badaud, badel, badiou, badolle...). 6. Deuxiéme vers du Processionnal, emprunté a l’office de la Chandeleur. — Sur la p. 72 du cahier, Claudel a collé une lettre manusctite
avec
en-téte du consulat de France
a Fou-tchéou;
datée du 15 mai 1907, elle est vraisemblablement gétant intérimaite du consulat, Fernand
|
signée du
Pila; le futut ambassa-
deur de France 4 Tokyo n’a été nommé a Fou-tchéou que le rer février 1908. Cette lettre mettant en cause des tiers, nous omettons de la publier, conformément a la recommandation de Claudel. Voir p. 203.
1076
Cahier I
7. L’ Allemagne et la Réforme, pat Jean Janssen, traduit de Pallemand sur la 14° édition par E. Paris, avec une introduction de M. G. A. Heinrich, Plon, 1902. Claudel cite de mémoire ou résume ces lignes : « Chez tous ces grands esprits [de l’Allemagne au milieu du xv® siécle], la crainte de Dieu était le commencement de la sagesse. Chrétiens convaincus, humbles croyants, ils n’en étaient pas moins indépendants et résolus. Leur courage ne
redoutait rien, et leur 4me énergique et forte était en méme temps d’une sensibilité profonde» (t. I, /’Allemagne a la fin du Moyen Age, p. 5). — Cf. Suarés, p. 105, une allusion a cette lecture.
Page 47.
.
1. Claudel note-t-il cette interprétation fantaisiste, sachant qu’elle est fantaisiste? Il pouvait consulter /’ Année liturgique de dom Guéranger qu’il avait sous la main (VI¢ seétion, t. III, Paris, 1867, p. 153). — Cf. Processional (Po., p. 297) : « Comme le clergé et les fidéles 4 chacune des trois Rogations / S’en vont de bonne heure a travers la campagne en procession/ Pour demander la benison de Dieu sur l’ouvrage des agriculteurs et sur les prémisses des moissons... » 2. Cap situé a l’entrée du golfe d’Aden. On notera le gout de Claudel pour la contemplation et l’interprétation des contours @un pays ou d’un continent. Voit par exemple dans /e Soulier de Satin, et J. Petit, « la Carte chez Claudel », Cah. Cl. canadien, 4.
3. Les Grées « appattiennent a la génération des divinités pré-olympiennes, comme leurs sceurs les trois Gorgones. Elles sont sceurs et au nombre de trois. Elles s’appellent Enyo, Péphrédo et Dino, et n’avaient 4 elles trois qu’un ceil et qu’une dent qu’elles se prétaient 4 tour de rdle» [voir le mythe de Persée] (Pierre Grimal, Dié. de la mythologie grecque et romaine, PLO LE ro5 tp. 269): 4. En réalité, LXX, 9 : « Ne me rejetez pas au temps de la vieillesse; lorsque ma force se sera épuisée, ne m’abandonnez
pas. » 5. Cf. C. del’ Est, « le Pin» (Po., p. 79). 6. Texte non identifié. Trad. : « Il faut amoindrir ses haines, augmenter ses sympathies. » 7. Aristote, De anima, chap. 111, 430 a, 10. Ed. Teubner, p. 85. 8. De Coelo, liv. Il, chap. rv, 287 a, 10, Teubner, p. 42. Trad. (Tricot, Vrin, 1949, p. 78) : « [Etant donné qu’il est manifeste et posé en principe que PUnivers est doué d’un mouvement de
rotation circulatoire, et qu’il a été démontré qu’Jau-dela de la citconférence la plus extérieure il n’y a ni vide ni lieu, [il faut nécessaitement que univers soit sphérique]. »
Abril- Juin 1907
1077
Aprtés cette note quelques indications peu claires et peu aisées a reproduire sur les chiffres chinois : « XX ou en chinois 5, les quatre points et l’autre. En caracteres romains V moitié de X [indication du X coupé en deux]. ) (en chinois 8 [suivent quatre points en carré] deux cartés. 4 [un carré dont deux cdtés sont prolongés] le carré marqué de deux index. En chinois [un cercle coupé par deux arcs] les paires dans l’aétion de se dégager. » __ Page 48. t. Extrait de Walden. Trad. : « Comment puis-je m/’affliger, moi qui ne cesse d’admirer?» Parlant a Lyon en 1949 de la littérature japonaise, Claudel compare pour la « fraicheur» et le « sentiment» un recueil de Kamo Tchoméi « aux livres de PAméricain Thoreau » (Pr., p. 1159). 2. Keats, Bright lar: « The moving waters at their priestlike
task / 3. veau 4.
/ Of pure ablution round earth’s human shotes. » Trad. : « Ils échangérent leur gloire contre la figure d’un qui broute Vherbe. » Odes, III (Po., p. 252) : « Je mhonorerai point les fantomes
et les poupées, ni Diane, ni le Devoir, ni la Liberté et le boeuf
Apis. » 5. Odes, V (Po., p. 284) : « Car les ténébres sont extérieures, la lumiére est au-dedans. » — « Toujours » est en surcharge. 6. Vetsets 23-24 : « Et il parlait de les exterminer, si Moise son élu ne se fat tenu sur la bréche devant lui. [...] Et ils n’eurent
que du mépris pour une terre si désirable. » 7. Vertsets 28-29 : «Ils se consacrérent a Béelphégor et mangérent des sacrifices offerts 4 des dieux sans vie. Ils irritérent le Seigneur par leurs ceuvres criminelles et la ruine s’accumula parmi eux. » 8. Le Psaume CVI, combiné avec le Magnificat, est la substance méme de la III® Ode. Page 49. 1. Odes, V (Po., p. 289) :« Comme on voit les petites araignées ou de cettaines larves d’inseétes comme des piertes ptécieuses bien cachées dans leur bourse d’ouate et de satin, / C’est ainsi que l’on m’a montré toute une nichée de soleils encore embartassés aux froids plis de la nébuleuse...»» — Les compataisons qui précédent semblent bien étre elles aussi des notes prépatatoires pout cette V° Ode. 2. Luc, I, 34. Réponse de la Vierge 4 Ange : « Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d’-homme?»
— On
1078
Cahier I
rapptocherait du commentaire de Claudel de nombreux passages des Odes; voir II, Po., p. 246-247 : « Ou sont les hommes? [...] Seigneur, il fait bon pour nous en ce lieu, que je ne retourne pas a la vue des hommes. / Mon Dieu, dérobez-moi a la vue de tous les hommes»; IV, p. 264 : « Que m’importent tous les hommes 4 présent!...»; p. 274 : « Ou eét la société de tous les hommes ?...»; et encore V, p. 279, 280, 282, 283. 3. Cf. Choses de Chine (Pr., p. 1021) : « Il fait si chaud que ma le€ture préférée eSt celle de quelque exploration polaire... » 4. L’Evolution de la matitre, 1905, chap. 1, passim, spécialement p. 55. A propos dune chronique du Dr Lebon sur « |’Evolution des forces », Mercure de France, 1°? septembre 1907, Claudel écrit a Frizeau : « L’apparence de solidité des choses ne serait due qu’a Vextréme rapidité du mouvement des particules qui les composent » (Jammes, p. 113, 20 octobre 1907). — Cf. Abrégé (Suarés, p. 204) : « Nous voyons que tout lunivers remue. Tout en ce monde est mouvement, et témoigne de Vagitation sacrée de la créature, toujours en état de création, incapable d’exister par elle-méme, de subsister en présence d’un Créateur immobile; tout trahit Pafflux. » 5. Claudel appellera Stanley « grand inventeur de la terre», Accompagnements, « Elémir Bourges» (Pr., p. 534). Le passage de la [V® Ode sur « le canot démontable qui remonte |’Atuwhimi avec Vexpédition polaite qui prend des observations magnétiques » (Po., p. 267) a pu lui étre inspiré par le récit de Stanley, A travers le continent mystérieux, Hachette, 1879, chap. 1x, p. 278 : « L’Atuwhimi vient de LTEst-Nord-Est magnétique...» On trouveta une gravute représentant le « canot démontable » dans Stanley, Dans les ténébres de I’Afrique, Hachette, 1890, t. I,
Pp. 376. Bréviaire romain, leQure de office de matines pour la féte de S. Hilarion, moine du désert d’Egypte. Trad. : « Va, pourquoi crains-tu? Va, mon ame, pourquoi hésites-tu ?» — « Mourant » est en sutcharge. 7. Odes, V (Po., p. 282) : « Et moi, je vois tous vos agtres qui
veillent, pateils aux Dix Vierges Sages a qui l’huile ne fait pas défaut. » Page yo.
1. Sut le P. Robert, voit Chaigne, Vie, p. 75, et infra, plusieuts allusions. — Le P. Desrumeaux, aprés avoir été procureur des Lazaristes en Chine, fut nommeé visiteur, c’est-a-dite repré-
sentant du supérieur général de cette congrégation pour tous les diocéses de la Chine du Nord. Voit Jacques Leclercq, Vie du Pére Lebbe, Castermann, 1955, passim, surtout p. 166 sq.
Juillet-Décembre 1907
1079
2. « Dans le temps » est en surcharge. 3. Ps. XLIV, 14. Le texte est : Ovenis gloria ejus filiae regis ab intus... Trad. : « Toute la gloire de la fille du roi est au-dedans. » 4. Claudel écrira a Gide le 28 septembre 1912 : « Je suis bien curieux de savoir ce que vous pensez du Paradise loft. A cdté dadmirables beautés et des morceaux délicieusement précieux et confits (l’Ange chimique dans le soleil), on y trouve des choses impayables : la bataille d’artillerie des anges, par exem| ple» (Gide, p. 204). Sur Vartillerie des anges, voir aussi Apo. calypse (O. C., t. XXV, p. 87 et 163, n. 2). Toutefois, dans son “discours a Cambridge (Pr., p. 1325), Claudel place Milton _ parmi les écrivains anglais qu’il a lus « avec un plaisir infini». 5. Trad. : « On ne vetrait personne se toutner vers Dieu
' sans amour de la leétute. » 6. Claudel a pu lire la vie de S. André Bobola, jésuite polonais mattytrisé par les cosaques 4 Janow en 1657, soit dans I’Essai | historique sur le bienheureux André Bobola, par Victor de Buck, prétre de la compagnie de Jésus et bollandiste (Bruxelles, Vandereydt, 1853), soit dans la Vie du bienheureux André Bobola, pat le P. Olivaint (Paris, Julien, Lanier et Cie, 1854). Quelques
détails viennent de ce dernier ouvrage : « Ils coupérent des branches encore tendres et flexibles et, les ayant trempées dans Veau [...]. Les branches, en se séchant, setraient [la téte] de plus en plus » (p. 48); également « le tas de fumier » sur lequel e&t jeté le corps du martyr (p. 58). 7. Le livre de Bougainville, Description d’un voyage autour du monde, fat publié en 1771-1772 (2 vol.). Celui de Diderot,
| Supplément au voyage de Bougainville, fut publié pour la premiere fois en 1796 pat Vabbé Bourdet de Vauxcelles sous le titre | AWOpuscules philosophiques et littéraires. On le trouve dans Diderot, CEwvres, Bibliothéque de la Pléiade, p. 934. :8. Verset 5. Trad. : « Il a fait les cieux avec intelligence...»
Page sr.
1. Cf. Corona,
« Hymne du Saint-Sacrement» (Po., p. 398) :
« Versant la téte sur Votre épaule...» et Protée, Il, 2 (Th. I, Dp. 344) : « Cette téte tout 4 coup que j’ai versée sur ton épaule... »
| 2, Stephen-Jean-Marie Pichon, né a Arnay-le-Duc en 1857, ministre de France 4 Pékin en 1900. Claudel évoque briévement la révolte des Boxers dans Souvenirs de Pékin (Pr., p. 1026). Voir Gide, p. 255.
3. I, 2. Trad. : [le Fils] par lequel aussi il a fait les mondes. »
4. Le 24 mars
1911, Claudel dans une lettre a Sylvain Pitt,
reprendra les mémes
mots
: « Car Joseph était charpentier. II
était obligé de discutet avec les clients et de signer de petits
1080
Cahier I
contrats, de poursuivre les débiteurs récalcitrants, de plaider,
de compromettre, d’acheter ses fournitures au meilleur compte en réfléchissant sur les occasions, etc.» (Positions, Il, « Lettre sur S. Joseph», O. C., t. XV, p. 236). Au début de cette lettre,
il déclare avoir l’« esprit rempli» de la « grande et un peu miyStétieuse figure de saint Joseph dont le nom seul fait sourire les gens supérieuts » (sbid., p. 237). En 1906, il se proposait de donner 4 son premier enfant le nom de Joseph et avait fixé la date de son mariage en soulignant « jour de la S.-Joseph» (Jammes, p. 84, 88, 91). 5. Verset 4 : « Il compte la multitude des étoiles et il leur donne des noms 4a toutes.» Cf. Messe (Po., p. 492) : « Ou cette étoile prés de la Croix-du-Sud qu’on appelle Alpha du Centaute?» * Page 52.
1. Le trait qui souligne « imbécile» et le mot « non» ont été ajoutés aprés coup. La formule se trouve dans Tas de pierres, éd. Pauvert, Ciwvres dramatiques, p. 1561.
1908
Page 53.
1. Odes, V (Po., p. 286) : « O les premiéres gouttes de Paverse qui roulent dans la poussiére de la pluie de l’Equateur pareille a du thum tiéde! » 2. Cette réflexion a été inspirée 4 Claudel par une page du Cours de philosophie positive (Schleicher, t. I, 1907, p. 398). Comte vient de parler du théoréme de la conservation des forces vives, de sa limitation découverte par Carnot, et de son application a la mécanique industrielle : « Ce théoreme présente direftement, en effet, la considération dynamique d’une machine quelconque sous son véritable aspect, en montrant que dans toute transmission et modification du mouvement effe€tué pat une machine il y a simplement échange de force vive entte la masse du moteur et celle du corps 4 mouvoir. Cet échange serait complet, c’est-a-dire toute la force vive du moteur serait utilisée en évitant les changements brusques, si les frottements, la résiStance des milieux, etc., n’en absorbaient nécessairement une portion plus ou moins considérable suivant que la machine eét plus ou moins compliquée. Cette notion met dans tout son jour
Pabsurdité de ce qu’on a appelé le mouvement perpétuel en indiquant
Janvier-Février 1908
1081
méme d’une maniéte générale 4 quel instant la machine abandonnée a sa seule impulsion primitive doit s’arréter spontané_ ment;
mais cette absurdité est d’ailleurs de sa nature tellement
- sensible qu’Huyghens avait, au conttaite, fondé en partie une démonstration du théoréme des forces vives sut l’évidence manifeste dune telle impossibilité» (mots soulignés par les éditeurs). 3. Cf. Positions, « Réflexions et propositions sur le vers francais », Mémoires, p. 44; Suarés, p. 129; Riviere, p. 126, et la
lettre au P. de Tonquédec (O. C., t. XVII, ~ nécessité (nombre, rime) » est en marge.
p. 270). —«La
Page 54.
1. Ila Ilae, gq. 23, art. 8. De Caritate, q. 1, art. 3; IIL Sent, dist. 36, art. 2. 2. Claudel
reprend
souvent
cette
image;
cf. « l’Iliade »
(Pr., p. 403), « PAutomate créateur » (O. C., t. XVII, p. 323) et « Réflexions et propositions sur le vers francais» (Pr., p. 3) : «... ce ne sont pas les mots qui créent /’I/iade, c’est /’Iliade qui crée les mots ou les choisit...» Ainsi se détruit la théorie du « hasard créateur ». 3. « Tout ce qui vit nait de la vie. » 4. Claudel a illustré d’un dessin la deuxiéme loi de Képler. — Cf. Odes, V (Po., p. 289) : « ... La mort au lieu de vous obscutcir / Vous dégage comme une planéte qui commence son éternelle otbite, / Parcourant des aires égales en des temps égaux, / Selon Pellipse dont le soleil que nous voyons reporte un seul des foyets.» Et Riviére, p. 130 : « Quand on lit un traité d’astronomie, par exemple la description des travaux de Lagrange sut les perturbations planétaires, on est saisi d’admiration pour les précautions prises pour que chaque planéte garde son orbite avec une précision exquise» (28 janvier 1908). 5. Noms de deux étoiles de la Grande Outse. Page ss.
1. Le 6 Dumesnil, m’a apptis pas et qui
février 1908, Claudel écrit 4 Gide : « [M. Georges professeur de philosophie a la Faculté de Grenoble] un mot admirable d’Aristote que je ne connaissais est le résumé actuel de toutes mes convictions : “En
tout, pour commencer, le meilleur’. » 2. Cf. Odes, V (Po., p. 284): « Vous
avez placé en moi le
rapport et la proportion / Une fois pour toutes; car un chiffre peut étre changé, mais non pas le rapport de deux chiffres : la est la certitude»; et p. 289 : « ... notre imagination ne peut pas
1082
CahierI
ajouter /Un seul chiffre 4 ce Nombre en extase devant Votre Unité!» — Sur Bergson, voir Jammes, p. 105, lettre du 12 juillet 1907. Page 56. 1. Dans le Soulier de Satin, 111, 8, Ange gatdien dit a Prouheze:
« Od dis-tu qu’est le parfum? o/ diras-tu qu’est le son? Entre le parfum et le son quelle est la frontitre commune? Ils existent en méme temps. Et moi j’existe avec toi» (Th. I, p. 815). 2. La derniére phrase semble étre une surcharge. 3. S. Augustin, In Joannis evangelium tratatus CXXIV, tract. XLIX, n° 6, 5. A propos de la parole de Jésus 4 Marthe : Hoc ergo ait: \Infirmitas haec| non est ad mortem, quia et ipsa mors non erat ad mortem, sed potius ad miraculum, quo fatto crederent homines in Christum et vitarent veram mortem. « Voici donc ce qu'il dit : Cette maladie ne va pas vers la mort, parce que cette mott elle-méme n’était pas pour la mort, mais plutot pour un miracle en vertu duquel les hommes croitaient au Christ et éviteraient la mort veritable.» Office du vendredi, 4° semaine de Caréme. 4. Verset 51 : « En vérité je vous le dis, si quelqu’un garde ma parole, il ne verra jamais la mort.» Evangile du dimanche de la Passion. 5. Déja dans Art poétique (Po., p. 31):« Jentends par forme, non seulement le tracé dune certaine figure, mais du fait de la fermeture quelle établit, la constitution d’un certain milieu, en tant qu’obéissant dans toutes ses parties au rythme qui les
compose. » Page 57.
1. Claudel prépare /’Ozage et « arréte le dessin» du drame. Voir p. 685 n. 23978; ne Shen 132. 2. Verset 13 : « Ils m’ont abandonné, moi qui suis une source d’eau vive, et ils se sont creusé des citernes, citernes crevassées,
et qui ne peuvent retenit l’eau. » 3. Verset 18 : « Et maintenant qu’as-tu a faire sur le chemin de ’Egypte pour boite de l’eau bourbeuse ?» 4. Ibid., ll, 20 : « Sous tout arbre touffu, tu t’es prostituée,
comme une femme impudique. » 5. Ibid., U, 31 : « Suis-je devenu un désert pour Israél ou une terre de ténébre? Pourquoi mon peuple a-t-il dit : “Nous nous retitons, nous ne viendrons plus vets vous’? » — 32 : « Une jeune fille oublie-t-elle sa parutre, ou une épouse |’écharpe qui
otne son sein? Cependant mon peuple m’a oublié durant des
Mars- Avril 1908
1083
jours sans nombre.» Au-dessus de peéforalis, Claudel a écrit en sutcharge « le corset». — Tous ces textes sont lus a l’office du dimanche des Rameaux. 6. Claudel résume ainsi le texte de S. Léon qui constitue la 5° legon des matines du dimanche des Rameaux : « En effet si Yennemi cruel et orgueilleux avait pu connaitre le dessein de la miséricorde divine, il eit désiré apaiser les ames des Juifs plutdt que par des haines injustes les libérer de leur servitude, alors qu’il attente a la liberté de ceux qui ne lui doivent rien » (Sermo LXII, 3, De Passione Domini, XI; P. L., LIV, col. 351).
7. Ibid., 6° legon : « Les mains impies des futieux se portérent sur lui : tout en accomplissant leur crime, elles servaient le
Rédempteur. » 8. Office du dimanche des Rameaux, répons de la 8 legon de matines. Texte tiré de Sap., II, 16 : « Nous sommes pout lui chose frelatée; il évite notre commerce
comme
une souillure.
I] proclame heureux le sort final des justes. » 9. Cf. Riviére, p. 159 : « L’épouvante métaphysique, cette “ap hasie extatique” dont parle Plotin.» Sur les différents sens de éxoraows chez Plotin, voir Jean Trouillard, /a Purification plotinienne, P.U.F., 1955, Pp. 97Page 58.
1. Verset 11 : « Ton sauveur vient; il porte avec lui sa récompense. » 2. Vertset 2: « Il n’a ni beauté, ni éclat, nous l’avons vu.»
3. Ibid., 2-3 : « Et nous avons méconnu. II était méprisé, le dernier des hommes, un homme de douleurs, qui connait la
.
souffrance. » 4. Luc, XXII, 27 : « Moi, cependant, je suis au milieu de yous comme celui qui sert.» — Ce texte, comme ceux qui précédent et qui suivent, est lu a la messe du Mercredi-Saint. 5. Luc, XXII, 37 : « En effet, ce qui me concerne touche a sa fin. » 6. Luc, XXII, 25 : « Et il livra Jésus 4 leur volonté. » — 35 : « Et le peuple se tenait 1a, regardait; et avec lui les chefs se moquaient de Jésus : “Il a sauvé les autres, qu’il se sauve luiméme, s’il est le Christ, l’élu de Dieu’’. »
7. Jérémie, XVII, 16: « Je n’ai pas désiré le jour de Phomme, vous le savez.» Lu aux matines du Mercredi-Saint. Page y9. 1. C.E.
Lire
Connaissance
de Il’ES.
Voit
Tombes-Rumeurs
(Po., p. 41-43), sut le « pays des tombes » avec « le petit édicule
1084
Cahier I
ot lon brile tous les papiers que marque
le mot
noir», le
demi-cercle ou Omega, les pins. Voir aussi Dragon (O. C., IV, p. 59): « Partout, que ce soit la touffe des roseaux divinatoires
ou ttois pins plaintifs, ou la grande forét de saules et de peupliers des sépultures impériales, le Chinois veut qu’il y ait au-dessus de ses morts le bruit d’un feuillage ému et du vent qui passe.» Voir également une photographie d’une tombe en oméga, 4 Fou-Tchéou, dans Paul Claudel par lui-méme, de P.-A. Lesort, Seuil, 1963, p. 54. 2. Trait cité textuellement dans Choses de Chine, 9 mars 1936 (Pr., p. 1024).
3. Contra Gentes, lib. IV, cap. xcvir. Apres la phrase soulignée, Claudel a omis : « Plus de cataclysmes 4 redouter, plus de ces révolution$§ qui viendraient troubler ou bouleverser Vordonnance du globe. » 4. Sum. th., q. 91, att. 1, ad 5. La traduction et le rapprochement de ces deux textes indiquent que Claudel les a lus dans J.-B. Terrien, /a Grace et Ja gloire (voir p. 34, n. 12); le premier, t. I, p. 301, le second p. 302. 5. Cf. S. Jean, XVI, 13 : Ouaecumque audiet Spiritus santus Joquetur. Claudel a écrit « esprit » avec une minuscule. 6. Libre citation de Lutéce, Lettres sur la vie politique, artistique et sociale de la France, pat Henri Heine, Michel Lévy, 1866, p. 135 : « ... Le peuple mécontent qui réclame non seulement Pégalité des
lois, mais aussi l’égalité des jouissances » (lettre du 4 novembre 1840); et p. 211 : « Il ne s’agit plus de Végalité des droits dans Etat, mais de l’égalité des jouissances sur cette terre... » (11 décembre 1841). Page 60.
1. S. Jean, XVII, 2. Texte exa&t : Us ommne quod dedisti ei det... Trad. : « Pour qu’il [le Fils] donne la vie éternelle a tous ceux que tu lui as donnés. »
2. Verset 25 : « Je vous revaudrai les années qu’ont dévorées la sauterelle, le ver, la nielle et la chenille, cette armée puissante que j’ai envoyée contre vous. » Page 61. 1. H. Oldenberg, /e Bouddha, sa vie, sa dottrine, sa communaute. Vérifiées dans la 4° édition francaise, revue d’aprés la derniére édition allemande (Alcan, 1934), les citations de Claudel different
un peu du texte. P. 23 : « Le créateur du monde, Prajapati : au commencement il était seul et ce désir lui vint : “Puissé-je devenir plusieurs, puissé-je engendrer les créatures”’...» P. 26,
Mai- Juillet 1908
1085
cite le « Bradhmana des cent sentiers», comme un ouvtage des « plus significatifs de toute la littérature védique». Le texte : « Au commencement... furent engendrés » se trouve p. 35. Les autres Citations, avec quelques variantes, p. 39, 42, 46.
2. Sur le gotit de Claudel pour la bonne cuisine, voir Cah. Cl. II, p. 79; Dragon (O. C., Ill, p. 145) ou Frédéric Lefevre, Une heure avec... 5° série, Gallimard, 1929, p.
114: « Les cuisiniers
sont des gens trés appréciables et pour lesquels on ne saurait
avoir trop dVégards. » 3. « Les archives de la terre», en surcharge. 4. Luc, VI, 38 : « Car la méme mesure avec laquelle vous aurez mesuté setvira de mesure pout vous.» La réflexion qui suit rappelle certains themes de la V® Ode. Page 62.
1. Claudel a d’abord écrit mesure, a raturé, puis écrit « avére ». 2. L’expression est de Crétineau-Joly, dans son Introduétion ‘aux Mémoires du cardinal Consalvi, Plon, 1864, t. I, p. 33. I
s’agit des négociations, engagées aprés 1815, avec George IV d’Angleterre, Alexandre de Russie et Frédéric-Guillaume de Prusse, pour la restitution au Saint-Siege des territoires dont il avait été spolié. 3. Trad. : « La blessure corporelle en effet fait apparaitre la blessure spirituelle. » 4. R. D. D. Ruperti abbatis monaSterii S. Heribert Tuitiensis [de Deutz] opera omnia, dans P. L., CLXVII-CLXX. Le De divinis offictis libri XII eSt dans le tome CLXX (il fut achevé en 1111; voit Henri de Lubac, Je crois en Dieu, Introd., p. 10). 5. Vie de Constantin, P.G., XX, col. 1107. Trad. : « Constantin,
tout brilant de la sagesse divine...» Cette Vie de Constantin, qui nous
est parvenue
s’agirait d’Eusébe
sous
le nom
de Césarée
d’Eusébe,
est contestée;
il
(265-340), l’auteur de lHistoire
ecclésiastique, disciple de Pamphile, surnommé « |’Hérodote chrétien » et « Pére de histoire ecclésiastique ». Page 63.
1. La derniére phrase est en surcharge. 2. Cf. Jammes, p. 132, et Suarés, p. 130. 3. Claudel a écrit /e 24 raturé, puis « le méme jour ». 4. Cf. Odes, V
(Po., p. 289)
: « Et nous
considérons
vos
étoiles au ciel / Paisiblement... » 5. Voir des textes tardifs, comme celui de 1952, sur Hugo : «un magnifique poéte, bousilleur éhonté d’admirables dons, ceux de l’imagination plutét que du cceur et de la pensée. [...]
1086
Cahier I
Un incontestable Inspiré, qui ne se méfiait pas assez de Vinspiration.» (Pr., p. 474.) 6. Verset 19 : « Voix de votre tonnerre tout autour, Vos éclairs ont illuminé le monde.» — Claudel a inversé les deux phrases. Page 64.
1. Le tome XCVI de P. L. contient les lettres d’Elipand (col. 859-882) et la lettre d’Hétérius (ou Ethérius) a Elipand (col. 893-1030); il s’agit des controverses adoptianistes (voir Diét. d’ Histoire et de Géographie ecclésiaStiques, t. 1, col. 586). La lettre d’Hétérius est de 786. 2. Trad.*: « Que nous passions en ce que nous ptenons, que nous soyons ce que nous recevons. » 3. Vertset 39: «... ils n’étaient que chair, un souffle qui passe et qui ne revient plus. » 4. Plus exa&tement Heilmholtz, physiologiste allemand du xix® siécle, auteur d’un ouvrage sur la « consetvation de la force», d’ot est tirée sans doute cette idée.
5. Coupute de journal, probablement /e Temps, collée sur deux colonnes et templissant toute la page 97. Page 65.
1. Claudel a marqué ce passage depuis : « En second lieu... » Page 66.
1. Claudel a mis une croix en face de cette derniére phrase. Page 67. 1. M. : lire Maurras, semble-t-il. Voir la lettre 4 Suarés du
10 février r911 : « J’avoue que l’Apte polémique de Maurras m/a plu, peut-étre non pas par les meilleurs cdtés de mon Ame. Mais du moins il hait autant que moi la démocratie. [...] Ou je
me sépare tadicalement de lui, c’est pour sa sécheresse pédantesque et doétrinale, pour son admiration absurde a l’égard d’un des birbes les plus hideux de 1848, Auguste Comte, pour ses prétentions dogmatiques mal justifiées en littérature, et enfin pout sa maniére réaliste de concevoir la monarchie» (Suarés, p. 160). Dans la méme lettre, Claudel avoue ses « préférences » pout «cette forme de gouvernement», mais une préférence tout intelleGtuelle : « Pour l’instant, cette monatchie est un téve
Aout 1908
1087
et un homme de pensée a d’auttes devoits que de se méler a la cohue des cattefouts.» En fait, ces réflexions sur la monatchie
a cette date préparent /’Ozage. Page 68.
1. Cf. /a Ville, Il (Th. I, p. 452), par exemple. On retrouvera ces idées sur les « corporations» dans Loir-et-Cher et dans les articles écrits aprés la guerte; voit Pr., p. 1359 : « Le droit a Pespoit. » 2. On retrouve ces idées sur la Révolution, empruntées peutétre a Proudhon, dans une lettre 4 Suarés : « C’est une révolution contre le hasard » (p. 159, 10 févtrier 1911), dans la « Lettre a Sylvain Pitt», Positions, Il, et surtout dans /’Osage: « C’est une révolution contre le hasard!/ Quand un homme veut remettre son bien ruiné en état, / Il ne va pas s’embatrasser superstitieusement d’usage et de tradition [...] / Se fiant a sa
propte raison » (Th. I, 258). ' 3. La premiére rédaction raturée est : Connaitre a fond, c’est-adire ce qu'il y a de plus bas. 4. Extrait de la séquence Lauda Sion Salvatorem pout la féte du Corps du Christ. « Quantum potes, tantum aude. C'est la grande devise de l’art et de la civilisation chrétienne...» (Riviere, p. 187, 28 avril 1909). Cf. Turelure, dans /’Ofage, Il, 1 (TA. I, p. 259) : « Ouantum potes, tantum aude! Cest la devise des Francais. » Trad. : « Ose autant qu’il est en ton pouvoir. » 5. Cf. Prudence, /e Livre des couronnes (Periftephanon liber), hymne
IX, « Passion
de saint Cassien»,
v. 10-15
: « [Je vis]
Vimage d’un mattyt peinte en vives couleurs; il portait mille plaies; ses membres étaient tout lacérés, et sa peau apparaissait ctiblée de petites piqares. Autour de lui d’innombrables enfants (spectacle pitoyable!) enfongaient, fichaient dans son corps les petits stylets avec lesquels ils avaient l’habitude de remplir tapidement leurs tablettes enduites de cite, en écrivant sous la di€tée des paroles du maitre » (trad. Lavarenne, Budé, t. IV, p. 112). — Claudel peut noter aussi ce détail d’aprés la legon du Bréviaire, 13 aout. 6. Voir Dié. de la Bible, supplément, t. 1, col. 207-225 : ces tablettes, découvertes pat hasard en 1887, étaient « les archives
diplomatiques
du pharaon Aménophis
IV»; elles contenaient
des lettres venant « des villes de la cOte, comme Biblos, Beirouth, Sidon, Tyr, Acre, Ascalon, et des villes de l’intérieur comme Mégiddo, Gézer, Jérusalem, Lachis. [...] Cinquante années de
Vhistoire des pays bibliques au début du xrv® siécle avant notre ere. » 7. Voir Dragon (O. C., IV, p. 33-34) : « La Chine [...] n’était
1088
Cahier I
pas un Etat, c’était un domaine soumis 4 |’exploitation d’une armée innombrable de fonétionnaires inutiles. [...] Il y a une entente séculaire entre le peuple et ses parasites. » Page 69. 1. Verset 11 : « Et ma vieillesse
[se renouvellera]
par votre
abondante miséricorde. » 2. Ovide, Métamorphoses, IV, 461. Trad. G. Lafaye : « Ixion
toutne sut sa toue, condamné a se poursuivre et a se fuir. » 3. Ps. LXXXVIII, 41. Rétablir : ejus formidinem. Trad. « Vous avez templi de frayeur ses forteresses. » 4. Eccli.; XXX,
:
25 : « Car la tristesse en a tué beaucoup,
elle n’est utile a rien. » 5. 5° Néméenne, 17° Strophe, début. 6. Voir Abrégé de toute la dottrine chrétienne (Suarés, p. 204) : « [Le désordre] ne peut étre l’cuvre que de la créature libre, libre de se prendre elle-méme pour fin, au lieu de Dieu qui n’a pas de fin. Différence, préférence. Cette préférence vicieuse est le péché dit originel, qui a pour cause cette différence originelle d’avec Dieu en qui létre se complait, se plait en tant que tel. La conséquence du péché originel, par qui Pétre fini se choisit
pour fin, est la Fin, mort
ou séparation...»
Voir également
Positions, 11, « Du mal et de la liberté ».
7. Eschyle, Agamemnon, voit 1080 sq.; c’est Cassandre qui parle : « Apollon! Apollon! dieu des routes! Apollon qui me perds — et sans peine — pour la seconde fois » (trad. Paul Mazon, Budé, p. 48). — Cf. Introduttion al’ « Apocalypse» (O. C., XXI, p. 107) : « ... le patron des sauterelles, suivant le prophéte, il n’est autre que celui des intelleCtuels, et particuliérement des poetes : ni plus ni moins qu’Apollon lui-méme. Car poéte en grec signifie auteur, faiseur, mais Apollyon veut dire destrudfeur. » Cf. également Apocalypse (O. C., t. XXV, p. 49 et 89), A propos du méme passage IX, 11; et enfin Conversation sur Jean Racine (Pr., p. 466) : « A Porigine méme de la tragédie, sur le seuil méme de cette porte redoutable d’ot tant de chefs-d’ceuvre allaient sortir, le vieil Eschyle dresse la figure grandiose de la prophétesse troyenne, accusattice de cet Apollon qui I’a séduite : Apollon! Apollon! Dieu de la porte! mon Apollon de mort! Apélesas, tu m’as perdue |» 8. Apoc., XVIII, 22. Trad. : « ... et la voix de la meule chez toi ne s’entendra jamais plus.» — Les textes qui suivent sont également extraits de l’Apocalypse. Trad.: XX, 11: « Puis je vis un trdne [...] et Celui qui siége dessus. Le ciel et la terre s’enfuirent de devant sa face sans laisser de traces.» XXI, 8: « Mais les laches, les renégats, les dépravés, les assassins, les
Septembre-Oltobre 1908 imputs,
les sorciers,
les idolatres,
bref tous
1089 les hommes
de
mensonge, leur lot se trouve dans l’étang brilant... » Page 70. 1. Apoc., VI, 14. Rétablir : Es coelum recessit sicut liber involutus.
Trad. : « Et le ciel se retira comme un livre qu’on roule. » 2. Aphorismes, Sansot, 1908. Fagus faisait pattie de la « Coopétative de prieres » (cf. Jammes, p. 20). Il avait déja publié a cette époque Testament de vie premiére, 1898; Colloque sentimental, 1898;
_-Ixion, 1903; Jeunes fleurs, 1906. 3. L’Antilambda, signe utilisé dans les manuscrits pour indiquer les citations, avait la forme d’un lambda trenversé < ; PAntisigma { servait a indiquer les vers 4 transposer. 4. Ps. CII, 2: « Vous étendez le ciel comme une tente. » 5. Il s’agit sans doute du voyage que Jean-Claude Berton situe en 1907 (Cah. C/. IV, p. 114). 6. Sous « quenouilles » un mot taturé : grains (2); « comme de la céramique » est en sutchatge. Page 71.
1. Tout ce passage est de lecture difficile : on pourrait lire « montagnes de ferre» et « entre les deux masses fondantes...)>. 2. Cf. Odes, II (Po., p. 235): «... au plus terre de la terre, je vis jaune.» Ibid.: « ... le vent jaune. » Dragon (O. C., IV, p. 147) : « La Chine du vent jaune, de l’air jaune, de eau jaune, de la Terte jaune. » 3. « Ni os ni épiderme » est en surcharge. 4. Voit dans Protée, | (Th. IL, p. 336): «... cet arbre gluant qui produit des pots de confiture. » Page 72.
1. Cf. Odes, IIL (Po., p. 252): « Et Pobservateur cherche et
trouve les pivots et les rubis, Hercule ou Alcyone... » 2. Durand (ou Durant) de Mende, op. cit., IV, 20, 6 (éd. de Madrid, 1775, p. t10). Trad. : « Alleluia, le mot dit peu et signifie beaucoup, car cette joie est plus grande qu’on ne peut le dite avec des mots. » — Sur Guillaume Durand, dit le Spéculateur (1231-1296), et son Rafionale, divisé en huit livres, — le 4° traite de la Messe —, voir Did. d’hist. et de géogr. ecclés., t. XIV, col. 1169-1170. 3. Voir sur cette idée bien claudélienne, Mémoires improvisés, p. 312. Cf. aussi la lettre a Riviére, 29 mai 1913 : « L’amour humain n’a de beauté que quand il n’est pas accompagné par la
1090
Cahier I
satisfaction. [...] Je ne parle pas de amour conjugal...» Les références dans l’ceuvte seraient innombrables. 4. Imitation de Jésus-Christ, liv. Ml, chap. xxi, « Contra vanam et saecularem scientiam), 3. Le 8 novembre,
a Gide
: « Pourriez-vous
me
trouver
une
Claudel écrit
édition latine de
VImitation bon matché imprimée en assez gros carattéres et contenant le texte latin ? Toutes les traductions frangaises sont détestables » (Gide, p. 92). — Trad. de Lamennais : « J’enseigne sans bruit de patoles, sans embarras d’opinion, sans fastes, sans arguments, sans disputes. » 5. IX, 33: « IL n’y a personne qui puisse reprendre les deux patties.» — « Dieu et ’homme » est en surcharge. 6. Préciser : Il Par., xm : « Si je ferme le ciel et quwil ne tombe point de pluie ou que j’ordonne et commande aux sautetelles de ravager le pays et que j’envoie la peste... » 7 Gen., XXVIII, 16 : « Le Seigneur est vraiment en ce lieu et je ne le savais pas. » — Ce texte comme le précédent se trouve dans l’office de la Dédicace des Eglises. 8. Verset 12 : « Que celui qui achéte ne se réjouisse pas et que celui qui vend ne s’afflige pas. » Page 73.
1. Jules Renard note dans son Journal, le 13 février 1900, a la suite @une discussion avec Claudel sur laffaire Dreyfus : « Mais la tolérance, lui dis-je. — Il y a des maisons pour ga, répond-il. » 2. Verset 18 : « Il s’est revétu de la malédiction comme d’un vétement, elle a pénétré comme
|’eau au-dedans de lui, comme
Vhuile dans ses os. » 3. Verset 28 : « Mon Ame s’est assoupie d’ennui. » 4. Sermo 18 de Sanitis,de Béde le Vénérable; la premiére phrase est extraite de la 5° legon de matines de la Toussaint; les autres de la 4° legon de matines du 3° jour dans Poétave de la Toussaint. « A ses fleurs ne manquent ni les roses ni les lys. La paix et la joie engloberont tout. Tout sera tranquille et calme. Une continuelle clarté... Les saints resplendiront comme des étoiles et comme l’éclat du firmament ceux qui en auront instruit beaucoup. » — Cf. Présence et prophétie (O. C., XX, p. 267): « Aujouthui méme |’Eglise se revét dune ‘atmosphére approprice, deuil ou joie, au saint ou au mystére qu’elle commémore. Ni /es roses, nous dit Bede, ni les Lys ne lui manquent. » 5. Ibid., 5° legon de matines du 5@ jour dans Pofave de la Toussaint. Trad. : « Celui qui a fait Sa volonté vit éternellement comme Lui-méme vit éternellement. » 6. Numpholeptos, « Caught by a Nymph», v. 144-145 : « Cette
Olfobre- Novembre 1908
1091
nature féminine, trois fois subtile, des sens. » — « Silencieux vous étes la, vous écoutez, vous souriez, silencieusement un de vos tayons pénétra en moi, blanc quelques instants... » 7. Claudius a Salmasia (de Saumaise) [1588-1653] appelé « Maximus atque Eruditorum princeps». Le titre de ’ouvrage auquel se référe ici Claudel est De hellenistica commentarius contro-
versiam de lingua hellenistica decidens et plenissime pertrattans origines et dialettos graecae linguae, Lugduni Batavotum, 1643. — Trad. : « Qui affirmerait qu’Eschyle est plus clair pour un helléniste d’aujourd’hui que les Evangiles ou les Epitres? Son Agamemnon a lui seul Pemporte en obscurité sur tous les livres sacrés avec leurs tournutes hébraiques et sytiennes et tout le fatras hellénistique. » 8. Claudel a biffé grand et écrit en surcharge : « Erreur, hélas! » — Il écrit a Gide, le 8 novembre : « J’ai fait ces jours-ci la connaissance d’un grand poéte anglais que je ne connaissais pas, Robert Browning. Il a tous les défauts des auteurs de sa race, prolixité, mauvais gout, absence d’ordre incroyable. Mais Pimagination est de premier ordre» (Gide, p. 92). Voir ibid., p. 282. Cf. Th. I, p. 1454, 4 propos du Pére humilié : « Le dénouement ne me satisfaisait pas. Il s’agissait de cette légende italienne que Browning a tacontée tout au long dans /e Pot de basilic...» (Ce poéme n’est d’ailleurs pas de Browning.) Page 74.
1. La parenthese semble avoir été ajoutée apres coup, sans doute en méme temps que « Erreur, hélas!» The Ring and the Book comprend environ 20 000 vets. 2. Trad.
: « Combats
farouchement,
chrétien,
dans
cette
bataille. » 3. The Ring and the Book, 1, 633 : « L’ceil inquisiteur d’une étoile... » 4. Verset 11:« J’ai choisi d’étre des derniers dans la maison
_ de mon Dieu. » 5. Ces noms lieux-dits, comme
sont sans
doute
des noms
de famille ou
de
Violaine, Besme ou Cceuyre.
6. Cf. Riviere, p. 173 (20 décembre 1908) : « Je viens d’envoyer a /’Occident le manusctit des Cing Odes.» A Frizeau (Jammes, p. 141, 9 décembre) : « J’ai temis a un officier qui partait pour France le manuscrit de mes Cing Odes.» A une question posée par Gide le 9 janvier 1909, Claudel répondit le 28 (Gide, p. 95) : « Le manuscrit que j’ai envoyé a /’Occident est celui des Quatre Odes et du Processionnal qui, avec
les Muses,
sont
destinées
a
former mon nouveau livre. Aucune d’elles dans mon intention ne peut étre détachée. Je veux que tout pataisse en bloc, sans
1092 que l’effet
Cahier I en
soit amoindri
par
aucune
publication
anté-
rieure. »
7. Voit Cab. Cl. IV, p. 115, et Pr., p. 398, 1026, 1079, des textes ot Claudel évoque la mort du dernier empereur de Chine. 8. Claudel note les fétes liturgiques en vue du « gros recueil en 4 volumes» dont il parle dans une lettre 4 Gide le 28 janvier 1909 : « que j’appellerai Corona benignitatis anni Dei, qui sera non point une imitation du bréviaire, mais un cycle de chants naissant sous les pas des heures sacrées » (Gide, p. 96). 9. Il Cor., vi, 16. Rétablir : ... inhabitabo in illis et inambulabo inter eos... « Vhabiterai au milieu d’eux et j’y marcherai. » 10, Voir n. 7. Pr., 1026: « J’arrivai a Pékin juste a temps pour contempler la supréme péripétie, la mort myStérieuse et simultanée de la vieille Sémiramis et du pauvre simulactre qu’elle
tenait dans ses serres. » 11. « L’incompréhension fait partie de mes attributs», Henri Mondor, Claudel plus intime, Gallimard, 1960, p. 202.
im
Page 75. 1. Widor, « ’GBuvre de Gevaert», /a Revue des Deux Mondes,
15 septembre 1908. Charles Widor était pianiste et compositeut. 2. Ibid., p. 379. 3. Cette note et la précédente, inspirées par larticle de Widor, ne sont pas des citations textuelles. Page 76.
1. Sut le Logion d’Oxyrrhinque, voit Dif. de /a Bible, article « Papytus biblique », col. 2086 : Logia de Behnera, et Supplément, t. VI, col. 1109. Il s’agit dun papyrus, retrouvé en 1897 a Behnera, Pancienne Oxyrrhinque, qui tappotte des paroles du
Christ. 2. Ici Claudel a dessiné le caraétére chinois « contenir
sa
bouche ». 3. Apres « au-dessus » : de nous, raturé. 4. Images prises dans les vets 2 et 3 du Psaume CX XXII. 5. I Cor., 1, 23 : « Nous préchons nous le Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les paiens. » 6. Gen., II, 7. Trad. : « Alors leurs yeux a tous deux s’ouvri-
rent.» Se lit dans Poffice de ’Immaculée Conception (8 décembre). Page 77.
1. Trad.
; « Venez
a moi, vous
qui me
désirez.
Je vous
Novembre-Décembre 1908
1093
taconterai ce que le Seigneur a fait pour mon ame. II vit, le Seigneur, puisqu’il m’a remplie de sa miséticorde. Je vous _ .taconterai ce qu’il a fait pour mon Ame.» — « Je suis issue de la bouche du Trés-Haut, née avant toute créature;
j’ai fait naitre
dans le ciel une lumiére inépuisable. Les abimes n’existaient pas encore et déja j’étais congue. Car Dieu m’a créée dans la justice, ila pris ma main et il m’a formée. Les abimes n’existaient pas encore et déja j’étais congue. » — Ces textes, tirés de l’Ecclésiastique, du Psaume
LXV,
des Livres de Judith et des Pro-
verbes, sont bien connus de Claudel. Is s’appliquent a la Sagesse ~ou ala Vierge et ont une grande importance dans la signification symbolique des petsonnages féminins du théatre claudélien. Méme origine liturgique que le précédent. 2. Extrait dun sermon de S. Jéréme sur PAssomption de la Vierge:lecon 5 du 2° nocturne de la féte de ’Immaculée Conception. Rétablir : Circumdedit enim virum in utero, sicut Jeremias teflatur, et non aliunde accepit. Trad. : « Car elle a enveloppé un homme dans son sein, comme l’atteste Jérémie, et ne l’a point recu d’ailleurs. » 3. Jean, XIV, 30. Rétablir : Venit enim princeps hujus mundi et in me non habet quidquam. Trad. : « Car le Prince de ce monde vient. Contre moi il ne peut rien. » 4. Homélie de S. Germain, In praesentatione Deiparae, 7° legon du 2° noéturne de la féte de l’Immaculée Conception : Ave amoenissimus et rationalis Dei paradisus. Claudel se souvient sans doute de Rimbaud : « Le chant raisonnable des anges...» 5. Cant., V, 2:« Ouvre-moi, ma sceur, mon amie, ma colombe, ma parfaite.» — Adaptation liturgique de Cant., I, 3 : « Derriére toi, Vierge immaculée, courons dans l’odeur de tes par-
fums. » 6. Verset
3 : « Donne-nous un conseil, exerce l’arbitrage; étends ton ombre comme celle de la nuit, en plein midi. »
7. Hesebon, capitale du roi amorrhéen Sehon; Sabama, en hébreu : fraicheur ou patfum; les deux villes sont citées dans lig OWA 8. Is., XXV, 4:« Un tefuge contre la tempéte, un tafraichissement contre la chaleur». Cf. Seigneur, apprenex-nous a prier (O. C., XXIII, 11) : « Bousculé, assourdi, ahutri par le vacarme @une rue patisienne, si je pousse, contraint par exemple par une subite giboulée, cette porte et l’autre par-derriere qui ne demande qu’a s’ouvrir, une église! tout 4 coup quel contraste, quel vide, quel silence, et comment éviter Pimage [...] dune berge, d’un abri, d’un refuge? [...] On est bien, on est tranquille, Cest raftaichissant... » 9. Is., XXV, 6: « Un festin de mets délicieux, un festin de | bons vins, de viandes pleines de suc et de moélle, de vin clari-
1094
Cahier I
fié.»» — La note suivante semble inspirée par d’auttes passages dIsaie (XXVIII et XXIX). Les leftures d'Isaie sont assez nombreuses dans les offices de |’Avent d’ot Claudel semble tirer ses citations. 10. Hab., I, 3 : « Attends-le, car il va venir. » Page 78. 1. Is., XXVI,
géants ne visités et 2. Is., rompue,
14: «
Que les morts
ne revivent pas, que les
ressuscitent pas, cat c’est pour cela que vous les avez anéantis et vous en avez détruit le souvenir. » XXVIII, 18 : « Et votre alliance avec la mort sera ' votre pacte avec l’enfer ne tiendra pas.» Claudel a
copié infirmo au lieu de inferno. 3. Cf. p. 74, n. 8. Claudel écrita plus tard un poéme, « Sainte Lucie», repris dans Visages radieux (Po., p. 837). 4. Verset 20: « Le Seigneur vous donnera le pain de angoisse | et Peau de l’affliftion, il n’éloignera plus de toi ton doéteur, mais tes yeux verront celui qui t’enseigne. » 5. Frédéric Masson, Awtour de Sainte-Héléne, Ollendorf, 3 vol.
Reétifier : Antommarchi. — Claudel prépare /’Ofage ; il écrit a Gide le 8 novembre : « J’ai employé mon année [...] 4 réfléchir a un grand ensemble de drames qui vont m’occuper toutes les années qui viennent. La chose est encore trop indéfinie et trop compliquée pout que je vous en parle. J’ai cependant a peu pres arrété le dessin du premier drame et méme écrit la premiére scéne »> (Gide, p. 92). 6. « Les saules ne sont pas plus trates ici qu’a Babylone, c’est a cet atbre vermineux que je suspends mes instruments. In salicibus suspendimus organa nostra» (Jammes, p. 151, a Frizeau, 19 décembre 1908). — Ps. CXXXVI, 2. — Voir « Memento pout le Samedi soir » (Po., p. 473). 7. Versets 3-4: « Etablissez, Seigneur, une garde a ma bouche et une porte a mes lévres. Ne laissez pas mon cceut se livrer 4 des paroles de malice pour chercher des excuses au péché. » 8. XLI, 14: « Ne crains pas, vermisseau de Jacob. » Page 79.
1. Claudel avait @abord écrit : « L’esprit n’affirme... L’esprit n’exprime...»; « esprit » est raturé et remplacé par « parole ». Cf. Odes, 11 (Po., p. 242) : « Ainsi la voix avec qui de vous je fais des mots éternels! Je ne puis tien nommer que d’éternel. / La feuille jaunit et le fruit tombe, mais la feuille dans mes vers ne périt pas, / Ni le fruit mar, ni la rose entre les roses! / Elle peérit, mais son nom dans Vesprit qui est mon esprit ne périt plus. La voici qui échappe au temps. »
Décembre 1908
1095
2. Voir Art poétique (Po., p. 177-181). 3. Gratry, /a Morale et la loi de I’Histoire, Douniol et Lecoffre, 1868, t. Il, p. 327 : « De la Pépouvantable et sacrilége perversité de Vesprit de conquéte entre peuples chrétiens. De 1a, par
exemple, l’inexpiable malédiétion qui pése, jusqu’ a réparation complete, sur les empires qui ont, ainsi que s’exprimait Joseph de Maistre, perpétré l’exécrable partage d’une nation chrétienne, la Pologne. Tant que ce point ne seta pas coniprtis, l'Europe n’entrera pas dans la justice et dans la paix.» Cf. le rdle de Lumir
dans
/e Pain dur et celui
de
Fausta
dans la Cantate,
. « Cantique du peuple divisé». L’influence de cet ouvrage de
Vabbé Gratry est sensible dans la vision historique de /’Osage, voir J.-P. Kempf et Jacques Petit, Ezudes sur la Trilogie, « l’Otage», Archives des Lettres modernes, 1966. — Dans « Témoignage » (2950) 4(Br5) ps AL380 Ge. ‘ie partage de la Pologne qu’on a considéré a juste titre comme le péché mortel de l’Europe. » 4. XLII, 2-4: « On n’entendra pas sa voix dans les rues. [...] Il ne sera pas triste ni précipité. » 5. Cf. p. 37,n. 10. On trouvera une bibliographie duP.Wieger dans Marcel Granet, /a Pensée chinoise, coll. « ?Evolution de Phumanité» : Textes historiques, Ho-Kien-Fou, 1902; Caraétéres, ibid., 1903; les Péres du syStéme taoifte, Hien-Kien, 1917; /a Chine a travers les dges, 1920; Histoire des croyances religicuses et des opinions philosophiques en Chine, depuis l’origine jusqu’a nos jours, 1917. Claudel lira aussi de lui Folklore chinois dont il se servira pout la conférence sur « les Superstitions chinoises» (Pr., p. 1075). — Il reprendra Vidée notée ici dans « Méditations sur une paire de chaussures» (Pr., p. 1242; texte de 1938) : « Les Chinois ont remarqué que les objets usuels longtemps employés par un méme maitre ont pris une espéce de personnalité [...].
Les légendes de la-bas sont remplies des aventures d’une figute de pont usée par le temps, d’une piéce de jeu d’échec perdue... » 6. LI, 1 : « Regardez le rocher dont vous avez été taillés, la catricre ferafonte dont vous avez été tirés. » 7. Office de la féte de S. Jean LEvangéliste, 3° noéturne, 2° répons. Trad. :« Il but l’eau de l’Evangile a la source sacrée elle-méme, au cceur du Seigneur. » Page 80. 1. Ps. XXIII, 3 : « Qui montera sur la montagne de Dieu? » — Luc, I, 39 : Maria [...] abiit in montana cum festinatione. « Martie partit en hate vers le haut pays. »
2. Rature : « des Equivalents ». CLAUDEL V - 38
38
1096
Cahier I
3. Verset
12 : « Leurs filles apprétées, ornées
images de temple.»
comme
des
a
1909 Page 81. 1. Eccli., III, rr : « La malédi@tion d’une méte la [la maison] détruit jusqu’aux fondements. » 2. Claudel a lu cette phtase dans l’article de Paul Stapfer sur le livre de Fortunat Strowski, Pascal et son temps, article intitulé « Une |contribution a Vhistoire du sentiment religieux», /a Revue des Deux Mondes, 15 novembre 1908, p. 321. 3. Sur la gloite de Léonide Andreieff (1871-1919), compatable a celle de Gorki, et son rapide déclin, voir T. de Wyzewa, Introdu€tion a /’Epouvante, trad. Fr. Perrin, 1903, et /a Revue des Deux Mondes, 15 mai 1909, Quelques piéces d’Andreieff ont été représentées a4 Paris : Celui qui regoit des gifles, les Jours de notre vie, la Pensée...
4. Réflexion inspirée par la liturgie de la féte de ’Epiphanie : setmon de S. Maxime au 2° noturne, 4° legon, du 5& jour de VPo@tave : Ferunt enim hodie Chriftum... consecrasse fluenta Jordanis, et sermon de S. Grégoite de Nazianze au 2® no€tutne, 5° legon, de Voétave : Ur per haec santtificentur aquae Jordanis. Le 21 décembre 1908, Claudel écrivait 4 Suarés : « Mon bréviaire que je lis tous les jours...» (p. 137). 5. Evangile des « Noces de Cana», le 2¢ dimanche aprés PEpiphanie.
@ & | t #
Page 82, 1. MnAwry : peau de mouton; cf. Hébr., XI, 37. 2. Charles Benoist publiait alors dans /a Revue des Deux Mondes une série d’articles sur « ?Organisation du travail». ( Voir ses Souvenirs, Plon, 1933, t. Il, p. 450. La phrase de Le | Trosne et celle de ’abbé Baudeau sont 4 la page 186 de la Revue (vol. XLVIII,
1° novembre
1908), le texte
de Taine,
sbid.,
p. 176: « Ils’agit de la découvrir [la constitution nouvelle, approptiée, durable], si elle existe, et non de la mettre aux voix. A cet |
égard, nos préférences seraient vaines; d’avance la nature et | Phistoite
ont
moder 4 elles, nous» (extrait poraine). Enfin sation», etc.,
choisi
pour nous; c’est A nous de nous accom-
car il est sir qu’elles ne s’accommoderont pas a de la préface aux Origines de la France contempoce que dit Claudel du « phénoméne de conden- 4) résume les pages 195-200 sur la concentration |
Janvier 1909 Aa
Pp. 199).
ae le mot
«condensation»
1097 est d’Auguste
Comte
3. Sermo LXXXII, 4 (P. L., LIV, col. 424). Office de la féte de la Chaire de S. Pierre 4 Rome, le 18 janvier, 2° no@turne,
5° legon. Trad. : « Cette forét de bétes sauvages frémissantes et cet océan d’eau profonde et agitée. » 4. Charles Hention est ce « jeune Vosgien» dont Frizeau parle dans une lettre du 17 septembre 1908 (Jammes, p. 137). Il a déja été question de lui p. 12, n. 10. Ayant lu les articles de Riviere parus dans /’Occident, il lui avait écrit pour demander _Vadresse de Claudel (cf. Lettres de Riviére 4 Alain-Fournier : jeudi, aodt 1908 et 29 aodt 1908). Il participera a l’enquéte d’Agathon, /es Jeunes Gens d’aujourd’ hui (1912), deviendra l’ami de Jacques et Raissa Maritain (cf. R. Maritain, /es Grandes Amitiés, Desclée, 1941 et 1944, p. 421-438), tencontrera chez eux Jean Coéteau (cf. J. Cocteau, Lettre a Jacques Maritain, Stock, 1926), sera le guide spirituel d’Eve Lavalliére convertie, avant d’aller vivre au désert 4 la maniére du P. de Foucauld. II] est l’auteur de LAbrégé de la dottrine spirituelle de S. Jean de la Croix (Jammes, p. 402; note d’André Blanchet). 5. Cf. Odes, IV (Po., p. 264) : « Si le vigneron n’entre pas impunément dans la cuve, / Croirez-vous que je sois puissant 4 fouler ma grande vendange de paroles, / Sans que les fumées m’en montent au cerveau! » Page 83. 1. Ps. VI, 9 : « Jugez-moi [...] selon innocence qui est en | moi.» 2. Ps. X hébreu, 17 : « Votre oreille a entendu la priére de leur cceur. » 3. Proverbes, XII, 2 : « Celui qui est bon puisera la grace du Seigneur, mais celui qui met sa confiance dans ses proptes pensées agit en impie.» — 10 : « Le juste se met en peine de la vie de son bétail, mais les entrailles des impies sont cruelles. » — XIII, 8 : « Les richesses de l’homme sont la rancon de son 4me;
mais celui qui est pauvre n’entend
_«Celui
qui dénigre
une
chose
pas de menaces. » —
s’engage
pour
13 :
l’avenir. » —
| XIV, 10: « Le cceur connait l’amertume de son 4me, l’étranger
| ne se mélera point 4 sa joie.» — XVI, 1: « C’est 4 Vhomme de | préparer son ame et au Seigneur de gouverner la langue. » | Page 84.
1. Ps. X hébreu, 14: « C'est 4 vous qu’a été laissé le soin du | pauyre. »
1098
Cahier I
2. Au lieu de « rien de sincére », Claudel avait d’abord écrit peu sincere. Cf. Lettre 4 Gide, 17 mai 1911 (p. 174): « Il y aurait tout un article 4 écrire sur le style Louis-Philippe, Renan, Lamartine, etc., le plus mauvais qui ait jamais existé et qu’on confond si-drélement avec le style classique. » A la fin de sa vie, il sera dune sévérité moins tranchante, 4 l’égard de Lamartine du moins : « L’abondance heureuse d’un Lamartine [...] on pourrait la compater 4 cette nymphe fluide, nourtie d’une pluie monotone, qui par de paresseux détours aboutit a quelque lac prisonnier de son teflet» (texte de 1952, Pr., p. 474). Encore : « Je suis plein d’une admiration en grande partie née de mon impuissance personnelle pour Racine, pour Virgile, pour Lamartine » (O. C., XVIII, p. 268, texte non daté). « La ‘“thaine” de Claudel pour les Romantiques ira en s’atténuant avec l’Age. De cet adoucissement du jugement, Lamartine sera le premier bénéficiaite » (Gide, p. 328; note de Robert Mailet). 3. « La gloire de Dieu eét de cacher la parole et la gloire des Rois est de la découvrir. » — Pour la seconde citation, en réalité XX, 30: « Le mal se guérira par les meurtrissures livides et par les plaies les plus profondes. » : 4. La « Librairie de Art indépendant » a publié en 1895 une traduction par Pierre Quillard du Livre de Jamblique sur les Mystéres ;ce livre est une sorte de traité de démonologie composé en réponse a la lettre de Porphyre 4 Anébon, dont nous ne connaissons que quelques fragments par Eusébe et S. Augustin. Claudel connaissait Quillard qui rendit compte de Téte d’Or et recut /a Ville; il put lire Jamblique dans cette traduétion. Voir De Mysteriis, reponse de Jamblique au De regressu animae de Porphyre, éd. Parthey, 1857, IV, 11-13. 5. Trad. de Lamennais : « Plusieurs, s’imaginant qu’ils seraient meilleurs en d’autres lieux, ont été trompés par cette idée de changement. » 6. Cf. Art poétique (Po., p. 127) : « Et tel est le mystére qu’il s’agit présentement de reporter sur le papier avec l’encre la plus noire. »
Page 8.
1. Trad. : « Car Dieu regarde moins 4 lation qu’au motif qui fait agir. — Celui-la fait beaucoup qui aime beaucoup. Celui-la fait beaucoup qui fait bien ce qu’il fait. » — XVI: « Si vous ne pouvez vous rendre tel que vous voudriez, comment pouttrez-vous faire que les autres soient selon votre gré? » 2. XIX, 4: «Le matin, formez vos résolutions, le soir, examinez votre conduite. » — XX, 6: « Dans le silence et le
Février-Mars 1909
1099
a
repos l’ame pieuse fait de grands progrés et pénétre ce qu’il y a
de caché dans l’Ecriture. »
3. XX, 2: « I est plus aisé de se taire que de ne point excéder dans ses paroles. » 4. XX, 8 : « Fermez votre porte sur vous et appelez Jésus votre bien-aimé. » 5. XXIII, 4: « Il en est peu que la maladie améliore, comme il en est peu qui se sanétifient par de fréquents pélerinages. » 6. XXIV, 3 : « Que dévorera ce feu, sinon vos péchés? » 7. Imit., Il, 1, 1 : « Cat le Royaume de Dieu eét paix et joie dans le Saint-Esprit (Rom., XIV, 17) : ce qui n’est pas donné
aux impies. » 8. Mot du bas-latin : sorte de vase étroit et long. Cité par Littré dans l’étymologie de « bocal ». Page 86. 1. Imit., Il, tv, 1 : « [Jésus] visite souvent l’homme intérieur, ’et ses enttetiens
sont
doux,
ses
consolations
ravissantes;
sa
paix est inépuisable, et sa familiarité incompréhensible. » — 4: « Que cherchez-vous autour de vous? Ce n’est pas ici le lieu de votre repos. » 2. Art. IV. Trad. : « C’est pourquoi rien n’empéche le Corps du Christ d’étre hots de tout Pespace contenant les corps célestes et de n’étte pas dans un lieu qui le renferme. » 3. I, 10 : « Ramener
toutes
choses
sous
un
seul Chef, le
Christ. » 4. Imit., Il, 1v, 1 : « Si votre cceur était droit, alors toute créatute vous setait un mitoir de vie et un livre rempli de saintes instructions. » 5. Ibid., v, 2 : « OU étes-vous quand vous n’étes pas présent a vous-méme? » 6. Voir p. 68, n. 6. 7. II Cor., vil, 9 : « ... comme chatiés, mais non mis a
mort.» 8. Cf. Protée, II (Th. I, p. 375) : « LE MAJORDOME : — Je vais yous envoyer quelque chose de simple. / I/ se passe la main sur la figure qui ne montre plus aucun trait. | » Page 87.
1. Claudel a collé ici un dessin « Représentation des ancéttes » et noté « Origine de la tablette des ancétres chinoise ». 2. Lettre a Gide, 18 février 1909 : « [Le] Ministere ot je suis déja mal vu en raison de mes opinions religieuses et ot Berthelot eét mon seul appui»
(p. 99). A Suarés, 1¢7 avril : « J’ai eu beau-
L100
Cahier I
coup d’ennuis ces derniers temps. Un coquin que j’avais di exécuter, a dénoncé mes “menées cléricales” et sans le dévouement de mon ami Berthelot, j’aurais pu passer un mauvais moment» (p. 146). D’aprés une lettre a Riviére (p. 143) ce « coquin » a été « exécuté » avant le 12 mars.
Pierre Moreau écrit dans Cah. Cl. IV, p. 25 : « Partout ot la France a un représentant, il lui semble [4 Claudel] que la chrétienté est présente. En quoi il n’a pas toujours l’accord de toute la “‘colonie frangaise” a laquelle il arrive de taxer son consul de cléricalisme, et de Vobliger 4 se défendre point par point auprés de son ministre Stephen Pichon. Est-il vrai qu’il mésuse de son autorité pour garnit de catholiques déclarés un conseil municipal? Il répond par des chiffres : ce conseil municipal contient en réalité tant d’Israélites, tant de dignitaires de la Loge magonnique, tant de protestants. Il n’empéche qu’il rend bien souvent visite aux missionnaires...»» — Cf. aussi Chaigne, Ve, p. 102-103. Page 88.
1, VII, 11 : « Le pacifique a eu une vigne dans celle qui contient les peuples nombreux. » 2. Ce nom sera utilisé dans /e Pain dur, pour le frére d’Ali Habenichts. « tours : Habenichts?
I] n’y a pas de Habenichts a
Epernay. — sicuex : Il ne s’appelle pas Habenichts. Il s’appelle Dumesloir. Roger Dumesloir. C’est un beau nom » (TA. I,
p- 483).
3. Imit., Il, x11, 7. Rétablir : Tota ifta vita mortalis plena es miseriis... : « Toute vie mottelle est pleine de miséres et environnée de croix. » — III, 1, 1 (d’aprés Job, IV, 12) : « Heureuses
les oreilles toujours attentives 4 recueillir ce souffle divin... » 4. Verset 22 : « [Le gedlier] confia 4 Joseph tous les détenus. » Ce texte est appliqué par la liturgie 4 S. Joseph. 5. Trad. : « Les matins de diamant du passé. » 6. Lois, liv. Ill, 677 ¢. Platon n’emploie pas le mot « universel». Il parle de «traditions antiques» concernant « la destruction de ’humanité plusieurs fois par des déluges, pestes et bien d’autres fléaux ». 7. Cornucopia : corne d’abondance. 8. Voir p. 40, n. 5.
9. Cicéron, De oratore, I, 29, 132 : « Le point capital de l’art, c’est la convenance (le seul précisément que l’art ne peut enseigner). » Page 89. t. Il s’agit de Varchevéque de Paris qui fit disperser les religieuses de Port-Royal quand elles eurent refuser de signer
Mars- Abril 1909
IIOI
le formulaire relatif 4 la condamnation des cing propositions de Jansénius. 2. Inspiré par le sermon de S. Léon, féte de |’Annonciation, 2° nocturne, 5° legon : « Il a donc fallu [...] que par la dispensation d’un secret dessein, Dieu immuable [...] complete la premiére disposition de son amour par un myStére plus caché. » — Cf. Corona, « Hymne du Sacré-Cceur» (Po., p. 410) : « Dieu pénétre comme
un voleur dans ce patadis de la mott./ [...]
c’est une femme qui fraude l’enfer.»» — Rappelons que Claudel a fait un voyage en Palestine en 1899. 3. XXIX, 12 : « Vous avez déchiré mon sac et vous m’avez environné de joie.» — XXX, 21 : « Vous les cachez dans le
secret de votre face.» — XXXII, 15 : « Lui qui a formé le coeur de chacun et qui connait toutes leurs ceuvres. » — Prov., XXVII, 5 : « Une réptimande ouverte vaut mieux qu’un amour caché. » 4. En haut de la page 124, Claudel a collé un portrait de la ‘femme d’Edgar Poe, Virginia : coupure d’un journal illustré anglais, avec ces mots : From a painting. By permission of Miss Amelia F. Poe. — Sur Vadmiration de Claudel pour Poe, voir Suarés, p. 147, 18 avril 1909; Gide, p. 49; Cah. Cl. I, p. 56-59: trad. de « Leonainie» et P. Brunel, « Claudel et Edgar Poe», Paul Claudel I, Revue des Lettres modernes, 1964. 5. Ps. XXV, 7: « Vous sauvez, Seigneur, les hommes et les bétes.» — XXXVI, 21 : « L’impie empruntera et ne payera
pas. » Page 91.
1. « Paul Claudel, un des premiers fervents de G. K. Chesterton, dut renoncer a poutsuivre la version d’Orthodoxie, dont il publia un magnifique fragment en 1910» (H. Massis, Intr. a Hérétiques, Plon, le Roseau d’or, 1930, p. 10). Ce fragment a paru dans la N.R.F. d’aodit 1910; c’est le chapitre vi : « Les paradoxes du Christianisme. » « Le monde est plein... », Orthodoxie, trad. Ch. Grolleau, Rouart et Watelin, 1923, chap. 11, p. 34. — « Ils se sont pattagés...», p. 56; — « La tradition donne un vote...», chap. Iv, p. 60; méme page : « La tradition n’est que la démocratie qui se prolonge a travers le temps...»; — « Les contes de fées...», p. 70, cité dans Pr., p. 542; — « Toute couleur...», p. 77; — « La répétition dans la nature...», p. 78; — «Le changement résulte...», p. 79; — « Non seulement meryveilleux...», p. 81; — « Quoi que veuille dire...»; Claudel ici ne cite pas, mais résume la thése de Chesterton sur les « vérités petpendiculaires» : « Le paganisme a déclaré que la vertu résidait dans un équilibre; le christianisme a déclaré qu’elle
1102
Cahier I
était dans un conflit : la collision de deux passions en apparence opposées » (p. 130); —« Partout la croyance a réalisé la modération par deux émotions impétueuses» (p. 131); —« L’Eglise historique a gardé céte a cdte ces deux idéals comme des couleuts vives, rouge et blanc [...]. Elle a toujours eu une saine horreur du rose. Elle hait cette combinaison de deux couleurs qui est le faible expédient des philosophes» (p. 137); — « Le courage n’est pas...»; Claudel cite librement : « Le courage chrétien est un mépris de la mort, le courage chinois est un mépris de la vie » (cité dans Dragon, Pr., p. 1074); —« La nature n’est pas... », p. 160 (cité dans Pr., p. 424, 552).
2. Sermo XI, De passione Domini, 2° no€turne
du dimanche
des Rameaux. Les textes qui précédent sont également empruntés aux offices de cette féte. Jér., I], 12-19 : « Cieux, soyez étonnés de cela, portes du ciel, soyez inconsolables! Car mon peuple a fait deux maux, ils m’ont abandonné, moi, une source d’eau vive, et ils se sont creusé des citernes, citernes crevassées qui ne peuvent retenir l’eau. [...] Les enfants méme de Noph et
de Taphnés t’ont souillé des pieds a la téte. [...] Maintenant qu’as-tu a faire sur le chemin de l’Egypte pour boire de l’eau bourbeuse? Et qu’as-tu a faite sur le chemin des Assyriens pour boire l’eau du fleuve? [...] Sache que c’est une chose amére et mauvaise d’avoir abandonné ton Dieu! » — Le texte suivant eSt tiré en partie de Prov., I, 12 : « Les impies ont dit : attaquons injustement l’innocent et comme l’enfer avalons-le tout vif; faisons disparaitre son souvenir de la terre et tirons au sort entre nous ses dépouilles.» — S. Léon, compléter : Admisit in se impias manus... : «ll a permis que des furieux portent sur lui leurs mains impies qui tout en s’appliquant a leur propre crime, sont au setvice de leur Rédempteut. » 3. Noté d’aprés le chapitre vit d’Orthodoxie, « ’Eternelle Révolution ». 4. Claudel fait allusion au livre de Lafcadio Hearn, Japan, An attempt at interpretation,
New-York,
Londtes,
Macmillan,
1905, ow le poéte se réfere fréquemment aux théories évolutionnistes de Spencer en matiére de religion. 5. Verset
14 : « La neige du
Liban
disparaitra-t-elle,
ou
peut-on faire tarir les eaux qui s’élancent fraiches et courantes? » Page 92.
1. Déja en 1906, Claudel lisait le Man’s place in the universe, d’Alfred-Russel Wallace (Jammes, p. 81). On verra plus loin (p. 132) une autre mention de ce livre, datée de février 1908. Le 12 juillet 1907, il parle 4 Frizeau de « argumentation de Wallace sur lunicité probable de l’expérience vitale » (p. 106).
Abril 1909
1103
I lui recommande le livre, ainsi qu’a Riviére (lettre du 28 janvier 1908, Riviére, p. 129). — Au-dessous des mots « période glaciaite», Claudel a écrit « beaucoup d’arbustes ». 2. Tout ce passage est 4 comparer avec «la Légende de Prakriti» (Pr., p. 944). 3. IX, 22 : « Sans effusion de sang, il n’y a pas de pardon. » Lana coccinea, « la laine écarlate », et ’hysope sont cités tbid., 19. — Ps. XIII, 1: « L’insensé dit en son cceur : il n’y a point de Dieu. » 4. Claudel avait d’abord écrit : Toute chose nouvelle. 5. S. Grégoire, Homilia XXI in Evangelia, au Bréviaire, matines de Paques, 3¢ legon : « Dans l’éclair en effet il y a l’éclat terrifiant qui fait craindre, mais dans la neige, la caresse de la blancheur » (Claudel a écrit caritatis au lieu de candoris). Commentaire d’un passage de Matth. : « Son aspeé était comme celui de l’éclair et ses vétements comme de la neige. » — Paques était le 11 avril. '
Page 93.
1. Comparer « Rodin » (Pr., p. 286) : « ... ces dames du monde qui n’ont dune jolie femme que le sexe. » 2. Claudel pense sans doute a l’Ame. Cf. Odes, II : « Délivrezmoi de moi-méme! Délivrez l’étre de la condition! » (Po., p. 238). Voir aussi dans Loir-et-Cher et Seigneur... le theme de la « séquestrée », Voir ici p. 19, n. I. 3. Claudel avait d’abord écrit au lieu de « esprit » intelligence. 4. Jacques Leeb, Archiv fur die gesammte Physiologie, 1902, t. XCIII, p. 59, et Weismann,
Ueber den Ursprung des Todes, 1893,
p. 33, sont cités par Metchnikoff, Etudes sur la nature humaine, Essai de philosophie optimiste (Paris, Maloine, 4° éd., 1908), p. 348-349. — « intrinséque » est en surcharge. 5. « les mémes », surcharge. 6. Jean, VIII, 26. Claudel cite le texte grec, puis le texte latin, et traduit 4 sa maniére. 7. Apologeticum, XX XIX, 1 (P.L., I, col. 468). Trad. Waltzing, Budé : « Nous sommes un “‘corps” pat le sentiment commun d’une méme croyance, par Punité de la discipline, par le lien d'une méme espérance. » Se Ciasa Lona laa Sattinadearic Stl attlsCcOLpe: q. 87, aft. 4, corp.
9. Claudel
traduit
plaisamment,
en
faisant
allusion
a la
politique francaise, la phrase de Pline : ... ediflum meum quo secundum mandata tua heterias esse vetueram (Lettres, X, 96, 7). Trad. exaéte : « ... mon édit par lequel, selon tes ordres, j’avais interdit les associations. »
1104
Cahier I
10. S. Grégoire, Homilia XXVI in Evangelia (au 3° noéturne, 7° lecon, du dimanche in albis), Trad. : « Il n’y a pas de mérite a croite lorsque la raison apporte des preuves. » Page 94. 1. S. Anselme, Pros/ogion, cap. 1 (P. L., CLVIII, col. 227) : Neque enim quaero intelligere, ut credam ; sed credo, ut intelligam ; ou Meditationes, XX1, (ibid., col. 816). Trad. : « Je ne cherche pas a
comprtendte pour croite; mais je crois pour comprendre.» Le texte d’Isaie (VII, 9) est : Si non credideritis, non permanebitis, « Si
vous ne croyez pas, vous ne tiendrez pas. » 2. Ce texte est vraisemblablement d’un commentateur de S. Thomas. Trad. : « La grace efficace, par laquelle Dieu agit physiquement sur le libre arbitre, non seulement ne lése ni ne diminue le libre arbitre de la créature, mais méme laugmente et lui donne toute sa force. » 3. Adage scolastique : « Il n’y a volonté que s’il y a connaissance. »> 4. Cf. Pr., p. 398 : « J’ai assisté aux funérailles simultanées du dernier Mandchou, du pauvre petit empereur et de son affreuse maratre...»; p. 1026 : « Je vois encore ces étranges funérailles, que dépassaient de beaucoup en dignité et en splendeur celles de Pempereur du Japon, dont je fus plus tard le témoin, les archers, les chameaux avec une dépouille de zibeline
suspendue au bridon, la monnaie de papier d’or et d’argent...» Dans une conférence faite 4 Prague en 1910 (Pr., p. 1079), Claudel avait évoqué ces funérailles auxquelles il avait assisté « il y a un an, en ce méme mois de mai», avec les mémes détails. A Suarés le 11 mai (p. 149), il confie : « C’était assez piteux. Au
gtand ait toutes ces pompes prennent un ait de carnaval.» 5. S. Cyprien, De catholicae Ecclesiae unitate, V. P. de Labriolle traduit (coll. Unam Sanitam, éd. du Cerf, 1942, p. 11) : « La dignité épiscopale est une; chaque évéque en posséde une patcelle sans division du tout. » I] note (ébid., p. 52) : « L’expres-
sion in solidum (mot 4 mot : pout le tout) est d’origine juridique. Elle s’emploie pour des débiteuts tenus solidairement, ou pour des petsonnes qui possédent une chose sans division. L’épiscopat est la fonétion qui ne se divise pas entre ses différents titulaires, encote que chaque évéque en détienne une patcelle.» Voit D. O. Kasel dans un article de la Revue bénédittine, 30, 1913, p. 413. Pour les controverses d’autrefois relatives 4 ce texte, voit Turmel, Hist. de Ja théol. posit., Ul, 255.
Abril-Mai 1909
1105
Page 95.
1. Claudel tient a cette étymologie qu’il semble étre le seul a proposer.
Cf. Fewilles de Saints, « ?Architeéte»
(Po., p. 617):
« Dés que les Romains eurent pris la Gaule, aussitét ils firent une croix sur son corps, / Ces deux routes pour |’Eternité qui vont de l’Est 4 ?Ouest et l'autre du Sud au Nord. / Et au carre-
four de ces Voies qui de Forum viarum a pris le nom de Fourviére... » 2. « Couvert et», en sutcharge. 3. Lire Thiébault. Claudel, distrait, a ajouté, aprés coup, un / a Davout, qwil écrit Davoult. Voir Mémoires du général baton Thiébault, publiés sous les auspices de sa fille Mlle Claire Thiébault, d’aprés le manuscrit original, par Fernand Calmettes, Plon, 5 vol., 1893-1895. 4. Trad. : « Une violente fidélité... » 5. En surcharge sans rature : « carotte».
' 6, I, 21 : « Recevez avec douceur la parole entée en vous. » Page 96. 1. Le 26 février 1909, Claudel avait écrit 4 Frizeau : « J’aurais un petit renseignement 4 vous demander. Connaitriez-vous un livre contenant en Jatin le formulaire de ladministration des différents sacrements? J’autais surtout besoin de la formule
exacte de l’absolution... » (Jammes, p. 151). Le 29 mats, Frizeau annonce qu’il a trouvé un Rétwel romain, il Venvoie le 18 avril. Claudel en accuse téception quelques semaines plus tard : voir lettre de Frizeau du 6 juin. Il y copie évidemment ces formules. Trad. : « Ouvrez-vous » — «... qui vient de gotiter ce premier aliment sacré, ne permettez pas qu’il reste plus longtemps affamé sans pouvoir se tassasier de nourriture céleste. » — « A cet homme, ton serviteur, qui etre dans la nuit de ce monde, dans le doute et l’incertitude, donne, je ten supplie, de connaitre le chemin de la vérité et de la connaissance. » —« Léve-toi,
achéve ta priére et dis : amen.» — « Regois ce vétement blanc. Regois cette lampe allumée. » 2. Verset 10: « Le Seigneur fait persister le déluge. » 3. Le texte de Bonald est cité par Balzac dans l’Avant-propos, daté de juillet 1842, des Scénes de la vie privée (Pléiade, t. I, p. 8). Rétablir : « Un écrivain doit avoit en morale et en politique des idées arrétées; il doit... »
Page 97.
1. Le rapprochement de ces événements
seta au centre du
I106
Cahier I
troisitme drame de la « Trilogie», /e Pére humilié. — prise de Rome » est en surcharge. 2. Cf. le Pain dur, Wi, 2:«... comme un prisonnier tous les membres, qui cherche son frére dans la nuit bouche, une figure humaine dans la nuit pour lui donner 4 manger qu'il tient entre les dents » (T#. I, p. 476).
« et la lié par avec la ce pain
3. Sur Arthur H. Smith, voir Dragon, chap. u1 (O. C., IV,
p- 39 sq). Chinese Charaéteriftics a été traduit de l’anglais sous le titre Meurs curieuses des Chinois par B. Mayra et le lieutenantcolonel de Fonlongue, Payot, 1927. Du méme auteur : Ja Vie des paysans chinois, Payot, 1930. — Trad. : « Les habitants de Tien-tsin ont une réputation de violence, surtout dans leur langage, et ils sont redoutés dans toute la Chine comme querelleurs et bruyants; dans certains endtoits des provinces du centre, les hdételleries affichent un avis ttaditionnel
: “On
ne
tegoit pas les habitants de Tien-tsin”’. » 4. Adam de Saint-Victor, séquence XI, De Sanéta trinitate: « Rien en Dieu excepté Dieu. » — Cf. Gide, p. 89, 4 aot 1908 : « Je me trouve lancé dans une série d’hymnes liturgiques, ot j’essaye de reprendrte la tradition de Nottker, d’Adam de SaintVictor et de Prudence. » — « Le chant religieux » (O. C., XVI, p- 206) : « Qui rend justice aujourd’hui a ce magnifique poéte qu’est Adam de Saint-Victor? »; Corona (Po., p. 473), « Memento
pour le Samedi soit» : « Séquence de Nottker, prose d’Adam de Saint-Viator / [...] Et latin de Paul Claudel aux derniers jours! » 5. Sut les pages 134 et 135, Claudel a collé deux « illustrations pour Arthur Gordon Pym : l’Aurore boréale antar€tique ». Titre anglais : The lights that creak like the joints of reindeer ; the heavens Stretched out like a curtain. 11 se souviendta de ses illustrations quand il compatrera 4 l’aurore boréale le « manteau 4 triple frange » de la Vierge (O. C., XX, p. 20) et verra « le ciel décoré de tous les festons de l’aurore boréale » (O. C., XVI, p. 296). 6. Rom., XI, 34-36 : «
Qui en effet a jamais connu la pensée
du Seigneur? Qui en fut jamais le conseiller? Ou bien qui l’a prévenu de ses dons pour devoir étre payé de retour? Car tout est de lui et par lui et pour lui.» Le commentaire de Claudel, « et en particulier 7%a@», peut se référer au sens péjoratif de ce pronom; il faut comprendre sans doute : « ces choses désagréables ». Page 98.
1. Nous n’avons pas retrouvé louvrage d’ot Claudel tire cette citation. Il peut s’agir aussi bien d’un article. 2. Is., IX, 3. Claudel traduit le texte.
Juin- Juillet 1909
1107
3. Cf. O. C., XVIII, p. 336 : Symphonialis eS anima, a dit _ Ste Hildegarde. Voir ici p. 274 et au tome II, février 1947. 4. « Lrartiste est le contemporain de toute sa vie. Les événements dont il n’a pas le souvenir, il en a le pressentiment » (« Camille Claudel», Pr., p. 284; texte de 1951). Cf. Mémoires, p. 31 : « Un poéte ne fait guére que développer un dessein préétabli»; avec les deux citations, auxquelles Claudel aimera a revenir : « Tous les étres aimés /Sont des vases de fiel qu’on _ boit les yeux fermés » (Baudelaire encore au lycée), « Mon ame - vers d’affreux naufrages appareille » (Verlaine). Mais l’idée ne se limite pas a cette constatation psychologique; les commentaires bibliques montreront que Claudel n’a pas épuisé dans « Connaissance du temps » la méditation sur le temps et l’éternité. 5. Ps. XXV, 10. Dans « Vitraux» (Pr., 323), Claudel liera également le vitrail et la mosaique. — « Dans ta lumiére nous
verrons la lumiére. » 6. Li Po ou Li Tai Po (701-762); ce détail se retrouve dans
‘Encyclopedia Britannica, éd. 1962, vol. XIV, p. 179. Page 99.
1. Allusion au club des « Huit Immortels de la Coupe de Vin», fondé par Li Po avec Chihchang, Li Schihchih, Li Chin, Tsui Tsungchi, Chu Chin, Chang Hsu et Chio Sui (ibid.). DE WKOIbe [ahs Bory 386. thc 3. Noemi (Ruth, I, 2); d’aprés Menochius ce nom « signifie belle, suave et agréable » (Bible en 8 vol. trad. par Carriéres, in /oc.). — Cosmas Indicopleustes, moine géographe d’Alexandrie (vie s.), auteur @une Xproriavixy) tomoypapia. Indicopleustes signifie « Navigateur dans l’Inde». Voir Dittionnaire de Théologie catholique, t. III, col. 1916. 4. Cest la derniére ligne de l’Invocation aux Muses que Montesquieu destinait au livre II de /’Esprit des lois. Elle a été supprimée par Jacob Vernet au moment de impression du livre A Genéve. Charles Nodier l’a placée en téte de son édition du Temple de Cnide, 1824. Voit Albert Chétel, Ja Prose poétique francaise,
V Artisan
du Livre,
1940,
p. 139.
En
voici la fin :
« Divines Muses, je sens que vous m’inspirez, non pas ce qu’on chante 4 Tempé sur les chalumeaux, ou ce qu’on répéte a Délos
sut la lyre : vous voulez que je parle a la raison : elle est le plus parfait, le plus noble et le plus exquis de nos sens. »
5. « D’aprés ses Adfes (Biblioth. d’Hagiogr. lat., 2321, 2323-2325) qui sont fortement romancés [Ste Dorothée] fut arrétée sous Dioclétien 4 Césarée de Cappadoce d’ot elle était originaire. [...] Elle est mentionnée par le martyrologe hi¢éronymien et le
martyrologe romain qui lui associe Théophile. Son culte devint
1108
Cahier I
trés populaire au Moyen Age, qui la compte parmi les quatorze auxiliateurs » (Diff. d’hist. et de géogr. eccl., t. XIV, col. 684). 6. Guillaume de Nogaret, légiste, mort en 1313. Th. IL, p. 1425 : « Un mot dans le drame indique que Cotfontaine est le descendant de Guillaume de Nogaret.» En effet, Sygne dit a Georges : « Souviens-toi [...] de ce Nogaret aussi dont nous descendons qui frappa le Pape sur la face» (sbid., p. 286). — Turelure, lui, fait une allusion 4 Préameneu, a propos du concile réuni 4 Paris : « Préameneu m’a demandé une note 4 ce sujet » (ibid., p. 262). Il fut, avec Tronchet et Portalis, rédaéteur du « Projet préliminaire » du Code civil. 7. Claudel lit Pouvrage de Chesterton, Hérétiques. Nous donnons les références d’aprés la traduction de Jenny S. Bradley, introduétion de Henri Massis, le Roseau d’or, Plon, 1930. — « Pas de fumée sans feu...», p. 32 : «M. Rudyard Kipling a contribué brillamment a reconquérir les provinces perdues de la poésie. [...] Ila pergu la signification et la philosophie propres de la vapeur et de largot. La vapeur n’est, si vous le voulez, qu’un sale sous-produit de la science, et argot un sale sousproduit du langage. Mais M. Rudyard Kipling a été du petit nombre de ceux qui ont compris la parenté divine de ces choses,
qui ont su qu’il n’y a pas de fumée sans feu, autrement dit, que partout ot se rencontre la chose la plus vile, se rencontre aussi la plus pure. » 8. Le texte de Bernard Shaw est cité dans le méme ouvrage, p. 53 :« Toute appréciation sincére repose sut un certain myéstére @humilité, presque d’obscurité. L’>homme qui a dit : “Bienheureux celui qui ne s’attend a rien, parce qu’il ne sera pas décgu”’ exprime la béatitude d’une maniére imparfaite et mensongére. La vérité est celle-ci : “Bienheureux celui qui ne s’attend a rien, parce qu’il sera magnifiquement surpris”.» Dans le méme sens le Roi d’Espagne du Sou/ier (Th. II, p. 687): « Et je dis en effet que la jeunesse est le temps des illusions, mais c’est patce qu’elle imaginait les choses infiniment moins belles et nombreuses et désirables qu’elles ne sont et de cette déception nous sommes guéris avec l’4ge. » 9. «La force dune chaine...», p. 56 : « Seule ’Eglise chrétienne, historique, fut fondée sur un homme faible, et pour cette taison elle est indestructible, car aucune chaine ne peut étre plus
forte que son chainon le plus faible. » Claudel conseille 4 Gide de citer ce mot 4 Péguy 4 propos du reniement de S. Pierre (Gide, p. 125). to. Cf. « les Superstitions chinoises» (Pr., p. 1078) : « Ce sentiment de lorientation est d’ailleurs trés développé chez les Chinois; nous n’avons que deux cétés, la gauche et la droite. Le
Chinois emporte toujours avec lui ses quatre points catdinaux... »
Juillet- Aout 1909
1109
11. « Naviguer est nécessaire, vivre ne l’est pas. » Page roo. ite, WOME OY, GO), Fly 3% 2. Ces deux textes sont extraits de la liturgie des défunts.
Verset 5 du Dies irae et fragment d’une des oraisons de l’absoute : « Le livre alors sera cité...», et « ne ’oublie pas pour l’éternité », 3. Verset 49 : «... les fléaux envoyés par des anges de malheur. » 4. « Jai dit : vous étes des dieux, vous étes tous fils du Trés-Haut. » 5. De Genesi ad litteram, \ib. IV, cap. xvii, 31-36 (P. L., XXXIV, col. 308-310). 6. Claudel revient en arriére pour méditer sur cette féte, sans doute pour Corona. Il semble bien que ces notes soient en effet de fin juillet, comme le suggére la date portée au début de la page. , 7. Jean, Ill, 30: I//um oportet crescere, me autem minui (parole ‘de S. Jean-Baptiste). — « Le sublime chant de l’Exu/tet auprés duquel les accents les plus enivrés de Sophocle et de Pindare me pataissaient fades» (« Ma conversion», Pr., p. 1013). — Paul Diacre, ou Warnefrid (740-801), auteur de Phymne Us queant laxis resonare fibris, pour la féte de S. Jean-Baptiste; c’est en effet la premiére syllabe de chacun des six premiers hémistiches
de cet hymne qui désigne les notes de la gamme. Claudel se souviendra de cette note dans sa « Lettre a l’abbé Bremond sur Vinspiration poétique » : « Avant la voix il y a le souffle... »; une note précise : « Comme saint Jean-Baptiste avant le Verbe. Les notes de la gamme ont été tirées d’un hymne 4 saint JeanBaptiste » (Pr., p. 47). Méme note dans Un poéte regarde la Croix (O. C., XTX, p. 41). — « ascendantes » est en surcharge. 8. Sequentia X XI de S. Joanne Baptista (P. L., CXCVI, col. 1490),
v. 36-40. Rétablir c/auso clausus au lieu de clausus clauso. Trad. : « Au prisonnier, également prisonnier, Jean applaudit. [...] A ciel ouvert il montre l’Agneau, Voix de celui qui crie dans le désett, Voix qui annonce le Verbe. » Cité dans /’Année liturgique, 24 juin. 9. Ibid., v. 44: « I n’était pas la lumiére, mais le flambeau. » 10. Trad. :« Prophéte avant qu’il ne fat né. » Le sacramentaire léonien comporte une messe spéciale pour cette féte. Cité dans Ll’Année liturgique. Page ror,
1. Terme de marine : petit batiment de transport a fond plat, employé sut les riviéres, sur les canaux et dans les rades (Littré).
1110
Cahier I
2. Claudel a lu cette phrase de Voiture dans un article de Faguet sur Valincour, « Un critique homme du monde au xvue siécle », Ja Revue des Deux Mondes, 15 mai 1909, p. 391. 3. Verset 17 : « Si Dieu ne m’ett assisté, il s’en serait peu
fallu que mon 4me n’habitat le séjour des morts. » 4. Cette image inspirée peut-étre par Nahum, I, 3 : e¢ nebulae pulvis pedum ejus, seta utilisée dans la Cantate: « Il vole sur ses pieds ailés chassant la terre d’un orteil impétueux, / Et les vierges qui le regardent du haut de la colline voient deux nuages de poussiéte s’élever sous ses sandales! » (Po., p. 340). — Crest, semble-t-il, la premiére référence a la Cantate, que préparent peut-étre aussi les notes un peu antérieures sur le « solstice ». — Claudel avait d’abord écrit : /a poussiére s’éleve... 5. Cf. : « Dédicace», publié en téte du théatre en 1910 : « Quand un seul diamant pare le ciel qui dort/ [...] L’Etoile, Premier-né du jour futur, Vesper! / [...] Etoile du matin dans le soir revivante, / Astre anadyoméne au fond du jardin vert » (Po., 965). Ces vers ne sont pas dans la version du méme poéme publiée en 1893 (sbid., p. 8). 6. Notation fondamentale pour la « symbolique claudélienne». Voir plus tard dans Apocalypse (O. C., XXV, p. 34) : «La mer qui est horizon, le miroir du ciel, la présence et constance perpétuelle aux yeux de ’homme de illimité... » Je Ch pe Gi, nea 8. Claudel aimera rappeler ce souvenit, un de ses derniers souvenirs chinois; voir « Sur la banquette arriére » (Pr., p. 1111): « ... le souvenir de la derniére journée que j’ai passée en Chine. Au fond d’un atroyo boueux une misérable barque était amarrée. Dans cette barque deux pauvres gens. [...] L’un soufflait dans une petite flate de bois a trois trous, l’autre avec une baguette
tapait en mesure sur le bol de porcelaine...» Voir également « Eloge du Chinois » (ébid., p. 1050). Page 102.
1. Mgr Le Roy, /a Religion des primitifs, Beauchesne, 1909, passim, suttout p. 94 : « La Famille, chez les primitifs d’ Afrique et chez tous les auttes, est le pilier central auquel, avec la religion, toute la vie sociale se tattache », et p. 133 : « Importance de la Famille dans la consetvation des croyances. » 2. Cf. Présence et Prophétie (O. C., XX, p. 261), sur la vue et Pouie, et Un poéie regarde la Croix (O. C., XTX, p. 336). 3. Cf. Cab. Cl. IV, p. 115; Cest bien le 15, et non le. 13, comme indiqué dans ce Cahier, que Claudel quitte Tien-tsin; en 1909, le 15 aotit était en effet un dimanche. Sur les fatigues de ce voyage, voir Swarés, p. 150, 14 septembre; Riviére, p. 188;
Aoit-Septembre 1909
IIII
et surtout « Absent professionnel » (Pr., p. 1249), ov il teprend les détails notés ici. 4. Phrase ajoutée en marge. 5. Extrait de Phymne Sacris solemnits pour la féte du SaintSacrement. Trad. : « [Ce sacrifice dont il a voulu confier le ministere] aux seuls prétres, auxquels donc il convient d’en user
pour eux-mémes et d’en donner aux auttes. » Page 103.
1. Isaie, XXXII, 17 : « Le fruit de la justice seta le 2. Extrait de la Préface de la Messe pour les défunts. commentera ce texte dans « Consolation 4 une métre sur de sa fille» (O. C., XVI, p. 220): « La vie est changée,
repos. » Claudel la mort non pas
dtée. » 3. Eccli., XVI, 1, cité dans « Introdu&tion 4 un poéme sur Dante» (Pr., p. 428). Cf. Isaie (O. C., p. 206) : « Vous avez créé tout a la fois, et voici que tout vient ensemble a votre appel. » Voir dans Je crois en Dieu, Gallimard, 1961, différents textes sur
la création simultanée. 4. Cf. « Introduction 4 un poéme sur Dante» (Pr., p. 425): « Un des lieux communs les plus absurdes et les plus odieux de cette poésie de pacotille est celle de Pimmortalité promise non pas 4 notre 4me [...] mais aux éléments purement matétriels dont nous sommes composés [...] ta chair revivra éternellement dans les roses. [...] C'est comme si l’on disait : “Voici la Vénus de Milo, je vais la débiter en pavés. C’est vrai qu’elle aura cessé d’exister comme Statue, mais elle existera comme pavés et poudre a repasser les couteaux.” Je maintiens que deés lors elle a cessé entiérement et absolument d’exister aussi bien que la rose qui est devenue du fumier. » Cf. également « Religion et Poésie » (Pr., p. 61): «... n’est-ce pas une pensée consolante que notre cher corps subsiste dans le vent, dans le soleil, dans les fleurs et
dans les petits oiseaux?» 5. Cf. Annonce (Th. I, p. 99): «... On a fait la fosse ob vous Vavez commandé, / Jouxtant l’église la-haut, prés de celle du dernier chapelain, votre frére. / [...] Un grand lierre noir /Sort
de la tombe sacerdotale et traversant le mut / Pénétre jusque dans V’arche scellée. » 6. Louise de Massaty et son fils Jacques. Page 104.
1. Premiére mention dans ce Journal de Camille Claudel. Dans une étude sur /’Annonce, publiée dans les Lettres romanes, t. XVI, 1962, A. Espiau de la Maéstre montre comment « Claudel
Ili2
Cahier I
a trouvé les données caractéristiques de Mara, entre autres, avec
une cruelle exemplarité, dans la personne de sa sceur ainée, Camille, dont le destin, exceptionnel d’originalité, d’individualisme forcené, d’ambition artistique et féminine, de passion malheureuse aussi et de désolante fatalité, constitue, semble-t-il, un faéteur essentiel et permanent de l’expérience claudélienne de la vie et de sa conception de la destinée humaine terrestre » (p. 9). Les précisions données dans cet article sont la base la plus site que nous connaissions pour une étude sur la vie tragique de Camille Claudel. Nous résumons : Camille est née le 8 décembre
1864; elle a
donc dix-huit ans lors de l’établissement de la famille a Paris en otobre 1882. Elle sera internée 4 Ville-d’Avray en 1913 et moutra en 1943. Sur le drame passionnel qui détermina la rupture avec Rodin, puis la folie de Camille, voir Judith Cladel, Rodin, sa vie glorieuse et inconnue, Gtasset, 1936, chap. VIII, p. 224-
231. Claudel fait allusion a cet ouvrage dans son allocutionptéface a l’exposition des ceuvres de sa sceur, en 1951 (Pr., p. 282). Espiau de la Maéstre écrit (p. 14, n. 21) : « L’auteur, rapportant les confidences de Rodin 4 ce sujet, les situe chronologiquement en fonétion de laffaire du Balzac (1898-1899) et rapporte : “(Camille] était devenue, il y avait prés de quinze ans, sa collaboratrice et son cher modéle (p. 225), ce qui reporterait la date de Ventrée de Camille Claudel dans Vatelier de Rodin 4 l’année 1884, donc deux ou trois ans aprés l’arrivée 4 Paris de la famille
Claudel (of. 1882).” Judith Cladel précise d’autre part que Camille Claudel “quitta latelier au bout de quatre ou cing ans”’, donc vets 1890, pour s’installer seule dans un faubourg extétieur de Paris (p. 226); c’est alors que commenga le drame passionnel proprement dit (p. 226-227), qui amena la rupture et Visolement de Camille au quai Bourbon. En absence de dates plus précises, il semble donc que l’on puisse affirmer néanmoins que Claudel était bien encore 4 Paris, aux Sciences politiques, au moment du drame de sa sceut. » On peut également consulter Anne Manson, « Rodin V’intraitable», dans /es Maudits de Gilbert Guilleminault, le Meilleur Livre de luxe, 1961; Anne Manson conte une scéne ot s’opposent Camille et Rose Beuret, la « vieille compagne» de Rodin que celui-ci épouseta in extremis. Rodin, jusqu’a ses derniers instants, serait resté hanté par Camille.
Sut Camille, voit encore l’article de Henty Asselin, Bu//etin de la Société Claudel, 21, janvier-mats 1966, et quelques allusions dans le Journal de Jules Renard (Pléiade, p. 149, 272-273, 570); les lettres de Louis Claudel 4 son fils, 1909 et 1910 (Cah. CI. I, p. 117-120),etde Claudel: Mémoires, p. 15-17, 22, 332, et les deux
atticles : Pr., p. 272-285.
Septembre 1909
1113
2. Cf. Mémoires, p. 11; Claudel rapporte ce souvenir : « Mon gtand-oncle entra au petit séminaire de Liesse, 4 la suite d’un veeu formé par la famille, si ce réfugié [un prétre insermenté] patvenait a échapper a ses petsécuteurs. Vous trouverez la une des premiéres traces du drame de /’Osage. » 3. In Io libro Sententiarum, dist. VIL, q. 3, att. 1, ad 4. Cf. aussi De Malo, q. 3, att. 2, corp. Trad. : « Le mouvement du moteur est regu dans létre ma, selon le mode de celui-ci. » 4. Cf. Osage (Th. Il, p. 233): « La vierge bien tempérée dont le sourite modeste ne va pas aux coins de la bouche/ Jusqu’a faite trois rides tracées comme avec le crayon le plus fin, 6 Sygne qui tiez entre ces guillemets. » 5. Vers 213. Il s’agit des hérésiarques des premiers siécles (Arius, Valentin, Pélage) par opposition aux Réformateurs. — Sur Boileau, voir Pr., Index, assez nombreuses allusions, et un texte p. 437-438.
Page IOs. 1. Il s’agit certainement de traits de langage relevés 4 Villeneuve. D/ailleurs, Turelure dit dans /’Ofage: « Voila que je reviens 4 mon coin de terre comme un blaiteau a la patte cassée et comme les auttes “bétes fausses’’» (Th. Il, p. 255). — Les mots, televés plus haut, ont peut-étre la méme origine. Page 106.
1. Grégoite, professeur de botanique et de biologie cellulaire 4 la Faculté des Sciences de l’Université catholique de Louvain, le Matérialisme contemporain et le probléme de la vie, Bruxelles, Paris, Gabalda, 1908; premier patagraphe, p. 9; second, p. 23; la derniére phrase n’est pas une citation textuelle : « C’est en faisant violence, si l’on peut s’exprimer ainsi, aux tendances natives de Ja matiére livrée a elle-méme, que le chimiste parvient a effe€tuet des synthéses organiques compliquées » (p. 24). 2. Claudel, distrait, avait d’abord écrit, au lieu de « Meaux»,
« Lyon». S. Faron, évéque de Meaux, est mentionné au martyrologe romain (28 o€tobre). Claudel songe sans doute toujours au projet primitif de la Corona; voir p. 74, n. 8.
3. « Maitre
Grandhurleur»
est d’une autre encre
dans le
manusctit; addition postérieute. — Ces deux noms étaient utilisés dans la premiére version du Pain dur, « Maitres Quoniam et Grandhurleur, huissiers » (Th. I, p. 1448).
4. Noter VobSstination de Claudel a écrite « Rheims». Ce voyage auta peut-étre pour conséquence de donner tant d’importance 4 Reims dans /’Amnonce.
1114
Cahier I
5. Dans /’Annonce (Th. II, p. 20) :
«la Tour de Laon»
et
» Jehanne, la bonne cloche». — Claudel évoquera ce voyage dans une lettre 4 Frizeau, le 24 septembre, en reprenant d’ailleurs certains détails notés ici (Jammes, p. 165). 6. Extrait du Ps. XXIX, 12 : « Vous m’avez environné de joie. » 7. Verset 6 : « L’abime Penveloppe comme un vétement. »
Le renvoi 4 Job fait sans doute allusion au texte relevé p. 15. Page 107.
1. La lettre 4 Frizeau (p. 165) fait comprendre cette phrase : « ... Pimportance qu’a eue Liesse dans V’histoire de France. Tous
les rois depuis Louis VII jusqu’a la duchesse de Berry y sont allés en pélerinage. C’est la Sainte Sage-femme capétienne. » 2. Mes pensées, chap. v. « Lettres et Arts », III, « Art d’écrire » (Cuores completes, Pléiade, t. I, p. 1220) : « Pour bien éctire, il
faut sauter les idées intermédiaires, assez pour n’étre pas ennuyeux; pas trop, de peur de n’étre pas entendu. Ce sont ces supptessions heureuses qui ont fait dire a M. Nicole que tous les bons livres étaient doubles. » 3. Hostel-en-Valromey, chateau appartenant a la famille Sainte-Marie-Perrin (commune de Belmont dans |’Ain, 4 15 kilométres de Brangues). Claudel y composera la Cantate en 1911. 4. Paysage d’Hostel, évoqué dans la Cantate (Po., p. 339) : « Ce céleste jardin dans les nues ot toutes fleuts poussent d’ellesmémes, et l’herbe, puis la forét, / Et puis, aprés les paturages, la vigne aux flancs rebondis de la montagne, / [...] Et le torrent, se faisant jour sous les pampres, vets la plaine jaillit d’une lévre
de marbre. » 5. Voir p. 82, n. 4.
6. Divination
par les entrailles des victimes. Cf. Cantate (Po., p. 338) : « Hostel, pressoir et autel, lieu de libation et d’auspices, / Dont indice sous mon pied cette pierre qui sort de la terre, / Montrant le taureau phrygien et le couteau du sactrifice. »> 7. Il existe une Bonne de Pise, chanoinesse réguliére de S. Augustin, morte
en 1207, une Bonne
d’Armagnac,
fille de
Bernard et Eléonore de Bourbon (1434-1457); plus prtobablement, Claudel pense a la vierge Bonne, morte 4 Reims, qui figure au martyrologe romain le 24 avril. Il y a une Albine, martyre de Lyon avec Blandine (177), une autre, martyre sous
Déce (martyrologe romain, 16 décembre), une sainte Albine, honorée a Paris (féte le 26 septembre), d’autres encore. Il est possible que Claudel dont on sait les attaches bénédiétines, ait eu en main Vouvrage de dom
Henri
Quentin, bénédiGin
de
Offobre 1909
III5§
Solesmes, /es Martyrologes hiftoriques au Moyen Age, étude sur la formation du martyrologe romain, Gabalda, 1908. Page 108.
1. Cf. Cantate (Po., p. 358) : « ... Latone quand elle s’attachati au palmier de Délos.» — Claudel a d’abord écrit : Lazone s’accrochant... 2. « Ou de l’Adoue » est en surcharge. 3. La fontaine de la Doue est 4 quelques kilométtres d’Hostel. Cest
la que, dans /’Annonce,
Claudel
a situé le dialogue de
Violaine et de Jacques (II, 3), mélant étrangement le paysage du Valromey 4 celui du Tardenois. 4. Joseph de Maistre, Del’ Eglise gallicane dans son rapport avec le Saint-Siége, liv. I, chap. v : « Port-Royal» (t. III des CEwres completes, Lyon, 1889), p. 41 : « [Port-Royal] écrivit contre le
calvinisme, et le continua, moins par sa féroce théologie qu’en plantant dans l’Etat un germe démocratique, ennemi naturel de toute hiérarchie.» Noter que Claudel a déja lu ces pages en 1905 (voir p. 28). Il n’a pas encore achevé /’O/age, qu’il reprendra entiérement l’année suivante. 5. Ibid., t. Il, Du Pape, liv. IV, chap. v, p. 476 : « Elles sont
Stériles, dit-on, et rien n’est plus juste; elles ont rejeté l’époux. » 6. Cf. p. 107, n. 6, et Cantate (Po., p. 338) : « ... Hostel, qui -veut dite 4 la fois la Porte, et le Refuge et l’Autel. » 7. J. de Maistre, ibid., chap. v1, p. 481. L’auteur ajoute : « Car le mal lui résiste [a Dieu] plus que le Néant. » — Pour les citations suivantes : liv. I, chap. 1, p. 1; chap. 11, p. 12 : « A propos des conciles » est une addition de Claudel; chap. 1, p. 15. Page 109. 1. De Providentia, V, 8. Cité par de Maistre, ibid., p. 28 :
« Suivant la belle pensée de Sénéque : Dieu obéit a des lois, mais c’est lui qui les a faites.» Le texte latin donné en note. Trad. R. Waltz : « Le Souverain créateur et conduteur du monde a pu diéter les destinées, il y est soumis lui-méme, il obéit incessamment, il n’a commandé qu’une fois. » 2. Paysage d’Hostel. Cf. Cantate (Po., p. 339) : « Entre ces deux promontoires qui barrent V’aurore et le soir, /Que le soleil l’un aprés l’autre colore, / Le Colombier et la Montagnede-Colétre, / Se baisant, se couvrant de leur ombre tour a tour
comme deux beeufs accouplés qui se léchent l’un l’autre l’encolure...» 3. Cette phrase n’est pas extraite du Pape, mais de l’Essai sur le principe générateur des constitutions politiques. Une référence dans
1116
Cahier I
Du Pape, p. 34, a sans doute conduit Claudel a se reporter a cet autre ouvtage. On y trouve en effet, méme édition, t. I, p. 259,
cette formule et la citation d’Horace qui suit; cette citation, il e&t vrai, est également dans Du Pape, p. 106. 4. Inspiré par de Maistre, Du Pape, ibid., p. 94; commentaire
d’une phrase de Retz : « Qui assemble le peuple l’émeut »; le mot « spititueux» est dans de Maistre. 5. Odes, I, 12, v. 45. Voir note 3. Trad. F. Villeneuve, Bude :
« Elle croit comme un arbre, par l’aétion secréte du temps... » 6. S. Thomae Aquinatis expositio in Evangelium Joannis, cap. Vut, le&t. 1v, 3. Rétablir dans la premiére phrase : secundum suam naturam, dans Vavant-derniétre : refentis au lieu de retentus. Trad. : « Chaque étre est ce qui lui convient en vertu de sa nature. Quand donc il est mis en mouvement pat quelque étre extérieur, il n’agit pas selon lui-méme, mais sous l’action d’un autre, comme un esclave. Or l’homme, en vertu de sa nature, est doué de taison. Donc, quand il est ma par la raison, il se meut de
son propre mouvement et agit selon lui-méme, comme un étre de condition libre. Et quand il péche, il agit en dehors de la raison : alors il est comme md par un autre, prisonnier de limites qui lui sont étrangéres : et ainsi “celui qui fait le péché est esclave du péché”’. » Page r10.
1. Notes écrites en marge du livre de Proudhon, De /a Justice dans la Révolution et dans I’ Eglise; Claudel en titera ses « Propositions sur la Justice » (Positions, Il, O. C., XV, p. 160) et précisera « Aprés la lecture du livre de Proudhon...». On rettrouve ces themes dans une « Lettre 4 Sylvain Pitt» (sid., p. 166) datée de Prague, juillet 1910. Enfin ces idées apparais sent également dans /’O/age; cf. J.-P. Kempf et J. Petit, Etudes sur la « Trilogie», I, « VOtage», Archives des Lettres modernes, 1966. 2. Lieudit dans le canton de Champagne-en-Valromey (Ain). « Lys ignoré», sans doute est-ce une étymologie que suggére Claudel. 3. De Prague, le 18 novembte 1910, Claudel donne 4 Gide
le nom et ladresse de Théodore de la Rive, 4 Présinge, prés de Genéve (Gide, p. 155). C’est un protestant converti, membre de la « Coopétative de priéres » (cf. p. 260, n. 6). 4. Verset 112 : « J’ai porté mon cceur a pratiquer toujours vos
lois, 4 cause
de la récompense.»
Claudel,
en détachant
propter retributionem, semble insister sut le sens littéral : « 4 cause de la recompense ». 5. Cf. Odes, IV (Po., p. 266) : « ... la meule banale. »
Odtobre-Décembre 1909
1117
Page 111. 1. Cest le theme de /a Parabole du Festin et du Festin de la Sagesse. Pour Milhaud (Cah. Ci. III, p. 226), Claudel indique : «... la foule des Stropiats envahit la scene dans un mouvement trés rapide.» Et dans le texte : « A deux pieds s’ils ne veulent pas venir, qui inviterai-je? — Les boiteux» (Th. II, p. 1207). 2. Claudel reproduit ici (p. 152-157), 4 la date du 3 novembre, le récit que lui fit Louis Massignon, le 18 juin 1908, de sa -_ conversion et des années qui la précédérent. I] conclut : « Tout - ceci m’a été dit sous le sceau du secret, mais je ne puis laisser sans la noter une telle confidence. M[assignon] part pour l’Egypte le 18 novembre. C’est presque aussit6t sa conversion qu’il m’a écrit» (p. 157). Conformément au désit exprimé par Claudel nous ne publions pas ces pages. — Le 4 février 1909, il écrit a Riviere (p. 179) : « J’ai fait la connaissance d’une bien belle Ame, un nommé L... M..., un converti, éléve de l’Ecole du Caire,
qui s’est converti apres un long séjour en Orient. Chose curieuse, le motif de sa conversion a été l’étude de la vie d’un musulman qui vers l’an 1000 fut bralé pour étre allé a la foi catholique. » — Né le 25 juillet 1882, 4 Nogent-sur-Marne, professeur au Collége de France, Louis Massignon est mott a Paris le 4 novembre 1962. Sa bibliographie occupe 45 pages des Mélanges de V’Institut de Damas. Rappelons /a Passion d’Al-Hallaj, martyr myStique de l’Islam (these de doétorat, 1922), Annuaire du monde musulman (1924, téédité en 1954), Essai sur les origines du lexique technique de la myStique musulmane, Parole donnée, recueil d’atticles, études et préfaces, Intr. de Vincent Monteil, Julliard, Dossier des Lettres nouvelles, 1962. 3. Hébr., XIII, 3 : « Souvenez-vous des prisonniets, comme si vous étiez enfermés avec eux...» 4. Sur la représentation diplomatique de la France a Prague, voit Cah. Cl. IV, p. 145. J 5. Sur Zdenka Braunerova, belle-sceur d’Elémir Bourges, voir Raymond
Schwab,
Elémir Bourges, Stock,
1948, Appen-
dice C, 3, p. 265 : « La belle-sceur d’Elémir Bourges s’est, apres ses études de peinture (notamment a Paris dans [atelier de Carolus Durand, en 1880), vouée a la rénovation de l’art populaire tchéque, notamment de la peinture sur verre; elle organisa en 1925 la salle d’att tchéque qu’on a pu voir a Exposition des Arts décoratifs au Pavillon de Marsan. Elle a illustré des livres, en 1913 la publication posthume des Leffres d’Italie de Charles Demange, chez Crés. Elle rayonnait sur un cercle a Prague; Claudel l’y vit beaucoup, et avec une grande affeCtion, quand
il y était consul de France; il lui a dédié les “Images saintes de Bohéme” dans Corona Benignitatis Anni Dei; quand elle mourut
1118
Cahier I
il peignit joliment dans un poéme ce qu’elle avait de fraicheur et de générosité sous des bizarreries, des brusqueries. » Ce poéme se trouve dans Po., p. 896. Elle a également exécuté des dessins, frontispices... pour des éditions de Claudel. Voir G. Marie Stuart, « ?@uvre graphique de Z. Braunerova pout Paul Claudel», Rencontres, Paris, numéro spécial, 1963. — Milosz Marten, écri-
vain tchéque, spécialiste de littérature frangaise, fut également trés lié avec Claudel. Voir dans Rencontres, n° 1, 1965, un article de V. Hellmuth-Braunet, petit-neveu de Z. Braunerova, sur « Paul
Claudel, Zdenka Braunerova et Milosz Marten», et une confétence de Marten sur Claudel, du 27 mai 1910. 6. Sut
«lAuttiche,
chef-d’ceuvre
de
lart
jésuite»,
voir
Pr., p. 1085, « A la louange de l’Auttiche ». Cf. Soulier (Th. IL, p. 782): « La porte qu’encadrent des faisceaux mélés d’anges et de guirlandes de tuyaux d’orgues, pareils aux fuseaux prisma-
tiques de la Grotte de Fingal. » 7. Vojtech, nom tchéque de S. Adalbert, qui dans le premier manuscrit du Sou/ier tenait le rdle dévolu ensuite 4 S. Adlibitum (Th. IL, p. 790). — La couleur liturgique « cendrée » est également en usage, pout les féries de PAvent et du Caréme, dans le rite lyonnais. Page 112.
1. Claudel lit a cette époque J. Jeergensen, Saint Frangois d’ Assise, sa vie, son e@uvre, traduit du danois par Téodor de Wyzewa, Perrin, 1909. Cf. Avant-propos, p. xur : « Cest Saint Francois qui nous dit [...] “L’homme ne sait absolument
qu’autant qu'il agit.” Tantum homo habet de scientia quantum operatio. » Ce texte, également cité p. 158, est extrait des Admonitiones, § VII. 2. Visions d’Anne-Catherine Emmerich, éd. Duley d’Ebeling, 3 vol., Poussielgue-Rusand, 1864. Voir t. I, p. 65, 142, 262: « [Jésus] dit qu’aucune femme n’avait été plus chaste que sainte Anne, et que, si elle s’était remari¢e deux fois aprés la mort de Joachim, elle Vavait fait par ordre de Dieu.» — Le
P. Auguste Poulain, S.J., donne la légende du triple mariage de S. Anne comme exemple de l’influence des idées préconcues qui peuvent fausser une expérience mystique : « Sur la foi de ses direCteurs, sainte Colette avait d’abord admis que sainte Anne s’était mariée trois fois et avait eu plusieurs filles. Elle crut voir sainte Anne venir lui rendre visite avec toute sa famille supposée (Bollandistes, au 25 mai, p. 247. Parergon, n° 8). Certains faits,
racontés dans des révélations contestées, ne sont que la reproduction de traits appartenant aux évangiles apocryphes ou a des légendes postérieures. A la fin du Moyen Age et 4 VPépoque de
Décembre 1909
1119
la Renaissance, ils étaient vulgarisés par des livres tels que la Légende dorée de Jacques de Voragine» (les Grédces d’oraison,
traité de théologie mystique, Beauchesne,
10° éd., 1923,
p- 346).
3. Coupute de journal collée, avec en marge ces mots, de la main de Claudel : « M. M. mort de typhoide pendant la guerre. » Sans doute faut-illire M. T. De tels détails, voir également p. 104, annoncent certains themes du Pain dur: la vente du Christ,
Putilisation industrielle du monastére... 4. Cf. Jorgensen, op. cif., p. 211. Epigraphe au livre III, « le Chanteur de Dieu», avec la trad. : « Car que sont les serviteuts de Dieu, sinon des espéces de jongleurs, ayant pour tache de relever le coeur des hommes et de le pousser a la joie spirituelle.» Extrait du Speculum perfectionis. 5. Ibid., p. 159, 163, 433. Dans /e Pére humilié, Ul, 1 (Th. IL, p-. 527) : « Ainsi notre Frére Pacifique qui de deux morceaux de bois mort ramassés au fond du jardin se faisait un violon dont il Savait jouer mieux qu’un tireur d’archet, / Et la musique qu’il en faisait sortir, il n’y avait que Dieu et lui pour l’écouter. » Cf. l’Epée et le miroir (O. C., XX,
34), ou Claudel rappelle ce
détail, cité également dans une lettre 4 Jammes, le 2 janvier 1910
(p. 170).
6. Dans une lettre 4 Arthur Fontaine du 3 mai 1910, Claudel se reprochetra d’ « avoir en 1909 laissé moutir ce pauvre CharlesLouis Philippe ». « Si j’avais su étre avec lui un peu plus indisctet» (Swarés, Intr., p. 13). Gide, en effet, lui avait peu avant envoyé copie d’une lettre de Philippe qui laissait croire qu’il elit pu se convertir : « Je ne doute pas que cette lettre augmente vos tegtets de ne pas lui avoir parlé davantage » (p. 115). Claudel avait été prévenu par Marcel Ray, professeur 4 Montpellier et ami d’enfance de Philippe. On peut lire dans Chaigne, Ve,p. 110, sa réponse : « Je l’avais laissé 4 Paris, il y a quelques semaines, plein de vie et de gaieté, et maintenant de tout le petit groupe de mes amis, c’est lui le premier qui me quitte en silence. [...] Je sentais que cette ame si belle et si religieuse était faite pour Péclaitement total. J’espére fermement que cette grande lumiére ne lui a pas été refusée au dernier moment...» Voit Gide, p. 119, 260, 294, 299. Le poéme a la mémoire de Ch.-L. Philippe parut dans le numéro d’hommage de la N.R.F.; il fera partie de Corona (Po., p. 441). Voit également dans Pr., p. 539, un texte de
1922.
1120
Cahier I 1910
Page 113.
1. Dans Jcergensen, op. cit., p. 358, il y a Bo, Bo et non Ba, ba. Il ne s’agit pas d’un sermon du frére Egide, mais d’une injonétion d’Egide a un frére mineur qui lui demandait de bénir le sermon qu’il devait prononcer sur la grande place de Pérouse. « Je veux bien bénir ton sermon, mais 4 la condition que tu dises ceci : Bo, bo, etc. Je parle beaucoup et n’agis que trés peu. » 2. Le monastére bénédictin des saints Cosme et Damien est connu a Prague sous le nom d’Emmaiis, parce que le jour ot il fut inauguré, — lundi de Paques 1372 — le célébrant lut, non en latin, mais en langue slavonne, lévangile des pélerins d’Emmaiis. L’empereur Charles IV Vavait fondé pour des moines sud-slaves qui avaient le privilége de célébrer la liturgie dans leur langue. En 1910, les Bénédiétins d’7Emmaiis dépendaient de Beuron dont la liturgie différe sensiblement de la liturgie romaine. — Cf. Swarés, p. 169 : « L’office des Bénédiétins, mes voisins... » 3. Jorgensen, op. cit., p. 276: « [Francois] demanda 4 aller
en France parce que, dit-il, c’est un pays ot l’on a plus de respect pour le corps du Christ que dans les autres nations catholiques » (Speculum perfeétionis, chap. Lxv). 4. « Voici tant de siécles que nous sommes séparés de ’humanité», dira Sichel. Le Pain dur (Th. Il, p. 481). Voir également pour cette idée Isaie. 5. Gide, p. 118 : « J’arrive de Vienne ot j’ai vu Tannhduser avec une immense émotion. Je ne sais si Wagner a jamais rien fait de plus beau» (15 janvier). Pour les jugements de Claudel sur Wagner, voir Pr., p. 367et 479, « le Poison Wagnérien»
et « Richard Wagner» et les notes. Méme a l’époque tardive ou il exprimera son ressentiment 4 l’égard d’un Wagner trop aimé, son admiration pour Tannhduser demeurera intacte. Voir « le Cor d’Hernani » (Pr., p. 479), texte de 1952 : « Je me souviens! Cétait au Volksoper de Vienne, une reptésentation, m’a-t-on dit, assez médiocre de Tannhduser. [...] Elle [cette piéce] suffit cependant a déchainer en moi un ouragan de passion et de sanglots qui ne cessa de m’accompagner depuis |’Ouverture jusqu’au dernier coup d’archet d’une conclusion hétoique. Ces rugissements de la chait mélés 4 ceux de l’Ame qui luttent avec une force égale Pune contre l’autte, c’était moi, c’était cela qu’il me fallait! » Déja dans Richard Wagner: « Tout Wagner est dans Tannhduser [...]. Vous faites le malin, mais vous auriez été avec moi a cette représentation de Vienne, et Dieu sait si elle était
Janvier 1910
1121
mauvaise! Vous auriez été aussi béte. J’ai sangloté d’un bout A Pautre. » — Enfin dans « le Drame et la musique » : « Tannhduser reste un drame grandiose et admitablement composé...» (Pr.,
Pp. 143). Page 14. 1. Cf. Annonce (Th. II, p. 105) : « Le Roi et le Pontife de nouveau
sont rendus a la France et 4 l’Univers, / Le schisme
-_ ptend fin... » 2. Elisabeth Sainte-Marie-Petrin, fille de René Bazin et belle-
sceut de Claudel, publiera en 1921 /a Belle Vie de sainte Colette de Corbie, Plon. Claudel préfacera ce livre d’un poéme « Sainte Colette», repris dans Feuilles de Saints (Po.,p.613); les principaux détails évoqués dans le poeéme sont déja dans cette note. II est possible que Claudel ait suggéré a sa belle-sceur lV’idée de cet ouvtage daté in fine « Hostel et Lyon, 1° mats 1914-10 mats 1920». Il avait de l’amitié pour Elisabeth Sainte-Marie-Perrin (cf. Jammes, p. 312 : « ma chéte belle-sceur, Elisabeth... ») avec
laquelle il a échangé une correspondance fort importante et intéressante. En 1926, elle a publié une Introduétion a l’auvre de Paul Claudel, Bloud et Gay.
3. Cf. «le Gott du fade» (Pr., p. 116): « ... ce que j’appelle le Style Gramidon, ce Style chaste et feutré dont Villustre Ernest Renan nous offre les meilleurs exemples. » 4. Claudel utilise cette figure héraldique dans le blason des Cofifontaine, dans /’Ofage : « en chef d’or avec une foi de gueules (deux mains unies)...» (Th. I, p. 219). Georges dita : « Et voici que nos mains aussi se sont dissoutes et que la foi sut notte blason est corrompue...» (p. 286).
Page 116. 1. Deux fois de suite Claudel écrit Jésus au lieu de « Josué »,
lapsus qui s’explique pat un rapprochement; cf. « Offrande du temps» [1914] (Po., p. 529) : «... le soleil est arrété, /Comme pat ce Jésus jadis que nous appelons Josué. » 2. VI, 1-19 : « Cependant Jéricho était fermée et barricadée dans la crainte ot l’on y était des enfants d’Israél et nul n’osait y entrer ni en sortir.» — 2: « Alors le Seigneur dit 4 Josué : Je vous ai livré entre les mains Jéricho et son roi, et tous ses vaillants hommes. » —
3 : « Faites le tour de la ville, vous tous
tant que vous étes de gens de guerre, une fois par jour. Vous ferez la méme chose pendant six jours.» — 4 : « Mais qu’au 7° jour, les prétres prennent les sept trompettes dont on se sert
dans
Vannée
du jubilé et qu’elles
marchent
devant
l’arche
Tyr22
Cahier I
dalliance. Vous ferez sept fois le tour de la ville et les prétres sonneront de la trompette.» — 5 : « Et lorsque les trompettes sonneront d’un son plus long et plus coupé et que le bruit aura frappé vos oreilles, tout le peuple poussera de grands cris et alors les murailles de la ville tomberont jusqu’au fondement et chacun entrera par l’endroit qui se trouvera vis-a-vis de lui [...]. » — 9 : « Et le reste du peuple le suivit.» — 10 : « Or Josué avait donné cet ordre au peuple : Vous ne jetterez aucun cri, on n’entendra aucune voix et il ne sortira aucune parole de votre bouche, jusqu’a ce que le jour soit venu ow je vous dirai : Criez et faites un grand bruit. [...]» — 11 : « Et l’arche retourna au camp et y demeura.» — 12 : « Et Josué s’étant levé avant le jour. [...]»— 16: « Et Josué dit 4 tout Israél : Jetez un grand cri; car le Seigneur vous a livré Jéricho.» — 17 : « Que cette ville soit en anathéme et que tout ce qui s’y trouve soit consacré au Seigneur : que seule Rahab, la courtisane, ait la vie sauve, avec tous ceux qui se trouvaient dans sa maison, parce qu’elle a caché ceux que nous avions envoyés pour connaitre le pays. » — 18 : « Mais pour vous, prenez bien garde de toucher a quoi que ce soit contre l’ordre qui vous a été donné, de peur de vous rendre coupables de prévarication et d’attirer ainsi le trouble et le péché sur toute l’armée d’Israél. » — 19 : « Que tout ce qui se trouvera d’or et d’argent et d’objets Vairain et de fer, soit consacré au Seigneur et mis en réserve dans ses trésors. » 3. Vie et euvres de la Bienheureuse Marguerite-Marie Alacoque, Poussielgue, 1876, 2° éd., t. I, p. 99.
4. Discussion née de la déclaration de l’épiscopat, en septembte 1909, qui condamnait Vécole laique, la tolérant « a condition que rien ne porte atteinte 4 la conscience des enfants », et proscrivait certains manuels scolaires. Voir A. Dansette, Histoire religieuse de la France contemporaine, Flammation, 1965, p. 638. 5. Cette note est préparée par les deux paraboles auxquelles Claudel a fait allusion quelques lignes plus haut (Luc, XI, 11-13). Page 117.
1. Cf. Lettre 4 Jammes (p. 171, 26 janvier 1910) : « Que ditesvous de cette discussion sur les écoles 4 la chambre? A la suite de ce débordement d’ineptie, la Seine déborde a son tour, et les
eaux du ciel envahissent les caves du Journal officiel. » 2. Le 26 janvier, Claudel écrit 4 Jammes : « Prés de vous a Pau se trouve un jeune Roumain que j’ai aidé autrefois, avec Mgr Baudrillart, 4 amener 4 Dieu. Je le crois entre les mains Wune femme qui exerce sur lui un grand ascendant et qu’il a épousée civilement...» 11 lui demande d’aller le voir (p. 170). Il en
Janvier-Février 1910
1123
parle 4 nouveau le 1° février, le ro mars et en février ou mars 1911 : « Le pauvre Tresnea, 4 qui vous vous étes intéressé, est ‘mort a Cannes dans de trés bons sentiments, aprés avoir recu les sacrements » (p. 199). 3. « Coupe-moi les cheveux », dit Protée 4 Brindosier. « Mais, il n’y a pas de cheveux! 4 peine cing ou six filaments impalpables! Ce sont des ciseaux de brodeuse qu’il me faudtait! » (Protée, I, v; ThA. II, p. 326). _ 4. Allusion a la phrase célébre de René Viviani dans son _discouts de novembre 1906 4 la Chambre des députés : « Ensemble et d’un geste magnifique, nous avons éteint dans le ciel des lumiéres qu’on ne tallumeta plus.» Voir A. Dansette, op. cit., p. 585. Voir ici p. 312, n. 5. 5. L’église Sainte-Marie du Tyn, a Prague, fait face a l’Hotel de Ville. Tyn est un mot slave qui signifie enclos, l’enclos ot se réunissaient les martchands; l’église date du xrv® siécle, les clochers de 1510. ' 6, Exactement « plaire en s’insinuant ». 7. Cf. Lettre a Suarés (p. 151, 3 février) : « J’ai vu J’autre jour chez un marchand de bric-a-brac un grand chandelier-asept-branches ptovenant sans doute dune vieille synagogue. C’a été jusqu’ici ma plus grande émotion a Prague, je ferai quelque chose de ce chandelier. Le fait juif a d’ailleurs eu toujours pour moi le plus profond intérét.» Voir p. 137. De telles réflexions préparent évidemment /e Pain dur.
8. A. Espiau de la Maéstre note
que,
dans la Jeune Fille
Violaine, Bibiane mord sa mére a l’oreille (TA. I, p. 521 et 606). Le méme jeu de scéne se trouve dans le livret de Popéra de Mascagni, Cavalleria ruéticana, qui fut créé a Paris en 1892; il n’est pas impossible que Claudel qui préparait alors son drame s’en soit inspiré (att. cit., /es Lettres romanes, 1962, t. XVI, p. 16, n. 24).
9. Trad. : « Pratiquant la vérité dans la charité. » Page 118. 1. Cf. Lettre 4 Jammes, le 11 février, p. 171. 2. Cf. Lettre 4 Gide, 14 mai 1911, 4 propos d’un fragment dela traduction de Tacite par d’Ablancoutt : « ... Vidée d’une bonne traduction, qui pour étre exacte ne doit pas étre servile, et au contraire tenir un compte infiniment subtil des valeurs...» Le texte de Nicolas d’Ablancourt pataitra avec un commentaire de Claudel dans la N.R.F. du 1& juillet 1911. En septembre et
oétobre i911 seront publiées dans la N.R.F. des traductions par Claudel de Coventry Patmotre, faites en 1910. 3. Cf. «le Chemin de la Croix» (Po., p. 484) : « Ayez pitié
1124
Cahier I
de tous ceux qu’on déchire! / De l’enfant opéré trois fois que le médecin encourage, /Et du pauvre blessé dont on renouvelle les bandages, / De l’époux humilié, du fils prés de sa mére qui meutt, /Et de ce terrible amour qu’il faut nous arracher du ceeur.» Ce texte parut en 1911. Page 119.
1. « Mettte », expression familiére 4 Claudel. Cf. Gide, p. 88 : « Ce pauvre Signoret 4 qui vous avez mis une belle préface. » Pout ce poéme, voit p. 112, n. 6. 2. S. Thomas, sur les anges, voit Ia, q. 50, art. 4. — J. Pacius, né 4 Vienne en 1550, mort 4 Valence en 1635; converti a la Réforme, professeur de droit 4 Heidelberg, Montpellier, Padoue, Valence; outre la publication de nombreux ouvrages juridiques, on lui doit Pédition de plusieurs traités d’Aristote. Il s’agit ici vtaisemblablement du livre de Porphyre sur les Catégories d’Aristote. Trad. : « L’espéce, dans son sens originel, est ce qui appatait a la vue : c’est pourquoi elle signifie d’abord la forme visible ou apparence extérieure. » — « Au gente qui est quelque chose d’indéterminé, l’espéce ajoute forme, beauté, perfection relevant de la raison. » 3. La liturgie romaine autorise pour le 4® dimanche de Caréme (Laetare), comme pour le 3° dimanche de |’Avent (Gaudete), des ornements roses, pour signifier Pallégresse chrétienne 4 approche du mystére de Joie. 4. Evangile tiré de Jean, VI. « Panes hordaceos, des pains d’orge.» Trad. des deux passages qui suivent : « Ramassez les mofceaux qui restent, afin qu’ils ne soient pas perdus», « Il s’enfuit dans la montagne». 5. Cf. Jammes, p. 181 : « Cette colline de Petrin dont le printemps de autre cdté de la riviére vient de faire un gros bouquet blanc. » 6. Claudel a pu étre provoqué 4 une lecture de /’Astrée par un atticle de Victor Cherbuliez
dans /a Revue des Deux
Mondes,
1? janvier 1910. Cf. Dodoitzu (Po., p. 769) : « Feu sans fumée » : « Connaissez-vous ma bien-aimée/ Ce feu qui brile sans fumée ? » 7. Voir Daremberg et Saglio, Did. des antiq. grec. et rom., t. IV, Ile partie, p. 1277. Scipio, chez Pline.
Page 120. 1. Ps. CXXIV, 2:« ... Le Seigneur est autour de son peuple... » 2. Souvenirs entomologiques, 10o® série, Delagrave, 6¢ éd., p. 35 : « Un mois durant et plus, sans nourtiture aucune, il [le mino-
Mars 1910
1125
taure] accomplit une besogne forcenée, toujours dispos. [...] |. L’énergie chimique, issue des aliments, n’est pas l’unique origine de lactivité animale. Comme stimulant de la vie, il y a quelque chose de supérieur aux bouchées digérées. Quoi donc? Que sais-je? Apparemment des effluves, connus ou inconnus, émanés du soleil et permutés par lorganisation en équivalent mécanique. » Le 3 mars, Claudel écrit 4aGide : « Je vois qu’on célébre a Avignon le jubilé de Henri Fabre. Connaissez-vous ce naturaliste admirable? S’il était anglais il serait plus célébre que Darwin ~et a bien plus juste titre » et lui conseille la leture des Souvenirs entomologiques, « une des lectures les plus stupéfiantes et les plus nourticieres pour imagination ». Il les lisait déja « avec enthousiasme » en 1905 (Jammes, p. 63, de Villeneuve, 29 septembre). Il cite Fabre (Pr., p. 987) dans la préface du « Bestiaire spirituel ». 3. Claudel a écrit ici en surcharge et plus tard (l’encte est différente) : « Pas exact, parait-il, mais des distances en somme
équivalant a linfini. » ; 4. Avant cette note, Claudel a griffonné un « Schéma du monde» : deux cercles concenttiques : l’intérieur du plus petit est A, espace entre les deux B, au-dela du plus grand C. « A. Le systéme solaire. B. L’incommensutable de tous cédtés, le vide. C. Les étoiles. » 5. Cf. « le Chemin de la Croix», 6¢ Station (Po., p. 481) : « Ce voile [...] /Afin qu’éternellement son image s’y attachat / Qui est faite de son sang et de nos crachats. » Page r2t.
1. Lridée convenait pour la XIe station. Claudel l’a transformée pout la IV@ (Po., p. 479); « O métes qui avez vu moutir
le premier et Vunique enfant / Rappelez-vous cette nuit, la derniére, auprés du petit étre gémissant... » 2. Le 26 février 1910, Claudel écrit 4 Gide : « Ma petite fille a un abcés, mon petit gargon a la coqueluche. » Ce qui explique sans doute ces quelques notes. BunGt,.« Dédicace») |voit p. 101, ne 5. 4. « Simarre » est en sutcharge. 5. « De la mort» est écrit en surcharge, a la place d’un mot biffé, illisible. —- Claudel note sans doute encore ces noms
de
saints pout Corona. I] consactrera, voit p. 127, un poéme a S. Jean Népomucéne, S. Stapin figure dans /’Ofage (Th. II,
p. 254).
6. « Qui cherchez-vous? [...] Jésus le Nazaréen. — C’est moi. [...] Ils reculérent et tombérent a terre. » Jean, XIX, 4-6, Evangile du Vendredi-Saint. Donc le 25 mars, voit note suivante.
1126
Cahier I
Page 122. 1. Thren., IV, 1 : « Les pierres [du san¢tuaire] ont été semées au coin de toutes les rues. » Office du Samedi-Saint, 17 noéturne, 2e lecture. — Voir p. 112, n. 3, 4 propos du Pain dur. — Il s’agit vraisemblablement du méme village, Grisy-sur-Seine, dans arrondissement de Provins (Seine-et-Marne). 2. L’abbé Favre-Gilly, né 4 Meylan (Isére) le 18 mai 1881, mort 4 Biviers (Isére) le 13 juillet 1934. Homme de grande culture, excellent orateur, mais qui n’a rien publié. Il a pu rencontrer Claudel qu’il admitait; sur son memento, il y a ces vets de la Cantate: « La nuit passe, le jour revient, Beata! / Et je répondais ¢ Qu’ importe le jour! Eteins cette lumiére qui ne me
permet de voit que ton visage! » 3. Claudel a lu ce trait d’une légende chinoise dans un ouvrage du P. Wieger, Folklore chinois, 1909; il le citera quelques semaines plus tatd dans sa conférence sur « les Superstitions chinoises » (Pr., p. 1083).
4. Il semble d’aprés l’écriture que ce soit a une date trés postérieure que Claudel a ajouté ici « ou plutdt VPanalogie». Cf. Art poétique (Po., p. 143) : « L’ancienne [logique] avait le syllogisme pour organe, celle-ci a la métaphore. [...] Il n’est science que du général, il n’est création que du particulier»; et p. 180 : « L’immense tache 4 chacun dévolue est de tout compater, d’essayer tout avec tout.» Cf. également Pr., p. 54, 422, 428.
5. Claudel avait d’abord écrit : « du général au particulier». 6. I, 12 : «Il leur a donné pouvoir de devenir enfants de Dieu. » 7. Lite : « Sainte-Marie-Perrin », famille de Mme Claudel. 8. Cf. « Introduction 4 un poéme sur Dante» (Pr., p. 423) : « Par la critique ou gout intime, le poéte sait immédiatement les choses qui conviennent ou non 4 la fin qu’il poursuit. La critique est pour ainsi dire le cété négatif de la création. C’est
ainsi que dans une statue on peut considéter soit la statue elleméme, soit les éclats que le ciseau a fait sauter. » 9. Kolin, ville de Bohéme, sur la tive gauche de l’Elbe.
Page 123. Claudel cite librement
Vladimir
Soloviev,
/a Russie et
ifeElise universelle, Albert Savine, 1889, puis Stock; 2° éd., p. 74: « Dieu s’est fait homme dans la personne du Messie juif, au
moment ot ’homme se faisait Dieu dans la personne du César romain. » — Pout la seconde citation, p. 136 : « Aprés la monatchie assyro-babylonienne, cette téte d’or du despotisme le plus
Mars-Abril 1910
1127
pur et le plus centralisé, vient la monarchie médo-perse — la poitrine et les bras d’argent symbolisant une puissance despotique moins centralisée, moins pute, mais en revanche beaucoup plus vaste — enserrant dans ses bras toute la scéne historique alors entre la Gréce d’un cdté et l’Inde de l’autre. Puis vient la monatchie macédonienne d’Alexandte le Grand — ce ventre Aairain qui dévore |’Hellade et Orient...» Cf. Dan., II, 31-36. 2. I, Jean, V,7:«... Et ily ena trois qui rendent témoignage sur la terre : |’Esprit, l’Eau et le Sang, et ces trois sont un.» Claudel renvoie évidemment a « l’Esprit et eau ». 3. Trad. : « Ruben, mon premier-né, ma force et la principale cause de ma douleur; tu devais étre le plus favorisé dans les
dons, et le plus grand en autorité. Mais tu t’es répandu comme Peau. Puisses-tu ne point croitte... » 4. Verset 23 : « Celle-ci sera appelée “femme” patce qu’elle fut tirée de Vhomme. » Cf. Seigneur, apprenez-nous a prier (O. C., XXIII, p. 31 sq.), un commentaire de ce texte. Page 124. 1. Bellarmin,
De
controversiis
christianae fidei adversus
hujus
temporis hereticos, t. II, De Sacramento matrimonii, p. 790 (Naples, 1858). Claudel a omis aprés « Ecclesiae» : Si vero consideretur matrimoninm jam fattum et celebratum, negari non potest... Claudel cite ce texte en francais dans sa « Lettre sur Coventry Patmore » (Pr., p. 530) : « Le mariage est semblable a l’Eucharistie dans ce que ce dernier sactement a de permanent. Tant que les époux vivent, toujours leur société est celle du Christ et de son Eglise... Car on ne peut nier que les époux eux-mémes, vivant ensemble en leur société et conjonétion, sont un symbole matériel et
extérieur de l’indissoluble union du Christ et de son Eglise; de méme que dans le sacrement de l’Eucharistie, la consécration achevée, demeurent les espéces consacrées qui sont le symbole sensible et extérieur de l’aliment spirituel intérieur. » — Cf. Osage (TA. IL, p. 271) : « Il [Dieu] fait un sacrement comme son corps méme, / De cet aveu pat qui le pécheur se condamne 4 mort {...| /Et de méme il a sanétifié tout consentement dans le matiage que deux étres l’un a l’autre se font l’un de l’autre pour Péternité. » Passage ajouté dans le dernier manuscrit, auquel Claudel travaille précisément 4 cette date.
2. Reétifier : « Otakar. » Les deux premiers actes de la comédie de Shakespeate, ainsi que le cinquiéme et deux scénes du troisiéme,
se passent en Sicile, le reste en Bohéme. Sur Vintérét que porte Claudel au Conte d’hiver, voir Mémoires, p. 36. 3. « de douanier », en surcharge. 4. Voit p. 120,n. 5. CLAUDEL
V - 39
39
1128
Cahier I
5. IV, 20 : « Nous
ne pouvons
pas quant
a nous
ne pas
publier ce que nous avons vu et entendu. » 6. Trad. : « On est puni par ot l’on péche. » 7. Carmina theologica, lib. 1, sett. 2. Poemata moralia (P. G., XXXVII, col. 523). Trad. : « La premiére vierge est la sainte Trinité. » 8. Claudel cite librement De /’institution oratoire, I, cf. 6 f. s’agit de certains amateurs passionnés d’étymologie : « Je citerai entre autres Caius Granius, qui s’applaudissait de dire coelibes, célibataires, dans le sens de coelites, habitants des cieux, parce que les célibataires sont exempts du plus pesant des fardeaux. » Claudel a ajouté et coelestes.
Page 12). 1. Loc. cit., p. 124, n.
2. Trad.:
7: « La virginité est splendide. »
«Oh! combien belle est la race chaste avec son éclat. »
3. « Le Chemin de la Croix », V® station (Po., p. 480) :« Qu’on nous emploie aussi, méme de fotce, 4 votre Croix. / Tel Simon
le Cyrénéen qu’on attelle a ce morceau de bois. / Il ?empoigne solidement et marche derriére Jésus, / Afin que rien de la Croix ne traine et ne soit perdu. » 4. Mémoires, Pléiade, p. 65 : « Les rois qui ont été sages et qui ont connu leurs véritables intéréts ont rendu les parlements dépositaires de leurs ordonnances. [...] Ils n’ont pas cru s’abaisser en s’y liant eux-mémes, semblables 4 Dieu qui obéit toujours a ce qu’il a commandé une fois. » Cf. Sénéque, De Providentia, V, 6; Voir p. 109, n. I.
5. Ibid., p. 72: « Il [le Parlement] gronda sur lédit du tarif, et aussitdt qu’il eut seulement murmuré, tout le monde s’éveilla. [...] Le peuple entra dans le sanétuaire; il leva le voile qui doit toujouts couvrir tout ce que lon peut dire, tout ce que l’on peut croire du droit des peuples et de celui des tois qui ne s’accotdent jamais si bien ensemble que dans le silence. La salle du Palais profana ces mystéres. » 6. Dans la préface au « BeStiaite spirituel» (Pr., p. 987), Claudel reviendra sut cette idée pour l’étendre : « Non seulement les choses existent, mais elles existent ensemble,
et l'une pat
rapport a l’autre... » Page 126.
1. Quoique les radicaux aient perdu quelques siéges lors de ces éleftions ils conservaient cependant une majorité; Claudel songe évidemment 4 toute lagitation qui continue autour des problémes religieux.
Abril-Mai 1910 2. Soloviev,
op. cit. Claudel
résume
1129 le chapitre
Ile partie : « La pierre de l’Eglise », p. 88 sq.
1 de la
3. Cf. « le Chemin de la Croix», début (Po., p. 477) : « Cest fini. Nous avons jugé Dieu et nous l’avons condamné a mortt. /
Nous ne voulons plus de Jésus-Christ avec nous, car il nous géne...» — On peut songer aussi 4 Louis, a la fin du Pain dur, qui « se débarrasse » (Th. II, p. 486) du Christ. 4. En réalité XXXII, 15 : « Lui quia formé le coeur de chacun | deux...»
5. Eglise Saint-Nicolas de la Mala Strana, sur la rive gauche de la Moldau. C’est la que prie Dofia Musique et qu’interviennent les quatre saints (Sou/ier, III, 1; Th. II, p. 782). — Si Claudel n’a
pas utilisé telle quelle ’idée de Varchitefte, au moins peut-on noter qu’il va, peu aprés, commencer
la rédaétion de /’Annonce,
ou les « divagations atchitecturales» de Pierre de Craon qu’il avait d’abord envisagé de supprimer (Gide, p. 98) prendront une importance plus grande. — Dans la derniére phrase, il avait d’abord écrit : Le soir.
6. Sans doute est-ce la premiére idée de ce conte écrit a Prague, « le Cheval qui apportait le soleil» : « ... au seuil d’une grande forét, il arriva devant une maison solitaite; dedans se trouvait un vieil homme qui lisait dans un gros livre» (Pr., p. 1090). On songe aussi au « Philosophe» de Rembrandt (ORG XOX IM, paz): Page 127. 1. Cf. Edward Metedith Cope, Introduttion to Aristotle's Rhetoric, Cambridge, 1867, p. 190-193. « Un aimable esprit de
taison. »> 2. Trad. : « Charis [grace], un mot que l’on peut a peine traduire, puisqu’il signifie non seulement bonté, grace ou faveur, mais aussi le sentiment de gratitude suscité par la bonté. — Les Charites, ou Graces, étaient la personnification grecque
des sentiments mutuels de bonté. — De ce fait, le temple des Graces symbolisait les services mutuels sur lesquels repose la société. » 3. Trad. : « Une question bien posée est la moitié de la science, )» 4. Martyr du secret de la confession. I] aurait été noyé dans la Moldau par ordre du roi Vacslav IV. Sa Statue, ornée des cing étoiles qui, selon la légende, accompagnérent
son corps
flottant sut le fleuve, se dresse sut le vieux pont de Prague. Claudel lui a consacré la 3° de ses « Images saintes de Bohéme » (Corona, Po., p. 443). Voir déja une allusion p. 121.
1130
Cahier IIa
Page 128.
1. Il reste une trace de cette idée dans le Iet atte du Pére humilié: « Tout le monde est au feu d’artifice, de autre cdté du
jardin. J’ai entendu les premiéres parmi les cris atténués de la foule» 2. Cf. « le Chemin de la Croix» homme est-il si simple affaire que
fusées qui montent au ciel (Th. I, p. 508). (Po., p. 483) : « Le salut de le Fils /Pour ?accomplir est
obligé de s’atracher du sein du Pére?», et Ofage, I, 2 (Th. U,
p- 272) : «... quand le Fils pour le salut des hommes / S’est attaché du sein de son Pére... »
CAHIER
Ila
Page 131.
1. Claudel écrivant le Cahier I avait sous la main cet autre cahiert (que nous désignons par II a), pour des notes d’un catactére plus particulier : science, projets de drames, textes d’ Aristote ou de S. Thomas, etc.). Voir p. 161, n. 1, pour les utilisations
successives de ce cahier. 2. « Et lisse », en surcharge. 3. Claudel avait d’abord écrit E//ipse, raturé. 4. Ces lignes non datées ont été sans doute écrites en janvier 1908. Elles semblent en effet contemporaines des pages 82-83 du précédent cahier, ot il est question de Kepler qui avait choisi Mats pour son systéme de recherches astronomiques (voit p. 54). Crest a cette époque que Claudel écrit, 4 Tien-tsin, Ja Maison Sermée (Po., p. 282) : « Si Pastronome [...] / Epiant avec la méme poignante curiosité le visage de Mars qu’une coquette qui étudie son miroir... » Page 132.
1. Claudel avait déja parlé du livre de Wallace a Frizeau, début 1906, voir Jammes, p. 81, et encore p. 106 et 128. Il en parle a Riviere, p. 129, le 28 janvier 1908. Il l’a déja lu sans doute tandis qu'il écrivait ?_Art poétique. 2. L’abbaye d’Igny, fondée par S. Bernard en 1126, commune d’Igny-le-Jard, canton de Dormans, arrondissement d’Epernay (Marne), deviendra dans /’Ofage Vabbaye de Séfontaine, puis Cotfontaine. Georges est vicomte de Cotfontaine et Dormant,
Sans date
1131
Turelure, préfet de la Marne. — Les trois mots latins sont empruntés librement 4 un célébre distique sur les Ordrtes reli-
gieux : Bernardus valles, colles Benediflus amabat Oppida Franciscus, magnas Ignatius urbes (Bernard
aimait
les vallées,
Benoit
les collines, Francois
les
petites villes, Ignace les grandes cités.) 3. Comparer cette premiére ébauche d’un plan pour la -« Trilogie» a ce que Claudel écrit a Frizeau, trois mois plus tard, le 1°f mai 1908 : « Il est assez possible que je prenne pout cadre une histoire audacieusement atrangée du x1x® siécle, ot je distingue trois phénoménes intéressants : 1. La Révolution frangaise, que j’appellerai /a révolution contre le hasard. — 2. La connaissance de la terre. — 3. La séparation de la terre et de l'homme qui n’y a plus d’attache (suivant les recommandations ascétiques!) » (Jammes, p. 130). ' 4. Citation approximative de Thren., I, 4: Viae Sion lugent... Claudel adapte le texte : « Les pierres de Sion pleurent parce que personne ne vient a ses fétes.» Job, XIV, 14 : « Crois-tu quwune fois mort on peut revivre? » 5. On notera que dans ce plan de /’Ofage, Sygne semble accepter le sacrifice qui lui est imposé; dans le drame elle s’y tefusera; la valeur symbolique sera tout autre. Voir J.-P. Kempf et J. Petit, /’Osage, Archives des Lettres modernes, 1966. 6. Plan bien vague encote du Pain dur. Turelure y célébrera le « chemin de fer » (TA. II, p. 420), Louis évoquera les « moissons» de la Mitidja (sbid., p. 446). Page 133. 1. Ce troisiéme drame est le moins net dans |’ébauche. Seul _ demeurera le théme de l’aveugle. Noter VPidée du « pére astro- nome» devenant aveugle; Claudel lit des ouvtages sur la cosmographie, écrit les Odes; la « beauté de ce monde», a laquelle il faut dire adieu, déborde la terre. 2. Peut-étre est-ce déja, bien vaguement, Vidée de la fin du Pére humilié, inspirée de “Robert Browning” (/e Pot de Basilic), le visage de Pensée « enseveli parmi les enivrantes corolles » des tubéreuses (TA. II, p. 1457). Plus probablement « la femme
qui
sent une bonne odeur» est une réminiscence du Cantique des Cantiques: « Je suis comme la fiancée du Cantique dont il est dit que les doigts distillent la myrrhe », dit Pensée (p. 567). 3. Ceci rappelle la Ile Ode: « Et comme toutes choses de vous / Ont regu l’étre, dans le temps elles restituent |’éternel » (Po., p. 242), et la V@: « Vous avez placé en moi le rapport et la
1132
Cahier Ila
proportion, / Une
fois pour toutes; car un chiffre peut étre changé, mais non pas le rapport de deux chiffres : la est la cettitude » (p. 284). 4. « Et tout nu» surcharge.
ainsi que « au poignet
gauche»
sont en
5. Tatonnements sur le nom des personnages de /’Ofage. Claudel songe 4 Bellefontaine, 4 l’'abbaye de Sept-Fons, a la fontaine de la Sibylle... (cf. Pr., p. 1006 sq.). Séfontaine demeurera dans le premier brouillon de /’Osage et Sygne seta « la pauvre sibylle qui garde le feu» (TA. Il, p. 221). « Sygne» semble une surcharge postérieure. 6. sGhin.t3F Page 134. 1. Marc, XIV, 35 : « Pour que, s’il était possible, cette heure passat loin de lui.» — Jér., XII, 4 : « Jusques 4 quand la terre seta-t-elle en deuil, et toute Pherbe des champs sera-t-elle desséchée 4 cause de !a méchanceté des habitants? Les bétes et les oiseaux ont péri, car ils ont dit: il ne verra pas notre fin. » Ibid., 10 : « De nombreux pasteurs ont saccagé ma vigne, ils ont foulé aux pieds ma propriété, ils ont changé une part délicieuse en une solitude. Ils Pont dévastée [...] et il n’y a personne qui ait le cceur attentif. » 2. Deux villes d’Italie portent ce nom, lune dans la province de Salerne, l’autre dans celle de Pérouse. Claudel recherche de
beaux noms pout ses petsonnages. 3. « Moments » est en surcharge. 4. Premiére notation vraiment proche du Pére humilié. Celle qui suit est le schéma du Pain dur: arrivée de Louis, départ de Lumitr. 5. Cf. Pr., p. 1007, « Mon pays». Claudel y évoque « l’antique pignon de Chinchy», Toutes ces réflexions sur la « Trilogie » ne Péloignent guére des souvenirs de Villeneuve. 6. Lridée dun quatriéme drame faisant suite au Pére humilié poursuivra longtemps Claudel. Il raconte dans Mémoires (p. 249 et 253) comment une nuit d’orage, a la Guadeloupe, il lui sembla « saisit la possibilité d’une quatri¢me piéce qui terminerait la Trilogie, et, quand le jour est venu, ¢a s’était dissipé... ». Voir Cah. Ci. II, p. 108, le récit fait aussit6t 13 novembre 1928; voit également ici p. 832.
a Milhaud,
Page 135. 1. Idée utilisée dans /’Annonce faite a Marie, dune maniére
Sans date
1133
a peine différente; l'enfant ressuscité aura les yeux de Violaine. — « Révé 4» est une surcharge, 2. Ps, LXIV, v. 12: Benedices coronae anni benignitatis tuae...
Claudel songe sans doute déja au recueil qu’il publiera sous ce titre, et dont il parle a Gide, dés janvier 1909 (Gide, p. 96). Les premiers hymnes de la Corona furent écrits en 1908. 3. Cette note permettrait de dater approximativement la page. Le premier manuscrit — fragmentaire — de /’Osage (I, 1 et 2) porte encore Séfontaine; il doit étre de mars-avril 1908. Ces notes, comme
les suivantes
: « sacre
des rois de France»
et
« Caractere de Coffontaine », marqueraient la réflexion avant la rédaction nouvelle de ces deux scénes. 4. Juvence (Gaius Vettius Aquilinus Juvencus), prétreespagnol
du tv® siécle, qui traduisit en vers l’évangile de S. Matthieu, vets 330. On lui attribue aussi un poéme sur la Genése, un Carmen de laudibus Domini et un Triumphus Christi heroicus (P. L., XIX). — Jovinien, hérétique du ve siécle. S. Jér6me a écrit un ‘contra Jovinianum ; il niait que Vétat du mariage fut inférieur a celui du célibat. Il fut condamné pat un synode romain en 390 et mourut avant 406. Claudel est sans doute séduit par Vidée d’un dialogue entre le poéte chrétien et l’hérétique. A moins que seuls les noms l’aient séduit. Il semble d’ailleurs que ces deux noms aient été ajoutés, aprés coup, au-dessus de la note suivante. 5. Rudel, poete provengal du x1re sié¢cle, devenu amoureux sur sa renommée de la comtesse de Tripoli, partit pour la voir; il mourut en arrivant. Swinburne, Heine, Rostand (Princesse /ointaine) se sont inspirés de cette légende. 6. Par ou pour, le mot est illisible. Page 136.
1. Théme
des déclarations de Cotfontaine
a Sygne et au
Pape. Cf. Th. Il, p. 227: « O ame qui m’es née toute pareille [...] / Vous comprenez ces choses / Comme la terre nous donne son nom, je lui donne mon humanité. » Et Sygne : « Leur sang a été semé sut le mien » (ibid.). 2. Ibid., p. 225 : « Ah! c’est une chose plus enivrante que le vin d’étre une belle jeune femme! » 3. Claudel aime ce mot. Cf. Partage de Midi: « J'ai été nettoyé lan dernier, /Rincé comme un verte a biére! » (TA. I, p. 986). — Soulier (Th. II, p. 709) : « Je veux me méler 4 chacun de ses sentiments comme un sel étincelant et déleftable qui les transforme
et les rince.»
—
Et encore,
/’CEi/ écoute (Pr.,
p. 182), 4 propos de Vermeer : « ce regard put [...] rincé de toute matiére... »
4. Cf. Pierre de Craon, dans /’Annonce: « Et Saint-Thomas
1134
Cahier Ila
de Fond-d’Ardenne qu’on entend le soir appeler comme un taureau du milieu de ses matécages » (Th. II, p. 108). 5- Ce « drame» deviendra la Cantate: Fausta, Beata et Laeta, la métre, la veuve, la fiancée.
6. L’orthographe habituelle est Ruysbroeck ;mystique flamand du xiv® siécle, dit l’Admirable. Dés 1907, Claudel en conseillait la leGture a Riviére (p. 49). Il cite son Speculum divinae veritatis et
L’Ornement des noces spirituelles, dans Présence et Prophétie (O. C., KX, p. 226 et 277). Il l’a lu dans la traduction de Hello qui écrit, lui aussi, Rusbrock.
7. Latradudtion des Scivias de Ste Hildegarde par R. Chamonal n’a patu qu’en 1912; la parenthése a donc été ajoutée plus tard, ce que confirme la graphie. Cf. O. C., XVIII, p. 336, et supra, . 98, n. 3.
: 8. Pierre de Craon, dans le « Prologue» de /’Annonce, parle de son église qui sera « comme une pyxide pleine de manne». Il reprend aussi quelques vets plus loin image qui suit : archite€te « donne 4 tout lédifice son orient comme a une perle». — « Pyxide » est ajouté en dessous de « custode ». Page 137.
1. Notes pout /e Pain dur. La cantatrice est Sichel, « musicienne»; le chandelier 4 sept branches n’y jouera aucun fdéle. Claudel l’a trouvé chez un brocanteur de Prague, voir p. 117, n. 7, lettre 4 Suarés du 3 février 1910. Peut-on en titer argument pour dater ces notes? 2. Cf. p. 134 et 136. C'est encore la Cantate qui reprendra cette idée. 3. Cf. p. 93 : Claudel a noté la méme phrase dans son autre Cahier en avril 1909; mais l’une ou l’autre notation peut étre un souvenir. 4. Note de le€tute difficile. 5. Claudel utilisera quelques-unes des idées notées ici. Ce petsonnage d’homme d’affaires n’est pas sans annoncer certains traits de Turelure. — Habenichts dans /e Pain dur tirera de sa setviette des objets hétéroclites. — Le « dénouement », inversé — c’est Louis qui est dépouillé — est celui du Pain dur. — Claudel, a la 7° ligne, a hésité entre « qui l’a aimé» et « quw’il a aimé[e] ». Le choix entre les deux leCtures n’est pas aisé. 6. « Bodhisatva », addition postérieure. Page 138.
1. Cf. Dragon, chap. tv, /a Religion (O. C., IV, p. 53-75). L’ouvrage d’Edkins y est cité p. 56, n. 2. Il est possible que Claudel compléte sa documentation pour achever son livre.
Sans date
1135
Rappelons qu’il fait une conférence sur «les Superstitions chinoises », en mai 1910, 4 Prague. Voir Pr., p. 1075. 2. Cf. Eid (Po., p. 28) : « Le Bouddha du Paradis de l’Ouest. » 3. Amitofou. Cf. Ex (p. 29) : « L?Amitofou monte au ciel au milieu des flammes et des démons» et Dragon (O. C., IV, p. 61) : « Amitofou dont le nom conéstitue la sempiternelle litanie des bonzes. » _
Page 139.
r. « Ciel brouillé», les Fleurs du mal; Spleen et Idéal. 2. Substantia angel... la, q. 53, att. 2, corp. (la parenthése résume le ad 3). — Locus angeli..., ibid., ad 1. — Dum angelus movetur..., thid., ad 2. — Motus angeli..., ibid., att. 3, cotp. — Question de la bilocation, ibid., q. 52, att. 2, corp. Trad. : « La substance de l’Ange n’est pas soumise au lieu, comme s’il la contenait, mais elle lui est supérieure, car elle le contient. Par suite il est en son pouvoir de se rendre présente en un lieu comme elle le veut, avec ou sans intermédiaire (méme par un
mouvement continu). Le lieu de ange ne lui est pas égal par la grandeur, mais par la présence de son a€tion. — Quand |’Ange se meut localement, son essence est rendue présente 4 divers lieux : mais essence de l’4me n’est pas rendue présente aux objets qu’elle pense, ce sont plutét les objets pensés qui sont en elle. » Page 140.
1. Citation de Summa philosophica in usum Scholarum, auttore F. Thomas Maria Zigliara, O. P., Lyon, 1882, t. 1, p. 463. Avant
la derniére phrase, Claudel a omis trois lignes. Trad. : « Le lieu est défini par Aristote la surface premiéte, la limite immobile du cotps ambiant ou encore le terme du contenant, immobile, ptemier. Dans cette définition la surface est posée comme genre que le lieu vérifie comme toute autre surface; mais les autres cataétéres jouent le rdle de différences spécifiques. Le lieu est concu en effet comme quelque chose d’enveloppant, dont les limites enferment, pour ainsi dire, un vide rempli par le corps localisé. Ces contours changertaient-ils matériellement, ils demeurent les mémes formellement en tant qu’ils citconscrivent le corps. Ainsi nous disons qu’un homme qui se tient sans mouvement dans un fleuve, est toujours dans le méme lieu, encore que, autout de lui, la surface de Peau soit constamment en mouvement. Le situs est la disposition des patties du corps placé en un lieu, L’espace est la distance que nous constatons entre un corps et un autre ou entre les patties d’une seule et méme étendue ».
1136
Cahier Ila
2. « Etre en un lieu se dit en deux sens. D’une maniére “circumscriptive”... [L’ange], un objet est dans un lieu d’une maniére délimitée quand il est déterminé a un seul lieu, de telle sorte qu’il s’y termine ou s’y délimite, sans pouvoir occuper simultanément un autre lieu adéquat. — Sacramentellement. — Partout. »
3. « C’est patce que sa puissance s’applique d’une certaine maniére a un lieu que l’ange est dit étre dans un lieu corporel. » 4. « Dite que l’ange est dans un lieu, c’est dire simplement qu’il le contient parfaitement et immédiatement dans lordre de la cause efficiente. » 5. « Si une substance incorporelle exerce sa puissance sur une chose corporelle, elle la contient, mais elle n’est pas contenue par elle; l’4me est dans le corps comme le contenant, non comme contenue pat lui; de méme lange bien loin d’étre contenu par le lieu qu’il occupe Penveloppe dune certaine maniéte » (S. Th., Joc. aud. Trad. Heéris).
6. Cf. Art poétique (Po., p. 169) et Vitraux de |’ Apocalypse: « Si nous avions une oreille plus subtile et si elle se prétait a une division du temps plus fine, nous n’entendrions pas un do ou un /a, mais un nombre x de vibrations...» (p. 78).
7. Cf. Odes, I (Po., p. 227): « Ne quitte point mes mains, 6 Lyre aux sept cordes, pareille 4 un instrument de report et de compataison! » Voir aussi la méditation du temps (Art poétique, Po., p. 143) : « Je comprends que chaque chose ne subsiste pas sur elle seule, mais dans un rapport infini avec toutes les autres.
»
8. Voir notes sut Péternel» mutailles
dans «le Poéte et le Shamisen» (Pr., p. 834) les le triangle : « Cest le passager qui s’inscrit dans et ici en mai 1923 : « Celui qui est prisonnier de peut s’échapper, mais non celui qui est prisonnier
d’un triangle. » 9. Cest la grande idée claudélienne du monde « inépuisable et fermée», dont la finitude est 4 image de Vinfini divin a Popposé de linfini indéterminé. Claudel résume ici les chapittes vi et vit du livre III de la Physique d’Aristote; ou plutdt sans doute il en lit des fragments dans les notes d’une Somme, comme plus loin du De Anima et de la Métaphysique. Nous
nous inspiterons pour ttaduire les citations d’Arigtote de la traduction H. Carteron de la Physique (Budé), des traduétions Tricot, Vrin, du De Anima et de la Métaphysique. Les textes latins cités par Claudel sont parfois assez différents du texte grec, le résument souvent,
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Page r4t. 1. Liv. III, 207 6: « Les nombres sont infinis en puissance et
non en acte.» — « Qu’il ne peut y avoir d’un infini sensible un corps infini sensible. » 2. Les
Amours jaunes, Messein (1941, p. 18), « Féminin singu-
lier ». La premiére édition du recueil est de 1873 : Externel féminin de l’éternel Jocrisse! Fais-nous sauter, pantins nous payons les décors | Nous éclairons la rampe... Et toi, dans la coulisse, Tu peux faire au pompier le pur don de ton corps. Fais claquer sur mon dos le fouet de ton caprice, Couronne tes genoux |... Ett nos tétes dix-cors ; Ris ! montre tes dents !... mais... nous avons la police
Et quelque chose en nous d’eunuque et de recors... / 3. « Sichel» est noté en haut et a gauche de la page, encadré. ' 4, 204 b: « 1. La définition du corps est ce qui est limité par une surface, mais l’infini par essence est illimité. — 2. Le nombre est nombrable, mais le nombrable peut étre parcouru en le comptant, il n’est donc pas infini. — 5. Il ne peut y avoir un corps infini composé d’éléments finis. » 5. 206 b: «... de méme que l’existence de la journée et de la lutte est un renouvellement continu, de méme aussi l’infini. Et en effet dans ces exemples, il y a existence en puissance et en
acte, ’olympiade consiste aussi bien dans la lutte en puissance que dans la lutte réalisée. » Page 142.
1. « Platon enseigne d’abord que puisque le semblable est connu pat le semblable, de ce que l’4me connait les choses, elle
doit étre constituée par les principes et les éléments des choses. Mais en soi les ptincipes et les éléments sont des nombres; donc il a pensé que l’Ame était constituée par les nombres. — 2. que, comme patmi les nombres les uns sont harmoniques, les autres non, l’Ame est composée de nombres harmoniques... — 3. que, puisque les nombres naturels sont disposés comme en ligne droite, l’Ame, qui est constituée pat les nombres, est comme une ligne droite et connait par une vision droite ou une connaissance direéte. — 4. que de méme que la ligne droite peut étre courbée en un cercle, ’4me peut fléchir circulaitement sa connaissance, pour revenir a se connaitre soi-méme. » 2. « Il rejette ’opinion qui enseigne que l’4me est un nombre qui se meut par lui-méme. — Le point, c’est une unité occupant
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Cahier IIa
une position, ainsi le point ajoute seulement 4 l’unité la position. » Page 143.
1. 412 a, Il, 1: L’4me est une entéléchie premiére d’un corps naturel ayant la vie en puissance, c’est-a-dire d’un corps organisé. 2. Liv. V, vi : « L’un par essence a cing modes. — 1. On appelle un pat essence ce qui a continuité (par soi-méme ou dans
un autre, de fait ou par natute). Toutes ces choses sont dites unes pat essence, parce que leur mouvement est un essentiellement, de maniére que l’une ne puisse étre mue sans Vautre. On dit que le mouvement est un parce que les éléments en sont indivisibles dans le temps (comme les mouvements d’une ligne ou de segments liés), tous ces mouvements sont simultanés. — 2. Quand le sujet ne differe pas spécifiquement. — 3. Lorsque
le genre est un. — 4. Lorsque la définition est une. — 5. Lorsque la pensée, celle qui a pour objet la quiddité, est indivisible, parce que ces choses sont simples. — Toutes les choses qu’on dit unes ont en commun de n’étre pas divisibles. — L’un est un principe pour le nombre. Ce qui est indivisible selon la quantité et qui est indivisible absolument et sans position s’appelle unité; ce qui est absolument indivisible mais a position est le point; ce qui n’est divisible que selon une dimension est le point, selon deux dimensions, la surface, selon trois dimensions, le corps.»
— x1: « On appelle antérieur ce qui est le plus rapproché du principe moteur. » — xxx: « On appelle accident per se ce qui fondé en essence dans un objet, n’entte cependant pas dans Vessence. » Page 144. 1. VII, ur : « La forme matiere est ce qui n’est par certaine quantité, ni d’une catégoties qui déterminent composé [de la matiére et substance que matiére. » 2. Ps.
est antérieure 4 la matiére. — La soi ni existence déterminée, ni une certaine qualité, ni d’aucune des
l’étre, ni leurs négations. — Le de la forme] semblerait étre plutét
XX XVIII, 8, en réalité : « Ma substance eét en toi.»
Fillion traduit : « Tous mes biens sont en vous», ce qui ne convient nullement 4 linterprétation de Claudel ici. 3. Timée, 37 d. Page 14).
1. Ibid., 52 c. — Nous ne savons 4 quelle édition correspondent les pages notées par Claudel. — Rien ne permet en outre
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de dater avec exactitude ces notes. II dira 4 Gide, le 10 juin 1912, qwil lit le Timée (p. 200). Mais la leGture dont il s’agit ici précéde les pages
sur l’Eucharistie, 4 partir desquelles il a écrit « la
Physique de l’Eucharistie », datée de Prague, 1910. Celles-ci se situent sans doute vers le milieu de 1910. 2. Ibid., 52 d. 3. Ibid., 52 ¢. 4. Idée que l’on retrouve dans « la Messe la-bas» et surtout dans « l’Offrande du temps», écrite en 1914 (Po., p. 529): « Il __ n’y a plus de temps mais Dieu seul, et le soleil est arrété... » 5. Ps. LX XII, 39 : « Un souffle qui passe et qui ne revient plus. » Page 146. 1. On retrouvera cette méditation sur les chiffres tout au long des premiers chapitres de Vitraux. ,
2. Voir «la Physique de l’Eucharistie », O. C., XV, p. 169-180. 3. Catéchisme du Concile de Trente, éd. Gagney, Lyon-Paris, 5° éd., 1857, t. I, chap. v, n° 1, p. 375, et chap. v1, n° 24, p. 403 : Apostolus admonet gravissimum scelus admitti ab tis qui non dijudicant corpus Domini (1 Cor., x1, 29). 4. Ibid., chap. vi, n° 25, p. 404 : Nullam in eo [sacramento] elementorum subStantiam remanere.
5. Extrait de Phymne Pange lingua pout la féte du Saint-Sactement. Cf. S. Augustin, in Ps. XX XIII narra. I, n° 10, cité dans Catéchisme (ibid., n° 27, p. 406). 6. Catéchisme, ibid., n° 31, p. 409 : Non solum verum Christi corpus, et quidquid ad veram corporis rationem pertinet, velut ossa et nervos, sed etiam totum Christum in hoc sacramento contineri. Page 147.
1. Ibid., n° 32, p. 410 : Cum verba illa efficiant quidquid significant. 2. Claudel résume, sbid., n° 37, § 2, p. 412. 3. Ibid., n° 38, p. 414 : Hoc enim nomine |panis| Eucharistia appellari consuevit, tum quia panis speciem habeat, tum quia naturale alendi et nutriendi corporis vim, quae panis propria eft, adhuc retineat. 4. Ibid., n° 43, p. 416 : Christum Dominum in hoc sacramento, ut in loco non esse; etenim locus res ipsas consequitur, ut magnitudine
aliqua praeditae sunt. Chrisium vero Dominum ea ratione in Sacramento esse non dicimus: ut magnus, aut parvus est, quod ad quantitatem pertinet, sed ut substantia est. SubStantia enim panis in Christi subStantiam, non in magnitudinem, aut quantitatem convertitur. Nemo vero dubitat substantiam aeque in parvo atque in magno spatio contineri. Nam et aeris subStantia, totaque ejus natura sic in parva, ut in magna
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Cahier Ila
aeris parte, itemque tota aquae natura non minus in urnula quam in fiumine insit necesse est. Cum igitur panis subStantiae corpus Domini nostri succedat, fateri oportet, ad eumdem plane modum in Sacramento
esse, quomodo panis substantia ante consecrationem. Ea vero utrum sub magna aut sub parva quantitate esset, nihil ad rem omnino pertinebat. 5. Ibid., n° 44, p. 417 : Quoniam ea accidentia Christi corpori et sanguini inhaerere non possunt, relinquitur ut supra omnem naturae ordinem ipsa se ulla alia re nisa sustentent.
6. Compléter, Ia, q. 88, art. 2. Trad. : « La quantité de la substance est la forme substantielle, réellement distinéte d’elle, pouvant étre séparée et conservée sans elle. »
7. « [La substance] : un étre subsistant par soi; [l’accident] : un étre 4 qui est da d’étre dans un autre. » Page 148.
1. Corriger Opuscule gr, chap. 18. Trad. : « Or, le premier accident affectant immédiatement les substances corporelles est la quantité; car toutes les substances corporelles sont en effet douées de quantité, et c'est méme pat sa meédiation qu’elles recoivent les autres accidents : par exemple un corps par le moyen de la quantité, recoit la couleur, la forme, etc. C'est ainsi
que S. Thomas définit la quantité. » 2. Compleéter, IIa, q. 75, art. 6 : « Un accident coextensif 4 la substance, la distribuant en ses diverses patties intégrantes. » 3. Matth., VI, 11 : Panem supersubStantialem da nobis hodie. Cf. Corona, « Hymne du Saint-Sacrement» (Po., p. 398) : « Donnez-nous aujourd’hui notre pain supersubstantiel. » 4. col. n’est 5.
De diversis quaeStionibus LX XXIII, quaest. XXI (P. L., XL, 16); cité dans Illa, q. 75, art. 3, sed contra. Trad. : « Dieu pas cause de la Tendance au non-étre. » Verset 63 : « Les paroles que je vous ai dites sont esprit et
elles sont vie. » 6. Compléter, IIIa, q. 76, att. 1, ad 3. Aprés quantitate, Claudel a omis sicut tota natura aeris in magno vel parvo aere, et tota natura hominis in magno vel parvo homine. Trad. : « ... mais d’une substance en une subSstance. Et ainsi la substance du corps ou du sang du Christ est ici en vertu du sacrement, mais non les dimensions du corps ou du sang du Christ. D’ot il apparait que le corps du Christ est dans ce sacrement par mode de substance et non par mode de quantité. Or la totalité propre de la subStance est contenue indifféremment dans une petite ou une grande quantité. Donc toute la substance du corps et du sang du Christ est contenue dans ce sacrement aprés la consécration, comme avant la consécration se trouvait 1a toute la substance du pain et du vin. »
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7. Compléter, art. 3, obj. 1. Trad. : « Car Vinfini repugne non seulement 4 la nature, mais aussi a la grace. » Page 149.
1. Ibid., ad 2. Claudel a omis ipso (in ipso corpore Christi vero). Trad. : « La substance comme telle précéde méme la quantité dimensionnelle. Et ainsi, patce que la conversion de la substance du pain se termine dire¢tement 4 la substance du corps du Christ, _. selon laquelle le corps du Christ est proprement et direftement dans ce sactement, cette extension des parties est dans le vrai corps du Christ, mais ce n’est pas d’aprés elle qu’il se réfeére a ce sacrement, mais d’aprés la substance. » 2. Billuart, théologien dominicain (1685-1757), auteur d’un Cursus theologiae universalis ou Institutiones theologicae (titre différent selon les éditions). Trad. : « Comprenez par 1a que le corps du Christ est doué de forme, de couleur, etc., en lui-méme mais non selon l’extension locale. Tout ceci est mieux percgu pat Vintellec&t que par Vimagination. » 3. Illa, q. 76, art. 4, ad 1. Trad. : « Le mode d’étre de tout objet dépend de ce qui lui appartient par soi, non de ce qui lui appattient par accident; ainsi un corps est dans la vue patce qu’il
est blanc, non parce qu’il est doux, bien que le méme corps soit blanc et doux; la douceur est ainsi dans la vue selon le mode de
la blancheur, non selon le mode de la douceur. Donc, puisque en vertu du sacrement il y a sur l’autel la substance du corps du Christ et que l’extension locale ne s’y trouve que pat concomitance et comme pat accident, l’extension locale du corps du Christ se trouve dans ce sacrement, non selon son mode propre (le tout dans le tout et chaque partie dans chaque pattie), mais selon le mode de la substance, qui est d’étre toute dans le tout, et toute dans chaque pattie. » 4. Compléter : corp. Dans la derniére phrase Claudel écrit eft immobilis au lieu de immobiliter eft. Trad. : « Car Vétre qui de soi est indéfectible ne peut étre le principe d’une cessation d’étre, mais l’autre disparaissant, il cesse d’étre en lui, comme Dieu dont l’étre est indéfeétible et immortel, cesse d’étre dans une créature cortuptible par le fait que cette créature cesse d’exister... D’ovd il suit que le Christ, en soi, est immuable dans ce sacte-
ment. » 5. Compléter
ad
2. Trad.
: « Dans
ce sacrement,
sil est
donné aux accidents de persister sans le support d’un sujet, ce n’est pas en vertu de leur essence, mais par la vertu divine qui les soutient. C’est pourquoi ils ne cessent pas d’étre des accidents,
puisqu’ils n’en perdent pas la définition (aptitude a s’appliquer a un sujet), laquelle demeure toujouts en eux-mémes sans applica-
1142
Cahier Ila
tion aétuelle, et que d’autre part la définition de la substance ne leur convient pas. » Page 150. 1. Id., ad 4. Trad. : « Composée de “‘l’étre” et de “ce qui
est”. » 2. Trad. : « Deux principes : 1. la quantité dimensionnelle de la substance est une forme spéciale, réellement distinéte d’elle, pouvant
étre
séparée
et
conservée
sans
elle; 2.
elle est la
ptemiétre disposition de la matiére, par Pentremise de laquelle celle-ci regoit d’autres formes accidentelles, de maniére qu’elles lui adhérent intimement, comme la couleur 4 la surface. »
3. Trad. :« La dimension... une quantité ayant une position. » 4. S. Ambroise, De sacramentis, lib. V, cap. Iv, in medio, cité
dans IIIa, q. 77, att. 6, obj. 1 : Non iste panis est qui vadit in corpus, sed panis vitae aeternae qui animae nostrae subStantiam fulcit. Trad. : « Le corps du Christ ne passe pas dans le corps de l’homme. » 5. Corriger S. Ambroise (et non S. Augustin), De Pie santio, lib. I, cap. vu, cité dans Ia, q. 50, art. 1, ad 3. Trad. « Bien que certaines substances ne soient pas contenues dans des lieux corporels, elles ne sont pas exemptes de limitations. »
6. Claudel résume Ia, q. 50, art. 2, ad 3. Le texte est : Et hoc est a quibusdam dicitur quod angelus est compositus ex quo est et quod est, ve/ ex esse et quod est, ut Boetius dicit.[...] In Deo nos eft aliud esse et quod est.[...] Unde solus Deus eft afttus purus. Trad. : « Il y a en eux une certaine composition d’acte et de puissance et en eux “‘]’étre”’ et “‘ce qui est” n’est pas identique. » 7. Ia,q. 50, art. 2, corp. Trad. : « L’intelligence n’appréhende pas les choses selon le mode des choses, mais selon son mode
propre. » 8. Ibid., ad 3. Trad. :« Ce qui est c’est la forme substantielle, mais l’étre lui-méme est “ce pat quoi” la substance existe. » 9. IIa, q. 30, art. 2, ad 4. Trad. : « Les substances immaté-
rielles sont finies du fait de leur étre, mais infinies du fait que leur forme n’est pas tecue dans un autte. »
10. Denys VAréopagite, De coelefti hierarchia, cap. xiv (P. G., II, col. 322), cité dans Ia, q. 50, att. 3, corp. Trad. : « Nombreuses sont les armées des esprits d’en-haut, elles dépassent la limite faible et regtreinte de nos nombres matétiels. » 11. Ia, q.
50,
art.
3, ad
x. Trad. : « Nombre
résultant,
non du partage de Vespace continu, mais de la distin€tion des formes. »»
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1143
Page ryt. 1. Claudel traduit Ia, q. 52, art. 1, corp. 2. Trad. : « L’ange est dans le lieu : cela signifie simplement, dit Cajetan, qu’il le contient parfaitement et immédiatement dans l’ordre de la cause efficiente. »» 3. Hébr., I, 14, est cité en note dans plusieurs éditions de la Somme a propos de la question Usrum angelus possit moveri localiter ) (Cla, q. 53, art. 1) et par S. Thomas lui-méme dans Ia, q. 57, . att. 2, corp., et art. 5, ad 1. Trad. : « Est-ce que tous ne sont ~ pas des esprits chatgés d’un ministére, envoyés en service pout
ceux qui doivent hériter du salut? » 4. D’aprés Ia, q. 53, att. 1, corp. 5. De divinis nominibus, cap. vu (P. G., UI, col. 870), cité dans Ia, q. 55, art. 1, obj. 1. Trad. : « Les anges connaissent ce qui est sur la terre, selon la nature propre de l’esprit. » 6. Ibid., cap. 1v, cité dans Ia, q. 55, att. 1, ad 3. Id ef omnia in omnibus eSt de S. Thomas. Trad. : « Dieu réunit les ensembles dans les ensembles, c’est-a-dire toutes choses en toutes choses. »»
7. Ibid., cité tbid., minés par les raisons 8. Claudel résume comprend, non en choses — Dieu seul commune.» Toutes
sed contra. Trad. : « Les anges sont illudes choses. » Ia, q. 55, art. 1, ad 3. Trad. : « L’ange perfection, ni selon l’essence propre (des les comprend ainsi) mais selon l’essence ces notes se tapportent a la « Premiére
note sut les Anges» (O. C., XX, p. 370), datée de « Francfort
1910»). 9. « Abime.» Ce mot doit étre mis en relation avec ce qui suit. Cf. S. Augustin,
De Genesi ad litteram
(P. L., XXXIV,
col. 247). Claudel avait déja lu ce traité, au moins partiellement; le 6 septembte 1905, il écrivait a Frizeau : « S, Augustin nous donne pour V’interprétation des jours de la Création exemple d’une audace qui n’a jamais été dépassée » (Jammes, p. 57). 10. Ibid., col. 248. Trad. : « Comment comprendre que Dieu dise : “Que la lumiére soit’’, si ce n’est en créant, puisqu’il est lui-méme immuable? » 11. Ibid., col. 249. Trad. : « Comprenons que la parole incorporelle de Dieu est dans son Verbe coéternel, qui rappelle 4 soi toute la création imparfaite, pour qu’elle cesse d’étre informe, mais soit formée d’aprés l’ordonnance de ses ceuvtes. » 12. Ibid., col. 250. Trad. : « L’eau, une certaine vie selon
Pesptit, encore fluente avant de se convertir et de tecevoir sa fotme. » 13. Cité par S. Augustin, zbid., col. 256. Trad. : «
le monde d’une matiére informe. »
Qui as créé
1144
Cahier Ila
Page 152.
1. Ibid., col. 256. Titre du chap. xv: « La matiére précéde la forme pat l’origine et non dans le temps. » 2. Cité, ibid., col. 258 : « Avant toutes choses fut créée la Sagesse. » 3. Ibid., col. 258-259. Claudel résume. I] se souviendra de ce
texte dans la Cantate: « Et le torrent des ombres descend le long de la patoi» et « Que le soleil de ce monde triomphe, nous refusons d’étre pénétrés, / Et refoulés, acculés, nous lui opposons cette invincible patoi» (Po., p. 369).
4. Cette phrase qui n’est pas une citation littérale est répétée trois fois par S. Augustin, ibid., col. 264. Ps. XXIII, 2: super maria fundasti eum [orbem terrarum| : « ll a affermi la terre sur les
eaux. )> 5. Ibid., col. 269. La derniére phrase, qui n’est pasde S. Augustin, résume : Sie et discretio vel species aquarum atque terrarum, sic naturae lignorum et herbarum, sic luminaria coeli, sic animantia orta
ex aguis ac terra, Trad. : « Car la créature raisonnable ne ‘connait pas sa conformation avant d’étre formée, mais dans l’illumination méme de la vérité, a laquelle elle se convertit en trecevant sa forme. Les autres étres, qui sont inférieurs, sont créés de telle
sorte qu’ils existent d’abord dans la connaissance de la créature réelle, et ensuite dans leur genre. C’est pourquoi la lumiére est d’abord dans le Verbe de Dieu, selon le modéle sur lequel elle est faite, c’est-a-dire dans la Sagesse coéternelle du Pére, et ensuite dans la création méme de la lumiére, selon la natute qui lui est donnée.
La, non
créée, mais engendrée;
ici, vraiment
créée, cat formée a partir de ce qui est informe. Et c’est pourquoi Dieu dit : Que la lumiétre soit, et la lumiére fut faite : elle était dabord dans le Verbe, puis fut réalisée. Quant au ciel, il était d’abord dans le Verbe de Dieu selon la Sagesse engendrée, ensuite il fut fait comme créatute spirituelle, c’est-a-dire dans la connaissance des anges selon la sagesse créée qui est en eux; enfin le ciel fut créé de maniére qu’il existat dans son genre propre. Et ainsi de toutes les autres créatures. » 6. Ibid. Lire : liber secundus, cap. vir. Trad. : « [Tout cela]
les Anges le connaissent mieux intérieurement dans le Verbe de Dieu. » 7. Claudel
tésume,
non
sans
ambiguité,
ces
lignes
de
S. Augustin (ibid.) : Quemadmodum ergo ratio qua creatura conditur, prior est in Verbo Dei quam ipsa creatura quae conditur ; sic et ejusdem rationis cognitio prius fit in creatura intellectuali, quae peccato tenebrata non est: ac deinde ipsa conditio creaturae. 8. Trad. : « Et qu’ils soient des signes pour les temps, les jours et les années. »
Sans date
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Page 153.
1. Ibid., col. 274, cap. 14: « L’appellation “jour”? désigne-t-elle la chose créée dans son espéce, et la “nuit” la privation, en sorte que la nuit serait la matiére non encore formée en espéce, et d’ot le reste sortirait, comme on peut dire que méme dans les choses formées, la mutabilité est une sorte de matiére informe? Ou plutédt, dans la chose créée et formée elle-méme, est-ce cette mutabilité, cette possibilité de déchoirt, qui est appelée nuit,
cat les choses créées, méme si elles ne changent pas, ont en ~ elles la possibilité du changement? Soit et matin ne sont pas a interpréter comme un temps qui passe ou qui attive, mais comme une limite faisant comprendre jusqu’ot s’éléve le mode propre d’une nature, et ol commence une autte nature. » 2. Epis CXxVIN, cap. xt, 14 (RP. 1) XxOdml col: 439), Claudel a noté le texte tel qu’il est cité dans S. Thomas, Iz, art. 1, corp. (sauf vigere au lieu de vigor). Trad. : « Dieu a donné a l’Ame
une telle force que de sa béatitude rejaillit méme sur le corps la plénitude de la santé et la vigueur de Vincorruption. » 3. Cité ibid. Ce texte n’est
pas de S. Augustin.
Certains
éditeurs aprés ut Augustinus indiquent (alius audior). En réalité VPAmbrosiaster. Trad. : « Dieu fit Phomme tel que, tant qu’il ne pécherait pas, il aurait Pimmortalité, responsable de lui-méme, soit pout la vie, soit pour la mort. » 4. Cité ibid., sed contra.
Trad.
: « Par le péché la mott est
entrée dans le monde. » 5. Ibid., att. 2, corp. Trad. : « Patir : étre privé d’une disposition naturelle. » 6. Ibid., att. 3, corp. Unde post resurrettionem homines cibis non indigent. Le texte de Gen., I, 7 : « et VPhomme
devint un étre
vivant. Ce qui veut dire : donnant la vie au corps. Un corps animal. » 7. Ibid., att. 4, cotp., d’aprés LlAmbrosiafter: Vitae arbor medicinae modo corruptionem omnem probibebat. Trad. : « L’arbre de vie, agissant comme une médecine, empéchait toute corruption. »
Page 154.
1. Ig, q. 98, art. 1, corp. Trad. : « Cela en effet semble étre de Vintention de la nature, qui est permanent et perpétuel; ce
qui est seulement temporaire ne semble pas de l’intention principale de la nature, mais plutét ordonné a autre chose : sinon, cet objet disparaissant, l’intention de la nature cesserait aussi. Donc, comme dans les étres corruptibles, seule ’’espéce est perpétuelle et permanente, le bien de l’espéce eét la principale intention de la nature : c’est 4 sa conservation que la génération naturelle
est ordonnée.
Au contraite les substances incorruptibles sont
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Cahier IIa
permanentes, non seulement quant 4 l’espéce, mais quant aux individus; et pour cette raison les individus mémes telévent de Pintention principale de la nature. Ainsi, du fait de son corps cortuptible par nature, la génération convient 4 ’homme; mais du fait de son Ame incorruptible, il lui convient qu’une multitude d’individus soient voulus par la nature, ou plutét par Auteur de la nature, seul créateut des 4mes humaines. » 2. Cf. Odes, V (Po., p. 284): « Fais entrer toute la création
dans I’arche... » 3. Voir Supplément de la Somme théologique, q. 69, att. 1, corp. 4. Cité ibid., art. 2, sed contra. Trad. : « Nous savons en effet que si cette tente — notre demeure terrestre — vient a étte détruite, nous avons une maison qui est ’ceuvte de Dieu, une demeure éternelle qui n’est pas faite de main d’homme et qui est dans les cieux. » 5. Ibid., corp. C£. déja dans Repos: « J’ai médité et j’ai trouvé
un poids en moi-méme; j’ai suivi mon poids...» (Th. I, p. 835). 6. De spiritu et anima (P. L., XL, col. 791), cité ibid., q. 70, art. 1, ad 1. Trad. : « L’4me se retire du corps, emportant tout avec elle, sens, imagination, raison, intellect, intelligence, pas-
sions concupiscible et irascible. » 7. Ibid., att. 3, corp. [Ignis] inStrumentum eft divinae justitiae vindicantis, quod sic detinet spiritum : et ita efficitur si poenalis retardans eum ab executione propriae voluntatis, ne scilicet possit operare ubi vult, secundum
vult...
Cf.
Positions,
II, « Lettre
4 Mme
E.»
(O. C., XV, p. 211) : « Alors elle [la créature] se met 4 briler sut elle-méme et comme Dieu I’a faite indestructible et que dailleurs il n’y a plus de temps elle brile éternellement sans pouvoir se consumer...» Cf. Th. I, p. 833, Repos. 8. Cité sbid., art. 3, ad 8. Trad. : « Elle enflamme le cycle de son existence. » Préciset : III, 6.
9. Cité zbid., q. 74, att. 1, sed contra, Trad. : « Elle passe la figure de ce monde. » Rettifier : 7, 31. 10. Aristote, cité ibid., q. 80, att. 1, corp., semble résumer, De Anima, 415 6: « L’Ame est pout le corps non seulement une cause formelle et une cause finale, mais encore une cause eff-
ciente.» Le texte littéral ne se trouve Aristote.
pas, semble-t-il, dans
11. Cité ibid., sed contra. Trad. : « Les ceuvres de Dieu sont parfaites. »
12. Aristote, cité ibid., corp. Texte difficile 4 identifier, la référence donnée est De Animalibus, liv. Ill : « La comparaison de l’4me au corps est comme de I’art 4 l’objet d’art. » 13. Ibid. Trad. : « A la résurrection, le corps de ’homme doit cotrespondte pleinement 4 |’A4me, car il ne ressuscite que patce quwil est fait pour l’4me raisonnable. »
Sans date Page
1147
ys.
1. Ihid., ad 1. La citation du De Anima, liv. I, 412 b. Trad. : « Les membres peuvent, par rapport 4 l’ame, étre considérés de deux maniéres : ou comme matiére par rapport 4 la forme,
ou comme instruments par rapport a l’agent. “Le rapport est en effet le méme entre le corps entier et l’4me entiére, et entre les parties de J’un et de lautre”, comme i] est dit De An. — Si _ donc les membres sont envisagés d’aprés la premiére comparaison, leur fin n’est pas l’opération, mais plutét /’étre parfait de Vespéce, lequel sera requis méme aprés la résurrection... D’aprés la seconde : leur fin est l’opération... Cependant l’ingstrument ne sett pas seulernent a exécuter l’opération de l’agent, mais aussi 2. tétes 3.
a en manifester Ja puissance. » Cité tbhid., art. 4, sed contra. Trad. : « Pas un cheveu de yos ne périra. » Texte d’Avicenne, Métaphysique, liv. I, cap. 1v, cité shid., corp. Trad. : « La vérité de chaque chose eSt la propriété de son étre qui lui est attribuée d’une maniétre Stable. »
4. Cité ibid., q. 81, art. 1, sed contra. Trad. : « Jusqu’a ce que [...] a constituer cet homme parfait, dans la force de l’Age, qui réalise la plénitude du Christ. » nous parvenions
5. Cité ibid., art. 3, sed contra. Civ. Dei, lib. XXII, cap. xvu1. 6. Ibid., art. 4, corp. Trad. : « Les opérations qui sont ordonnées a la perfection premiere de la nature humaine, soit pour
la produire, soit pour la conserver, ne se retrouveront plus 4 la résurrection. » 7. Distique célébre sur les caracteres des corps glorieux : « Glorieux,
subtils, agiles, impassibles, Tous
les bienheureux
jouiront de ce quadruple don.» Notons que ces quatre qualités sont énumérées au début de q. 82 que lit alors Claudel, dans un autre ordre : impassibilitas, subtilitas, agilitas, claritas. — MI les reprendra dans Un poéte regarde la Croix (O. C., XIX, p. 329 8d.), selon Vordre de la Somme et commentera ce qu’il appelle ces guatre « dots » (p. 332). Tout ce passage d’Un potte regarde la Croix teptend d’ailleurs les notes accumulées ici. 8. S. Jean Damascéne, De fide orthodoxa, lib. Il, cap. «x11, cité ibid., q. 82, art. 1, corp. Trad. : « La passion est un mouve-
ment étranger a la nature. » 9. Ibid. Trad. : « La raison en est que tout etre qui patit est eatrainé dans l’orbite de l’étre qui agit sur lui; l’agent s’assimile le patient, et ainsi le patient cornme tel est arraché 4 son étre
propre. » 10, Cité ibid., I Cor., xv, 48. « Tel a été le céleste, tels seront
aussi les céleStes. » 11. Cité shid. « Il transfigurera notre corps de misére pour le
1148
Cahier Ila
conformer 4 son corps de gloire, avec cette force qu'il a de pouvoir méme se soumettre tout l’univers. » Page 156.
1. De Trinitate, lib. XV, cap. xvi. Cité ibid., art. 3, ad 3 (cf. aussi Ia, art. 2, corp.) : Non erunt volubiles nostrae cogitationes,
ab aliis in alia euntes atque redeuntes, sed omnem scientiam noStram simul uno conspettu videbimus. Trad. : « La, il n’y aura plus de pensées mouvantes. » 2. Ibid., att. 4. Cf. dans Un poéte regarde la Croix (O. C., XIX, p. 344) un long développement sur ce theme, et en général sur les sens dans les corps glorieux.
3. Lite : De generatione animalium, lib. Il. Cité ibid., q. 83, att. 1, corp. Cette citation d’Aristote indique que Claudel lisait la Somme dans l’édition de Padoue (1666-1698); les autres éditions citent seulement le premier membre de phrase. Trad. : « De Gener. — Le corps subtil remplit les parties et les fragments de parties. Car, par la nature méme du liquide, qui s’accommode mal de ses propres limites, mais s’adapte bien aux limites d’un cotps étranger, il suit les contours du corps qui le touche, s’épanche de tous cétés dans le contenant, et par sa subtilité en pénétre les moindres patties. » 4. Q. 83, art. 1, corp. Trad. : « Dans les corps de peu de
densité, la forme prédomine la matiére : c’est pourquoi on qualifie de subtils ces corps qui sont mieux soumis a la forme et sont plus perfectionnés par elle. » 5. Cité tbid. Lite ultimum caput, v. 39. Trad. : « Un esprit n’a ni chair ni os comme vous voyez que j’en ai.» 6. Cité ibid., art. 2, obj. 3. Trad. : « La votte du ciel aussi solide que de l’airain fondu. » 7. Jacq., I, 23: ... consideranti vultum nativitatis suae in speculo. Ce texte n’est pas cité dans la Somme, loc. ind. 8. S. Grégoire, Homilia XXXIV in Evang., cité ibid., q. 84, art. 2, corp. Corriger : mitiantur. Trad. : « Od qu’ils soient envoyés, c’est en Dieu qu’ils courent. » 9. De fide orth., lib. Il, cap. 11; cité in Ia, q. 50, art. 1. Trad. : « L’Ange est dit incorporel et immatériel quant a nous; mais comparé a Dieu, il apparait matériel et corporel. — L’Ange est une substance intelle€tuelle toujours en mouvement.» C’est une nouvelle série de notes qui commence; aprés la Somme, Claudel consultera le De coelesti hierarchia de Denys, et sur les citations de cet ouvrage s’achévera cette partie du Journal. Il serait intéressant de pouvoir la dater. Deux hypothéses sont possibles : la le€ture de Denys est contemporaine de l’allusion faite dans une lettre 4 Frizeau : « Sur la hiératchie, il me semble
Sans date
1149
bien que l’on trouverait quelque chose dans Denys I’Aréopagite, De divina hierarchia...» Cette lettre est du 30 janvier 1912; les notes dateraient de cette époque. — Mais il se peut aussi qu’il ait déja lu ce traité et en parle par souvenir; cette lecture et ces notes poutraient étre contemporaines du projet de publication de la « Premiéte note sur les Anges»; on sait que ce texte rédigé pour Frizeau fin 1908 (Jammes, p. 141) n’avait pas été publié; il est question de cette publication en février 1910 (sbid., p. 173); | elles ne paraitront — avec peu de modifications — qu’en aout 1911 dans 1’Amitié de France; Claudel aurait d’abord songé 4 les reprendre, puis aurait renoncé a ce projet, se contentant d’apporter quelques corrections au texte ancien. Dans ce cas les présentes notes seraient de 1910. On peut penser que Claudel reprenant ce cahier — a l’envers — comme Journal le 2 juin 1910 aura assez vite cessé d’y relever des textes théologiques. Dés 1911 ceux-ci seront notés dans le « Journal» méme; voit p. 206, mio. Cité Ia, q., 50,att. 1, ad 35 woitap.gl sO, mee5s iit la).qs $0; att. 2;:ad'3; Voir p. 150, n. 6. 12. Ia, q. 50, att. 2, ad 4. Trad. : « Les substances immatétielles créées sont finies selon leur étre, mais infinies en ce que
leurs formes ne sont pas regues dans un autre...» Page 157. 1. Ibid., corp. Trad. : « Tout objet est compris dans la mesure ou il est abstrait de la matiére, car les formes unies 4 la matiére sont des formes individuelles, que l’intellec&t n’appréhende pas comme telles. » 2. Ibid. La derniére phrase n’est pas citée textuellement.
Trad. : « L’intelle& appréhende les choses, non selon le mode des choses, mais selon son mode propre. En conséquence les choses matérielles, qui sont au-dessous de notre intellect, s’y trouvent sur un mode plus simple qu’en elles-mémes. Mais les substances angéliques sont au-dessus... Notre intelleét les saisit selon son mode propte, comme il saisit Dieu. » 3. Claudel résume Iz, q. 50, art. 4. Trad. : « Les anges different seulement par leur espéce. » 4. De fide orth., lib. UI, cap. 11; cité q. 52, art. 2, obj. 3. Trad. : « L’ange est 1a ot il agit. » 5. « Théme et variations », ce sera l’une des idées dominantes
de « la Légende de Prakhriti» et de tous les textes de Claudel sur la création. Il faut entendre ici certainement que les Anges sont une variation du théme fondamental de la création et que nous pouvons tenter ainsi de les comprendre. « II est légitime de dire qu’il y a dans l’Ange spirituellement quelque chose qui
1150
Cahier Ila
correspond a notre organisation physique.» « Seconde note sut les Anges » (1933), O. C., XX, p. 378. 6. Q. 53, att. 3. Le texte d’Aristote ne patait pas étre cité dans la Somme: « Le mouvement — passage d’un état a un autre état. » 7. De coelesti hierarchia, cap. 11, cité ibid., q. 54, art. 3, sed
contra. Trad. : « On distingue chez les Anges : substance, puissance, opétation. » 8. Q. 55, art. 2, corp. Trad. : « Les anges doivent leur perfection intelligible 4 un influx intelleCtuel par lequel ils ont regu de Dieu, en méme temps que leur nature spirituelle, les ““espéces” des objets connus. C’est pourquoi Augustin dit... que les autres étres, inférieurs aux anges, quand ils sont créés, existent d’abord dans la connaissance de la créature intelleCtuelle, et ensuite dans leur propre genre. »
g. Claudel résume bid., art. 3. Trad. : « Les anges les plus élevés comprennent par le moyen d’espéces plus universelles que ceux des tangs inférieurs. » 10. De genesi ad litteram, lib. IV, cap. xxv. Cité ibid., q. 58, att. 7, sed contra. Trad. : « Il y a une grande différence entre la connaissance d’un objet dans le Verbe de Dieu et la connaissance de ce méme objet dans sa nature : 4 bon droit Pune est rattachée au jout, l’autre au soir. »
Page 158.
1. Cf. Ia, q. 108, art. 4, obj. 3 : Hierarchia ecclesiaStica exemplatur a coelesti, Cf. la lettre 4 Frizeau, citée p. 156, n. 9. 2. Claudel a lu le texte du pseudo-Denys dans une version sensiblement différente de celle de Scot Erigéne (P. L., CX XII). Voir col. 1039. Trad. : « Considérant que ces beautés apparentes
sont les images des splendeuts cachées, les suavités sensibles des parfums, la figure de économie spirituelle, et que les lumiéres matérielles se donnent comme un signe des clartés incorporelles... » 3. Dissimiles similitudines (ibid., col. 1042). 4. Cf. ibid. « Leur aspect de courage viril»... « est a comprendre de l'amour divin, d'une clarté transcendante et irés pure et dune grace irrésistible et embellissante. » 5. Claudel note d’aprés ibid., col. 1045. Apres i/uminatum un mot illisible : perfeffum (?). Le développement de Denys porte sut purgatio, illuminatio, perfettio... Pour les deux textes qui ptécedent : « Le but de la sainte hiérarchie est, autant qu’elles sont possibles, assimilation et ’union 4 Dieu » et « Coopérateur de Dieu lui-méme, comme disent les saints oracles. »
6. Ibid., col. 1050. Seraphim: mot
hébreu
qui désigne les
Juin 1910
I151
setpents brdlants du désert, dont la morsure est elle-méme brilante, et auxquels on prétait des ailes, sans doute parce - qu’on les voyait gicler du sable ou des cailloux embrasés. — « Produisant lumiére et chaleur. » 7. Ibid. : multitudinem scientiae, aut fusionem sapientiae. Cf. O. C., XX, p. 398 sq. « Connaissance abondante, effusion de sagesse. » 8. Ibid. Trad. :«Sublimité qui n’habite pas dans les choses d’en bas, mais adhére de toutes ses forces, immuablement et fermement, a Celui qui est vraiment. » 9. Trad. : « Ils conservent toujours pat amour de Dieu un mouvement qui leur est propre, égal et invariable... Mais ils gardent toujouts, intangible, l’état déiforme qui leur est propre. » — Ibid. col. 1051. Cf. O. C., XX, loc. cit. to. En réalité, Ps. XVII, 12: «... tout autour
de sa tente. »
11. Ibid., col. 1053-1056. Trad. : « Pouvoir de régir et de gouvernet. > Cf. la parole de Saint-Denys d’Athénes dans /e Soulier de Satin, Ul, 1 (Th. I, p. 788) :« ... ces Anges les uns par-dessus
les autres que j’ai décrits. »
CAHIER
II
I9IO Page r6r. 1. Contraitement au Cahier I, le Cahier Il est paginé, mais la page 1, datée de Prague, est en réalité la page 16. — Quatorze feuilles ont été arrachées par Claudel lui-méme aux deux tiers de chaque feuillet. La page 15 subsiste, dont la page 1 est le verso. Subsistent également : —une date : offobre 1900, éctite aprés coup d’une encre différente, en matge et en ttavers de la premiére page arrachée; —en haut de cette méme page, 4 gauche en diagonale, ces mots : « Sur lad[emande| de mes supérieurs |...] je n’aime guere les[...] »; ce qu’on peut comprendte : « bien que je n’aime guére les journaux intimes »;
— des noms proptes : « Delcassé, Doumer, Jammes, le P. Havret, M. Hardouin, du Chaylard, Mgr Masot.» Delcassé, ministre des Colonies en 1894-1895, a dirigé le Quai d’Orsay de juin 1898 a 1902. La premiéte lettre de Claudel 4 Jammes est du 2 mai 1897. Doumer a été gouvertneurt de l’Indochine de 1896 a 1902.
Mer Salvador Masot, dominicain, était vicaire apostolique du Fo-Kien Nord, tésidant 4 Fou-tchéou.
Voici le texte de la page 15 :
1152
Cahier II
« Le Vice-Roi me fait demander indirettement s’il y aurait moyen de contratter avec une banque francaise un emprunt de 400 000 taéls (1 y00 000 francs) garantis sur les likins de thé remboursables en dix ans. Je télégraphie a Pékin pour m’éclairer sur la question de principe. « 3 décembre. Je recois de Pékin un avis favorable. Je télégraphie a Shi pour demander si la banque de I’Indo-Chine ou la banque RussoChinoise consentent [sic] 2 examiner l’affaire. « 4 déclembre|. Télégramme de Sh’i. La banque de l’Indo-Chine consent a examiner l’affaire, mais attend au préalable une réponse de Paris.» Deux interprétations sont possibles. Ou bien les supérieurs (religieux) de Claudel lui ont demandé de rédiger le récit de sa vie en Chine; il l’aurait dans ce cas interrompu assez vite, en quittant Ligugé, et ces notes seraient établies grace 4 sesagendas. Dans ce cas elles se rapportent a décembre 1896 (en 1895, 1897, 1898, Claudel n’est pas -4 Fou-tchéou en décembre). — L’autre hypothése est beaucoup plus probable: la « réponse» n’a pas
été aussi catégoriquement négative que Claudel l’a dit plus tard (voir p. 13 la lettre de Pabbé Vuillaume). Ses supérieurs lui ont demandé de rédiger son « Journal». Il commence aussitét en offobre 1900, il quitte la France, d’aprés une lettre a Pottecher (Cah. C/. I, p. 108) vers le 15 ou le 20 o&tobre. II] est donc 4 Fou-tchéou au début de décembre, date de ces notes. Il interrompt alors ce « Journal», qu'il ne reprendra qu’aprés le départ d’Ysé (voir p. 3). On comprendrait qu’il ait plus tard détruit ces pages qui contenaient le récit de la traversée sur VErnest-Simons et de la rencontre. Sur cette méme page, on lit tracés avec une autre plume et
d’une autre encte : « En vous, je suis antérieur a la mort» (cf. Odes, I; Po., p. 255]. « Comme l’eau incluse l’eau, ainsi lesprit reconnait Il’esprit [cf. Odes, 11; Po., p. 237], toute chose qui nait en lui co-naissant, en étant conscient de sa propre naissance, en jouant de sa propre naissance,
en s’arrangeant par elle aux autres ch{oses|, en naissant volontairement tel, en se produisant, en s’exprimant, ce qu'elle voit en l’obligeant a lui co-naitre lui donner moyen d’expression » (cf. Traité de la Co-naissance au monde et de soi-méme). Enfin au bas de la page a droite, cette référence au crayon : « Ezféchiel], XXII, 30. » 2. Formule classique de la théorie aristotélicienne (et thomiste) de la connaissance : Idem est aétus cognoscentis et cogniti. — Cognoscens in atlu est cognitum in alu. — Intelletlus in aflu est
intelletium in acu. L’akte du connaissant, qui le constitue en aéte de connaitre,
constitue
le connu
Cf. S. Thomas, Ia, q. 55, att. 1.
en
aéte d’étre connu.
Juin I9I0
1153
3. Histoire naturelle, liv. XVI, chap. 11: Est etiamnum aetatis differentia. Amygdala enim et pirus in senetta fertilissimae; ut et glandiferae, et quoddam genus ficorum. Claudel distrait a écrit
senetiu au lieu de senefta. Trad. : « Il y a encore la différence due a lage. L’amandier et le poitier en effet produisent davantage lorsqwils sont agés; de méme les arbres a glands et certaine espéce de figuier. » 4. Voit dans Hamelin, /e Syéme d’Aristote, Alcan, 1920, le résumé des récits de Strabon (XIII, 1, 54) et de Plutarque (Vie
de Sylla, chap. xxvt). Originaire de Scepsis (ville de Troade), Nélée, disciple d’Aristote, puis de Théophraste, hérita de la
bibliothéque de ce dernier, qui renfermait celle d’Aristote; ses héritiers, gens ignorants, pour soustraire les livres aux recherches
des Attales de Pergame, les enfermérent dans un souterrain. Plus tard, ils furent vendus 4 Apellicon de Téos; enfin Sylla les emporta
a Rome
(Théophraste
meurt
vers
287, les Attales
régnent de 241 4 129, Sylla prend Athénes en 86). — Hamelin een que ces ceuvres n’aient existé que dans la bibliothéque e Nélée. 5. Cf. Protée: « ... quel teint éclatant, aussi pur qu’une fleut de bégonia! » (Th. II, p. 335). 6. Cf. le Soulier de Satin: « Pour que son ame [celle de Rodrigue] avec son corps y soit écartelée, je vaux bien ces deux morceaux de bois qui se traversent » (Th. II, p. 779) et Sygne dans /’Osage : « Et moi aussi, me voici une croix a la place de mon nom
proscrit » (sbid., p. 233). 7. « setré» est en surcharge. 8. Cf. Annonce, Prologue (TA. II, p. 21) : « C’est l’alouette! [...] / L’entendez-vous qui ctie quatre fois de suite hi! hi! hi! hi! plus haut, plus haute! / La voyez-vous, les ailes étendues, la petite croix véhémente, comme les séraphins [...] 2 »
Page 162. 1. Cf. Protée (Th. I, p. 350) : « HELENE. En quoi est ce bracelet 4 votre bras gauche? — BRINDOSIER. Il est d’une matiére merveilleuse et sans prix qui s’appelle celluloide. — HELENE. [...] /Comment lui a-t-on donné cette couleur rose? / Il semble un ruban de soie et on voit la boucle et les trois trous pour l’ardillon... » 2, Trad. : « L’on peut trouver une preuve [de cette incorruptibilité] en cette vérité générale que tout étre désire naturellement exister, sous le mode qui lui convient. Chez les étres doués de connaissance, le désit est proportionné au mode de connaitre. Le sens ne connait l’étre que dans une étendue et une durée concrétes, mais l’intelligence le connait absolument, et par
1154
Cahier II
référence 4 n’importe quel temps. Aussi, tout étre doué d’intelligence désire-t-il naturellement exister toujours. Mais un désir naturel ne peut étre vain» (S. Thomas, Somme théol., 1, q. 75; art. 6; trad. J. Wébert, éd. de la revue des jeunes /’Ame humaine, Pp. 40-41). 3. « finement » est en surcharge. 4. Sur le couvent d’Emmaiis 4 Prague, voir p. 113, n. 2. 5. Trad. : « Que Justice soit faite. Et le verbe s’est fait chair. Que le monde pétisse. » 6. Voir p. 166, n. 1, une lettre 4 Gide dans laquelle Claudel teptend cette opposition.
Page 163. 1. Cf. Protée. « Qu’une longue boucle blonde fait bien le long de la délicieuse amande d’un jeune visage! » (Th. I, p. 335). 2. Cf. Toi, que penses-tu du Christ ?, p. 45 :« lly a les créateurs qui enfantent dans la nuit et dans la peine une chose que dans une large mesure ils ignorent (genitum non fattum) et qwils ne sont guére plus en état de corriger qu'un cerisier ses fruits et Christophe Colomb Amérique.» Texte de 1922. 3. Cf. la Messe la-bas : « Etait-ce 4 Prague dans l’éclat de rite doré dune de ces belles églises rococo, / Pleines d’anges qui s’y sont posés pattout comme une volée doiseaux?» (Po., p. 499). — Au début de ce texte, « en Stuc » est une sutcharge. Page 164.
1. Dans une lettre aGide, qui se proposait de venir a Prague : « Dresde
est tout pres...» (Gide, p. 146). Prés de Dresde,
se
monte l'Institut théatral d’Hellerau, ot deux ans plus tard sera jouée /’Annonce faite a Marie. 2. « Dieu s’est tenu dans Passemblée des dieux et au milieu d’eux il juge les dieux.»» — Ps. LX XX, 8 : « Je t’ai exaucé au sein de la tempéte, je t’ai éprouvé aux eaux de la contradiétion. » 3. La chapelle de saint Wenceslas est dans la cathédrale Saint-Vit, « cette chapelle incrustée de pierres précieuses, peinte de fresques gothiques autour de la douce statue dont vous devez si bien vous souvenir... ». Lettre de Jean Cep, gendre de Charles du Bos (Cah. C/. IV, p. 167). — Karluv tyn, il s’agit de l’église dédiée a saint Charles au sud de la nouvelle ville, qui est précédée dune « scala santa», ou plutdt du chateau de Karlstejn, a une trentaine de kilométres de Prague, ou se trouve Poratoire de Charles IV et une chapelle dorée décorée de pierres précieuses. 4. Claudel a écrit ici en surcharge : « Alleluia. »
Juillet- Aout 1910
1155
5. S. Nicolas de la Mala Strana. Tous les détails notés ici se tetrouvent dans /e Soulier de Satin, W1l, 1 : « Le soleil d’un soir -dhiver entre par la verriére au-dessus de la porte qu’encadrent les faisceaux mélés d’anges et de guirlandes de tuyaux d’orgues, pareils aux fuseaux prismatiques de la Grotte de Fingal. [...] Le cheeur trés sombre ot brile une lampe et sur lequel s’ouvrent des loges vides est orné de quatre piédestaux encore inhabités, mais destinés a recevoir les Evéques illustres qui vont se préN senter 4 Vinstant » (74. II, p. 782). La scéme méme, avec les __ discouts des quatre évéques, est évidemment inspitée par ce lieu. 6. Claudel, dans « le Retable portugais » (Pr., p. 256), reptendra la méme idée 4 propos de Saint-Nicolas : « A Saint-Nicolas de Prague, V’attention d’une assistance virtuelle était figurée comme au théatre par quelques loges vides. » 7. Dans sa « Note sur l’art chrétien», Claudel comparera de méme les églises baroques aux sermons de Massillon (Pr., p. 123). 8. Sur les églises « qui monttent », voir les textes déja cités et la « Lettre a Alexandte Cingria » (Pr., p. 118). 9. Essais, liv. I, chap. xxv, préambule. — Claudel a d’abord écrit « un peu de tout». Page 165. 1. Claudel n’avait pas relu les Pensées depuis sa vingti¢me année;
il a eu la « mauvaise
idée»
de faire venir de France
Pédition Brunschwicg; voir dans Gide, p. 150, ce qu’il pense de cette édition et le reproche qu'il fait a Pascal d’ « avoir ainsi maltraité et calomnié
la nature humaine,
non
seulement celle
qui a été souillée par le péché, mais celle-la méme qui a été créée pat Dieu et qui est glorifiée par la grace». Voir le méme teptoche, dans « le Théatre catholique» (TA. I, p. 1413), texte de 1914. Voir également Pr. assez nombreuses allusions et patticuliérement p. 1413, une lettre a H. F. Stewart; enfin Bulletin de la Société Claudel, n° 18, le commentaire d’Henti Gouhier, sur cette lettre. 2. Commencé en 1904, le Cahier I a été achevé en 1910, ce
qui explique la réflexion de Claudel. En fait, celui-ci sera terminé en avril 1913. L’attitude du poéte a changé, les notations deviennent plus nombreuses. ger Chips 107. : 4. Allusion au texte de Pascal sur les deux infinis (Rd.
Brunschwicg), p. 174, et sut la divisibilité de Pespace, p. 178. 5. Albert Chapon, direéteur des « Editions de l’Occident », créées par Adrien Mithouard, avait déja édité Partage de Midi. Dans ses lettres 4 Gide, 4 Suarés, par exemple, Claudel se plaint \ de la lenteur apportée a la publication. Les détails dont est
1156
Cahier II
« souillé» le livre sont certainement des fautes d’impression, auxquelles Claudel ne fait pas allusion par ailleurs, semble-t-il. Page 166.
1. Cf. Lettre 4 Gide, 1°7 septembre 1910, p. 150 : « Il est étonnant de voir la fascination que des esprits médiocres et superficiels comme Montaigne ont exercée sur ce grand homme : il considére ce Gascon avec |’ébahissement d’un Auvergnat. Exemple : Montaigne et Pascal disent que s’il est ridicule de considérer un riche sur ses habits, il ne est pas moins d’aimer une femme pout sa beauté ou un homme pout ses talents, car ce sont
choses qui peuvent bien étre retirées. Comme si un vétement, une qualité physique et innée, une supériorité spirituelle et acquise étaient des choses équivalentes et dont la disparition laisse également le support intact! C’est confondre Vhabit et Phabitus, Venveloppe extérieure et des qualités qui sont le produit méme de ’étre et qui lui tiennent par des liens essentiels et intimes. » 2. Claudel est sur ce chapitre de l’éducation trés proche de Fénelon qu’il connaissait mal et admitait peu. — Pour le Jardin des racines grecques de Lancelot, voir « Sur la grammaite», OnGr
x Vill pe 247
Page 167.
1. Note ornée dun petit dessin représentant les lévres de Vhomme d’affaires. 2. Cf. /’Ours e¢ la Lune: « Jouissance de Séléné-sur-Mer et de toutes ses cataractes » (Th. II, p. 610).
3. Trad. : « A S. Benoit le monde entier appatait dans un rayon de soleil. » 4. Le Chemin de la Croix, XIII& Station (Po., p. 486) : « Le
Christ qui a souffert aux yeux de tous de nouveau au sein de sa Méte est caché [...] / Ce qui est de Dieu, et ce qui est de la Mére, et ce que ’homme a fait /Tout cela sous son manteau est avec elle a jamais. »
Page 169. 1. Cf. Ed. Brunschwicg, p. 115. — Claudel reprendra ce theme, dans sa lettre 4 Stewart (Pr., p. 1415) : « Pascal, avec
tout son génie, avait des cdtés de snob. II est visible qu’il a été positivement éberlué par la rencontte de dandies supérieurs du genre de Méré et de Milton. Ce grimaud, ce provincial, restait béant devant ces gentilshommes. » — Ceci explique sans doute allusion a Bourget, référence 4 Vhomme plus qu’a Vceuvte,
Aout-Septembre 1910 provincial ébloui par les « mondains».
1157
Cette allusion semble
étre en surcharge. Page 170.
1. Ces deux textes de Pie X sont des coupures de journaux collées, les titres « Adtes de Pie X, aotit 1910» et « Contre “le
Sillon” » sont de Claudel. Dés 1907 (Jammes, p. 111), il s’était réjoui de la fermeté de Pie X; le 25 aofit 1910, celui-ci venait . dadresser une lettre aux évéques francais sut /e Si//on. 2. Vetsets 20-23 : « Voici ce que dit le Seigneur Dieu : “Voici que j’enverrai mon ange afin qu’il marche devant vous et qu’il vous garde pendant le chemin et vous fasse entrer dans la terre que je vous ai préparée. Respettez-le et écoutez sa voix. Et gatdez-vous bien de le mépriser parce qu’il ne vous pardonneta point lorsque vous péchetez et parce que mon nom est en lui. Si vous écoutez sa voix et si vous faites tout ce que je vous dis, je serai l’ennemi de vos ennemis et j’afligerai ceux qui vous affligent. Mon ange marchera devant vous”. » Ce texte
sett d’épitre 4 la messe du 2 otobre, féte des saints Anges gardiens. 3. Matth., XVIII, 6 : « La meule qu’un 4ne tourne. »
Page 171.
1. N’y aurait-il pas la une des explications de la fin du Soulier de Satin ? C’est « tronqué, mutilé » que Rodrigue se soumettra. — Noter par ailleurs que cette image se lie 4 la lutte de Jacob avec Ange, voir ligne suivante. 2. Voit p. 168, renvoi probable au texte sur l’Ange gardien. Be Nose oe HS 8MS The Page 172. 1. Ces initiales désignent Milosz Marten (voir p. 111, n. 5). Nous savons pat une lettre de Claudel a Suarés que cet écrivain spécialisé dans les lettres frangaises n’était qu’ « un pauvre employé de mairie» (Swarés, p. 167).— Sur Marten, voir Rencontres, n® 1, 1965. 2. Le Chemin de la Croix, It Station (Po., p. 477) : « Et lon voit la foule qui ctie et le juge qui se lave les mains. » — Voit aussi « le Point de vue de Ponce-Pilate » (Pr., p. 909).
3. Cf. l’Ours et la Lune (Th. II, p. 634) : « Le Bourguignon! Cest ainsi que les horticulteurs d’Antony appellent... — Le Soleil! »
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1158
Cahier IT
Page 173.
1. Cf. le Soulier de Satin (Th. I, p. 908), la frise que Rodrigue veut faire dessiner a l’AGtrice, « le Baiser de Paix» : « Cela m’est
venu a Vidée en regardant les moines au cheeur [...] / Ils projetaient leurs ombres l’un sur l’autre. » — Cette note ainsi que les quatre précédentes sont écrites au crayon. 2. L’église Sainte-Barbe (ou Barbara) 4 Kutna hora (Kuttenberg) fut construite sur les plans de Mathias Rejsek, l’architeéte
de la Tour Poudriére. — datant du xvurre siécle. kilométre: de Prague. — 3. Pierre de Craon,
En face se trouve un — Kutna hora est 4 Sedlec, cité plus loin, dans /’Annonce (Th.
collége de Jésuites, une soixantaine de en est un faubourg. I, p. 108) : « Ma
petite église de l’Epine qui est comme un brasier ardent et un buisson de roses épanouies. » 4. Ed. Biré, Garnier, t. V, Ile partie, liv. XIII, p. 224.
Cf. Lettres 4 Gide, p. 149 : « Croitriez-vous que je n’avais jamais lu les Mémoires d’ outre-tombe? Je les lis en ce moment, j’ai commencé pat la défiance, j’ai continué avec admiration, et je sens que je vais finir par ’enthousiasme »; p. 151 : « Vous étes heureux de ne pas encore avoir lu les Mémoires d’outre-tombe, vous avez une grande joie en réserve. II est essentiel de les lire
dans l’excellente édition Biré (bien laide au point de vue typographique), mais qui seule conserve Vadmirable composition par livres de cet ouvrage congu comme un poéme épique. » Voir encore Cah. C/. VI, p. 65, 9 avril 1912, une lettre 4 Copeau : «une de nos plus belles épopées frangaises»... Claudel fait alors un gtand éloge de Chateaubriand. Page 174.
1. Réflexions en marge des Mémoires d’outre-tombe. On y trouve, t. V, p. 254, le méme jugement sur 1830 : « Jamais on
ne perdit la partie 4 si beau jeu...»; p. 195, ’épisode du comte de Saint-Chamans, avec en note le récit de Saint-Chamans dans
ses Mémoires ; de méme pout Talleyrand, t. III, p. 379. 2. Nom de villages en Charente et en Gironde. 3. Verset 26: « Et ce monstre que vous avez formé pour qu’il sy joue [dans la met] », ou « pour vous jouer de lui». Cet
autre sens est celui qu’adopte Claudel. 4. Verset 20: « Ils échangérent leur gloire contre la figure d’un veau qui broute. » 5. Diminutif de Pierre Claudel.
6. Piéce XXXI,
v. 4 : « Riez tant que vous étes dans demeute, troupe des tis. »
ma
Septembre-Novembre 1910
1159
Page 175.
1. Cf. le Soulier de Satin (Th. I, p. 853) : «... le tite sur ton visage a été remplacé par la douleur et l’or pour te couronner pat la couleur myStétieuse de la neige. » Voir aussi Anne Vercors, ala fin de /’Annonce, IV, 5, et Po., p. 359 :« Cantique de l’or », etc. 2. Cf.’ Annonce (Th. I, p. 110) : « Le ciel de la nuit ot tout est travail et qui est comme un grand labour, et une piéce d’un seul tenant, / Et le Colon éternel y pousse les Sept beeufs l’ceil fixé sur
~
une
étoile
immuable,/ Comme
nous
autres
sur
la
branche verte qui marque le bout du sillon. » 3. Claudel reprendra cette image dans « Méditation sur une paite de chaussures » (Pr., p. 1246) : « Ce camelot du boulevard Montparnasse...» Texte de 1938. 4. Ce voyage en Bourgogne était prévu
de longue date. Claudel en parlait déja en septembre : « Je pars demain et serai a Hostel le 16. Puis une petite tournée en Bourgogne en auto
avec les Berthelot » (Gide, p. 152). ' 5. Ces réflexions sur la vieillesse semblent préparer le finale de /’Annonce ;commencée en aott 1910, la piéce sera achevée
peu ayant juin 1911. Page 176.
1. Mot de lecture difficile. 2. Graillet, consul de France, que Claudel avait connu en Chine. Voir Bulletin de la Société Claudel, n® 9, deux lettres que lui adressa Claudel. Il est d’ailleurs question dans lune d’elles du vin que l’oncle de Graillet lui faisait envoyer 4 Fou-tchéou. Page 177. 1. Cluny et la Papauté, discouts prononcé par Mgr Baudrillart dans l’église Notre-Dame de Cluny, le 11 septembre 1910, a Poccasion du millénaire de la fondation de Cluny (Besangon, 1910). « Parce qu’elle est composée d’hommes et humaine par un cété, il arrive que beaucoup de ses membres [de |’Eglise], 4 certaines heures, subissent l’entratnement
du monde;
parce
qu’elle est divine, et divinement assistée, elle se ressaisit toujours; VEglise, a-t-on dit, est une société qui se confesse et qui se réforme. » 2. Verset 5: « Toute téte est languissante et tout cceurabattu. »
— Sur les pages 23 et 24, sur le haut de la page 25, Claudel a collé des photographies du « ciel noéturne», empruntées aux ouvrages de vulgarisation de l’abbé Moreux (on lit sur deux d’entre elles les initiales Th. M. et, quelques lignes plus bas, CLAUDEL V - 40
40
1160
Gahier II
Vabbé Moreux est cité). Claudel a écrit page 23 : Le ciel, la Toussaint et page 24: La nébuleuse d’Orient (cf. Ilustrations pour Dante). — Cf. fin de la Ve Ode, la comparaison des saints et des étoiles (Po., p. 290). — Il® Ode: « Il [le ciel noéturne] nous donne signature sur le papier photogtaphique avec les 6 000 Pléiades»; et encore « Chant de I’Epiphanie», dans Corona (Po., p. 383) : « Un grand ciel nu d’hiver [...] avec six mille étoiles de toutes leurs forces! » 3. Versets 1-4: « Voici que le dominateur des armées va dter de Jérusalem et de Juda homme valide et Phomme fort, toute la force du pain et toutes les ressources en eau, homme fort et ’homme de guerre, le juge et le prophéte, le devin et le vieillard, le chef de cinquante hommes et homme au visage vénérable, le conseiller, les plus sages d’entre les architeétes et ceux qui ont l’intelligence des paroles myStiques. Je leur donnerai des enfants pour princes, et des efféminés domineront sur eux. » 4. Cf. Lettre a Gide, le 14 mati Tort (p..172)"s« ... une bonne traduction, qui pour étre exacte ne doit pas étre servile, et au contraire tenir un compte infiniment subtil des valeurs, en un mot une véritable transsubstantiation. » Une note tirée de cette lettre paraitra dans la N.R.F. le 1&? juillet 1911, accompagnant un fragment de la traduction de Tacite par d’Ablancourt, communiqué par Claudel (voir Gide, p. 331). Rappelons que Claudel traduit 4 cette époque des poémes de Coventry Patmore (voir Po., p. 308 sq. et notes). Page 178.
1. Cf. Un poéte regarde la Croix (O. C., XIX, p. 181) : «... VPallongement jusqu’a moi du Sacrifice éternellement ordonné dans le milieu de la Terre.» Pour Vabbé Moreux, voir
Pe liste 2. Prudence, Cathemerinon Liber, hymne III, v. 148. Cité dans
Ll’Année liturgique, t. 1, pour la féte de PImmaculée Conception : « Une lutte acharnée.» Dom Guétanger traduit ce passage : « Une haine antique et violente régnait entre le serpent et Vhomme...»
—
La citation
suivante,
non
textuelle,
est tirée
dune « Prose», donnée dans le méme recueil : Virga prolem conceptura, Stella solem paritura... « L’Etoile qui enfantera le soleil» — image appliquée a la Vierge. Claudel adapte ou commet une erreur en relevant S¢e//a solem genuit. 3. Mémoires d’outre-tombe, éd. cit., t. VI, p. 168, n. 1: « Il est clair 4 mes yeux que l’ogive dont on va chercher si loin Porigine
prétendue mystérieuse est née fortuitement de linterse€tion de deux arcs de plein cintte... » 4. S. Paul, I Cor., 1v, 4: « Celui qui me juge, c’est le Seigneur. »
Décembre 1910
1161
5. Isaie, XIII, 8 : « Ils se regarderont l’un l’autre avec stupeur et leurs visages seront enflammés. » 6. Il est question de ce Fleury, dans une lettre de Jammes a Frizeau, le 9 juin 1911 : « Dis 4 Claudel que l’Albert Fleury qui a publié ce poéme au Mercure est un autre Albert Fleury que le René-Albert Fleury de Condom. Mais hélas! malgré ce poéme, je ne pense pas son auteur davantage convetti» (Jammes, p. 213). Page 179. 1. Il est peu probable que cette note fasse allusion a une représentation de Boris Godounov 4 Prague ou a Vienne. Créé a Saint-Pétersbourg en 1892, Vopéra de Moussorgsky a été représenté a Paris en 1908 et a Breslau en 1913. La simple mention de l’ceuvre, aussit6t aprés une note sur Beethoven, semble indiquer que Claudel a entendu au concert des fragments. Il fait une bréve allusion 4 Moussorgsky dans une lettre du 17 février 1910 (Gide, p. 121). — Sur Beethoven, outre « le Beethoven de Romain Rolland», voir Un poéte regarde la Croix (O. C., XX, p. 148).
2. Cf. Annonce (Th. II, p. 66) : « Les deux cloches de la cathédrale, Baudon et Baude... » 3. Cf. Odes, IV (Po., p. 264) : «... et le mal de ce cceur trop plein! » 4. Versets 7-12 : « Avant d’étre en travail elle a enfanté; avant
le temps de l’enfantement, elle a mis au monde un enfant mile... Moi qui fais enfanter les autres, n’enfanterai-je pas aussi? dit le Seigneur; moi qui donne aux autres la fécondité, demeurerai-je Stérile? dit le Seigneur ton Dieu. Réjouissez-vous tous avec Jérusalem... Joignez votre joie a la sienne, vous tous qui pleurez sut elle; afin que vous suciez et que vous titiez de ses mamelles le lait de ses consolations, et que vous savouriez avec délices la plénitude de sa gloire. Car voici ce que dit le Seigneur. Je ferai couler sur elle comme un fleuve de paix et la gloire des nations comme un totrent qui déborde, vous sucerez son lait. » 5. Cf. Cantate. BEATA : « Parle, mais parle lentement! » p. 367; FAusTA, de méme, p. 368. Page 180.
1. « La nuit 4 demi dormant» est en surcharge. 2. « A cété de nous» est en surcharge. 3. Sans doute inspiré par Jér., Il, 21 : « Je tavais planté comme une vigne de choix»... vineam elettam. 4. Cette maison a été ainsi appelée par les gens du quattier, parce qu’elle abritait le laboratoire du prince; plus tard sous
1162
Cahier II
Rodolphe (fin du xvi® siécle), elle fut achetée par lalchimiste Edouard Kelly; elle fait aujourd’hui partie de l’hépital. 5. En réalité, Ps. CKXXVIII, 5 : « Voici, Seigneur, que vous connaissez toutes choses, les nouvelles et les anciennes, c’est
vous qui m’avez formé et vous avez mis votre main sur moi.» 6: rétablir Mirabilis facta est scientia tua de me et non potero ad eam: « Votre science metveilleuse est au-dessus de moi, elle me sutpasse et je ne saurais l’atteindre. »
6. Ps. CXL, 2: rétablit sicut incensum : « Que ma priéte s’éléve devant vous comme |’encens. » — 10: « Pour moi je suis jusqu’a ce que je passe. » 7. Ps. CXLIUI, 12 : « Leurs filles sont parées et ornées a la maniére d’un temple. »
IQII Page r8r.
1. Claudel ne manquera plus, jusqu’a sa mort, de noter, le rt janvier de chaque année, le temps qu’il fait. 2. En vieux frangais : deport ou desport. Premier sens : maniére d’étre du corps, maniére de se tenir. Deuxiéme sens : manifestation joyeuse, plaisir, distraction (Godefroy, Diéionnatre de l’ancienne langue frangaise). 3. « Le Chant de lEpiphanie », Corona (Po., p. 379), évoque ces trois mySstéres. Claudel a pu trouver ces détails, y compris celui du triomphe d’Auguste, dans /’Année liturgique, avec un long commentaire sur les trois mySstéres; voir les notes de ce poéme dans CHuwvre poétique.
Page 182. 1. Isaie, XL,
1 : « Laisse-toi
illuminer,
Jérusalem.»
Texte
utilisé a plusieurs reprises dans la liturgie le jour de l’Epiphanie et pendant l’odave. 2. Claudel aime a citer Lao-tseu. Cf. CEuvres en prose, passim. — Voir Sous le signe du Dragon (O. C., IV, p. 70-71), un texte proche de celui-ci. Il semble 4 cette époque, selon une note, citer Lao-tseu d’aprés Wieger, Textes philosophiques. Il reviendra plus tard au Tao, pendant son séjour au Japon; cf. interview par Fr. Lefevre, 7 mai 1927 : « Je me suis surtout initié a la philosophie hindoue et aux livres chinois sur le Tad. Le Tad est une philosophie farceuse et paradoxale qui abonde en plaisanteries et en brocards contre les confucianistes qui représentent un peu ce que sont les classiques chez nous, je veux dite les gens
Janvier 1911
1163
qui multiplient les petites régles artificielles et ridicules...» Dans sa conférence de 1938 sur « la Poésie francaise et l’Extréme- Orient» (Pr.,p. 1040), il parlera de « cet admirable ouvrage qu’on appelle le Taoh-Teh-King». Voir aussi « le Départ de Lao-Tzeu » (Pr., p. 920). Le Tao-Teh-King (ou Livre de la Raison supréme et dela Vertu), vie siécle avant Jésus-Christ, a été traduit en francais par G. Pauthier et publié, avec une version latine et le texte chinois en regard, gravé par Marcellin-Legrand, chez FirminDidot en 1880-1897. King signifie littéralement « Livre par ~ excellence ».
3. Tcheng-Tseu, auteur du commentaite du Tahio (ou Grande Etude), saint livre de son maitre Confucius. 4. Le Y-King, ou Livre des changements, est un des livres sacrés du Confucianisme. Claudel y fait allusion dans sa conférence sur « les Superstitions chinoises » (Pr., p. 1079). 5. « La manifestation », addition postérieure (encre et plume
différentes). » 6. Cf. le Soulier de Satin (Th. Il, p. 920) : « Je veux la belle pomme patfaite [...] Le Globe. » — Cf. Vitraux de I’Apocalypse, p. 157: « Mal et pomme, c’eSt le méme
mot en latin, de méme
que pomme signifie toute espéce de fruit en général. C'est une espece de petit globe comestible qu’Eve tend mystérieusement a Adam dans le sublime tableau du Titien au Prado. » 7. Rom., XII, 21 : « Sois vainqueur du mal par le bien.» Rétablir vince. Claudel cite ce texte dans une lettre a Suarés le 10 février (p. 160). 8. Au-dessus de la page 32, avant ces notes, Claudel a collé une photographie d’un buste : « Mgr le duc de Rohan, Archevéque de Besangon, Pair de France, Prince de Léon. » Page 183. 1. « Ni les Sociétés », en surcharge.
2. « En eux-mémes », en surcharge. 3. Claudel a d’abord écrit : « Je veux avoir...» 4. Claudel a d’abord écrit : « .. d’étre /’élément essentiel... »
5. Aprés « intéréts » deux mots raturés, illisibles. 6. Ces notes sont contemporaines des deux lettres a Suarés (ast et 10 février, p. 157 et 159) sur la Révolution, contempo-
taines aussi de la publication de /’Ozage, dans la N. RoEeebiles pourraient étre inspirées par les derniets chapitres des Mémoires d’outre-tombe,
dont
Claudel
achéve
alors Ja le€ture.
Chateau-
briand y évoque les transformations politiques et sociales dont il a été le témoin et leurs conséquences. 7. « Peuple » est en surcharge.
1164
Cahier II
Page 184.
1. Voir plus bas. 2. En supplément aux Mémoires d’outre-tombe, Chateaubriand a écrit une notice d’une vingtaine de pages sur sa sceur Julie de Farcy. On les trouve dans l’édition Biré au tome VI. La phrase citée est a la page 496 et doit étre ainsi rétablie : « Il me parait difficile de mourit de joie, mais je congois qu’on puisse mourir de contrition. » 3. « Tous», en sutcharge.
Page 185. 1. « La mort héroique...», coupute de journal collée. Le nom propre imprimé est Monier. Claudel l’a biffé au crayon bleu et remplacé par Mesny. 2. Claudel, distrait, a écrit Phédon au lieu de Phédre. I) cite en effet librement Phédre, 266 b, texte controversé qui s’achéve par
un hexamétte, pastiche probable d’Hométre (cf. éd. Budé, notice, p. CLIV, n. I et p. 73, N. 2): «... si je crois voir chez quelqu’un une aptitude a porter ses regards dans la dire€tion d’une unité et qui soit Punité naturelle d’une multiplicité, cet homme-la,
j’en suis le poursuivant, sur /a trace qu’il laisse derriére lui, comme sur celle d’un dieu. » 3. « S’épaissit » est écrit en dessous de « s’obstrue ». 4. Extrait de la réponse de Christine de Suéde a Mazarin qui, aprés l’exécution de Monaldeschi, lui suggérait de n’en pas endosser la responsabilité devant Vopinion frangaise, mais de laisser croite 4 un accident survenu au cours d’une rixe : « Vous savez que tout homme qui a passé trente ans ne craint guére les sornettes, et moi je trouve beaucoup moins de difficulté a étrangler les gens qu’a les craindre...» Claudel cite cette phrase dans Dragon (O. C., TV, p. 50, n. 2). — L’inexactitude relative de cette citation et celle de la précédente font penser que Claudel les a trouvées l'une et l’autre dans un article ou un livre que nous n’avons pu identifier. — « Sommes ainsi faits» est en surcharge. 5. La féte de saint Blaise est le 3 février, ce qui permet de dater la note. 6. Versets 27-28 : « Dieu a choisi [...] les choses qui ne sont tien, pour détruire celles qui sont. » Page 186.
1. Ces notes sut la mise en scene commencent au bas de la page 36 et se poursuivent page 38. — Sur la page 37, Claudel a collé un dessin représentant la déesse égyptienne Toveris a téte
Janvier-Pevrier 1911
1165
@hippopotame femelle. En regard ila écrit : « La déesse Touésis
[sic], fidele image de la Troisieme République francaise. Modéle a ptoposer pour les Maities et les Ecoles primaires. Grand modeéle pour la Cour centrale de la Sorbonne. » 2. « Léger» est en surcharge. 3. « Une dimension » est en surcharge. 4. Ces « idées sur la mise en scéne» ont sans doute été inspirées a Claudel par des représentations données a Vienne (voir plus loin). Il faut remarquer qu’elles sont antérieures a toute représentation d’une de ses propres piéces; mais en 1909, en I910, cettaines tentatives ont été faites auprés de lui (voir Cah, Cl. IV, p. 77 sq.), son intérét est donc éveillé. On compatera ces réflexions avec les indications qu’il donnera 4 LugnéPoe en
1912 pour les représentations
de /’ Annonce et suttout
avec les deux articles qu’il a éctits sur les représentations d’Hellerau (en particulier a propos de l’utilisation de la lumiéte). Voir Mes idées sur le thédtre, textes réunis et présentés par J. Petit
et J.-P. Kempf, Gallimard, « Pratique du Théatre », 1966. Page 187.
1. Verset 24 : « Car la Sagesse est plus aftive que tous les étres agiles et elle atteint partout a cause de sa pureté.» — XII, 20 : « Car vous avez puni avec précaution les ennemis de votte serviteur qui avaient si bien mérité la mort; si vous leur avez donné le temps et l’occasion afin qu’ils puissent se convettir, avec quelle circonspection jugerez-vous des enfants, aux péres
desquels vous avez donné des serments
et de si excellentes
promesses.» La troisiéme citation est du verset 21 : «... et Punivers combattra avec lui contre les insensés. » 2. Leitmotiv wagnérien de /’Anneau du Nibelung: désit ardent de amour. 3. Id. Souci primordial, origine angoissée de la vie. Cf. « le Poison wagnérien» (Pr., p. 369) : « Le programme donne
dailleurs la liste numérotée des thémes, il n’y a qu’a le consulter.» — Cf. Odes, I (Po., p. 229) : « L’?Or, ou connaissance intérieure que chaque chose posséde d’elle-méme, / Enfoui au sein de l’élément, jalousement sous le Rhin gardé par la Nixe et le Nibelung»; et « Richard Wagner» (Pr., p. 864) : «... ce timbre vital, cette Urmelodie... »
4. Ces deux notes sont sur la méme ligne; la seconde ajoutée aprés coup. — Le grenadin est une variété d’ceillet. 5. En 1938, Claudel prétendta que ces représentations de la Tétralogie ont été pour lui décisives; de wagnérien passionné quwil était, il sortit « abruti, exténué » et « la Statue de l’Enchanteur, y compris le béret et le menton en galoche, était par terre
1166 en petits morceaux...»
Cahier II (« le Poison wagnérien », Pr., p. 370). —
De méme, dans sa conférence sur Verlaine, en 1935, il disait : « Richard Wagner, dés que j’ai entendu sa musique, non plus au concett, mais au théatre, s’est d’un seul coup englouti pour moi sous les tuines de son Walhalla de carton. » Cependant, le 18 février 1911 — cest-a-dire apres Sieg fried et avant /e Crépuscule des dieux — il écrit a Gide: « Jassiste pour la premiére fois a la Tétralogie de Wagner. Quel génie
surhumain au milieu de quelles erreurs et de quel chaos!» Le 8 mats, a Suarés : « J’ai entendu l’autre jour avec une immense émotion les quatre drames du Ring. Comme vous dites, nous sommes d’une génération qui a Wagner dans les moelles. La Walkure eSt sublime d’un bout a Vautre, la fin dépasse presque les forces humaines...» (p. 164). Dans « Richard Wagner » écrit
en 1926, admiration l’emporte encore sur la « démolition ». Il est permis de penser que Claudel en 1938 victime d’une illusion rétrospective a reporté sur les représentations de 1911 lorigine dune hostilité — a base de ressentiment — plus tardive. Il est vrai qu’il commence dés 1913 a modifier son point de vue (voir « Claudel contre Wagnet », atticle de Claude Prey, /e Conservatoire, avtil 1955); en 1921 ses impressions sont ttés mélées (voir Pr., p. 1446). L’influence de Darius Milhaud explique peut-étre en partie cette évolution et surtout Vadmiration grandissante que Claudel éprouve pour Berlioz (voir Cab. Gisilliipe 3774283): 6. Avant « jaillir», Claudel avait écrit : éc/ater (raturé).
Page 188.
1. Evangile de la Sexagésime, février 1911. 2. Voit Edouard Ganche, Frédéric Chopin, Mercure de France,
p. 248 sq. Il s’agit du rubato; la phrase exacte est : « Que votre main gauche soit votre maitre de chapelle et garde toujours la mesute. » I] doit y avoir 4 la main droite une « liberté d’expression comportant altération du temps ». Rapprocher des « Muses modératrices » et de « la petite pression de la main pour gouverner» (Odes, I; Po., p. 225 et 227). 3. Claudel a d’abord écrit met (raturé), puis « fourre ». 4. Le Tolstoi vivant d’ André Suarés a été publié en février 1911, peu aprés la mort de Tolstoi, dans les Cahiers de la Quinzaine (12® série, 7° cahier). Claudel fait allusion a ces lignes des pages 118-119: « Tolstoi est excommunié. [...] Tolstoi est en horreur au clergé. Dans les couvents du mont Athos, on se signe quand on le nomme. II est ’Antéchrist pour ces Ames simples. Les moines le tiennent pour un démon des plus noits. On ameute contre lui les paysans, qui, lui montrant le poing, le traitent en
Février-Mars 1911
1167
hurlant d’impie et de diable! C’est un plaisir amer pour la raison de savoir qu’on hue Tolstoi sur la route de Toula, et qu’on lui lance des pierres au nom du Christ. La pesante ironie! Que ces cailloux ont de tristesse! » Claudel dans une lettre a Suarés le 8 mars s’exprimera dans les mémes termes, avec une vive aversion pour Tolstoi; voir également la réponse
de Suarés (p. 163 et 167). Claudel écrit le 8 mars et dit avoir regu l’ouvrage le jour méme. 5. Claudel a introduit cette onomatopée dans son « Chant _-de matche de Noél» : « ... le quadruple A//e/uia avec neume, et non pas croac! et Requiem» (Po., p. 465). 6. Dans /e Pain dur (Th. II, p. 422), Maimon est supprimé. « Ali Habenichts», ce nom donne « la juste pointe d’Orient et de Galicie». 7. Cf. « Sur la grammaite» (O. C., XVIII). Cette réflexion peut étre inspirée a Claudel par un article de Sainte-Beuve, Causeries du lundi, t. UL; le critique cite des phrases particuliérement lourdes : « fautes réguliéres », dit-il, « une faute d’orthographe ou de grammaite» serait « moins grave selon moi» (p. 69). — L’adage cité est bien connu : « Extréme justice, extréme injustice. » Page 189. 1. Nous n’avons pas retrouvé dans le tome II des Lundis la seconde citation. Claudel dans une lettre 4 Gide Ja donne sous une forme plus tridicule : « la proportion ot X est dans un sillage qui est celle de la hauteur ot il s’éléve » (p. 169, 17 mars). La « corde fondamentale » se trouve dans l’article sur « Chateaubriand romanesque et amouteux», p. 146, Garnier, 5& éd., 1858. « Nous serons trés discret a notre tour [sur la vie amoureuse de Chateaubriand], nous efforgant seulement de bien définir cette cotde si fondamentale en ce qui touche l’ame et le talent du grand écrivain. » Claudel a lu ce volume « lors d’un petit voyage a Vienne » et fait part a Gide de son mépris pour Sainte-Beuve (p. 168-169). Cf. « Les cacographies a la Sainte-Beuve» (Pr., p. 44; janv. 1925); « Le charabia d’un Sainte-Beuve» (sbid., p. 1490; sept. 1940). Plus tard, il aura de l’estime pour Port-Royal, mais n’aimera jamais Sainte-Beuve. 2. Matth., V,17: «Je ne suis pas venu abolir, mais accomplir. » 3. Ces deux notes se retrouvent dans Dragon, p. 73-74. 4. Claudel
a lu ce texte
dans
Sainte-Beuve,
Lwundis, t. II,
p. 136. Il a omis apres « vie» la date : « 1774.» 5. Vtaisemblablement inspiré par la lecture de Sainte-Beuve, peut-étre par l’article trés sévere qui termine les Lundis sut « Chateaubriand homme d’Etat et politique». On ne s’étonnera
1168
Cahier II
pas que le Contre Sainte-Beuve ait dissipé les « préjugés» de Claudel a l’égard de Proust (Pr., p. 1485). Leurs jugements sont analogues. Page 190.
1. Yanni Papadiamantopoulos, né a Athénes, prit son pseudonyme, Jean Moréas, de la province de Morée (Péloponnése), ou se trouve Patras, célébre pat son commerce de raisins secs. 2. Voir p. 117 et Jammes, p. 199 : « Le pauvre Tresnea a qui vous vous étes intéressé est mort 4 Cannes dans de trés bons sentiments, aprés avoir regu les sacrements. Ses derniéres paroles ont été : “Je suis heureux”.» — Cette note du Journal léve toute incertitude sur la date de la lettre de Jammes. 3. « Mais il s’enfuit seul dans la montagne » (Jean, VI, 15). 4. Claudel a découvert Benson en 1909. Le Maitre de /a terre, traduit par Teodor de Wyzewa, l’avait « beaucoup impressionné ». « La fin touche au sublime », écrivait-il 4 Frizeau (Jammes, p. 151). None other Gods, Londtes, Hutchinson and Co., p. 288, pour le passage cité. 5. En réalité, non
pas Isaie, mais
i Ezéchiel,
XXXVI,
23 :
« Je sanétifierai mon grand nom, qui a été profané parmi les nations.» Le texte qui suit est bien d’Isaie, I, 16 : « Cessez de faire le mal.» Ces deux textes appartiennent 4 la liturgie du metctredi de la 4 semaine de Caréme; Claudel aura commis une erreur en les relevant dans son missel, ou de mémoite.
6. Exercices spirituels (Marietti, 1928), n° 97: ... agendo contra propriam sensualitatem, et contra suum amorem carnalem et mondanum. Page 191.
1. Noté sans doute aprés la lecture de l’atticle « Panthéisme » (du P. Auguste Valensin) dans le Did. apolog. de la foi cath. (Beauchesne); Claudel se référait frequemment 4 cet ouvrage. — Au-dessus de cette note, il a collé un dessin qui occupe les deux tiers de la page; c’est le Lacordaire de H. Flandrin, gravé d’aprés Dien. 2. Le nom eét de lecture douteuse.
3. Le Chemin de la Croix, Ile station (Po., p. 478) : « Certes le malheur de l’homme est grand, mais nous n’avons rien a dire; / Car Dieu est maintenant dessus, qui est venu non pas expliquer, mais remplit. Jésus regoit la Croix comme nous tecevons la Sainte Eucharistie :/ “Nous lui donnons du bois pour son pain”, comme il est dit par le prophéte Jérémie. » 4. Ibid., V® Station, p. 480.
Mars- Abril 1911
1169
Page 192. 1. Ibid., 11° Station, p. 478. Cf. Imitation, I, 12, 5 : « Si vous
portez de bon cceur la Croix, elle-méme vous pottera... » 2. Isaie, LIII, 2 : « Et il n’avait pas d’apparence.» Derniére note concernant /e Chemin de la Croix ;Védition originale, datée in fine Semaine sainte 1911, est une plaquette in-8° de 18 feuillets numérotés et 1 feuillet blanc, Editions de Durendal. Tirage a moins de 100 exemplaires. Cf. Jammes, p. 223, 225; Gide, p. 182. 3. Luc, XXII, 16: « [Je ne mangerai jamais plus cette Paque] |.jusqu’a ce qu’elle s’accomplisse dans le royaume de Dieu. » — Matth., XXVI, 56; Jean, XVIII... : « pour que les Ecritures soient accomplies ». Page 193. 1. Réflexions contemporaines des traductions de Coventry Patmote, ou du moins de leur reprise. Cf. Po., p. 313, Legem tuam dilexi: « Vinfini, mot horrible...» 2. Voir Grégoire de Tours, Historia Francorum (P. L., LX XI, col, 222, n. 1) : Chlodovecus ou Hludouvicus. 3. Séquence De Resurectione Domini II, v. 25-27 et 74-77, que
Claudel a pu lite dans /’Année liturgique, au mercredi de Paques. Trad. : « L’enfant Isaac, dont le nom signifie sourire, et en place duquel la brebis est immolée, figure d’avance le joyeux mystére qui rend la vie.» « Nouveau matin, matin joyeux, qui essuie les pleurs du soir. La vie a vaincu le trépas, c’est le temps de se réjouir. » 4. Séquence Vidimae Paschali laudes. Rétablit Nobis credendum magis... Ces vers sont omis dans la version liturgique du jour de Paques, mais se trouvent dans /’ Année liturgique au jeudi de Paques. Trad. : « Croyons plutdt a Marie seule et véridique, qu’a la tourbe perfide des Juifs. » Page 194.
1. Souvenit de Rabelais, Pantagruel, VII (Pléiade, p. 220), titre d’un des ouvrages de la « librairie de Saint Victor» : Ouestio subtilissima, utrum Chimera in vacuo bombynans possit comedere secundas intentiones, et fuit debatuta per decem hebdomadas in
concilio Conftanstiensi. « Une chimére bourdonnant dans le vide... » 2. Cf. «le Cheval qui apportait le soleil» (Pr., p. 1091), dont le héros et verrier. « Quand il sentit au bout de son tuyau la bulle énorme et légére... » 3. Cf. Annonce (Th. II, p. 108): « Saint-Jean-de-Vertus comme un beau jeune homme au milieu de la craie champenoise... » —
1172
Cahier II
Page 199.
1. Magasin des enfants, ou Dialogues entre une sage gouvernante etplusieurs de ses éleves, de la premiére distinétion, La Haye, 1768, t. I, 3© dialogue, p. 13-40. 2. Cest en cette fin de printemps que Claudel commence la composition de la Cantate. Cf. Lettre a Frizeau, Hostel, le 14 juin :
« Me voici en France depuis quelques jours, jouissant délicieusement de cet admirable printemps, et du visage de ce pays aupres duquel les autres ne sont que ténébres » (Jammes, p. 215). 3. Cf. Cantate: « [Nuit] Pleine d’oiseaux mystérieux sans cesse et du chant qu’on entend quand il est fini... / De feuilles et d’un faible cri, et de mots tout bas, et du bruit... / De l’eau lointaine qui tombeet du vent qui fuit » (Po., p. 329); « Chante, raconte, appelle, oiseau, Philoméle » (p. 331); « Je n’entends que le vent tout bas et l’eau qui pleure! » (p. 332). C’est le début du poeme, évocation de l’atmosphére dont il nait. 4. Comité composé de notables lyonnais pour l’achevement
de la basilique de Fourviére, dont le beau-pere de Claudel était Pun des architectes. 5. Claudel a d’abord écrit : groupe, puis « mosaique ». 6. Cf. /e Pain dur, Ali Habenichts : « Ce n’est plus du commetce, c’est de la fantaisie » (Th. II, p. 487).
7. Claudel a d’abord écrit : en parabole. Page 200. 1. Bellefontaine, ferme familiale située entre Combernon et le bourg de Villeneuve, et dont Claudel s’est inspirée peut-étre pour Cofifontaine. 2. Les éléments de ce paysage se retrouvent dans la Cantate, « Cantique du Rhéne », p. 341 : « ... comme une cité en ruines »; p. 340 : «... ces longs pans de muts concentriques l’un sur Vautre »... 3. Idée utilisée burlesquement dans /’Ours et la Lune, avec I’« isolateur » qui permet d’éteindre la lune (Th. II, p. 606). 4. Cantate, p. 370, tepris textuellement. 5. Ce sont les trois cantiques de Beata. Le Cantique du Froment sera transformé en « Cantique du peuple divisé ». 6. Addition postérieure, écrite en surcharge. Voir p. 204. 7. Voir Vutilisation de ce paysage dans /’Ours et la Lune
(Th. II, p. 598). 8. Nom supprime. Page 201. 1. Cf.« A Zdenka Braunerova » : « ll est né sous son pinceau
Juin- Aout 1911
1173
magnifique toutes sortes de fleurs rouges et bleues» (Po., p. 896). 2. Cantate, « Cantique du peuple divisé» : « Et éclairant le beau col nu a la petite oreille soudain l’éclair d’un diamant/ Comme une grosse goutte sous d’épais cheveux noits...»
(Po., p. 350).
3. Aeneas Sylvius (1405-1464), pape sous le nom de Pie II en 1458. I] avait été nonce apostolique pour la Bohéme en 1452. Il a laissé des poemes, des discours, plus de 400 lettres, des essais _ historiques et géographiques. 4. Cantate, ibid., p. 351 : « Et lon n’entendait rien que dans
les avenues immenses le roulement sourd d’un équipage... » 5. Entre cette note et la suivante, Claudel a collé une photogtaphie représentant Mme Claudel et ses trois enfants, Marie, Pierre et Reine, datée du 14 juillet ro1t. 6. Ce theme revient trés fréquemment sous la plume de Claudel. Voir par exemple « Introduction 4 un poéme sur Dante» : « Considérons [...] quelques-uns des thémes que la poésie du x1x® siécle a cru découvrir. [...] Nous trouvons qu’ils ne composent pas, qwils ne s’arrangent pas avec l’ensemble de la réalité...» (Pr., p. 424). Voir également « le Théatre catholique » (Th. IL, p. 1414) : « Le bien seul compose [...] en d’autres termes il eSt seul puissant a établir, non pas entre quelques sentiments, mais en tous, l’ordre ot ils trouvent leur arrét et leur satisfaction. La révolte, l’amour humain, la joie de vivre, etc., tout cela compose mal, cat ces sentiments sont impuissants par eux-mémes a agréger la totalité de Vunivers...» Voir encore Th. Il, p. 1475 : «... Pargument que j’employais contre Gide dans une lettre que je ne lui ai jamais écrite : Le bien compose, et le mal ne compose pas.» — Claudel avait d’abord écrit : L’inconvénient du vice pour la littérature est qu’il ne compose pas (raturé).
Page 203. 1. Deux tatures : « Vénus sous rose... dans /e corail rose. » — « un nid de», surcharge. 2. Dr Gustave Lebon, /a Psychologie politique et la défense sociale, Flammarion, 1910. Voit liv. II, chap. 1, p. 118-119. 3. Voir le Pain dur (Th. IL, p. 424), Lumir a Sichel : « Son sang
est retombé sur le votre. Le sang! / C’est une grande chose que le sang. [...] / A ce moment ¢’a été pour vous comme une nouvelle naissance...» Voir aussi un long commentaite de cette idée dans une lettre 4 Darius Milhaud, Cah. C/. III, p. 42, 6 janvier
1914. — Pour Il’Apocalypse, cf. Vitraux de 1’Apocalypse, p. 146. 4. L. M.: Lire Louis Massignon. Voir p. 111, n. 2.
1176
Cahier II
Page 207. 1. Sut Jean de Saint-Samson, voit Henri Bremond, Hist. litt. du sentiment relig. en France, Bloud et Gay, t. Il, /’Invasion mystique, chap. v, p. 363-393. « Aveugle depuis l’age de trois ans» non
dés le berceau (sbid., p. 369). 2. « Stadtpfarer » : curé une paroisse de ville. Abt est sans doute un nom propre. 3. Il Cor., xu, 11 : « Je connais un homme dans le Christ qui, voici quatotze ans, — était-ce en son corps? était-ce hors de son corps? je ne sais, Dieu le sait — ... cet homme-la fut ravi jusqu’au troisiéme ciel. » 4. C£. Annonce (ThA. I, p. 76) : « ... cette ctuelle petite bouche, quand elle vous mord dedans!»; p. 93 : « ... cette petite bouche aveugle qui chetche et ces dents impitoyables. » 5. Voir en particulier Loir-e¢-Cher, « Dimanche » (Pr., p. 703) : « Eternellement il [le damné] brille de cette lumiére qu'il repousse»; p. 714 sq. le théme opposé sera longuement développé : « la lumiére de Dieu » et sa « réfraCtion dans une ame»... 6. Cf. Mémoires: Amtrouche a Claudel : « Cette hypocrisie qu’on lui a souvent reprochée [4 Gide], comme 4 vous, d’ailleurs, votre orgueil...» (p. 214). Claudel : « Cet orgueil, je ne le nie pas, mais il y a aussi beaucoup de maladresse. Beaucoup de gens sont orgueilleux, mais savent mieux le cacher que je ne lai fait » (p. 266). 7. Hero-worship, «le Culte des héros», titre d'un ouvrage de Carlyle. On sait que le cceur de Marat a été jeté dans un égout. 8. Trad. : « C’est la puissance du Créateur, la force du toutpuissant, qui tient tout [en sa main], qui est la cause de la subsistance de toute créature. » Page 208. 1. Cf. Positions, II, « la Physique de l’Euchariétie » (O. C., XV,
p. 170, 173) : « La subStance est [...] ce qui est la raison d’étte, ce qui est la ressoutce et le support nécessaire des qualités véridiquement déterminées par nos sens. » 2. Formule qui reprend pour les modifier certains themes de V-Art poétique et prépare d’autres réflexions. Rappelons : « L’espace ou le dessin fini, le temps ou le dessin qui est en train de se faire...» (Po., p. 125); « Il y a une étendue spirituelle ot les “distances” sont réglées non plus par l’éloignement tactile, mais par les relations harmoniques » (ibid., 201). Vitraux de Il’Apocalypse, p. 20: «... Sil n’y avait plus de temps, il n’y aurait pas non plus d’espace puisque l’espace ne peut s’apprécier que par le temps que nous
mettons
a le parcourit. » Un poéte
regarde la Croix, a ptopos du corps glorieux : « La distance n’est
Novembre-Décembre 1911 plus pour lui une division ou appelle en musique un intervalle 3. Trad. : « Cest ainsi que abandonnant et en n’aidant pas. Cx Xx, cole 77):
Livy
un éloignement, mais ce qu’on » (O. C., X1X, p. 331). Dieu aveugle, qu’il ferme en » Compléter : traCtatus LIII, n° 6
4. Jean, I, 9:« Dieu éclaire tout homme venant en ce monde. » — Tim. : « Il veut sauver tout homme. » 5. Voir la fin de Evangile d’Isaie, « la ReStauration d’Israél ». Ces réflexions préparent /e Pain dur. 6. Crest au Livre des demeures que Sainte Thérése développe a plusieurs reprises le théme du soleil et de l’Ame enténébrée (ate demeure, chap. 11; 7@ demeure, chap. 1). — Cf. Francois Varillon, « Reperes pour |’étude du symbolisme de la porte dans l’ceuvre de Paul Claudel » (Cah. Ci. I, p. 187) : « Téte d’Or fourmille d’allusions a la gedle ot' homme est enfermé. [...] La salle du palais royal, avec la lampe posée 4 terre, oti veillent des hommes étendus, figure le monde clos sur lui-méme, cachot a peine éclairé» (voir p. 3, n. 2). — Ajoutons que cette image
reStera liée au souvenir de Ste Thérése, dans « Sainte Thérése » (1915) (Po., p. 624 sq.), elle sera développée tout au long de la premiere pattie. 7. Cf. « Premiere note sur les Anges » (O. C., t. XX, p. 372) : « Jimagine que les créatures dans les ordtes différents de l’Etre sont entre elles dans une relation “métaphorique’’... », et Présence et Prophétie (ibid., p. 256) :« ... un bon moyen de connaitre l’4me est de regarder le corps...» Suit un long développement basé sut cette « méthode ». 8. Texte déja cité, II a2 (voir p. 148). « Dieu ne peut étre cause de la tendance au non-étte. » 9. 1Cor., xv, 44. Voit dans Je crois en Dien, p. 358 sq., quelques textes de Claudel sur la résurreCtion de la chair. Cf. ici p. 153. Voir surtout les pages importantes de Un poéte regarde la Croix (0.C., XIX, p. 328 sq.). — Ces problémes préoccupent alors tout spécialement Claudel. Il semble méme qu’il ait dés 1913 rédigé des « essais» : « J’ai passé [...] part le couvent des Dominicains du Saulchoit. J’y ai porté mes Essais sut la Vie des Corps bien-
heureux qui ont vivement intéressé les péres. Il patait que théologiquement c’est absolument solide et plausible. [...] Tous sont profondément intéressés, et voudtaient me voit pousset plus loin dans cette voie» (17 juin 1914, Jammes, p. 269). Page 209.
1. II Cor., xm, 2. Claudel qui disait naguére a Riviere ne connaitte d’autre édition de la Bible que celle de Fillion avec son commentaire « sot et impatientant » (Riviére, p. 51), lit peut-étre
1178
Cahier I
déja le texte sacré, traduit et paraphrasé par le P. de Carriéres, avec les commentaites qu’il apprécie, de Menochius. Ici « le ciel physique, le ciel des éius» est noté d’apres sertium empyreum, sedes beatorum du commentaite. — Il est vrai que Fillion, VII, p. 371, donne des explications trés proches.
2. «Figure
de celui qui est 4 venir»,
note
de l’édition
Brunschwicg, p. 626. 3. Dans une lettre du 3 décembre Claudel raconte ce voyage a Mayence dans des termes tout ptoches; la plupart des détails
cités ici s’y retrouvent. — Au-dessus de « elles ont duré», en sutcharge, il a écrit un mot difficilement lisible, qui pourrait étre fuite ou fait; cf. Lettre 4 Suarés : « Au Musée, vieux souliers de légionnaires trouvés dans une soutce, [...] Ils ont fu jusqu’ici... » Cf. /’Ours et la Lune (Th. IL, p. 616) : « Un de ces vins ot Pon dirait que les chaussures de toutes les légions romaines ont macéré! »
4. « L’4me pattie» est en surcharge. 5. Willigis, archevéque de Mayence,
aurait fait fondre les
panneaux de bronze des pottes (x® siécle). Claudel copie sans doute une inscription : « Willigis [archevéque] avait le premier
fait faire des portes revétues de metal. » Page 210.
1. Voit un texte déja cité « Quelques réflexions sur |’Allemagne»
et « Europe»
(Pr., p. 1382 et 1375) : « Les fleuves ne
sont pas des frontiéres. Ce sont des engins de rassemblement. [...] L’Allemagne [...] n’a pas été faite pour diviser les peuples, mais pout les rassembler...» (p. 1383). Entre cette note et la suivante, deux lignes raturées : « 27 nov[embre|. Camille a 4 bh. du matin s’est sauvée de chez elle. On ne sait on elle est. » 2. Auguste Comte, Cours de philosophie positive, 4& éd., Paris,
1877, t. I, p. 298. Cité par Emile Meyerson, Identité et réalité, 2€ éd., Alcan, 1912, p. 45. Reétifier : « relations consfantes ». 3. Cf. Art poétique, « Connaissance du temps» (Po., p. 131) : « des formes, point de Jois». 4. E. Meyerson, op. cit., p. 22. 5. L’argument de Connaissance du temps (Po., p. 125) dit: « La différence génératrice.» Claudel revient & cette époque sur les themes de lArt poétique en vue d'un « grand travail philosophique qui complétera la connaissance sut la nature de l’espace, des corps et de l’esprit» (Lettre a Frizeau, 14 février 1912, Jammes, p. 243). . IV, 5 : « Que votre modestie soit connue de tous les hommes. » 7. Entre cette note et la suivante, Claudel a écrit puis raturé :
Décembre 1911 - Janvier 1912
1179
Imiter dans la vie Vapplication, la soumission ardente du musicier qui déchiffre, quand il voit peu a peu sur les portées apparattre le dessin d’une phrase nowelle. Cf. Dofia Musique (Th. I, p. 787) : « Ce n’est pas nous qui faisons la musique, elle est 1a, rien n’y échappe, il n’y a qu’a s’y adapter... » et Non impedias musicam (O. C., XIX, p. 172): «... il y a dans toute musique humaine trois choses 4 considétrer : la premiére est la partition, qui est pour nous comme le livre de la destinée, et que nous avons a déchiffrer 4 vue @’ceil et page apres page...»
~ Page 211. 1. Lire : Louis Massignon. Cf. Eventails: « A la fatale trompette notre 4me n’a pas encore appris l’art de rester sourde » (Po., p. 736); Annonce (Th. II, p. 32) : « La trompette sans aucun son que tous entendent»; /e Pére humilié (p. 536) : « Entends le cti de la trompette majeure qui t’appelle»; et /e Soulier de Satin (tid., p. 904) : « Cest comme un coup de trompette qui vous nettoie... » ' 2. Trad. : « il compte la multitude des étoiles et il leur donne des noms a toutes» et « ... sa sagesse n’a point de bornes. »
192 Page 212.
1. « Atmosphéte de Brasserie. » 2. Cf. « Note sur les Euménides», reprise dans « /’Orestie d’Eschyle» : « La fécondité est infinie de l’aéte violent qui implique et engendre spontanément sa propre san¢tion, laquelle n’est autre qu’un égal crime» (Pr., p. 418). 3. Ed. Brunschwicg, n° 666, p. 630 : « Inimici Dei terram lingent. Les pécheurs léchent la terre, c’est-a-dire aiment les plaisirs terrestres » (Ps. LX XI, 9). 4. Claudel a lu tout simplement le 4° cahier de la 13° série des Cahiers de la Ouinzaine, septembre 1911 : « Deuxiéme Cahier préparatoire pour le cinq-centi¢éme anniversaire de la mort de Jeanne d’Arc qui tombera le Jour des Rois de l’an 1912»; il contient /e Porche du Mystére de la Deuxtéme Vertu. 5. Voit Du Cange, Glossarium mediae et infimae latinitatis: Boria praedium rusticum. Portia n’y figure pas. Page 213.
1. Le bienheureux
Pierre-Julien Eymard, né et mort
a La
Mure (Isére), 1811-1868, fondateur de la Société du Trés-Saint-
1180
Cahier II
Sacrement. — « Le secret de Maximin», il s’agit de Maximin Giraud, le compagnon de Mélanie Calvat, dont la vision est a Porigine du péletinage 4 Notre-Dame de La Salette. Claudel consacteta a ce « secret» controversé un chapitre des Vitraux de |’Apocalypse, chapitre publié seul en 1952, sous le titre « le
Symbolisme de La Salette ». 2. Cf. Jammes, p. 244 : « Je trouve dans Pascal une citation d’Isaie qui vous intéressera peut-étre. Et /uxit... etc. Cela m’a tappelé Vaspeét brouillé et jaunatre des Pyrénées un jour que nous nous ptomenions ensemble.» Lettre du 21 février 1912. Cf. Is., XXXIII,
9; Pensées, éd. Brunschwicg,
n° 682, p. 638.
Trad. :« La terre pleure et languit; le Liban est confus et souillé. »
3. « Tout prés dici se trouve une montagne aujourd’hui couronnée-de guinguettes ot la légende place le sommeil de Brunnhilde. [...] La forét ot je me proméne tous les dimanches est donc celle ot Siegfried a poursuivi Poiseau » (Suarés, p. 173; 11 avril 1912). 4. VIII, 12 : « Moi, la Sagesse, j’habite dans le conseil. » 5. « Le second souffle. » 6. Ed. Brunschwicg, p. 642 : « Il n’est pas permis d’attribuer 4 lEcriture les sens qu’elle ne nous a pas révélé qu’elle a. Ainsi de dire que le mem fermé d’Isaie signifie 600, cela n’est pas révélé. » (Cf. #bid., n. 2. « Allusion a certaines particularités de alphabet ou plutét de l’écriture juive : il y a des lettres qui s’écrivent de deux facons, fermées ou ouvertes, comme le mem; or les manu-
scrits d’Isaie font un mem fermé au lieu d’un mem ouvert, ce qui en change la valeur numérique. ») Page 214. 1. A Riviere (p. 245), 12 o€tobre 1912 : « L’Art pour l’Art n’est pas une doétrine de créateur. Ce n’est pas avec cette molle gymnastique callisthénique qu’on fera sortir d’un homme ce quw il a de profond et d’essentiel. La question des rapports de l’art et de la morale et de la religion est excessivement grave, difficile et compliquée.» — A Jammes, p. 251, 4 octobre 1912 : « Le dernier numéro de la N.R.F. me déplait fort. [...] Faut-il donc voit une fois de plus treparaitre toutes ces vieilles rengaines de PArt d@abord, de PArt pour l’Art que nous croyions enterrées? [...] Il n’y a de beau que ce qui eét nécessaite, et il n’y a de nécessaire que ce qui sert 4 la gloire de Dieu. » Cette réflexion, en marge de la leéture de Pascal, est d’ailleurs
suttout petsonnelle; elle répond 4 quelque inquiétude de Claudel. Il y reviendra dans « le Théatre catholique », répondant aux critiques de /’Ozage ;voir Th. II, p. 1410, 1413. 2. Voir dans « Développement de l’Eglise» (Po., p. 212) :
Janvier-Février 1912
1181
le symbolisme de la porte « ménageant le passage de ce qui est hors a ce qui est au-dedans» et dans Positions II
(O. C., XV, p. 294) le « Projet d’une Eglise souterraine
a
Chicago ». 3. Holzhauser
(1613-1658), théologien catholique allemand,
né a Langenau, mort a Bingen. Il a écrit une Interpretatio Apocalypsis (usque ad XV, 5), Bamberg, 1784. Selon lui sept Ages de l’Eglise sont représentés par les sept lettres aux Eglises d’Asie du Prologue de jee ea : « Il distingue ainsi l’4ge séminal, _ ou apostolique (lange d’Ephése); l’age irrigatif ou des martyrs (ange de Smyrne); Page illuminatif ou des doéteurs, depuis Constantin jusqu’a Charlemagne (l’ange de Pergame); lage pacifique ou du régne social du Christ, depuis Charlemagne jusqu’a Charles V (lange de Thyatyre); l’Age purgatif ou des épreuves salutaites commengant a Charles V et durant encore, jusqu’a Vavénement du saint pontife et du grand empereur (Vange de Sardes); ’4ge consolatif, préparant les fidéles aux tribulations des derniers temps (l’ange de Philadelphie); l’age désolatif, ou de |’Antéchrist (ange de Laodicée). Cet age se terminera par le dernier jugement» (Dié. de Ja Bible, t. I, art. « Apocalypse», col. 751). — Claudel a trouvé trés vraisemblablement ces indications dans Fillion, t. VII, p. 790. — Par la suite il hésitera sur l’interprétation. Dans les Vitraux de |’Apocalypse, il n’admet plus celle-ci : « Assez longtemps j’ai cru, avec d’ailleurs pas mal de commentateurs, que les sept Eglises, c’était sept périodes successives de l’histoite de l’Eglise, et j’ai encore du mal a me débarrasser de cette idée.» « Je vois dans les sept Eglises de saint Jean sept Figures typiques de notre Mére qu’on tetrouve 4 toutes les époques de l’Eglise» (p. 41-42). — Dans Apocalypse, il teviendra a Vinterprétation historique et s’en expliquera (O. C., XXV, p. 317). 4. Claudel trouve cette remarque dans Fillion, t. VUI, p. 786: on devrait lire "Az6 rod dvtos... Il reproduit d’ailleurs l’erreur commise par Fillion, ce qui confirme l’origine de la note : le texte de l’Apocalypse est azo 6 yr... Fillion suggére lexplication : pour « conservet au nom de Dieu toute sa solennité », on « I’a traité comme s’il était indéclinable ». Page 275.
1. Dans Vitraux de I’Apocalypse, p. 290, Claudel reprendra longuement ce commentaire de l’alpha et de ’oméga, développant des considérations du méme ordte sur la forme méme des lettres. 2. Coupute de journal collée. On trouve ce texte d’Emerson dans |’Autobiographie d’aprés son journal intime, trad., intr. et notes
1182
Cahier II
par Régis Michaud, Armand du mot « Rythmes ».
Colin, t. I, p. 297. Il est précédé
3. « De tout ce qui est purement individuel, on ne peut rien dire. »
4. Lire Ile épitre de S. Pierre. Claudel avait d’abord écrit (chap. 11) : « Ils diront : Ot est la promesse de son avénement? Cat depuis que nos péres sont morts, toutes choses demeurent
comme depuis le commencement de la création. Car ils affeétent d’ignorer qu’il y eut autrefois des cieux et une terre sortie de Veau et formée au moyen de l’eau par la parole de Dieu. Et que ce fut par ces choses mémes que le monde d’alors périt, submergé pat l’eau. Quant aux cieux et a la terre d’a présent, ils sont gardés pat cette méme parole et réservés pour le feu, au jour du jugément et de Ja ruine des impies. Mais il est une chose
que vous ne devez pas ignorer, mes biens-aimés : c’est que, devant le Seigneur, un jour est comme mille ans et mille ans comme un jour. Le Seigneur ne retarde pas l’exécution de sa promesse, comme quelques-uns le supposent, mais il use de patience envers vous, ne voulant pas qu’aucun périsse, mais que tous viennent a la pénitence. Le jour du Seigneur viendra comme un voleur : alors les cieux passeront avec un grand fracas, les éléments
embrasés
se dissoudront,
et la terre sera
consumée avec tout ce qu’elle renferme. Puis donc que toutes ces choses doivent se dissoudre, quels ne devez-vous pas étre par la sainteté de votre conduite et par la piété, attendant et hatant l’avénement du jour du Seigneur, 4 cause duquel les cieux enflammés seront dissous et les éléments embrasés se fondront. Mais nous attendons selon ses promesses de nouveaux cieux et une nouvelle terre, dans lesquels la justice habitera. » Page 216.
1. « [Le vainqueur] je le ferai colonne [dans le temple de mon Dieu] et il n’en sortira plus jamais. » 2. Verset 1 : « Un livre écrit en dedans et en dehors. » — « Ces animaux sont pleins d’yeux tout autour et au-dedans. » 3. Toutes ces notes prises dans |’Apocalypse, chap. xv et xvI. 4. Claudel a vraisemblablement lu cette phrase dans Correspondance de Beethoven, trad., intr. et notes de Jean Chantavoine, Calmann-Lévy, 1903, Introduétion, p. 16 : « On sait que dans les premiets quatuors il y a des “‘quintes’’, le pire des crimes contre la syntaxe musicale. Un jour Ries les signala 4 Beethoven : “Et puis apres? — Mais tout le monde les défend! — Qui ¢a, tout le monde? — Mais Fux, Albrechtsberger. — Eh bien, moi,
je les permets”. » Et sur une page d’esquisses, Beethoven écrit
dans ce frangais-allemand qui lui est propre : « Il n’y a pas de
Février-Mars 1912
1183
régle qu’on ne peut blesser a cause de schdner.» — Depuis une audition des derniers Quatuors, Claudel était fort curieux de mieux connaitre Beethoven; l’année précédente, il avait demandé
a Suarés que lire 4 son sujet (p. 163, 8 mars 1911). 5. « Les eaux que tu as vues a l’endroit ot la Prostituée est assise, ce sont des peuples, des nations et des langues. » 6. « Vous avez cru me voit manger et boire; mais moi je me
sets d’une nourtiture invisible et d’une boisson que les hommes ne peuvent voir.» En réalité, v. 19. _ 7. « [Alors je vis un grand tréne blanc] et celui qui était assis dessus; devant sa face le ciel et la terre s’enfuirent, et il ne se
trouve plus de place pour eux. » Page 217. 1. Verset 14: « Puis l’enfer et la mort furent jetés dans l’étang de feu.» « brdlant sur lui-méme » est en surcharge. 2. XXI, 23 : « Et la ville n’a pas besoin du soleil et de la lune ‘pour qu’ils ’éclairent. » — 25 : « Ses portes ne setont pas fermées
le jour, car il n’y aura point 1a de nuit. » — La derniére citation est exactement
: Mensura
hominis quae est angeli; « mesure
de
Phomme, mesure de l’ange», traduit Claudel dans sa « Note sur les Anges». Cette premiere lecture attestée de l’Apocalypse (car elle n’est certainement pas la premiére réelle) prend une grande importance, lorsqu’on sait quel intérét passionné Claudel attachait a ce texte qu’il a longuement commenté au moins deux
fois, dans Vitraux del’ Apocalypse et Apocalypse, et auquel il est revenu jusqu’a ses derniers jours. 3. Claudel note ici, d’aprés la Bible de Fillion (Luc, III, 23 4),
Vhypothése selon laquelle la généalogie de Luc serait celle de la Sainte Vierge : « Il est remarquable que dans le Talmud, Chagiga, LXXVII, 4, Marie est appelée fille d’Héli.» La note cursive de Claudel n’implique pas qu’il prend cette hypothése au sérieux. 4. Pied composé de deux bréves et d’une longue, que Claudel assimile a l’iambe, fondement du rythme poétique (Pr., p. 5). Ce mot a été ajouté aprés les autres notes. 5. Sous cette note, et sans rapport apparent avec elle, Claudel a collé cote 4 cote un croquis et une photographie, suivis de ces mots : « Arthur Rimbaud, croquis de Forain et photo (1870),
communiqués par Paterne Berrichon». Le 11 mars il écrit a Jammes : « Je vous envoie deux reproductions que j’ai fait faire d’une photo du jeune Rimbaud et d’un croquis du méme pat Forain, que Berrichon m’a envoyés. Peut-étre cela vous intéressera-t-il » (Jammes, p. 245). — L’année précédente, il est
entré en relations avec Paterne Berrichon, qui lui a demandé de faire partie d’un comité pour l’éreétion d’une statue a Rimbaud;
1184
Cahier Il
il a refusé, comme il va refuser en avril 1912 d’écrire un article sut Rimbaud (Cah. Cl. VI, p. 64). En juillet, il se rendra a Roche, pays natal de Rimbaud. 6. Claudel a lu cette phrase dans la Sainte Chantal de Henri Bremond, Lecoffre, 1912, p. 158. Texte exact : « O Jésus, que Pordre que Dieu avait mis en cette bienheureuse 4me était admirable! Tout était si rangé, si calme et la lumiére de Dieu si claire qu’il voyait jusqu’aux moindres atomes de ses mouvements, — Le texte de Ste Chantal que cite Claudel dans son article-préface aux CEuwvres de Rimbaud (juillet 1912), Pr., p. 515, est a la page 60 du méme ouvrage. 7. Extrait d’une lettre de Mérimée 4 Mme de Montijo, datée de Paris, le 8 mars 1848 (Correspondance générale de Mérimée, établie et ahnotée pat Maurice Parturier, le Divan, 1946, t. V, p. 258). Texte exact : « La Révolution a été faite par moins de six cents hommes qui, la plupart, ne savaient ce qu’ils faisaient, nice qwils voulaient. » Page 2178. 1. « En effet, ceux qui sont selon la chair gotitent les choses de la chair, ceux qui sont selon l’esprit gotitent les choses de Vesprit. [...] Car la sagesse de la chair est ennemie de Dieu, parce quelle n’est pas soumise 4 la loi de Dieu, et elle ne peut pas Létre. »
2. Sonnets, 86 : « Le mat royal de son large poéme.» Trad. Ch.-M. Garnier. 3. « En effet, ses perfections invisibles sont devenues visibles depuis la création du monde, par la connaissance que ses ceuvres en donnent; de méme sa puissance éternelle et sa divinité... » — « Inintelligents, dissolus, sans affection, sans loyauté, sans
miséticorde.» Ce dernier texte sera l'une des épigraphes du Pain dur. i 4. Friedrich Riickert (1788-1866). Les Kindertotenlieder sont de 1872. 5. Coupure d’imprimé collée sur les pages 83 et 84. — Jacopone de Todi (1228 ou 1230-1306), auteur présumé du Stabat Mater, On trouvera la lamentation de la Madone (Donna del paradiso) dans le Choir: de textes publié en 1914 par J. Pacheu (Tralin), p. 300, ou dans lAnthologie franciscaine du Moyen Age, annotée pat Maurice Beaufreton, Crés, 1921, p. 175. Ozanam a, le premier, en 1848, arraché a l’oubli les Laude de Ser Jacopo de Benedetti. Elles sont écrites en diale€&te ombrien. Au bas de la page 83, Claudel a noté : Per eam quae invicem est, fidem vefiram atque meam (Rom., I, 12) : « Par cette foi commune a vous et a moi.»
Mars-Abril 1912
rais5
Si 219.
- Note du texte : « Amoroso: amoureux, vieux frangais :qui Rani Vamour. » Page 221. . Coupure collée, tres abimée. Ibsen est une le€ture douteuse. e4 derniéres lignes sont peu lisibles; on croit lire «... qui contre tous les ascétismes du Moyen age sut revendiquer les __ légitimes jouissances de la vie de famille, { ] du foyer, de la table, des relations conjugales, Luther dont Michelet a dit, Luther c’est le [ ], /e retour [ J.» — Les derniéres lignes, entre parenthéses, sont de la main de Claudel, qui a aussi tracé un trait a ’encre rouge dans la marge en face de la premiere ligne et du passage relatif a la « jouissance ». Page 222. »
1. Verset
13 : « J’ai été comme
un
vase
brisé.» Ce texte
inspire la suite de la note. — Rodrigue sera cédé a la « sceur glaneuse » avec « un tas de vieux bouts et débris de toutes sortes, vieilles armes, vieux chapeaux, vieux drapeaux, fers cassés, pots fendus,
chaudrons
félés
[...], les déchets,
les rognures,
les
balayutes, ce qu’on jette, ce que personne ne veut...» (TA. I, p. 946). — Cf. également Protée: « Marmites craquées, vieux couteaux, fanaux. [...] Tout lui est bon...» (p. 369). — Voir surtout /’Epée et le miroir (O. C., XX, p. 152) : vas perditum... 2. Ces trois notes sont partiellement effacées, accidentellement, semble-t-il. — Les mots entte crochets droits sont de lecture difficile, douteuse, voire conjecturale.
3. Theme fréquemment repris par Claudel. Voir en particulier, « Lettre au Temps» a propos de /’Ofage (Th. II, p. 1411) : « Elles [les exigences du christianisme] ne mutilent rien, elles sont catholiques, c’est-a-dire universelles, elles en appellent a Vhomme tout entier, son intelligence, sa volonté et sa sensibilité,
elles nous obligent 4 un état permanent de mobilisation contre les passions, contre les doutes faciles, et pour cette guerre perpétuelle nous n’avons pas ttop de toutes nos facultés. » 4. Cf. Vitraurcc de I’ Apocalypse, p. 141 : «... un ciel chargé de lourds nuages violets et [...] une mer menagante, couleur de jus
de mitire, a perte de vue au large du Cap Spattivento. » Page 223.
1. Annonce, Prologue (Th. II, p. 24): « Tant de clochers dont Vombre en tournant écrit Vheure sur toute une ville...»; p. 25 :
1186
Cahier II
«... une cathédrale dont le soleil successif fait de toutes les parties lumiére et ombre!»;
Cantate (Po., p. 369) : [Le soleil]
« Regard transversal 4 la nuit! » « La vie transversale a la mott. » 2. Voir dans /’Echange le role de Lechy Elbetnon (en particulier, Th. L, p. 676), dans /e Soulier, VA&rice (Th. I, p. 899 sq.), Loir-et-Cher, Palmyre (Pr., p. 680). — Plus tard une rencontre avec la Duse, voit p. 329, donnera a cette idée de nouveaux développements. 3. Cf. Un potte regarde la Croix (O. C., XIX, p. 397): « Les bras de la croix [...] ce sont des leviers en action. »
4. CE. le Pain dur, U1, 4 (Th. I, p. 485) : « Ecoutez-la! Elle dit “religion” et “catholique”, comme on dit une salle 2 manger Renaissance. / Ca lui est bien égal! Ganz Wurst! Cest tout saucisse pour elle! » Cf. Pr., p. 1292, et ici p. 246. — Avant les ptemiets mots, une rature : Le symbole. Page 224. I. «... Et par suite de l’habitude, Pun suit autre, selon une
loi...» 2. Cf. Un poéte regarde la Croix (O. C., XIX, p. 396) : « Cet
esprit en qui Dieu a créé le monde en soufHlant dessus...» et suttout ibid., p. 336 sq., le développement sur la musique et la voix humaine. 3. Cantate, « Cantique de l’ombre » : « Avant que l’ombre de nouveau, cherchant sa place, revienne se poset sut notte corps comme la flamme sut le flambeau! » (Po., p. 371). — Cette note est d’avril 1912, Claudel travaille a l’achévement de la Cantate qu’il enverra 4 Gallimard en septembte (Gide, p. 203). 4. « Ca et la» est en surcharge. 5. Limée, 73 b. — Cf. Cantate (Po., p. 371), « Cantique de Pombre» : « Comme les dieux sous le diaphragme au plus profond de la béte ont placé le foie poli et brillant que les sactificateurs interrogent! » — Cf. Gide, p. 200, 10 juin 1912: « Je lis en ce moment le Timeée. » Page 22). 1. En éctivant a Brangues en 1937 la « Myétique des Pierres précieuses », Claudel se souviendra de cette visite : « Il faut que
la main de Phomme s’ajoute a ce caillou qui l’invite. Il faut qu’un lent polissage vienne dissiper l’obscurité interne... » «
2. Cf. Un poéte regarde la Croix (O. C., XIX, p. 241 sq.) : Quant 4 Vaimable Joseph [...] tien de plus saisissant que le
parallélisme de sa Passion avec celle de l’Rvangile... » 3. «et des mots» en sutchatge. Cf. Cantate (Po., p. 367) :
Aril- Juin 1912
1187
« Que le sens sacré de la parole et le son de la voix humaine/ Tombe dans la pensée mot par mot et s’y dissolve...» — Cf. «la “Philosophie du Livre » (Pr., p. 77), ’importance donnée au blanc et les remarques sur le poéme de Mallarmé « Un coup de dés jamais n’abolira le hasard ». Page 226. 1. «A la messe » est en surcharge. De méme « occupés »). 2. En avril, Copeau a demandé un article sur Rimbaud
a
Claudel, celui-ci a refusé, comme il refuse encore dans une lettre a Gide le 10 juin (Gide, p. 199). A Copeau (Cah. Cl. VI, p. 65) il dit n’avoir a ajouter sur ce poéte que quelques notes 4 ce qu’a dit Berrichon, entre autres : « l’état d’hypnose particulier connu
de tous les grands marcheurs». Voir ce qu’il en dit dans sa « Préface », (Pr., p.. 517.) 3. Cantate (Po., p- 368) : « Et la fleur blanche du printemps de toutes parts s’évanouit dans le feuillage /Comme une mer qui résorbe son écume. »
Page 227. 1. « Que le mouvement seul anime » est en surcharge. 2. Ps. XXI, 15. « Mon ccaeur est devenu comme de la cire fondue au milieu de mes entrailles. » 3. Timée, 45 b-46 ¢; 67 c-68 d. Cf. Art poétique (Po., p. 167-169). 4. Cf. le Pére humilié, UL, 2 (Th. I, p. 527) : « Ainsi Christine
VAdmirable sur son lit de souffrances et de ses levres immobiles {...] /Une mélodie de jubilation, sans aucune reprise de Vhaleine s’élevait comme le chant d’un séraphin en extase! » — La vie de Ste Christine de Saint-Trond
(1150-1224) a été écrite vers
1232 pat Thomas de Cantimpré, dominicain de Louvain; le merveilleux le plus étrange y est naivement accepte. 5. 73 4; 78 ¢; 85 d. — Voir aussi Aristote, Hit. anim., I, 7,
491 a, 28; 17, 496 b, 29.
6. Idée notée, semble-t-il, pour le « Cantique de l’ombre ». Cf. Po., p. 372 : « Ov finit le corps sinon ot Vautre corps le lui fait sentir ?... » 7. Cantate, «Cantique de ’ombre» (Po., p. 372): « Ah! pas plus moelleusement une vicille nef au pitge de quelque Célébe
n’€pousera la borne occulte sous la met /Que toute mon ame d’avance ne se préte a ce choc ténébreux! » 8. Cette phrase qui n’est pas de S. Irénée a pu lui étre attribuée a Vépoque des controvetses autour du pélagianisme. — Cf. Corona, « Hymne de la Pentecédte » (Po., p. 389) : « Venez, Esprit
1188
Cahier IT
créateur! la grace achéve la nature! » — Voir Adv. Haer., I, v1, 1; W610.) (RNG Staal cohsosnet 125) Page 228.
1, Réflexion en marge des derniéres pages du Timée qui met les maladies de l’4me — la folie — en tapport avec état du corps. Mais Claudel ne peut s’empécher sans doute de songer a Camille, dont l’état semblait déja grave; voir p. 210, n. 1,
et 104, n. I. 2. Notes inspirées sans doute par le livre de Newmann, An Essay on the development of christian doétrine. Le 19 mars, Claudel avait parlé 4 Gide de ce livre, « l’un des plus beaux livres d’apologétique catholique que je connaisse » (Gide, p. 196). 3. En vieux francais : pavo, pavon, pavotte (pat exemple chez
Chrétien de Troyes) : pavot. 4. Overwhelmed, éctasé, accablé. Claudel a souvent
cette im-
pression lorsqu’il revient a Villeneuve; voir déja Connaissance de VES, « Pensée en mer» (Po., p. 37) et Jammes, p. 217, 23 juin 1911 : « Me voici de nouveau avec mes vieux patents dans ce Villeneuve que vous aimez et qui est plein pour moi de tant de souvenirs la plupart bien amets [...] et ces visages de ceux qui restent, sur lesquels la marque du temps s’approfondit chaque année. » Page 229.
1. Coupure de six mots concernant cette conversation. 2. Voir cette lettre que Claudel recopie un peu plus loin, Pp. 230. Page 230.
1. Claudel qui avait refusé 4 la N.R.F. un article sur Rimbaud a écrit brusquement quelques pages le 15 juin (Gide, p. 200); il les reprend aprés ce voyage (ibid., p. 202, 3 aout) : « Jai été trés impressionné pat mon voyage dans le pays de Rimbaud et j’ai ajouté quelques propos 4 mon article.» — On retrouvera la plupart des détails notés ici dans cette « Préface », en particulier Pr., p. 519. Voir aussi « Conférence sur Verlaine », ibid., ce qu’il dit de l’Ardenne, et /a Messe /a-bas (Po., p. 510-512). — Dans le texte : rectifier Voncq (canton d’Attigny). Pour Frédéric R., voir Rimbaud (O. C., Pléiade, p. 571-573), deux lettres de lui; pour Vitalie, sbid., son « Journal», p. 557-569. Quelques correftions dans ce texte : aprés « ce pays d’Ardennes », Claudel a d’abord écrit : foréts, eaux lentes; « a grand toit » est en surcharge;
au
Juillet 1972 lieu de « sous
1189
la date », sous l’inscription, raturé; rature égale-
ment : C’est comme si j’étais au chevet d’un Dieu. « dun cancer aussi», « aussi» est en surcharge. Ratute : «... ot on le voit
presque noit ». « les pieds nus aux tives...» : « nus » en surcharge. Avant « c’était mal», deux mots illisibles raturés.
2. Marie Kalff, comédienne du Théatre de |’Giuvre, qui avait é€pousé auteur dramatique R.-H. Lenormand. On lira une longue note, fort précise, dans Cah. C/. V, p. 200, sur sa carriére et sur son activité claudélienne. Voir également Cah. C/. IIL, | p. 278. — Une lettre 4 Gide (p. 202) et une lettre 4 Jammes “(p. 250) indiquent qu’il fut question dans cette entrevue de Partage de Midi, Claudel refusa mais fut sensible aux qualités de Pinterpréte : « J’ai va Mme Kalff a Paris, qui m’a lu un passage de Partage de Midi, fort bien, ma foi, et avec beaucoup d’émotion »
(Jammes, p. 250). 3. L. M. : Louis Massignon. — L’abbé Daniel Fontaine, d’abord vicaire a Clichy, puis curé de Saint-Antoine-des-QuinzeVingt; dite€teur de conscience de Claudel qui composera un poeme a sa mémoite, lors de sa mort en 1921 (Po., p. 606). Il avait été le dernier confesseur de Huysmans et c’est Massignon qui Vavait fait connaitre 4 Claudel. — Jean Variot était entré en
relations avec Claudel l’année précédente; il ditigeait /’Indépendance et s’intéressait aux problémes de théatre; voir Cah. C/. V, nombreuses notes sur lui, p. 205 sq. — Sut Georges Sorel, voir Gide, p. 323, une longue note de R. Mallet; il était un des principaux
rédafteurs
de
/’Indépendance.
—
Dans
son
« Adieu
4
Giraudoux » (Pr., p. 572), Claudel dira avoir lu « les premiéres pages» de celui-ci. Elles datent de 1908 et il en a parlé 4 Gide (p. 92) dés cette époque. Giraudoux a passé le « concours» en 1910 et a certainement rencontré Claudel déja chez Berthelot. Page 234.
1. Cette lettre d’Isabelle Rimbaud figure dans Rimbaud, O. C., Pléiade,p.561. Claudel l’a reproduite en partie dans sa « Préface». Il commet en la recopiant quelques erreurs de détails, dont cettaines seront cotrigées dans la « Préface». — Les mots soulignés ici le sont par Claudel. 2. Addition postérieure (encre et plume différentes). — Le 10 juillet, Claudel écrit 4 Frizeau : « J’ai passé deux jours du plus ptrofond intérét 4 Roche et 4 Charleville, dans le pays et dans la famille de Rimbaud. C’a été pout moi trés émouvant. Isabelle Rimbaud est une femme ttés remarquable. Elle a écrit une lettre sur la mort de son fréte qui est de toute beauté. J’ai couché dans
la chambre méme de Rimbaud ot il a écrit Une Saison en enfer, dans son lit. J’ai prié sut sa tombe, et j’ai communié pour lui 4
I190
Cahier II
Paris le lendemain avec une profonde émotion. I] prend place maintenant parmi mes motts les plus intimes et les plus chers. Je vais écrite sur lui quelques pages que vous vertez prochainement » (Jammes, p. 249). 3. Claudel a fait un voyage
en Palestine
et au Liban
en
novembre-décembre 1899. Une image biblique renouvelle sans doute ses souvenirs, par exemple «les riviéres dévalant du Liban » (Cant., V, 15). 4. Pour Henrion, voir p. 82, n. 4.
5. Bréve allusion 4 ce voyage en Bohéme dans Gide, p. 202, 3 aout. Pour Marten, voir p. 111, n. 5.
6. Treu, en bourguignon : pressoir. Indiqué par Littré, dans la note historique sur treuil. — La note suivante se trouve sur la méme ligne, mais a été ajoutée postérieurement. Page 235. 1. Cette note semble difficile 4 interpréter; on ne sait s’il faut
la lier 4 la précédente qui est du 6 aotit, évidemment, et y voir le résultat d’une méditation de Claudel non seulement sur l’histoire, mais sur sa propte vie.
2. Claudel poursuit la leGQure du Timée, semble-t-il. 3. La traduction indique que Claudel avait en main lédition de 1866 (Lecoffre); un mot cependant est emprunté 4 celle de 1911 (Beauchesne) oti dona eSt traduit par privileges. Page 236.
1. Coupure de journal collée. 2. Ces deux notes sont en marge de la coupure de journal. 3. « Ma femme nourrit », addition postérieure. 4. Voit Cah, C/. V, p. 81, la lettre de Claudel 4 Lugné-Poe; il pose comme condition que Marie Kalff jouera le rdle de Violaine, ibid. et p. 199. —On lira dans /a Table ronde, avril 1955, ses lettres A Marie Kalff; celles qui concernent /’Annonce ont été reproduites dans O. C., IX, p. 271. Page 237.
1. Claudel a d’abord écrit : avec des monstres pour éfoiles; « comme un ange de ténébres » est une surcharge. — L’image de Poétopode sera utilisée dans Protée (Th. II, p. 336). 2. « Qui pése ces choses [le rejet atuel du respect de Dieu] a droit de craindtre qu’une telle perversion des esprits ne soit le commencement des maux annoncés pour la fin des temps, et comme leur prise de contaé& avec la terre, et que véritablement,
Aoit-Septembre 1912
TIQ1
le « fils de perdition », dont parle Apotre (II Thess., 11, 3), n’ait déja fait son avénement parmi nous » (S. Pie X, lettre encyclique du 4 o€tobre 1903, E supremi Apoftolatus, Adtes de Pie X, éd. Bonne Presse, I, p. 35). —« Hitler» est évidemment une
addition postérieure. 3. Cf. Ville, (Th. 1, p. 462), Lala a Ceeuvre : « La porte que “asouverte pour sortir a empli ta chambre de la lumiére de la une. » 4. Osage, 1, 2 (Th. I, p. 248) : « ... cet ancien chirographe qui
|. avait été attaché a la croix. » Le mot et l’image sont dans Col., I,
= 14. 5. Variot évoque cette visite dans /a Table ronde, avril 1955 (voir O. C., IX, p. 259), et Claudel dans une lettre 4 Lugné-Poe (Cah. Cl. V, p. 83); cette le€ture lui a facilité le « travail de
couputes», les idées de Variot qui vient d’étudier le théatre allemand ont intéressé; il envoie celui-ci 4 Lugné. 6. « On sait qu’en Babylonie et en Egypte la nature du sol avait obligé les indigénes 4 se servir de briques pout la plupart de leurs travaux d’archite@ture (cf. les décorations des tombeaux de Beni-Hassan, par exemple, qui rendent d’une facon trés vivante la confection et l'utilisation des briques » (W. Corswant,
Did. d’archéol. bibl., Delachaux et Nestlé, Neuchatel, 1956, p. 54). Page 238.
1. Grand catéchisme de la persévérance chrétienne, ou Explication philosophique, apologétique, historique, dogmatique, morale, canonique, ascétique et liturgique de la religion, par le P. d’Hauterive, Paris, Vivés, 12 vol., 1876, t. I, p. 54. Claudel appréciait beaucoup cet ouvrage 4 cause des nombreux textes patristiques qu’il contient. Plusieurs volumes se trouvent encore dans la bibliothéque de Villeneuve. 2. Jér., XXIII, 24. Sans doute est-ce déja la lecture de Jérémie qui avait inspiré la note sur Babylone. 3. Réflexion — non citation textuelle — a partir du chapitre 11 sur la nécessité d’une religion révélée. La grande idée claudélienne de la nécessité de |’Univers et de la Bible pour la connaissance (naturelle et surnaturelle) de Dieu est déja sous-jacente a cette note. Cf, les « paroles» de Mgr Baudrillart, p. 82. Page 239. 1. Cf. « Lettre au Figaro», 1914 (Th. I, p. 1413):
« Lesprit
de I’Eglise n’est pas un esprit de défensive, c’est un esprit de conquéte. » 2. Texte déja cité a plusieurs reprises, voit p. 189, n. 2. CLAUDEL V - 41
41
T192
Cahier II
3. Le 15 septembre (voir O. C., IX, p. 372), Claudel avait annoncé ce voyage a Marie Kalff; il veut travailler avec elle a cause du « poids terrible du rdle de Violaine ». Mais Marie Kalff est tombée malade; elle doit faire un séjour en montagne. II faut
choisit une autre Violaine, ce sera une des préoccupations de ce séjour a Paris. Claudel voit bien entendu Lugné-Poe, Suzanne Després, femme de Lugné-Poe, dont il fait alors la connaissance, Variot mélé de trés prés 4 la mise en scéne de /’Annonce, Mme Lara, sociétaire de Ja Comédie-Frangaise, qui finalement remplacera Marie Kalff; Claudel trés inquiet sera plus tard satisfait de cette comédienne (a Gide, p. 204; 4 Marie Kalff, 26 décembre, Table ronde, avril 1955), mais en 1919 il refuse de lui donner un rdle « 2 aucun prix » (Cah. Cl. III, p. 58), en 1924
cependant‘l la laisse monter Téte d’Or (sur Lata, voit Cah. Cl. V, notes, passin). Il voit également les autres acteurs de la piéce : Mme Iribe — Jeanne Diris — qui devait jouer le rdle de Mara, mais sera remplacée; Henri Rollan, prévu pour Jacques Ury, lui aussi remplacé (il sera Pierre de Craon en 1921 et Codfontaine en 1950), Victor Magnat, Pierre de Craon. — Sur tous ces acteurs voir les notes de René Farabet, Cah. C/. V. — Le nom
qui suit « Gladys » est illisible. 4. Marcelle Géniat, sociétaire de la Comédie-Frangaise et qui venait de donner sa démission. Claudel la voit sans doute pour une « séance» qu’elle doit donner a l’Alliance frangaise a Francfort (Cah. Cl. V, p. tog, lettre 4 Lugné-Poe). 5. Voir O. C., IX, p. 274, lettre 4 Marie Kalff : « Les études que j’ai faites [...] m’ont appris [...] quwil faut accentuer sur la consonne et non pas sut la voyelle, et qu’on obtient plus d’effet en portant la voix sur les toutes derniéres syllabes. Par exemple,
il est bien plus énergique de dire, au lieu de .. C€ petit étre qui criite ce petit étre qui errrie et au lieu de
... Vobscurcissement comme d’un ombrage trés obscut
Pobscutcissement comme d’un ombrage trés obscur. » Il nuancera quelque peu ces affirmations, mais en gros les maintiendra. Voir « PHarmonie imitative» (Pr., p. 107) : «... pour moi, dans la di€tion, la consonne est |’élément essentiel. » Voir aussi dans Mes idées sur le thédtre, les conseils aux a&teurs du
Soulier de Satin. 6. Ps. VII, 9: « Jugez-moi, Seigneur, selon ma justice et selon Pinnocence qui est en moi. » 7. Ps. XLI, 8 : « L’abime appelle l’abime, au bruit de vos
Ottobre- Novembre 1912
1193
cataractes...»» — Gen., II : « Et l’esprit de Dieu planait sur les eaux. »> 8. Ps. XXIV, 14 : « Le Seigneur est le ferme appui de ceux qui le craignent.» — Comme les deux précédents, ce psaume appartient aux offices des défunts. — Le texte suivant, attribué a Isaie, est sans doute une citation faite de mémoire; le passage le plus proche est: Ascendam super altitudinem nubium, similis ero Altissimo, XIV, 14.
9. En réalité, Apoc., II, 20: « Voici que je me tiens 4 la porte et je frappe.» Voir Positions (O. C., XV, p. 264), le commentaire
~
que fait Claudel de ce texte : Ecce to ad ostium et pulso, dans une lettre de 1922. 10. Cf. Protée (Th. U, p. 339): « Il n’y a ici d’autre Héléne qu’Héléne de Troie [...] / ... comme en témoignent ces grands tas de briques noircies qu’on voit en face de Ténédos.» Note inspirée par le vers de Virgile qui suit. Page 240.
' 1. L’Enéide, Il, 23. Claudel traduit le vers qui évoque Ténédos, « ile fameuse et riche tant qu’a régné Priam, maintenant...» — Il copiera de nouveau ce vers, voir p. 264. 2. « Jai appris que toutes les ceuvres que Dieu a créées demeurent a perpétuité. » 3. Sainte Alpais, morte le 3 novembre 1211 a Cudos, diocése de Sens. Sa « vie merveilleuse» fut écrite par un religieux cistercien de ’abbaye des Escharlis (voir Dié. d’hist. et de géogr. ecclés., t. I, col. 673). 4. Lapsus : lire Clément XI, pape de 1700 a 1721. Léopold Ier, empereur d’Allemagne de 1658 a 1705. Cf. précédemment les notes sur la Prusse et l’Allemagne, p. 205. 5. Exode : «Ils virent le Dieu d’Istaél et son marchepied paraissait un ouvrage fait de saphir et ressemblait au ciel lorsqu’il est serein. » — Ez. : « Au-dessus de la téte des animaux paraissait un firmament semblable a un cristal terrible 4 voir qui était étendu en haut sur leurs tétes. » — « I] fit aussi une mer d’airain...» —
Apoc.
: « Et devant le tréne était comme
une mer, trans-
patente, semblable a du cristal.» — Cf. dans Emmazis (O. C., t. XXIII, p. 398), Vinterprétation de la « mer d’airain». La teleéture de ces textes a pu étre suggérée 4 Claudel par la féte de la Dédicace. Page 241.
1. Il semble que Claudel énuméte ici les personnes a qui il se reproche d’avoir fait tort. Frandon est le collégue qu’il remplaca lors de son premier séjout 4 Fou-tchéou et avec lequel il semble
1194
Cahier I]
avoir eu en effet des relations fort peu cordiales. Dubail, consul général de France 4 Shanghai lorsqu’il y arrive en 1895. De Rataud, il est question ici et 14 dans ses agendas de Chine; Héritte, Drogin,
Blanchot
sont donc
vraisemblablement
des
collégues de cette époque. — Marie, sans doute Marie Claudel, cousine germaine et marraine du poéte. — Peyrot est sans doute le personnage qui 4 Tien-tsin dénonga Claudel pour menées cléricales (voir p. 87, écrit Perrot). — Barack, voir plus haut, p. 239: « affaire Barackova»; Louise, sa sceur Louise de Massary. 2. S. Bonaventure, Breviloquium, 2° pats, cap. 1 C. — Entre
compositis et Nam quoniam omission d’une dizaine de lignes. — Trad. : «... La créature est l’ceuvre de la Trinité sous une triple causalité : efficiente, d’ou la créature recoit l’unité, le mode et la mesure; exemplaire, par laquelle se trouve dans la créature la vérité, la beauté et le nombre; finale, par Jaquelle se trouve dans la créature Ja bonté, l’ordre et la pesanteur. Et tout cela se retrouve dans toutes les créatures comme vestiges du Créateur, soit dans les choses corporelles, soit dans les choses spirituelles, soit dans les choses 4 la fois corporelles et spirituelles... « ... [Car], parce que le principe parfait dont découle la perfection de toutes choses agit nécessairement par lui-méme, selon lui-méme et pour lui-méme — il n’a besoin de rien en agissant hors de lui — il faut qu’il ait, a Pégard de toute créature, un dessein selon la triple causalité efficiente, exemplaire et finale. Il faut aussi que toute créature puisse étre comparée a la cause premiére selon cette triple causalité. Toute créature, en effet, est constituée dans l’étre par la cause efficiente, elle est conformée a Pexemplaire, elle est ordonnée 4 une fin. Par 1a, elle est une, vraie et bonne; conforme, belle et ordonnée; mesurée, distinéte
et équilibrée...» Trad. Bibliothéque Bonaventurienne, série textes, Ed. franciscaines, 1967 (Breviloquium, Ul, p. 57-59). 3. S. Jean Damascéne, De fide orthodoxa, lib. I, cap. 3 B (P. G., XCTV, col. 866) : « L’ange est une substance intelleGuelle toujours en mouvement. » 4. V. 130-132, trad. A. Masseron : « Et il dirigea ses pas dans
des
sentiers
d’erreur,
en
suivant
du
bien
de
fausses
images qui ne tiennent aucune de leurs promesses.» Ces vets sont d’une autre écriture que celle de Claudel. Ne serait-ce pas celle de Piero Jahier (voit note suivante)? Page 242.
1. Piero Jahier, écrivain piémontais, protestant, qui venait de traduire Partage de Midi, éd. de «la Voce», Florence, 1912. L’indication donnée dans les notes de Gide, p. 274, n’est peut-étre pas tout a fait exacte : Claudel est entré en relations avec Jahier,
Novembre-Décembre 1912
1195
part lettre, dés le début de 1912, lorsque celui-ci lui a demandé Yautorisation de traduire Parfage. Il a publié plusieurs articles sur Claudel, une traduction de VArt poétique... On trouvera dans : Piero Jahier, Con Claudel, Milan, 1964, certains de ses atticles, sa correspondance avec le poéte et une bibliographie.
2. « Mme Frappa dans Mara a joué avec énergie et tout a fait selon mon cceur » (lettre 4 Kalff, O. C., IX, p. 275). Elle avait remplacé Mme Iribe d’abord choisie pour ce réle (voir p. 239). Voir sur elle les notes du Cah. Cl. V. — Le siége social de PGuvre était 22, rue Turgot; les répétitions y avaient lieu dans ~des locaux de fortune, Lugné-Poe louant les salles pour ses spectacles. 3. « Tout scribe devenu disciple du Royaume des Cieux est semblable 4 un propriétaire qui tire de son trésor du neuf et du vieux,
4. 5. 6. , 7.
>>
« Or toutes ces choses leur atrivaient en figures. » « Les géants méme gémissent sous les eaux. » Suivent deux mots illisibles, noms de plantes, semble-t-il. Théme que Von retrouvera sous une forme burlesque
dans les dialogues de /’Oiseau noir; cf. « Richard Wagner » (Pr., p. 884-885). Mais ici il s’agit, semble-t-il, du sujet d’un des
poémes de Corona, « le Jour des cadeaux » (Po., p. 445). Page 243.
1. Pour cette représentation de /’Annonce et son succes, voit
Cah. Cl. V, p. 93 sq. : téations de Claudel, de Lugné-Poe et surtout de la presse. I] semble bien en effet qu’attendue avec une curiosité parfois ironique cette représentation ait été une « révé-
lation ». 2. Refrain chantonné pat Turelure dans /e Pain dur (Th. II,
p- 458).
3. « Donner ou jeter son ceeur a la gribouillette : se lier avec la premiere femme venue. » Littré. 4. Remedium amoris, v. 10; ce vets manque dans plusieurs éditions. Il semble signifier : « Ce qui est maintenant calcul fut auttefois élan. » 5. Voir « Ossements » (Pr., p. 970): «... il ne s’agissait de rien moins que du plus beau musée de Paris, le Musée d’ Anatomie comparée : et, depuis, 4 chacun de mes passages en France, je reviens visiter cette galerie sublime...» Pour les oiseaux, voir ibid., p. 978. Voir aussi « Fossiles », p. 997, le Triceratops, « la Légende de Prakriti» et Pr., p. 1527, des notes prises lors d’une visite 4 ce musée « la Galerie d’ostéologie ». 6. Sans doute Marguerite Sainte-Marie-Pertin, épouse du Dr Millon, sceur de Mme Claudel.
1196
Cahier II
7. Il, 17-18. Rétablir : Dileétus meus mihi et ego illi qui pascitur inter lilia. Donec aspiret dies et inclinentur umbrae. Trad. : « Mon bien-aimé est 4 moi et moi 4 lui. I] pait son troupeau parmi les lis, Avant que souffle la brise du jour et que s’évanouissent les ténébres...» Claudel reléve sans doute ce passage pour les analogies qu’il offre avec le « Cantique de l’ombre», dans la Cantate, achevée a cette date.
Ba Page 244. 1. Claudel notera le méme nom, avec une autre adresse, p. 267. 2. Le Turandot de Busoni (il avait d’abord écrit Busantini) ne
fut achevé qu’en 1917; il s’agit donc de l’audition d’un fragment symphonique. — Orphée, que Claudel entendra un peu plus tard, en juin, 4 Hellerau, est un des cing opéras qu’il cite dans « le Drame et la Musique » comme importants; il le citera a nouveau a propos des Troyens de Berlioz (Pr., p. 145 et 869). Page 24). 1. Voit p. 223, n. 4. Expression utilisée dans /e Pain dur. 2. Ibid. (Th. IL, p. 443). Sichel dit en parlant de Cotifontaine
« un complexe comme celui-ci» : « ALI. — On ne dit pas un complexe. — sICHEL. C’est drdle, je ne peux pas vous voit sans parler allemand. » 3. Cratyle, 390 d et e. Le passage cité est la conclusion, proposée par Socrate, de sa discussion avec Hermogéne. — Cette idée confirme pour Claudel ses propres vues sur les « idéogrammes occidentaux »; il se référe au Cratyle 4 ce propos dans « PHarmonie imitative » (Pr., p. 96); voir ibid., p. 52. 4. Voir Pétude de H. Leclerq dans le Did. d’archéol. chrét. et de liturgie, Letouzey, t. 1, 1907, col. 127-155 : « L’amulette gnostique trouvée en 1784 dans les ruines des thermes romains de Baden-
weiler
(Rheinland)
et la pierre conservée
a Vuniversité
de
Fribourg, qui porte au droit le serpent 4 téte de coq avec l’exergue IAQ ABPAZAS, au reverts la belle acclamation 408 MOI XAPIN APXEO IAQ». On appelle communément Abraxas des piertes taillées de ce gente. —« Liquide» est en surcharge. 5. Francis de Miomandre, ami de Berthelot, par qui Claudel Ya connu. Leur premiére rencontre remonte a 1905 (Suarés, p. 36). Dés 1902, Miomandre avait publié dans le Mercure de France un atticle sur Claudel; en 1907, une plaquette, Claudel et Suarés,
Janvier-Février 1913
1197
| Ed. de la Libre esthétique; enfin il venait de donner a /a Revue de Paris, a propos des teprésentations de /’Annonce, un article
« Claudel et le théatre idéaliste », qui parut dans le numéro du 15 février. 6. Chimiste anglais, prix Nobel en 1904. A fait des recherches sur les gaz. Claudel fait allusion 4 cette découverte que le radium dégage de V’hélium. 7. Variations sur un sujet, « Crise de vers», Pléiade, p. 363 :
« Les langues
imparfaites
en cela que plusieurs,
manque
la
supréme : penser étant écrire sans accessoites, ni chuchotement “mais tacite encore l’immortelle parole, la diversité, sur terre, des idiomes...» Claudel donne la suite. 8. Reinhardt, célébre metteur en scéne allemand, était alors
direéteur du Deutsches Theater de Berlin et du Kammerspiel, dans lequel il mettait en scene de nombreuses piéces frangaises ; il connait Lugné-Poe et le succés de /’Annonce Vincite a s’intéresser 4 Claudel (voir Cah. C/. V, p. 107 et 108). En fait, il ne
monteta jamais aucune de ses ccuvres, mais /e Livre de Chriftophe Colomb fut écrit sur une « commande» de lui (cf. Cah. C/. III, passim). Page 246. 1. Paul Loewengard, /es Magnificences de |’Eglise, Perrin, 1913, ps 40s nl. 2,\ébip.252, ni 1
2. Hellerau est une petite ville prés de Dresde ot Emile Jaques, dit Jaques-Dalcroze, avait fondé en 1911 un Institut d’art, qui fut plus tard transféré 4 Laxeubourg, prés de Vienne. L’ Annonce y seta teprésentée en 1913. — Alexandre von Salzmann, d’origine russe, atchite¢te et metteur en scene. — Jacob Hegner eSt le traduéteur allemand de Claudel; c’est lui qui fera adaptation de /’ Annonce. Pour Reinhardt et Hollaender, voir plus haut. —
Sur Hellerau, voir Cah. Cl. II, Cah. Cl. V et
Mes idées sur le théatre. 3. «
Quwils soient un comme
nous sommes
un. »
Page 247.
t. «Il a marqué les limites des peuples selon le nombre des anges de Dieu.» Il faut comprendre sec. Septuag., « selon les Septante » (secundum Septuaginta). La Vulgate donne en effet « selon le nombre des enfants d’Israél ». 2. Deut., XXXII, 10: « Il l’a trouvé dans une terre déserte, dans un lieu affreux et dans une vaste solitude. » 3. En réalité Gen., I, 19-20 : « Le Seigneur Dieu, ayant formé de la terre tous les animaux terrestres et tous les oiseaux
1198
Cahier IT
du ciel, il les amena devant Adam, afin quwil vit comment il les
appellerait. Et le nom qu’Adam donna a chacun de ces animaux est son nom véritable. — Adam appela donc tous les animaux dun nom qui leur était propre, tant les oiseaux du ciel que les bétes de la terre. » 4. Sur Louis-Prosper Claudel, voir H. Guillemin, « Claudel avant sa conversion», Revue de Paris, mai-juin 1955; voir aussi Cah. Cl. I, p. 112 sq. — Cf. Lettre a Gide (p. 210) : « Non, mon pauvre pére ne s’est pas confessé avant sa mofrt, et c’est un grand remords pour moi. Si j’étais venu plus tdt, peut-étre l’aurais-je décidé a remplit ces devoirs, comme il en avait manifesté l’intention...» (22 mats 1913). Corona, «la Présentation» (Po., p. 385): «Il y a un enfant malade a la maison et j’attends de mauvaises nouvelles de mon pérte. » 5. Sut Camille Claudel, voit supra, p. 104, n. 1. 6. Voir Seigneur, apprenez-nous a prier, «la Séquestrée »
(ORCS
a3)
7. « Cest arbuSte, dit Cartoufle, porte fruit de mesme nom, semblable 4 truffes, et, par d’aucuns, ainsi appelé » (O. de Serres, Théétre d’agriculture..., V1, 10). Cf. Huguet, Dit. de la langue du XVI? siécle.
Page 248.
1. Claudel a déja utilisé image dans sa « Note sur les Anges »; il compare leur ation « 4 ce phénoméne chimique appelé cazalyse ot un élément par lui-méme inerte détermine du seul fait de sa présence Vinter-action de deux éléments autrement l’un 4 Végard de l’autre impuissants » (O. C., XX, p. 372). 2. En réalité
LX XVI, 17: « Les eaux vous ont vu, 6 Dieu,
les eaux vous ont vu et elles ont eu peur et les abimes ont été troublés. Redoublement de fracas des eaux, les nuages ont fait retentit leur voix. [...] La mer fut votre chemin et les grandes eaux Vos sentiers et vos traces ne seront point connues. » Liturgie du Jeudi-Saint. 3. Ps. CLX, 7: « Il boira de l’eau du torrent dans le chemin. » 4. Habacuc, III, 16 : « Et que je me joigne 4 notre peuple prét a marcher avec nous.» Liturgie du Jeudi-Saint. 5. Trad. de dom Guéranger : «O Dieu dont esprit était porté sur les eaux a l’origine du monde, afin que dés lors cet élément congit la puissance de sanétification [...] afin qu’un méme élément devint mystérieusement la cessation du péché et le retour a Ja vertu [...]. Qu’il daigne féconder par l’impression secréte de sa divinité cette eau préparée pour la régénération des hommes, afin que cette divine fontaine ayant concu la sanctification, on voie sottir de son sein trés pur une race toute
Mars- Abril 1913 céleste, une créature renouvelée; et que la grace, comme
1199 une
mére, réunisse dans un méme enfantement ceux que le sexe distingue selon le corps, ou l’4ge selon le temps [...] qu’elles recoivent la vertu de purifier les Ames. » Page 249. 1. P. L., t. LX XVI, col. 1170. Trad. dom Guéranger : « Que signifie la gauche sinon la vie présente? Que marque la droite sinon la vie éternelle ?De la vient qu’il est écrit dans le Cantique ~ des Cantiques : Sa gauche est sous ma téte et il m’embrasse de sa droite.» Commentaire du récit évangélique ot il est dit qu’en entrant dans le tombeau, les saintes femmes « virent un jeune
homme assis 4 droite ». 2. V. 97-102. Trad. Masseron
: « La plus douce mélodie
qui résonne ici-bas et attire le plus notre 4me 4 soi paraitrait un nuage qui tonne en se déchirant, si on la comparait au son de cette lyre, qui vint couronner le saphir le plus beau dont s’orne
én s’azurant le ciel le plus lumineux. » 3. Claudel cite Arnold Bennett, dans son discours 4 Cambridge, parmi les romanciers anglais qu’il a aimés (Pr., p. 1324). 4. Claudel a d’abord écrit : Ce que je pense est la seule chose qui existe, 5. « Il y ena une pour toi. »
CAHIER
III
Page 253.
1. Sur cette tournée de la troupe de Lugné-Poe, voir Cah.
Cl. V, p. 111. A Francfort, la représentation se termina en effet pat le couronnement du poéte sur la scéne. Claudel assista également a la représentation donnée 4 Strasbourg et en fut moins satisfait qu’il ne patait ici; voir op. cit., p. 113 et 187 sq.
2. Le Dr Biicher avait fondé la Société dramatique de Strasbourg; il animait des cercles de culture frangaise. Dans une lettre du 27 mars 1914, Claudel le désigne comme un « homme vtaiment extraordinaire», « le plus compétent que je connaisse dans les maladies nerveuses». Il presse J. Riviére de le recommander a Gide, 4 la suite de la crise provoquée entre les deux amis par la publication des Caves du Vatican (Gide, p. 232).
1202
Cahier II
—« Givago», biffée.
addition postérieure 4 la place de linitiale B.
4. Cette derniére phrase a été éctite, semble-t-il, beaucoup plus tard, en marge et en travers de la page. — II faut noter que Lumir, dans /e Pain dur, verta ainsi Turelure : « Je vous trouve Pair d’un mouton. [...] Et le bas de la figure est si drdéle! / Vos deux lévres sont comme des marionnettes qui se poursuivent... » (Th. I, p. 431). 5. Guy Coquille de Romenay (1523-1603), jurisconsulte. Il définit les droits des Etats généraux, posant en principe qu’a eux seuls appartiennent la souveraineté et le droit de disposer de la couronne. Son traité des Libertés de |’Eglise gallicane lui avait été dérobé et ne fut retrouvé que vers le milieu du xvué siécle. Il a écrit aussi un dialogue Sur /es causes de la misére en France et plusieurs piéces de poésie latine sous le titre Guidonis Canchylii Romenaei Nivernensis Poemata (Nevers, 1599). 6. Trad. : « Les eaux vous ont vu, 6 Dieu, les eaux vous ont
vu.» 7. Voit p. 253.
Page 257.
1. Dans cet article, Albert Dufourcq rend compte des travaux de Pierre Duhem, qui « établissent, avec preuves a l’appui, que les principes sur lesquels repose la science moderne ont été formulés avant Newton,
avant Descartes, avant Galilée, avant
Copernic, avant Léonard lui-méme, par les maitres de |’Université de Paris, au cours du xiv® siécle». Le passage cité par Claudel est a la page 355.
« Comme le veut Aristote » est ajouté par Claudel. Avant « ce repére», il a omis lincise : « On cesse donc de démontrer par le mouvement du ciel Pimmobilité de la terre.» Les points de suspension remplacent : « j’entends Vespace vide qu’ils comblent. » « Cette théorie scotiste...» est en note, précédée de la référence : Johannes Canonicus, OQuaestiones super VIL Physicorum libros Aristotelis, lib. IIL, q. 1, art. 1-3; lib. IV, q. 5, ad 2. Claudel
écrit « theses » au lieu de ¢héories (de M. Bergson). Il a omis la fin de la note : « Elle est rejetée par Guillaume d’Occam et Grégoire de Rimini; ceux-ci gardent seulement les théories de Scot touchant le rdle du lieu dans le mouvement local, l’immobilité
du lieu, la localisation de l’orbite supréme. » Page 258. 1. Dans
le méme
numéro
de
/a Revue des Deux
Mondes,
article faisant suite 4 celui de Dufourcq : « Fin de la domination franque en Syrie. Prise de Saint-Jean-d’Acre en l’an 1291 par
Juillet- Aokt 1913
1203
Yarmée du soudan d’Egypte», par Gustave Schlumberger, P. 379-414. — Remarquer erreur de date : c’est le 2 odtobre 1187 que Jérusalem fut reprise par Saladin; la bataille de QarnHattin eut lieu le 4 juillet. 2. Tycho-Brahé, d’origine danoise, astrologue de la cour de GuStave-Adolphe et de Christine. Rodolphe II le fit venir a Prague ot il mourut le 13 o€tobre 1601. Il est enterré dans Péglise Sainte-Marie du Tyn. Kepler fut son éléve. 3. Voir Jacques Leclercq, Vie du Pére Lebbe, Casterman, 1955, p. 115 : « Le doéteur Chabaneix avait délaissé la pratique reli_ gieuse, mais il était extrémement dévoué a4 toute misére...» L’auteur rapporte le récit fait par le Pere Lebbe de la conversion du Dr Chabaneix. 4. Voir sur ce theme
« Préface
a un
livre técent»
(Po.,
P- 978). Page 259.
1. Un mot illisible. ?
2. Cette citation et les suivantes sont tirées de la Somme, I a,
q. 50, art. 1, obj. 1. Claudel se remet 4 |’étude de l’angélologie thomiste (cf. p. 139): « L’ange est une substance intellectuelle toujours en mouvement. » 3. La seconde phrase seule est de saint Ambroise, De Spiritu Sanéfo, lib. I, cap. vit. La premiére résume ce qui dans la Somme précéde la citation de saint Ambroise : « Toute créature est circonscrite par les limites déterminées de sa nature... Méme si cettaines ne sont pas contenues dans l’espace corporel, elles n’en ont pas moins une substance citconscrite. » 4. Distin@tions de Boéce, #bid., art. 2, ad 3 : « Ce par quoi une chose est, et ce qu’elle est. Etre et le fait d’étre. » — Intelligentia est finita superius,
ces
mots
seuls
sont
d’Aristote,
De
causis,
prop. XVI. La suite est de saint Thomas, ibid., ad 4. « L’intelligence est limitée par en haut, en tant qu’elle recoit son étre d’une
intelligence supérieure; et elle est illimitée par en bas, en tant qu’elle n’est pas regue dans une matiére. » 5. Trad. : « Il n’y a pas d’obSstacle a ce que l’ange soit affecté a un lieu déterminé par le contaét de sa puissance, de méme que le cotps occupe un lieu déterminé par le contact de son étendue. » 6. Pseudo-Denys, De coelesti hierarchia, cap. 11. Cité in I a, q. §4, art. 3, sed contra. Trad. : « On distingue dans les anges Vessence, la puissance et l’aéte. » 7. Id., De divinis nominibus, cap. 1v; cité ibid., gq. 55, art. 1, sed contra. Trad. : « Les anges sont illuminés par les raisons des
choses. »»
1204
Cahier IIT
Page 260.
1. « Les “espéces”’, pat lesquelles les anges comprennent, ne leur sont pas données pat les choses, mais leur sont conaturelles... Ainsi leur intelligence acquiert sa perfection par l’illumination intelle€tuelle, au moyen de laquelle Dieu leur donne a la fois les ‘“‘espéces” des choses qu’ils connaissent et leur nature intelligente. Aussi bien, dit saint Augustin, les créatures inférieures aux anges sont créées de telle sorte qu’elles sont d’abord connues comme créatures raisonnables, et ensuite comme appattenant a tel genre» (S. Thomas, Somme théol., 1, question 55, att. 2). Sur la page 13, Claudela collé une photographie du David et
Goliath de la cathédrale de Reims. I] a écrit en dessous : « David ayant le soin d’abattre Goliath le mesure et sa main pése la pierre exacte. » Cette note tente d’expliquer l’attitude de David, dans ce groupe. 2. Boringe est le nom de la propriété, située a MenthonSaint-Bernard, proche du lac d’Annecy, qui appartint 4 Taine; c’est la que Taine est enterré. 3. Voir Cah. Cl. V, p. 124. Claudel voulait entretenir LugnéPoe d’Hellerau et aussi des projets de Gaston Baty; voir p. 288,
iy W/6 4. Voir p. 230.
5. Hopital psychiatrique ou est internée Camille. Cf. p. 247. 6. Le 27 aoat, Claudel écrira une longue lettre a Frizeau (Jammes, p. 262) pour lui raconter cette entrevue 4 laquelle assistait ’abbé Daniel Fontaine. L’idée de cette coopérative de priéres date de 1909; Claudel en formulait le but dans une note rédigée a Notre-Dame de Liesse le 22 septembre et envoyée a Jammes et a Frizeau (Jammes, p. 166). Le P. André Blanchet (ibid., p. 20) a défini les buts de cette association destinée aux
« intelle€tuels convertis » et donné des précisions sur son développement : une centaine de membtes vets 1928, et sa disparition.
« Cette modeSste association, qui se développa entre deux condamnations, celle du Si//on et celle de /’Aétion francaise, en subit les remous. L’absence, voulue, de tout ecclésiastique dans le comité direfteur (composé de Paul Claudel, G. Duhamel, G. Frizeau, Ch. Henrion et Fr. Jammes) pouvait inquiéter avant
la codification de |’ “A&tion catholique” et rappelait l'un des griefs élevés contre /e Sil/on. Claudel tenait donc beaucoup a une approbation de la hiérarchie, et obtint celle du cardinal Amette. Mais la condamnation de /’Adion frangaise amena association 4 se dissoudte : des laics ne se reconnaissaient en effet aucune autorité pour s’exclure les uns les autres au nom du dogme ou de la morale. Claudel en vint 4 penser que peut-
Aout-O fobre 1913
1205
étre “la conception méme de notre société était erronée”’. Luiméme proposa de la laisser s’éteindre. » 7. Saint Louis. Cette note pourrait trés vraisemblablement dater le « Chant de la Saint-Louis» (voir Po., p. 451 et notes).
8. Claudel note la féte liturgique. Page 261. 1. Versets
48-52
: « Rappelez-vous
ce qu’est ma
vie, car
est-ce pout le néant que vous avez créé les enfants des hommes. _[...] Souvenez-vous, Seigneur, de ’opprobre de vos serviteuts, je Pai tenu caché dans mon sein, il venait de nations nombreuses. Souvenez-vous
du
teptoche
de vos
ennemis,
Seigneur,
du
reproche qu’ils ont fait au sujet de votre changement a l’égard de votte oint. » 2. Au-dessus de « seigneur », et sans biffer ce mot, Claudel a
écrit « spectateur ». 3. Voit p. 253, n. 2, et 279.
' 4. L’abbé Fontaine et probablement Massignon. 5. Trad. : « Savoir vraiment, c’est connaitre les causes. » Page 262.
1. « Mon cher Suarés, je vous écris tant bien que mal, d’une main privée du secours de l’autre. J’ai rapporté de mes vacances un joli panatis qu’on me charcute depuis un mois. C’est un joli spectacle » (Swarés, p. 179, 16 septembre 1913). 2. Cf. Art poétique (Po., p. 159 sq.). « Dela connaissance chez les étres vivants. » 3. « Tristan [...] entre les bras de son gros édredon d’Isolde... » (Suares, p. 180).
4. L’ Annonce en allemand. On sait d’ailleurs que ce fut une adaptation de la piéce, transposée dans le Moyen Age allemand, qui fut jouée. 5. « La premiére représentation de /’Annonce a été superbe et aprés la répétition générale qui avait beaucoup cloché nous ne nous attendions pas 4 un pareil résultat. La Violaine a été 4 peu prés supportable, Dietrich qui jouait Mata absolument magnifique, les autres trés bons, surtout le Pere...» (Lettre a Lugné-
Poe, Cah. Cl. V, p. 129). La presse fut plus sévére que Claudel, qui écrira 4 Milosz Marten : « La presse avait été assez dure envets les aéteurs et injustement, je crois, cat je les avais trouvés bons » (ibid., p. 251). Decarli tenait le rdle du Pére, Bbert celui de Pierre de Craon. Claudel admire beaucoup Marie Dietrich, « une aétrice admirable qui a des détentes de panthére » (a4 Gide, De2zLt).
1206
Cahier LI
6. Johann Georg de Saxe, frére du roi, avait épousé MarieImmaculée de Bourbon (branche de Sicile-Caserte); ]’ambassadeur est Jules Cambon, alors en poste 4 Berlin; le prince Lobkowitz et la comtesse Orczych venaient de Prague; pour Neipperg, voir p. 255. Page 263. 1. « M. d’Estournelle de Constant, 3, rue de Valois, a Paris, qui dirige une caisse de secouts artistique » (Jammes, p. 275, 276).
2. Paul Adler traduisait alors Téze d’Or. 3. Dan., III, 60 : « Toutes les eaux qui étes au-dessus du ciel, bénissez le Seigneur. [...] Toutes les vertus du Seigneur, bénissez
le Seigneur: » 4. Ps. CIII, 2 : « Enveloppé de lumiére comme d’un vétement.» La suite « enveloppé de douleur...»» est de Claudel. 5. Gaillard, vice-consul; Pingaut, attaché au consulat.
6. Claudel avait rencontré Alexis Léger chez Jammes en 1905 : « Un délicieux enfant, écrit Frizeau, un esprit trés noble et grand, je pressens, avec un cceut alourdi de cette mélancolie adolescente qui n’ose et ne sait vivre et choisit » (Jammes, p. 95). Aprés une le&ture des Muses que lui fit G. Frizeau le 17 décembre 1906, Alexis Léger, étudiant en droit 4 Bordeaux, écrivit 4 Claudel
qui lui répondit « de son mieux ». Une seconde fois en décembre 1908 (ibid., p. 145). Les premiers poémes d’A. Léger parurent dans la N.R.F. en aout 1909. Il entra dans la carriére diplomatique en 1913 et Occupa son premier poste au consulat général
de France 4 Hambourg. 7. « Hambourg [...] un ciel maritime et boréal ob se dressent de grands clochers verts pareils 4 des aiguilles de glace » (Gide, p. 213, 13 novembre 1912). Page 264.
1. Le 19 oétobre eut lieu la derniére représentation de /’Annonce. « Dietrich, superbe dans le réle de Mata, jouera Violaine et je suis stit que ce sera trés cutieux » (Cab. Cl. IV, p. 131). 2. La fin du nom eét illisible.
3. P. Comert, rendant compte dans /e Temps des représentations d’Hellerau, le 7 o€tobre, avait écrit, en évoquant le « succés
allemand » de Claudel : « C’est 14 un fait incontestable qui fournit une excellente formule pour juger le talent évidemment supérieut, mais un peu déconcertant de M. Paul Claudel. Son ceuvte est de celle que le public littéraire de Berlin apprécie plus ais¢ment et gotte méme plus complétement, semble-t-il, que le public de Paris » (Cah. Cl. II, p. 272).
Offobre-Novembre 1913
1207
4. « C'est pas non plus que je crache sur le Beaune, mais c’est un vin qu’il faut boire seul 4 mon Age», dit Turelure, /e Pain dur (Th. I, p. 444). — Avant cette note, deux lignes raturées : Derniére promenade en auto avec Gautier le 13. 5. Note inspirée sans doute par ces lignes du 3¢ Sermon pour l’Epiphanie : « Par cette élévation [au-dessus de tout ce qui n’est pas Dieu], le fond intérieur [de l’-homme] est soudain envahi par un ardent désir, et, par ce désir, l’>homme eét de plus en plus dépouillé, débarrassé de toute dissemblance, c’est-a-dire de tout __ ce qui n’est pas Dieu, et ce désir va ainsi grandissant, et l’>homme s’éléve au-dessus de lui-méme, il se surpasse, et il n’est pas rare que, par ce contac avec le fond dénudé de tout, le désir pénétre jusque dans la chair et dans le sang, jusqu’a la moelle des os » (Tauler, CEwores completes, 8 vol., Paris, Tralin, 1911-1913, t. I,
p- 409). La parenté de cette note avec la précédente et la suivante peut indiquer la le€ture d’un ouyrage, non identifié, ot Claudel aurait relevé ces trois citations. 6. Henri de Berg, dit Henri Suso, théologien dominicain né 'a Constance en 1295, mort 4 Ulm en 1366. 7. On trouvera dans le Cah. C/. III plusieurs lettres 4 Darius Milhaud sur ce probléme des tapports de la poésie et de la musique, ou plutdét du passage de Pune a l’autre (p. 36 sq.). Claudel voudrait pour |’Agamemnon d’Eschyle des solutions nouvelles. Darius Milhaud est d’ailleurs venu assister aux représentations d’Hellerau en septembre. 8. L’Enéide, Il, 21-23; déja noté p. 240. Il s’agit de Ténédos, ile située en face de Troie. Claudel traduit 4 peu prés le vers qu’il cite. Cf. Protée, Il, 2 (Th. I, p. 339): « ... ces grands tas de briques noircis qu’on voit en face de Ténédos. » Page 265. 1. La Chanson de Raoul de Cambrai, éd. Meyer et Longnon,
Paris, 1882, Société des Anciens textes frangais, laisse 130, épisode de la bataille de Saint-Quentin : « Par Dieu, Raous, ja mais ne t’aimerai / De ci que mott et recréant t’aurai... » 2. Aliscans, éd. Quessatd et de Montaiglon, Paris, Franck, 1870, p. 25, V. 812-867. 3. Ratute : payer. 4. Ps. LX XVII, 66 : « Il frappa ses ennemis au dos. » 5. Verset 17: « Israél a regu du Seigneur un salut éternel. » — 15 :« Vraiment vous étes le Dieu caché...» — 19: « Je n’ai pas
parlé en secret.» — 20 : « Ils sont dans Vignorance, ceux qui portent un bois sculpté par eux et qui prient un Dieu qui ne peut sauver.» — 23: « J’ai juré par moi-méme; une parole de justice est sortie de ma bouche et elle ne sera pas révoquée. »
1208
Cahier III
Page 266. 1. Versets 17-18 : « Il lance sa glace par morceaux; qui peut résister devant son froid? Il envoie sa parole et il fond ces glaces; son vent souffle, les eaux coulent. »
2. Claudel a lu ce texte dans un article d’Henri Bremond sur Lucie Faure-Goyau, /e Correspondant, 25 novembre 1913, p. 793 : «Mme Goyau avait [...] plus que de l'amour, une vétitable dévotion pour la lumiére. Attentive aux moindres indications de la Providence, son nom de baptéme lui commandait déja cette dévotion magnifique. Que n’ai-je pu lui faire connaitre une abbesse du dix-septiéme siécle que j’ai rencontrée récemment, Luce de Lux [sic], au nom deux fois lumineux : “La petsonnalité humaine...” eéc.» C’est Claudel qui écrit crystal et souligne. Au lieu de « l’amout isolé », lire « amour indt ». Voir Véloge de Luce de Luxe, abbesse de Saint-Ausone d’Angouléme, dans Eloges de plusieurs personnes illustres en piété de l’ordre de Saint Benoit décédées en ces derniers siecles, par la Mére de Blémur,
Ed.
de la revue
Mabillon,
abbaye
Saint-Martin
de
Ligugé, 1927. Luce de Luxe est morte le 7 avril 1656. 3. Ps. LX XIX, 13 : « Pourquoi avez-vous rompu sa cloture, de sorte que tous ceux qui passent dans le chemin la pillent? » Cette note recoupe les réflexions de Claudel a propos du probléme juif, dans /e Pain dur. 4. Le P. Barge, O. P., dire&teur de Ja Revue des Jeunes, avait
adhéré a la « Coopérative de priéres » (voir p. 260, n. 6). 5. Avant « m’indiquait», deux mots raturés : me rappelait, wminvitait. Page 267.
1. Claudel avait d’abord écrit : /a lampe sacrée des affaires. 2. Souvenir, semble-t-il, de la lutte de Jacob avec l’Ange dont Jacob sortit boiteux. Voir /a Messe /a-bas 4 propos de Rimbaud (Po., p. 512), la signification que Claudel donne 4 la blessure dont mourut Rimbaud : « L’équilibre de ces deux jambes en marche, Dieu lui-méme te 1’a retranché. »
3. Trad. : « L’glise, le peuple uni au prétre. » 4. Verset 12:« Si j’ai faim, je ne te le dirai pas.» — 16-20: « Mais Dieu dit au pécheut : pourquoi énuméres-tu mes com-
mandements, pourquoi as-tu mon alliance a la bouche, toi qui hais la discipline et qui as rejeté mes paroles derriére toi! Si tu voyais un voleur, tu courais aprés lui et tu mettais ta part avec les adultéres; ta bouche a été remplie de malice et ta langue ourdissait la fraude. Tu t’asseyais pour parler contre ton frére, tu tendais des pi¢ges contre le fils de ta mére. Voila ce que tu as fait et je me suis tu. »
Décembre 1913- Janvier 1914
1209
5. Jud., XVI, 18 : « Les pierres se fondront comme de la cite devant votre face. »
6. Cf. p. 244. Page 268. 1. Les Thierry étaient des cousins éloignés de Claudel. La grand-mére de Paul Claudel était née Thierry. 2. CEwores de Lavoisier,
Paris, Imprimerie
impériale, 3 vol.,
1864, t. I, p. 2. Compléter : « ... et que, quelque certains que _fussent les faits, quelque justes que fussent les idées qu’ils - auraient fait naitre, ils ne transmettraient encore que des impressions fausses, si nous n’avions pas des expressions exactes pour les rendre. » Page 270. 1. Coupure de journal collée sur toute la longueur de la page. « Voila les savants» est de la main de Claudel, au crayon, en
rnarge, en bas et a gauche.
2. Epitre aux Romains, I], 2.
1914 Page 271.
1. Riviére annonga lui-méme a Claudel sa communion de Noél. La réponse de Claudel est la derniére lettre publiée de leur correspondance : 5 janvier 1914. 2. L’adresse indiquée est celle du noviciat des Salésiens de dom Bosco. 3. Voit pour ces teprésentations de /’Echange la correspondance Claudel-Copeau et ses notes, Cah. Cl. VI. 4. Ville o& vécut Anne-Catherine Emmerich.
Page 272. 1. Claudel appellera acte III, scéne 1.
Mortdefroid
2. Dans la N.R.F. de mars
le notaire
du
Pain
dur,
1914, Henri Ghéon consacre un
atticle 4 Dérouléde. Le livre de Jér6me et Jean Tharaud, Paul Dérouléde, Ernile-Paul, venait de paraitre. 3. Trad. : « Qu’il ne m’arrive pas aprés avoir perdu le monde de perdre aussi le ciel. » 4. «comme on se purge...» a été ajouté p. 35 du manuscrit. Claudel avait utilisé la « formule » dans la premiere rédaction du Pain dur, U1, 1 (Th. I, p. 1449).
1210
Cahier II
5. « Issachar est un ane robuste », dit Jacob (Gen., XLIX, 14).
6. Dans la N.R.F. du 187 mars 1914, p. 498, Claudel publiera une note nécrologique sur Wolf Dohrn. On la trouvera presque intégralement reproduite dans Cah, Ci. III, p. 272. Page 273.
1. C’est Marten qui avait traduit /’Annonce ; sur ces représentations et les discussions qui suivirent, voir Particle de Dag Mar, « 1’ Annonce faite a Marie en Bohéme»,
Rencontres,
Paris, 1965,
n° 1. Sur Zdenka Braunerova, voir p. 111. 2. « Nijinsky» (Pr., p. 385) : « Mais on ne gagne pas la couronne de France en cassant des cailloux et le mérite jamais ne méritera la grace. » 3. Sans doute la Dietrich (voir p. 262 et 264). 4. Sut la page 37, Claudel a collé une photographie de /a Mort de la Vierge, portail Nord de la cathédrale de Senlis. Donné par Sylvain Pitt (de la main de Claudel). Page 274.
1. Claudel a d’abord écrit : « Podeur du corps qui grille... » 2. Marie d’Agtreda (1602-1665), abbesse du monastére franciscain de lImmaculée-Conception a Agreda, en Castille (CEwvres, Versailles, 1817, t. XXX, p. 637-640; t. XLI, p. 92). La Mistica ciudad de Dios, parue 4 Madrid
en 1670, donna lieu 4
plusieurs controverses. La sévétité sans mesure de Bossuet pour Marie d’Agteda est connue. 3. Voit p. 98, n. 3. La Vie de Sainte Hildegarde (1108-1179),
thaumaturge et prophétesse du XII° siecle, écrite par les moines Théodoric traduite en frangais et Son ouvrage le plus vias Domini...), P. L., a été donnée en 1909,
et Godefroy, contemporains de la sainte, a été publiée en 1907, Paris, Chamonal. — important est Scivias (abréviation de Sei CXCVII, col. 383-738. Une traduction en Chamonal, 2 vol. 4. Luc, XXIV,
29 : « Reste avec nous, Seigneur, car le soit
tombe. » 5. Sceut Marie de la Croix est le nom que prit en religion Mélanie, la bergére de La Salette. On sait qu’un chapitre de Ax milieu des vitraux de I’Apocalypse fut publié sous le titre Je Sywbolisme de La Salette. Déja en 1912 (Jammes, p. 238), Claudel parle 4 Frizeau de La Salette, 4 propos d’un pélerinage qu’y a fait Massignon.
Janvier-Février 1914
1211
Page 275. 1. Cf. Odes, UI (Po., p. 262): « ... comme un prétre couvert de
_Yample manteau d’or [...] mélé 4 ce groupe au cheeur qui officie dans le soleil et dans la fumée...» et « ’Offrande du temps » (écrit en 1914 4 Hamboutg) : « Mais vous, prétres. [...] Quand
vétus d’or et de lin 4 l’autel... » 2. Barres publiait a cette époque, dans /a Revue des Deux Mondes (que lisait Claudel), une série d’artticles sur « la Grande pitié des églises de France» (décembre 1913-février 1914). Cf. Odes, V (Po., p. 288) : « ... la Statue abattue de Notre-Dame... »
3. Ps, CXVIII, 54 : « Vos préceptes sont le sujet de mes cantiques dans le lieu de mon exil. » 4. Trad. :« Mais vous, Seigneur, vous étes parmi nous et votre nom a été invoqué sur nous. »
5. M. signifie sans doute « Méditations». Il peut s’agir de projets soit pour le bulletin de la « Coopérative de priéres », soit pout le Journal de Clichy (bulletin paroissial de ’abbé Fontaine) auquel Claudel collabore en secret depuis un an. ' 6. De la main de Claudel en haut de la page. Le texte est une coupute de journal collée. — Claudel a longuement parlé du Fengshui dans « les Superstitions chinoises» (Pr., p. 1076) : «... une sorte de physiognomonie de la nature», dans Sous /e Signe du Dragon (O. C., t. IV). Il développera longuement ses ptoptes réflexions sur ce théme dans la derniére des Conversations dans le Loir-et-Cher. Page 276. 1. Trad. : « Je pourtsuivis : — “Quand on a commencé 4 parler de la construction des chemins de fer, vous vous tappelez que les gens ont dit que le fengshui de chaque endroit serait détruit. Des esprits sacrés seraient dérangés, des dragons mis en colére améneraient
la ruine; des fées a la bonne
influence
déserteraient l’endroit et le priveraient 4 tout jamais de biens et de bonheur. Alors, quand vous étiez chez vous 4 entendre de tels propos, qu’en pensiez-vous ?” « Il sembla réfléchit avec soin avant de répondre comme s’il fouillait pour retrouver sa véritable pensée et ses souvenirs en cette affaire et me donner une réponse exacte. Il dit alors : — « “Durant notre enfance au pays, notre vieux maitre aimait nous donner des explications sur le fengshui. Je sais que des gens parlent des fées et de tout le reste et que les uns croient en toutes ces créatures et ces esprits et que d’autres n’y croient pas; mais vous avez tort de ticaner quand les gens parlent du fengshui. Cela garde une signification profonde. Le maitre nous disait volontiets que le lieu de notre naissance et de notre vie était
1212
Cahier III
gardé et protégé de tout mal par le ciel; cet endroit devait aussi aux travaux des hommes de bien qui avaient vécu la avant nous
d’étre devenu hospitalier et pourvu de tout ce qui est nécessaire pout rendre la vie agréable. Les inondations vinrent a plusieurs reprises, mais c’était encore notre chez nous et l’on nous apprenait 4 le considérer comme bénéfique. En un mot, le sens de fengshui est le suivant : aucun lieu n’est trop pauvre ou trop petit du moment que les gens y vivent bien et gardent les régles de la vie; agissent avec mutuelle justice et préservent avec respect ce qui leur a été transmis; alors, certainement, a une génération ou autre, il va pousser la, aussi certainement et normalement que les arbres ou les fleurs, quelque grand universitaire ou juriste dont le renom et la gloire proclameront au monde la vertu de son pays natal. Ceci s’est vérifié maintes fois au cours de notre histoire; quelques-uns des hommes les plus illustres et les meilleurs de notte pays, 4 chaque période, sont nés et ont passé leuts jeunes années dans de petits villages comme celui d’ou je viens. Pourquoi cela? Simplement parce qwun grand homme est un fruit qui pousse sur Varbre des générations; l’arbre doit grandir dans le calme et étendre ses rameaux en paix. Toutes les bonnes choses que l’on nous a appris 4 préserver et 4 transmettre ensuite 4 nos enfants ont poussé de cette maniére; nous étions pauvres, mais nous avions
nos relations de famille et cela voulait dire joies partagées et assistance mutuelle dans la peine; nous avions nos fétes villageoises et nous les maintenions et les passions 4 la maniére d’autrefois, comme
on nous avait appris; la terre était cultivée
avec le méme soin que jadis; et pour le reste nous prenions notre part des beaux jours et des tempétes, du soleil et de la pluie, qui nous venaient au rythme de la nature. C’était tout ce que nous
avions pour notre vie; si vous
bouleversiez
ces choses,
nous serions détruits et rendus étrangers dans notte propre pays. « “La loi des compensations. — Vous savez vous-méme que les maniétes de vivre anciennes et les nouvelles ne cohabitent pas; ainsi, malgré tout ce que les nouvelles apportent en fait de bien-étre, de savoit ou de richesse, elles détruisent indubitable-
ment, méme si ce n’est pas immédiat, tout ce qui liait ensemble les lieux et les gens. Une fois que la mutation a commencé, rien ne peut restaurer le vieux systtéme — il s’en va A jamais et les hommes qui viendront part la suite ne pourront jamais étre les mémes que ceux qui ont surgi et poussé dans |’atmosphére d’auttrefois. Le source de la grande ame eét tarie; arbre qui produisait des fruits de pensée paisible et de calme raison, qui aurait pu donner sa patt de grands et nobles personnages pour conduite le peuple, est cassé, ou bien ses branches sont desséchées ou encore ses tacines empoisonnées. Toute la vie de ce
Février-Mars 1914 lieu
va
se flétrir, méme
si les habitants
1213 et les maisons
se
multiplient en nombre et en richesse; le fengshui de ce lieu est 42?
ruiné’’. »
Page 277.
1. Wolf 2. _ bable
Lier cette note 4 celle de la page 273 sur l’incinération de Dohrn a Lausanne. Un peu plus loin, Claudel cite le P. Sertillanges. Il est proqu'il note ici les noms des deux Elisabeth en lisant /a
- Charité, choix de textes précédé d’une étude, Librairie Renouard, H. Laurens, 1913, ot le P. Sertillanges écrit (p. 13) : « [On
tacontait que] Elisabeth de Hongrie, puis Elisabeth de Portugal avaient vu des pains ou de l’or se changer en roses dans les plis de leur manteau, pour que ne fussent point dévoilées leurs bonnes ceuvres.»
Toutes deux mariées, veuves et tettiaires de
Saint-Frangois. Il est probable que la note précédente est inspirée par le méme ouvrage. ' 3. Eccl., IV, 12: « Un triple cordon se rompt difficilement. » 4. Laboureau, /a Messe au cours des ages. 5. Cf. « Saint André», Corona (Po., p. 422) : le « poisson qui reluit ». 6. Cf. le Pére humilié (Th. I, p. 541): « Tant que je suis seule, je suis comme quelqu’un qui n’a point de corps [...] / Seulement, si quelqu’un vient, / Me prend et me serre entre ses bras, / C’est alors seulement que j’existe dans un corps.» Cf. ici p. 324 et Ap fg OS 7. Cette phrase n’est pas une citation textuelle. Claudel énonce en bref la thése biranienne de la connaissance du moi dans effort. 8. Ces quatre mots sont ajoutés en surcharge, apres coup. Page 278. 1. « Cest Léon Werth», ajouté postérieurement : encre et plume différentes. Léon Werth, qui « aboyait» en effet dans les Cahiers d’aujourd’hui, fondés en o€tobte 1912, contre les « bourgeois», les «cléricaux», les écrivains de /’Aéfion frangaise, Maurice Barrés, etc., avait publié dans cette revue en décembre
1913 (n° 8, p. 394) un article sur /’Echange. On y lisait, entre autres sottises : « M. Paul Claudel est Pécrivain des grammairiens
et des belles dames d’art. [...] C'est le type méme du traseur de | sous-préfecture qui vous saisit par le bouton du gilet et vous 1) demande, en vous tegardant dans le blanc des yeux : ““Avez-vous
| lu laBible ? Avez-vous lu Eschyle ?”... L’ceuvre de M. Paul Claudel | est une édition, 4 usage du cours supérieur, des pages rouges | du Larousse... »
1214
Cahier III
2. Claudel achéve ce trecueil de poeémes qui sera imprimé en Belgique cette méme année; édition détruite (voir Po., p. 1096). 3. On trouve ce texte dans A. D. Sertillanges, /e Baptéme et la confirmation, H. Laurens, 1929, coll. Anthologies illustrées, préface, p. 15. Claudel l’a lu évidemment dans une autre édition. Ila écrit « eau bénite », pour « eau baptismale »; « signe d’hospitalité» au lieu de «signe de Vhospitalité». « Quand v{ous] enttez...)» ne se trouve pas dans |’édition citée. Sut la premiére moitié de la page 45, Claudel a collé une photographie de Sylvain Pitt (voir p. 254, n. 2). 4. De lingua latina, liv. V, 37:
Vitis a vino, id eS a vi. « Vitis
vient de vigum, lui-méme issu de vis (vigueur). » Cf. Jean Collart, Vatron, De lingua latina, liv. V, texte, traduction et notes, les
Belles-Lettres, 1954, p. 25. Page 279.
1, XXXV, 10: « Ou est Dieu qui m’a créé, qui inspire dans la nuit des chants d’allégresse? » 2. Saint
Grégoire,
Moralia,
XXVI,
12,
commentaire
du
vetset précédent de Job : « Ezéchiel recut le livre dans lequel étaient écrits les lamentations, les gémissements et les plaintes » (allusion 4 Ezéchiel, II, 9). Texte exa&t : Exechiel propheta accepisse teflatur... 3. XXXVIII,
37 : « Qui exposera Parrangement des cieux et qui fera taire leur harmonie? » 4. Moralia, liv. XXX, 4 (P. L., LX XVI, col. 533) : « Les mots disparus, la vision intérieure nait pour ainsi dire du son de la prédication éternelle. » 5. Cf. Job, XXXIX, 13-18, et surtout S. Grégoire, sid., XXXI, 5, qui interpréte en effet image de l’autruche comme le symbole de l’hypocrisie. 6. Ps. LXVIII, 16 : « Que le puits ne ferme pas sa bouche sur moi!» Rétablir : Neque urgeat... 7. Voit p. 254) n.-2. 8. Charles-Albert Cingria était membre de la Coopérative de priéres. 9. En 1921, dans son « Adieu au Danemark», Claudel se souviendra de cet « endroit appelé Blankenese d’ot l’on domine cet énorme port de Hambourg...» (Pr., p. 1111). 10. Hagenbecks Tierpark, jardin zoologique de Hambourg. On sait que Claudel aimait 4 observer les animaux (voir par exemple « le BeStiaire spirituel »). Dans Au milieu des vitraux de l’Apocalypse, il fait dire a sa fille : « Vous prenez un air innocent, mais je sais que vous avez déja votre petite idée. C’est comme
Mars- Abril 1914
1215
quand vous nous proposiez une promenade et nous finissions toujouts par aboutit au Zoo » (O. C., t. XXVI, p. 119). 11. Restaurant situé dans le sous-sol de l’hétel de ville de Lubeck. 12. Hn réalité Ps. XXI, 15 : « Je me suis tépandu comme Peau» ; aprés cette note, une rature : N.-S. ne donne jamais le.
Page 280. 1. Jean, XVIII,
20 : « Je n’ai rien dit en secret. Pourquoi
“ m’interroges-tu ?Demande a ceux qui m’ont entendu ce que je leur ai dit : eux ils savent ce que j’ai dit. » 2. Cf. Pr., p. 781, « Samedi», des Conversations dans le Loir-etCher: « Qui comptenait un pays avant l’automobile. [...] Tout a pfis un sens, un dessein, une composition.» Et sbid., p. 732, « Cantique de l’Intelligence ». 3. On tetrouve cette image dans les Vitraux de 1’Apocalypse (O. C., t. XXVI, p. 24). 4. A rapprocher de « la Légende de Prakriti», par exemple, ou des « Fossiles ».
Page 281. 1. Ferdinand Brunot et Charles Bruneau, Précis de grammaire historique de la langue francaise, Masson, 1937, n° 438 : « On avait en ancien frangais trois formes différentes pour chaque nom, suivant la place qu’il occupait dans la phrase : les noms de nombte six et dix ont conservé en frangais ces trois prononciations : j’en ai sis, dis; si-z-hommes, si(x) femmes.» N° 637 : « Six et dix sont seuls 4 consetver en francais moderne la triple prononciation qui était au Moyen Age celle des mots terminés par une consonne.» N°’ 147-156 : « C’est une prononciation parisienne et populaire qui s’est imposée ici progressivement a la langue littétaire.» Claudel aimait a répéter que « c’est le
peuple qui fait la langue ». 2. Cf. Conversation sur Jean Racine (Pr., p. 463) : « C’est Vallon| gement racinien, l’Ame de toute sa longueur qui se tend, qui _ s’'allonge en profitant de toutes ses articulations depuis l’épaule | jusqu’a la triple phalange des doigts, et au point étincelant des | ongles. » Page 282.
1. « Le Printemps» a été ajouté apres coup. 2. Versets 2-3 : « Vous étendez les cieux comme une tente, vous couvtez d’eau les parties supérieures. » — 9-12 : « Vous
1216
Cahier II1
leur avez prescrit des bornes qu’elles ne franchiront pas et elles ne
reviendtont point couvrir la terre. Vous faites jaillir les sources dans les vallées, les eaux cheminent entre les montagnes. [...] Les Anes sauvages soupirent aprés elles dans leur soif. Au-dessus d’elles habitent les oiseaux des cieux.» — 25 : « Voici la vaste mer. » 3. Versets 23-24: « Ceux qui travaillent sur les vastes eaux,
ceux-la ont vu les ceuvres du Seigneur, ses merveilles au milieu de l’abime. » 4. Un mot illisible; peut-étre « encombrés » ou « recourbés ». 5. « De cuivre», en surcharge.
Page 283. ~ 1. Ps. XVII,
verset
12
: «leau
ténébreuse
des nuées
de
Vair...»; verset 16 : « Alors les sources des eaux ont apparu et les fondements de la terre ont été mis 4 nu»; verset 17 : « Il m’a retité de l’inondation des eaux»; verset 30 : « Car par vous je serai arraché 4 la tentation, et par mon Dieu je franchirai le mur. » 2. Verset 12 : « Vous avez déchiré mon sac et vous m’avez
environné de paix. » Page 284.
1. Coupure de journal collée. « L. Veuillot » est de la main de Claudel. Ce texte est tiré d’un article du 19 avril 1875, publié vingt jours aprés les funérailles d’Edgar Quinet. Voir Veuillot, CEuvres completes, 3° série, Mélanges, t. XIII,
Lethielleux,
1938,
p. 79. La phrase d’Edgar Quinet est extraite de sa préface aux CEuvres de Marnix
de
Sainte-Aldegonde;
en
fait Quinet
cite
Martnix (cf. Veuillot, sbid., t. VIII, p. 402). Cf. « Louis Veuillot »(Pr., p.'481-487). Cantique (O.C.,t. X XID, 442 : « Les vrais “‘pacifiques”, ceux qui ne se contentent pas de
jouit de la paix, mais qui la font, ce sont les combattants, de Vespéce d’Athanase pat exemple. — Et pourquoi pas de Louis Veuillot? — Certainement pourquoi pas?»; Gide, p. 118 « Veuillot [...] est pour moi le type du héros.» Voir la note significative dans Un poéte regarde la Croix (O. C., t. XTX, p. 205), out Claudel se range aux cétés de Veuillot et de Bloy : « Remets ton coutelas dans sa gaine, brave Veuillot, et toi, vaillant Léon Bloy! (sans parler de P. C.)! » 2. Trad. : « Nul n’atteint d’un coup le sommet. » 3. Trad. : « Et moi grace a l’abondance de votre miséricorde...» Cette note et la précédente sont écrites en travers de la page, de part et d’autre de la coupure de journal (texte de Veuillot). 4. Vertset 3 : « La voix du Seigneur est au-dessus des eaux, le
Aril-Mai 1914
1217
Dieu de majesté a tonné, la voix du Seigneur est au-dessus des grandes eaux. » 5. « Theme » est en surcharge, ajouté aprés coup.
Page 28). 1. « Discussions » est en surcharge. 2. Rature : ficelé. 3. X, 2 : « Et il posa son pied droit sur la mer et son pied -gauche sut la terre.» — XII, 18 : « Et il se tint sur le sable de la mer.» — XV, 2: « Et je vis comme une met transparente mélée de feu.» — XVI, 3 : « Le second ange versa sa coupe dans la mer et elle devint comme le sang d’un mott et tout ce
qui avait vie dans la mer moutut.» — XVII, 15 : « Les eaux que tu as vues 4a l’endroit ot la prostituée est assise, sont des peuples, des nations et des langues. » — XIX, 6 : « Et comme le bruit des grandes eaux. [...] Alleluia.» — XXII, 1: « Et il mie montra un fleuve d’eau vive, limpide comme du cristal, qui sottait du tr6ne de Dieu et de PAgneau.» — XXII, 2: « Au milieu de la place de la ville, et des deux cétés du fleuve, était Varbre de vie, qui porte douze fruits, donnant son fruit chaque mois, et les feuilles de l’arbre sont pour la guérison des nations. » 4. Trad. : « Adultéres, ne savez-vous pas que l’amour de ce monde est inimitié contre Dieu? » 5. Versets 4-5 : « Par conséquent quiconque veut étre ami de ce siécle se rend ennemi de Dieu. Pensez-vous que |’Ecriture dise en vain : l’Esprit qui habite en vous a-t-il des désirs qui portent a l’envie? » 6. Sut la seconde moitié de la page 56 et sur la page 57, Claudel a collé des dessins de Jean Dulac, extraits de Comedia illustré,
teprésentant deux scénes de /’Echange, avec Marie Mlle Marion, Dullin et Copeau, au Vieux-Colombier.
Kalff,
Page 286. 1. Cf. Jammes, p. 268, 14 mai 1914 : « Que dites-vous de ces trigtes élections? le speftacle de la méchanceté et de la sottise toujours triomphantes et couvtrant tout le pays a quelque chose d’accablant. » Les éle€tions de mai 1914 ont en effet renforcé a la Chambre des députés la majorité républicaine. — La derniére phrase parait avoir été ajoutée apres coup. 2. Trad. : « Il sera comme un atbre planté prés d’un cours d’eau et qui donne son fruit en son temps. » 3. Notation d’un théme fondamental que l’on retrouvera dans VOde jubilaire et surtout, 4 propos de Rodrigue, dans /e Soulier de Satin. Voit Po., p. 677; Th. U, p. 892.
1218
Cahier II
4. En réalité, XXVIII, 2: «... Je suis assis sur le trone de
Dieu, au milieu de la mer. » 5a De Ia Sagesse, trois livres, par Pierre Charon, patisien, chanoine théologal et chantre dans l’église reese, es Condom, éd. Amaury Duval, Paris, 1827, t. I, liv. 1, chap. 1,
6. Trad. : « Le bruit qu’elle faisait, était ooiele au bruit des grandes eaux. » Page 287.
1. Ezéch., XLVI, 5 : «... c’était un torrent que je ne pus traverser, cat Jes eaux s’étaient gonflées, comme celles d’un torrent profond, qu’on ne peut passer 4 gué...)»; versets 7-12 : « Au bord du torrent il y avait une grande quantité d’arbres. [...] Il me
dit : ces eaux qui sortent vers les monceaux de sable de Vorient et qui descendent vers la plaine du désert entreront dans la met et en sortiront, et les eaux de la mer deviendront saines. Et tout animal vivant qui rampe vivra pattout ot viendra le
torrent et il y aura de nombreux poissons 14 ot viendront ces eaux et la ou viendra le torrent tout sera sain et vivra. Les pécheurs se tiendront sur ces eaux. [...] Les poissons seront d’espéces nombreuses comme les poissons de la grande Mer. [...] Et sur le bord du torrent, de chaque cété, croitront toutes sottes d’arbres fruitiers. [...] Les fruits serviront de nourriture et les feuilles de reméde. » 2. Vetsets 4-5 : « Jérusalem sera une ville sans tempartts, a
cause de la multitude d’hommes et des animaux qui seront au milieu d’elle. Et moi je serai pout elle, dit le Seigneur, un mur de feu tout autour et je serai glorifié au milieu d’elle. » 3. «Alors je dis: je ne vous ferai plus paitre: que ce qui meutt meute! que ce qui est égorgé soit égorgé! et que ceux qui restent dévorent la chair les uns des autres! » — Rappelons que ce texte a servi d’épigraphe au Pain dur, que Claudel achéve vers cette époque. Voit TA. II, p. 417. 4. Verset 10: « Puis je pris la houlette qui s’appelait Beauté et je la brisai, pour rompre Valliance que j’avais conclue avec tous les peuples.» — XIII, 5 : « Et chacun dira : Je ne suis pas prophéte, je suis agriculteur, car Adam a été mon modeéle depuis ma jeunesse. » — XIV, 8:« Ence jour-la des eaux vives sortitont de Jérusalem, une moitié coulera vets la met d’Orient et une moitié vets la mer d’Occident; elles couleront en été et en hiver. » Page 288.
1. Trad. : « Le mouvement local n’est pas seulement dans le lieu, mais autour du lieu, »
Mai 1914
1219
2. Jean de Saint-Thomas, théologien dominicain, commentateur de S. Thomas, né le 11 juillet 1589 A Lisbonne, mort 4 Prague-en-Aragon le 17 juin 1644. Maritain avait prété 4 Claudel quelques-uns de ses ouvrages, mais celui-ci ne l’appréciait guére, a cause de son Style diffus qu’il opposait a la concision nerveuse de S. Thomas. — Nous n’avons pas retrouvé la référence de ce texte, qui tel quel est intraduisible. 3. Trad. : « Et comme dire de quelqu’un qu’il est habillé suppose le vétement, situer quelqu’un ne peut se faite qu’en - référence au lieu qu’il occupe. « L’ange n’a de présence locale qu’en raison de son aétion et opération : aussi bien il n’est pas localisé, mais localisant. Comme la présence de l’Ame au corps est celle d’une “forme”, ainsi Pangea relation au lieu par son action; le lieu est le point d’application de la puissance angélique. Le fait d’ “informer” le corps et de lui étre uni ne localise pas l’Ame, selon la catégorie de
P “ubi’’ : de méme l’aétion de la puissance angélique ne localise pas l’ange, mais rend présente son action. » 4. Trad. :« Présent, c’est-a-dire qu’il n’y a pas de distance. » 5. A VPoccasion de l’exposition internationale que la guerre devait interrompre. Claudel en note la visite a la ligne suivante. 6. Louis Aguettant, né 4 Lyon le 3 avril 1871, mort 4 Lyon le 10 mats 1931, y fut professeur de littérature francaise aux Facultés catholiques de 1898 a 1931. Auteur d’un livre (posthume) sur /a Musique de piano des origines a Ravel, Albin Michel, 1954, dune ttaduétion d’ Abt Vogler, de Browning, et d’articles sur Valéry, Claudel, Jean-Marc Bernard, Gabriel Fauré, André Caplet, etc. « Un esprit de la plus grande rareté, disait Valéry, car trés tates sont ceux qui se développent comme lui sur les
confins de la musique, des lettres et de l’abstrait » (da Musique de piano, p. 17). 7. Soirée organisée par Gaston Baty au Grand-Théatre de Lyon, avec la troupe de |’CEuvre; c’est Suzanne Després qui interprétera le rdle de Violaine. Voit Cah. Cl. V, p. 151. 8. « Lyonnais d’adoption, je connaissais depuis longtemps Edouard Herriot, et je ressentais pour lui, en dépit des opinions qui nous séparent, la sympathie qu’inspire une nature puissante et généreuse...» (Pr., p. 1293; texte de 1936). Voir dans le Bulletin de la Société Paul Claudel, n® 13 (avril 1963), quelques lettres extraites de leur cortespondance. Claudel lui a écrit plusieurs fois en 1913 (voit Cab. C/. V, p. 126) pour tenter de Pintéresser au mouvement d’Hellerau et a la construction d’un théatre du méme type en France. Herriot est dés cette époque maire de Lyon et sénateur du Rhone. 9. Il s’agit de /’Otage, mis en scene pat Lugné-Poe. 10, On trouvera tous les détails sur ces représentations,
1220
Cahier III
l’accueil de la presse et les réactions de Claudel (Lettre au Temps [juin], au Figaro [14 juillet]), dans Cah. Cl. V, p. 153 sq., et Th. I, p. 1409 sq.
11. Couvent du Saulchoir, 4 Kain (Belgique). Cf. Jammes, p. 269 : « J’ai passé en revenant 4 Hambourg, par le couvent des Dominicains du Saulchoir. » 12. « Quelle belle chose qu’un couvent et spécialement un couvent
de Dominicains,
avec cette clarté, cette virilité, cette
promptitude » (ibid.). 13. Sur le P. Barge, voir p.266,n. 4. —LeP. Gillet, futur Maitre général de ordre de Saint-Dominique. — Le P. de Poulpiquet, théologien, auteur de /’Objet intégral de 1!’apologétique, Bloud, 1912; /e Miracle et ses suppléances, Beauchesne, 1914; /’Eglise catholique, étude apologétique, éd, de la Revue des Jeunes, 1923. 14. « Il y a de belles ames [...] entre autres ce jeune convertt, Massis, qui écrit dans /’Ec/air et dont j’ai fait la-bas la connaissance » (Jammes, p. 269). Cf. le récit d’ Henri Massis, Jugements, II, Plon, 1924, p. 268.
jen Gh psez7aey ne 2. 16, « J’ai porté [au Saulchoir] mes essais sur la Vie des Corps bienheutreux, qui ont vivement intéressé les péres. Il parait que théologiquement c’est absolument solide et plausible. L’un d’eux m’a méme dit que c’était “emballant”’. Tous sont profondément intéressés, et voudraient me voit pousser plus loin dans cette voie» (Jammes, ibid.). — On a lu plus haut les notes prises par Claudel sur les corps ressuscités, p. 153. Il reviendta sur ce sujet en particulier dans Un poéte regarde la Croix. Les deux essais de 1914 furent détruits a Tokyo en 1923, mais les moines du Saulchoir en avaient conservé une copie (voit Oxelques manuscrits détruits, Bulletin de la Société Paul Claudel, n° 10). 17. Voir n. 2 ci-dessus.
Page 289. 1. Cest a Hank’éou, en 1897, que Claudel se lia avec Emile Francqui, alors consul de Belgique (voir Pr., p. 1020). Ibid., p. 1025, dans Souvenirs de Pékin, il rappelle la constru€tion du « chemin de fer de Hank’éou a Pékin, exploit de mon ami Emile Francqui, auquel je ne suis pas peu fier d’avoir collaboré ». En 1905, il retrouve Francqui au cours des vacances (voir p. 24, n. 7). Il lui consacra au moment de sa mort un article (Figaro, 19 novembre 1935; Pr., p. 1563). Jammes a fait un intéressant portrait de Francqui dans ses Mémoires. 2. Voir p. 126. 3. Famille de Hambourg, amie de Claudel. Seckendorff était dessinateut.
Mai- Juin 1914
1221
4. Jorgensen avait assisté a la représentation de /’Osage. Claudel y fait allusion dans une lettre a Jammes (p. 272). Sans doute note-t-il ici le nom de D’éctivain danois 4 occasion d’une correspondance échangée sur la question du « désespoit» de Sygne. Ce nom parait avoir été ajouté aprés coup. 5. Texte utilisé comme
antienne
des
laudes
de l’office
de
sainte Cécile (22 novembte), tité de la Passio sanétae Caeiliae, qui n’est pas tenue pour authentique; c’est ce dernier texte, non Pantienne, que cite Claudel. Ce sont les paroles de l’évéque ~ Urbain, lorsqu’il voit arriver Valérien, que sa fiancée Cécile lui envoie pour recevoir le baptéme : « [Seigneur, bon pasteur], Cécile ta servante t’a servi comme une abeille industtieuse. » Ce dernier mot traduit mal argumentosa. Dans « Sainte Cécile » (Po., p. 608), Claudel fait allusion au « doéteur... qui argumente » et que continue le chant de sainte Cécile. 6. Au lieu de « cueille», Claudel avait d’abord écrit a/trape. Une tature : « et de la main le mécanicien... » — Sur les pages 64 ét 65 est collé un dessin de Seckendorff représentant Claudel endormi. En haut, de la main de Claudel : I/ dort; en bas : par Seckendorff, vers Lubeck, 21-6-14. 7. Les deux « pensées» sont séparées. La premiére est la pensée X du titre XIII; la seconde est la pensée XIX du méme titre. Le texte exact est « La lumiére est comme une humidité divine... La flamme est un feu humide» Perrin, 1922, p. 162, 163).
(Pensées, de Joubert,
Page 290. 1. «1. Il me ramena ensuite vers la porte de la maison et voici, des eaux sortaient sur le seuil de la maison, vers orient; car la face de la maison regardait vers l’orient; or les eaux descendaient
au cété droit du temple, au midi de Pautel. — 2. Et il me fit sortir par la porte du septentrion, et me fit tourner en dehors de la porte extérieure, vers le chemin qui regarde a Vorient et voici, les eaux jaillissaient du cété droit. — 3. Lorsque ’homme qui avait un cordeau a la main fut sorti vers Vorient, il mesura mille coudées, et il me fit traverser l’eau, et j’en avais jusqu’aux talons. — 4. Il mesura encore mille coudées, et il me fit traverser Peau et j’en avais jusqu’aux genoux. — 5. Il mesura encore mille coudées et il me fit traverser l’eau, et j’en avais jusqu’aux teins. Il mesura encore mille coudées, et c’était un torrent que je ne pus traverser, car les eaux s’étaient gonflées comme celles dun torrent profond qu’on ne peut passer a gué. — 6. Alors il me dit : Certes tu as vu, fils de homme.
Et il me fit sortir, et
me ramena au bord du torrent. — 7. Quand je fus tourné, voici, il y avait sur le bord du torrent une tres grande quantité d’arbres
1222
Cahier III
des deux cotés. — 8. Et il me dit : Ces eaux qui sortent vers les monceaux de sable de l’orient, et qui descendent dans la plaine du désert, entreront dans la mer et en sortiront, et les eaux de la
mer deviendront saines. — 9. Et tout animal vivant qui rampe vivta partout ot vient le torrent, et il y aura de nombreux poissons 14 ot viendront les eaux, et la ot viendra le torrent tout sera sain et vivra. — 10. Les pécheurs se tiendront sur ces eaux; depuis Engaddi jusqu’a Engallim on séchera les filets; ses poissons seront d’espéces nombreuses, comme les poissons de la gtande mer, en quantité extraordinaire. — 11. Mais sur les tivages et dans ses marais, les eaux ne seront point assainies,
parce qu’elles seront destinées pour des salines. — 12. Et sur les bords du torrent, de chaque cété, croitront toutes sortes d’arbres fruitiers; leurs feuilles ne tomberont pas, et leurs fruits ne
manqueront jamais; chaque mois ils en porteront de nouveaux, parce que les eaux sortiront du sanétuaire; leurs fruits serviront de noutriture et leurs feuilles de reméde. » 2. Verset 16 : « L’aspe& des roues et leur Structure les rendaient semblables a une vision de la mer [...].» — Verset 17 : « [...] Elles allaient et ne se retournaient pas.» — Verset 20 :
« Ow allait Pesprit et ot lesprit s’élevait les roues s’élevaient également et le suivaient, car l’esprit de vie était dans les roues. » — Verset 24 :« [...] le bruit de leurs ailes, semblable au bruit des grandes eaux, semblable a la voix du Dieu trés haut. » 3. Verset 12 : « Chacun d’eux marchait devant soi; ils allaient ou Vesprit les poussait; ils ne se retournaient pas en marchant. »
Page 291. 1. La Bible et les découvertes modernes en Palestine, en Egypte et en Assyrie, Paris, Berche
et Tralin, t. IV, 1889, p. 367. Il n’est
nullement certain que Claudel ait lu cet ouvrage; plus vraisemblablement il lit Ezéchiel dans la Bib/e de Fillion, qui cite ce texte de Vigouroux, t. VI, p. 14. Claudel reviendra trés souvent sur ces textes difficiles d’Ezéchiel décrivant sa vision du tréne de Yavhé, en particulier dans ses commentaires de |’Apocalypse, et surtout dans la « Seconde note sut les Anges» (O. C., t. XX, 389) et dans /a Rose et le rosaire, « les Quatre visages des Chétubins » (O. C., t. X XI, 195). 2. Nicobar, archipel indien dans le golfe du Bengale, d’ou les Danois ont effe€tivement rapporté ces « idoles en chapeaux haut-de-forme ». 3. Bapst, ancien ministre de France 4 Pékin, dont Claudel fut le premier secrétaire en 1906, avant d’étre nommé consul a Tien-tsin (Swarés, p. 82). Claudel le remplacera en 1921 comme ambassadeut au Japon.
Juin- Juillet 1914
1223
4. Georg Morris Cohen, dit Brandes, critique littéraire, né a
Copenhague en 1842, mort en 1927. Claudel était depuis longtemps en relations avec lui; voir Pr., p. 1407, une lettre qu’il lui adresse de Fou-tchéou, en 1903. 5. Parc boisé a 15 kilométres au nord de Copenhague. 6. « [A Copenhague] toutes sortes de superbes batiments, anciens et modernes, y protestent par une pourpre énergique contre l’ambiance du bleu et du gris. Le plus beau est la gare. » |. « Une goutte d’encre», Pr., p. 1109. 7. Ce nom a été ajouté; souvenir du Musée qui posséde en effet plusieurs toiles de Braque antétieures a 1914. 8. Souvenir d’une visite 4 la Glyptothéque. Voir plus tard, p. 459. — Claudel notera la méme impression en Italie, voir ici p. 325. Il Putilisera dans /e Pére humilié (Th. Il, p. 514) : « Moi aussi, on m’a conduite au milieu de vos dieux grecs, moi aussi, jai posé la main sur ce marbre qui brile. » — Claudel a d’abord
écrit chauds au lieu de « brilants ». ' 9. Claudel ne fait aucune allusion a cette « idée » du 3 juillet 1914 dans le texte de 1946 : « Comment j’ai écrit /e Pére humilié» (Th. IL, p. 1453). — Notons qu’il n’a pas encore achevé /e Pain dur, terminé a Bordeaux en o¢tobre
1914. —
note, il a ajouté « A Kl[ampenborg] ».
Au-dessus de la
Page 292. 1. Chouchette, nom d’enfant de Marie, fille ainée de Claudel. Cf. Lettre 4 Suarés, le 4 juillet : « Cher ami, je suis bien inquiet a ce moment. Ma fille ainée est malade. Je suis tourmenteé » (p. 182). 2. XXIX, 31, dans la Vulgate : « Ceux qui me mettent en lumiére auront la vie éternelle.» — Aprés me, Claudel a écrit en surcharge « Marie»; c’est la Sagesse qui patle dans le texte
biblique et l’on sait que, suivant la liturgie, Claudel l’assimile a la Vierge. 3. Ile Epitre 4 Timothée, II, 4 : « Quiconque est enrdlé au ser-
vice de Dieu ne s’embatrasse point dans les affaires séculiéres. » 4. Ceét la « main de gloite » dont il s’agit. Il en est question dans Jes Secrets du Grand Albert et Netval ena fait le theme d’un conte, « la Main enchantée ».
5. Il peut s’agir du neveu de Claudel, fils de sa sceur Louise, Jacques de Massaty. 6. Les quatre derniers mots ont été ajoutés au crayon. 7. En surcharge : bulles d’air. Page 293.
1. Claudel reprendra ces notes, en septembre 1919, CLAUDEL
V - 42
a Copen42
1224
Cahier III
hague, pour son « Saint Martin», Fewilles de Saints (Po., p. 671):
«
Qu’en dis-tu, peuple de Hambourg?
et réponds si tu t’en
souviens encore, de ces sombres jours d’été, [...] /Et cette foule
sans parler tout ce peuple en chapeaux de paille sur la Jungferstiege qui attendait les nouvelles! / Et comme le vent pat risées soudaines fait grésiller toute la surface de |’Alster, / Ainsi ces tétes tout 4 coup qui ondulent... » 2. Méme rappel de l’Apocalypse, en 1939 : « Ainsi donc encore une fois la troisiéme partie de la mer, le tiers encore une fois de la terre qui va se changer en sang! » (Po., p. 573). 3. «Saint Martin», ibid.: « Cette foule qui plie dans le courant d’air. [...] / Le torse mongtrueux de la Guerre au bout de la chaussée apparait et d’un tour de son épaule elle déracine la Porte de la Cité. [...] Ces fous qui 4 grand labeur jadis a travers la muraille fondue firent entrer le Cheval de bois... » — Cf. aussi Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 722): «lly a beaucoup 4 dire sur la guerre. Il faut croire que ca sert tout de méme 4 quelque chose pour qu’on n’ait jamais pu s’en passer. Crest la guetre quia fait l’Europe et qui nous a obligés a prendre Pun a Pautre cet intérét poignant.» Voir encore Pr., p. 1380, 13.812:3Poxy pws 89. ete.
4. Verset 7 : « Vos jugements sont un ptofond abime. » Verset 9: « Ils seront enivrés de ’abondance de votre maison et vous les ferez boire au torrent de vos délices. » Verset 10: « En vous est la source de la vie, dans votre lumiére nous verrons la lumieére. » 5. Verset 4: «Il compte la multitude des étoiles et il leur donne des noms 4 toutes. »
6. Ce vers ne figure pas dans Hymmes attribués 4 S. Ambroise qui sont en appendice a ses CHwores, P. L., XVI, col. 1171-1222.
« Une sentinelle veille d’en haut... » L’image tappelle Jér., VI, 17. 7. Versets 10-11 : « Le fleuve de Dieu a été rempli d’eau. [...] Ainsi vous préparez la terre : enivrez ses ruisseaux, multipliez ses germes. Sous ses ondées elle se réjouita, donnant ses fruits. » Page 294.
1. Verset 6: « Lui qui a fait le ciel, la terre, la mer et tout ce qu’ils contiennent. » 2. Verset 8 :« Ils seront réduits 4 rien, comme une eau qui s’écoule. » 3. Voir p. 293, n. 1. Grosse Bleichen est aussi une rue de Hambourg.
4. « Quand les trains chargés de soldats commencétent... » (« Saint Martin », Po., p. 671). 5. Legon douteuse.
Aout 1914
1225
Page 295.
1. Claudel tacontera ce voyage dans « l’Absent professionnel» (voir Pr., p. 1249) :« ... mon départ de Hambourg en aotit 1914 au milieu dune foule vociférante qui voulait nous faire un mauvais parti, exaltée jusqu’a la frénésie par un certain costume tricolore que portait mon fils 4gé d’un an...» Henri Claudel avait en fait deux ans comme Vindique le Journal, ou dailleurs le chiffre 2 est en surcharge et d’une autre encre. 2. « Du beau monde! Du joli monde!! » Page 296.
1. Jules Cambon n’avait pu gagner la frontiére danoise que moyennant une rancon de trois mille marks-or. Voir Cah. Cl. IV,
p. 147.
2. Nom illisible.
3. Statues d’hommes portant des sortes de trompettes. , 4. Le€ure douteuse. 5. « Ils’agissait de rentrer en France par la Suéde, la Norvége et l’Angleterre. M. Cambon, je ne sais pourquoi, craignait de nouvelles mésaventutes et il jugea plus prudent de m’expédier en éclaireur a la téte de son personnel domestique » (Pr., p. 1429). 6. Nom illisible. 7. Nom illisible. 8. Mot douteux (ratures et surcharges). Page 297.
1. La date clot le récit écrit certainement ce jour-la en arrivant a Villeneuve. 2. Nom illisible. 3. Sur cet ouvrage, voir p. 26, n. 1. Il se trouvait dans la bibliothéque de Villeneuve, héritage de l’abbé Cerveaux. Claudel Vy retrouve. 4. Claudel a omis 4 la fin de la note : « ““Voyez ces eaux miraculeuses, suspendues en vodtes sur nos tétes! ces démes de
cristal et de diamant!”? On ne peut rendre en frangais, dans la traduction d’une loi, cette poésie qu’exprime un seul mot. » 5. Voir dans «le Chant de la Saint-Louis», écrit Pannée précédente (Po., p. 453), ce theme déja exprimé et que l’on retrouve fréquemment lié au mois d’aott.
Page 298. 1. Louise de Massary, sceur de Claudel. 2. « Ma mére et ma sceut amenées en auto pat André Berthelot
1226
Cahier III
dans son chateau de Benest en Charente se sont décidées aprés une quinzaine, tout danger pataissant conjuré, 4 revenir a Paris ot elles sont aétuellement » (Jammes, p. 274, 24 septembre). — Le nom du chateau n’est pas lisible. 3. C’est l’adresse indiquée dans les lettres 223-226 a Jammes et a Frizeau. 4. Image reprise dans une lettre 4 Jammes, p. 274, et dans /a Nuit de Noél 1914: « Cette bataille sur toute la longueur de la Marne que nous avons livrée, ayant Geneviéve 4 notte gauche et Jeanne 4 notte droite» (TA. I, p. 580). 5. Jammes, ibid.: « Cette bataille de six jours autour du jour
de sa féte...» Féte de la Nativité de la Sainte Vierge, le 8 septembte. Méme indication dans /a Nuit de Noél 1914, ibid. Page 299.
1. « Car ils affe@tent d’ignorer qu’il y eut auttefois des cieux et une terre sortie de l’eau et formée par le moyen de l’eau, par la parole de Dieu. » 2. Lire Hossegor.
3. « Pendant ce mois» indique que Claudel résume ici quelques semaines; les notes précédentes sont sans doute contemporaines de la lettre a Jammes, citée plus haut, 24 septembre. « J’entre au service des prisonniers...» Il y est déja le 2 o€tobre (Jammes, p. 276). 4. Pour Mauriac, cf. Jammes, p. 278, lettre a Frizeau : « Je laisse beaucoup de souvenits 4 Bordeaux que je quitte avec un véritable regret. J’y ai trouvé pendant toute la durée de mon séjour d’excellents amis, dont la maison a été pour moi comme un foyer retrouvé, les Mauriac d’abord.» — Jacques Riviére avait été porté disparu au début d’oftobre (voir Cah. Cl. VI, p. 89). — Olivier Hourcade était un jeune journaliste qui s'intéressait au theatre; il avait eu quelques démélés avec Claudel a propos d’une lecture de /’Osage, vite apaisés (Jammes, p. 255). — M. de Margerie était le supérieur dire€t de Berthelot, aux Affaires politiques (Pr., p. 1276). Mélanie de Vilmorin, mére de la romancieére Louise de Vilmorin. 5. Id., c’est-a-dire II Petr., m1, 7 : « Les cieux et la terre d’a présent, ils sont gardés pat cette méme parole et réservés pour le feu au jour du jugement et de la ruine des impies. » — 10: « Le jout du Seigneur viendra comme un voleur; alors les cieux passeront avec un grand fracas, les éléments embrasés se dissoudront et la terre sera consumée avec tout ce qu’elle renferme. [...].» — 12:«... Les cieux enflammés se dissoudront et les éléments embrasés se fondront. »
6, Verset 3 : « Le feu s’enflammeta en sa présence, »
Aoht-Décembre 1914
1227
7. Cest ainsi qu’est désigné Pie X dans la prophétie de Malachie. Claudel a noté sa mort en aot. 8. En réalité XCVI, 3 : « Le feu marche devant lui. » g. Il Petr., 111, 4 : « Tout demeure comme depuis le commencement de la création. » to. I Cor., xv, 42 : « Il ressuscitera dans la gloire.» — On retrouvera ce théme dans les poémes de 1915 : « Dertiére eux », « Aux morts des armées de la République » (Po., p. 535 et 537). Page 300. 1. « et de la bousculade » est en surcharge. 2. René Sainte-Marie-Perrin, frére ainé de Mme Claudel.
3. Cf. Lettres
a Jammes du 29 o€tobre ot Claudel annonce
sa visite et a Frizeau, le 24 novembre : « J’ai vu Jammes detnierement. Cela m’a fait grand plaisir » (Jammes, p. 277).
4. Cest Claudel, selon Henri Hoppenot, qui avait eu Vidée de ces tracts. « Il avait [...] eu [...] Vidée [...] de petits tracts anonymes de deux pages, imprimés sur papier trés mince, et dont le texte rédigé par lui dénongait les atrocités allemandes, démontrait le bon droit des Alliés. Des artifices typographiques vati¢és devaient retenir l’attention et l’adhésion des lecteurs. Aucune de ses ceuvres n’avait encore connu un tel titage. Nous en expédiames par ballots a tous les postes diplomatiques et consulaires. S’il survit quelque part quelques exemplaires de ces feuilles périssables, leur place serait a la section préhistorique @un musée de la Propagande » (Cah. C/. III, p. 8-9). 5. Initiale illisible. 6. Cest pendant sa captivité a Kenigsbruck que Jacques Riviére composa la plus grande partie de son livre, A /a trace de Dieu, que Claudel préfacera en 1925. — On sait qu’AlainFourniet avait pout Claudel une grande admiration dont témoignent ses lettres a Riviere. 7. Antoine Sainte-Marie-Pertin, frére de Mme Claudel, et sa femme Elisabeth, fille de René Bazin. Page 301.
1. Voit p. 300. « Son vieux setviteur», l’archite¢te de Foutviere, voit Po., p. 617.
2. En décembre 1916, Claudel entrera a la cathédrale SaintJean également pour se confesset et notera aussi la beauté de la rosace du Couchant : « Je me dirige [...] / Vers la cathédrale la-bas [...]/ Du bleu tel que Vécartement de toute matiére Vouvre
seul,
au
couchant
flotte
(« Sainte Geneviéve », Po., p. 636). 3. Nom illisible.
encore
cette
Rose
inouie»
1228
Cahier LI
Page 302.
1. Ce poéme pouttait bien étre, écrit en 1915, « la Vierge a Midi» (Po., p. 539).
2. Annonce de textes tardifs sur le paysage rhodanien, comme « l’Eloge du Dauphiné», voir par exemple Pr., p. 1335 : « Les trois éléments dont respire le paysage orchestral [a propos de Berlioz] : lumiére, composition et mouvement. »
3. Claudel révait de faire organiser des représentations de l’Orestie au théatre antique d’Orange; il avait peu auparavant écrit a Lugné-Poe pour avoir des renseignements précis (voir Cab. Cl. V, p. 163, et Mes Idées sur le thédtre, p. 47 sq.). Les détails quils notent ici sont exactement ceux dont il s’est préoccupé
dans sa lettte 4 Lugné-Poe. 4. Elisabeth, belle-sceur de Claudel. « S. M.», lite SainteMarie-Perrin, leur beau-frére (voit p. 300 et 301). Cf. « l’Architecte » (Po., p. 616) : « [Il] sait ce que c’est que de donner son fils. » 5. Théodore Perrin, fils de Gabriel (1837-1914), avocat, frére de l’architeCte.
ONS) Page 303.
1. « L’Esprit de connaissance et d’amout.» Fragment de la colleéte de la messe du 3 janvier, féte de sainte Geneviéve. 2. Ce poéme est tres nettement lié aux Essais monttés six mois plus tét aux Dominicains du Saulchoit (voir p. 288, n. 16). Les souvenirs d’Henri Massis permettent de préciser ce lien « L’office du soit a peine achevé, nous rejoignons dans leur cellule deux savants dominicains, le P. Gillet et le P. Barge, que
Claudel était venu consulter sur argument d’un Paradis qui, leur dit-il, serait le poéme de sa vieillesse. C’étaient des commentaites de la Somme, des interprétations de la Bible, et notam-
ment de ces images si fréquentes “ou la matiére est rassemblée en une seule eau”. L’ean, voila pour Claudel l’élément paradisiaque... » (Jugements, I, cité dans /a Table ronde, avtil 1955, p.86). — En fait Claudel qui, on l’a vu, a déja pris de nombreuses notes,
poursuivra son étude sur le symbolisme de l’eau dans la Bible pendant les mois qui suivent et durant son séjour au Brésil. « [Il] étudiait alors la question de l’Eaw si importante du point de vue mystique, et il choisissait les versets de la Genése qui la mentionnaient sous ses formes les plus divetses : met, lac, pluie, soutce, fleuve, humidité, rosée, brouillard, puits, et il les com-
mentait » (D. Milhaud, Notes sans musique, Julliard, 1949, p. 76).
Janvier 1915
1229
Le cahier ot il prit ces notes a été conservé; il y fait lui-méme allusion, Pr., p. 798, par exemple, et surtout dans Paul Claudel
interroge |’ Apocalypse (O. C.,t. XXV, p. 272): « J’ai eu l’indécision daller chercher au fond de je ne sais quel coffre le gros cahier od jadis au Brésil [...] je dépouillais la Bible et notais en l’accompagnant de commentaires tout ce que l’Esprit-Saint, sachant ce qu’Il dit et ce qu’Ll fait, quoi qu’en disent les savants modernes, nous taconte les Haux. Mais j’ai da refermer l’ouvrage : j’étais submergé, roulé, emporté par l’immensité et la splendeur des _. témoignages, peut-étre un jour reprendrai-je cette glose : ce seta le travail de mes derniéres années. » Ce texte peut expliquer dailleurs l’abandon du poéme. Dans les mois qui suivent Claudel va écrire les premiers « Poémes de guette ». 3. La duchesse de Clermont-Tonnerte, née Elisabeth de Grammont, avait beaucoup d’admitation pour Claudel; elle patle de lui dans le Ill¢ volume de ses Mémoires, la Troisiéme Heure. La seconde petsonne est, semble-t-il, la baronne Antoine de Brémont, petite-niéce de Lamartine et poétesse (voit Cah. Cl. V, p. 167 et 279). Sur Vabbé Mugnier, voir Varticle de René Dumesnil, Mercure de France, 1®* mars 1949, p. 398-409, et Vouvrage de la princesse Bibesco, la Vie d’une amitié. Ma correspondance avec l’abbé Mugnier, 1941-1944, Plon, 3 vol. Dans ses Mémoires improvisés, Claudel le range, ainsi que l’abbé Bremond, parmi ces gens qui « sympathisaient avec toutes les erreurs et n’y voyaient que la partie de vérité» (p. 223). 4. Cest «le grand vieillard nu dans son paletot poutti» (Th. I, p. 350) dont il est question au début du second afte. Dans son exemplaite, Claudel a noté, en marge de ce passage : « Joseph Knaff, rencontré a Notre-Dame, au moment de ma conversion.» Voir /a Ville, édition critique par Jacques Petit, Mercute de France, p. 198. Page 304.
1. « Les eaux s’étant accrues élevérent Varche en haut audessus de la terre. » 2. « Dieu parle une fois et il ne répéte pas une seconde fois ce qu'il a dit. » 3. Nom illisible. 4. En réalité, Il Cor., v, 4: « ... afin que ce qui est mortel soit
absorbé par la vie. » 5. « La déglutition », surcharge. 6. II Cor., x1, 25 : «... trois fois j’ai fait naufrage. Il m’est atrivé de passer un jour et une nuit dans l’abime» (in profundo maris).Du moins est-ce le texte qui se tapproche le plus de la note de Claudel.
1230
Cahier IIT
7. Le Chdtean del’ dme ou le Livre des demeures, Premiere demeute, chap. 1. 8. 508 a, Claudel a sans doute lu dans quelque ouvrage cette citation; il ne parait pas alors lire Platon. Page 305. 1. Lite : « Pierre arrive le 28 janvier; le 7 février, il va a
Massillon. » 2. Eve Francis est ici nommée pour la premiére fois. Elle fut une des grandes et fidéles interprétes de Claudel : elle fut Sygne de Cotifontaine au Théatre de |’ Guvre en juin 1914 et reprit tres souvent
ce rdle; elle joua Violaine
en
1921
a la Comédie-
Montaigne, en 1940 4 Lyon, la Méte dans /’Annonce au Théatre Hébertot en 1948, Lechy Elbernon en 1939 au Théatre des Mathurins, etc. On lira dans O. C., IX, p. 281, un extrait de ses catnets sut les représentations de 1921, et ibid., t. X, p. 304, son
atticle sut la reprise de /’Ofage en 1928. Nombreuses références dans R. Farabet, /e Jeu de /’atteur dans le thédtre de Claudel, Minard, 1960 (dans Cah. C/. Il, V et VI); voir également Temps héroiques, Denoél, 1949, ouvtage dans lequel elle rapporte de nombreux souvenirs sur Claudel; en particulier pour le détail noté ici, p. 299. 3. Aprés « une femme» en surcharge et d’une autre encte : « Mad. Partet. » 4. Th. Il, p. 571. La souffrance des deux enfants, dont il vient d’étre le témoin, n’est sans doute pas étrangére a l’idée de cette courte piéce. 5. Teodor de Wyzewa (1862-1917), rédacteur a /a Revue des Deux Mondes, collaborateur d’Edouard Dujardin a la Revue wagnerienne et ala Revue indépendante, traducteut des Fioretti et de la Légende dorée. Il a écrit, avec le comte de Saint-Foix, un ouvrage monumental sur Mozart. — Dans une lettre a D. Milhaud, Claudel l’appelle « mon ami» (Cah. C/. III, p. 50). 6. Mari d’Isabelle Rimbaud (voir p. 229). 7. « Aux morts des Armées de la République», Poémes de guerre (Po., p. 537) :« Aprés le corbeau affreux et le sifflement de la bise gémissante / J’entends le merle qui chante. » Page 306.
1. Vie par elle-méme, chap. vit. 2. Cette note pourrait bien étre expliquée par la le@ture de sainte Thérése, en particulier du chapitre vi de sa Vie, ot elle raconte une longue maladie qui l’affligea durant trois ans. 3. Vendredi de la deuxiéme semaine de Caréme.
Février-Mars 1915
1231
4. Verset 6: « J’ai foulé les peuples dans ma fureur; je les ai enivrés dans mon indignation et j’ai renversé leur force a terre. » 5. Claudel avait d’abord écrit : I/ reste aux paiens la graisse... — Le récit auquel il fait allusion est dans Genése, XX VII, 37 : « Je Pai affermi dans la possession du blé et du vin» et 27: « LPodeur dun champ plein. » — Il a déja évoqué cet épisode biblique (voir p. 22). 6. Voir p. 305. ~ Page 307.
1. Cf. « Nijinsky » (Pr., p. 385) : « J’étais donc n’ont jamais apprécié d’autre danse que celle de pieds quittent rarement la terre... » 2. Fille d’Elémir Bourges. Née en septembre Sita en Phonneur de ’héroine du Ramayana, 28 février 1915. Elle était malade sans espoir ¢ Les
journaux
de
bonne
information
un de ceux qui l’Orient, od les 1887 et appelée elle mourut le depuis dix ans.
annoncérent
la mort
d’Elémir Bourges, qu’ils confondaient avec sa fille» (Raymond Schwab, /a Vie d’ Elémir Bourges, Stock, 1948, p. 189).
3. Toutes ces références renvoient a la Vie de sainte Thérése par elle-méme. Page 308. 1. Verset 11 : « L’eau jaillit en abondance, en sorte que le peuple eut 4 boire et les bétes aussi. » 2. Verset 14: « L’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau qui jaillita jusque dans la vie éternelle. » Claudel commet un lapsus : viam pour vitam. Ce texte est extrait de VEvangile du vendredi de la troisitme semaine de Caréme; le précédent, de l’Epitre du méme jour. Donc le 19 mats. 3. Huysmans avait légué toute sa bibliothéque a son confesseut, ’abbé Fontaine, voir p. 230, n. 3. Page 310. 1. Toutes ces notes seront utilisées pour « Sainte Thérése », Feuilles de saints (voit Po., p. 624). Claudel se souviendra de ces
pages dans la scéne du Soulier de Satin (Ill, 8; Th. I, p. 821), ot PAnge gatdien suscite en Prouhéze un instant de connaissance mystique : «... c’est le néant a chaque instant ot je sombre et Dieu sur ma bouche qui me fessuscite, et c’est, supérieure a toutes les délices, ah! la tra€tion impitoyable de la soif, ’abomination de cette soif affreuse qui m’ouvre et me crucifie! »
Las
Cahier III
Page 311.
1. Claudel a omis d’indiquet par des points de suspension une coupure dans le texte.
2. C’est Claudel qui souligne. 3. Lapsus. Lite : méme. Claudel résume le texte : « Ces auteuts recommandent d’éloigner de soi toute image corporelle... » 4. Plusieurs pages séparent, dans le texte de sainte Thérése, cette phrase de la précédente. Claudel a omis de noter qu'il s’agit ici du chapitre xx1r. 5. Claudel a omis : « et qui possédent un bon jugement ». Page 312.
.
1. Date sans doute erronée ou retour en arriére; les derniéres
indications chronologiques sont de mats; deux pages plus loin on lit 29 mars. 2. « Tietce de Picardie : on nomme ainsi la tierce majeure de la tonique substituée a la médiante de l'accord parfait final d’une ceuvte du mode mineur, comme pour mieux en affirmer la tonique, grace 4 son accord parfait majeur et a la résonance naturelle qui l’engendre. J.-S. Bach en use fréquemment, mais J.-J. Rousseau en réprouve le procédé dans l’Encyclopédie » (Edmond Costére, Celle 95):
Encyclopédie de la musique, Fasquelle,
1961,
3. Nom illisible d’un compositeur russe, semble-t-il. 4. Voit p. 214, n. I. 5. René Viviani dans un discouts prononcé en 1906 (voit
p. 117). Claudel y fait allusion dans un poéme éctit quelques mois plus tard : « la Grande Attente» (Po., p. 558). Page 313.
1. Suite des citations de sainte Thérése, Vie par elle-méme. Page 314.
1. Depuis « Pendant cing heures de suite...», coupure de journal collée. 2. Cf. Poémes de guerre, « Derriére eux» (Po., p. 536): «... la macération de tout l’hiver... » Page 31).
1. Cette conférence a paru dans le Journal de l’Université des Annales, n° 13, année 1914-1915; elle était surtout un commen-
taire des poémes lus; on en trouvera des fragments dans les
Mars 1915
1233
notes de Po., éd. de 1967, 4 propos de chacun de ces poémes. Légerement remanié, ce texte sera repris pour la série de confétences que Claudel va faire en Suisse et en Italie (voit p. 320). 2. Depuis « comme... », semble une addition poéstérieure. 3. Verset 20 : « Comme le songe de ceux qui s’éveillent, Seigneur, vous réduirez au néant dans votre cité leur image. » — Verset 25 : « Car qu’y a-t-il pour moi dans le ciel? et qu’ai-je
désiré de vous sur la terre? » 4. En réalité Ps.
LX XIII, 5 :« Comme dans une forét d’arbres
a coups de hache, ils ont brisé les pottes 4 l’envi. Avec la hache et la cognée ils ont tout renversé. » 5. Verset 4: « La terre s’est dissoute avec tous ceux qui l’habitent. Moi, j’ai affermi mes colonnes. » 6. Verset 8: « Et au souffle de votre fureur les eaux se sont amoncelées, l’?onde mobile s’est dressée, les flots se sont accu-
mulés au milieu de la mer. » — Comme tous les textes précédents, celui-ci appartient a office du Jeudi-Saint. Page 316. 1. Comme la précédente, cette note est inspirée par le « Cantique de Moise»; celle-ci plus précisément par le verset 11 : «... ils ont été submergés comme le plomb dans les ondes bouillonnantes. » — Claudel exprime la méme idée avec l’image du feu : « Un feu qui unifie dans le Paradis, qui putifie dans le Purgatoire, qui calcine dans l’Enfer» (Trois figures saintes..., O. C., t. XXIV, p. 449). 2. Claudel reprendra cette note quand il composera a Rio de Janeiro, en mats 1918, « l’Architecte», a la mémoire de son beau-pére Sainte-Marie-Perrin (cf. Po., p. 617) : « [La tour] Pareille 4 un fusil contre ’épaule d’un vieux garde-national au port d’armes, aigué comme un cri de joie! / Comme les hirondelles qui font l'une prés de Vautre leurs nids sous l’avancement du toit, /Dix familles ainsi quand revient été occupent toute la hauteur du batiment /Et par le trou de chaque fenétre il entend une voix de jeune femme ou d’enfant. [...] / Et méme quand on croit que tout est parti et que méres et nourrices ont emmené leurs contingents, / Tout-a-coup c’est une voix qui catesse et qui gtonde et l’on voit au premier étage /La figure du tout petit que l’on vient de lever et qui apparait derriére la vitre comme un fromage. » 3. Voir Francois de Ribera, Vie de sainte Thérése, trad. Marcel Bouix, t. I, 1884, p. 430. Cf. Fewilles de Saints (Po., p. 632): «... Elle meurt, dans le déchirement et la transe de amour
définitivement vainqueur, / Couchée sur le cété gauche, apres une agonie de quatorze heures! »
1234
Cahier IIT
4. Cf. /’Ours et la Lune (Th. I, p. 601) : « [Cette route] entte
les buissons qui parait et reparait comme les points irréguliers dun fil.» « blanche» est en surcharge. Page 317.
1. Cf. Protée, I, 1 (Th. I, p. 312) : « Cette mer si bleue qu’il n’y a que le sang qui soit plus rouge! » 2. Don,
hameau
de la commune
de Vieu,
prés d?Hostel.
Artemare seta cité dans /’Ours et la Lune, plusieurs scénes s’y passent (voir Th. I, p. 611, 613). 3. Ce début a été ajouté aprés coup. 4. Chouchette (Marie), Pierre et Gigette (Reine) sont les enfants de Claudel; Marc est le fils du do&eur Millon et de Marguerite, sceur de Mme Claudel; Bernard et Jean sont les fils
de René Sainte-Marie-Perrin, tué a Ypres (voir p. 300); Georges et Marthe sont les enfants de M. Piraud et d’Ida Desjardins, cousine getmaine de Mme Claudel. Page 318.
1. Nous n’avons pas retrouvé la citation exacte, mais Vidée est exprimée a plusieurs reprises dans la conclusion du livre Du Pape. 2. Nous n’avons pas retrouvé la référence exacte. On peut traduire : « Toute ignorance est pénible, bien qu’elle passe pour la plus grande sagesse. » 3. Mgr Baunard, reCteur des Facultés catholiques de Lille, de 1887 a 1908, auteur d’une trentaine d’ouvrages apologétiques ou hagiographiques.
4. Malgré les guillemets, Claudel ne cite pas textuellement, mais résume en dutcissant quelque peu. La derniére ligne cependant est une citation exacte : « De méme, écrit Renan, que plusieurs de ses grands cétés sont perdus pour nous pat la faute de ses disciples, il est probable que beaucoup de ses fautes ont été dissimulées » (Vie de Jésus, Michel-Lévy, 5& éd., 1865, p. 458). — Claudel aimera citer ce texte, ainsi dans une lettre 4 Henri Massis, Table ronde, avtil 1955, p. 89, le 10 février 1916, et dans les Vitraux de l’ Apocalypse (O. C., XXVI, p. 277). 5. Il était « tout entier une voix». 6. « Couvertes de neige », en surcharge. Page 319. 1. Voir p. 295.
2. On sait que, plus tard, dans /e Livre de Chriflophe Colomb et dans /’Histoire de Tobie et de Sara, Claudel proposeta d’utiliser
Abpril-Mai 1915
1235
le cinéma pour obtenit des décors mouvants; idée qui est déja suggérée lointainement ici. 3. Au-dessus de « horizon», Claudel a écrit « les monts»; il avait d’abord écrit « des lignes ». 4. Cf. /’Ours et la Lune (Th. IL, p. 639) : « La limite de la terte
au milieu d’un abime de lumiére aussi mince que le bord d’une coupe, ténu comme un fil de harpe tendu... » 5. Excruciant est écrit 4 droite, en biais : « ils torturent ». 6. Cf. « Introduction a un poéme sur Dante » : « Cet erythrium .. dent-de-chien qui perce la neige au mois de mats de sa petite lance de poutpre, quel immense assemblement de causes concentriques il a fallu pour qu’a chaque fin d’hiver il redevienne possible! » (Pr., p. 426). Page 320.
Jitg Gite jobs EHOfe ' 2. On pourrait lire aussi : « Créateur, credo, créancier. » Mais
Pautre le€ture semble préférable. 3. Claudel fait « une tournée de conférences littéraires, catholiques et patriotiques» (a Frizeau, 7 juin 1915); il reprend la conférence faite aux Aynales (voit p. 315). Eve Francis, comme
dans cette confétence, lit des poémes. On trouvera dans Temps héroiques, d’Eve Francis, quelques détails sur ce voyage (Denoél, 1949). Lucien Gennarti était secrétaire d’un cercle littéraire, qui avait organisé le séjour de Claudel a Milan;
il restera en relations
avec lui et fera beaucoup pour la connaissance de son ceuvre en Italie. Page 321. 1. Au-dessus de « trés curieuse », trois mots de le€ture difficile;
ptobablement « scéne pour Taine »? 2. Un mot illisible aprés ce nom. 3. Cette rencontre avec Peppino Garibaldi n’est pas sans intérét; descendant du célébre Garibaldi, il avait organisé une légion qui combattait en France; un de ses fréres fut tué et il ne put teprendte son corps que difficilement. Voir Eve Francis, Temps héroiques, p. 296. Ces détails ont pu inspirer a Claudel certains traits du Pére humilié; voir. J.-P. Kempf, Jacques Petit, Etudes sur la Trilogie, 3, Archives des Lettres modernes. Pour Piero Jahier, voit p. 242. Ratute : Le Musée. Rature : Musée. . Le&ture difficile : « 4 ’improviste » est douteux.
Claudel SIAL
se trompe dans les dates, en reprenant le récit de
1236
Cahier III
son voyage; le mardi suivante).
18 mai il est déja a Rome
(voir page
Page 322.
1. Ces deux lignes sont écrites entre deux barres horizontales tracées sur toute la largeur de la page. 2. Cf.« Rome», poéme écrit peu aprés ce voyage (Po. p. 543): « Tous les chemins ménent 42 Rome, dit-on, et c’est ici quils aboutissent. [...] / A cette magonnerie qu’on appelle le Colisée comme un muscle et a cette espéce d’engin vasculaire»; p. 545 :
« Qu’est-ce qwil y a a voir? Pas autre chose qu'un homme parmi les bétes, pas autre chose qu’un homme aux prises avec la mort! / Parmi tant de combattants, est-ce qu’il y en aura un enfin qui sera le plus fort? » — Claudel a bien écrit ainsi la derniére phrase : « Jusqu’a ce quelqu’un... » 3. Cf. da Ville, 1 (Th. I, p. 324) : « Jaime l’odeur amére des pétunias », dit Ly, le poéte. 4. Premier
ministre
italien; il restera
en fait au pouvoir
et
déclarera la guerre a PAllemagne. 5. Voit p. 303, n. 2, a propos de« la Vision des eaux futures ». 6. Il s’agit, bien
entendu,
du Pére humilié,
auquel
Claudel
pense depuis prés d’un an (voir p. 291). 7. Ces indications correspondent au premier plan du drame, consetvé dans les archives de Claudel : Orso serait l’ami, non le
frére d’Orian, et tapporterait non pas la téte, mais la main du mort. Voir J.-P. Kempf, J. Petit, op. cit. Page 323.
1. Cf.« Rome» (Po. p. 544): « La pouzzolane qui a la couleur impériale elle-méme de la pourpte mitre. » 2. « Avalé», ajouté en surcharge.
3. Deux ratures successives : flamb., resplendissante. 4. Cf. le Pére humilié, 1, 3 : « Ces eaux [...] qui jamais ne font silence [...] tant de choses, dont j’ai eu Vidée et qui toute cette nuit sont devenues des roses [...], ces mutailles de verdute presque noire [...] le cyprés...» (Th. Il, p. 509-510). Toute latmosphére du premier ate parait étre inspirée par cette visite
de Tivoli. 5. La Chambte italienne d’abord hostile, ce qui avait entrainé la démission du premier ministre Salandra (voir p. 322, n. 4), se vit contrainte sous la pression de l’opinion d’accepter la guerre; le vote eut lieu en effet le 20 mai 1915. 6. Les deux notes qui suivent interrompent le récit, qui se poursuit a la page suivante, ligne 12. Elles paraissent avoir été
Mai 1915
1237
ptises, en marge, sur la page de droite, tandis que Claudel écrit la page précédente. Page 324.
1. Cf. le Pere humilié, WI, 2 (Th. IL, p. 541): « Tant que je suis seule, je suis comme quelqu’un qui n’a point de corps, pas de position, nul visage. / Seulement, si quelqu’un vient, / Me prend, et me serre entre ses bras, /C’est alors seulement que j’existe dans un cotps. [...] Je ne commence 4 exister que dans ses bras. / » ~Les lignes qui suivent sont également utilisées pour cette scéne. 2. Cf. « lArchitecte» (Po., p. 616) : «... construisant cette église bleue et blanche pour le Janicule romain... » 3. Claudel aura oublié cet usage romain quand, aux derniers jours de sa vie, il s’insurgera contre son introduction en France (voir t. II, aodt 1953). 4. Voir dans Mes idées sur le théatre, p. 43. , 5. Idée que Claudel semble avoir découverte en traduisant les Choéphores et qwil teprendra souvent; voit Mes idées sur le théatre, passim. Page 325. 1. Comparer : « [Benoit XV] est un petit homme vif, curieux, interrogeant, qui parait surtout curieux de savoir et de se renseigner. Ce sont des dispositions excellentes. La largeur d’esprit de Léon XIII est redevenue en honneut » (James, p. 280). 2. Rappelons qu’a cette époque la France n’a plus de représentant officiel au Vatican; les relations diplomatiques ne seront rétablies qu’en 1921. 3. Le mouvement «le Sillon», fondé par Marc Sangnier, avait été condamné en 1910 pat Pie X, mais Benoit XV avait en effet une attitude plus favorable. 4. Voit p. 291. — Cette note semble avoir été ajoutée postétieurement. 5. Trois mots illisibles; peut-étre « banc de dev[ant]». — Claudel a accompagné cette note et la suivante de croquis. Page 326. 1. Titre d’un des Poémes de guerre, daté de juin 1915 (Po., p. 536). Page 327.
1, Mére de Vi&tor-Emmanuel, roi d’Italie depuis 1900,
1238
Cahier III
2. Eleonora Duse sera en 1917 la martraine de la derniére fille
de Claudel, Renée (Mme Jacques Nantet). Page 328. 1. Vers d’exil, 1 et VII (Po., p. 13 et 18). Pour le second, c’est
le dernier vers que cite Claudel : « Si vous chetchez ce que j’ai fait, mes mains sont vides. » — Les Vers d’exi/ ont paru dans le Thédtre, 17° série, Mercure de France, dans le tome IV avec /e
Repos du Septieéme Jour et Agamemnon. 2. Cf. le Pére humilié (Th. I, p. 906) : « Les femmes ne devien-
nent intéressantes qu’a cinquante ans. » — On peut se demander sile personnage, l’aétrice, qui prononce cette afrmation, Lady U, n’est pas, masquée a peine, la Duse. Voit J.-P. Kempf et J. Petit, op. cit.
Ps Voit p. 291 et 325. Claudel a d’abord écrit : «la face de marbre d’ Apollon ». Page 329.
1. Dans /e Soulier de Satin, Rodrigue imaginera pour les quatre évangélistes des représentations un peu différentes (cf. Th. II, p. 901). — Sous « biche», une rature : éfudie. z. Cette note se trouve placée entre deux barres horizontales, au milieu de la note suivante, entre « femmes» et « la Duse a raison ». 3. Le 7 juin, Claudel écrit 4 Frizeau : « J’ai vu en Italie la
grande attrice Eleonora Duse. [...] Aprés tant de gloire et d'argent, elle agonise seule et pauvre dans une triste pension de Florence. Mais cette mort a sa beauté [...]. Cela m’a fait comprendre qu'il y a deux types de femmes et que toutes ne sont pas faites pour étre méres de famille. Chez elles aussi l’inspiration souffle parfois dune certaine maniére propre, pour leur plus grand malheut en général. C’est ce que Duse me disait 4 propos de /’Echange qu’elle aime entre toutes mes piéces, et dont elle me parlait encore avec une humilité et des retours sut elle-méme bien touchants » (Jammes, p. 280). Aptés « Bacchante » Claudel a écrit et raturé : Marthe et Marie.
4. Voit dans Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 745-746) le souvenir de ce passage 4 Génes. Page 330.
1. Claudel retrouvera ce souvenit dans /e Soulier de Satin (Th. I, p. 901): «... le parapluie. [...] Et en dessous un évangéliste
Juin 1915
1239
en plein vent, saint Luc en train de travailler a ses écritures, C’est une petite rue d’Avignon...» — Un mot est illisible. 2. Jésuite, célébre prédicateur. 3. Antoine Sainte-Marie-Perrin, son beau-frére (voit p. 300). 4. Note pour /e Pére humilié; au cours de la féte du Ie afte, Sichel porte le costume de la nuit; dans le texte de 1944, Pensée seta la Nuit et Sichel ’Automne. 5. Is’agit du mythe d’Er le Pamphylien, aux derniéres pages | de Ja République, sur la rémunération. Aprés le jugement, les |-méchants sont punis sur terre pendant autant de fois mille ans ~ quwils ont commis d’injustices, les jugstes sont récompensés dans les mémes proportions. Ce laps de temps écoulé, les méchants remontent de l’enfer et les justes descendent du ciel pour faire | choix d’une vie nouvelle. Or il arriva qu’un de ceux qui descen| daient du ciel choisit « la plus grande tyrannie » (619 4); il avait pourtant vécu dans un Etat bien gouverné, « mais s’il avait eu de la vertu, c’était 4 ’habitude, non 4 la philosophie, qu’il le devait » (619 4). '6. Claudel dira de Péguy qu’il était « un fils droiturier de notre Gaule» (Pr., p. 536). Page 331.
|
iemVOltsp 123 Ostia 2 2, Cantique des cantiques, I, 1 : « Qu’il me donne un baiser
| de sa bouche;
car tes mamelles
sont meilleures
que le vin»;
| 2:« suaves comme les parfums les plus exquis... »; II, 3: « [...] Je
| me suis assise 4 l’ombre de celui que j’avais désiré, et son fruit est doux 4 ma bouche»; 4 : « Il m’a introduite dans le cellier a vin; il a réglé en moi amour»;
6 : « Soutenez-moi
avec des
fleurs, fortifiez-moi avec des fruits, car je languis d’amout. » 3. Opuscules de sainte Thérése, Pensées sur Vamour de Dieu, chap. vit.
4. Nom de l’hdépital psychiatrique de Montfavet, 42 quelques _ kilométres d’Avignon. 5. Depuis « faits », semble ajouté aprés coup. | Page 332.
1. Dans l’édition des CEuvres completes de sainte Thérése par les Carmélites du premier monastére de Paris, Beauchesne, 1910, 6 vol.; ce texte est au chapitte xvIIl, p. 139.
2. Ibid., chap. séjour au Brésil (voir p. 303). Cf. ils disent que ce
xrx, p. 152. Claudel poursuivra pendant son |’étude du symbolisme de ]’eau dans la Bible /e Pére humilié : « Ils disent qu’ils n’ont pas soif, n’est pas de l’eau; ils disent que ce n’est pas
1240
Cahier II
Pidée qu’eux-mémes se font d’une soutce et de Peau; ils disent
que l’eau n’existe pas. / Quant a nous, nous ne savons autre chose, sinon qu’elle donne la vie et que nul ne peut vivre sans elle » (TA. I, p. 524). 3. Positions, 11, « Du mal et de la liberté » (O. C., XV, p. 203) : « On obje&te couramment : Comment une faute finie peut-elle entrainer une peine infinie? La question est mal posée. [...] On ne peut dire que l’étre fini est puni avec l’infini. C’est au contraire Pétre naturellement adapté a l’infini, ou immortel, que ses péchés confinent dans le fini... » 4. Voit p. 299, n. 3.
5. Cf. « le Précieux Sang» (Po., p. 542) : « Seigneur, qui pour un verre d’eau nous avez promis la mer illimitée... »
Page 333. 1. La page 138 est une sorte de brouillon constellé de dessins et hiéroglyphes : « [Un dessin fait de plusieurs lignes horizontales sinueuses.] Hiéroglyphe de la mer. — Samaritaine. — Mi. Les eaux, en chinois également. La met, la mére, Marie. [Un mot illisible.] Le serpent. La vie. {wn (les deux constructions paralléles). Le serpent serait-il une corruption du poisson divin? De 1a, tu ramperas dans la poussiére au lieu de l’eau primitive et éternelle. [Un cercle avec 4 l’intérieur une ligne sinueuse.] Le serpent (le poisson dans le cercle). @ Théta, théos, Dieu, fini, infini. P R6 Le harpon avec lequel Isis tire des eaux le cadavre
@ Osiris. N Nu X
Chi Tendance des choses en haut et en bas de
méme.
I Gamma _ La norme, léquerte, l’angle droit. A Delta Les jambes mesurant la terre; le bon champ, le delta, Parpentage. » 2. Ed. des Carmélites de Paris, p. 108. 3. C'est Aace moment, semble-t-il, que Claudel écrit « la Grande Attente» (Po., p. 547). Voir p. 556:« L’an avec toutes ses saisons au complet qui est achevé et de nouveau une autre année qui recommence. » Page 334.
1. HoStel est sur le territoire de la commune
de Belmont.
Juillet- Aout 1915
1241
2. Le Pére humilié, WV, 2: « Que c’est singulier de penser qu’en ce moment il se fait de moi des yeux qui seront capables de voir et que je porte ces étoiles vivantes dans mon sein!» (Th. IL,
P. 559). 3. Kdition citée p. 194. Ce texte intéresse Claudel en fonétion de la thése traditionnelle sur la polysémie scripturaire qu’il développera dans ses ccuvres exégétiques. Cf. Cantique (O. C., XXII, p. 32): « [Dans la Bible] chaque vocable a une portée supérieure a la valeur contingente qu’il sert provisoirement a
recouvtir. » 4. Ibid., p. 196.
Page 335. 1. Cotmaranche est 4 une quinzaine de kilométres d’Hoétel. 2. Ibid., p. 204. « Ces deux derniéres demeutes », p. 200.
3. « Et que désormais personne ne me méprise. » La rele€tute du Cantique des Cantiques, que Claudel, semble-t-il, vient de faire, n’est pas sans importance pour /e Pére humilié; cf. J.-P. Kempf et J. Petit, op. cit. 4. L’Ours et la Lune (Th. I, p. 607). L’Ours dit a la Lune: « Je te paierai des boucles d’oreilles. » 5. Ibid., p. 601 : « les routes de la nuit phosphorescentes et magnétiques ». 6. Ibid., p. 602 : « envisage toutes choses effrontément [dit POurs] jour et nuit comme un homme du monde de cet cil unique et pateil 4 une chique de verte, qui m’a été vissé sous Porbite avec une clef anglaise. » Page 336.
1. Ibid., p. 638, tout le développement final. 2. Voir note précédente : « ... on voit tout la-bas un seul feu gros comme une téte d’épingle dans les ténébres solides, / Et un quart d’heure encore et voila quel’on se réveille dans ’immen-
sité d’une ville...» — Il faut remarquer que /’Ours et la Lune, ptéparé par toutes ces notes, ne seta écrit qu’en 1917 a Rio de Janeiro. 3. Verset 8: « Et il dominera de la mer 4 la mer, et depuis le
fleuve jusqu’aux extrémités de la terre. » 4. Vetset 13 : « C’est vous qui avez affermi la mer par votre puissance, qui avez brisé les tétes des dragons dans les eaux.» _ 5. Verset 4: «La terre s’eSt dissoute, avec tous ceux qui Vhabitent. Moi j’ai affermi mes colonnes. » 6. Sainte Thérése, édition citée, p. 297.
1242
Cahier IIT
Page 337.
1. Ibid., p. 299. 2. Ibid., p. 309. Page 338.
1. Ibid., p. 310. SEE i Brat 3. Ibid. 4. Livre de la Sagesse, VII, 22 : « Unique, multiple, [discret], sir, qui voit tout...» En fait Claudel isole certains des adjeCtifs qui dans ce passage servent a carattériser la Sagesse, 4 moins que ce choix n’ait été fait par Pauteur qu'il lit. 5. Le Pére humilié, Ill, 2 (Th. U, p. 552) : « Laisse-moi une derniére fois tendte les mains vets toi /Comme
les mourants,
quand un ange place la harpe éternelle déja entre ces doigts qui la cherchent. » 6. Darius Milhaud évoque cette visite dans Notes sans musique, Julliard, 1949, p. 71 : « Je m’arrétai au retour [d’Aix-en-Provence] chez le beau-pére de Claudel, M. de Sainte-Marie-Perrin, PatrchiteGte de Péglise de Fourviére de Lyon, chez qui il passait quelques jours en attendant de rejoindre son poste d’attaché commercial 4 ’ambassade de Rome... » Page 339.
1. La Nuit obscure et la vive flamme d’amour, éd. Hootnaett, Desclée de Brouwer, t. III, 1923, p. 165-166. Claudel résume plutét qu’il ne cite; au lieu de Cantique, lire Strophe ; il sagit du
commentaite du 6° vers de la strophe. N . Cité par Ste Thérése, Livre des Fondations, fin du chapitte xv. . Claudel a dabord écrit : « qui ef si solide». . Ils’agit de Francisco Suarez, jésuite espagnol du xvi° siécle. . Matthieu, X, 9 : « Ne possédez ni or ni argent. » uu fw Page 340. 1. Cf. Jammes, p. 284 : « Les événements satisfaisants mais enfin nous sommes
ne sont pas trés
débatrassés de Delcassé;
c’est un bonheur presque aussi gtand que la bataille de la Marne. » 2. Claudel connaissait de Max, qui avait participé 4 la matinée donnée le 25 avril 1912 (voit Cah. Cl. I, p. 113); il comptait alors sur lui pour des lectures; voir par exemple Cah. Cl. V, p. 171.
— Les relations de Vera Sergine et d’Edouard de Max étaient
Septembre-Novembre 1915
1243
bien connues, mais la chronique parisienne attribuait aussi a de Max d’auttes meeuts. 3. Au début d’otobre, les troupes austro-allemandes et bulgares ont déclenché une offensive contre la Serbie; en quelques semaines, toute la Serbie sera occupée. 4. Industriels lyonnais intéressés par la mission économique de Claudel a4 Rome. 5. Voir p. 288, n. 6. 6. Alfred Baudrillart, re€teur de l'Institut catholique de Paris, __Vie de Mgr d’Hulft, de Gigord, 2 vol., 1912-1914. Voir surtout t. I, chap. xvir: Mgr d’Hulst et les congrés scientifiques internationaux des catholiques; t. II, la Question biblique. Page 341.
1. Claudel note, semble-t-il, certaines fétes avec Vindication
des églises de Rome ou elles sont traditionnellement célébrées : notes un peu antérieures a son voyage. ' 2. Nous omettons ici une dizaine de noms propres difficilement lisibles. Sept lignes : visites faites le vendredi et le samedi. Page 342. 1. Le Pére humilié, I, 2 (Th. I, p. 506): «... Pinvasion des
troupeaux quand ils matchent vers les Abruzzes a l’époque de la transhumance... » 2. Ibid., p. 500 : « La ville aux cent démes dans |’obscurité avec une seule place rougeoyante comme un feu de bivac / D’ot sottait le bout d’une colonne antique surmontée de la statue @un Apétre! » 3. Ibid., p. 510 : « Voyez! ces murailles de verdure presque noite sut qui vous n’avez aucune prise / Ne sont la que pour nous sépater du monde. / Tout ce que peut déverser un ciel d’été, / Il faut ces pins qui sont au-dessus de nous l’ombrage et la bénédiétion, il faut pour amener notre ceil jusqu’a cet imperceptible petit point de lumiére la-haut, cette étoile vertigineuse, léboulement de ces sombres avalanches! / Ce palmier derriere vous (I’entendez-vous frémir ?) eSt-ce qu’il ne s’y connait pas en fait de royauté, le jardinier qui a fait place ici 4 ces catara¢tes végétales ? » 4. De la recherche de la vérité, liv. III, Ue partie, chap. v1. 5. Confessions, 1, 1, 1 (ptiére liminaire). 6. Cette note résume toute la premiére scéne du Ile aéte du Pére humilié, la conversation du Pape et du jeune frére franciscain. 7. Cf. Lettre 4 Frizeau, le 25 novembre 1915 : « Quand, des jardins de la villa Médicis, on voit le dome de Saint-Pierre, d'un
1244
Cahier III
blanc bleuattre, avec le soleil d’une qualité vraiment divine qui voisine avec lui comme une gloire, on se sent vraiment chez le Bon Dieu. » Page 343.
1. Lettres, I, xxvu, 1 (P. L., t=. XXXII, coli-107):"«@ homme bon et bon frére, vous étiez inconnu a mon ame.»
2. Verset 7. Tout le début du Psaume est résumé ou partiellement traduit dans les lignes qui précédent. « Ou irai-je pour me
dérober a votre esprit, et ob m’enfuirai-je de devant votre face ?» 3. Deut., XXXII, 21 : « Et moi je les piquerai de jalousie en aimant ceux qui n’étaient point mon peuple, et je les irriterai en leur substituant une nation insensée. » — 22 : « Ma fureur s’est allumée comme un feu; elle pénétrera jusqu’aux fonds des enfers, elle dévorera la terre. [...]» — 35 :« A moi la vengeance, et c’eSt moi qui leur rendrai en son temps ce qui leur est du. [...] » — 37:« Ot sont leuts dieux, dans lesquels ils avaient mis leur
confiance?» — 39 : « Considérez que je suis le Dieu unique, qu’il n’y en a point d’autre que moi seul. » — 40: « Je léverai ma main au ciel, et je dirai : ‘““C’est moi qui vis éternellement”’. » 4. Correspondance du R. P. Lacordaire et de Mme Swetchine, publiée par le comte de Falloux, Paris, Didier, 1864, p. 535. Extrait dune lettre datée de Toulouse, 9 févriet 1854, lendemain
du jour ot Pambassadeur de Russie avait quitté la France (guerre de Crimée). Lacordaire s’inquiéte pour Mme Swetchine, mais « admire dans cette guerre les voies de la Providence. [...] Depuis la fondation des peuples chrétiens sous Charlemagne, toute Phistoire roule sur la lutte des faibles contre un homme ou un empire qui abuse de sa prépondérance. [...] Dieu ne veut pas que le succés du monde romain se renouvelle; il a divisé les nations... »
Page 344. 1. Le comte Joseph Primoli, artiére-petit-fils de Lucien Bonaparte et neveu de la princesse Mathilde. Voir Marie-Louise Pailleron,
/e Paradis perdu,
dans
la Revue
des Deux
Mondes,
15 juillet 1942, p. 191-194. « Le comte Primoli se souvenait d@’étre Bonaparte en appelant dans ses salons toute illustration frangaise traversant [Rome].» Raymond Schwab, /a Vée d’Elémir Bourges, Stock, 1948, p. 145. — Le peintre Albert Besnard était alors direfteur de |’Académie de France. 2. « Premiere » est en surcharge. 3. Trois entretiens, CEuvres completes, t. VIII, 1911. L’idée du
Décembre 1915 - Janvier 1916
1245
progtés, symptéme de la fin du monde, vient de Tourgueniev. Claudel lisait déja Soloviev en 1912 (voir Gide, p. 196). Page 34). 1. « De Quirinus » est en surcharge. — On retrouvera trace de cette réflexion dans le « Projet pour une église souterraine a Chicago », Positions, I. 2. Le Pere humilié, 1, 2 (Th. I, p. 507): «... ce qui s’offre au
regard c’est une colonne de porphyre entourée d’une guirlande “dor qui s’éléve parmi la fumée des sacrifices. » 3. Claudel admirait Lucien Guitty; en 1914, il songeait 4 lui pour jouer Turelure dans /e Pain dur (Cab. Cl. V, p. 160). Page 346.
1. Claudel a dessiné en marge
un visage et des esquisses.
Au-dessus de « Statue de Sainte», il a écrit « ou tableau ».
| 2. Le Pére humilié, I, 3 (Th. I, p. 509) : « [Pensée] telle que le Printemps avec un grand ceillet comme un javelot entre les doigts. »
3. Il semble bien que ce cloitte ait inspiré le décor du second atte du Pére humilié: « Un cloitre de matbre blanc. [...] Au milieu un puits de marbre. [...] Le jardin est tout planté d’oran\ gets» (Th. I, p. 520). | | Page 347.
1. Cf. le Pére humilié (Th. II, p. 505) : « Jimagine que M. de Homodarmes et sa Psyché vont avoir fini leur petit tour de jardin. »
1916 Page 348. 1. Camille Barrére, ambassadeut de France 4 Rome.
Claudel
en parle avec sympathie, le classant du moins parmi les « grands ambassadeurs » dans « Adieu 4 l’Amérique » (Pr., p. 1220), mais sé moque un peu de lui dans un texte un peu plus tardif (Pr.,
p. 1255).
1
7
v
2. Ce théme intéresse et irrite Claudel; il faut renvoyer ici a «la Légende de Prakriti» (Pr., p. 944), texte dans lequel Claudel tentera de trouver une « solution » personnelle. 3. Nom illisible.
1246
Cahier III
Page 349. 1. Young, /es Nuits, 18°, « la Conscience», note C: « [Pour
que les méchants soient chatiés, il n’est pas besoin de démons ni de furies.] La vibration aigué de la brillante lumiére [de la vérité], voila ’enfer.» On sait que le poéte William Blake fut aussi peintre et graveur. 2. Nom illisible : « L. » suivi de « S. C. de S.». 3. Cf. Po., p. 563, « A I’Italie » : « Duse! vous souvenez-vous a Rome cette année dans votte petite chambre d’hétel, / Cette étoile dans le ciel vert... » i 4. Premier commis du bureau des Vingtiemes, Etienne-Noél Damilaville faisait circuler en franchise les lettres de Voltaire, Diderot, d*Holbach, d’Alembert, etc. Le théme le plus constant des nombreuses, et le plus souvent courtes, lettres de Voltaire a
Damilaville, est ’inefficacité des philosophes dans la lutte contre le « fanatisme» : « Si les philosophes s’entendaient, ils réussiraient a écraser Pinfame! » 5. « couchant » est en sutcharge. 6. Claudel reviendra souvent sur ce théme de l’archite€ture baroque; voir en particulier Pr., p. 257: «... cette architeCture baroque qui répond tellement a mes gouts. » 7. Voit plus loin, p. 356. 8. Job, VIII, 9 : « Car nous ne sommes que d’hier... » 9. Proverbes, XXVIII, 5 : « Mais ceux qui recherchent le Seigneur, prennent garde a tout.» 10. Job, X, 12 : « Et c’est votre providence qui a gardé mon ame. »
Page 350. 1. Eccl., XL, 2: « Les réflexions qui les tiennent en suspens. » 2. Joél, II, 2 :« Comme l’aurore se répand sur les montagnes. » 3. Cf. le Soulier de Satin (Th. I, p. 876) : « Le respec! toujours le respect! Le respeé& n’est di qu’aux motts, et a ces choses non
pas dont nous avons usage et besoin! » 4. Cf. Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 755) : « Comme c’est joli, ces vieilles rues de Rome ot les maisons du gris au rose en passant par le jaune, présentent toutes les nuances des dessous de champignons frais!» 5. 1,9: « Car Pimpie sera interrogé sur ses pensées. » Rétablir « erit au lieu de « ef». 6. Trad. : « Par ce qui est hors de nous 4 ce qui est en nous; par ce qui est en nous 4 ce qui est au-dessus. »
Janvier-Feévrier 1916
1247
Page 351.
Tew Ciapw26Osnile 3" 2. Le Pére Garrigou-Lagrange, dominicain, professeur a Puniversité romaine Angelicum. — L’écrivain danois Johannés Jcegersen fait partie depuis 1910 de la « Coopérative de priéres » (Jammes, p. 183). Claudel parle également de lui (sbid., p. 272) a ptopos des polémiques que provoqua en 1914 la premiére représentation de /’Ofsage. — Pout cet article, voir la lettre 4 Massis, 10 février, publiée dans /a Table ronde, avril 1955, p. 88 : « Les
- Italiens me font ’honneur de s’occuper de ma modeste personne. A propos de la Corona, j’ai été violemment attaqué par le principal journal catholique, le Corriere d’Italia, qui m’accuse de manquer de respect avec les textes sacrés et d’oSstentation! Toujours la méme tendance qui a si brillamment réussi : laissons bien tranquillement ow elles sont, sans jamais en faite usage, les paroles de vie, sous prétexte de respeff, ce mot absurde. La vie n’a pas tant de ménagements, et ce qui est agréable a Dieu, ce n’est pas le respeé, le pharisien qui se tient 4 distance respeétueuse, c’est le besoin; la familiarité est toute naturelle avec un pérte. » Cf. p. 350 une note déja inspirée sans doute par cet article. Page 352.
1. Trois mots illisibles : « Les G... nuovoi. » 2. La derniére phrase semble se rapporter 4 mer de la phrase suivante; Claudel l’a écrite aprés coup sur la partie blanche de la page aprés « en plein ciel»; nous pensons toutefois qu’il faut lite : « Naples est un grand balcon sur la met si belle qu’elle n’est comparable qu’au sommeil le plus profond. » Cf. « Rome » (Po., p. 547): « Cette longue ligne a4 l’horizon la-bas toute droite plus désirable que le sommeil. » 3. Claudel a d’abord écrit : Pas 2 Ja porte du cimetiére. Page 354.
1. Cette note est insérée dans la précédente, entre deux barres horizontales. 2. Voit plus bas : Futura olim; C est le titre que Claudel a
donné 4 la préface de ses ceuvres complétes : « Choses jadis futures. Passées alors? Non point passées. Présentes...» Dans Conversations dans le Loir-et-Cher, Grégoire et Saint-Maurice dialoguent a propos d’une « simple feuille de papier sur laquelle sont écrits ces mots : “Futura olim’.» « Excellent titre pour un
|
|
recueil d’anticipations » (Pr., p. 780). 3. Hinnulus (qui signifie le faon, mais aussi le baudet) sera le nom d’un des savants du Soulier de Satin (Th. I, p. 895) :« «.. j’ai
1248
Cahier IIT
toujours peur de voir arriver Hinnulus. Quel baudet 4 longues oteilles!»» — « de Muses» est en surcharge. — II est probable que Claudel, lisant un texte latin, note des mots dont le rapprochement n’est étrange que par l’absence de tout contexte. Nous n’avons pu tetrouver le texte qui lui aurait suggéré ce
« jeu».
Page 35). 1. Cf.« AV’Italie » (Po., p. 563) :« Cette étoile pour nous dans le ciel vert, non pas une seule étoile, mais deux, / Jusqu’au jour ou chaque jour plus proches elles ne firent plus qu’un seul feu! » 2. Déja noté as haut, p. 353.
3. Voit-p. 93, n.
A Cf le Pére jumilis, Il, 2 (Th. I,p. 533) : « orso. — Et c’est parce qu’il aime trop que vous lui dites de ne pas l’épouser? / LE PAPE, — Ce n’est pas parce qu’il l’aime trop, mais parce qu'il ne l’aime pas assez. » 5. Trad. : « Crains que Jésus ne passe une fois et ne revienne
pas. » 6. Ils’agit de la seconde édition, non datée, de ]’Art poétique; cette note précise l’époque de sa parution; les arguments y figurent pour la premiére fois. 7. Verset 5 du chapitre vur : « Quelle est celle-ci qui monte du désert, enivrée de délices ? »
8. Trad. : « Que le Seigneur soit entre moi et toi! » 9. Le 31 mai, Claudel écrit 4 Massignon : « Le Prince Wladimir Ghika est une figure bien intéressante. Converti, do&eur en théologie, il est laic tout en pronongant les veeux pour répondre aux volontés du Pape qui a pensé que son ceuvte ainsi poutrait étre plus large et plus facile. Il a amené 4 Bucarest les Sceuts de St-Vincent de Paul qui étaient précédemment 4 Salonique, il vient d’y implanter les Assomptionnistes. [...] Le Prince Ghika a écrit aussi quelques petits ouvrages d’une haute mysticité qui me tappellent un peu le genre du P. Faber, un entre autres, sur la souffrance, qui m’a beaucoup frappé » (cité par Chaigne, Vie, p. 149). On trouvera ibid. quelques renseignements sur la personnalité et la vie du prince Ghika. Voir aussi Michel de Galzain, Une ame de feu, Mgr Wladimir Ghika, Beauchesne, 1961,
et W. Ghika, Pensées pour la suite des jours et Entretiens spirituels, Beauchesne,
1961.
Page 356.
1. Citation du Cantique des Cantiques, V, 2. On sait quelle importance ce théme du « cceur » a pour Claudel (voir A. Vachon, op. cit., passim).
Février-Mars 1916
1249
2. Claudel commence la leture de /’Histoire littéraire du sentiment religieux en France, de Vabbé Henri Bremond, dont le premier tome vient de paraitre. Il écrit par disteaGion S.-Etienne-du-MontaulieudeS. sfidénae- du-Greés, église aujourhui disparue, qui se trouvait prés de l’hdtel de la Rose blanche ou demeurait le jeune Frangois de Sales, alors éléve au collége de Clermont. La Vierge noite de S.-Etienne-du-Grés, mise en vente pendant la révolution, honorée dans la chapelle des Religieuses de S. Thomas de la rue de Sévres (Huysmans vint prier devant elle), fut ensuite transportée dans le couvent des mémes teli~ gieuses a Neuilly. — Sur la crise de scrupules que traversait alors Francois de Sales, et que dissipa soudain sa priére devant la Vierge noite, voir le témoignage de sainte Chantal dans Bremond, p. 86. La phrase latine citée par Claudel est p. go. Rétablit : nominis mei qui non est damnator... « Gloire 4 mon nom qui n’est pas le damnateur, mais Jésus. »
Page 357. 1. De civitate Dei, lib. XTX,
cap. xi,
xiv
(P. L., t. XLI,
col. 640-642). Claudel a écrit au début de la citation rationisque au lieu de aéfionisque. — 13 : « Ainsi donc, la paix du corps, c’est Vagencement harmonieux de ses parties; la paix de Ame sans taison, c’est le repos bien réglé de ses appétits; la paix de l’Ame raisonnable, c’est Paccord bien ordonné de la pensée et de Paction; la paix de l’Ame et du corps, c’est la vie et la santé bien
otdonnée de l’étre animé; la paix de homme mortel avec Dieu, c’est ’obéissance bien ordonnée dans la foi sous la loi éternelle;
la paix des hommes, c’est leur concorde bien ordonnée; la paix de la maison, c’est la concorde bien ordonnée de ses habitants dans le commandement
et l’obéissance; la paix de la cité, c’est
la concorde bien ordonnée des citoyens dans le commandement et l’obéissance; la paix de la cité céleste, c’est la communauté
parfaitement ordonnée et parfaitement harmonieuse dans la jouissance de Dieu et dans la jouissance mutuelle en Dieu; la paix de toutes choses, c’est la tranquillité de Pordre. L’ordte,
c’est la disposition des étres égaux et inégaux, désignant a chacun la place qui lui convient. » — 12 : « [Par exemple si un homme est suspendu la téte en bas...] ce renversement trouble la paix de la chait; c’est pourquoi il est pénible. L’4me pourtant reste en paix avec son cotps et s’inquiéte de sa santé; c’est pourquoi il y a un homme qui souffre. Quand l’4me le quitte, chassée par les souffrances, une cettaine paix n’en régne pas moins dans le corps
qui demeure tant que dure l’assemblage des membres...» — 14: « C'est pourquoi si nous étions des animaux sans raison, nous n’aurions de désir que pour la bonne constitution de notre corps
1250
Cahier III
et l’apaisement de nos appétits... Lorsqu’en effet cette paix du corps fait défaut, celle de |’Ame sans raison est aussi com promise, patce qu’elle ne peut obtenir le repos de ses appétits... Mais comme l’homme est doué d’une ame raisonnable, il assujettit a la paix de l’Ame raisonnable tout ce qu’il a de commun avec les bétes. » Trad. G. Combés, Desclée de Brouwer, 1960. 2. Introduttion a la vie et aux vertus chrétiennes, pat M. Olier,
Paris, Gaume, Vhumilité», p. elle est établie. deux attributs
1833, chap. v, 3° section, « Des fondements de 65 : « L’humilité a deux fondements, sur lesquels Le premier eét la vérité, le second est la justice : divins, selon lesquels nous devons vivre. »
3. Le 8 mats, Claudel écrit
4 H. Massis : « Quels sombres
jouts nous passons en ce moment, cher ami. Il faut prier, car c’est vraiment l’heure du Prince de ce monde. Hier j’étais horriblement triste et je suis allé prés de saint Jean de Latran faire Pexercice de la Scala Santa...» (/a Table ronde, avril 1955, p. 90). — Cf. « Sainte Geneviéve » (Po., p. 642): «... a Rome [...] entre les deux communiqués, / L’angoisse, et imagination qui s’affole, et cette sourde douleur constante, et ’ennemi toujours dans notte chair enfoncé... » Cette note semble se rapporter au poéme « le Crucifix » (Po., p. 554). 4. « Ils m’ont abandonné, moi qui suis une source d’eau vive,
et ils se sont creusé des citernes, des citernes crevassées, qui ne peuvent retenir l’eau. » SL a Geeigatt, Ssadragtdies, atte. racers 6. Dans Védition des Carmélites de Paris,
1910,
liv.
II,
chap. 111. Pour les trois textes : Exode : « Et la nuée était ténébreuse et éclairait la nuit.» — Ps. XVIII : « Le jour proclame ce message au jour et la nuit en donne connaissance 4 la nuit. » — Ps.
CX XXVIII,
11 : « Mais la nuit méme devient ma lumiére
dans mes délices. » — Il faut noter le rapport entre ces themes et Je Pere humilié — personnage de Pensée — que Claudel achéve alots. 7. Ibid., liv. I, chap. vr. 8. Ces mots sont de la main de Claudel. Le texte italien qui suit est une coupure de journal. Trad. : « Je vois a la jumelle les Allemands; ils prennent leur élan et s’avancent en masses profondes. Derriére les ptemiéres tétes d’autres apparaissent a perte de vue. Comme un flot, cette force massive, pesante, avance. Maintenant nous les voyons nettement; ils sont au coude a coude, ils ont besoin de se sentir en contaé, de se sentit pied contre pied. Ils marchent le Mauser au bras, et
vident leur chargeur d’un geste mécanique de l’index. Mais ils avancent
comme
une
matée
monstrueuse;
de leurs
tangs,
a
travers le fracas de leurs canons qui continuent 4 tonner, montent des chants qui ressemblent 4 des aboiements. Ainsi est l’Ame
| ] | | ]
Mars 1916
1251
allemande que l’on a faussement représentée comme empreinte de sentimentalité; elle n’a pour se manifester que le hurlement -des chacals et des hyénes. Mes soldats frémissent. Je les retiens. Mais jusqu’a quand les maintiendrai-je derriére le parapet? Brusquement, quand la vague allemande est 4 trois cents métres de nous, éclatent, formidables, mille détonations en méme temps; c’est notre artillerie qui, ayant laissé s’avancer l’ennemi,
le fauche maintenant de plein fouet en méme temps que nos mitrailleuses. Mes soldats crient : Bien! et en font autant... C’est - bien la scéne la plus terriblement infernale que j’aie vue en ~ dix-huit mois de guerre. L’Yset, ot pouttant la lutte fut surhumaine, ne peut s’y compater. J’aurai toujours devant les yeux cette vision attoce.
« Notre mitraille atteint les Allemands en tonnant et en sifflant comme un outagan épouvantable; tous nos canons de tout calibre tirent en méme temps, langant en l’air une gerbe de chair allemande coupée en morceaux; l’infanterie allemande de premiére ligne était si serrée que les soldats atteints oscillaient un instant sous le choc du projectile et déja morts restaient encore debout quelques secondes. Les files successives étaient littéralement fauchées. Nous voyions nettement voler des tétes, des bras, des jambes, et méme des torses, dans une fumée rouge jaunatre qui montait de la foule. C’était comme si nous avions devant nous un mur humain dont les pierres auraient été des tétes fendues. Les corps s’accumulaient en longues files hautes a certains endroits d’un bon métre. Eh bien, malgré cet épouvantable carnage, cet inimaginable tuerie, cette hécatombe qui défiait en horreur les tableaux les plus sombres, il y avait encore des Allemands et des Allemands qui avangaient contre nous, escaladant les corps de leurs camarades tombés, les foulant aux pieds souvent, de leurs lourdes bottes, et qui s’élangaient en avant jusqu’a ce que, pris sous le feu des mitrailleuses, ils s’abattent, inertes, devant nos barbelés.
« A un moment, il y eut pourtant, dans le terrible flot qui se langait contre nous, un grand désordre, qui se traduisit par un mouvement circulaire, comme un tourbillon vivant, derriére les cadavres. Alors nos canons et nos mitrailleuses, redoublant
de violence, jetérent au milieu de cette hésitation une telle pluie d’aciet que, tournant le dos, ils se repliérent derriére un mouvement de terrain. Aprés cette force gigantesque qui faisait littétalement
trembler
la terre,
devant
cet énorme
monceau
de
cadavres, il y eut comme un moment de tréve. I] semblait que la béte féroce, harcelée et domptée, s’était tapie dans un coin de
cette cage sanglante qu’était le champ de bataille, la gueule pleine de bave, haletante. »
1252
Cahier IV
Page 359. 1. Ce texte est écrit sur une carte de correspondance
non
collée, insérée entte les pages 176 et 177; en travets, au ctayon, le mot « Dominica». Le texte de S. Paul est dans Timothée,
Ile épitre, 1, 5; rétablir : Non coronatur nisi..., « [il] n’est pas couronné, s’il n’a pas combattu selon les régles ». 2. Compléter la référence : Montée du Carmel, loc. cit., liv. II,
chap. Ix. 3. Ibid., chap. xvui, d’apres Imitation, II, 25 : ut gustata suavitate supernae felicitatis, pigeat de terrenis cogitare: « afin qu’ayant trempé mes lévres 4 la source des biens éternels, je ne puisse plus sans dégout penser aux choses de la terre» (trad. Lammenais). 4. Ibid., chap. xv; le texte cité est extrait du Ps. CXLVII, 17. Page 360. 1. Ps. XLIII, 22 : « ... nous sommes tous les jours livrés a la mott et on nous regatde comme des brebis de boucherie. » — 23. « Levez-vous; poutquoi dormez-vous, Seigneur? Levezvous,
et ne nous
repoussez
pas a jamais.» —
24. « Pourquoi
détournez-vous votre visage? pourquoi oubliez-vous notre misére et notte tribulation ?» — 25.« Car notre ame est humiliée dans la poussiere et notre sein est collé 4 la terre. » — 26.« Levezvous, Seigneur; secourez-nous et rachetez-nous a cause de votte
nom. » 2. En face de « Vers applicables 4 la guerre a€tuelle », sur le dernier feuillet du cahier, on lit « Hélas! encore plus aujourd’hui. 7 juillet 1940.» — A cédté, un portrait de Walt Whitman collé. En 1926, Claudel louera Whitman d’avoir été le seul, au xx siecle, a s’intéresser au présent : « Personne n’a compris, sauf Whitman, ces freres sur toute la planéte qu’on mettait a notte disposition » (« Richard Wagner», Pr., p. 865).
CONE
RaIN
Page 363.
1. Cette note est sur la page 1 du Cahier, suivie de la signature de Claudel. — Le vetso de la page est blanc. — Les pages de ce IVe Cahier ne sont numérotées qu’au recto, ce qui explique la pagination donnée ici : [2], [2 v], c’est-a-dire p. 2 verso.
Décembre 1916
1253
2. Voir Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 776) : « Tout de méme il y a une certaine valise que l’on m’a volée a Lyon, et une autre a Marseille, et que je voudrais bien ravoir. Ce cahier de notes depuis qu’on me I’a pris, je voudrais bien connaitre son histoire et ce qui s’eSt écrit sur ses pages blanches. » 3. Claudel avait en effet imaginé la construction d’une ligne de
chemin de fer qui, se substituant 4 |’Orient-Express, eat réuni Bordeaux
4 Constantinople part le Simplon, Milan, Trieste et
Belgrade... En juillet 1916, le ministére du Commerce I’avait chargé d’étudier en France les conditions dans lesquelles cette ligne pouyait étre réalisée; c’est la raison pour laquelle il fait alots cette « tournée commerciale» dont il parle plus loin. Voir Cah. Cl. IV, p. 150. 4. Il s’agit sans doute d’un commergant bordelais et non du critique de /’Aétion francaise. A Voccasion de ce passage a Bordeaux, Claudel verra Frizeau (Jammes, p. 290, 291).
5. Voir plus haut p. 55, n.r. Dumesnil est mort en aout 1916; cest peu aprés que Claudel écrit le poeme a sa mémoire (Po., Pp. 603). Page 364. 1. Cf. dans la Cantate, écrite trois ans plus tot : «... [Le Rh6éne] en un flot torrentiel et solide, / En un pan de verre» (Rotre pets 41): 2. Claudel a d’abord écrit : qui représente... 3. Voir p. 289. La baronne de Seckendorff épousera le prince de Borgia, du corps diplomatique italien. 4. Voir le Soulier de Satin, 1, 14 (Th. I, p. 722): « ... cette belle truite tose sous sa peau d’argent comme une nymphe comestible... » 5. Marguerite
Sainte-Marie-Perrin,
sceur de Mme
Claudel,
épouse du do&teur Henri Millon; elle est morte le 10 septembre
1961.
Page 365. 1. Fabticant de machines agticoles. 2. Cette matinée fut donnée au profit du foyer franco-belge. — « La Cloche», lu par Copeau, est un poéme de Connaissance de lV’Ef. — Louise Lara (1876-1952), sociétaire de la Comédie-
Francaise, plus tard dite&trice d’Ars et affion, avait joué Violaine en1912; elle lut le début de la Cantate avec Jeanne Delvair et Eve Francis. — Jean Hervé, mobilisé, avait obtenu une permission qui lui permit de jouer Georges de Cotfontaine au Théatre Antoine, le mois suivant. — Janvier jouera dans cette reprise
1254
Cahier IV
le rdle de Badilon. — Claudel prononga une « Introduétion » demeurée inédite; on en lira un fragment dans les notes d’O. C.,t. XVIII, et la présentation de Partage de Midi dans les notes de Th. I. — Voir dans Temps héroiques, d’Eve Francis, Denoél,
1949, p. 338 sq., le récit de cette matinée. 3. C’est Gémier et non Lugné-Poe qui assure la mise en scéne de ces teprésentations de /’Ofage (Lugné-Poe avait monté la piéce en 1914). José Savoy jouait le Pape, comme en 1914, ve Francis, Sygne. — Les représentations eurent lieu au Théatre Antoine du 11 au 17, et non du 12 au 18 : huit représentations, deux matinées vendredi 15.
le jeudi
14 et le dimanche
17, et relache
le
4. Jammes était venu a Paris ot il fit une conférence le 23 décembre.
Avant cette note, Claudel, plus tard, a écrit a tort :
« 1917».
I9I7
Page 366.
1. Voit Cah. C/. Ill, p. 50. Claudel annonce 4 Milhaud que tout est « atrangé avec Philippe [Berthelot] » et lui annonce le départ pour le 6; départ retardé du samedi 6 au mardi 9. 2. Louise de Massary, sceur de Claudel; Antoine et Elisabeth
Sainte-Marie-Perrin, ses beau-frére et belle-sceur.
3. Sut la page 4, Claudel a collé, avant de se séparer de sa famille, cing photographies : au centre, son fils Pierre; en haut a gauche, Mme Claudel; a droite, ses quatre enfants; en bas a gauche, ses filles Marie et Reine; 4 droite, son
fils Henri. I]
a écrit : « Pierre, juillet 1915; tous les autres, aoat 1916.» 4. Cette image suflira 4 suggérer certaines scénes du Soulier de Satin; I, 7 et 9 se passent en effet dans « le désert de Castille », « Montagnes tomanesques dans l’éloignement », a noté Claudel (Th. II, p. 691). Elles correspondent bien 4 ces « paysages d’aventures et de romans», puisqu’il s’agit de la scéne entre
Rodrigue et le Chinois, de l’enlévement d’Isabel et de la bataille. 5. Claudel teverra ces tableaux lorsqu’ils seront exposés 4 Genéve en 1939; dans « la Peinture espagnole» qu’il écrit alors, il se montreta moins sévére pour Goya : « La basse fosse, le monde intense et vermineux de Breughel et de Jér6me Bosch, que chérissait Philippe II et ou plus tard Goya opérera des descentes...» (Pr., p. 215); il jugera « délicieux» un petit tableau de lui (Pr., p. 217). Mais il restera réticent devant les ceuvtes du Greco : «... d’ou nous vient, au milieu de ces étranges bonshommes, cette géne? Quelques rares succés, oui, mais
Janvier 1917
1255
jamais une impression de plénitude, je ne dis pas d’une surabondance, jamais celle d’un homme qui s’est laissé faire, d’une joie désintéressée, aucune sécurité, l’artiste est toujours présent, Peffort est toujours sensible...» (Pr., p. 220). Pour les autres tableaux évoqués ici, voit ce texte. Page 367. 1. Claudel a écrit et raturé : blanc. 2. Ministre de France a Lisbonne. comme ambassadeur a Londres. 3. Belem,
quartier
suburbain
de
Il terminera Lisbonne;
une
sa carriére scéne
du
Soulier de Satin se passe au palais de Belem (I, v1; TA. Il, p. 686). D., sans doute Daeschner, plutét que Darius Milhaud. 4. Nom du bateau anglais sur lequel Claudel doit embarquer pout le Brésil. 5. Claudel a d’abord écrit : verticales. 6. Un signe semble renvoyer 4 la fin de la note précédente : «,Cet homme qui tenait une poule caquetante... » Page 368. 1. Voir « Ballade», poéme écrit « En mer, janvier 1917» (Po., p. 605) : « Pendant que les émigtrants de troisiéme classe la-bas faisaient timidement un peu de musique / Et que la mer inlassablement montait et redescendait 4 chaque coupée du salon [...] /Rien que la mer a chaque cOté de nous, rien que cela | qui monte et qui descend. » 2. Voit la Messe la-bas (Po., p. 512) : « Toute la nuit au troi| siéme étage du ciel annongant le temps nouveau cette espéce de Géant stellaire. » — Des ratures et renvois confus laissent penser que Claudel a voulu, dans une seconde rédattion, écrire : _ «... la coruscation au troisiéme étage du ciel de ce grand corps dont le nom est multitude», en supprimant : « de ce corps...
_ apparait ». |
3. Les huit notes qui précédent (depuis « Trois femmes avec _ des corsets d’or...») sont écrites au crayon. 4. Ces chiffres sont écrits sut une feuille de papier 4 lettre bleuté avec en-téte de l’hétel Mirabeau, 8, rue de la Paix, Paris.
Ils ne semblent pas de la main de Claudel. — Les recettes de _l’Echange, en 1914, étaient nettement
moins importantes (voir
_ Cah, Cl. V, p. 83), celles de /’Osage, repris a l’Odéon, étaient ptoches de celles relevées ici, mais il n’y avait eu que trois | teprésentations. 5. Le 21, selon Chaigne (Vie, p. 153). 6. Lrimage reparaitra lorsque Diego Rodriguez évoquera sa médiocre découverte, /e Soulier de Satin, WV, 7 (Th. I, p. 909) : CLAUDEL
V - 43
43
1256
Cahier IV
«... C’est un pain de fonte rouge au milieu de l’océan Atlantique... » 7. « ou capturé» est en surcharge. 8. La « Ballade» (Po., p. 605) fait allusion aux « batiments torpillés », aux « grands transatlantiques » coulés. Page 369. 1. Cf. /e Soulier de Satin (Th. I, p. 751) : « Sur cette rose Atlantique...» Mais ce passage rappelle surtout Partage de Midi (Th. I, p. 991) : « Avez-vous bien vu hier /Comme du cceut de la grande substance de la mer / Il naissait, feuillages verts / Et lacs roses et tabac...» 2. « Manches» est réécrit au-dessus d’un mot de lecture difficile, non raturé. Il semble bien que Claudel se relisant éctive le méme mot plus clairement. 3. C’est le theme méme de la « Ballade» : « Ceux qui sont partis pour toujours et qui n’artiveront pas non plus...» (Po., p. 604). 4. Purgatoire, X, 95 : « [Celui qui jamais ne vit chose nouvelle, sut produite] ces paroles que l’on voit, [nouvelles pour nous, cat sut terre on ne les rencontre pas]. » — Cf. « Réflexions sur le
vets frangais » (Pr., p. 29): « le parler visible» de deux personnes qui parlent derriére un mur, de telle sorte qu’on entend la musique des mots sans en comprendre le sens; et « Premier discouts aux hommes de lettres belges» (Pr., p. 1227): «... a tous ceux qui ne me connaissent que par l’accent de cette parlure visible,comme dit le vers de Dante, qui résonne aux pages d’un livre...» 5. Ecrit au crayon depuis « Une pédale de cuivre...» Page 370.
1. Sut Jules Chevalier, voit p. 376, n. 5. 2. Petropolis, « résidence d’été des diplomates, des membres du gouvernement... », note Darius Milhaud, Notes sans musique,
p. 86. — Silvestre est une montagne proche de Rio, excursion traditionnelle pout la vue sut la baie. — Le canal do Mangue se trouve dans un autre quartier de Rio.
3. Ces deux chiffres, ajoutés aprés coup, semblent indiquet que Claudel se rend de nouveau a Petropolis le dimanche 11 et le lundi 12 février. 4. Comme on le verra d’aprés les citations bibliques relevées dans les pages qui suivent, il semble que Claudel, étudiant le symbolisme de Peau, ait alors lu systématiquement la Bible; il teléve ici les passages qui l’intéressent, mais sans se rapporter 4 ce theme; il copie en effet les autres sur un cahier spécial. Ici
Janvier-Féevrier 1917
1257
Genése, 12 : « [Voici le signe de alliance que j’établis] pour jamais [entre moi et vous] et tous les animaux vivants qui sont avec vous, » — 15 : « Et je me souviendrai de l’alliance que j’ai faite avec vous et avec toute 4me qui vit et qui anime la chair. » 5. Gen., X, 5: Ab his divisae sunt insulae gentium, « C’est pat eux que furent peuplées les iles des nations». Il s’agit des fils de Japhet. Fillion indique que imsulae gentium désigne la partie méridionale de Europe. 6. Verset 4 : « Et rendons notre nom célébre avant que nous ~ nous dispersions en toute la terre. » 7. « Et moi en lui» est en surcharge. Page 371.
1. On retrouvera les principaux thémes de cette réflexion sur P« arbre de vie» dans Paul Claudel interroge 1’Apocalypse (O. C., t. XXV, p. 285, en particulier). Bs (Gy OGY he, 2h Hey '3, Gen., XVII, 1: « Je suis le Dieu tout-puissant. Marchez
devant moi et soyez parfait.» — 8 : « Tout le pays de Chanaan, comme une possession éternelle. » 4. Gen., XIX, 20: « Mais il y a prés dici une petite ville od je puis fuir; elle est petite, je puis m’y sauver. Vous savez qu’elle n’est pas grande et elle me sauvera la vie. » 5. Un prénom et un nom illisibles; seule Pinitiale du nom est nette : F. 6. Il faut comprendre : Esdras, liv. III, chap. rv, verset 22;
cétablir : cum furtum fecerit et fraudes... « Et lorsqu’il a commis des | vols, des fraudes, des rapines, il les appotte 4 celle qu’il aime. » —
Le Ile livre d’Esdras est considéré comme apocryphe, mais | figure assez généralement, a titre documentaire, dans les édi| tions anciennes de la Vulgate.
7. Lapsus : lite 400 sicles (Gen., XXIII); Abraham achéte ce champ pour enterrer Sara. 8. Le Soulier de Satin, 1, 7 (Th. U1, p. 698) : « La-bas, sous les feuilles [...] une femme qui pleure de joie et qui baise son épaule
nue. » |
9. L’Ours et la Lune (Th. II, p. 638), avant-derniére phrase :
| «... une plage au pied de montagnes sombres toute jonchée de _ grandes palmes desséchées... » Page 372.
1. Versets 24-26 : « Etes-vous mon fils [Esaii]? Je le suis, répondit Jacob. [...] Isaac lui dit : Approchez-vous, mon fils,
et venez me baiser. » Verset 33 : « Isaac fut frappé d’un profond
1258
Cahier IV
étonnement...» — C’est le récit qui parait avoir vivement frappé Claudel de la bénédi€tion usurpée par Jacob. 2. Claudel ne note pas un itinéraire, mais des lieux qu’il a vus. Therezopolis, ov il se rendra souvent, est une ville de villégiature 4 une centaine de kilométres de Rio. Gavea, une plage toute proche de Rio, a la sortie sud-ouest de la ville; Tijuca, une
montagne couvette de foréts, prés de Rio, au nord-ouest. La Vista Chineza est proche de Therezopolis. Et la corniche est la route a flanc de montagne qui conduit de la Gavea 4 Rio. 3. Ps. XLI, 3 : « Mon
4me a soif du Dieu fort et vivant.
Quand viendrai-je, et paraitrai-je devant la face de Dieu? » 4. La Nuit de Noél 1914 venait d’étre jouée dans la salle de V’CGiuvre du Chantier, qui se trouvait sur la paroisse de labbé Daniel Fontaine (voir Cah. C/. V, p. 280). Le Journal permet de corriger l’erreur de date : les représentations n’eurent pas lieu en février 1916, mais en février 1917. 5. Ces mots, de leGture trés conjecturale, sont suivis d’initiales peu lisibles, entre parenthéses : (Les V.), semble-t-il. 6. Gen., XLI, 45 : «Il Vappela, en langue égyptienne, le Sauveur du Monde.» XLII, 35 : «... ils trouvérent leur argent
lié... »; le mot exp/oratores apparait plusieurs fois dans le chapitre. — Dom Camille qualifie ’enfant prodigue d’ « explorateur » (/e Soulier de Satin, Th. I, p. 677). — XLIII, 23, citation fragmentaire, intendant leur dit : « Ayez esprit en repos [...] car pour moi j’ai regu |’argent que vous m’avez donné et j’en suis content. » — XLV, 5, rétablir : Praemisit me... « Dieu m’a fait venir ici avant vous pour vous consetver la vie... » 7. Avant cette note, une rature : D[ten] a Jacob.
Page 373. 1. « Opprimons-les avec sagesse. » Parole du Pharaon inquiet de la prolifération du peuple d’Israél. — Aprés cette note, Claudel a commencé de copier et raturé Ex., I, 22 : Ouidquid masculini sexus... 2. «... comme une chose suspendue devant vos yeux pout
exciter votte souvenir...» 3. « Vous ne suivrez point la multitude pour faire le mal, et, dans le jugement, vous ne vous rendtez point 4 Vavis du grand nombre pour vous détourner de la vérité. » 4. Cest Pidée méme du personnage de dofia Musique qui semble notée; cf. /e Soulier de Satin, I, x : « MUSIQUE: [...] Qu’entendez-vous ?— LE vicE-Ror : Une faible musique» (TA. II,
p. 763).
5. « Or Josué, entendant le tumulte et les cris du peuple, dit a Moise: On entend dans le camp comme les cris de personnes qui
Feévrier-Mars 1917
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combattent. Moise lui répondit : Ce n’est point 1a le cri des personnes qui s’exhortent au combat, ni les voix confuses d’hommes “qui s’excitent a prendre la fuite, mais j’entends la voix de personnes qui chantent. » 6. Claudel précise ici des idées déja incluses dans les propos de Pierre de Craon,
au IV® aéte de /’Annonce faite a Marie; voir
sut ce theme A. Vachon, op. cit. 7. Quartier de Rio, tout proche dela rue trouvait la légation.
Paysandu ow se
Page 374. 1. Autre quartier de Rio, au nord de la ville. 2. Chute du ministére Briand. Alexandre Ribot est président du Conseil dans le nouveau gouvernement, en méme temps il a la charge des Affaires étrangéres. Il gardera ce ministére lorsque son cabinet tombeta en septembre. _ 3. La Nuit de Noél 1914 (Th. U, p. 576). Lapsus, c’est Jacques, et non Jean, qui prononce cette phrase. L’abbé Poivrel était directeur de |’Buvre du Chantier. Antoine Sainte-Marie-Perrin. 4. « Lorsqu’un homme présentera au Seigneur une oblation en sacrifice, son oblation sera de pure farine...» Claudel, pour-
suivant sa lecture suivie de la Bible, commence 5. « Alors
le Lévitique.
la terre se plaira dans les jours de son
repos,
pendant le temps qu’elle demeurera déserte. [Quand vous serez dans une terre ennemie]
elle se reposeta,
et elle trouvera
son
repos, étant seule et abandonnée; parce qu’elle ne V’a point trouvé dans vos jours de sabbat lorsque vous V’habitiez. » 6. Rétablit : smputabitur : «... en comptant une année pour chaque jour.» Il s’agit comme dans le texte précédent des menaces de Dieu. 7. « Parce que le Seigneur votre Dieu est un feu dévorant et un Dieu jaloux. » 8. Verset 2 : «... sous tous les arbres touffus. » g. Verset 8: « Vous n’agitez plus alors comme nous le faisons aujourd’hui, ot chacun fait ce qui parait droit a ses yeux.» La note suivante résume les versets 18 et 19. 10. Matthieu, XXVI, 63. La passion selon saint Matthieu est lue le dimanche des Rameaux. — « Comme si» est en | surcharge.
Page 375. 1. Monastére du xvuré siécle, situé 4 Rio méme. 2. La Messe la-bas (Po., p. 515): «Il n’y a pas deux amouts, comme I’a écrit Lacordaire. » Voir également la méme citation,
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Cahier
IV
commentée, dans « Introduétion 4 un poéme sur Dante» (Pr., p. 431). 3. Voir dans /e Pere humilié, 11, 1, attitude du Pape a propos des Etats pontificaux, et les conseils que lui donne le Frére mineur. 4. Santos est le port de SAo Paulo, dominé par la Serra. 5. Vetset 24: « D’ou vient qu’il a fait éclater sa fureur avec tant de violence? » Page 376.
1. Verset 11 : « Ce commandement que je vous prescris aujoutd’hui n’est ni au-dessus de vous, ni loin de vous. » — 12 : « Il n’est point dans le ciel...» — 13 : « Il n’est pas non plus au dela de la mer...» —
14: « Mais ce commandement est tout
ptés de vous; il est dans votre bouche et dans votre cceur, afin que vous l’accomplissiez. » 2. Chap. tv: Dieu commande 4 Josué d’élever un monument avec douze piertes prises dans le lit du Jourdain. 3. « A qui enseignera-t-il la science? A qui donnera-t-il Vintelligence de sa parole? A des enfants qu’on ne fait que sevrer, qu’on vient d’arracher 4 la mamelle. Instruis, instruis encore; instruis, instruis encore; attends, attends encore; un peu ici, un peu la. Mais le Seigneur parlera d’une autre maniére a ce peuple, il ne lui tiendra plus le méme langage. »
4. Comptendte Colossiens. « Car toute la plénitude de la divinité habite corporellement en lui. » 5. Jules Chevalier, « directeur de l’Office national des valeuts immobiliéres», envoyé au Brésil pour aider Claudel a liquider «un énorme et hortifique amalgame d’entreprises financiétes, commerciales et industrielles, connu sous le nom de
Brazil Railway, et ou Pépargne frangaise et belge avait engagé plusieurs milliards de francs-or ». Sur cette « ténébreuse affaire », voit Cah. Cl. II, p. 38, et VI, p. 155 sq. 6. « Comme on voit briller dans l’eau le visage de ceux qui y regardent; ainsi les cceurs des hommes sont dévoilés aux sages. » Page 377.
1. Montée du Carmel, éd. des Carmélites de Paris, t. II, liv. II, chap. xxv, p. 335; éd. Hoornaert, Desclée de Brouwer, t. I, chap. xxv, p. 193. 2. Jbids Mle pa 6:
Bld,
1922,
panes
4. Ibid., p. 28. Sagesse,
I, 5 : « [le saint esprit de sagesse]
s’éloigne de pensées qui sont sans intelligence. »
Abril-Mai 1917
1261
5. Ibid., chap. v1, p. 32.
6. « La guerre» est en surcharge. Page 378.
1. L’ile de Lage se trouve 4 quelques centaines de métres de la cote, au milieu du goulet qui telie la baie de Rio a l’Atlantique. 2, Premiére mention du Pere de Foucauld, cing mois et demi apres sa mort. En 1950, Claudel écrira une lettre au Pape Pie XII . concernant la procédure en vue de la béatification (Charles de | Foucauld, Nouveaux écrits spirituels, ptéface, Plon, 1950), et en 1955 composera « le Frére Charles», Trois Sigures Saintes pour le monde attuel (O. C., t. XXIV). 3. Une ratute: dans, semble-t-il. 4. Ces notes
annoncent
les « réflexions»
de Camille,
dans
le Soulier de Satin, sur les tapports du Créateur et de la créature. Voit Th. I, p. 838 sq. '5. La rédaétion en avait été achevée le 16 avril. Le 10 mai, Claudel écrit 4 Frizeau : « Comme l’inspiration littéraire est une
_ chose absolument fantaisiste et excenttique, j’écris en ce moment _ une espéce de bouffonnerie qui recule les limites de art en ce gente, mais ou il y a cependant pas mal de poésie et méme de tristesse; cela s’appelle /’Ours et la Lune.» On a vu qu’il avait utilisé pour écrire cette piéce de nombreuses notes ptises a Hostel en 1915 (voir p. 335). 6. 12 : « Une parole m’a été dite en secret, et mon oreille a recueilli comme 4 la dérobée ses faibles sons.» — 16: « Quelqu’un se tint 1a dont je ne connaissais pas le visage; un spectre parut devant mes yeux, et j’entendis une voix parteille a un souffle léger.»» — XII, 4 : « On se moque de la simplicité du | juste.» — 5 : « C’est une lampe méprisée dans les pensées des tiches, mais qui est préte pour le temps marqué. » 7. La Messe la-bas (Po., p. 493): « Ce papillon sur la rose tout a coup, muet comme le pinceau du peintre! » Page 379. 1. Ibid., p. 492: «... ces palmes dans le vent du soir... ce chaos de feuilles et de fougéres dans le soleil...» — La Tijuca est aux pottes mémes de Rio. 2. Ou plutdt le mont de Castelo, dans la vieille ville. 3. Ibid. : « Cette étoile prés de la Croix-du-Sud qu’on appelle Alpha du Centaure. » 4. Caipi: paysan. 5. Canja: bouillon de beeuf ou de poule. 6, Ruy Barbosa, homme d’Etat brésilien, né 4 Bahia le 5 no-
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IV
vembte 1849, mort 4 Rio de Janeiro le 1°" mats 1923. Il fonde en 1868 a Sao Paulo le Radical Paulistano, journal qui l’aidera a la réalisation de ses idées en téte desquelles s’inscrit l’abolition de Vesclavage. Député de Bahia en 1876. Aprés un exil en Angleterre, il revient a Rio en 1895. Il se déclare 4 fond pour les alliés, amenant le Brésil 4 entrer en guerre contre |’Allemagne vets la fin de 1917. Ses Obras completas forment onze volumes; des Pages choisies ont paru, en frangais, en 1917. Voir l’article de Georges Le Gentil, Revue de 1’Amérique latine, mai 1923 (Cab. Cl. IV, p. 171, n. 2). Claudel consacra un article a la mémoite de Ruy Barbosa dans /e Figaro littéraire du 3 décembre 1949 (ébid., p. 171 et 179). 7. Le Corcovado, pic de 700 métres de haut; le Pain de Sucte, dans Rio méme, a |’entrée de la baie, a 400 méttes de haut. De
la maison de Ruy Barbosa, située prés de Botafogo, les deux montagnes se trouvent a l’opposé l'une de l’autre. 8. Rétablir : plenus sum enim sermonibus, et coarflat me spiritus uteri mei... « Cat je suis plein de paroles, et mon esprit est comme en travail et me presse. — Ma poitrine est comme un vin nouveau qui n’a point d’air, qui rompt les outres neuves. — Je parlerai donc pour respiter un peu; j’ouvrirai les lévres et je répondrai. » Eliu est un des amis de Job, celui qui prononce les paroles citées ici. Page 380.
1. Vetset 4 : « Cest Esprit de Dieu qui m’a créé, et c’est le souffle du Tout-Puissant qui m’a donné la vie.» 2. « Or Dieu fait toutes ces choses trois fois pour chacun des hommes, pour rappeler leurs 4mes de la corruption, et pout les éclairer de la lumiére des vivants. » 3. Job, XXXIV, 14 : « Sil regardait l'homme dans sa tigueur, il attirerait 4 soi esprit qui l’anime. » 4. Matthieu, XXV, 6: « Voici l’époux qui vient, sortez a sa
rencontte. » 5. Cf., a propos de « la Vision des eaux futures », p. 303, n. 2. 6. « .., cat mon pére ne fait aucune chose, ni grande ni petite, sans m’en parler.» Paroles de Jonathas 4 David.
7. « Je ferai pour toi tout ce que tu me diras.» (Id.) 8. « Car je suis dans Vangoisse, quoique toute ma vie soit encore en moi.» 9. Raymond Parr, conseiller de la légation britannique au Brésil, et sa femme Audrey. Claudel avait connu celle-ci 4 Rome. « Frangaise de naissance, écrit Henri Hoppenot, mais comptant dans son ascendance des ancétres allemands, polonais, brésiliens,
elle approchait, quand nous la conntimes, de la trentaine. C’était
336}
Mai- Juin 1917
une créature pleine de vivacité et d’esprit, douée pour tous les arts, capricieuse et bonne, entrainant tous ceux qui l’entouraient dans les remous de sa fantaisie, charmante et imprévisible. Claudel tournait comme
un gros papillon de nuit autour
de
cette flamme virevoltante. Consciente de son génie, elle le traitait avec gentillesse et amitié, tantdt se pliant A toutes les exigences du travail qu’il lui imposait, tantdt se réfugiant, pour s’y dérober, dans l’inexatitude et le silence. Tour 4 tour | fasciné et exaspéré, il Pavait surnommée
Margotine,
disait-il, d'une méchante fée d’un conte enfantin. ~~Pavait baptisé “cacique’’, ce qu’il est toujours resté et pour moi. De méme que nous faimes toujours casal”, d’un mot portugais qui désigne le couple, consonance
du nom,
Et Audrey pour Darius pour lui “‘le et dont la
lui plaisait.
« Ecrivant pour elle des poémes mi-sérieux, mi-badins, et les tetrouvant ensuite qui trainaient sur les meubles du salon, Claudel les reprenait 4 la dérobée et les enfouissait en bow gonnant dans sa poche. Mais un sourire, une attention de M 4
tine lui rendaient rapidement sa bonne humeur. De toya,. maisons diplomatiques, celle des Parr était la seule Feige et lui pouvaient se sentir a l’aise, se détendre dans unr P ‘ de sprees et de sympathie» (Cas. Gg », Reme de
3 Cf. Marthe Bibesco, « Promenades avers aie Paris, septembre 1961 : « La belle Audre*U0° ly 6
edie 79, et
fantasque et douée, surnommée p- 5” ese ‘hacehers de Voir également Darius Milhaud, 2° laicorteep Cah, Cl, Ill, nombreuses allusiFrizeau, parle des Claudel et de Milhaud. sune le ttre A la agnes qui entourent Bo Le 10 mai, Claudel.< we
tee
« Nijinsky », Claudel
«reliefs un peu difforrp. 292). «mes et dé comes Da baie» de Rio (Jamet « toutes sortes - “Ubid., p. 1094), il évoque
Tijuca,
G84);
dans « Au
Brest
»
bizarres» (Prouna Park géographiqne 4:urg
|
patlera d’up, Sao Francisco est un 11. Sagce de Rio, dans la baie.
taubo
”
g
de Niterdi, ville
| située
ts 4 moutif. »
des gens pré i ré-de-Cubzae ee san de Saint-And tat a Z Ser a lu 2 agSee l ude Cla e. ligion sceut Théres de ‘ 0 ae ee ce atri fond , eVintrable Mere Barat, d, Poussielgue, rine ¥ nar % Bau Met pat js; s, Jésu a } zs . e e V ie
1264
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IV
3. Ibid., p. 497 : « Mme Barat citait volontiers l’exemple de sainte Thérése qui, visitant un jour une de ses maisons ou ses filles avaient cru bien faire en s’interdisant de ne jamais rien dire qui laissat voir de l’esprit, s’écria effrayée : “Mon Dieu! que deviendrions-nous si un pareil principe venait 4 prévaloir dans nos petits monastéres ?Ce serait la grace aimable de Jésus-Christ qui s’y tatirait immédiatement. C’est bien assez...” etc.!» 4. 1779-1865; voir plus haut, n. 2.
5. Palais du ministére des Affaires étrangeres. 6. Commandant de la Marseillaise, qui va Claudel dans son voyage 4 Rio Grande do Sul.
accompagner
Page 382. ~ 1. Le titre exaét de la brochure de Martin Spahn est En /utte dour notre avenir (Im kampf um unsere Zukunft, Munich, Gladbach, i915). Voit dans Ja Revue des Deux Mondes du 15 aott 1916 ‘atticle de Georges Goyau, «les Catholiques allemands et ypire évangélique », p. 730. — Cf. les paroles de saint BoniFerg Somuer de Satin, Wl, 1 (Th. IL, p. 785) : « ... evéque de ce Sor | intérieur et enfermé, de ce peuple bouché et qui comprime ict ne les a pas faits pout etre ses bras, ou sa rame la mattiee geotte aile a ses épaules, | Mais pour étre foulés et éternellement 3. Ibid., p. 841, long développement sur ce theme. ' 4. « Ces Statues que j’ai vues a Angkor : une idole qui a quatte visages tournés vers les quatre points cardinaux» (Mémoires, p. 185). 5. Pr., p. 839 : « Et n’es-tu pas frappé qu’a ce temple énorme il n’y ait pas de porte extérieure, mais des pertuis simplement pout s’y glisser? Et tout en haut, en bas de l’ananas central, on voit une espéce de chatiére, un jas de serrure, un trou comme celui que laisse le ver quand il sort d’un fruit... » 6. « Au matin» est en surcharge. 7. Pr., p. 840 et 837: «... les cing tours d’Angkor Vat — les cinq ananas frangés de flammes... » Page 522.
1. Pr., p. 840 : « L’eau thésaurisée et Stagnante, exactement CLAUDEL
V - 45
45
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IV
adéquate 4 son cadre.» Voir toute cette page sur l’architecture du temple.
2. Claudel a d’abord écrit simplement dans la parenthése :
«leur fiente». Pr., p. 838 : « Et partout au-dessus de nous le vent de ces ailes anceaes
la ronde des rats volants et cette
puanteur hideusement parfumée qui, au fond de nos entrailles, lie je ne sais quelle connivence avec notte corruption intime...» 3. « Ces boules» est en surcharge. 4. Pr., p. 839 :« ... la foule infinie des apsaras gambillantes... » 5. « Dansant sur les ruines » est en surcharge. 6. Pr., p. 838 : « C’est ici le grand marécage, la Mer de lait dont il est parlé dans le Ramayana et que les dieux ont baratté aux jouts de la Création...» Cf. Chriftophe Colomb, I, 16 : « Les dieux barattent la met »; /e Soulier de Satin, I, 14 (Th. IL, p. 778): « L’heure de la Mer de Lait est 4 nous... Le Lac de Lait... » 7. Pr., p. 839 : «... leur tug-of-war cosmogonique...» Claudel dans ce passage recopie presque ces notes. 8. Garuda, divinité 4 corps d’homme et a téte d’oiseau. Page 523.
1. Pr., p. 837: «... la tempéte des singes, ces demi-dieux du bond, qui passent en trombe hurlante sur le plafond élastique de la forét. Le bond est quelque chose d’aussi metveilleux que le vol. » 2. Deux mots illisibles. 3 RONG IVE ps 3343 « Jemporte [...] la vision de ce point a Pest de Cantho qu’on appelle PEtoile de Fou-hi et oa se rencontrent sept canaux nouvellement creusés qui vont mettre toute une immense région en valeur. » 4. Pr., p. 837 : « Réjouis-toi d’étre revenu de 1a-bas sans rien
de plus grave que la colique», dit le Vase d’encens au poéte. 5. O. C.,1V, p. 334:« A cété des riziéres on voit dans le Sud et dans le Nord d’admirables plantations d’hévéas... » Page y24.
1. Voit Pr., p. 789: « Elle attend [...] que le joyau comble Pattente du lotus. — Om mane padmi aum! Ainsi soit-il! » 2. La réponse de Claudel a été publiée par F. Varillon, dans Etudes, septembre 1966. On se rappelle que R.-B. Chétix avait été présenté 4 Claudel par Maritain (voir p. 513). 3. Claudel développera cette idée au patagraphe 7 des « Réflexions et propositions sur le vers francais» (Pr., p. 8); voit aussi 7bid., p. 34 : « La musique du langage est une chose
Odfobre 1921
1321
vraiment trop délicate et complexe pour qu’elle se contente d’un procédé aussi rudimentaire et barbare que simplement compter. |= (ly a un proverbe qui dit que le Frangais sait compter.) » Page 525. 1. « La construction de la route de Lang Biang vers ces immenses plateaux déserts et fertiles » (O. C., IV, p. 337). 2. Le nom est en surcharge.
3. Claudel a, par inadvertance, écrit « flambeaux ». Page 526.
1. « A Dalat j’ai rencontré un de ces pionniers de l’Indochine dont l’ceuyre aussi méritoire que celle de nos grands Africains est complétement inconnue en France, M. le Résident supérieur Garnier, de la bouche de qui j’ai recueilli le récit de la période héroique des explorations et des conquétes » (ébid., p. 342). ' 2, Il est possible qu’il s’agisse du doéteur Cognacq dont Claudel dit qu’a lui « revient en grande partie ’honneur du magnifique mouvement d’enseignement » en Indochine (ébid.). 3. « Comme» est en surcharge. 4. «Le 19», surcharge. 5. Ibid., p. 337: « Ces routes superbes qui maintenant, depuis Vachévement de la “Corniche” du cap Vatellas, traversent d’un bout a l’autre et dans tous les sens notre possession. » 6. JérOme et Jean Tharaud. 7. Voit Pr., p. 826, ot Claudel utilise ce détail. 8. « Un des esprits les plus éclairés et les plus généreux que j'ai rencontrés en Indochine, M. Pasquier, résident supérieur en Annam » (sbid., p. 340). Page 527. 1. Voit Pr., p. 826, o& Claudel rappelle ce souvenir. Page 528. | | j
| |
1. Rature : ballet. 2. Rature : du messager. 3. Voit p. 58r.
4. O. C., IV, p. 336: « Une grande papeterie fabriquant par un procédé nouvellement découvert des pites et du papier (excellent) de bambou est en activité a Dap Cau.»
1322
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IV
Page 529.
1. L’Ornement des noces spirituelles eSt un commentaire de Matth., XXV, 6: Eoce sponsus venit, exite obviam ei. L’explication des « sorties » pat la pratique des vertus commence au chapitre x1. Le tome II des CEwores completes de Ruysbroek avait paru en 1920, Bruxelles, Paris, Vromant. 2. Claudel se souviendta en 1944 de la piété des Annamites; cf. Lettre-préface sur l’Annam (O. C., IV, p. 386): « Rien ne m’a plus profondément touché que ces foules de fréres et de
sceuts indochinois qui remplissent les belles églises de Hanoi, de Hué, de Saigon, d’Haiphong, si ferventes et avec lesquelles j’aimais 4 me confondre. » 3. « Avec Vavasseur» est en surcharge. 4. O. C., IV, p. 355 : « La [dans la région d’Hongay et de la Kampha] on a teconnu et on a commencé a mettre en exploitation a ciel ouvert des filons d’excellent anthracite qui ont une épaisseut de 20, de 50 et méme de 150 metres, ce qui est unique
au monde. » 5. Sur Varchite@ture du ciment, voit Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 739 sq.) : « Laissez-moi m’étonner avec vous que les architectes n’aient pas encore trouvé le moyen de faire un usage plus original du ciment...» Cette « convetsation» fut écrite en 1928.
6. « Rien n’est cutieux comme de voir ces tranches de montagnes que sont en train de démolir sur des gradins superposés des milliers de travailleurs et des files de wagonnets» (O. C.,
IV, p. 335).
7. Ibid.:«... la découverte Trieu... »
des vastes gisements de Dong-
Page 530.
1. Un nom illisible. 2. Procureur général des Péres des Missions étrangéres; Claudel Pavait rencontré en Chine (voir p. 50). 3. Claudel écrira plus tard sur sainte Thérése un texte repris dans Trois figures saintes pour le temps attuel. 4. Charles de Foucanld, explorateur du Maroc, ermite du Sahara,
Plon, 1921. — Rappelons que la belle-sceur de Claudel, Elisabeth Sainte-Marie-Perrin, était la fille de René Bazin. Dans
Pouvrage cité a la note précédente un chapitre est consacté a Ch. de Foucauld. 5. CE. le Soulier de Satin (Th. IL, p. 741): «... le vent d’automne a grand bruit qui balaye la terre et la mer»; et déja Partage de Midi (Th. I, p. 991) : «... le dur mistral... »
Novembre-Décembre 1921
1323
6. Centre scientifique et observatoire des Peres de la Com_pagnie de Jésus. Le Pere Teilhard de Chardin y fit de nombreux -séjours. Cf. O. C., XIX, p. 161: « Je pense aux PP. Chevalier et Froc qui ont organisé 4 Zi Ka wei tout le service météorologique des mers du Sud.» Voir également Po., p. 665 : « ... ces grands Jésuites [...] de Zikawei. » Page j31. 1. Sorte de portique, généralement en bois, souvent recouvert de laque rouge, qui marque l’entrée des temples shintoistes. Page j32.
1. Shiba Park, parc de Tokyo. 2. Cf. Pr., p. 1135 : « Dés notre arrivée 4 Tokyo, accueillis par les frissons de la terre, ces grondements sous nos pieds, ces conflagrations incessantes, nous avions compris de quel cyclope
4 demi endormi [...] nous étions les hétes. [...] Le 8 décembre 1921 [...] de violentes secousses avaient ébranlé et fendu la baraque vermoulue ov depuis trente ans est installée l’ambassade de France a Tokyo...» 3. Claudel parle de cette maison religieuse, sbid., p. 1139. 4. Quartier populaire au nord de Tokyo. 5. Mouvement noté en vue du Soulier de Satin. Voit, pat exemple, III, 13 (Th. Ll, p. 856) : « N’accuse que toi-méme, Rodrigue! ce qu’aucune femme n’était capable de fournir pourguoi me l’avoir demandé? [...] / Et maintenant pourquoi m’en vouloir...»; p. 855 : « De ce déliement, de cette délivrance mys-
tigue, nous savons que nous
sommes
par nous-mémes
inca-
pables... » 6. Ibid., IV, 6 (p. 900) : « Et pas ua brin de rouge sur la figure. Rien gu’un peu de carmin sur le lobe de chaque oreille. » 7. Le mot japonais que Claudel youlait écrire entre parenthéses eSt tokonoma, qui désigne précisément « l’enfoncement ou lon voit un tronce d’arbre naturel»; dans les maisons japonaises, la place d’honneur eét celle ot I’on tourne le dos au tokonoma. Cf. Pr., p. 1134: «... les restaurants superbes qui
exhibaient chaque jour au fond de leur tokonoma une peinture différente de Korin ou de Sesshiu... » 8. L’histoire des 47 Rodnins est Vune des plus célebres légendes du Japon. Serviteurs d’un seigneur condamné 4 se suicider pour avoir manqué a l’étiquette, ils jurérent de venger leur maitre. Ils le firent, acceptant d’avance Je jugement qui les condamna 4 se faire justice eux-mémes. Claudel y fera souvent allusion; voir Pr., p. 1130 : «... que ne peut-on attendre d’un
1324
Cahier
IV
chauffeur qui, comme celui d’un de mes collégues de Tokyo, va chaque semaine braler de l’encens sur la tombe des quarantesept Rédnins?» Cf. également p. 827-828. 9. Le shamisen est « un instrument 4 corps mince, reCtangulaire et d’aspe& plutdt plat; ila un manche trés long et fréle; aux Ryukiu le corps de V’instrument est couvert de peau de serpent, au Japon de peau de chat. L’instrument se joue avec un pleétre dur (fréquemment en ivoire). Le son du shamisen est aigu et métallique. [...] Le shamisen est exclusivement un instrument d’accompagnement... » (Eta Harich-Schneider, dans Encyclopédie de la musique, Fasquelle, t. Il, 1961, p. 700). — Cf. Pr., p. 1182: « Le second choriste tient la guitare 4 long manche japonaise, le shamisen de peau blanche, d’ou il tire de temps en temps avec un pleétre Vivoite quelques sons, sans doute assez semblables a ceux de la lyre antique.» Ibid., p. 1552 : «... le shamisen, cet instrument qui donne la vibration des nerfs pincés...»; et dans « le Poéte et le Shamisen », p. 820 : « Monsieur Peau-de-Chat »; p. 827 : « Monsieur Peau-de-Matou. » 10. Le Songe du vergier est un ouvtage anonyme de jutisprudence composé vets 1370 et imprimé en francais en 1491. Un chevalier et un clerc y débattent des droits du roi et de ceux du pape. — Au-dessus de cette note, Claudel a collé deux photogtaphies; l’une le représente en habit d’ambassadeur, le bicorne ala main, prés dun coupé, avec un employé japonais de l’Ambassade; sur l’autre, il est avec Mme Claudel et ses trois filles.
11. Voit Vanalyse des premieres lignes de Salambé dans « Réflexions et propositions sur le vers frangais» (Pr., p. 39) : « Les terminaisons masculines dominent, terminant chaque mouvement pat un coup mat et dur sans élasticité et sans écho. » Page 533.
1. Cette note est en marge d’une photographie astronomique. 2. Voit « le Départ de Lao-Tzeu» (Pr., p. 920). Page 534.
1. Coupure de journal collée, la référence est de la main de Claudel. Cette page cst citée tout entiére dans « le Poéte et le shamisen » (Pr., p. 822); elle est introduite par une allusion au
Journal ;« LB SHAMISEN. — Si tu te donnais la peine de fouiller dans ce cahier vert, 1a, sur la table, il me semble que tu trouverais
quelque chose de trés bien dit 4 ce sujet. LE poRTE (fowillant dans un cahier). — Voila, j’ai retrouvé. (I/ lit.) »
Décembre 1921 - Janvier 1922
1325
Page 535.
1. Paru dans /a Revue des Jeunes, le 23 juin 1913, et repris dans Positions, IL (O. C., XV, p. 169).
2. Note écrite en travers de la page. 3. Deo adjuvante, semble-t-il. 4. Ecrit en matge dune photographie collée de l’Observatoire de Mount Wilson : « Région du ciel prés de Zéta Orion, montrant une Nébuleuse obscure qui arréte la lumiére des astres situés au-dela. » — Le texte est tiré du Psaume CL, 5 : « Louezle avec des cymbales retentissantes; louez-le avec des cymbales
@allégresse. » 5. En marge d’une photogtaphie collée de l’Observatoitre de
Lick : « Une des plus remarquables des centaines de milliers de nébuleuses spirales du ciel. »
;
1922 Page 536.
1. Verset 6: « L’abime l’’enveloppe comme un vétement, les eaux s’élevent au-dessus des montagnes. » Bae (Ge yay Seay Laie 3. Claudel prononce, 4 cette occasion, le texte publié sous le titre « Discours sur les lettres frangaises » (Pr., p. 659). — Ueno est le quartier nord de Tokyo ou se trouve l'Université impériale. Claudel a laissé dans son cahier, sans le coller, le programme de la féte, en japonais et en frangais :
BIENVENUE A MONSIEUR PAUL CLAUDEL par la Jeunesse Universitaire et les Amis de la Civilisation frangaise
FETE donnée le Dimanche 15 janvier 1922 4 une heure de Vaprés-midi dans la grande salle du Seiyoken a Ueno.
PROGRAMME Premiére partie
I. Allocution d’ouverture : M. N. Sugiyama, doéteut en droit. II. Discours de bienvenue : a) pat M. S. Soja; b) par M. E. Heck.
1326
Cahier IV
ILL. Conférences : a) pat M. A. Maybon, correspondant du Temps; b) par M. Toson Shimasaki; c) pat M. T. Yoshie, professeur 4 l'Université de Waseda (en frangais). IV. Récitations d’extraits d’ceuvres de M. Claudel : a) en francais
: Mme
M. Murata; M. T. Takimura, pro-
fesseur a l’Ecole des Langues étrangétes; b) entraduétion japonaise : M. R. Kawaji; M.S. Takemoto, professeur a Université de Keio; M. Y. Yamanouchi,
professeur a l’Ecole des Langues étrangéres. V. Salutation de bienvenue en frangais pat cing représentants de la Jeunesse universitaire. VI. Réportse et discouts : M. P. Claudel. VII. Musique : Chant : Mme Dumay. Piano: Mme R. Voruz. a) La Splendeur vide (Saint-Saéns) ; b) Hai Lully (Coquard). Entr’acte (Thé). Deuxiéeme partie
I, Théatre : La Nuit de Noél de 1914, par M. Paul Claudel (pattiellement), représentée par un groupe déléves de la Seétion francaise 4 l’Ecole des Langues étrangéres. LE GENERAL ...... LE SERGENT ...... JBAN gt settndealinrers JACQUES uss sheot TLE} CURE tee marenevere
M. M. M. M. M.
K. A. S. S. K.
Takahashi Kiso Kudo Kawamura Hasegawa
Il. Musique : Chant : Mme Dumay. Piano : Mme R. Voruz. a) Air des lettres (Werther) (Massenet) ; b) Air de Lia (Debussy) : M. S. Gorai, professeur a l’Uni-
versité de Waseda. Groupes ayant organisé la fete de bienvenue au poéete Paul Claudel
Sections de littérature et de droit frangais a l’Université Impériale de Tokyo. Sections de littérature francaise des Universités de Keio, Meiji, Rikkyo, Waseda, et de l’Ecole des Langues étrangeres. Section frangaise Premier Lycée supérieur, Se&tion de Francaise [sic], ’Ecole de Etoile du matin. Athée [sic] Frangais, France Dorokai, Nichifutsugakkai, etc.
Janvier-Février 1922
1327
Page 537.
1. Verset 3: «... et son feuillage ne tombera pas; et tout ce qu'il fera réussita. » 2. Jean, XI, 28 : « Le maitre est 1a et il te demande. » 3. Romains, VIII, 35 : « Qui [donc nous] séparera [de ’amout du Christ] ?» 4. Voit, dans Contaéts et circonstances, le discours prononcé a cette occasion par Claudel, « les Qualités d’un chef de guerre »
(ORG Vile Dia 2 is) 5. Cette phrase depuis : « En allant...» est en surcharge. 6. Depuis 1921, le prince impétial, Hiro-Ito, exerce la régence. 7. Luc, XIX, 5 : « Zachée, hate-toi de descendte, car aujourd’hui, il faut que je demeure dans ta maison. » Claudel évoquera souvent cet épisode de ’Evangile qui répond sans doute a son « impatience». Voit par exemple Pr., p. 759, 814.
Page 538.
1. Temple trés ancien, plusieurs fois détruit par le feu, dont les batiments actuels datent de 1479. 2. Sesshiu, peintre (1421-1507). Cf. le Soulier de Satin, IV, 2 (Th. I, p. 873) : « Ce sont des pinceaux excellents dans la main
dun artiste parfait comme celui dont s’est servi Sesshiu, quand il a dessiné ce cercle, une perfection pour toujouts, sur la paroi de Kyoté.» — Pour Mokpe, il pourrait s’agir, par suite d’une erreut de transcription, de Mokkei, peintre du xv® siécle (Motiaki Watanabé, « Claudel devant l’art japonais», Bulletin de la Société Claudel, n® 30). 3. Le Fusuma est une porte a glissiere; Tenju serait une transcription erronée de Sinju, pavillon du Daitoku-ji.
4. Parc d’Arashiyama, du nom du site ot la riviére Oi franchit des rapides, appelé aussi parc de Kameyana, du nom de l’empereut qui l’a fondé. Page 539.
1. Voir la description de ce tombeau
dans « Meiji» (Pr.,
p. 1197). Mutsuhito, pére de l’empereur régnant Yoshi Hito, fut le reStaurateur du pouvoir impérial, en 1868.
2. potte 3. 4.
Shugakuin est une villa impériale du xvur® siécle qui comtrois jardins en terrasses. « Irréguliére» est en surcharge. Ces deux mots sont en sutcharge.
5. Voir p. 514, n. 5. Cf « Jules» (Pr., p. 862) : « JULES
Ce serait prudent de peindre un filet par-dessus [le tigre] pour
:
1328
Cahier IV
qu’il n’aille pas faire des dégats dans le voisinage. — LE POETE : Les moines ont eu cette sage précaution souvent pour faire mieux tenir sur son panneau tel chevreuil ou carpe particuliérement suspecte»; et sbid., p. 1166, le méme souvenir. 6. Ce temple est construit au flanc dune falaise. Il date du xvuue siécle. Claudel avait visité Kyoto lors du voyage qu’il fit au Japon, depuis Shanghai, en juin 1898. 7. Parc de Kyoto. Kurodani, temple proche de cette ville. 8. Voir p. 513 et 524. 9. Jean, XI, 39 (résurrection de Lazare) : «Il sent déja mauvais. » Page 540.
1. Depuis « Construire pour le savant...» jusqu’a « ... poursuivie », coupute de journal collée. — Cf. /a Ville, 2© version (Th. I, p. 468) : « Jai retrouvé Vignorancel...» Art poétique (Po., p. 132 Sq.). 2, Marc, XI, 13 : « Et [Jésus] voyant de loin un figuier qui
avait des feuilles, il alla voir s'il y trouverait quelque chose; et, s’en étant approché, il n’y trouva que des feuilles, car ce n’était pas le temps des figues... » Page y4t.
1. La Sumida est un fleuve qui passe a lest de Tokyo. Le jardin d’Hanayama qui se trouve dans la méme direction est suttout célébre par ses azalées. 2. Les shoguns sont les di€tateurs militaires qui gouvernérent en fait le Japon pendant les sept siécles de décadence du pouvoir impérial (1185-1868). 3. Sans doute Ebisu, un des dieux du bonheur, protecteut du travail. 4. Ps. VI, 8: «... j’ai vieilli au milieu de tous mes ennemis. » Ps. CXIX, 5 : « J’ai demeuré avec les habitants de Cédar.» La seconde citation est une addition postérieure. 5. Ville située a une quinzaine de kilométres au nord de
Tokyo; elle a aujourd’hui plus de cent mille habitants. Claudel y visite sans doute le temple shinto de Kikawa; voir la description quwil a faite dun autre sandtuaite shinto dans Connaissance de !’ Est, « PArche d’or dans la forét » (Po., p. 81). 6. Cf. le Soulier
de Satin, IV,
2, sur ’emprisonnement
de
Rodrigue au Japon et surtout IV, 11 : « C’est une belle nuit pour vous que celle ot l’on vous emméne pour vous mettre en prison [...]? — [...] Oui, c’est une belle nuit pour moi que celle-ci ou
je célebre enfin mes fiangailles avec la liberté! » (Th. IT, p. 943).
Février-Mars 1922 7. 8. 1885, Lille
1329
Voit plus loin 18 mars. Pierre Lasserre (voir p. 472). —Roger Allard, né a Paris en poéte, collaborateur du Beffroi, revue littéraire fondée a par Léon Bocquet.
Page 542. 1. Books on the table (et non with table), Londres,
William
Hennemann, 1921. Trad.: « Je dois avouer qu’il y a dans la nature méme de M. Claudel, tel qu’il se révéle dans ses écrits, quelque ~ chose qui me répugne, en tant qu’Anglais. I] me parait difficile de penser que ses admirateurs anglais soient parfaitement honnétes envets eux-mémes dans leuts tavissements. — Il y a, ou il devrait y avoir, un passage difficile entre notre tempérament national et le furieux sacerdotalisme de /a Messe /a-bas et des Cing Grandes Odes.» 2. Shibuya est un quartier de Tokyo; Moguro est 4 quelques kilométres au sud-ouest. ; 3. Pr., p. 1126: « Un regard sur l’Ame japonaise » : « ... cette petite fille qui gravit en chancelant les degrés du temple et au
bout du gros cable de coton trois fois tordu vient réveiller la gtenouille de bronze. » 4. Art poétique (Po., p. 155): « La vibration, c’est le mouve-
ment prisonnier de la forme. » 5. Voir lextrait d’une lettre du 24 aout 1922, publiée dans Positions, I, sous le titre « Ecce sto ad ostium et pulso» (O. C., XV, p. 264): « En latin pu/so veut dite aussi je pousse [...] [Dieu] ne
pousse pas seulement, il bat (pu/so, pulsation) comme les artétes douloureusement autour d’une meuttrissure... » 6. Cent phrases... (Po., p. 714 et 715) : « Le camélia rouge comme une idée éclatante et froide », « Le camélia panaché, une . face rougeaude de paysanne que l’on voit a travers la neige », Page 543. 1. Voit Vallusion faite 4 ce trait, Pr., p. 1130, « Un regard sur Ame japonaise » [1923]. 2. Conséquence de l’affaire de la Banque de Chine, voir p. 509. Cf. Pr., p. 1288 : «... quelle n’est pas la disproportion entre l’opinion d’un comité de fon&tionnaires, prévu officiellement pour le réglement de vétilles disciplinaires, qui conclut a une imprudence professionnelle, et le décret qui chasse Berthelot... »
1330
Cahier LV
Page 544: 1. Tremendous trifles, Londtes, 1909, A great man, p. 134. 2. Verset 21 :« Vous les cacherez dans le secret de votte face,
4 Vabri du tumulte des hommes. » 3. Cette note est en marge de la précédente. 4. Sur cette question capitale lire ’étude du P. Pierre Ganne dans Cah. C/. I, p. 236-269. Dans le bref dialogue avec Amtouche (Mémoires, p. 137), non plus que dans aucune de ses ceuvtes,
Claudel
n’a trouvé
une
formule
aussi
saisissante
et
théologiquement exaéte que dans cette note. D’ordinaire il embrouille quelque peu les choses par des allusions a la querelle dite du quiétisme qu’il connait mal. 5. Claudel met : « 3 », mais il s’agit certainement du re? avril. 6. Grand pate de Tokyo. Dans une ile du lac s’éleve un temple dédié 4 Benten, fondateur de la sete bouddhiste Tendai. 7. Arséne Henry, conseiller 4 ’ambassade de France 4 Tokyo; sa femme est la sceur de Wladimir d’Ormesson. — Baronne Alliotti, femme de ’ambassadeur d’Italie.
Page j45. 1. Tremendous trifles, Humanity an interlude, p. 187. Trad. : « (Redoutables frivolités) On ne peut comprendre Paris et son histoire si l’on ne comprend pas que sa férocité est la compensation et la justification de sa frivolité... Les gens y sont trop enclins a attaquer les autres, mais tout préts aussi a s’attaquer eux-mémes. Ils sont martyrs pour la religion, ils sont martyrs pout Virréligion; ils sont méme martyrs pour l’immoralité. Car Vindécence de beaucoup de leurs livres et journaux n’est pas de Pespéce qui charme, mais de l’espéce qui hotrifie et blesse; ils se torturent eux-mémes. Ils fustigent leur propre patriotisme pour le Stimuler, avec les mémes verges dont la plupart des hommes se setvent pout réduire les étrangers au silence... Ils se dénigrent et se tourmentent eux-mémes; parfois ils vont jusqu’a s’accabler de propos délibéré. » 2. Ps. LXVIII, 13 : « Ceux qui étaient assis 4 la porte [parlaient contre moi], et ceux qui buvaient du vin [me raillaient]. » 3. Voit p. 541. 4. Cette note est en marge. 5. Sut
la musique
en
Extréme-Orient,
voir
France-Asie,
revue bilingue des problemes asiatiques et de synthése culturelle, publiée a Tokyo : Principes de base dans les musiques de I’ExtrémeOrient, par Tran Van Khé, juillet-aodt 1962, p. 387. — Cf. Cent phrases... (Po., p. 710) : « Comment vous parler de l’automne quand jai encore dans l’oreille cette flite aigre du ptintemps qui me templit la bouche d’eau? »
Mars-Mai 1922 6. Ratute : donner. « répartir ».
On
peut
hésiter
1331 entre « reporter » et
Page 546.
1. Voir « Bougakou»
(Pr., p. 1178), la description de ces
danses que Claudel eut, dit-il, « occasion d’étudier » « quand le
Prince de Galles rendit visite 4 Sa Majesté ». 2. Dans le parc d’Ueno a Tokyo se trouve le Musée munici-
_
pal des Beaux-Arts, ot ont lieu traditionnellement les grandes - expositions de peintute. 3. Ratute : ic7. 4. Ratute : un.
5. Ratures : é/éments, puis parties. 6. On retrouvera ces idées, par exemple, a la fin de « Aegri Somnia» (Pr., p. 895), et la méme opposition avec la peinture occidentale, p. 889. Voir également les notes de ce texte. 7. Circuit dexcursion classique vets le mont Fuji et la mer, au sud de Tokyo.
Page 547. 1. Henri
Bremond,
Histoire
littéraire
du sentiment
religieux,
t. III, /’Ecole francaise, I partie, chap. v, /es Jésuites bérulliens, p. 274. — Le texte cité est le verset 131 du Psaume CXVIII : « Jai ouvert la bouche et j’ai attiré Pair... »; le second, Ps.
LX XX,
vetset 11; rétablir : Dilata... et implebo: « Elatgis la bouche et je la remplirai. » 2elhid. pepatys3. Nikko est 4 150 kilométres environ au nord de Tokyo. Chujenzi en est assez proche; c’est un lieu de villégiature, ot Vambassade
de France,
comme
plusieuts
autres
ambassades,
posséde une villa. Claudel y viendra souvent en été. 4. Jizo, un des dieux du bonheur. Claudel y fait allusion a plusieuts reprises dans les Cent phrases pour éventails. 5. Un nom de plante sans doute, illisible. 6. Cf. « PAffat du lutteur» (Pr., p. 1115) : «... comment oublierai-je ces aprés-midi que j’ai passés a ce cirque de RyuKya, de l’autre cdté de la Sumida, 4 contempler les séances de
lutte japonaise?» La détails notés ici. — Ces Tokyo, le « Jardin des 7. « Avec son toit»
description qui suit reprend tous les arénes se trouvent dans un faubourg de iris» en est tout proche. est en surcharge.
1334
Cahier
IV
Page yyr.
1. de la 2. 3.
Arthur Rimbaud, I//wminations, VUI, « Vies », Bibliothéque Pléiade, p. 174. Voir « le Poéte et le shamisen» (Pr., p. 825 et 827). Lu dans Bremond, Histoire /ittéraire..., t. IT, p. 453
« ... Je ne puis que ce que l’on me permet, et ne puis en aucune fagon m/’affranchit de cette dépendance. » 4. En haut de cette page Claudel a collé deux photographies, Pune de son fils Henri 4 Berck, mats 1922, l’autre de lui-méme dans la coulisse du thé4tre de marionnettes d’Osaka, méme date.
— La note est 4 tapprocher des « Réflexions et propositions sur le vers francais ». — « Petit» est en surcharge. Page 552.
1. Lu dans Bremond, /oc. cit., p. 475 : « Le fleuve signifie deux choses, la voie et la vie, car un fleuve est un chemin animé et
vivant, étant rapide et vivant, il est la figure de l’impétuosité de amour avec lequel nous devons nous porter a Dieu... » 2. Dmitri de Merejkovski, écrivain russe, né en 1865. Nous n’avons pas tetrouvé la référence de ces allusions. a UMEKS LIV, RSS Nie 4. Bremond, op. cit., t. TI, /’Ecole francaise. 5. Citation approximative de saint Paul, Philippiens, I, 23 : Desiderium habens dissolvi...: « Yai le désir d’étre dégagé des liens du corps et d’étre avec le Christ. »
6. Ps. XCVI,
7 : «
Qwils soient confondus tous ceux qui Que ceux qui les font leur deviennent semblables, avec tous ceux qui mettent leur confiance en elles.» Claudel a cité fragmentairement : adotent les images sculptées...» Ps. CXIII, 8 : «
Similes illis fiant qui faciunt ea, et omnes qui... — Pour Vétang et la
soutce, voit « le Poéte et le vase d’encens », 4 propos d’Angkor (Pr., p. 840).
Page 553. 1. Ville située a une cinquantaine de kilométres de Tokyo, fondée au x1r® siécle par Minamoto Yoritomo; sa tombe est
toute proche du temple d’Hachimangu. 2. Ennogi est également un san€tuaire de Kamakura. L’ile d@’Enoshima est 4 une dizaine de kilometres. 3. Voir Pr., p. 1148, 4 propos des funérailles de ’Empereur qui auront lieu quelques années plus tard. 4. Verset 19 : « Aussi la créature attend-elle d’une vive attente la révélation des enfants de Dieu. »
Juin- Aout 1922
1335
5. Ces poémes paturent sous ce titre dans le numéto d’avrilmai 1923 dela revue Intentions, puis dans Feuilles de Saints sous le titre « Poémes au verso de Sainte Genevieve», et en sous-titre le précédent (voir Po., p. 646).
)
6. Trad. : « Je n’ai pas de sympathie pour la critique qui voudrait traiter l’anglais comme une langue morte — une chose cristallisée 4 une étape atbitrairement choisie de son existence, et enfouie, au point d’oublier qu’elle a un passé et de niet qu’elle a un avenit. Le purisme, en grammaite comme dans le vocabulaite, est presque toujours signe d’ignorance. La langue a été faite avant la grammaite, et non la grammaire avant la langue. »
Page 54. 1. Consul de France a Yokohama, qui périta dans le tremblement de terre de 1923 (voit p. 605). Yokosuka est proche de
Yokohama. _ 2. « peut-étre », en surcharge. 3. Cher, pe Wr22 enc Cersetait, lencasees! y.etais) ull desyos rustiques pélerins,de faire réciter sur moi quelque antique xorito et de me soumettre a la bénédiction de cette espéce de chassemouche qui conféte la purification et le recueillement » (« Un tegard sur l’4me japonaise »). 4. Ratute : promenade.
5. Le mont Nantai est tout proche de Chujenzi (alt. 2 800), c’est un lieu de pélerinage. Yumoto est le point de départ de
Pascension.
Page syj. 1. Ce texte a déja été cité 4 deux reprises (voir p. 548, n. 3). 2. L’expression feflamentum confirmatum: «un testament en bonne forme», se trouve deux fois dans l’épitre aux Galates, Hear
svetsn7.
3. « Sur la route» et « des étapes» sont en surcharge. 4. Voit un commentaire sur les « deux colonnes», proche de ces notes, dans Emmazis (O. C., t. XXIII, p. 394). 5. Claudel attribue 4 tort ces mots 4 saint Ignace de Loyola. Il s’agit d’une inscription de la Grande Chartreuse; voit Balzac,
le Meédecin de campagne, Pléiade, t. VIII, p. 507. « Fuis, tais-toi et sois en repos. » 6. Dans le Dif. d’ Hist. et de Géog. ecclés. il n’y a pas moins de vingt-huit personnages de ce nom; sans doute Claudel pense-t-il
ici A Panachoréte qui mourut au désert de Scété, en Egypte, a la fin du rv® siécle; sa vie et sa légende pouvaient en effet le séduire.
1336
Cahier IV
Page sy6.
1. Vallée au nord de Nikko-Chujenzi, mines de cuivre.
ot se trouvent
des
2. Matsushima, sur la cote du Pacifique, est une baie célébre
pat un trés gtand nombre de petites iles ;deux portent en effet ces noms. 3. Ils’agit sans doute de l’abbé Esquerré, qui fut directeur du patronage patoissial de S. Frangois-Xavier, « Le Bon Conseil», a Paris. 4. Luc, XXIV, 29 : « Regte avec nous», dans le récit d’Em-
maiis.
Page 557. » 1. « Naivement » est en surcharge. 2. Entre deux lignes, deux mots de leCture difficile : « encore confondus », se rappottant soit 4 « Ciel et Terre», soit a« fini et Infini». 3. Jean, I, 9 : « C’était la vraie lumiére, qui éclaire tout homme venant en ce monde. » 4. Ibid., 1, 4: « En lui était la vie, et la vie était la lumiére des hommes. » 5. Ibid., I, 5 : « Et les ténébres ne l’ont pas saisie. » 6. Genése, VI, 6 : «
Que le firmament soit fait au milieu des
eaux, et quil sépate les eaux d’avec les eaux. » Raqi’ah est le mot hébreu, « qui signifie en francais Pétendue ». 7. « Deux choses» est en surcharge. Page sy8.
1. « Le temps commence», surcharge. 2. « Ses voiles écartés », surcharge.
3. « Une fois», surcharge. 4. Au vetset 21. Pour cette force produttrice, voir entre autres textes « la Légende de Prakriti» (Pr., p. 950), en particulier la reprise de ces réflexions.
Page 559. 1. Claudel accuse réception de ce télégramme (Gah. CIAL p72),
le 5 octobre
2. Ill, 16 : « [pour qu’il vous donne...] d’étre puissamment fortifié par son Esprit dans ?homme intérieur. » 17 :« [Que] vous puissiez comptendte |possitis comprehendere, et non sciatis] avec tous les saints, quelle est la largeur et la longueur, et la hauteur et la profondeut... »
Septembre-Novembre 1922
£337
3. Le Doryosan est un temple situé dans la montagne, prés de Mianoshita, a une centaine de kilométres de Tokyo, vers
Pouest.
—
La gefa est une
sorte de chaussure.
—
Pour les
garudas, voit p. §22, n. 8. 4. IV, 4:« lly aun seul corps et un seul esprit, comme vous avez été appelés a une seule espérance par votre vocation. » — 5: «lly aun seul Seigneur, une seule foi et un seul baptéme. » —6:«Ilyaun seul Dieu et Pére de tous, qui agit par tous et
qui réside en nous tous. » ~ Page 560. 1. Louis Massignon, /a Passion d’Al-Hosayn-Ibn-Mansour
Al-
Hallaj, exécuté a Bagdad le 26 mars 922, Librairie orientaliste Paul
Geuthner, 2 vol., 1922. Le texte que cite Claudel est au chapitre xu, « Théologie dogmatique », dans la section consacrée aux « ressoutces de la langue arabe», p. 593; Claudel a omis les mots arabes. 2. Claudel écrit «sons inarticulés » au lieu de « cris ». « Brouillée» n’est pas dans le texte; il est ici en surcharge. 3. La parenthése : « les racines...»» est de Claudel. La derniére phrase est soulignée pat lui. Page s6r.
1. Région thermale proche de Chuzenji. 2. Suit une rature : Visize a. 3. Verset 16 : « rachetant le temps...» — 18 : « Et ne vous enivtez pas de vin [c’est de la débauche]; mais remplissez-vous du Saint-Esprit. » — 19 : « Vous entretenant par des psaumes, et des hymnes, et des cantiques... » Page j62. 1. « Un pas», surcharge. 2. Il faut lire sans doute : « a l’égal de». Page 563.
1. Tous ces détails sont repris dans « NO» (Pr., p. 1167); voir patexemple, pout le maitre d’escrime, p.1171;1a description de la salle, p. 1167... On trouvera d’autres allusions a ces notes, et en particulier au « N6 de la Cloche», dans « le Festin de la Sagesse,
Un essai d’adaptation du Né6 japonais» (TA. Il, p. 1503). 2. Cf. Pr., p. 1138: « J’avais obtenu cependant qu’un nouveau local fat érigé pour la chancellerie et que l’hdétel proprement dit fat entouré de solides étais. »
1338
Cahier IV
3. Verset 15 : «Il fendit le rocher dans le désert, et il les abreuva, comme s’il y avait eu 1a des abimes d’eau. » — 16: « Il fit sortir de l’eau du rocher et la fit couler comme des fleuves. » 4. Au-dessus de cette note, Claudel a collé une photographie de «la maison de Villeneuve aprés sa réparation (septembre 1922)». Sous la méme photographie : « La grange de la Déme, [ruinée] par la guerre et maintenant démolie. » 5. Sanétuaire shint6, a Tokyo. Page j64.
1. Dans Védition Everyman’s Libraity (1907 et 1949), chap. xxxIv, p. 149. Trad. : «... prend le mystérieux océan qui est a ses pieds pour limage visible de cette 4me profonde, bleue, insondable, qui parcourt Phumanité et la nature : et chaque vision étrange, 4 demi discernée, mobile et merveilleuse, qui lui échappe, chaque nageoire d’on se sait quelle invisible forme, 2 peine apergue quand elle surgit, lui semblent l’incarnation de ces pensées fugitives dont seule ’Ame est peuplée et qui sans atrét la parcourent. Plus de vie maintenant que ce balancement imprimé par le roulis berceur du navire, qu’il emprunte lui-méme a la mer, et que la mer emprunte aux impénétrables matrées de Dieu. » 2. Miyanoshita est une station thermale, 4 moins de 100 kilométres de Tokyo. — Le point de vue de Dai est sur un plateau proche. Le nom entre parentheses est de le€ture difficile. 3. Note en marge de la précédente, sans doute ajoutée un peu aprés. Entre les deux notes une indication peu claite, peut-étre : « 13 n[ovembre].» 4. Chap. xxv,
p. 120, dans lédition
citée. Trad.
: « Le
Pequod roulait a travers le printemps lumineux de Quito, qui, en mer, regne presque continuellement sur le seuil de l’éternel été du Tropique. Les journées d’une tiéde fraicheur, claites, sonores, patfumées, luxutiantes, débordantes, étaient comme les gobelets de cristal des sorbets de Perse, pleins juqu’au bord et s’épanchant en flocons, telle une neige humide et rose. Les nuits figées et majeStueuses faisaient penser 4 des dames hautaines, aux tobes de velouts ornées de bijoux, nourrissant en elles, dans
un orgueil solitaire, le souvenir de leurs conquérants absents. Des seigneurs, les Soleils casqués d’or! Mais tous les enchantements de ce temps setein ne prétaient pas seulement de nouveaux charmes et de nouvelles puissances au monde extérieut. Au-dedans, ils se toutnaient vers l’ame, ils projetaient leur éclat sur ses cristaux, comme la glace claire sur la plupart des formes des silencieux crépuscules. » 5. Claudel cite cette «jolie pensée» dans «le Poéte et le
Novembre-Décembre 1922
1339
shamisen » (Pr., p. 831). Extrait du « Précis du Cantique des Cantiques » (1759), CEamores completes, Firmin-Didot, 1862, t. Il, p- 519. Le texte exa& est :
Ciel, que le temps est un bien précieux! Tout le consume et l’amour seul l’emploie. Page j6).
1. Traduction approximative de II Cor., rv, 17. Au-dessus de - cette note, une photographie : « Mon fils Pierre a Hostel (sep~ tembre 1922).» 2. Le mont Fuji est tout proche de Mianoshita. Nagao est un col proche d’ot I’on a une trés belle vue sur le Fuji. 3. Claudel a débarqué au Japon le 19 novembre 1921. 4. Paradis, chap. xvu, v. 24 : « Comme une pyramide contre
les coups du sort» (trad. Masseron). 5. Verset 5: « Ils n’ont ni savoir ni intelligence, ils marchent dans les ténébres. » La phrase frangaise qui suit traduit le verset 8. ' 6. Voir p. 563. Claudel a collé ici la photographie d’un tableau représentant : « le martyre de nobles Japonais chrétiens, en 1603, a Yatsushiro-Kiushiu, Japon». 7. Le mont Takao se trouve a quelque distance 4 Pouest de Tokyo. 8. Claudel a lu dans la traduétion publiée a Paris, en 1922,
Pépisode ot Léopold Bloom (Ulysse) faisant couler l’eau sur Pévier admire l « universalité» de eau, son « égalité démoctatique», sa « vastité océanique », etc. (U/ysse, III, 2). 9. Rom., XV, 4 : « Car tout ce qui est écrit a été écrit pour
notte instruction... » 10. Ce mimodtame qu’il était déja question de représenter en janvier 1922 (Cah. C/. III, p. 70) ne sera joué qu’en 1924. 11. Ces premiers mots sont une addition postérieure. Page s66. 1. L’ Art romantique, chap. xx, « Théophile Gautier» 4 et 5,
Bibliothéque de la Pléiade, p. 1041 sq. 2. « Car il faisait éclater sa sagesse d’une maniéte admirable. » Page 567. 1. La seule trace de cette conférence semble étre le texte publié dans Pr., p. 539. On y retrouve, p. 540, cette temarque. 2. L’un des fréres de Philippe Berthelot, physicien comme son pére.
1340
Cahier
IV
3. René Vallery-Radot, /a Vie de Pafteur, Hachette, 14° éd.,
1912. Le texte est extrait de la réponse de Pasteur a M. Poggiale, A une séance de l’Académie de médecine, en février 1875. Rétablir : « Le propre des théories vraies au contraire est d’étre Vexpression méme des faits... » 4. Rétablir : ... i gindeo di voi fra voi non rida: « Soyez des hommes et non de stupides brebis, pour que le Juif chez vous ne se moque pas de vous. » Page 568.
1. Sur Henrion, voir p. 107. Cf. Trois figures saintes pour le temps
attuel (O. C., XXIV,
447):
«...
mon
ami
Charles
H.
actuellement ermite en Tunisie... » 2. R. Vallery-Radot, op. cit., p. 43 et 83. Il s’agit des études de Pasteur sur les tartrates : « L’univers est un ensemble dissymétrique. [...] La vie est dominée par des ations dissymétriques. Je pressens que toutes les espéces vivantes sont primordialement dans leur structure, dans leurs formes extérieures, des fonétions de la dissymétrie cosmique. » 3. Wille proche de Tokyo, lieu de divertissement. 4. Voit p. 854. 5. Cf. Positions, UW, « Ecce XV, p. 264).
sto ad ostium
et pulso» (O. C.,
BO Page s69.
1. « En 1923, j’ai fait éditer a Tokyo mon poéme Sainte Geneviéve. [...] 1923 est l'année du sanglier, ce qui vous explique la justification du tirage» (Fr. Lefevre, Une heure avec..., 3° sétie,
1925, Pp. 1§7)-
2. Ces initiales
pourtaient
signifier « P[oétes]
F[rangai]s ».
Cest en o€tobre 1925 que paraitront dans la N.R.F. les Réflescions et propositions sur le vers frangais. Cf. Pr., p. 19 : « Un grand front...» et p. 17: «... ce front [de Baudelaire] comme un vaste miroir [...] et surtout la bouche qui est le trait essentiel de cette physionomie pathétique.»
3. Ville a Pest de Tokyo, ot se trouve un des pélerinages les plus importants du Japon.
4. Rakan, saint homme. Les cinq cents takans sont les cing cents disciples de Bouddha.
Janvier 1923
1341
Page 570. 1. Cent phrases... (Po., p. 736) : « Guéti de la mer j’offre en _-ex-voto une ancre toute rouillée et incrustée de coquilles. » 2. Cité par R. Vallery-Radot, la Vie de Pasteur, éd. citée, p. 556. La phrase est extraite du discours prononcé par Renan pour la réception de Pasteur 4 Académie francaise (en remplacement de Littré). |
Page
71.
1. Voit p. 532, n. 7. 2. La lecture de ce detnier nom est douteuse; |’Urami est une
tiviére qui passe entre Nikk6é et Chuzenji. 3. Dans la « Conversation sur Jean Racine», écrite quelques mois avant sa mort, Claudel développera la méme idée : « Comprenez qu’une piece de Double Véesse, c’est un spectacle qu’on vous sett a regarder. Ce n’est pas un drame, c’est des événements a la file qu’on vous invite a regarder. Le rideau tombe pour vous avertir que c’est fini» (Pr., p. 450). 4. Voit p. 574.
5. Voit Pr., p. 1177: «... le vieux monsieut qui teprésente généralement les jeunes filles... » Page 572.
1. A cété de cette note, coupute de journal collée : caricature du « Comte Uchida, ministre des affaires étrangéres » (ces mots de la main de Claudel). 2. Les Chapelles littéraires (Claudel, Jammes, Péguy) avait patu en 1920, Garnier. Cf. p. 472. 3. Avant « une fois », rature : dont. 4. Cette note, comme la fin de la précédente, est en marge de la coupure de journal. Phil. HI, 13-14. Reétablir : ad destinatum prosequor : « Oubliant ce qui est en arriére, je poursuis mon but. »
Page 573. 1. Claudel résume Bremond, Hisoire littéraire..., t. V1, 1923, ELS.
4 2. Cf. Pr., p. 1134: «... Asakusa, le domaine des joies populaites... » C’est un quartier de Tokyo. 3. Pout le Bougakou, voit Pr., p. 1178. La description du no Okina est faite dans « NO» (ébid., p. 1174).
Page f74. 1. A propos des aéteurs du N6, voir Pr., p. 1172, et Th. U,
p. 1503.
1342
Cahier
IV
2. Ce sera l’un des thémes essentiels du texte sur /e Festin de la Sagesse, « Une adaptation du Né japonais » (TA. I, p. 1504); voir également /e Jet de Pierre (Th. Il, p. 1256). 3. Sut Sylvain Lévi, voir Fr. Lefevre, Une heure avec..., 3° sétie, 1925, p. 158-159.
Page 575. 1. Pr., p. 1174: « Et dans cette admirable piéce, Hagouromo,
qu’on joue dans le froid clair de janvier, on voit l’Ange, sa robe sainte reconquise, repliant au-dessus de sa téte un membre sublime, s’élever littéralement vers le ciel en une colonne de neige et d’or.» — Cf. Cent phrases... (Po., p. 731) : « Le Fouji. L’Ange du, Japon a revétu son surplis de plumes. » 2. Addition postérieure depuis « Brilé...»; cf. « Villes en flammes ». 3. Super Cantica, LXXXII, 3 (P. L., t. CLXXXIII, col. 1187 d). Cité par Rodrigue, /e Soulier de Satin (Th. Il, p. 876). Trad. : « L’amour ignore le resped. » 4. La référence indique que Claudel a lu Boon dans la 2° édition, T. Fisher Unwin, Londres, 1920. Trad. : « Et c’est notre réaCtion ingtin@tive de défense, venue du subconscient, qui nous rend
si violemment hostiles 4 une religion fruste, a des réalités spitituelles 4 Pétat brut, aux gens qui nous abordent en disant des choses tudes 4 comprendre sur ces redoutables sujets. — Ls pourraient réveiller le tigre. — Nous aimons penser 4 la religion comme a une chose spécialisée, codifiée, reléguée a sa place. » 5. On ne posséde aucune indication sur cette représentation. 6. Voir la thése de Frédéric Deloffre, Marivaux et le marivaudage, les Belles-Lettres, 1955, I, chap. ur: « Les théories linguistiques de Marivaux.» Dans Jes Pensées sur la clarté du discours et dans la sixi¢me feuille du Cabinet du philosophe, Marivaux
répond aux critiques qu’on lui faisait de manquer de naturel et de clarté.
Page 576. 1. Epitte tirée de I Cor., 1x. Ici verset 26 : « Moidonc, je courts, et non comme au hasard. Je combats et non comme en frappant Lair. » 2. Voit p. 547, n. 6. 3. Cité Pr., p. 1164, dans littérature japonaise ».
« Une
promenade 4 travers
la
4. Il s’agit de /a Femme et son ombre; \a note est suivie d’une
photographie (coupure de presse), Claudel assis devant un poéle avec un groupe de Japonais et de Japonaises.
Janvier-Février 1923
1343
5. Luc, VII, 11 : « La semence, c’est la parole de Dieu. » — 8: « Une partie tomba le long du chemin, et elle fut foulée aux pieds. »
Page 577. 1. Téze d’Or, 2¢ version (Th. I, p. 245) : « Je ne suis pas venu comme Vhumble dieu de la soupe, / Bienveillant, clignant des yeux dans la vapeur de la viande et du chou. » — « Le Kojiki, le Nihongi sont des épopées confuses, des espéces de recueils de folklore et de traditions, contenant vraisemblablement, au milieu ~ dune cosmogonie naive et embrouillée, quelques parcelles de vérité historique» (« Une promenade 4 travers la littérature japonaise», Pr., p. 1156). 2. Lu dans Bremond, op. cit., t. VI, p. 311. Sur Jeanne de Matel, voir L. Christiani, Une grande myStique lyonnaise, Jeanne de Matel, Lyon, Vitte, 1947. 3. Ps. XXXII, 9 : « Gotitez et voyez combien le Seigneur est doux. » Voir p. 455, n. 3. Page 578. 1. I Cor., x1, 9 : « Car nous connaissons
; j j |
en pattie, et nous
prophétisons en partie. » — 12 : « Je connaitrai, comme je suis connu. » 2. Déja cité dans Odes, II (Po., p. 246) : « Comme le moissonneut Habacuc que |’Ange apporta 4 Daniel sans qu’il edt laché Vanse de son panier » (Daniel, XIV). 3. Voit Po.,p.1138, et les précisions données par Claudel dans le discours cité. 4. Ps. LIV, 23; rétablir : Jada super Dominum curam tuam : « Jette ton souci sur le Seigneur. » 5. Pr., p. 1134: «... les hauteurs de Kudan ow se dresse la porte de bronze dédiée aux morts de la Victoire... » Cette colline se trouve dans Tokyo. 6. Pr., p. 1173 : « Les deux jambes méme dans l’ancien costume de cour japonais ont chacune leur robe de soie... » 7. Ibid., p. 1169 : « C’eSt une folle a travers la campagne déserte qui va a la recherche de son fils mort » («« No»). 8. Voir p. 574, n. 2. Dans le texte cité, cet exemple sera reptis.
Page 579. 1. Pr.,p.1169,« NO»:« Le Cheeut n’est pas partie a action... » Voit, pout les conclusions thédtre, passim.
que Claudel en tite, Mes idées sur le
1344
Cahier
IV
2. Claudel a écrit « la Neige » (Pr., p. 1187), sur une musique de ce compositeur; il lui a dédicacé la deuxiéme version de /a Femme et son ombre (Th. I, p. 1465). 3. Une des grandes iles du Japon. 4. I, 20 : « C’est la bouche du Seigneur qui a parlé.» — LVI,
12; rétablir :Aedificabuntur in te deserta...: « Les déserts
séculaires seront rebatis par toi. » 5. Matth.,
IV, 3 : « Dites
pains.» C’est PEvangile
que ces pierres deviennent
du Tet dimanche
des
de Caréme dont
Claudel cite, dans la note suivante, la collefe : « [la grace qu’elle s’efforce] d’obtenit pat ses mortifications. » Page 580.
1. Reproduit dans les notes de Po., p. 1138. 2. Verset 6: « Renouvelez vos prodiges et faites des miracles
nouveaux. » 3. A&eur qui jouera dans /a Femme et son ombre (voir p. 581). 4. Voir p. 506, n. 2. 5. Suite de textes extraits de la Bible : « Je suis Celui qui suis. — Qui es-tu? — Je suis la lumiére du monde. Je suis la vie, la vérité et la voie. Je suis PA et PQ. Ne craignez rien, c’est Moi. » 6. « Dans les Védas, on trouve cette idée que la substance du monde est fluide ou semi-matérielle, et que le fidéle peut satisfaire ses aspitations religieuses en participant a un fluide apparenté a cette réalité fondamentale. » Page s8r.
1. Voit Art poétique (Po., p. 163). 2. Voir p. 528. 3. « Seigneur notre Dieu, qui avez choisi ces créatures [le pain
et le vin] [...] nous vous en prions, qu’ils deviennent le soutien de notre vie présente et le sacrement de la vie éternelle. » 4. C'est en aottt 1926 que Claudel composera les « Idéogtammes occidentaux » (Pr., p. 81). 5. Voit Cah. C/. Ill, p. 73, 27 mats 1923 : « Ici on a donné avec un gtand succés /a Femme et son ombre. J’avais des a&teurs vraiment épatants, d’une grace, d'une souplesse et d’une expression tragiques superbes. La Lune qui défilait en haut derriére les pins et les reflets représentés par des enfants qui se glissaient un miroir a chaque main entre les nénuphars étaient moins réussis. La musique purement japonaise, shamisen, flite, petit violon,
harpe de bois, gong,
absolument temarquable. »
tambours,
chanteurs,
m’a paru
Février-Mars 1923
1345
Page j82. 1. Cf. Pr., p. 1127, « Un regard sur l’4me japonaise », 2. Jean, XIX, 36 : « Vous ne briserez aucun de ses os.» — Ps.
XI,
2:
rétablit
diminutae... : «car
les
vérités ont été
diminuées par les enfants des hommes.» — XVII, 43 : « Et je les briserai comme la poussiére que le vent emporte; je les écraserai comme la boue des tues. » 3. Voit p. 578. i} Page 583.
1. Claudel a voulu écrire Tokyo; il part pour Kyoto. Il n’a pas son cahier sous la main pendant ce voyage. Il prend des notes sur des feuilles de papier a lettres avec en-téte : Nara Hotel. Overlooking the Nara-Koen a widely reputed typical natural Park in the historical town of Nara. — Sanyo hotel. In the Shimonoseki Station compound, particularly convenient for passengers both on railway and steamers. De tetout a Tokyo, il a collé ces feuilles sur les pages 95 v, 96, 96 v, 97 du cahier. Elles ont une largeur de 13 centimetres; dans les espaces libres a gauche et a droite, il a
écrit des notes que nous signalerons par le mot « Cahier ». Elles sont donc postérieures au récit du voyage, et doivent étre datées vraise mblablement du retour a Tokyo. 2. CE 'p.t5 78! 3. « Cahier. » Déja en 1911, Claudel notait : « Vénus endormie dans un nid de corail rose.» Voir « Un regard sur ’4me japonaise» (Pr., p. 1123) : « Sur une atche de corail je traverse un étang de jade... »; et Cent phrases...: « La rose J’ai franchi sur un pont de corail quelque chose qui ne permet pas le retour» (Po.,
p. 708).
4. « Cahier. »
5a Cahier. Citéee7,, Pp. 1127. 6. Suite des notes prises a Kyoto. 7. Cent phrases... (Po., p. 738) : « L’arbre de la Chair pareil a un monsttueux cerisier aux ventouses toses et aux boutons d’un violet virulent. — Une vapeur d’or réunit tout le paysage dans le bain d’une antiquité immémoriale joie nouvelle et l’éternelle splendeur. » 8. Kano Motonobu, peintre du xvi si¢cle; Kérin est plus célébre (1658-1716); Claudel le cite dans « Villes en flammes » (Pr, iPatae)s 9. Sut Part du bouquet au Japon, voir «le Poéte et le shamisen » (Pr., p. 832).
1346
Cahier
IV
Page 584.
1. Cent phrases... (Po., p. 739): « Aprés un long voyage, on me présente a un vieux cerisier tel qu'un vieillard démantelé dont la bénédi&tion m’était indispensable. » 2. « Cahier.» Voir p. 583, n. 3. 3. « Cahier. » 4. « Cahier. »
5. Ueno, parc situé 4 Tokyo, est le lieu dune des derniéres batailles soutenue pat les Tokugawa contre Meiji, donc vers 1870. 6. Pagoda-Anchorage, port ot lon débarquait pour gagner Fou-tchéou. Page y8y..
1. Ou « tuelle», les deux mots sont superposés. 2. Voit les deux notes marginales dans lesquelles Claudel exploite cette image, p. 583 et 584.
3. Pr., p. 1127, « Un regard sur l’4me japonaise» : «... la corde de paille qui le [l’arbre] place parmi les choses kami...» (c’est-a-dire sacrées). 4. A proximité de Nara, Yoshino est un endroit trés célébre pour le grand nombre des cerisiers que l’on peut y voit. 5. A Nara, voir p. 548, n. 8. Les notes qui suivent se rettouvent dans « le Poéte et le shamisen » (voir Pr., p. 831) et dans un texte assez coutt, « le Triangle japonais » (ébid., p. 1512). 6. « essor» en sutcharge. 7. « Cahier. » 8. Rature : Les arbres. 9. Cent phrases... (Po., p. 739) : « Temple. Il se passe quelque chose dans l’ombre et tout 4 coup une flamme s’allume dans le miroir dargent. » Page 586.
1. Ps. XXXIV, 11 : « Ils m’ont interrogé sur ce que j’ignotais.»» — 12: « [Ils m’ont rendu le mal pour le mal] c’était la Stérilité pour mon Ame. » 2. « Pleins de fissures, nous nous écoulons pat chacune delles. » 3. Le 29 avril. Une douzaine de représentations eurent lieu 4 la salle Berlioz; la piéce était reprise par Lugné-Poe; un « vif succés », dit un courriériste, mais, semble-t-il, bien moins grand
que lots de la création (voir Cab. C/. V, p. 173). La presse n’était pas faite pour rassuter Claudel sur sa « situation littéraire». André Beaunier écrivait par exemple : « A la place du francais, il y a maintenant le Claudel. Jamais on n’a vu galimatias plus hautain. »
Avril-Mai 1923
1347
Page 587.
1. C'est presque la formule que Claudel aime a répéter : « Tout ce qui est est symbole, tout ce qui arrive est patabole » eel 13). 2. Ces notes sont évidemment en rapport avec /e Soulier de Satin; cf. I, 1: « Et ce qu'il essayera de dire misérablement sur la terre, je suis la pour le traduire dans le Ciel» (I. I, p. 669). — Depuis : « Il n’y a tien...» se trouve au milieu de la page avec signe de renvoi. _ 3. Jean, I, 26: « Au milieu de vous se tient quelqu’un que
yous ne connaissez pas. » 4. Voit p. 26. 5. XXXII, 13: «... pour lui faire sucer le miel de la terre et Phuile des plus duts rochers... » 6. Pour l’évolution — et les contradiétions — de Claudel a Pégard de V. Sussmann, voir p. 668, 717, 740. 7. Ratute : c’[esf]-d-d[ire]. Page s88.
1. XXXYV, 21: « La priere dun homme qui s’*humilie percera les nues [...] jusqu’a ce que le Trés-Haut Vait regardé. » 2. Cf. Fr. Lefevre, Une heure avec..., 3° sétie, 1925, p. 165 : « Les analyses de Proust sont intéressantes, mais c’est l’analyse de la décomposition. Et puis il y a autre chose dans la vie que ce peuple d’oisifs et de larbins. Ce que je reproche surtout a Proust, c’est cette pratique de Pintrospection continuelle. C’est une hygiéne déplorable que de se regarder. On se fausse en se regatdant; on fabtique une espéce d’individu artificiel qui remplace la personnalité naive et agissante.» Cf. Mémoires, p. 38, Préface a R. Jouve (O. C., t. XVIII, p. 252) : « Pourquoi le spectacle de la décomposition [...] serait-elle seule intéressante? » — Cependant Mémoires, p. 335 : « Proust, quelle que soit mon opinion a son égard, est tout de méme un artiste extrémement important et considérable» et le billet a Mme Mante-Proust (O. C., t. XVIII, p. 450), au moment de la publication du Contre Sainte-Beuve. 3. Cent phrases... (Po., p. 739) : « Dans une écuelle de terre, je
bois une gorgée de séve. » 4. Histoires des origines du christianisme, liv. VIL, Marc-Auréle et la fin du monde antique, Calmann-Lévy, 1882, p. 483. 5. « La nuit», surcharge. 6. Depuis « le méme bruit... », dans la marge, avec indication de renvoi.
13.48
Cahier V
Page 589.
1. « De sa malhonnéteté», surcharge. Page j90.
1. L’épitre du méme jour. Le passage de Luc que Claudel vient de commenter (XI, 5-13) est lu a la messe des Rogations; le méme
jour, on lit Jacques, V, 6-20 : « Si un
d’entre vous
s’écarte de la vérité, mais qu’ensuite quelqu’un le convertisse, sachez que celui qui raméne un pécheur des sentiers ot il s’égatait, sauveta son Ame et fera dispataitte ses péchés.» — Pour Vattitude de Claudel sur ce point 4 l’égard de Philippe Berthelot, voit Pr., p. 1290, « Consolation 4 moi-méme ami», et ici les notes 4 la mort de Berthelot.
GATE
sur la mort d’un
RAY,
Page 593.
1. Sur la page de garde, Claudel a écrit : « Cinquieme Cahier. Tokyo, 11 mai 1923» et signé. 2, XIV, 2:«... je vais vous préparer une place. » 3. Pr., p. 834: « Un arbre n’est beau, une montagne [...] que s'il s’inscrit dans une certaine figure géométrique, de préférence un triangle, présentant des proportions si belles qu’elles détruisent la contingence. C’est le passaget qui s’inscrit dans l’éternel. » 4. Verset 11 : « Maintenant je commence. » 5. Job, XIV, 14: « J’attends tous les jours que mon changement arrive.» — Préface de la Messe des morts : « La vie est changée, non pas dtée.» — Voir sur ce sujet les réflexions de Claudel dans Un poéte regarde la Croix.
Page 594. 1. « Chloroforme » est en sutchatge. 2. Voir déja dans La Ville (Th. I, p. 459, pat exemple). Tout ce passage seta teptis et parfois littéralement recopié dans Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 688-690). — Voir aussi les textes tassemblés dans Oui ne souffre pas... Gallimard, 1958, et pour une opinion presque opposée, Pr., p. 1316. — La derniére
phtase a été ajoutée aprés coup.
Mai 1923
1349
Page jos.
1. X, 10: « Moi, je suis venu pour que [les brebis] aient la vie '- et qu’elles aient plus abondamment. » Page 596.
1. Ce développement est trés proche de certaines affirmations de Camille, /e Soulier de Satin, III, 10 (Th. Il, p. 838): « Ainsi, moi fini, si je tiens bon, j’arréte la Toute-Puissance, |’Infini _souffre en moi limite et résistance... »
Page 597. 1. Coupure de journal collée. Le titre est découpé et collé a part. La parenthése finale est de la main de Claudel, en marge. — Parmi les ouvrages de Hello, voit surtout : Renan, 1’Allemagne et l’athéisme au XIX siécle, Perrin, 1858; Renan et la Vie de Jésus, ibid., 1863; et suttout Philosophie et athéisme, Poussielgue,
1903.
Dans l’édition Perrin, 1930, on trouve le début textuellement p. 176 et 177; la suite résume les pages 180 a 246. 2. Cf. « Villes en flammes» (Pr., p. 1139) : « ... mon attaché aéronautique, le commandant Tétu. » 3. « [Claudel] aimait les escargots et ces mollusques avaient le don de l’inspiter...», Pierre Claudel, dans Cah. C/. II, p. 80; on trouveta plus tard dans ce Journal des poemes inspirés pat Pescargot; sut la portée de cette image, voir Jacques Petit, « A ptopos d’une fantaisie de Claudel», Cab. Ci. III, les Lettres modernes, 1966. 4. Entre deux lignes : « replis». 5. Cest-a-dite la tulipe, ceil du soleil. 6. Ps. XCVI, 7 : « Ceux qui adorent les images sculpteées... » Page 598.
1. Cf. p. 593. Cette idée de la « proportion » est en rapport avec les réflexions sur l’architecture japonaise et jouera un rdle important dans « le Poéte et le shamisen ». 2. Cf. Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 702 sq.). — Pour la cloche bouddhiste, voir p. 317. 3. XXVI, 11 : « Vous ferez un feStin de réjouissance en mangeant de tous les biens que le Seigneur vous aura donnés. » — En réalité, il s’agit de l’épitre du samedi aprés la Pentecéte. 4. Inspiré par la féte de la Trinité, premier dimanche aprés la Pentecéte. 5. Ces mots et les deux notes qui suivent sont écrits a cdté
1350
Cahier V
dune photographie de la mére de Claudel, collée en haut de la page, a gauche : « Maman, 83 ans. Mai 1923.» 6. Bété, domestique, homme de peine (voir Pr., p. 1138).
7. L’une des sceuts de Philippe Berthelot avait épousé CharlesViéor Langlois, qui fut professeur 4 la Sorbonne et directeur des Archives nationales. 8. Ila été question plusieurs fois d’Andrté Berthelot, frére ainé de Philippe, lorsqu’il accueillit la mére et la sceur de Claudel en 1914 et a propos de la Banque industrielle de Chine, dont il était administrateur; ce procés est la suite de cette affaire; la Banque
avait déposé son bilan le 30 juin 1921; Berthelot avait démissionné; le cabinet Briand également le 12 janvier 1922. André Berthelot avait été député puis sénateur. Erudit, il a rédigé, pour VHistoire générale de Lavisse et Rambaud, les chapitres sur le monde romain, le monde barbate, les Gallo-Romains, les Mérovingiens, les Carolingiens (t. I, chap. 1, 1, 11, VI, VI, vur).
9. Pour ces teprésentations, voit p. 586, n. 2.
Page 599.
1. Au-dessus de « entre en», Claudel a écrit « se donne ». — Cf. « Jules» (Pr., p. 849) : « C’est comme cette idée inouie, le
méme Freud, que le petit enfant qui se met un doigt dans la bouche chetche 4 se procutet une sensation érotique! — LE PORTE : Ce sont les gencives qui l’agacent tout simplement ou Pinstinét de téter. —
JULES : Ou si vous voulez faire
’homme
profond, dites que c’est la premiére forme de la communion avec soi-méme et qu’il veut se procurer le sentiment de sa propre identité. » 2. Cf. Positions, ,« Lettre aMadame E. » (O. C., XV, p. 211): « Au lieu de satisfaire 4 amour par le feu qui en fait lumiére, splendeutr, esprit, [la créatute] satisfait a la Justice par ce méme feu qui éternellement l’interroge, l’analyse, la calcine, expose sa nature, sa vocation et son ctime dans la lumiére inexorable de
Pévidence. » 3. « Ses ceuvtes le suivent. » Méme citation et développement identique dans Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 703) : « Oui, mais si les ceuvtes mauvaises suivent le damné, les bonnes aussi!...» et pout toutes les remarques qui précédent, p. 702 sq. Page 600.
1. X, 5 : « Cest par eux que furent peuplées les iles des nations, selon la langue de chacun, selon leurs familles et leurs
peuples. »
Mai- Juin 1923
1351
on L’Enéide, XI, 313 : « On a combattu avec toutes les forces de PEtat. »
3. C’est en effet la traduétion que donnent les éditions de la ulgate. Cf. « le Point de vue de Ponce-Pilate» (Pr., p. 912) : « Barabbas (le Fils 4 Papa, comme l’appelaient mes jeunes attachés)...», et Un poéte regarde la croix (O. C., t. XIX, p. 211). 4. Dans sa conférence, « Une promenade 4 travers la littérature
japonaise » (Pr., p. 1153), Claudel cite plusieurs textes du Makurano-soshi de Shei Shénogon, « cette grande dame qui métiterait
d@avoir sa place aux cdtés de Sapho et de Colette parmi les noms les plus brillants de la littérature féminine » (p. 1157). Elle vécut vers ’an 1000 (période Heian). — Kennk6, et non Bennké, est un bonze du xiri® siécle, auteur d’un livre intitulé Variétés des moments d’ ennui; Claudel le cite dans « Un regard sur l’4me
japonaise » (Pr., p. 1123) et dans la conférence citée, p. 1160-1161, il le compare alors a Horace. 5. Suit Papposition en rouge du sceau de Claudel avec ces mots : « Signifie : Kao, grand, élevé, en chinois. » Et — addition postérieure au travers de la page : « J’ai rempli mon nom. »
Page Gor. 1. Pléiade, t. VIII, p. 796. Rétablir : « ... sous les clefs d’une flate. Il expirait onduleusement a Voreille d’ou il précipitait
Paction du sang. Sa fagon de dite... et vous enttainait ’4me dans un monde surhumain... ne me suis-je pas fait injustement grondet... chargé [et non chargée]... cette lumiére parlée avec Pardeur que j’autais mise 4 serrer la comtesse sur mon sein!
Quel chant... » — Claudel cite ce texte dans « Réflexions et propositions sur le vers frangais» (Pr., p. 44): « Admirable écrivain quoi qu’en pensent les professeurs, épris des cacogtaphies a la
Sainte-Beuve. Je retrouve dans mes notes le passage suivant du Lys dans la Vallée, cet incomparable poéme. » 2. Idée souvent reprise; voir Pr., p. 1161, « Une promenade 4 travers la littérature japonaise» : « Les Japonais apportent dans la poésie comme dans I’art une idée trés différente de la ndtre. La ndétre est de tout dire, de tout exptimer...»; p. 1516 : « De méme en art rien de plus étranger au gout de lartiste chinois ou japonais que ce souci chez nous de bourtet le cadte... » 3. Voit p. 578. Page 602. 1. Coupure de journal collée. « La plus grande partie des Etats-Unis d’Amérique (dit M. Theodore Dreiser dans I’Independent de New-York) n’est pas capable de penser. Elle a la CLAUDEL V - 46
46
1352
Cahier V
prospérité matérielle, de belles demeures, de la mécanique a profusion, et pourtant la plupart des gens y ont la mentalité d’un paysan d’Europe ou d’Asie. Ils s’intéressent 4 leurs petits mariages, a leurs petits décés. Les problémes nationaux ou artistiques n’ont pas de place dans leur vie. « Prenez une grande et prospére organisation. Ecoutez les ptopos des gens. Quand ils ne parlent pas affaires, leur conversa-
tion est celle de garcons de neuf ou dix ans. Ils ne savent rien en matiéres d’art, de science, de religion. La littérature est le moindre sujet dont ils aient connaissance. Faites-leur une rematque intelligente, les yoila tout interdits parce que pour une fois vous ne leur avez pas raconté une histoire drdle. Ce pays, dit H. G. Wells, posséde richesse et loisir 4 un degré effarant. Mais les hommes de ce pays, tout simplement, ne pensent pas. Ils sont emportés par des bagatelles et des idées sottes. Vous pouvez enfermer leurs jeunes gens dans des universités, avec leuts salles de cours et leurs laboratoires, quand ils en sortent, tout ce dont ils savent parler, c’est Babe Ruth.
C’est un pays sans espoit pour les intellectuels et les gens qui pensent. La seule chose qu’ils puissent faire est de vivre entre eux, de former une franc-maconnerie des leurs, d’ot le reste est exclu. » 2. Main Street a été traduit en frangais sous le titre de GrandRue. La premiére Edition anglaise est de 1921; le texte cité est au chapitre xx, n° 3, dernier paragraphe, c’est une réflexion de Carol Milford sur le peuple américain des petites villes. Trad. : « Des gens sans gout, qui ingurgitent une noutriture insipide, et s’asseoient ensuite, débraillés et la téte vide, dans des fauteuils 4 bascule, dans un décor Stupide, écoutant une musique mécanique, tenant des propos non moins mécaniques sur la supériorité des
automobiles Ford, et se regardant comme la premiére race du monde. »»
Page 603.
1. Claudel parle a plusieurs reprises des Togukawa dans les textes japonais (voit «Index» de la Prose). Cette famille de shoguns gouverna le Japon pendant plus de deux siécles jusqu’a la restauration du pouvoir impérial avec Meiji, 1868. — Takasugi (et non Takasagi) était le chef politique du Choshiu; Saigo Takamori était appelé aussi Nanshd; Satsuma, région au sud de Kiou-Siou. D’accord sur l’opposition aux Shoguns, les deux chefs s’opposaient sur la politique 4 suivre. 2. The Eve of St Agnés, strophe xx1v; Claudel a écrit ces deux vets a la suite, comme s’ils n’en faisaient qu’un. — « [Vitraux]
Juillet-Septembre 1923
1353
aux couleuts sans nombre et aux teintes splendides comme le sont les ailes incarnates des grands papillons tigrés. » 3. Henry Morris Russell, né a New-York le 25 oétobre 1877, astronome, directeur de l’Observatoire de Princeton (1912-1947). Voit Astronomy, 1926, The Masses of the stars, 1940. — Voit p. 39, 535.
4. Repris textuellement dans « l’Elasticité américaine » (1936) (Pr., p. 1207). 5. Jean Boyer, du Comptoir National d’Escompte, ami de la z famille Claudel.
6. « Tues fou, Paul, tes grandes études te ménent 4 la folie. » WeGenese,; il
yirs
Page 604.
1. Coupure de journal collée. Cf. Serge Petsky, /a Vie et Pauvre de Dostoievsky, 1918, nouv. éd. 1924. Dans cette derniére édition le texte cité est p. 331; lignes écrites par Dostoievski en 1881, peu de temps avant sa mott. ’ 2, Locabelli, aviateur italien. D’Annunzio avait été officier dans l’aviation italienne pendant la guerre de 1914. Boe OlL DyalO7s, On) 5. Page 605. i. « Sentiment» est en surcharge. 2. Chiba est, dans la péninsule de Boso, 4 quelque distance de Tokyo, une ville industrielle. 3. Cantique, II, 9: « [... Le voici qui se tient] derri¢re notre muraille. » — Ps. XVII, 30:«... et pat mon Dieu je franchirai le mut» (rétablir : in Deo meo transgrediar...). — Matth., XX, 14: « Prends ce qui t’appartient et va-t’en. »
Ai MG, 0), Gere 5. Ici grande photographie collée de la main de Claudel : « Une crise Presse recueille les déclarations d’un 6. « A travers les villes en flammes
(coupure de journal), avec ministérielle au Japon : la futur Ministre : l’Oracle. » » (Pr., p. 1133) a patu dans Leétures pour tous de janvier 1924. « Cette relation, dit Claudel, me fut demandée par le directeur des Leétures pour tous, M. René Doumic lui-méme. » — On y ttouvera en effet tous les détails | notés ici. 7. Galard de Béarn, prince de Chalais, conseiller de l’Ambassade (voit p. 567). 8. Attaché militaire de l’Ambassade.
|
|
Page 606.
|
1. Lite Fiat voluntas tua, Avant ces lettres, rature : un mobi-
1354 lier.
Cahier V —
Sut
ces
manusctits,
voir
«
Quelques
manuscrits
détruits », Bulletin de la Société Claudel, Il.
2. Ces deux invocations se trouvent dans les litanies de la Vierge.
3. « de série » est en surcharge. Page 607.
1. Les Goncourt. Sans doute Claudel a-t-il lu louvrage dE. et J. de Goncoutt, /a Duchesse de Chateauroux et ses saurs. 2. Sur cette page trois photographies collées; lune, d’un groupe d’une ttentaine de personnes parmi lesquelles Claudel; Pautre, du cadavre de Déjardin sur une charrette; la troisiéme, de
Claudel autimon de la méme charrette. De la main de Claudel : « Au milieu des réfugiés de Yokohama (2 septembre 1923). — Le cadavre de Déjardin, consul de France 4 Yokohama. — Egena elementa.»
3. Ades, IX, 6: « Seigneur, que voulez-vous que je fasse ?» — Cf. pour ce theme, dans oeuvre de Claudel, Vers d’exil (Po., p- 17): « Toi qui m’as appelé, dis-moi ce que tu veux. » 4. Surcharge : « et amusent ». 5. Saint Frangois de Sales revient souvent sur cette idée, notamment a propos de la souffrance : voir Introduétion a la vie dévote, III, chap. xxxvit, et Cimvres completes, édition Annecy, t. XVIII, lettre 1519, p. 379; t. XIX, lettre 1716, p. 361. Page 608.
1. Voit p. 587,n. 3, pout le texte de Jean. L’autte texte est tiré de Genése, X XVIII, 16 : « Le Seigneur est vraiment en ce lieu-ci et je ne le savais pas. » 2. Cf. Ia, gq. 115, art. 2, De Genesi ad litteram, liv. VI, cap. x
et XVIII. 3. En haut de la page, photographie de Henri Claudel a Berck. Claudel a écrit : « Henri le jour de sa féte (11 ans), 28 septembre 1923.»
Page 609. t. Daniel, XIII, 9 : « Ils détournérent les yeux pour ne pas voit le ciel. » Page 610. t. VIII, 45 : « Les foules vous pressent et vous accablent. » 2. Cf. Chaigne, Vie, p. 169 : « [Mme Claudel] fut atteinte
Odfobre-Novembre 1923
1355
_ dune typhoide consécutive aux conditions insalubres créées par Ja catastrophe [le tremblement de terre]. » 3. Ps. XLIV, 11 : « Ecoutez, ma fille, [et voyez] et prétez Poreille.» — Ps. CXLII, 8 : « Faites-moi sentir dés le matin | yotre miséricorde...» — Ps. L, 10 : « Vous me ferez entendre
_ une parole de joie et de bonheur. » 4. Voir p. 697. 5. Confrére de Claudel a Paris, aux conférences de Saint_ Vincent de Paul. Page 611.
1. Rature : inaugures.
|
2. «Ingratitude» est une addition postérieure. — Cf. une lettre a Milhaud, Cah, C/. III, 31 oftobre 1923 : « Merci, cher ami. [...] J’ai vécu en effet des heures assez impressionnantes. _ Mais les paquets de lettres et de journaux que je regois de France me prouvent que j’avais la-bas beaucoup plus d’amis que je ne men doutais. »
3. « Je me souviens de la maniére impayable dont il nous annon¢a un beau matin le passage de vie a trépas de Mme Obscure Infelix Faible Boyau, plus connue sut cette terre sous le nom de Claire Felix Faure Goyau, la femme regrettée d’un illustre | académicien. » Pierre Claudel, dans Cah. C/. I, p. 79.
4.
Nom supprimé.
5. Ici une coupure de magazine, collée, reproduction d’un tableau portant en légende : « Tremblement de terre au Japon, par Hokusai. » 6. Cette incorrection de Valéry est dans Eupalinos ou I’Architette précédé de I’ Ame et la Danse, Gallimard, 1923, p. 116. Page 612.
1. En haut de cette page, coupute collée : reproduction d’un | dessin de Picasso représentant un cheval. 2. Ce psaume est un cantique de louange. Rappelons le verset 10 : « Le mal ne viendra pas jusqu’a toi et les fléaux ne s’apptocheront pas de ta tente. » | 3. «Il regarde la terre et la fait trembler. » 4. Le plus célébre des Tokugawa, qui rétablit le shogounat. | Il résida longtemps 4 Shizuoka et y fut enterré au sommet du Kumozan. On accéde a sa tombe pat un escalier d’un millier de matches. Son corps fut plus tard transporté a Nikko; voir p. 630.
5. Surcharge : « un nid d’aigle ». 6. C'est en effet a proximité de Shizuoka, 4 Mia-no-Matsubara,
1356
Cahier V
que se situerait l’événement légendaire qui est a l’origine du né. Voir p. 574. 7. Stanislas Fumet, Mission de Léon Bloy, Desclée de Brouwer, coll. « les Iles », 1935, p. 162, note : le texte est tiré du Désespéré.
Claudel lit sans doute un article de S. Fumet, utilisé plus tard dans ce livre, et publié dans /es Lettres, of&tobre et novembre 1923. 7a Ibid., p. 166, note; extrait de /’Ame de Napoléon. 9. Cette phrase n’est pas une citation; elle est inspirée part | S. Fumet, ibid., p. 177. 10. Ibid., p. 178 : « Bloy se demande s’il n’y eut point [de la part des Juifs] l’'accomplissement d’une effrayante mission qui veut que le caractére de la distinétion théologique... regoive... » Page 613.
1. La« Priére de Manassé, roi de Juda», texte apocryphe, est traditionnellement publiée avec les Livres d’Esdras, III et IV, a la suite de la Vulgate : « Et je ne puis plus respirer. » z. Claudel a donné plusieurs traits de Lin Fan au Serviteur chinois de Rodrigue dans /e Soulier de Satin. 3. « Se convertissent. » 4. Bernard Brunhes, /a Dégradation de |’énergie, Flammarion, Bibl. de philosophie scientifique, 1909, p. 299. 5. Ibid., p. 245. « Le mot énergie a été substitué par le do&eur Thomas Young 4 celui de vis viva pour désigner la capacité de produire du travail due a la vitesse acquise et l’emploi du méme mot, a une époque toute récente, a été étendu par sir William Thomson a une capacité, de quelque nature qu’elle soit, de produirte du travail. » Page 614.
1. Ibid., p. 316. Noter un lapsus, Claudel a écrit « sans aucune addition d’une énergie [au lieu d’une inertie] complémentaire ». 2. Ibid.; Claudel résume la page 315. 3. Cf. Cent phrases... (Po., p. 725) : « Jécoute le torrent qui se précipite vers sa soutce. » 4. Brunhes, op. ciz., p. 236.
5. Cf. ibid., p. 238-243; la phrase n’est pas une citation. Cette note se trouve en dessous d’une photographie (collée) de l’ambassade de France, avec cette légende : « L’ancienne ambassade de France, construite par le marquis Okuma, brilée le 1° septembre 1923. Au premier, en commengant par la droite, ma chambre, chambre de ma femme, chambre de Chouchette. En haut du mat se tenait le corbeau Adhémar.» Voir «la Maison du Pont des Faisans » (Pr., p. 1198).
Décembre 1923 - Janvier 1924
a3s7
Page 615. 1. Surcharge : « va dans un sens ». 2. Une Saison en enfer, Pléiade, p. 207. 3. Entre cette note et la précédente, rature: 4 déc. mort de Maurice Barres. 4. Le Soulier de Satin, liminaire (Th. II, p. 663): « L’ordre est le plaisir de la raison, mais le désordre est le délice de ’imagination. » 5. Cf. Lettre 4 Gide, 12 janvier 1924, p. 241 : « La sainteté est _de supprimer la paroi, de s’anéantir, de cesser d’étre a ]a volonté divine aucun obstacle. »
1924
Page 616. er...CE. Den Si7o Ls de
Beal D055. Page 617. 1. Claudel déctrit cette représentation dans « N6 » (Pr. p. 1174): «... un autre nd trés antique et trés curieux que l’on appelle Okina... » 2. Traité du Purgatoire. Claudel cite sans ordre; d’autre part les différentes éditions du Trai#é ne présentent pas les mémes divisions en chapitres ou paragraphes; on peut se reporter a Sainte Catherine de Génes, pat Pierre Debongnie,
Desclée de Brouwer,
1960, p. 210. 3. Ibid., p. 208. Page 618.
1. Ibid., p. 203, 206, 211. 2. Cf. Mémoires, p. 54, et
«Mon Pays»
(Pr., p. 1007): «... Vhori-
zon de l’Ouest tel qu’on le découvre de ce cap ow se dressait Pantique pignon de Chinchy : la butte du Géyn, de bruyéres et de sable blanc avec ses roches fantastiques, et puis la vallée de YOurcq, la trouée vers Paris, vers le monde, vers la mer, vets
Pavenir! » 3. Voit p. 605. Ces notes sont proches de Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 709) : «... cette union de la lumiére et de la résistance...» et toutes les pages sur les vitraux.
1358
Cahier V
Page 619.
1. Surcharge : « qui donne des idées ». Page 620.
1. Cf. les Aventures de Sophie (O. C., t. XIX, p. 161): «... ce saint patriarche au Japon qui administrait dans la paix évangélique une république de lépreux. » 2. XV, 3: « Le Christ ne s’est pas complu en lui-méme. » 3. Cf. pour ces réflexions sur le vide les « conversations » contenues dans /’Oiseau noir; rapprocher en particulier de cette note :« ... je vous dirai que les poémes se font a peu prés comme les canons. On ptend un trou et on met quelque chose autour» (« Jules», Pr., p. 848). 4. Jean, VIII, 32: « La vérité vous délivrera. » 5. Cf. « Réflexions et Propositions sur le vers
frangais »
(Pr., p. 10,n. 1) :« Tout condamné 4 mort aura la téte tranchée. / Quiconque aura été condamné 4 la peine des travaux forcés a temps / Sera mis de plus pendant la durée de sa peine — en état @interdiction légale. / Qui ne reconnaitrait dans ces magnifiques textes du Code Pénal le balancement de nos vers classiques?» 6. Souvenir de Partage de Midi (Th. I, p. 987) : « amet d’avoir fini d’étre jeune! »
Que c’est
Page 621. 1. Imitation de Jésus-Chrift, liv. Il, chap. vit, 5 : «... de sorte
qu’ayant exclu et banni tout Je reste, vous seul » (trad. Lamennais). 2. « Réflexions et propositions sur le vers « Il y aurait beaucoup a dire sur le vers shakespeatiens dont l’élément prosodique
soyez seul uni 4 lui frangais » (Pr.,p.6): des derniers drames principal parait étre
Penjambement, she break, le heutt, la cassure aux endtoits les plus
illogiques, comme pout laisser entret l’air et la poésie par tous les bouts. » — Cf. également Mémoires, p. 36.
3. Jean, I, 6: « Il y eut un homme envoyé de Dieu, dont le nom était Jean.» Claudel rappelle ce texte 4 propos de don Juan d’Auttiche, dans /e Soulier de Satin (Th. II, p. 883) : « Comme si c’était lui dont parle l’Evangile 4 la fin de la messe... » 4. « [Barrés] était tourné vers le passé. Je suis attiré par Pavenir. “La terre et les morts”, dit Barrés. Je lui répondrais volontiers : “La met et les vivants”’ », dans Fr. Lefévre, Une heure avec..., 3© sétie, p. 165. 5. I Cor., rx, 26 : « Moi donc je cours, et non comme au hasatd. Je combats, et non comme frappant air. »
Février-Mars 1924
1359
6. La Reléve du matin a été publiée en 1920, Je Songe en 1922, le Chant funébre pour les morts de Verdun en 1924. Claudel avait lu au moins le premier de ces ouvtages; voit dans Jes Nouvelles littéraires, 23 janvier 1964, la lettre qu’il écrit alors 4 Montherlant, le 17 octobre 1920. 7. Sans doute inspiré par saint Paul, I Cor., 1x, 24 : « [Ne savez-vous pas que ceux qui courent dans le Stade courent tous, | mais qu’un seul remporte le prix.] Courez de maniére 4 le
rempotter. » 8. « La chose produit des fruits pour son maitre. » 9. Rature : me.
Page 622.
1. Un signe de renvoi devant cette note, qui commente sans doute : Curro ut comprehendam. z. Chayet, secrétaire de l’Ambassade. Bo lGris jor, Asks) 4. Cf. p. 246. 5. Note en marge.
6. Feuille 4 en-téte de « Imperial Hétel Tokyo», collée dans _ le Cahier.
Page 624. 1. Rature : matériels.
Page 625.
1. Ces notes depuis « Ajouter » sont en marge dans les pages 29 et 30. | 2. Cf «le Poéte et le vase d’encens» (Pr., p. 845) : « Les choses qu’on peut enseigner ne valent pas la peine d’étre apptises. » 3. Sermon sur la Sagesse, VU, 30, et VIII, 1 (P. L.,
col. 1031
CLX XXIV,
C) : Sicut sapientia sapor boni, ita malitia sapor mali
| dicitur, et Super Cantica, 85, 8 (P. L.,
CLX XXIII, col. 1191 D):
« La sagesse eSt le gout du bien. » | 4. Dans Mémoires, p. 261-262, Claudel est 4 Pégard de Barres _ plus équitable et plus nuancé. | Page 626.
1. Cf. Je Soulier de Satin (Th. Il, p. 922); Rodrigue
: « Je
| promets. [...] Je promets, mais je ne tiendrai pas. »
2. Ville importante proche de Tokyo, qui fut un des fiefs des
1360
Cahier V
Tokugawa; le jardin Kairaku-en, od se trouvent ces pruniers, est célébre. 3. Surcharge : « irréguliére ». Page 627.
1. LVIII, 13 : « [Si tu appelles] le sabbat tes deélices... » Claudel y fait souvent allusion. Voir par exemple Pr., p. 724. 2. Enréalité: Er fafa est, dum oraret, species vultus ejus altera, 1X,
29: « Et pendant qu’il priait, ’aspe€t de son visage devint tout autre. » 3. Surcharge : « Ecartelé: Epinglé. » 4. « Hautement apprécié. » 5. «... les soshi (cadres de papiers)...», « Villes en flammes » (GEER os SUE Page 628. 1. XXI, 25 : « Les désirs tuent le paresseux. » 2. XXII, 54: « Pierre le suivait de loin. »
3. Ici Claudel a dessiné le theme décoratif du vent : une spirale disposée horizontalement. Page 629. 1. Verset 5 : « Car tout ce qui est glorieux sera protégé. » 2. Dans Odes, III, on lit déja « montrance» au lieu de « monstrance» (Po., p. 263). 3. Claudel écrit « musique» en pensant vraisemblablement au personnage de Dofia Musique;
cf. /e Soulier de Satin, Il, 10;
également « la Parabole d’Animus et d’Anima» (Pr., p. 27). 4. Jean, XIV, 2:«... je vais vous préparer une place.» La suite de la note est une traduction commentée de Jean, XV, 1-5.
Ce dernier texte était lu a l’Evangile le 30 avril, féte d’un martyr; le premier pour la féte de S. Jacques et S. Philippe, le 1°™ mai. Page 630.
1. Surcharge : « sombres ». 2. Temple célébre proche de Nara. 3. Le plus célébre temple de Nikko, élevé 4 la mémoitre de Togukawa Ieyasu. 4. Les deux derniets mots en surcharge. Page 631.
1. Claudel évoque ce « nd», dont Benkei est ’un des personnages principaux, dans « l’Arrieéte-pays » (Pr., p. 1194).
Abril- Juin 1924
1361
2. Genro, seigneur féodal. 3. Voir « Bounrakou » (Pr., p. 1180). 4. Lecture douteuse pout Nara. 5. Cf. «le Poéte et le shamisen» (Pr., p. 829) : «Comme on
_ aimerait voir un nd joué sur cette estrade que nous avons vue a _ Miyajima et que la met 4 chaque marée montante circonvient! » 6. Maitreya, successeut du Bouddha, messie du bouddhisme.
» Page 632. _- 1. Cf. « Paul Verlaine», (Pr. p. 499): «... cette longue harpe | pat terre que les Japonais appellent le Koté.» Cf. Cent phrases... (Po., p. 734): « Le Japon comme un long Kotd tout entier a
frémi sous le doigt du Soleil levant »; « Pont» (Pr., p. 1188) : « ... un pont en forme de koté. » 2. II Tim., 1, 12 : « Je sais en qui j’ai cru. » 3. Verset 131 : « J’ai ouvert ma bouche et j’ai attiré lair. » 4. Ce nom est en sutcharge. Page 633.
1. Aée
I, sc. v. Gide traduit cette derniére réplique de
Cléopatre : « Mes jours de primeur » (Pléiade). | 2. Surcharge : « au cceur chaud ». | 3. Mémoires, p. 333 :« Quand on regarde leur vie [des hommes | de lettres] de prés, on a impression d’un profond déséquilibre. Ils sont trés différents des savants, par exemple, dont beaucoup _ peuvent étre appelés des saints : un Pasteur, un Ampére, un _ Cauchy, ou un homme
_ vies complétement téalisation
d’action comme
de Lesseps, ont eu des
téussies, qui donnent
trés saine, et, somme
toute,
le spectacle d’une heureuse
malgré
les
obstacles plus ou moins pénibles qu’ils ont rencontrés. » 4. Surcharge : « de jeunes disciples ». Claudel avait d’abord écrit : « d’Orientaux ». 5. Cf. Gide, p. 214, 25 novembre 1913 :« Je me défie beaucoup de votre Rabindranath Tagore. Ce que j’en ai lu me parait assez écceurant, et je méprise tellement ce genre d’Asiatique! » 6. Ps. XLI, 8 : « L’abime appelle l’abime, au bruit de vos cataractes. » HEN Olt 14 03. 2,01). X. 8. « La ow il n’y a pas de femme, l’homme soupire dans Vindigence. » 9. 2° sermon sur la Pentecéte, 4(P. L., t. CLX XXIII, col. 328 A).
1362
Cahier V’
Page 634. 1. Confessions, X, xxt1, 33. Le texte exact est : Beata vita eft
gaudium...: « La joie qui nait de la vérité, voila le bonheur. » 2. « La plénitude de Dieu est la sainte Trinité. » 3. Ces idées ont été souvent exptimées pat Max Jacob. Voir Pierre Lagarde, Max Jacob mystique et martyr, éd. Baudinieére, 1944, Pp. 55-573 voit aussi Max Jacob, /a Défense de Tartufe, éd. A. Blanchet, Gallimard, 1964, p. 277 : « [La méditation est
la] descente d’une seule idée nue plus bas dans le ventre aux convictions. » 4. Voit p. 504. 5. « Martie, complément de la Trinité — Marie, noble couche
de la Trinité. » 6. « La cause tevient vers la femme. » 7. Lire vraisemblablement : « Féte du Cceur Sacré de Jésus. » Page 635. 1. Claudel a lu le livre en anglais, 1923, Londres, Hodder and Stoughton. La traduction frangaise par Isabelle Riviére est de 1925, Plon. C’est a elle que nous renvoyons. « La période... », p. 29. —« Celui qui suit... », p. 31. —« Le culte de la nature... », p. 32. — « Les hommes ont été rendus esclaves...»; Claudel résume la p. 42 : « Un trés honnéte athée avec qui je discutais un jour émit cette opinion : “Les hommes n’ont été tenus en esclavage que pat la crainte de Venfer.”” Comme je le lui fis remarquet, s'il edt dit que les hommes n’avaient été libérés de Vesclavage que pat la crainte de l’enfer, il se fat du moins référé 4 un fait historique indiscutable. » — « La bonne nouvelle... », Pp. 33. — « Rome sobre...», ébid. — « Le jardin innocent...»; p. 45 : « Les fleurs ont perdu l’odeur des guirlandes oubliées cueillies dans le jardin de Priape. » —« Le démon paien...», p. 38. 2. Voit Purgatoire, chap. xxI. Page 636.
1. Dans Paul Claudel interroge le Cantique des Cantiques, Claudel oppose Bouddha, « étendu sur une couche voluptueuse», au Christ « crucifié sur un support vertical » (O. C., t. XXII, p. 97). 2. IV, 15 :« ... que nous croissions [a tout égard] en celui qui est le chef, le Christ. » 3. Rature : sont.
4. On trouve la priére de ’abbé Petreyve, dans E/évations, pritres et pensées de Vabbé Petreyve, recueillies par Cl. Peyroux, Libr. de PArt catholique, 1917, p. 147, ou dans /’*Abbé Perreyve
Juin- Juillet 1924
1363
raconté par lui-méme, pat Cl. Peyroux, Spes, « Mr Paul» est l’expression qu’employait (voir p. 13).
1933, p. 668. — l’abbé Villaume
5. Claudel avait d’abord écrit : désespoir. 6. La derniére phrase semble ajoutée postérieurement. 7. Voit p. 618. Cf. Mémoires, p. 21 : « Pendant plusieurs années, mon pain quotidien ¢a a été Baudelaire, Leconte de Lisle et Flaubert... » Page 637.
1. Claudel parle de Blake dans « Réflexions et propositions sut le vers frangais »: « un voyant» (Pr., p. 35), un « halluciné »
(p. 36).
2. Le William Blake de Chesterton a paru en rgt1o. Trad. : « Blake de Chesterton. — Les initiations dans |’Ancien Orient. Et dans beaucoup de ces temples, tant anciens que modernes, la récompense finale du culte rendu au dieu 4 travers veilles et purifications, est qu’on est enfin digne de s’entendre dire que le ‘dieu n’existe pas. — Cela seul qui est aimable peut étre adorable. — Plus nous avangons dans la connaissance des choses élevées, plus nous les trouverons palpables et incarnées. — Coventry Patmore. L’homme éclatante
sage veut suivre une étoile, basse, grande,
dans le ciel; mais
4 mesure
qu’il en approche
elle
deviendra de plus en plus petite, jusqu’a ce qu’il la reconnaisse dans l’humble lanterne d’une petite auberge ou d’une étable. « Dieu se manifeste de manié¢re humaine, et plus belle — A ceux qui habitent le royaume du jour. » 3. CXVIII, 20. Rétablir : Concupivit anima mea...:« Mon ame a désiré vos ordonnances avec une grande ardeur. » 4. Ps. CX XXIII, 6 : « En son ceeur il a disposé des ascensions. » 5. En haut de la page, deux photos : « le Pere de Foucauld au Hoggar» et «la Vierge du perpétuel Secours, reproduction
peinte par le P. de Foucauld Nazareth ».
pour orner son Ermitage
de
Page 638.
1. 2. 3. vous 4.
Cette note ajoutée postérieurement. « La piété, considérer en esprit toutes les choses apaisées. » VII, 2:« Onse setvitra envets vous de la mesure dont vous setez setvis. » Promenade toute proche de Chujenzi. Pour le Shirane,
voit Cent phrases... (Po., p. 717). 5. Cf. la Rose et le Rosaire (O. C., t. XXI, p. 168) : « Le Quinze aout marque le comble et le sommet de l’année... »
|
1364
Cahier V
6. Ces réflexions reprennent celles que Claudel a notées en visitant Angkor. Cf. « le Poéte et le vase d’encens » (Pr., p. 840 et 841).
ica Cent phrases... (Po., p. 710) : « Le matcheur
solitaire
Pour ma bouche cette poignée de cresson... » 8. Commentaire de Apocalypse, X, 6. Cf. Au milieu des vitraux... (O. C., t. XXVI, p. 20 et 85). 9. C’est le méme chapitre de l’Apocalypse qui provoque cette réflexion. Voir la « Seconde note sut les Anges» (O. C., t. XX, en patticulier p. 382 sq.). Page 639. 1. Cf. Fr. Lefévre,
Une heure avec..., 3° sétie, p. 158: « A la
vérité on pourrait puiser avec profit dans les livres de l’Orient, mais jusqu’a présent ils ont été assez mal compris; on les a fait setvit de force 4 Villustration de telle ou telle thése philosophique de l’Occident, formulée avec une dureté bien étrangére a Pesprit de la-bas. » 2. Tout ce passage est presque recopié dans « le Poéte et le shamisen» (Pr., p. 827): « Par exemple je revois ces bébés en croix contre la vitre comme de brillants papillons... » 3. Surcharge : « et remplie d’herbes grasses ». Page 640. 1. Ce roman de Charlotte Bronté est de 1852. 2. Voit « Un an aprés » (Pr., p. 1146 et 1147). Claudel évoque les cérémonies de Yokohama et de Tokyo « sur le fameux terrain de Hifukushé ot 33 000 réfugiés trouvérent la mort... » 3. Cf. Au milieu des vitraux... (O.C., t. XXVI, p. 86): «... cette horloge qui est le cceur...» et p. 20: « ... il n’y a pas succession... »
4. Le 28 aout est le jour ot l’Eglise célébre saint Augustin. Page 641.
1. « Vous pouvez aller au diable. » 2. Claudel a laissé a cette page sans la coller une catte postale représentant « les falaises et la gréve de Sotteville-sur-Mer » et sut laquelle on lit: « I. 11, 24. Meilleuts souvenirs en partant de Sotteville pour occuper notre petit appartement a Passy, de la patt de Louise et de Gaston. » 3. Cf. « Mort de Judas» (Pr., p. 906) : « Pendant ces heures douloureuses tien ne m’a davantage affligé et scandalisé, je
l’avoue, que la lacheté de mes ex-confréres, et surtout l’inqualifiable désertion de Simon Pierte...»» — En dessous de cette note,
Aoit-Septembre 1924
1365
photographie collée avec de la main de Claudel : « Gigette (14 ans), Henri (12 ans) a Hostel, juillet 1924.» Gigette est le nom familier de Reine, la seconde fille de Claudel.
4. « Le recueil de chansons de Béranger, ot l’on trouve tant de belles choses mélées aux inspirations d’un anticléricalisme imbécile » (« la Chanson frangaise», Pr., p. 383). 5. Hiroshigé Andé (1797-1858) a illustré les sites de la route, longue de 450 kilométres, qui relie Tokyo 4 Kyoto, les cin-
quante-trois étapes du Tokkaido. Cf. « le Poéte et le shamisen » (Pr., p. 826) : «... le fameux Tokkaido illustré par Hiroshigé... » — 6. Saint Bernard, Homilia I super « Missus est» (P. L., t.
CLX XXIII, col. 59) : « Marie congut dans ’humilité. » 7. Rature : détachée.
Page 642. 1. Ps. LX XXIII, 11 : « Car un seul jour passé dans vos tabernacles vaut mieux que mille.» — 2 : « Que vos tabernacles sont aimables, Dieu [des armées].» — 3 : « Mon 4me languit et soupite aprés les parvis du Seigneur. » — Ps. CXIX, 5: rétablir Habitavi cum habitantibus Cedar...: « Jai demeuré avec
les habitants de Cédar.» — 6 : « Mon 4me a été longtemps exilée. » 2. III, 14: « Entre dans l’argile et foule-la aux pieds. » 3. Gal., V,17:« Car la chair convoite contre l’esprit et l’esprit contte la chair [...] pour que vous ne fassiez pas tout ce que vous voudriez. » Cf. la préface de Partage de Midi (Th. I, p. 1338, et Pr., p. 872). 4. XII, 50: « J’ai a étre baptisé d’un baptéme et comme je me sens pressé jusqu’a ce qu'il s’accomplisse! » 5. Phil., I, 7. Rétablir : Sed semetipsum exinanivit...: « Mais il s'est anéanti lui-méme en prenant la forme d’un esclave. »
6. Surcharge : « Béta du Cygne». Page 643. 1. Le P. Angelo Secchi (1818-1878), jésuite, aStronome. 2. Surcharge depuis : « 14 ans...». 3. « Et Sénéque le tragique » est en surcharge. Page 644.
1. 2. deux 3.
« Bijvanck » et « Léon Daudet » sont en surcharge. Il semble — si l’on tient compte de la surcharge — que les derniers soient Pottecher et Jules Renard. La derniéte phrase est ajoutée en marge. Cette note appelle-
1366
Cahier V
trait des éclaitcissements nombreux. Nous renvoyons aux cinq ptemiers chapitres de Mémoires, au Cah. Ci. I, ot Yon trouvera les correspondances avec Mallarmé (p. 40), avec Pottecher (p. 68), avec Schwob (p. 145), avec Bijvanck (p. 161); voir aussi le Journal de Jules Renard, Pléiade. Voir aussi dans Prose divers textes sur les écrivains cités ici. Nous devons 4 l’obligeance de M. Léon Guichard, qui en a publié un large extrait dans son Renard, Gallimard, Bibliotheque idéale, 1961, p. 144, la lettre suivante, datée de Washington, le
26 décembre 1930 : « Cher Monsieur,
« Votte lettre a réveillé en moi de bien vieux souvenirs. J’ai connu Jules Renard tout au début de ma vie littéraire et je m’étais pris pour son talent d'une vive admiration. C’était ’époque des Quillard, des Hérold, des Fontainas, d’Edouard Dujardin et de toute la pale friperie symbolarde — le régne de la nuance mauve et du crépe Liberty — Hérold avait vidé les casses de imprimeur de 4! J’étais infiniment reconnaissant a Renard, en tant que visuel et en tant que paysan, de sa vision ptécise et concréte des choses, de ses petits tableaux bien nets qui contrastaient avec la cuisine malpropre des naturalistes. Je fus donc enchanté de faite sa connaissance pat Marcel Schwob. Lui, Schwob, Pottecher et moi, et de temps en temps Barbusse, nous avions un déjeuner hebdomadaire au café d’Harcourt. Puis je partis pour PAmérique en 1893. C’est en tentrant en 1895 qu’eut lieu ce fameux diner chez ma pauvre sceur Camille qu’il a décrit plutét inexa&tement. Puis cinq ans de Chine. En rentrant je le trouvai ainsi que Pottecher fanatisé par Vaffaire Dreyfus. ce moment, je Pavoue 4 ma grande honte, j’étais plutét antidreyfusard, mais surtout l’affaite ne m’intéressait pas et le parti auquel elle servait de drapeau me faisait horreur. Nous rompimes. « Je ne crois pas que Renard eit une admiration démesurée pout mon ceuvre, ce dont je suis bien loin de lui faite un grief. Quant 4 moi je perdis de jour en jour ma sympathie pour la sienne, et a partir des Histoires naturelles j’ai cessé de rien lire de lui. J’ai cependant feuilleté son Journal ov il y a des pages effroyables sut la mort de sa méte et sut la sienne propre. Mais toutes ces pattes de mouches sont fatigantes. « Il y a dans le Journal un patagtaphe intéressant sur la métaphore et Pimage, 4 propos de mes tradu@tions d’Eschyle. Il m’a fait beaucoup réfléchir. R[enard] ne concevait Vimage que comme un objet concret reflétant un autre objet concret. La fourmi tessemble au chiffre 3, etc. Soit, mais cela ne va pas trés loin. Il y a une autte forme de Pimage qui en fait un instrument
Septembre 1924
1367
de connaissance et surtout de découverte supérieur encore au
syllogisme! c’est l’analogie dont S. Bonaventure a donné la formule. « Dans Renard : 2 = 4 en donnant au signe = sens non pas Wégalité mais de valeur. « Dans S. Bonaventute :
I
s
Sa
« Le rapport de a a b est équivalent a celui de ¢ 4 d et nous comprenons pourquoi comparaison est raison et pourquoi une image a valeur de preuve. C’est tout un monde qui s’ouvrait ainsi a moi. En somme le monde physique est comme une espéce d’abaque qui nous fournit le matériel nécessaire pour connaitre le monde invisible. « Pottecher et Suarés pourront vous donner plus de renseignements que moi sur Renard que j’ai en somme peu fré-
‘quenté. « Bien amicalement. Paut
CLAUDEL. »
« Je dois avoir quelques lettres de Renard, mais je ne sais pas trop ot elles sont. Elles sont d’ailleurs sans intérét. » 4. Voit Vladimir Soloviev, /a Justification du bien, Essai de philosophie morale, Aubier, 1939, I1I¢ partie, chap. v : « La question nationale du point de vue moral. » Page 64).
1. « En ce jour-la il y aura une route d’Egypte en Assyrie : les Assyriens entreront en Egypte et les Egyptiens en Assyrie, et les Egyptiens serviront les Assytiens. En ce jour-1a Israél sera, lui troisiéme, uni aux Egyptiens et aux Assyriens; la bénédiction sera au milieu de la terre que le Seigneur a bénie en disant : Mon peuple d’Egypte est béni et l’Assyrien est ’ceuvre de mes mains; mais Israél est mon héritage. » 2. Voit par exemple dans Pr., p. 1372, « le Messianisme nationaliste ». Page 646.
1. Kangaroo, de David-Herbert Lawrence, parut en 1923. — Sut cette interprétation de la forme géographique d’un pays,
1368
Cahier V
voit J. Petit, «la Carte chez Claudel», Cahiers Canadiens Claudel IV. 2. « Ila changé les fleuves en désert et les sources d’eau en un sol desséché. » 3. Cette bulle ne se trouve pas dans les Aéfa apostolicae Sedis. 4. Voit « la Maison du Pont des Faisans » (Pr., p. 1198). Page 647.
1. Voir Pexégése plus simple que Claudel donnera de cet épisode de la Passion, dans Un poéte regarde la Croix (O.C., t. XIX, p. 218-219).
2. Michée, VII, 19 : «... et il jettera tous nos péchés au fond de la mer. ».— Ps. XX XV, 7: « Vos jugements sont un profond abime. » 3. Luc, XIII, 8 : « [Laisse-le encore cette année jusqu’a ce que je creuse tout autour et] que j’y mette du fumier.» — 9: « Peut-étre portera-t-il du fruit... » 4. Les « deux témoins » de Apocalypse, chap. x1. 5. Dans son entretien avec Fr. Lefévre, op. cit., p. 157, Claudel dit, comme
ici, /e Vieillard du mont
Omi; ces poémes ont été
édités sous le titre « le Vieillard sur le mont Omi», d’abord dans Commerce, ptintemps 1925. Audtey Parr (voir p. 380) a illustré la deuxiéme édition, le Livre, 1927; Claudel les a enfin insérés dans /’Oiseau noir, édition de 1927. 6. Claudel avait d’abord écrit : a fini de sonner. 7. Sur José-Maria Sert, voir p. 437. L’indication donnée ici par Claudel se référe a « Sous le vent des iles Baléares », premier
projet de ce qui seta la Ve Journée du Soulier de Satin; elle se de Protée, évoqués Cah. C/. IID). 507). Ses articles de consacrés a Jules Eugéne Marsan et
tapporterait aux projets de représentations dans la correspondance avec Milhaud (voir 8. Sans doute « André Beaunier » (voit p. la Revue des Deux Mondes en 1924 étaient Romains, Henri Bremond, Alain-Fournier, Tristan Deréme. Page 648.
1. Claudel parlera de cet acteur, alors en tournée en Amérique, dans « le Drame et la musique» (Pr., p. 150) : « Ce n’est pas un eerie et ce n’est pas une femme, c’est un sylphe.» Voir plus
as. 2. 3. 4. luth
Fille de Patc de Kotos; importé
Pambassadeur d’Allemagne 4 Tokyo. Tokyo, en face de l’Hdtel Impérial. voir p. 632, n. 1. Biwa : nom japonais du pipa, de Chine au Japon au x® siécle.
Odtobre-Novembre 1924
1369
5. Cependant Claudel écrira en 1926, dans Richard Wagner: « L’enchantement du Vendredi-Saint que je n’ai pas comprtis» (Pr., p. 882). Page 649.
1. Une partie de ces notes sera utilisée dans « Bougakou » (Pr., p. 1179), avec celles auxquelles Claudel renvoie ici, voir
Pp. 545.
2. Voir p. 543. 3. Ici photographie collée de la derniéte fille de Claudel : « Renée, 7 ans, septembre 1924, Avec le chat Poilu. » 4. Le second lac est le lac Nishimoumi, le quatriéme Motosu. 5. Nom illisible.
le lac
Page 650. ‘ 1. Légende ou apologue, présenté par Claudel en conclusion de sa conférence sur « Une promenade 4 travers la littérature japonaise » (Pr., p. 1166). 2. Raymond Bantock a édité pour les étudiants japonais une anthologie de poémes en prose, A book ofpoems in prose, Burmmei, Shoiu, Tokyo, 1925. Claudel préfacera en 1929 The slumberer; voit Children of the stage an the Slumberer, two plays by Raymond Bantock, with ptefaces by E. Gordon Craig and Paul Claudel, London, The C. W. Daniel Company. 3. Musée, trésor.
Page 651. 1. Shimadzu Nariakita (1809-1858) qui contribua 4 introduire au Japon la télégraphie, la photographie, la fabrication du verre
et l’artillerie de type européen. 2. Saigo Takamori,
un
des promoteurs
de la trestauration
Meiji. 3. C’est donc l’ile de Kyushu, 4 l’ouest du Japon, que Claudel visite pendant ces quelques jouts. 4. Mme Claudel était pattie pour la France le 19 septembre. Page 652. 1. Ratute : ses idées toutes faites. 2. Surcharge : « il touche du luth ».
1370
Cahier V
Page 653.
1. Comparer avec le texte définitif, Pr., p. 27. 2. A cété de cette note, photographie collée, avec, de la main
de Claudel 3. Cf. « départ du 4. XIX, ment. »
: « Louise, 1923, S[otteville] sur M[er]. » le Cap-Moule-a-Chique » (Pr., p. 1100); souvenir du Brésil. 11 : « Et le Seigneur n’était pas dans ce tremble-
1925
Page 655. 1. « Tout entier dépensé pour notre usage. » 2. Cf. Cent phrases... (Po., p. 735) : « J'ai respiré le paysage et maintenant pout dessiner je retiens mon souffle. » 3. Voir la premiére note de l’année; sans doute s’agit-il d’un
motif de décoration des fétes du Nouvel An. 4. Traduction de Vamen liturgique. 5. Catulle,
©
XX XI, 14, éd. Budé : « Riez tous, tant que vous
étes dans ma demeute, troupe des Ris. » Déja cité p. 174. Page 656.
1. Claudel lui a dédié « la Nature et la morale» (Pr., p. 1184), écrit précisément en janvier 1925. 2. Jardin de la se€te zen 4 Kyoto. Quinze piettes y sont
disposées de telle maniere sur un rectangle de sable qu’on ne peut les voit toutes ensemble : symbole de la réalité dont on ne découvte jamais simultanément tous les aspects. Voir sa desctiption dans «la Nature et la morale»
(Pr., p. 1183) : «... dans
Penclos du vieux jardin de Ryuanji ce sobre paysage fait de quinze pierres et de sable...» 3. Le&ture
difficile.
Le nom,
non
lu, pourrait
étre Muso
Kahushi, créateur du jardin des mousses de Kokedera, 4 Kyoto. Mais la parenthése si notre lecture est juste (on pourrait lire également : temple) suggérerait qu’il s’agit d’une des peintures
de Kano Tanyt, nombreuses 4 Kyoto. 4. Cf. « Adieu Japon» (Pr., p. 1153) : « Je revois certaines cérémonies de thé, certains aprés-midi dans la boutique d’un martchand d’encens de Kyoto, ou dans celle de notre ami Kita... » Page 657.
1. Sur la liaison intrinséque de ’humour et de la foi, voir Pierre Ganne, op. cit. — Cette note est importante, surtout si on
Janvier-Février 1925
1371
la met en rapport avec l’attitude de Rodrigue 4 la fin du Soulier de Satin; \ui aussi connait
cette
délivrance
qui conduit
4 la
bouffonnerie. 2. Purgatoire, XXX, 39 : « [Et mon esprit] [...] sentit la force irrésistible de son ancien amour. » 3. «Le monde immense, gris, sans luminaite, ptrofond, dépeuple. » 4. « Familier. » 5. Miscellaneus Poems, Lycidas, v. 86 : « Le Mincio qui glisse doucement, couronné de roseaux mélodieux. » 6. V, 5-6 (Budé, p. 5). Trad. G. Lafaye : « Nous, quand une fois est morte la bréve lumiére de notte vie, il nous faut dormir une seule et méme nuit éternelle. » 7. Allusion au hétos du Livre d’esquisses de Washington Irving. Page 658.
,
1. 2. (Pr., 3.
Nom illisible. Voit sur ce sujet « Jules ou PHomme p. 847). Voir p. 548.
aux deux cravates »
Page 659.
1. Voit « Dimanche» des Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 701). 2. Ces impressions se tetrouveront dans un texte tardif, « PAsie et le démon», /e Figaro littéraire, 29 novembte 1952. 3. Ces deux noms en sutcharge. An Chaps 520. 5. Sutcharge : « d’un violet magnifique ». 6. Voir Pr., p. 826. Page 660. 1. Rature : arbres. 2, Crest le 21 février que Claudel remercie Aurousseau (voit fragment de cette lettre, Th. II, p. 1468). 3. Coupure de 14 mots. 4. Voir « le Poéte et le vase d’encens » (Pr., p. 837) :« ... tout le monde 4 Saigon vous raconte l’histoire de M. Long, de lord
Northcliffe et d’André Tudesq... » 5. Claudel évoquera cette impression dans les Vitrawx de L’ Apocalypse (O. C., t. XXVI, p. 202). 6. Voit p. 606. |
1372
Cahier V
Page 661. 1. Fils d’une des sceuts de Philippe Berthelot, qui avait épousé Charles-Viétor Langlois, professeur 4 la Sorbonne, puis directeur des Archives nationales. 2. Lire 22 et 23 février. 3. Ratute : gros. 4. Chaigne, Vie, p. 174, donne quelques détails sur les conversations de Claudel avec les deux carmélites passagéres de
l’Amazone, Méte Aimée de Marie et Sceur Jeanne de l’EnfantJésus (qu’il appelle par erreur Anne); celle-ci fondera en 1933 le Carmel de Tokyo. Page 662. 1. Nous
n’avons
pas rettouvé
le texte.
N’est-ce
pas une
confusion avec Ps. CXXXV, 9: ... ‘tellas in poteStatem nottis: « ... les étoiles pour présider a la nuit»? 2. Surcharge : « terminée par Ceylan ». 3. Cf. Partage de Midi, p. 1011 : « ... comme Lakshmi qui est bleue dans le milieu d’un prisme vert. » Page 663. 1. Cf. la lettre de Sceur Jeanne 4 Chaigne (Vie, p. 176): « Un matin de trés bonne heure [Claudel] se trouvait sur le pont ot Sceur Jeanne de l’Enfant-Jésus récitait son bréviaire. Le disque de la lune en son plein reposait sur la ligne d’horizon. [...] Pautre extrémité montait dans une buée d’ot le soleil levant. [...] Paul Claudel visiblement ému disait : “On se croirait au jour de la Création”. » — A cette page sur une feuille (non collée) avec en-téte du Tokyo-Club, l’Hymne a Apollon de Keats, copié de la main de Claudel. 2. A cdté de cette note, photographie collée de An academic skyscraper : the « cathedral of learning, University building at Pittsburg» et cette réflexion : « Un type de Vhabitacle du futur groupe humain, l’équivalent moderne de l’Hotella de "Europa. II reste 4 coiffer chacun de ces fits accolés d’une église ou d’un observatoire. Revétements en céramique, pat ex[emple] rouge et violet, bleu et vert.» Claudel fait allusion 4 ce gratte-ciel dans les Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 740 et 744). Pour « Europa» ou plutét « Oropa », voir ibid., p. 770.
Page 664.
1. En haut de la page 64, le texte est interrompu par ces lignes écrites par Seur Aimée de Marie (voir p. 661) : « Carmel de Jésus
Mars 1925 Emmanuel,
|
1373
sous la protection de N.-D. du Mont
Carmel, de
notte Ste Mére Thérése de S. Joseph. Mats 1925.» Suivent les signatures de Sceur Aimée et de Sceur Jeanne de l’Enfant-Jésus. 2. Surcharge : « la supplication ». Page 66). 1. La derniére phrase semble une addition poéstérieure. 2. « Tu
ne
m’as pas embrassé.»
Luc,
VII, 45, parole du
Christ 4 Simon. 3. Claudel reviendta a plusieurs reprises sur l’exégése de ces textes; voir en particulier dans Présence et Prophétie (O. C., t. XX, P. 244) et ici, p. 22, 306. 4. Genése, X XVII, 22: « [La voix est celle de Jacob], mais
les mains sont les mains d’Esaii. » 5. Rature : garder. 6. Cf. Odes, I (Po., p. 233) : « Toi-méme, amie, tes grands cheveux blonds dans le vent de la mer, / Tu n’as pas su les tenir bien serrés sur ta téte; ils s’effondrent! les lourds anneaux /
Roulent sur tes épaules, la grande chose joconde / S’enléve, tout part dans le clair de la lune.» Voir aussi Partage de Midi (Th. I, p. 992): « Alors un coup de vent comme une claque/ Fit sauter tous vos peignes...» et p. 1060 : « Ysé se léve et se
tient debout [...] toute blanche dans le rayon de lune. [...] Un grand coup de vent lui souléve les cheveux. » 7. « Strasbourg» dans Corona (Po., p. 438); le poeme est de 1913. Pout le rapprochement avec /e Soulier de Satin, on sait que Rodrigue est recueilli par une religieuse, carmélite elle aussi (Th. II, p. 946). Voir Seigneur, apprenez-nous a prier (O. C., t. XXIII, p. 40): « Une fois sur le pont du bateau qui me ramenait du Japon, j’ai eu de longues conversations avec une Carmélite qui tevenait elle-méme de Hué. [...] C’était une belle et longue Alsacienne qui me rappelait assez cette statue de la Synagogue que l’on voit 4 la porte de la Cathédrale de Strasbourg » (texte de 1942). 8. « Il faut que celui qui approche de Dieu croie qu’il existe et qu’il recompense ceux qui le cherchent. » Page 666. 1. Marie-Antoinette de Geuser, née au Havte le 20 avril 1889,
morte dans la méme ville mata» ses lettres et notes Sceeut Jeanne, Jusqu’aurx est épuisé. Le P. Raoul Apostolat de la Priére).
le 22 juin 1918; elle signait « Consumspitituelles. Le recueil que connaissait sommets de l’union divine, Consummata, Plus I’a réédité en 1929 (Toulouse, Il a en outte écrit une biographie de
1374
Cahier V
M.-A. de Geuser, ibid., 1928. Le mot cité ici se trouve dans ce dernier livre, p. 302; il est extrait d’une lettre du 3 février 1918 : « N’as-tu jamais rencontré de ces affiches sur lesquelles on peut lire ces mots : “expropriée pour cause d’utilité publique” ?Moi, je n’en ai jamais vu, mais j’ai entendu répéter cette expression qui m’a frappée, et je me suis sentie appelée a étre aussi “expropriée pour cette grande cause d’utilité catholique: l’établissement du régne du Christ dans les 4mes pour la plus grande gloire de Dieu”. » 2. « Mon fils, tu es toujours avec moi et tout ce qui m’appartient est a toi. » 3. Un titre et un nom illisibles. 4. Dans le Pére humilié, 1, 3 (Th. II, p. 509): « ... telle que le Printemps avec un grand ceillet comme un javelot entre les doigts. » 5. Un an plus tét, 12 janvier 1924, Claudel confiait a Gide son aitrait pour loraison de foi : « C’est le livre de Vabbé Bremond sur les Oratoriens francais, Condren et Bérulle, qui autrefois m/’avaient profondément rebuté (presque comme VImitation) qui m’a fait comprendre cette modalité essentielle de la priére. Je n’avais jamais réussi 4 méditer par la méthode de saint Ignace. Mais celle de Condren m’a tout de suite été douce et facile. Elle consiste non pas dans aucun effort de l’intelligence, ou de la mémoite, ou de imagination, mais dans un abandon complet, profond, filial, 4 cette volonté qui est au dedans de nous. Nous n’avons plus qu’a nous laisser faire et 4 écouter celui qui est notre guide, notre médecin, notre conseiller et beaucoup plus » (Gide, p. 241); cf. p. 674.
Dans les derni¢res années de sa vie, Claudel, plus réservé sut Vceuvre de Bremond, 4 qui il reprochera d’avoir exalté Fénelon aux dépens de Bossuet, reviendra paradoxalement 4 la maniére de ptier recommandeée pat saint Ignace. Cf. « José-Maria Sert et sa cathédrale» (Pr., p. 289) et Seigneur, apprenez-nous a prier (O. C., t. XXII, p. 17 et 41), ob il évoque sa convetsation avec la Sceur Jeanne. 6. Cf. « Jacques Riviére » (Po., p. 690) : « Nouvelles de Jacques Riviere, il est mort, sur le bateau ce matin comme nous quittions
PAfrique. »
Page 667. 1. Voit p. 104 et 247. 2. Jean Paulhan était alors rédateur en chef de /a Nouvelle Revue frangaise, dont Jacques Riviére avait été le direteur de 1919 a 1925.
i
Mars- April 1925
1375
3. Recueil dont la premiére édition porte la date du 25 o&tobre
1925. 4. Cf. « Jacques Riviére», qui est daté du 6 avril : « Patientez un moment. La porte ne ferme pas pour moi aussi bien que vous le croyez» (Po., p. 691). 5. Cf. « Briand» (Pr., p. 1270) : « Tout nez et tout mains [...] et le poil, on dirait sensible, d’une épaisse moustache. » 6. Isabelle Riviere, sceur d’Alain-Fournier.
Page 668.
1. Noter qu’un mois plus tard une entrevue — la derniére — auta lieu entre Gide et Claudel (voit p. 673). 2. Réflexion inspirée pat la précédente et par le dernier livre
de Jacques Riviére. Bo. Karte toy sate), 4. Voit p. 587 et, pour les noms cités, passim. « Et toi que penses-tu du Christ», daté du 2 janvier 1927 (Positions, O. C.,
it. XV, p. 246), est adressé a l’abbé Totsuka. 5 Olt Dany 23. 6. Il semble que cette idée d’une Messe terrible soit inspirée a la fois par le souvenir de la messe Terribilis (fete de la Dédicace @une église) et pat la « Messe de Feu» de saint Jean Eudes en Phonneur du Sacré-Cceur (cf. Bremond, op. cit., t. II, p. 637). Claudel cite saint Jean Eudes plus loin, p. 688. 7. « Jacques Riviere» parut dans le numéro de mai 1925 de la N.R.F. Le numéro d’hommage (avril) était déja composé lorsque Claudel est arrivé en France.
Page 669. 1. Voir p. 107, n. 5. 2. Lire Cellettes, commune le chateau
de Lutaines,
du Loir-et-Cher.
pour les vacances;
écrite les Conversations dans le Loir-et-Cher. 3. Voit Conversations dans le Loir-et-Cher Cantique de l’intelligence ».
Claudel louera
il commenceta
a y
(Pr., p. 732), « le
Page 670.
1. Sutcharge : « minces ». 2. Voir Pr., p. 712 et, pour les vitraux, p. 741. Ces notes semblent trés direftement utilisées. 3. Ici rature : qui pénétrent. 4. « Des chairs de suie sourde» et « des verts de cédre» sont en sutcharge. Deux mots en surcharge illisibles. 5. Ratute : foudre.
1376
Cahier V
Page 671.
1. Sutcharge : « dans le ciel». z. Au-dessus de « bousculade » : « tohu-bohu ». 3. Voir la reprise de ces notes dans Conversations... (Pr., Pp.709-715), et « Vitraux» (p. 326 sq.). En particulier p. 710 : « ouverture centrale de cette triple baie, la Mer de Verte dont parle l’Ecriture, ce fleuve de ténébres et d’eau, cette inondation de bleu, un horizon de déluge, la montée de l’élément théophanique. [...] C’est le bleu qui sert [...] 4 Vimmobile vocifération
de la couleur»,
commentaire
de
lallusion
au
Psaume : Eruflavit cor meum..: 4. Notes a propos des vitraux de Chartres; voit Conversations... (Pr., p. 715) : «... sa simarte de pourpre et de réglisse »; p. 710: « ... ces velOuts somptueux de gitoflée...»; p. 709 : « ... les eaux de Chartres. » 5. lls seront édités sous le titre de : A /a trace de Dieu, Gallimard, 1925, avec une préface de Claudel, reprise dans Positions, II. 6. Voir Conversations... (Pr., p. 709) : « Qui doutera que cette union de la lumiére et de la résistance, que cette qualification exquise de |’Eternité, que ce prét du verre, n’est pas accompagné par la joie, n’a qu’a entrer dans la gloire de Chartres.» Ibid., la couleur : « Comment la définir autrement que le mélange de ame avec la lumiére ?» 7. Cf. Conversations... (Pr., p. 818) : « Tout ce qui réunit n’est-il pas meilleur que ce qui sépate ?ne sommes-nous pas las de tous ces muts, de toutes ces grilles et de tous ces barrages ?... » 8. Philippe Berthelot venait d’étre réintégré; Briand alors ministre des Affaires étrangéres le nomme secrétaire général du Quai d’Orsay. 9. Un mot supprimé. 10. Cf. Conversations... (Pr., p. 696): « Qu’on me donne Aix, pat exemple, avec ses petites places, ses fontaines ombragées de trois platanes, ses types aussi dessinés que des vignettes, le poéte, la folle, le communiste, et ces grands vieillards secs de tous cétés comme des tiges d’angélique 4 moitié confites qui cherchent un bon endroit au soleil pour se faire finir. » Page 672. 1. Cinq mots supprimés. 2. Armand Lunel, ami de Milhaud; voit dans Hommage du Festival d’ Aix-en-Provence, 1962, son atticle « Mon ami Darius
Milhaud ». 3. Les premieres lignes du « Monaéstére in corde maris » ont été écrites onze ans plus tard aprés un voyage en Provence, en 1936 (voit O. C., t. XVI, p. 368). —Raissa Maritain note dans
Abvril-Mai 1925
Ea
son Journal ; «[Le Pére Charles nous] parle de Claudel qui est allé asa rencontre a Marseille, et de leur pélerinage a Saint-Maximin, ou Charles a dit la messe devant les reliques de sainte Madeleine, et a la Sainte-Baume» (Journal de Raissa, publié par Jacques Maritain, Desclée de Brouwer, 1963).
4. Eve Lavalliére est morte en juillet 1929. Son livre Ma conversion, Gallimard, « les Documents bleus», a patu en 1931 avec
une
introduction
et des commentaires
de Pet Skansen,
préface de Francis de Croisset, et un entretien avec Eve Lavalliére, pat Robert de Flers. Sur le cas de « sa fille Jean-Jean », voir p. 171-172. — Lorsqu’en 1951 Claudel écrira « Eve Lavalliére », Trois figures saintes pour le temps afluel, il se référera a cette conversation avec Hention (O. C., t. XXIV, p. 447). 5. Sans doute Philippe Berthelot (voir Gide, p. 442). — Claudel se trompe sut le sens de cet envoi : Gide, avant de partir pour le Congo, mit en vente sa bibliothéque. Partage de Midi ayant été distribué a des amis et non mis en vente, il eut la délicatesse
de ne pas le vendre. S’il y avait une intention autre dans ce geste, elle n’était pas celle que Claudel crut y voir. Ainsi s’explique Vincompréhension qui marque leur derniére rencontre (voit page suivante). 6. Voir dans Hommage du Festival d’ Aix... une photographie de Milhaud avec sa femme Madeleine en robe de mariée et cette légende : « Mariage a la Synagogue d’ Aix, 1925, ot Poulenc et Claudel en gibbus [s/c] se découvrant sans cesse étaient sommés rituellement de se couvrit derechef. » Page 673. 1. Voir la note 3.
2. Cf. Conversations... (p. 694) : « Si vous avez passé quelques heures 4 Aix ou 4 Nimes ou 4 Avignon, vous avez du remarquer qwil y a toujours un endroit [...] que nous pouttions appeler le Forum ou l’Agora, ot toute la ville se donne rendez-vous a la fraiche. C’est l’heure [...] de fournir notre ingrédient obligatoite 4 la petite salade qui se retourne 1a tous les soits... » 3. Ibid. (p. 696) : « [Le Frangais] est fait de vingt races, langues et tribus différentes, entre lesquelles accord et Punité nécessaires ne pouvaient s’établir que sur le tertain juridique et diplomatique, c’est-a-dire de V’égalité, de la discussion, du traité et du comptomis, chaque individu naissant et se développant sous empire dun
contrat
social,
d’une
chatte
continuelle
avec
tous
ses
semblables...» Idée déja développée en 1923, dans « Un coup ceil sur ame japonaise» (p. 1121) : « Chaque Frangais [...] héritier de vingt races hétérogénes, a toujours constitué a lui seul une petite souveraineté en voie de tractations continuelles,
1378
Cahier V
diplomatique et juridique, avec les souverainetés voisines... », et dans « Discours sur les Lettres frangaises » (Pr., p. 660). 4. Marie, fille de Gabriel Perrin, avocat 4 Lyon (1837-1914), cousine germaine de Mme Claudel. 5. Claudel est généralement plus sévére encore a VPégard de Stendhal; voir en particulier, outre les textes publiés dans Pr., « le Drame de Brangues » (O. C., t. XXIII, p. 63-64). 6. Claudel a raturé puis récrit : « que son anxiété religieuse est finie ». Page 674.
1. Voit dans Gide, p. 242, la note écrite par Claudel aprés Penttevue en termes presque identiques 4 ceux du Journal et ibid., p. 243, Vextrait du Journal de Gide auquel Claudel fait allusion ici. — Depuis « G[ide] parle de cette entrevue... » est une addition postérieure, le renvoi est fait 4 la page 79 de ce cahier;
dans cette édition, p. 680. 2. Conférence
faite
a Vexposition
du livre, le 25 mai, et
publiée sous le titre « la Philosophie du livre» (voir Pr., p. 68). Claudel note, ibid., qu’au moment ov il disait : « Il n’y a rien d@’aussi bleu que Florence», « une pluie formidable se déchaina sut le toit de verre de la salle ot [il] faisaift] [sa] conférence ». 3. Elle venait d’étre canonisée. 4. Voit p. 344. 5. Diplomate, traduGteur de Kierkegaard, il a entretenu avec Claudel une correspondance trés importante. On lui doit la « Bibliographie claudélienne » publiée en 1931 et 1932 dans les Documents de la vie intellecuelle. 1 est mort en déportation. Claudel a écrit un poéme « Paul Petit » (Po., p. 888), qui servit de préface a un ouvrage posthume, Résistance spirituelle, publié en 1947. 6. Voir dans Pr., p. 1487, une lettre de Claudel 4 Max Jacob, un des rares témoignages connus sut leurs relations. Page 675.
1. « La hauteur du jour me donnera de la crainte. » 2. Voit p. 669. Claudel va y passer été 1925. — Claudel a d’abord écrit puis raturé : 1°" mai. 3. La référence aux Psaumes et la citation semblent inexates. Le texte le plus proche est dans Eccli., XX XIX, 9 : Et ipse tanquam imbres mittet eloquia...: « Et alors il répandra comme la pluie les paroles... » 4. Liv. I, cap. m1, n° 4 (P. L., t. XLII, col. 129) : « Lorsqu’ils ont quelque expérience, ce qui était fermé s’ouvre, ce qui était caché est connu. »
Maz- Juin 1925
1379
5. Rature : en ne mettant pas.
6. Surcharge : « avec Massignon ». Te (Gites je KOFI Page 676.
1. Gloated: dévorant des yeux. 2. Nom illisible. 3. Rature : de. Page 677. 1. Surcharge : « en auto avec Henti».
2. Voit dans Conversations... (Pr., p. 709 sq.). 3. Voir dans la collection « les Cahiers du théatre chrétien, Répertoire des compagnons de Notre-Dame», les ceuvres de Henri Brochet (Paris, Blot); quelques-unes ont été publiées par Enault, Paris. ' 4, Voir Cent phrases... (Po., p. 725) : « Le ruisseau devant et derriére moi je cause 4 la fois avec tous les moments de ma vie. » 5. En surcharge : « ascenseuts ». Page 678.
1. Surcharge : « superposées ». 2. Orthographe, sinon voulue, au moins influencée par les propos des Conversations... (Pr., p. 718) : « Ver est une moitié de vérité... » 3. Ces notes sur les chateaux seront reprises dans Conversations... (Pr., p. 738), allusion a Amboise, 4 Cheverny, a Blois, a Chambord... L’image : « ... la floraison au-dessus [des tours]
comme de longs lys et thyrses divers d’un tas de cheminées et de fumées fumantes.»
Voir aussi « Jules ou l’Homme-aux-deux-
cravates» (Pr., 854) : «la terrasse sur la riviére, Chambord... » 4. Sans doute « Une promenade 4 travers la littérature japonaise » (voit plus loin, p. 679, n. 1). 5. Nommée ici — et peut-étre rencontrée — pour la premiere
fois, Marthe Bibesco seta une grande amie de Claudel. Fille de Jean Lahovary, ministre de Roumanie en France, elle est née en Roumanie, mais fut élevée en France dés sa sixiéme année. Voir dans son livre Fewilles de calendrier, Plon, 1939, le chapitre « A la pointe de Vile Saint-Louis, En marge d’un livre
de Paul Claudel», et, dans /a Revue de Paris, septembre son article, « Mes promenades avec Claudel».
1961,
1380
Cahier V
Page 679.
1. Nom illisible. 2. Voit Pr., p. 1118; le texte prononcé était légerement différent dans son introduétion et sa conclusion; le texte publié est celui dit 4 Lyon (voir p. 696). Cf. Pr., p. 1547. 3. Le texte de ce discours, « Remerciements 4 l’Espagne», a paru dans /es Nouvelles littéraires, le 25 juillet 1925. Page 680.
1. Cf. Jammes, p. 307 : « Ma grande émotion a été la journée que j’ai passée a Avila » (18 juillet 1925). Voir aussi dans Chaigne, Vie, p. 183, n. 140, ces mots d’une lettre a Massignon (11 juillet) : « De beaucoup ce qui m’a le plus impressionné est Avila, ot j’ai passé une bien bonne et bien belle heure dans cette fournaise d’or
quest l’Oratoire de la Sainte, avec qui je me sens un lien profond. » 2. Claudel résume le texte de Matthieu : « Bienheureux ceux qui entendent la parole de Dieu et qui la regoivent. » — L’autre texte est extrait de Luc, XIX :« Zachée, dépéche-toi de descendre,
car C'est dans ta maison que je dois loger aujourd’hui » (rétablir in domo tua au lieu de secum).
3. Voir p. 673. 4. Philippe et Héléene Berthelot, Alexis Léger, Mélanie
de
Vilmorin, mére de la romanciére Louise de Vilmorin.
Page 681.
1. Cette parenthése est entre deux lignes; elle pourrait étre placée aussi bien aprés « rouge». 2. Pour compléter la note de Claudel, voir André Billy, Max Jacob, « Poétes daujoutd’hui», 3, Seghers, 1946. Max Jacob trevenait de la Bibliothéque nationale; sa chambre était tue Ravignan, c’était le 7 octobre 1909 (p. 18); la « vision» du cinéma eut lieu le 17 décembre 1914; le film était /a Bande des habits noirs; les quatre (et non deux) enfants de la concierge
(p. 25).
3. Idée exprimée fréquemment par Claudel; voir dans un des derniers textes qu’il ait écrits, « ’Enthousiasme» (Pr., p. 1393): « Disons plutét que c’est ’avenir qui aspire les événe-
ments...» 4. Ces réflexions préparent Prakriti».
lointainement
«la Légende
de
Page 682. 1. Claudel a lu ce texte dans Commerce, n° 4, ptintemps 1925; au sommaire de cette livraison, « le Vieillard sur le mont Omi»
Juillet- Aont 1925
1381
et des « Fragments myStiques» de Maitre Eckart, traduits par Bernard Greethuysen. Le texte cité est a la page 169; rétablir : « comme du vin, du pain, de la viande... » 2. Coupure de huit mots; note a caraétére familial. 3. Les Huit Paradis, Grasset, 1925, p. 169. Page 683. 1. Deux mots supprimés. 2. Claudel fait allusion a plusieurs reprises a cette priére; voit Conversations... (Pr., p. 789), pat exemple, ou « l’Europe » (Pr., p. 1378): «... VAsie s’absorbe, 4 demi endormie, dans Vexhalation de la syllabe : Aum...» 3. Edwar-Morgan Forster, né en 1879. A passage to India parut en 1924; consulter L. Trilling, E. M. Forster, Londres, 1944. Trad. : « Il n’y a pas de Dieu; Dieu ne nous entraine pas dans les complexités de la matiére et de Vesprit; en réalité, ce n’eSt qu’un jeu de mots, un calembout religieux, non une vérité religieuse. » ' 4. Zohar: le Livre de la splendeur ; ouvtage de mystique juive, base de l’enseignement cabalistique. Voir p. 969. 5. Cant., VIII, 12: « Ma vigne est devant moi.» — Genése,
XV, 1: « Je serai [...] votre récompense infiniment grande. » 6. Nom inventé, comme le village dont il est question dans
Conversations... (Pr., p. 701) : « Ceux qui prétendent que la France est un pays allegre et joyeux, ils n’ont qu’a écouter les cloches sonnet vépres sur nos villages comme la-bas Clénor tout a Vheute. »
Page 684. 1. Genése,
Il, 15 : « Le Seigneur Dieu prit ’homme
et le
mit dans le Paradis de délices, afin qu’il le cultivat et le gardat. » — Tout le « Samedi» des Conversations... seta consacré au développement de cette idée (voir Pr., p. 776 sq.). 2. Voit Pr., « José Maria Sert et sa cathédrale», p. 288; ibid., «Sur la mort d’un ami», p. 295. — Le premier de ces textes, présentation des peintures alots exposées 4 Paris, fut publié dans /e Figaro, le 21 mai 1928; ila été écrit au Japon en 1926. 3. Ps. CXI, 3 :« La gloite et les richesses sont dans sa maison. » —2:«La poéstérité des justes sera bénie.» — Ps. I, 3 : « Tout ce qu’il fera réussira.» Le psaume III est chanté a vépres, le psaume I a matines le dimanche. 4. Antoine et Elisabeth Sainte-Marie-Pertin.
5. On tretrouve cette idée, a propos du méme tableau, « Vénus,
1382
Cahier V
amour et la musique», dans « le Poéte et le shamisen » (Pr., p. 825): « Cest l’esprit attentif a la chair... »; dans « la Peinture espagnole» (Pr., p. 213) : « Ce poéte [le Titien], d'une volupté ou lesprit fait entendre 4 la chair l’appel de la béatitude. » Méme idée encore dans /e Cantique des Cantiques (O. C., t. XXII, Pp. 253-254). — Rappelons que «l’Amour sacré et l’amout profane», autre tableau célébre du Titien, se trouve 4 la galerie Borghése, 4 Rome, ce qui explique la fin de la note. Page 685.
1. Voit dans Chaigne, V7e, p. 177, la lettre de Sceur Jeanne racontant la rencontre de Cholet. 2. La Rangeardiéte, propriété de la famille Bazin. Rappelons qu’Elisabeth Sainte-Marie-Perrin était la fille de René Bazin. Voit « Discours 4 Académie frangaise » (Pr., p. 647) : «... René Bazin [...] qui refusa toujours d’étre froissé par le sauvage qui était entré dans sa famille... » 3. Rature : sep¢[embre]. 4. Adaptation du Psaume LXIV, 5-6 : Sanétum eft templum suum, mirabile in aequitate : « Votre temple est saint, il est admirable en équité. » 5. « Les portes fermées», Jean, XX, 26. Page 686.
1. Voit Cah. Cl. VI, p. 126; répondant a une lettre perdue de Copeau, Claudel écrit : « Je ne puis vous dite combien la maniére d’agir de cet ecclésiastique trop délicat m’a mortifié et consterné. » — Claudel, qui avait rompu avec Copeau en 1921 (voit p. 502), a tepris des relations avec lui, peu aprés la mort de Jacques Riviére (voir ibid., p. 114). 2. La lettre de Claudel 4 Madeleine Gide lui offrant de la rencontter et la réponse de celle-ci ont été publiées dans Gide,
D- 243-244.
3. Copeau vient en effet d’abandonner le Vieux-Colombier; il s’est installé au chateau de Morteuil.
Page 687. s 1. Voit Frangois Varillon, « Repéres pour l’étude du sym-
bolisme de la porte dans l’ceuvre de Paul Claudel», Cah. C/. I, p. 185-220 (voir p. 685, n. 5). 2. « Jésus se taisait», Matth., X XVI, 63. — Ps. XXXVII, 15 : « Je suis devenu comme un homme qui n’entend pas et
qui n’a pas de tépliques dans la bouche. »
Aut-Septembre 1925
1383
3. Complément 4 une note précédente datée du 31 aout; dans le cahier original celle-ci se trouve au verso de la précédente. « I] m’explique...» y renvoie. 4. Vindication « Madame B.» inciterait 4 penser qu’il ne s’agit pas ici des Berthelot; Claudel noterait plutdt « Héléne ». Ce pourrait étre Mme Bazin (voir p. 685). 5. « Parce que mon cceur s’est enflammé, et que mes reins ont été altérés, j’ai été réduit au néant et plongé dans l’ignorance. » Texte fréquemment cité dans la Montée du Carmel et la Nuit obscure; voit pat exemple Montée du Carmel, Il, vu, 11. Page 688.
1. L’expression Fornax Amoris vient de saint Bernardin de Sienne. Fornacem ardentissimae caritatis...: « Foutnaise d’atdent amout...» (Sermo sr4: « De Passione Domini»). Cf. saint Jean Eudes, CEuvres completes, Vannes, 1908, t. VIII, p. 208. Le texte
cité est Poraison jaculatoite qui termine la méditation « pour le jour de l’oéctave de la féte du trés Saint Coeur de la bienheureuse Vierge », ibid., 142. — Claudel a aimé les hymnes de saint Jean
Eudes, comme il a aimé celles de Nottker et d’Adam de SaintVictor;
sans
doute
les a-t-il connues
par Bremond
(op. cit.,
t. Ill, p. 634 sq.), lequel d’ailleurs ne cite pas linvocation televée ici. Trad. : « Coeur de Jésus et de Marie, fournaise d’amour, que mon cceurt en toi se plonge pour léternité. » 2. Commune d’Avrillé. 3. Beau-frére et sceur de Philippe Berthelot (voir p. 661). 4. Claudel développera cette idée dans «la Légende de Praktiti» (voir Pr., p. 944 sq.). 5. Ps. LX XVI, 6:« J’avais dans l’esprit les années éternelles. » Page 689.
|
| | i
1. Rature : /a. 2. Victoire Brunet, cf. Mémoires, p. 11 : « Notte vieille bonne Victoire Brunet, la fille du garde-chasse du duc de Coigny...», et dans « Mon Pays » (Pr., 1006) : « ... notte vieille bonne Victoire, qui, tout en gardant sa vache et en nous ouvrant des noix fraiches avec sa faucille, dans un langage plein de mots locaux savoureux, nous tacontait des histoires du vieux temps... » 3. Surcharge : « des bruyéres ». 4. Cf. « Mon Pays» (Pr., p. 1006-1007), ot Villeneuve est évoqué de la méme maniére, par ses quatre horizons. 5. Jacques de Massary, neveu de Claudel, et sa femme Cécile, fille d’Etienne Moreau-Nélaton. 6. Adaptation d’Isaie, LXV, 2: ... in populum incredulum; CLAUDEL
V - 47
47
1384
Cahier V
les deux detniers mots résument les versets suivants : « J’ai étendu mes mains tout le jour vers un peuple incrédule et qui contredit. » Page 690.
1. Frére de Ferdinand de Massary; on se rappelle que celui-ci avait épousé Louise Claudel. E. de Massary avait a peu prés Page de Claudel, ce qui explique la suite de la note. 2. Paris, Lemercier,
1925,
p. 183. —
Matth.,
XXVI,
25;
Marc, XIV, 63. — Claudel a omis « d’un seul coup» aprés « ainsi ». — Cet ouvtage posthume de Léon Bloy venait d’étre publié pour la premiére fois. 3. Note inspirée par Léon Bloy, /e Symbolisme de l’apparition, chap. VII-X1I. Page 691.
1. Claudel a sans doute lu ce texte dans /a Vie et Ja dottrine spirituelle du Pére Louis Lallemant, texte primitif révisé et annoté par le P. Aloys Pottier, Téqui, 1924, p. 300 : 5® principe de la Doétrine spirituelle, chap. 1, art. 3, § 2. 2. « Il mourut papiste. » 3. Hostel, rappelons-le, est sur la commune de Belmont. Page 692.
1. Les Sept douleurs de la Vierge sont fétées par la liturgie le 15 septembre; l’Invention de la croix, le 14. 2. Note inspirée par la leture de P.-L. Couchoud, /e Mystere de Jésus, Paris, 1924. 3. « Crise de 1.» est une addition postérieure. Page 693.
1. Conférence sur soi-méme et son ceuvre; un fragment en a partu dans Herbert Dickmann, Die KinStanschauung Paul Claudel, Bonn, 1931.
2, Ambassadeur de France 4 Londtes. 3. Op. cit. (p. 691), 7® principe, chap. 1, att. 2, § 4, p. gor: « La chose qui nous aura le plus frappé l’esprit hors de l’oraison ne manqueta pas de nous tevenir 4 l’oraison plutdt que dans nos auttes actions. » 4. Sutcharge : « des pauvtes ». 5. Lu dans le P. Lallemant, op. cit., p. 431 : « Les blessutes d’amour, la captivité d’amour, les langueurs d’amour, les
Septembre-Novembre 1925
1385
défaillances d’amour. » Voit Richard de Saint-ViGtor, De quatuor gradibus violentae caritatis, sermon repris plus tard en traité, analysé par Gervais Dumeige, Richard de Saint-Vittor et 1’idée chrétienne de l’amour, P.U.F., 1952. 6. Surcharge : « petites». 7. « L’infidélité. » Page 694. 1. Dom
Fernand
Cabrol,
abbé
de Saint-Michel
de Farn-
__ borough, auteur du Diéfionnaire d’archéologie chrétienne et de liturgie, Letouzey, 15 vol., 1907-1953; du Livre de la priére antique, Oudin, 1900; de /a Priére des premiers chrétiens, Grasset, 1929, etc. 2. Voit « Jules» (Pr., p. 847) : «... comme un cornet de dictaphone qui me permet de communiquer commodément avec les silos de votre cavité intérieure... » Page 695. 1. Briand ou plus vraisemblablement Berthelot. 2. «La cellule qu’on quitte peu devient douce», Imitation de Jésus-Chrif, liv. 1, chap. xxi, 5, trad. Lamennais. — L’inter-
prétation que donne Claudel rappelle la V® Ode, « la Maison fermée». 3. Définition et exemples de Littré. 4. Jacques de Massaty. 5. Mélanie de Vilmorin (voir p. 680). 6. Cf. Conversations... (Pr., p. 714) : « Et en dedans au-dessous a Vintérieur de nous ces chapelles ou de tout petits chrétiens sont prosternés devant la Vierge Noire et ot ce gros prétre en sutplis pareil 4 un vieux cheval pensif, penché paternellement, écoute un enfant du catéchisme qui se confesse... » 7. Sut Pabbé Mugnier, voir p. 303. 8. Nom supprimé. 9. Cf. Conversations... (Pr., p. 715) : «... la jucondité de cette friandise acide et jaillissante qui régénére nos papilles gustatives »; p. 716: «... savoutet un certain bleu sombre entre le nez et la racine de la langue comme on fait dun vin de Mercurey...»; p.718:«... [Le vert] Qui par les yeux fait appel a notre estomac. » Page 696.
1. Déja faite en Espagne (voir p. 679). 2. Dominicain, né 4 Caen en 1887, aumdnier des Btudiants
catholiques du cercle Saint-Bernard de Dijon de 1926 a 1932, mort le 13 février 1936.
1386
Cahier V
3. Cantique, I, 4 : « Il m’a introduite dans le cellier 4 vin. » Les autres notes sont inspirées par ce texte. 4. Coupure de quinze mots, a caraétére familial.
5. «... quant 4 celles qu’ils connaissent naturellement, comme les bétes brutes, ils s’y corrompent. » Page 697.
1. Voit p. 289. 2. Avocat et homme politique belge, trés lié avec les milieux littéraires frangais. 3. Ectivain, auteur de plusieurs études sur Claudel, mort en 1964.
wr Claudel citera ce tableau dans son
« Hommage a Anvers »
(Pr., p. 1224): «Il y a surtout un tableau qu’on appelle, je crois, le Christ a la paille, et dont je n’ai jamais cessé de me souvenir
avec amout et prédilection. » I] est de Rubens, et non de Snyders comme pourrait le laisser penser la note; Claudel cite Snyders (bid., p. 1223) et dans « la Peinture hollandaise » (sbid., p. 200),
et trés souvent Jordaens (voir Pr., index). 5. Sur Adrienne Monnier, voir p. 439. 6. Claudel lui proposera d’écrire la partition de « la Parabole du feStin», programme pour un oratorio, qui parait dans la Revue des Jeunes, le 25 janvier 1926. Cf. Cah. Cl. III, p. 109. 7. Née en 1894, Marie-Adélaide de Luxembourg succéda a son pére en 1912; en 1918, elle fut contrainte d’abdiquer en raison de son attitude germanophile durant la guerre; elle entra au couvent sous le nom de « Sceur Marie des Pauvres». Elle
mourut au chateau de Hohenbourg le 24 janvier 1924. 8. Cf. « la Catastrophe d’Igitur» (Pr., p. 509): « Je pourtais aussi comparet Igi/ur au talon qui reste d’un livre de chéques, quand toutes les feuilles, dtiiment enrichies de chiffres et de noms, ont été portées a la banque» (texte d’avril 1926). Igitur a patu fin 1925, Claudel le lit donc aussitét.
9. Cf. p. 657 : Claudel a écrit « Fin du Japon»; il espérait donc obtenit immédiatement un autte poste. Page 698.
1. Garcia Calderon, direéteur des éditions Excelsior, qui vont publier /’Ozseau noir dans le soleil levant. 2. Professeur de théologie 4 Université catholique de Fribourg, directeur de la revue Nova et Vetera. 3. Cette conférence est sans doute identique a celle prononcée en Angleterre (voir p. 693). 4. Pléiade, p. 269, 7 mars 1895 : « Chez Pottecher, 4 Bellevue,
Claudel nous lit sa traduction littérale de ’ Agamemnon d’Eschyle.
Décembre 1925
1387
Il s’est @abord fait prier assez modestement, puis il commence de sa voix de machine a parler, et ses lévres s’ouvrent comme
des éclairs de chaleur. Sa téte est d’un ton cendré. Il a Pair d@avoir brule. [...] Je lui dis qwil se grise d'images, et qu’il ne faut pas confondre l’image vaguement belle avec l’image exacte bien supérieure. » — Voir p. 342 la lettre de Claudel relative a Jules Renard. Page 699. t. Maurice
Sachs venait de se convertir,
i] allait entrer au
séminaire le 2 janvier 1926, pour en sortit six mois plus tard (voir /e Sabbat, Cortéa, 1946, chap. x11 et xtv). Claudel commet une erreur, c’est Cocteau qui a converti Sachs. — Dans /e Sabbat, p-. 157, Sachs note en effet avoir rencontré Claudel chez Jacques et Raissa Maritain. 2. On retrouveta ce theme dans Pr., p. 292 : « José-Maria Sert et sa cathédrale. »
, 3. La premiéte édition du Soulier de Satin, a tirage restreint, 4 vol. in-8°, N.R.F., 1929, comporte en effet une vignette sut la couverture et une lithographie par volume, composées par Sert. — L’ceuvte, rappelons-le, est dédiée au peintre. — Missia, femme de José-Maria Sertt.
Page 700. 1. Voir cette idée reprise dans « le Drame et la musique » (Pr., p. 150, par exemple); on la trouve fréquemment, sous des expressions diverses, dans la correspondance de Claudel avec Milhaud, dés 1913; voir Cah. C/. IL, passim. 2. « Leurs filles sont parées et ornées a la maniére d’un temple. » 3. Idée essentielle, longuement développée dans |’Apocalypse de Waroquier (O. C., t. X XV). 4. Ouvrage de Jacques Riviére, préfacé par Claudel (voir
p. 675).
5. Mlle A. de Widerhorn devint quelques années plus tard la Sceur Agnés du Sarment. Dans son livre Lettres inédites de mon parrain Paul Claudel, Gabalda, elle reproduit la lettre dont parle ici Claudel et qui fut le début de leur amitié : « Votre Correspondance avec Jacques Riviere, publi¢ée cet été dans /a Nouvelle Revue francaise, atriva 4 point au moment ou, sérieusement ébranlée dans mon infidélité, je manquais de directives pour me convertir définitivement, et od ce fameux respect humain m’empéchait de venir demander asile et conseil a l’Eglise. Est-ce que vraiment ce furent vos arguments en face des doutes intellec-
1388
Cahier V
tuels de Riviere qui eurent sur moi le plus d’effet? Je donne a votre influence une portée, mieux, une source plus profonde, plus réelle, de 14 plus décisive: le seul fait que vous étes profondément chrétien, que le christianisme soit la substance méme de votre vie et qu’il est vrai que ce n’est pas l’assentiment de notre gout que vous désirez, mais notre ame afin de la donner 4 Dieu. » — Agnés du Sarment est l’auteur d’un Claudel et la Liturgie, Desclée de Brouwer, 1945, et de l’anthologie claudélienne publiée sous le titre Je crois en Dieu, Gallimard,
1961, avec une
ptéface du R. P. Henri de Lubac, S. J. Page 7ot. 1. Voir cette lettre et la réponse de Claudel, dans Swareés, p. 183-184.
2. Coupure de trois mots, 4 caraétére familial. 1926
Page 702. 1. Histoire d’une dme, Carmel de Lisieux, 1898, chap. v, p. 74.
2. Paul Souday, critique littéraire du Temps, n’aimait pas Claudel et le disait avec quelque brutalité; en 1925 il avait parlé deux fois de Claudel, le 14 mai et le 24 décembre. — Nous n’avons pu identifier les « vers» que cite ici Claudel, mais ils sont certainement de J. de Strada (1821-1902), poéte et philosophe frangais 3. Voir p. 610. 4. Surcharge : « sur son lit». 5. Joseph Delteil venait de publier des fragments de sa Jeanne d’ Arc dans la Revue hebdomadaire (1925, Il, p. 209-218). Né en 1894, il avait publié en 1923 son premier livre. 62 Olt ps5 52: Page 703. 1. Edouard p. 98. Claudel a voit un rappel Prouhéze remet 2. Les
Herriot, Dans /a forét normande, Hachette, 1925, souligné « Pune de ses chaussutes », patce qu’il y inattendu de la scéne du Soulier de Satin, ou a la Vierge son soulier.
Soirées de Saint-Pétersbourg,
10o® enttetien,
t. V
des
CEwores completes, Lyon, Vitte, 1892, p. 179. Le texte eét : « Si vous considérez que tout a été fait par et pour Vintelligence;
que tout mouvement est un effet, de maniére que la cause proptement dite d’un mouvement ne peut étre un mouvement; que ces
Janvier-Février 1926
1389
mots de cause et de matiére s’excluent mutuellement comme ceux de cercle et de triangle, et que tout se rapporte dans ce monde que | mous voyons a un autre monde que nous ne voyons pas, vous sentirez que nous vivons en effet au milieu d’un systeéme de choses invisibles manifestées visiblement. » 3. Theme important de la derniére Conversation dans le Loir-etCher. Page 704. 1. Surcharge :« en hurlant ». 2. Lu dans Edouard Herriot, op. cit., p. 253 : « Si ’'un de ses propos de jeunesse [de Charlotte Corday] doit étre retenu, c’est
la phrase qu’elle prononce au cours d’un diner de famille ot elle refuse de s’associer 4 la santé de Louis XVI : “Un Roi faible ne peut étre bon’”’. » 3. L’article de René Guénon, « le Sacré-Cceur et la légende du Saint-Graal», paru dans Regnabit en 1925, a été publié dans Apergus sur I’ésotérisme chrétien, les Editions traditionnelles,
Paris, 1954. Sur Janus et les pottes solsticiales, voir/’Essotérisme de Dante, Paris, Bosse, 1925, p. 24, et /e Roi du Monde, ParisGrenoble, Didier et Richard, 1930, p. 29.
Page 70}.
1. « Elle semblait étre a la fois le poursuivant et le pourSuivi. » 2. C£. le Soulier de Satin, Ul, 14 (Th. I, p. 778): « La Lune. [...] L’heure de la Mer de Lait est 4 nous; si l’on me voit si blanche, c’est patce que c’est moi Minuit, le Lac de Lait, les Eaux. » 3. Actes, IX, 15, en réalité coram gentibus et regibus: « devant les nations, et devant les rois... » 4. Protée, Ue version (Th. II, p. 415) : «... ces anges touffus
qui prennent le nom de pieuvres dés qu’un ceil humain les apetcoit. [...] L’une d’elles L..] setre amoureusement entre ses tentacules un piano mécanique...» — Claudel compose cette seconde version de Protée pendant ce voyage; elle est datée « Janvier-février 1926». Page 706. 1. Saint
Brandan,
fundator
et abbas
Cluainfertensis,
Irlande,
vie siécle. — Les Bollandistes rejettent comme fabulosa Vhistoire a laquelle Claudel fait ici allusion. Cf. « Projet dune église souterraine a Chicago » (O. C., t. XV, p. 299) et Christophe Colomb, Ire partie, 1 (TA. I, p. 1140): «... le poisson Jasconius sur lequel saint Brandan a construit une cathédrale. »
1390 2.
» Cahier V Timée, 37 d.
3. « Qui donc nous séparera de l’amour du Christ? [...] Car je suis certain que nila mort, ni la vie, ni les anges, ni les principautés, ni les puissances, ni les choses présentes, ni les choses a venir, ni la violence, ni ce qu’il y a de plus élevé, ni ce qu'il y a de plus ptofond, ni aucune autre créature, ne poutra nous sépater de l’amour de Dieu, manifesté dans le Christ NotreSeigneur Jésus. » Page 707.
1. Sutcharge : « un géant borgne ». 2. Lu dans /’Année liturgique, pat dom Guéranger, abbé de Solesmes, Oudin, 1880, t. I], p. 582 : « Saint Anselme, dans ses Enatrations sur saint Luc [...] nous dit qu’il y a trois choses a considérer dans le cierge : la cire, la méche et la flamme. La cire,
ouvtage de l’abeille virginale, est la chair du Christ; la méche, qui est intérieure, est Ame; la flamme, qui brille en la pattie supérieure, est la divinité. » Voir P. L., t. CLVIII, col. 627 B. 3. XL, 17: « Les ombres couvrent son ombre» (il s’agit de Béhémoth). 4. In Heptateuchum, lib. I, q. 6 (P. L., t. XXXIV, col. 549). 5. Il Cor., x1, 9 : « La force s’accomplit dans la faiblesse. » Ce texte n’est pas extrait de l’épitre de la Sexagésime. 6. Reine, ou Gigette, fille cadette de Claudel, qui voyage avec lui. 7. Pour Aurousseau, voit p. 548 et 658-659. 8. Voir p. 659. Page 708.
1. Surcharges : « Les locataires et l’ascenseur» et « au pied, comme un concierge ». 2. Claudel a da rencontrer Pierre Benoit au Gouvernement général de Saigon. Celui-ci écrit dans ?Avant-Propos au Roi lépreux (Albin Michel, 1927) : « Il y a, 4 Saigon, dans le pare du Gouvernement général, une villa réservée aux hétes de marque du Gouverneur...» — Claudel rappellera burlesquement cette rencontte, dans « Méditation sur une paire de chaussures»; il écrit en évoquant ses visites académiques de 1935 :« Et le sixiéme [académicien] me tappelle que nous nous sommes tencontrés a Saigon autrefois, o1 non point quelque femme du monde, mais l’orang-outan familier lui-méme de M. le Gouverneur nous servit, parait-il, de truchement. »
Février 1926
1391
3. Claudel a d’abord écrit :
Délivré des cing sens Sans oreille et sans yeux, sans forme et sans habit L’esprit veille...
puis : Sans oreille et sans main... 4. 1Cotr., xm, 1 : «
Quand je parlerais les langues des hommes
et des Anges...» 5. Cf. office de la Quinquagésime,
3° nocturne,
Homilia
II
in Evangelia: « Nous ignorons qui était cet aveugle, mais nous savons ce qu'il signifie mystérieusement. Car l’aveugle est le genre humain...» (P. L., t. LX XVI, col. 1082 C). Cf. Moralia, WITS 3.0, 40) (Be Ly ta XeXV,
col, .83 210):
6. Suit entre parenthéses un mot illisible. 7. Ibid., XX, 21. Claudel cite ce texte dans « Jules ou ’Hommeaux-deux-cravates) (Pr., p. 861), et dans « Du sens figutré de PEcriture » (O. C., t. XXI, p. 90), en traduisant : « tandis qu’elle énatre un texte elle traduit un mystéte ». Sur cette idée de la polysémie scripturaire, 4 laquelle Claudel 's’attachera de plus en plus et qu’il illustrera par ses commentaites, voit de nombreux textes de saint Grégoire dans Henri de Lubac, Exxégése médiévale.
Les quatre sens de 1 ’Ficriture, Aubier,
1959,
spécialement p. 185-189, 415 et 532 : « [il faut que le récit de Esprit Saint] per intellectum nobis spiritualem fulgeat, et tamen sensus a fide historiae non recedat: « ptenne pout notte intelligence
un sens spitituel, sans que soit perdue la fidélité a histoire ». Voir aussi les titres élogieux que les exégétes médiévaux ont décernés a saint Grégoite (ébid., chap. vi, § V, p. 537-548). Saint Grégoire fut un des maitres de Claudel. Contrairement a ce que cettains ont cru légérement devoir affirmer, il est certain qu’ilalu les Moralia et les Homélies sur Exéchiel auttement que dans les brefs extraits du Bréviaire. Page 709.
1. Vetset 23; rétablit : Jala super Dominum
curam
tuam...:
« Jette ton souci sut le Seigneur et lui-méme il te nourtrira. » 2. Sutcharge : « comme le sang menstruel ». 3. Cf. «le Drame et la musique» (Pr., p. 150) : « Elle crée [la musique] quand il le faut derritre le drame une espéce de tapissetie sonote...» Il s’agit du théatre japonais. 4. « Une passion... désespoit», addition postérieure. Encte différente. — Cette note est trés diretement en rapport avec Hong-Kong, poéme écrit en juin 1927, donc un an et demi plus tard, pour servit de préface 4 une réédition de Connaissance de /’ Et (voir Po., p. 23) :« Et Lamock tourne toujours dans lanuit.
1392
Cahier V
[...] /Il y a soixante milles d’Ocksen a Chapel Island, [...] Le triple éclat de Dodd’s Island nous livre un long regard de Turnabout / Et [...] / J’2i vu de nouveau, avec un serrement de cceur, 4 ma gauche un moment apparaitre le feu des Chiens. » La fin du poéme évoque Fou-tchéou... 5. « Parti a Vouest. » 6. « En secret. » Page 710.
1. Evangile du ret dimanche de Caréme, qui en 1926 était été écrite le 20 février. du milieu de toi, si tu cesses
le 21 février. Cette note a donc 2. « Si tu éloignes la chaine d’étendre le doigt [...] ta lumiére ténébres seront comme le midi.
se lévera dans les ténébres et tes [...] Et [le Seigneur] délivrera tes os. [...] Les déserts séculaires seront rebatis par toi, tu reléveras les fondements des générations anciennes. [...] Si tu éloignes ton pied du sabbat pour ne pas faire ta volonté en mon saint jour; si tu appelles le sabbat tes délices [...] si tu Phonores en ne faisant pas ta volonté et en ne disant pas de paroles vaines, alors tu te réjouiras dans le Seigneur, je t’éléverai au-dessus des hauteuts de la terre, et je te donnerai pour nourriture l’héritage de Jacob ton pére. » Les derniers mots sont tepris de 12 : « Tu seras appelé le réparateur des haies et celui qui rétablit les chemins et les rend sars. »
3. Cette date indique la composition
du poéme
« Hang-
Tchéou » inséré dans /’Oiseau noir (voit Pr., p. 1185).
Page 711.
1. Surcharge : « de distractions ». 2. Epistle to Dr. Arbuthuot, 305-306 : Let Sporus tremble. — What? that thing of silk,| Sporus, that were white curd of ass’s milk. « Grumeaux de lait d’anesse. » 3. Trad. : « En des membres de phrase rythmée, une quantité convenable de syllabes et le sens passent d’un vers 4 un autte de maniétes diverses. » 4. Lu a Pépitre du samedi de la deuxiéme semaine de Caréme, donc le 27 février. — « La voix, la voix est de Jacob, mais les mains, ce sont les mains d’Esaii. » « Viens, mon fils, et embrasse-
moi.» Les derniers mots sont adressés 4 Esaii : « Ta bénédi@ion seta dans la graisse de la terre...» (Genése, XX VII). Cf. p. 665. 5. Claudel a écrit : « Tout est cela est choquant. »
Mars- Abril 1926
1393
Page 712. 1. Cf. « les Marchands de colombes » (O. C., t. IV, p. 183) :
«“Marchands de colombes’”, cela voulait dire au Moyen Ageautre chose. L’expression désignait ces prélats et prétres indignes qui, a l’exemple de Simon le Magicien, pour de l’argent vendaient le Saint Esprit... » 2. Rature : au fond. 3. Claudel résume le chapitre cité. Les deux citations, 26 : « Est-ce que vraiment les autorités ont reconnu qu’il est le Christ?» et 30 : « Ils cherchaient donc 4 Varréter et personne ~~ ne mit la main sur lui... »
Page 713. 1. « Vous
setez
comme
des dieux.»
« Je n’obéirai
pas»
(Genése, III, 5, et Jérémie, II, 20). 2. Luc, VII, 14: « Jeune homme, je te l’ordonne, léve-toi! » 3. Image développée dans « Ossements » (Pr., p. 969). ' 4. Matth., XXVI, 8 : « A quoi bon cette perte?» — Voir « Mort de Judas» (Pr., p. 905). Cf. ici p. 714 et 1005. 5. Philosophie des deux Ampére, publiée par J. Barthélemy
Saint-Hilaire, Didier, 1966, p. 183; c’est Jean-Jacques Ampéte qui rapporte ce mot de son pérte. 6. Surcharge : « pour la réparation... ». Page 714.
1. Voir «Mort de Judas » (Pr., p. 905). C’est le deuxieme theme important de cette parabole (écrite en 1935) que Claudel note; voir p. 1005.
2. Dans la péninsule d’Izu, et non Chujenzi. 3. Préciser I Petr., m1, 21
: « Le baptéme,
qui vous
sauve
maintenant non pas en enlevant les souillures de la chair, mais par l’engagement d’une bonne conscience envers Dieu, grace 4 la résurrection de J.-C. » 4. Voit p. 687, n. 1. 5. Jean, X, 14 : « Je connais mes brebis et mes brebis me connaissent.» Claudel reprendra cette phrase dans un petit poéme (voir Po., p. 988). 6. I Petr., 11, 16 : « Comme étant libres, non pour faire de la
liberté une sorte de voile dont se couvre la méchanceté. » Page 71}.
1. Verset 7: L’homme passe comme un fantéme.» Verset 8: « Tous mes biens sont en vous. » Claudel traduit plus nettement
1394
Cahier V
« image » et « substance », comme le montre son commentaire. — Claudel revient souvent sur ce texte essentiel pour fonder une exégese de l’Histoire, mais il est le plus souvent moins net qu’ici; voir par exemple « Du sens figuré de l’Ecriture » (O. C., t. XXI, p. 58) : « Nous passons et le Psaume dit que nous passons en image (Image, oui, mais qui dans la vision de Dieu trace une empreinte inaltérable). » Voir J. Petit, « ’Histoire 4 la lumiére de PApocalypse », Revue des lettres modernes, Claudel, 1967. 2. I wandered lonely as a cloud. « L’ ceil intérieur. » 3. Sut la conversion de René Schwob, voir ses deux livres, Moi Juif, livre posthume, Plon, le Roseau d’or, 1928, et Ni grec ni juif, ibid., 1931.
4. Cité dans «le Poéte et le shamisen» (Pr., p. 825). Ce dialogue sera écrit en juin 1926. 5. Ibid., p. 823 : « Comme ce pont d’Iwakuni que nous avons vu l’autre jout, qui va d’une tive 4 lautre non par une ligne droite, mais pat une série d’élans et de gracieuses courbutres. [...] Et ce vieux pin tentaculaire comme un concierge a sept tétes... » 6. Ibid., p. 821: «... tu as eu lidée, passant par Osaka, dit le
shamisen, de confronter le véritable bounrakou avec celui qui il y a deux ans s’était mis 4 marcher dans ton imagination. » Le texte « Bounrakou » est en effet de 1924. Page 716. 1. Ibid., p. 828, acteut.
2. Ibid.: « ... ces grandes roses que nous avons vues au jatdin bouddhiste de Hasédétra et que tu appelles des pivoines. » — Voir également Cent phrases... (Po., p. 706): « Je suis venu du bout du monde pour savoir ce. qui se cache de rose au fond des pivoines blanches de Hasédéra. » 3. Ibid., p. 830: « C’est la sylve sacrée d’Ysé. [...] Qui donc t’a amené de si loin sous les cédres et camphtes, parmi le conciliabule de ces noirs colosses [...] la riviere, moitié gravier et moitié étincellement mystérieux... » 4. Ibid. :« Ainsile premier Empereur du Japon Jimmo Teuno. [...] Un Japon sauvage et forestier... » 5. Ibid., p. 834 : « Te rappelles-tu cette plage de Isé a neuf heures du matin, cette mer dans la fraicheur du matin... » 6. Ville industrielle, proche d’Isé; son chateau avait été
construit par leyasu; c’est « au dernier étage du chateau de Nagoya» que Rodrigue « a appris la langue des bonzes et étudié la philosophie » (le Sowlier de Satin, \V, 11; Th. II, p. 881). 7. « Le Poéte et le shamisen » (Pr.,p.832) : « On croit connaitre quelqu’un [...] on a vécu avec lui pendant vingt ans et tout 4 coup on le voit descendre a la table du déjeuner avec une cravate bleue aussi inopinée que la petite vérole. »
Mai 1926 8. Toute |
cette note commente
1395
l’évangile de la messe des
Rogations, Luc, chap. x1 : « Demandez,
chetchez, frappez...»
« [Le pere de famille] répondant de lintérieut...» — Claudel teprend surtout la fin du texte : « Si ’un de vous demande du pain a son péte, celui-ci lui donne-t-il un caillou? S’il lui demande du poisson, lui donne-t-il un serpent? Et s’il demande un ceuf, eSt-ce qu’il lui présente un scorpion? »
| _
Page 717.
1. Cent phrases... (Po., p. 728), méme image et autre idée : « Un poéme qui roule de tous cétés sur le papier sans pouvoir s’y fixer comme une goutte d’eau sur une feuille de lotus. » 2. Cette note et la précédente en marge d’une image de la Vierge auxiliatrice. 3. Verset 16: « Délivrez-moi du sang, 6 Dieu, Dieu de mon salut... » 4. Isaie, LXIV, 6:« ... comme un linge souillé... » _ 95. C£. Seigneur, apprenez-nous a prier (O. C., t. XXIII, p. 58):
'« Tu sangs, catte 6.
mes un époux de sangs! dit quelqu’un dans la Genése. Des au pluriel.» — A cdté de cette note Claudel a collé une postale représentant le /ori7 de Miyajima. Shinagawa est un quartier de Tokyo. — Sur Violette
Sussmann, voit p. 587, n. 6; pout l’abbé Totsuka, p. 668, n. 4.
Page 718.
1. Cent phrases... (Po., p. 703): « Une gtenouille saute dans Pétang et la-haut dans le ciel O tsuki sama se met 4 rire si fort qu’elle est obligée de s’essuyer le coin de l’ceil avec un mouchoir de soie. » 2. Charles Vildrac, né en 1883, trés lié avec Jules Romains,
René Arcos, Georges Chenneviére, Duhamel, fit partie du groupe de l’Abbaye: poéte, romancier et surtout dramaturge. Il publiera en 1928 D’un Voyage au Japon, E. Hazan éd. 3. Le texte anglais qui suit est imprimé : coupure de journal que Claudel a collée 4 gauche et sur toute la longueur de la page. En haut et a droite, photographie, avec ces mots de la main de Claudel : « Le corps diplomatique 4 Tokyo (mats 1926) (tous les vieux roquantins). » Tradudtion du texte anglais :
| |
DECOUVERTE DE DEUX POEMES
que l’on croit étre I’auvre de feu la fille du Tsar « On a découvert deux poémes, que feu la Grande-Duchesse Olga, fille de feu le Tsar de Russie, a écrits, croit-on, quand
1396
Cahier V
toute la famille royale, aux mains des exécuteuts
bolcheviks,
était sur le point de mourir. Ce sont deux priéres en vers, Pune pout le “‘pays”’, l’autre pour les “‘ennemis”’. Les originaux, d’aprés Vinformation
du New
York
Evening
World,
furent
trouvés
a
Ekatetinenburg dans un cahier et publiés dans la relation de feu N. A. Sokolof intitulée /e Meurtre de la famille impériale. Deux jugements semblables de critiques sur la qualité morale de ces vers accompagnent leur publication, et l’on nous dit : « “Maurice Baring, auteur dramatique anglais, qui traduisit les poémes en anglais et les envoya au London Times pour publication, a fait le commentaire suivant :
« “L’original est manifestement Pceuvre d’un esprit cultivé, mais d’un écrivain inexpérimenté, qui a étudié néanmoins les meilleurs modéles. L’intérét de ces poémes est autre, plus que littéraire.” « Dans un journal russe, /es Derniéres Nouvelles, publié a Paris, un critique russe, M. Hadasevitch, écrit : « “En lisant ces vers malhabiles qui sont de vraies priéres, ignorés peut-étre de ses plus proches et de ses plus chers, il est impossible de ne pas s’incliner devant la saisissante élévation morale qu’ils révéelent’’. » Devant l’icéne de Notre-Dame
Reine du ciel et de la terre,
Consolation des affligés, Entends la priére que des pécheurs élévent Vers toi, — notre espérance et notre salut. Nous sommes plongés dans l’abime de la passion, Perdus dans les ténébres du péché;
Mais... notre pays, Oh sur lui Jette un regard de tes yeux qui voient tout. La sainte Russie, ta lumineuse demeure,
Est prés de sombrer. Nous t’implorons, 6 notre avocate : Nous n’en connaissons pas d’autre. IN’ abandonne pas tes enfants, Toi l’espérance des malheureux, Ne te détourne pas De notre triftesse et de notre soufrance. Priére
Exnvoie-nous, Seigneur, la constance Au jour de ténébre et de tourmente, Pour supporter la persécution du peuple
Et les coups de nos bourreaux.
Mai- Juin 1926
1397
Donne-nous la force, Dieu de justice,
De pardonner l’offense de nos fréres, Et de porter avec ta douceur La lourde et sanglante croix. Et au jour de tumulte, Quand nos ennemis nous dépouillent, Aiide-nous, Christ notre Sauveur,
A porter la honte et l’affront. Seigneur du monde, Dieu de l’univers, Entends notre priére, Donne la paix a notre dme A Vheure d’épouvante, al’ heure terrible. Et au seuil du tombeau,
Inspire aux levres de tes serviteurs La force plus qu’ humaine De prier humblement pour leurs ennemis. Page 719.
1. Lévit., XX VI, 5 : « La moisson avant d’étre battue sera ptessée par la vendange et la vendange elle-méme sera pressée par le temps des semences... » Page 720. 1. I Joan., 1v, 16 : « Dieu est amour et celui qui demeure dans l’amour demeute en Dieu et Dieu en lui.» — 17: «La perfe€tion de l’amour de Dieu est en nous [...] parce que tel il est lui, tels aussi nous sommes
en ce monde. »
2. Cf. « le Poéte et le shamisen» (Pr., p. 829) : « Kinuta, Cest un n6 de forme curieuse... » Bomelitadies Plus rien, plus rien ! La lune eft morte Et tout le monde avec elle;
Les fées du sommeil étendent la couche, L’accueil eS la dans un instant.
4. Claudel a d’abord écrit : « ... et dans cette gondole furieuse une femme qui hurle. » Page 721.
1. Cent phrases... (Po., p. 724) : « Les itis pour m’amener jusqu’ici sont venus me techercher jusqu’aux portes de Tokyo
comme une tibambelle de jeunes paysannes entre les roseaux tout le long du fossé plein. »
1398
Cahier
2. Ils seront publiés 4 Tokyo en 1927, édition Koshiba, sous le titre Cent phrases pour éventails (voir les notes de Po., p. 1148). Le manuscrit, conservé dans les archives de Claudel, est daté du 8 juin 1926. 3. Coupute de quatre mots, a caractére familial. 4. Sur Part du bouquet japonais, voir « le Poéte et le shamisen » (Pr., p. 832 sq.); voit la formule notée ici, p. 834 : « Un
bouquet de lignes. » 5. Trad.
: « Le ceeur, l’aide, le gout, l’habileté, la touche
finale. Cette école affirme qu’il y a trois secrets pour Parrangement des fleurs. Le premier est l’art de donner expression et sentiment aux ensembles. Le second, l’art de montter le caractére
des objets mis en jeu, plantes ou arbres. Le troisiéme, lart de garder présents a l’esprit la saison et l’occasion de arrangement, en évitant les rapprochements déplacés» (Conder, /’Art des fleurs au Japon). 6. « Le Poéte et le shamisen» (Pr., p. 834): «... évitant a la fois le désordre et la syméttie, la redite et la contradiction, et toutes ces intersections offensantes qu’ont énumétées les maitres de Vart Enshiu. » 7. Un nom illisible.
8. Souvenir repris dans « le Poéte et le shamisen » (Pr., p. 832): « Au milieu du lac, il y a une ile [...] une certaine absence dans Vimmense clair de lune... » Page 722.
1. Surcharge : « physiques ».
Page 723.
1. Voir O. C., t. XV, p. 294-295; le développement de cette note sert de préambule au « Projet d’une église souterraine a Chicago». — Au milieu de cette page, photographie collée de Reine Claudel, fille du poéte, a seize ans. 2. In Joannis Evangelium, trak. XIV, 5 (P. L., t. XXXV, col. 1504-1505).
3. Surcharge : « soutetraine ». 4. Antonin Raymond, archite&e d’origine tchéque et de nationalité américaine, établi 4 Tokyo; voir «la Maison d’ Antonin Raymond a Tokyo » (Pr.,p. 1201). — Pout le « Projet une église souterraine a Chicago », voit O. C., t. XV, p. 294 sq. 5. Fils du neveu de Claudel, Jacques de Massaty.
Juillet-Aott 1926
1399
Page 724.
1. Verset 7: « L-homme pénétrera au fond de son cceur. » 2. Verset 14 : « Les ailes de la colombe sont argentées ~ et Pextrémité de son dos a Je pale éclat de Vor. »
3. Trad. : « est de titer le meilleur parti de la plupart des choses ». 4. Ce texte sera recopié intégralement, avec quelques vatiantes de détail, dans « le Poete et le vase d’encens» (Pr., p. 844). — Claudel l’avait lu bien longtemps auparavant; dés 1896 ou 1898,
ilen a fait une paraphrase en versets claudéliens (voir Po., p. 963, ~ «Tao Teh King »). — Cf. Fr. Lefévre, Une heure avec..., 3° sétie, 1925, p. 159 : « Le Tao Te King eSt un des grands classiques de Phumanité... » 5. Temple de Kyoto. Page 725. 1. Voit Pr., p. 1190, « PAbdication au milieu des pins», inspiré par cette salle du palais Niji. — De la méme époque semblent dater « Neige »,« Deux bambous vetts»,« la Canne », « Pont» (Pr., p. 1187-1189). Page 726. 1. Cantique des Cantiques, III, 4 : « Je Vai saisi et je ne le laisserai point aller. »
2. Cf. Conversations... (Pr., p. 686) : « Et nous voyons que Vargent méme aujoutd’hui a perdu sa solidité et son poids. » 3. Cent phrases... (Po., p. 717): « Au point du jour le Nantai au Shirane décoche une grande fléche d’or. » 4. Claude Laroche était la fille de l’ambassadeur de France a
Varsovie; deux jouts aprés avoir apptis sa mort, Claudel compose 4 Chujenzi le poéme seize ans» (Po., p. 863).
intitulé « Claude
Laroche
morte
a
5. Ces lettres sont les detniéres de la correspondance Gide'
'
Claudel (p. 244) 6. Voir une note apparemment
référence
aux
Conversations...
dans
opposée, p. 787, n. I, avec
laquelle
Claudel
souhaite
Vabolition des iimites (cf. Pr., p. 818).
Page 727.
1. Romains, VUI, 39. 2. « Les intervalles musicaux », addition postérieure. 3. The eoliam Harp, v. 44-46. Au vets 45 Claudel a écrit formed au lieu de fram’d. Trad. : « Tout ce qu'il y a de vivant dans la
1402
Cahier V
5. Ibid.: « ... ce caillou carié 4 qui la mer fait une bague de neige... » 6. Ibid., 859, les peintutes, l’ « aigle », le « petit port de péche ». Rappelons que ce dialogue est écrit en novembre 1926. 7. Matth., XXII, 9 : « Allez donc dans les carrefours. » 8. Vertset 4: « Je vous célébrerai, Seigneur, parmi les peuples et je vous chanterai parmi les nations. » Page 734. 1. Vetset 2:« Mon cceur est préparé, Seigneur, mon cceur est ptéparé, je chanterai et je psalmodierai dans ma gloire. Levezvous, ma gloite, levez-vous mon luth (et ma harpe), je me léverai dés l’aurore. » 2. Stevenson, A child’s garden of verses, XXII, The cow. Trad. : L’aimable vache, toute rousse et blanche, Je l’aime de tout mon ceur, Elle met toutes ses forces a me donner la créme Que je mange avec la tarte aux pommes.
3. Trad. : « Elles sont 4 vous, si vous les demandez. » 4. Joruri, ou jorori, spectacle de marionnettes. Voir Pr., p. 1552, dans « Lettre au professeur Miyajima ». 5. Cette nomination 4 Berlin désirée par Berthelot et plusieurs fois envisagée aurait échoué par l’opposition de certains milieux allemands. On n’autait pas pardonné 4 Claudel le ton de certains poémes écrits pendant la guerre et particuliérement, dans « Sainte Geneviéve», « Ce grand Ane solennel, Gethe» (Pa., p. 642). 6. Haguromo, titre d’un n6 : « PAnge a la robe de plumes », voit p. 574. Voir Cent phrases... (Po., p. 731) : « Le Fouji, PAnge du Japon a revétu son surplis de plumes. »
Page 735. 1. Voit « la Maison du Pont des Faisans » (Pr., p. 1198). Note accompagnant une photographie de l’ancienne ambassade. 2. Texte reproduit en appendice a l’étude sur le « N6» (voir Pr., p. 1548). Page 736. 1. Voir supra, p. 666, n. 5. 2. Balzac, Massimilia Doni, Pléiade, t. IX, p. 386 : « [Emilio] se coula vets la porte de la chambre de la Tinti, souleva la portiére et disparut comme une anguille dans la vase.» — Les
Offobre 1926
1403
deux auttes citations sont exttaites de Un drame au bord de la mer : « Ce récit fut aussi aigrement incisif que l’est un coup de hache »; «... mous matchions au milieu de la nature la plus actement sombte que j’aie jamais rencontrée » (sbid., p. 894 et 895). Ces deux récits se trouvent au tome II des Etudes philosophiques. — Pour ce jugement sur Balzac, voit p. 504. 3. Trad. : « Parler de la somptuosité de ce moment, ot j’écris dune main, pendant que de l’autre je tiens a la bouche un brugnon 4a la suavité de near. Seigneur! quelle douceur! Le fruit s’écoulait, moelleux et pulpeux, fondant, liquéfié, — toute _ sa chait délicieuse se dissolvait en tuisselant sur ma gorge,
comme une ftaise énorme et luxutiante. » 4. Voit p. 774. 5. Trad. : « L’on ne devrait pas contester ni affitmer, mais
chuchoter les résultats a Voreille de son voisin. » — « L’imagination est comparable au songe d’Adam.» — « Il se réveilla et il vit que ¢’était vrai.» 6. Ces idées apparaissent a plusieurs reprises dans les Conversations...
Voit
le début
de « Dimanche»
(Pr., p. 704); voit
également « Cantique de Palmyre » (Pr., p. 731) : fréres, quand il le voudrait, n’est capable de nous et : « Il ya beaucoup d’Ames, mais il n’y en a pas qui je ne sois en communion par ce point sacré
« Aucun de nos faite défaut... » une seule avec en elle qui dit
Pater Noster. »
Page 737. 1. Voir « la Maison du Pont des Faisans » (Pr., p. 1198) : « Le comte Okuma était ministre des Finances et ses ennemis critiquaient son budget a4 coups de canon...» 2. Voit Po., p. 435, 599 et §2. 3. Voir Pr., p. 81, texte daté d’aotit-septembre 1926. 4. Voit dans « les Mots ont une 4me»; cette note prolonge les réflexions sur les « Idéogrammes ». 5. En rapport avec « l’Abime solaite » (Pr., p. 1199). 6. Saint Raphaél, féte le 24 oftobre. Le texte cité, Tobie, XII,
13 : « Et parce que vous étiez agréable a Dieu, il était nécessaire que la tentation vous éprouyat», est tiré de l’épitre. 7. Inspiré par une des oraisons du jour : «... quwil présente donc nos pauytes priéres 4 votre bénédiétion. » Page 738.
1. Cette note, comme la précédente, est inspirée par les leGtures de l’office, extraites du Livre de Tobie ou d’un sermon
de saint Bonaventure. Ce sont les premiéres relatives au Livre
1404
Cahier V
de Tobie dont Claudel écrira un commentaire en aot 1935 a Brangues (O. C., t. XX, p. 46); elles préparent aussi lointainement /’Histoire de Tobie et de Sara (Th. Il, p. 1271). 2. Thomas Lowell Beddoes (1803-1849); voit The works of Thomas
Lovell
Beddoes, O.V.P., Londres,
1935.
The
Oviparous
Tailor, 1890, est p. 113. — Like the red... eSt en sous-titre apres Fragments of Love’s Arrou Poisones, p. 254. — Here’s the blue... The Brides Tragedy, a€te I, sc. 1, p. 174. Trad. : « Comme l’ébauche rouge d’Adam naissant. » — « Voici la violette bleue comme les yeux de Pandore. » — « La ptemiéte fois que la nuit tomba dans sa vie d’immortelle. » 3. Sutcharge : « et penser». 4. Cf. « Richard Wagner» (Pr., p. 878) : « On dirait positivement qu’au début du x1x® siécle on a rendu de la chaine au vieux Prisonnier et que toute la littérature a été envahie par l’émanation satanique. Pensez par exemple aux Anglais, a Byron, 4 Beddoes, 4 Coleridge, 4 Quincey et jusqu’au doux Shelley, on se demande comment ce personnage laiteux a pu se confiner pendant des mois dans une atmosphére comme celle des Cenci ! » 5. XVIII, 4: « [la cdte de l’Hellespont] plus riche en huitres que toutes les autres cétes.» Figure dans les « Fragments», Budé, p. 98. 6. III, 3, 6. Lettre adressée 4 Corellia Hispulla, fille de Corellius Rufus; au lieu de « fils », il faudrait dire « fille d’un ami». Claudel cite ce texte a la fin de « la Maison du Pont des Faisans » (Pr.,
p. 1199). Trad. : « De quels titres de noblesse, il porte le fardeau, de quels noms, de quels grands noms il soutient le poids. » Rétablit nomina.
Page 739.
1. Ce texte ne semble pas cité exactement. Le plus proche est dans Jérémie, XXIX,
14 : Reducam captivitatem vestram et congre-
gabo |...) de cunttis locis...: « Je raménetai vos captifs et vous réunirai [...] de tous les lieux... » 2. Cent phrases... (Po., p. 713) : « Pas mes épines qui me défendent dit la Rose c’est mon parfum. » 3. Ces notes annoncent «la Légende de Prakriti», écrite seulement en 1933 (voit Pr., p. 944). 4. Versets 13-15: «La sagesse est brillante et ne se flétrit point, ceux qui laiment la découvrent aisément, et ceux qui la cherchent la trouvent. Elle prévient ceux qui la désirent et elle se montre 4 eux la ptemiére. Celui qui veille dés le matin pour la chercher n’auta pas de peine, car il la trouvera assise 4 sa porte. » 5. Cf. « Pont» (Pr., p. 1189) : « Dans tout tableau, il y a un
Novembre 1926
1405
équilibre du plein et du vide, le yang et le yin, le male et la femelle. » 6. Cent phrases... (Po., p. 741) : « Eventail c’est Pespace luiméme
en se repliant qui absorbe
cet oiseau immobile a4 tire
dailes. » 7. V. 1380. Claudel relit peut-étre la chanson de Roland; dans « la Légende de Prakriti», il note « cette espéce de cri de charretier qui termine les longues laisses monorimes : Aoi! »
(Pr., Pp. 949, n. I). Page 740.
1. Coupure de trois mots. 2. Cantique, II, 3 : « Je me suis assise 4 lombre de celui que mon cceut désirait... » 3. Voir p. 717, n. 6. Au-dessus de ce nom, entre les deux notes, on lit « placide ».
‘Page 741. 1. Cf. Adversus Haereses, V, 14, 1 (P. G., t. VII, col. 1161) : Si
enim non haberet caro salvari, nequaquam Verbum Dei caro fattum esset. 2. « Un mélange d’oppositions. » 3. Voir p. 619. 4. Synésius, évéque de Ptolémais en Cyrénaique, i1v® siécle, Opuscules, Dion ou Traité de sa vie, 1V B to (éd. Nicolas Trezachi,
Rome, 1944, p. 245).
5. Hachette, « les Grands écrivains de la France», éd. Albert Cahen, t. II, 1920, p. 347, 350. Rétablir les points de suspension omis pat Claudel aprés « ils la respirent ».
Page 742. 1. Béde le Vénérable, Comment. in Marcum, lib. II, cap. 11. Claudel a lu ce texte dans le Bréviaire, 17 novembre, S. Grégoire
le Thaumaturge, 3° noéturne, 9° lecon. « Mais comme sous le nom de montagne, le diable est parfois désigné...» « Les montagnes sont jetées dans la mer. » 2. Rom., X, 20: « Mais Isaie s’enhardit jusqu’a dire : J’ai été trouvé pat ceux qui ne me cherchaient pas; je me suis manifesté ouvettement a ceux qui ne me demandaient pas. » 3. Cent phrases... (Po., p. 742) : « L’automne Au-dessus du ruisseau clair et vif une touffe de chrysanthemes jaunes. » 4. Cf. le Livre de Christophe Colomb, I, 16; dans la scéne des « Dieux qui barattent la mer», Vappariteur appelle Quetzalcoatl. Voir aussi Conversations... (Pr., p. 744 et 817).
1408
Cahier VI
Page 747. 1. Joan., XXI, 23 : « Je veux qu’il demeute jusqu’a ce que je vienne. » Evangile de la féte de S. Jean, 27 décembre. — Le méme jour Claudel lit dans le Bréviaire les trois legons tirées d’une homélie de saint Augustin (Traité 124 sur Jean); saint Augustin oppose deux vies : «... Pune d’elles est dans la foi, Vautre dans la vision; l’une pour le temps de notre pélerinage, Pautte pour celui de l’éternel séjour; l'une dans le travail, ’autre dans le repos [...] une dans les ceuvres de l’aétion, autre dans la recompense de la contemplation. [...] Celle-la est signifiée par Papdtre Pierre, celle-ci par Jean. »
1927
Page 748. 1. « Les noms doivent s’accorder 4 la nature des choses. »
2. Cf. Cent phrases... (Po., p. 713) : « La petite maman a pas vifs enléve le cerf-volant... »
Page 749. 1. Coupure de journal collée sur la partie droite de la page. A gauche, les signatures de l’abbé V. B. Totsuka et de Violet Agnés Sussmann sur un carton (collé) avec ces mots : The best of Good Wishes for a Happy Chrisimas. 2. Mémoires de la Reine Hortense, publiés par le prince Napoléon avec notes de Jean Hanoteau, Plon, 3 vol., 1927. Réflexion de Claudel aprés la le€ture du chapitre 11,
CAHIER
VI
Page 753.
1. Sur la page de garde, « Septiéme » raturé, et au-dessus : « Sixieme Registre. Commencé 4 Tokyo le 12 janvier 1927.» Suivent des initiales en capitales « AETS. 59», qwil faut sans doute comprendre « Aetatis» : « Ma 59° année». 2. Ce nom en surcharge.
Janvier 1927
1409
Page 754. 1. Ces réflexions annoncent « la Légende de Prakriti ». 2. Marcel (et non Michel) Azais (1888-1924), fondateur en
1920 de la revue Essais critiques; les principaux articles de cette revue ont été réunis en un volume sous le titre /e Chemin des Gardies,
Nouvelle
Librairie
nationale,
1926. Ami
de Lucien
Dubech et des écrivains de l’école maurrassienne. 3. Histoire des origines du christianisme, liv. VI1, Marc-Auréle et le monde antique, Calmann-Lévy, 1882, chap. xrx, « les Martyrs de Lyon», p. 309: « La publicité les soutenait. Quelle gloire ~ d’affirmer devant tout un peuple son dieu et sa foi! Cela devenait une gageute et trés peu cédaient... » 4. « Un peuple immense n’est pas un grand peuple. » 5. XII, 23 : « Mais aussitdt un ange du Seigneur le frappe [...] et dévoré de vers il périt. »
Page 755. , 1, Au-dessus de ces lignes, Claudel a collé une reprodu€tion du Baiser de Judas (détail : le Christ et Judas) de Giotto; voir Mort de Judas (Pr., p. 899). z. Entre autres romans « amusants », W. de Morgan Joseph Vance, 1906. Au-dessus de « amusants », Claudel au crayon (surcharge postérieure) : « erreur! » 3. Aprés « plus », rature : Jui. 4. Le livre de Henry Ford a été traduit en francais, titre Aujourd’hui et demain, pat L.-P. Alaux et P. Hollard, Bibliothéque de l’Industriel.
a écrit a noté
sous le Payot,
Page 756.
1. « Toutes les phases de la vie devraient absolument étre complémentaires. » 2. Sylvain Lévy parle des fouilles de Koutcha et de la langue koutchienne dans /’Inde civilisatrice, Publications de l'Institut de civilisation indienne, Paris, 1938, p. 253 sq. 3. Voir « Elisabeth Sainte-Marie-Perrin » (Po., p. 968), daté du 6 février 1927.
Page 757. 1. Milinda-panha, traduit en frangais sous le titre /es Questions de Milinda, par Louis Finot, « les Classiques de l’Orient ». Voir Henti de Lubac, /a Rencontre du bouddhisme et de 1’Occident, Aubier, coll, « Théologie», p. 14. Claudel cite cet « apologue de la
I410
Cahier VI
soupe » dans Présence et Prophétie (O. C., t. XX, p. 403, n. 1), a propos de la « fusion des facultés», dans Mémoires, p. 103. — Il dit a Frédéric Lefevre (Une heure avec..., 5° série, p. 116) : « Les paraboles des Questions de Milinda sont infiniment savoureuses et leur aimable scepticisme n’est pas bien dangereux pour un chrétien. Il faut tout d’abord comprendre qu’un poéte n’est pas un professeur. II ne faut pas syStématiser avec les Orientaux. Ce&t 1a la plus grande “‘source d’erreurs”’. » 2. Voir p. 728. 3. Ps, L, 8 : « Car vous
avez
aimé
la vérité; vous
m’avez
révélé les secrets et les mystéres de votre sagesse. » Ce psaume est en effet appelé Miserere, de son premier mot. Page 758. 1. Les « norito », textes rituels du Shintd, sont en effet les
textes de prose les plus anciens, au Japon. Page 759.
1. Voir
«les
Funétrailles
notes (Pr., p. 1148). 2. Au-dessus de cette
du
note,
Mikado», photographie
écrit
d’aprés ces
collée
(coupure
de magazine) : « Flattor Mill, from Constable. » 3. Entte autres textes reptenant ces idées, voir « le Chemin dans l’art » (Pr., p. 262). 4. Sut cette page, deux coupures de journaux collées; photogtaphies de Claudel avec des Japonais, sans légende. 5. Cantique, Il, 5. 6. Surcharge : « sa miséricorde, sa rédemption ». Page 760. 1. Vieux,
Page 761. 1. Voit «la Maison d’Antonin Raymond a Tokyo» (Pr., p. 1201); en fait Claudel met au net ce texte, dont le brouillon est daté du 24 janvier. Voir dans Rencontres, 1965, I, une lettre a Mme Raymond, du 20 février précisément. Il y parle de cet atticle et de son voyage : « J’ai passé une journée dans la nausée et une sombre torpeur. Le lendemain seulement, j’ai commencé a ouvrit Voeil un petit peu et 4 comprendte que je traversais le plus gigantesque spectacle
cosmique que
j’ai jamais vu, le
Feévrier-Avril 1927
I4II
Pacifique. Hier, sous le clair de lune c’était inoui, quelque chose de si grand qu’il n’était pas fait pour l’ceil humain. » 2. Terme générique : petits poémes chantés. Page 762. 1. Trois mots illisibles.
Page 763. —
1. « Montré comme une curiosité. » Les initiales suivies de [...]
_ indiquent des noms illisibles. Page 764.
1. Surcharge : « Mad. Nijinska ». 2. Un poéme de Paul Morand dans du 11 février 1928 évoque ce voyage. extrait dans ze, p. 188. Claudel lui aussi enthousiasme, dans sa conversation avec
/es Nouvelles littéraires Chaigne en a cité un parle de ce pays, avec Fr. Lefévre, op. cit.
Page 765.
1. Ce recueil paraitra en 1933 aux éditions Denoél, sous le titre R. Nijinsky, par R. Nijinska; la préface de Claudel a été publiée par ailleurs (voir Pr., p. 384). 2. Henry Bérenger, 4 qui Claudel succéde 4 Washington; il s’agissait d’un accord sut le probleme des dettes (voir Pr., p. 1210, et Cah. Cl. IV).
3. Claudel pense probablement aux distractions dans la priére (voit p. 767). 4. Parc de Washington, proche du quatrtier des Ambassades, ou Claudel fera sa promenade quotidienne. 5. Voir Pr., p. 1269 : «... Coolidge arborait entre deux petits yeux inquiets et pergants, au-dessus d’une bouche toujours | occupée 4 gtignoter quelque noisette, un cartilage agile et | pointu [...]: s’ilya quelque vérité dans la théorie des totems,
nul doute que ce personnage rousseau et futé n’appartint a la tribu des Ecuteuils. » Voit également ibid., p. 1215.
Page 766. 1. Voir « l’Elasticité américaine » (Pr., p. 1207) : « C'est avec une amertume patticuliére que je me rappelle les banquets de dames ow j’avais la fierté de représenter souvent mon sexe a
1412
Cahier VI
moi tout seul. Je me souviens d’une de ces feSstivités ot la présidente [...] sur le point de me rendre ma liberté m’enveloppa
longuement d’un regard qui me fit frissonner. C’était l’ceil a la fois vorace et technique d’une reine de cannibale... » 2. Homme d’affaires francais dont Pierre Claudel épousera la fille, Marion.
3. Lamont, haut personnage de la banque Morgan. 4. Alexis Carrel, médecin et biologiste francais, auteur de l’Homme
cet
inconnu,
Plon,
1935;
fa
Priére,
Plon,
1944;
Je
Voyage a Lourdes, Plon, 1949. — Lecomte du Nouy, biologiste et philosophe, auteur de /e Temps et la vie, Gallimard, 1936; 1’Homme devant la science, Flammarion, 1939; /’Avenir de I’esprit, Gallimard, 1941; /a Dignité humaine, New York, Brentano,
1944.
5. Cf. «la Légende de Prakriti» (Pr., p. 951) : « Pareille a ce Stade en quelque sorte visqueux dans Vesprit d’un poéte, quand les idées ne sont encore qu’une condensation quelque part [...] Phistoire de la vie sur la terre, on peut le supposer, commence a ce moment ot l’eau acquiert une vertu adhésive, ou la lymphe devient humeur, ot toutes sortes de ferments travaillent la séve primitive, ou la glaire et ’albumine se mettent
a la recherche d’une enveloppe... » 6. Rappelons qu’il s’agit de ’homme d’affaires américain que Claudel a mis en scéne dans /’Echange, 4 Boston, en 1894. Cette note est en marge d’une photographie du « Senator King ». 7. Voir dans le premier chapitre des Vitraux de 1’Apocalypse
la reprise de cette réflexion sur le temps.
Page 767.
1. La premiére phrase appartient 4 Phymne chantée 4 ce moment de la cérémonie : « Que tous, hommes et femmes, soient renouvelés par ’onétion du chréme et que notre dignité blessée soit pat lui guétie. » La suite est tirée du rituel méme
de la bénédiétion : « Qu’il n’y ait plus de place pour leur malfaisance [celle des esprits mauvais], qu’il ne leur soit laissé aucun réduit ot placer leur pouvoir, aucune liberté de cacher leurs embuches. — Que la san¢tification étant répandue dans ’homme part Vonétion, la corruption de la premiére nature soit anéantie, que le temple de chacun exhale la suave odeut que produit innocence de la vie, que selon les conditions établies par vous dans ce mystére, ils y recoivent la dignité de trois, de prétres et
de prophétes, avec ’honneur d’un vétement d’immortalité. » 2. Coupure de vingt-cing mots, 4 cara&tére purement familial. 3. Emam, peintre; Labbé, professeur de littérature francaise a New York.
Avril 1927
1413
4. Germaine Tailleferre (née en 1892), compositeur du Groupe des Six. Elle composera la musique de Sous le rempart d’Athénes, que Claudel vient d’écrirte. Page 768. 1. Robert Lacour-Gayet, attaché financier de l’ambassade. 2. Voir « Samedi» des Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 789): «... ce pdle de mouvement et de vide qui s’est créé en _ Amérique.» Voir tout ce passage. L’impression de Claudel “était déja la méme lorsqu’il éctivait /’Echange, ou la seconde version de /a Jeune Fille Violaine.
3. « Se fait et » est en surcharge. 4. Jean Borotta, champion frangais de tennis. 5. Voir Mémoires, p. 96 : « Dans un wagon il y a la banquette avant et la banquette arriére; il y a des gens qui regardent le passé qui s’éloigne, d’autres qui regardent le futur qui arrive. » Egalement «la Banquette avant et la banquette arriére » (Pr., p. 1311). 6. Coupure de quelques mots, de caractére familial. 7. Alexis Léger était alors direfteur des Affaires politiques au Quai d’Orsay. 8. Fernand Pila, né a Lyon en 1874, consul suppléant a Pékin en 1900, consul a Shanghai en 1902, a Fou-tchéou en 1908, attaché commercial pour l’Extréme-Orient en 1909, ministre 4 Bangkok en 1920, chargé de mission en Indochine en 1925, était alors chef du service des ceuvres frangaises a l’étranger. 9. Interview publié le 7 mai, Une heure avec..., 5° série. Claudel entre autres choses s’y exprimait clairement sur /’_A tion francaise ; « Je ne dirai certes pas que je suis content de ce qui arrive a l’Adtion francaise, mais j’ai toujouts considéré que ce mouvement n’était pas animé d’un esprit chrétien. L’aftion du Pape a été salutaire et elle était nécessaire. Comme diplomate, ayant passé la plus grande partie de ma vie 4 l’étranger, j’ai toujours constaté qu’il n’y a pas un journal qui ait fait plus de mal a la cause francaise que celui de MM. Maurras et Daudet, par ses violences a Pégard de tout ce qui teprésente notre pays...» 10. Voir la note précédente. Léon Daudet avait toujours
admiré Claudel dont il avait été le camarade 4 Louis-le-Grand et qu’il avait beaucoup fréquenté en 1891-1892. Toutes relations avaient cessé depuis bien des années. 11. Voir la lettre que Claudel adresse le 10 mai a Henri Massis, /a Table ronde, avril 1955, p. 94.
1414
Cahier VI
Page 769.
1. « Pour que beaucoup de cceurts soient mis 4 nu. » 2. Sur la baronne Pierlot et son fils le baron d’Aiguy, voir p. 511. Béon, chateau de la baronne Pierlot, 2 Culoz (Ain). 3. Il ne semble pas que ces chceurs soient composés surf un texte de Claudel, qui avait toutefois donné
le premier texte du Festin de Ja Sagesse. 4. Alors président du conseil. 5. Pensées, éd. Brunschwicg, n° 409, p. 6. Ibid., n° 425, p. 519. Pascal a écrit La derniére phrase est de Claudel. 7. Réflexions de Claudel sur les n° Mété est ici simplement note. 8. Ibid., n° 465, p. 546. Pascal a écrit dans nous ».
a Benoist-Méchin
511. : « par Dieu méme ». 428-434;
le nom
de
: « ni hors de nous ni
Page 770. 1. Citation libre; cf. Nuit obscure, 1, « Nuit passive des sens »,
§ 7 (éd. Hoornaert, Desclée de Brouwer, 1923, p. 22). 2. Lire Fouquiau; il s’agit de la veuve de Victor Segalen. 3. Rollin, Histoire romaine. 4. Ces exetcices sont postérieurs aux « Idéogrammes occidentaux », qui sont datés de septembre 1926. Mais Claudel reviendra fréquemment sut ces jeux (voit Pr., p. 91 sq.). 5. Suit un dessin représentant un ¢ renversé. 6. Sur le P. Marcel Jousse, jésuite, voir Archives de Philosophie, vol. Il, cahier IV, Ezudes de psychologie linguistique. Le Style oral rythmique et mnémotechnique chez les verbo-moteurs, Beauchesne, 1925. Claudel parle incidemment du P. Jousse dans sa « Lettre a Pabbé Bremond » (Pr., p. 45). Page 771.
1. C’est-a-dire en frangais « le champ que j’aimais » et « le chant que j’émets », phrases phonétiquement trés proches. 2. Cité dans la « Lettre 4 Pabbé Bremond » (Pr., p. 48). July fugitive (Miscellaneous Poems), v. 22-26. Trad. : « Cette essence de
toute souffrance, qui est joie. étaient lents sur l’azur, calmes flottant dans l’air. » 3. La mule de Christophe de Christophe Colomb, Il, 6 : «
Pp. 1179).
— Comme les oiseaux de met ils dans l’air, dansant sur la lumiére, Colomb évoquée dans /e Livre ’Auberge de Valladolid » (TA. I,
Mai 1927
1415
4. Trad. : « Dans un mois de mai fantastique. — Sans mouvements des ombres passent devant moi. — Triplement entourées de ’émeraude de notre aube mortelle. » Page 772.
1. La Cité antique, Uachette, 13° édition, 1890, p. 463. Aprés « tout de homme»,
Claudel a omis « toutes les vertus n’ont
plus été comprises dans le patriotisme, car l’Ame n’avait plus de patrie ». La derniére phrase est p. 462. 2. Rature : avril. 3. Sut Pamitié de Marthe Bibesco et de l’abbé Mugnier, voir p. 678. 4. Th. Il, p. 1115. Texte écrit pour le centenaire de Marcelin Berthelot (voir plus loin, p. 790). 5. « Nous ne reconnaissons qu’un Etat, Punivers. » 6. Lettres de Keats, vol. I, n° 83 (O.U.P., Londres,
1935,
p. 238). Lettre du 22 septembre 1818, 4 John Hamilton Reynolds. Trad. : « Poésie : une redoutable chaleur qui étreint mon cceur comme un poids d’immortalité. » 7. Citation de S. Augustin (Confessions, XIII, 9) : « Mon poids, c’est mon amour. » 8. Peintre, ami de Claudel et de Lugné-Poe. Sans doute est-il question de décor pout /’Annonce, projet non réalisé. Page 773. 1. Cf. « Mon pays» (Pr., p. 1006). —
Ce retour en arriére, a
cette date, atteSte la permanence du regret, chez Claudel, de la vie monastique impossible. 2. Pére de Cécile, qui épousa Jacques de Massary, neveu de Claudel. « Un homme de grand gotit et de grande science a qui nous devons la fameuse colleétion du Louvre, [et qui] a écrit Phistoire [du Tardenois] en trois gros volumes » (« Mon pays », Pr., p. 1005). 3. Voir Conversations dans le Loir-et-Cher, « Mardi» (Pr., P- 747): «... la courbure des vallées en France, celle de la Marne par exemple, de ce put galbe pareil a Pébénisterie de Louis XV. [...] Ce théme de la courbe, de la vallée qui revient pour se regarder elle-méme...» Voir également dans « Dimanche» (juillet 1927) le « Cantique de l’intelligence » (Pr., p. 733). Page 774.
1. Voit Paul Labutte, Un curé de campagne, apétre des vocations tardives, le Pére Mary (1863-1949), Séminaire Saint-Jean, par CLAUDEL V - 48
48
1416
Cahier VI
Changis-sur-Marne (Seine-et-Marne, 1958), p. 157; ’abbé Mary avait écrit a Claudel pour lui demander de I’aider. 2. « Le doigt du Seigneur est la » (Exode, VIII, 19). 3. Claudel évoquera cette visite dans Seigneur, apprenez-nous a prier (O. C., t. XXIII, p. 37), dans des termes proches de ceux
qu’il emploie ici. 4. Conversations dans le Loir-et-Cher, « Mardi» (1928) (Pr., p. 752) : « Vous étes-vous apergu qu’il y a une architecture qui marche? Je me suis avisé de ¢a l’autre jour en descendant la nef centrale ot les arcs aigus alternent avec les ogives persanes... », et tbid., « Samedi » (p. 781).
Page 77). 1. Agnés du Sarment (voir p. 700). 2. Ce projet apparait a plusieurs reprises dans la correspondance Claudel-Milhaud (voir Cah. C/. Ill). 3. Sur le P. Auguste Valensin, jésuite (1879-1953), consulter Auguste Valensin, Textes et documents inédits, Aubier, 1961, et
« Un gtand seigneur de l’esprit», par le P. André Blanchet, introduction 4 Regards, Aubier, 1955. En mats 1945, le P. Valensin a donné
4 Nice
trois
conférences
‘sur /e Soulier de Satin;
elles constituent le chapitre v du volume II de Regards, Aubier,
1955.
4. Voit Conversations dans le Loir-et-Cher, « Mardi» (1928) : « Une ville qui monte, c’est toujours beau, comme Lyon par exemple... » 5. Conversations a propos des dettes frangaises, sans doute.
Page 776.
1. Les cours de Pierre Janet au Collége de France ont été
publiés par M. Miron
Epstein. Ceux de 1926 ont pour titre
les Stades de l’évolution psychologique, éd. Norbert Maloine. — La seconde citation, approximative, est extraite de Ja Ville, 2e version (14. I, p. 471): « Comme elle vit, il n’y a pas une
livre de la chair de VPhomme qui ne pense. » 2. Cette « contemplative frangaise » est Pursuline Catherine Ranquet, née a Lyon en 1602, morte 4 Grenoble en 1651. Le texte cité est dans le tome VI de l’Histoire littéraire du sentiment religieux, p. 336. Le titre du chapitre 11 de la Ile partie est « le MySticisme flamboyant et les myStiques du silence». Aprés « adhérer » Claudel a omis : « et je me trouve dans une telle ignorance et impuissance de lui exptimer ma soumission et
Juin- Juillet 1927
1417
ma dépendance totale, et toute autre chose que j’aurais 4 lui dire, méme pout mes amis... » 3. Voit « Du cété de la défense » (juin 1927) (Po., p. 819) : « Et pendant que l’4me contre son Dieu une fois de plus remache amérement la vieille cause, / Elle n’entend pas quelqu’un tout bas qui nous demande pardon avec la rose. »
Page 777. 1. Outre Ja Vie de Paul Claudel, Mame, 1961, Louis Chaigne ~aectit le Chemin de Paul Claudel, Paris, éd. du Pélican, et Vie e¢ auvres d’écrivains (Mme de Noailles, Valéry, Claudel...), Lanore, 1936,
2. Salon parisien qu’a beaucoup fréquenté Proust. 3. Directeur de /a Revue des Deux Mondes, secrétaire perpétuel de l’Académie frangaise. 4. Coupure d’une dizaine de mots, a cara¢tére familial. 5. In Joannis Evangelium, tra&. I, 17 (P. L., t. XXXV,
col.
1387).
6. Cette note est reproduite dans le livre de Paul Labutte sur le P. Mary (voir p. 773) avec la photographie de la « grosse rampe de bois ». — Ce « petit oratoire tout a cdté du lit » n’est peut-étre pas sans lien avec Conversations dans le Loir-et-Cher, « Mardi » (1928) (Pr., p. 758) : « Quelle est votre grande idée, Acer ? — Habiter avec le Saint-Sacrement. » Page 778.
1. Rature : spectacles. 2. Rature : pouvatent.
3. Claudel évoque cette visite dans Conversations dans le Loiret-Cher, « Dimanche » (juillet 1927) (Pr., p. 717) : « Je voudrais que quelqu’un m’explique un peu ce que c’est que ces trois
boites ovales a plafond de mousseline ot je m’étais réfugié un cettain jour d’été glacial pour éviter la pluie, un peu comme Gribouille qui par crainte de se mouiller se fourre dans l’eau jusqu’au cou... » 4. Frontispice composé pout Pédition originale en 4 volumes.
Page 779. 1. Citation qui semble approximative; plusieurs passages en sont ptoches, dans Curiosités esSthétiques, Pléiade, p. 707 : « ... vu a une distance trop grande pour analyser ou méme comprendre le sujet, un tableau de Delacroix a déja produit sur l’A4me
1418
Cahier VI
une impression riche, heureuse ou mélancolique. » Et p. 863 : « Un tableau de Delacroix, placé 4 une trop grande distance pour que vous puissiez juger de l’agrément des contours ou de la qualité plus ou moins dynamique du sujet, vous pénétre déja d’une volupté surnaturelle [...]; cette impression, qui prend pour toujours sa place dans votre mémoire, prouve le vrai, le parfait coloriste. » 2. Le 2 aout Claudel écrit 4 Jammes : « Je viens d’acheter au marquis de Virieu une grande carcasse de chateau datant de trois ou quatre siécles ot je me suis installé avec tous les miens le 14 juillet. Cela m’a fait une curieuse impression, moi, |’éternel
exilé, de sentir enfin au-dessus de ma téte un toit qui m’appartient » (Jammes, p. 315). 3. « Simples » est en surcharge. 4. « S’en dégotiter » est en surcharge. 5. La derniére phrase semble ajoutée aprés coup.
Page 780.
1. Seconde des Conversations dans Le Loir-et-Cher (voir Bie sp niiOO)e 2. Sur la genése de ce drame, voir Cah. C/. III, p. 78, lettre a Milhaud du 2 aoit; commandé par Reinhardt le drame devait étre mis en musique pat Richard Strauss (ce que Claudel refusa) et décoré par José-Maria Sert : « Pendant plusieurs semaines j’ai trainé ce projet avec dégout, malgré les insigstances de Sert. Finalement j’ai vu Reinhardt a qui j’ai exposé mes idées sans beaucoup de conviction. Lui aussi a insisté et je suis parti pour Brangues. Mais alors est survenu un coup de théatre. Une des
idées qui m’étaient venues dans la conversation a pris feu, j’ai vu mon chemin tout 4 coup et j’ai écrit dans l’enthousiasme non pas le scénario comme je le croyais, mais la piéce presque tout enttére. »
3. « Ceux de ses serviteuts qui tiennent au monde, Dieu au ciel les recompense avec de la fumée. »
4. Claudel confond Henri Bremond et son frére le P. Jean Bremond,
jésuite, auteur des Péres du désert, Gabalda,
2 vol.,
1927, coll. « les Moralistes chrétiens, textes et commentaires ». 5. H. Petitot, O.P., Vie intégrale de sainte Thérése de Lisieux, éd. de Ja Revue des Jeunes, 1925. 6. « Un peu fané » est en surcharge, addition postérieure. 7. Cf. «la Légende de Prakriti» (1932): «On peut se fier a elle [la nature] pour exploiter jusqu’au plus infime détail toutes
les possibilités d’une situation et d’une forme données. Quand par exemple le theme de la palme... » (Pr., p. 963).
|
Aott-Septembre 1927
1419
Page 781.
1. La « Priére sur Sodome » est la premiére des Trois priéres d’ Abraham, publiées par Louis Massignon en 1929, en « tirage réservé hors commerce de cent exemplaires »; écrite en 1925, elle fut communiquée en manuscrit ou lue 4 Claudel par Massignon. — Cf. L. Massignon, Parole donnée, 1962, chap. Iv. 2. Peut-étre Poincaré, pour le probléme des dettes. — La note qui suit, sur Avignon, est un retour en arriére. 3. Voit Conversations dans le Loir-et-Cher, « Samedi» (1928) (Pr., p. 781); le méme rapprochement est fait avec la cathédrale ~ du Mans; voir pour cette notation p. 774. 4. Lina Beillans, 4 Quintin (voir p. 774, n. 3). 5. Nom supprimé. Page 782.
1. Parklike: « Semblable a un patc ». 2. Claudel a intercalé ici, sans la coller, une feuille de papier A en-téte du Taxedo Park sur laquelle il a copié des vers du Songe d’une nuit d’été, V1, v. 12-22: The poet’s eye... supposed a bear. 3. Ulalume, poéme d’Edgar Poe dans lequel est évoqué le « pays d’Auber ». 4. Homme d’affaires américain.
5. Nom d’un building de New York. Page 783. 1. Holy Sonnets, XIV, dernier sixain. Claudel a omis le troisiéme
vets:
Et pourtant je vous aime tendrement et souhaiterais étre aimée de vous, Mais je suis fiancée a votre ennemi, Enlevez-moi, emprisonnez-moi,
car a moins que je ne devienne votre [esclave, jamais je ne serait libre, Et je ne serai jamais chaste a moins que vous ne me ravissier.
2. Rature : jambes. 3. Rature : excitait.
Page 784.
1. Idée que Claudel ne retiendra pas dans « la Légende de Prakriti», mais dans « les Fossiles» (Pr., p. 994) il évoquera cette « association » de la nature au « péché originel ». 2. Génie du chriStianisme, 1, liv. III, chap. ur (CEwores completes,
1420
Cahier VI
Garnier, t. II, p. 65) : « C’est un palais écroulé et rebati avec ses ruines. » 3. Voit Une heure avec..., 5° série, p. 111. 4. Claudel a souligné « anguleuse» et a mis en marge un point d’interrogation et un point d’exclamation. 5. Ces deux textes sont imprimés a la suite dans un journal dont Claudel a collé la coupure. Page 78).
1. Il est longuement
question de cette traduction dans la
correspondance avec Darius Milhaud; elle sera éditée en 1930 a Yale.
Page 786. 1, Ps. XXXIV, 13 : « Ma priére retournait dans mon sein. » 2. Comprendre : un texte du xu® siécle cité par Jubinal; Achille Jubinal (1810-1875) a en effet publié des textes du Moyen Age. L’erreur vient trés certainement de Littré, qui cite fréquemment Jubinal, Sénéfiance de l’_A BC, presque a chaque lettre. Claudel feuillette Littré a la lettre O, c’est la qu’il a trouvé — note précédente — |’étymologie de « ouragan ». Dans cette méme note ooze eSt un mot anglais qui signifie : boue, vase. 3. C'est dans Littré que Claudel a trouvé cette citation, dans Phistorique du mot « cil» ; on y trouve également le proverbe qu’li releve a la suite. 4. C’est dans Littré également que Von trouve |’explication de cette note. « Oranvert » y est cité avec cette définition, comme « otibus»
: chandelle
de résine;
I « épaulard»
eét cité dans
Particle « orque». L’ « onoporde», nom de plante, avec son étymologie : pet d’4ne (voir plus loin, p. 787). « La Rose et Portie » s’inspire d’un texte de Gautier d’ Arras, cité a historique d’« ortie» : « Car feme a prendre, c’est grant chose, Cil prend Portie et cil la rose. » Enfin ob/ata est donné comme étymologie de « oublie ». Gy (Catitemes
Page 787.
1. Le livre de Chesterton, Esquisse d’un Etat sain, a patu en 1926. Pour la réflexion de Claudel, voir Conversations dans le Loir-et-Cher (en particulier Pr., p. 772 et 796 sq.). 2. Pensée disait : « Vintégre hiver » (/e Pére humilié, Th. II,
Pp: 509).
3. Claudel avait d’abord écrit : « a l’explosion ».
Septembre-Odtobre 1927
1421
4. Voir p. 786, pour l’origine de image; pour son utilisation, Conversations dans le Loir-et-Cher, « Mardi» (Pr., p. 750): «le pet
noit sous le pied d’un monstrueux onoporde. » 5. Au-dessus de « église », Claudel a écrit : « le pot a or ». 6. « L’église du sourire. » 7. Paradis, XXXII,
133-135
: « En face de Pierre, tu vois
siéger Anne, si heureuse de contempler sa fille qu’elle ne la quitte point des yeux en chantant Hosannah. » 8. Le Kalevala, ou la Demeure des héros, épopée finlandaise dont les éléments remontent au Moyen Age et ont été recueillis E pat Elias Lonnrot, vets 1830, et publiés en 1835. Claudel a insisté a plusieurs reprises sur cette source; mais la compataison est assez décevante. Page 788. 1. Sonnet VU, To G. A.
W., 1eT vers. Claudel avait d’abord
écrit /ong side. Trad. : « Une nymphe avec un soutire en dessous et un regard en coulisse. » 2. Versets 25-28 :« ... lui qui donne 4 tous la vie et la respiration et toutes choses. I] a fait naitre d’un seul toute la race des hommes, pour habiter sur la face entiére de la terre, ayant fixé des temps précis et les limites de habitation des peuples, afin qu’ils cherchent Dieu, et qu’ils tachent de le toucher et de le trouver, quoiqu’il ne soit pas loin de chacun de nous. Car c’est en lui que nous avons la vie, le mouvement et l’étre. » 3. Claudel s’intéresse beaucoup aux fossiles; voir « les Fossiles » : «... le visage de pierre du Triceratops » (Pr., p. 997). 4. Surcharge depuis : « et des éloges... » Page 789.
1. « Par derriére » (Exode, XX XII], 23). 2. Surcharge : « grasse ». 3. Martianus Capella, écrivain latin du v® siecle, auteur @une encyclopédie, le De nuptiis, dont les deux premiers livres sont intitulés De nuptiis Mercurii et Philologiae (ils racontent le mariage du deus rationis avec Philologie, la plus savante fille de la famille antique). Claudel reprend les termes mémes de cette note dans Conversations dans le Loir-et-Cher, « Mardi»
(1928) (p. 742).
4. Trad. : « Je suis, je suis, je suis poéte, je garde le temple des Muses. » 5. Voir p. 443.
1422
Cahier VI
Page 790.
1. Cette note accompagne une photographie collée au milieu de la page, a gauche.
2. Claudel se rappellera ces « automnes » améticains dans les Vitraux del’ Apocalypse, éctit vers cette époque (voir par exemple
ONG
atmo
Lipase)
3. Voir Cah. Cl. III, p. 88; c'est une des nombreuses difficultés qui s’éléveront a propos du Christophe Colomb. 4. Pour le centenaire de la naissance de Marcelin Berthelot.
5. Il s’agit de Sous le rempart d’ Athénes, composé a la demande de Philippe Berthelot (voir Th. II). 6. Un mot illisible. 7. Pour ’abbé Mary, voir p. 773. Celui-ci avait demandé a Claudel de*trouver en Amérique des bienfaiteurs pout son
ceuyfe. Page 791.
1. Au-dessus de Yvonne Pierryl, Claudel a écrit « morte depuis ». Ces représentations sont données au Théatre de l’uvre dans la mise en scéne de Lugné-Poe (voir Cah. Cl. V, p. 180). Magnat avait participé a la création, en 1912, en jouant le rdle de Pierre de Craon. 2. Verset 12 : « Ce n’est pas contre la chair et le sang que nous avons a lutter, mais contre les principautés et les puissances, contre les dominateurs de ce monde de ténébres, contre les esprits de malice des régions célestes. » 3. C'est peu aprés que Claudel commence son commentaire, Au milieu des vitraux de I’Apocalypse. 4. Apoc., VII, 9 : « Une grande multitude [...] que personne ne pouvait compter. » 5. « Et spirituelles », en surcharge.
Page 792. 1. Edgar Varese, né en 1885. Romain Rolland aurait dessiné d’aprés lui certains traits de son Jean-Christophe. 2. Voir Cah. Cl. IV, p. 180, la lettre de Lugné-Poe.
3. Ambassadeur d’Angleterre 4 Washington. 4. Lire sans doute : « la chambre ».
5. Association fondée en 1783, aprés la guerre de l’Indépendance, par les officiers de ’armée de Washington.
Novembre-Décembre 1927
1423
Page 793.
1. Sainte Mechtilde, religieuse du xr des Révélations.
siécle, qui a laissé
Page 794. 1. Coupure de journal collée; le texte est accompagné d’un croquis dont Claudel a relevé la légende. L’indication finale est de sa main; elle semble étre une référence donnée par l’auteur
de Varticle, plutét que Vindication de la source. Page 79). 1. Claudel reviendra sur ces thémes dans Conversations dans le Loir-et-Cher, « Samedi » (1928) (Pr., p. 778) :«... pour l’Hindou qui meurt, ravi, avec une queue de vache dans la main... » 2. Ce sont les parents de Perceval, ou Parsifal. _ 3. Il s’agit de la messe dite du pape Marcel, que Palestrina dédia 4 Marcel II en 1567. 4. « Délicieux, ravissant. » 5. « L’Arche et la colombe »; voir Pr., p. 38 (novembre 1927), « Religion et poésie ». 6. La correspondance Claudel-Riviére avait été publiée en 1926 chez Plon-Nourrit. Pour Quintin, voir la lettre du 5 juin
1911; c’est 14 que Claudel a vu bien plus tard Lina Beillans. — Sur ces coincidences, recoupements, Mémoires improvisés, p. 31.
appels extérieurs, voir
Page 796.
1. Sans doute s’agit-il du texte publié dans Accompagnements sous le titre « le Regard américain vers la France ». 2. P. L., t. CLX XVII, col. 181-188. Sur le transfert secret du corps d’Abélard, exhumé du prieuré de S. Marcel, au monaéstére du Paraclet, dont Héloise était abbesse, voir sbid., t. CLXXXIX, col. 427; ou V. Cousin, GEwores d’ Abélard, Paris, Durand, 1849, t. I, p. 715.
3. « Religion et poésie » (voir Pr., p. 38); conférence prononcée en anglais, le texte a été traduit ultérieurement par Claudel pour étre publié. 4. Georges Duhamel venait de publier le Voyage a Moscou, Mercure de France, 1927; ily raconte sommaitement au chapitte x11 (p. 98 sq.) sa visite 4 l’Institut Pavlov, « honneur de Leningrad ». 5. Phil., IV, 5 : «
les hommes. »
Que votre modestie soit connue
de tous
1424
Cahier VI
Page 797. 1. Antienne des Vépres : « O Orient [...] et Soleil de Justice, venez et illuminez... » 2. «Une épine de rose sur laquelle S. Francois tenté se roula. » 3. Le texte de Benjamin Constant est imprimé, coupure de journal collée; bien entendu Claudel commet un lapsus : 1904 pour 1804. Dans Védition des Journaux intimes de Constant, Gallimard, 1952, pat Alfred Boulin et Charles Roth, on lit : « 23 janvier 1804. Travaillé peu, pas trop bien. Vu Geethe... irritabilité physique... dégradée » (p. 53). « 12 février... Faust de Goethe... et de tous les gens de sciences... inouie. Je trouve que cela... Candide, étant aussi immoral, aussi aride, aussi desséchant, il y a moins... » (p. 59). 4. Ces lignes sont sur la page suivante, avec une fléche de renvoi. 5. Claudel
fera
allusion
au
jazz dans
Conversations
dans le
Loir-et-Cher, « Samedi» (1928) (Pr., p. 793) : « Tout le travail
en Amérique est une espéce de jazz formidable.» Dans la méme page, il rappelle Pautre détail: «... un pays tellement sutchargé et crépitant d’électricité que lon ne peut toucher un bouton de porte sans étre torpillé. » 6. Il s’agit du pate Briand-Kellog, signé au début de l’année suivante. 7. Verset 4 : Quand mon espoir est défaillant en moi... »; 5: « Tout espoit de m’enfuir m’est dté. »
1928
Page 798.
1. Projet qui sera abandonné (voir Cah. Ci. IIL). 2. Ce discours consetvé se trouve dans les archives de Paul Claudel. A cdté de Herrick, deux majuscules, « M. R.», sans doute les initiales de ses prénoms. 3. XII, 16 : « N’aspirez pas a ce qui est élevé, mais accommodez-vous 4 ce qui est humble. »
Page 799. 1. Virtuose, compositeur et homme politique polonais, né le 6 novembre 1860, mort 4 New York le 29 juin 1941. 2. Conférence non publiée. « Une promenade 4 travers la littérature japonaise » est de 1925 (Pr., p. 1153), « la Poésie francaise et l’Extréme-Orient » de 1937 (ibid., p. 1036).
Janvier-Pévrier 1928
1425
3. Pensées, éd. Brunschwicg, n° 119, p. 385; Claudel a omis la fin de la phrase : « ... qui sont de nature si différente. »
Page 8or. 1. Ce télégramme est daétylographié Claudel n’a pas collée. 2. En
surcharge,
4 une
date
sur
postérieure,
une
feuille que
Claudel
a écrit
au-dessus de la note : « A Nantes. » 3. Caste de parias japonais. 4. M. Allote de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son euvre, Kra, 1928, p. 25. Les « deux petits garcons » sont les deux fréres, Jules et Paul Verne. 5. Agricola, XLVI, 3. Trad.: «La figure de l’Ame est éternelle.» 6. Métamorphoses, 1, 26-29. Dans « Prakriti» (Pr., p. 944), Claudel cite Ovide en épigraphe. Trad. : « La substance ignée et impondérable de la votte céleste s’élanga et se fit une place dans les régions supérieures. L’air est ce qui en approche le plus par sa légéreté et par sa situation; la terre ...». Trad. G. Lafaye, les Belles-Lettres.
Page 802. 1. En rapport avec la note précédente, Claudel note sans doute ce mot avec le sens qu’il prend en fauconnerie : plumes du bout de l’aile d’un oiseau de proie. 2. Discouts consetvé dans les archives de Paul Claudel. 3. Verset 7: « Ne méprtise pas ta propre chair. » 4. Verset 12: « Les déserts séculaires seront rebatis par toi, tu reléveras les fondements des générations anciennes, et tu seras appelé le réparateur des haies et celui qui rétablit les chemins et les rend stirs. » 5. Ovide,
Métamorphoses,
I, 35. Trad.
: « Dieu
commenga
par agglomérer la terre [...] sous la forme d’un globe immense. » 6. Ibid., I, 69-71. Cité dans « la Légende
de Prakriti», n. 1,
p. 953. Trad. : « Dés qu’il eut enfermé tous ces domaines entre des limites immuables,
les étoiles, longtemps
cachées
sous la
masse qui les écrasait, commencérent a resplendir dans toute Vétendue des cieux. » 7. Tradu&tion des Métamorphoses, ibid., 434-437. 8. Gilson, éd. Vrin, 1925. — Voir Po., p. 675, pour ?« Ode jubilaire », et Art poétique, ibid., p. 153: « Rien ne s’achéve sur soi seul; tout est dessiné, aussi bien que du dedans par lui-méme, du dehors part le vide qu’y tracerait absente sa forme, comme chaque trait est commandé par les autres. »
1426
Cahier VI
Page 803.
1. « De plus » est ajouté par Claudel. 2. Gilson cite ce texte de I Senz., x11, unic. 3, concl. en note,
p. 168. La phrase qui précéde la traduit a peu prés. 3. Joseph
Curney
Cannon
(1836-1926),
homme
de
loi
américain, président de la Chambre des Représentants de 1903 a i911. Page 804. 1. Gilson, op. cit., p. 193. 2. Ibid., p. 194. Le texte est : « La sagesse de l’artisan se trahit a la perfe€tion de lordre; or tout ordre suppose un degré inférieur, un degré supérieur et un moyen degré. Si donc ce qu’il peut y avoir de plus bas est la nature purement corporelle, et ce qu’il y a de plus haut la nature purement spirituelle, le moyen degré se composera nécessaitement de l’un et de l’autre. » 3. Ibid., p. 199, citation textuelle. 4. Ibid., p. 201, citation textuelle. 5. Cité tbid., p. 206. In Hexaem, XII, 14. Trad. : « La créature
n’est qu’une représentation de la Sagesse de Dieu et comme une Statue. »
6. Id., ibid. Breviloquium, Wl, 12, 1. Trad. : « Le monde est comme un livte dans lequel brille, est représentée et lue la Trinité créatrice. » 7. Id., p. 207. II Sent., xvi, 1, 2. Trad.: « Etre une image de
Dieu est pour homme non pas un accident, mais plutét sa substance, de méme que pour aucune créature. » 8. Claudel met bout a bout plusieurs citations : Aut... in aliud, p. 209; I Sent., ut, I, unic. 2, ad 1. Trad. : « Ou bien il
s’atréte 4 la beauté de la créature, ou bien par elle il tend vers un autre but. Creaturae possunt..., ibid., en note. Ibid., 3, ad 2. Trad. : « On peut considérer les créatures comme des objets ou comme des signes. Dans le premier cas elles sont au-dessous de homme, dans le second elles sont sur le chemin, non au but, cat elles n’y parviennent pas, mais par elles l’-homme parvient a Dieu, aprés les avoir laissées derriére lui. » Page 80,.
1. Ibid., p. 210. « Puisque Dieu créait Punivers comme un auteur compose un livre, pour manifester sa pensée, il convenait que les principaux degrés d’expression possible y fussent représentés et que par conséquent un degré d’analogie supérieur a celui du vestige et de l’ombre y fat également réalisé. Etre
Mars 1928
1427
Panalogue d’un modeéle dont on porte la ressemblance inscrite dans Ja substance méme de son étre, c’est une maniéte de le représenter. Mais avoir conscience de cette analogie; savoir que, - par ses racines métaphysiques les plus profondes, on est une ressemblance;
comprendte
que la loi qui définit l’étre d’une
créature prédétermine la régle de sa vie; se vouloir de plus en plus conforme au patron sur le modéle duquel on se sait formé, voila un mode de représentation et d’expression bien supérieur a celui du vestige et de l’ombre, et c’est précisément celui de Pimage dont les substances spirituelles constituent le type le _ plus accompli. » 2. Cité en note, ibid., p. 220, De plantatione paradisi, 1. Gilson ajoute : « De la le double livre de |’Ecriture et de la nature. » Cf. « la Catastrophe d’Igitur » (Pr., p. 513) : « Une main sur le Livre des Livres
et lautre
sur l’Univers...»
(texte de 1926).
— Trad. : « De méme que pout ceux qui regatdaient pieusement le Christ, son aspect corporel apparent les conduisait a la connaissance
de sa divinité
cachée,
ainsi ceil de notre
intelligence
est conduit 4 comprendte la vérité de la sagesse divine par des figutes énigmatiques et myéstérieuses. Autrement [invisible sagesse de Dieu ne pourrait nous étre connue, si elle ne res-
semblait a ces choses visibles que nous connaissons et ne nous montrait a travers elles ses traits invisibles que nous ne connaissons pas. » 3. Cf. Art poétique (Po., p. 143) : « L’ancienne [logique] avait le syllogisme
pour
organe,
celle-ci a la métaphore,
le mot
nouveau... »> 4. Voir Du sens figuré de I’Ecriture (O. C., t. XX1). 5. Cité en note, Gilson, p. 268. Trad. : « La lumiére achevant ce qui est intérieur. » 6. Ibid., p. 269 : « Pour [S. Bonaventure] comme pour Robert Grosseteste... qu’on suppose un point lumineux quelconque, il sera capable d’engendrer et de propager instantanément, selon toutes les directions de l’espace, une sphére lumineuse dont il
sera le centre et d’un diamétre proportionnel a son intensité... » — Sur Robert Grosseteste (1175-1253), traduéteur anglais de l’Ethique 4 Nicomaque, voit E. Gilson, /a Philosophie au Moyen Age, Payot, 1930, t. II, p. 46 sq. Page 806. 1. Cité ibid., p. 290. Trad. : « La terre est pleine de semences,
non seulement de plantes, mais d’animaux. » 2. « La ville de l’ennui terrible. » 3. XIII, 55 : « Voici que l’Ange de Dieu, ayant regu son arrét, te coupeta en deux. »
1428
Cahier VI
4. Ed. Koshiba, Tokyo, 1927, trois volumes reliés a la japonaise et réunis dans un emboitage de toile bleu. 5. Voir dans Jammes les lettres 282-296 (p. 316-326) et la note d’André Blanchet. 6. Gallimard, 1928. Les deux premiers volumes avaient paru en 1926. Claudel écrit 4 Frizeau le 26 mars : « Avez-vous Iu les deux derniers tomes de la Correspondance de Riviere et de Fournier? Que c’est beau! sauf les passages ot ils parlent de moi et qui m’ont pas mal géné et agacé. » 7. «... aucune prophétie de VEcriture ne s’explique par une interprétation particuliére. » Page 807.
1. « Dans lesquelles il y a certains passages difficiles a comprendre, dont les hommes ignorants et mal affermis tordent le sens, comme ils le font des autres Ecritures, pour leur propre ruine. » 2. Tout ce passage est largement utilisé dans Conversations dans le Loir-et-Cher, « Samedi» (voit Pr., p. 784 sq.). En particulier : « GREGOIRE. L’attention a la racine. — SAINT-MAURICE. C’est pour cela que le Bouddha se regarde le nombril? — GREGOIRE. C’est pour cela que je me suis fait antiquaire. » Suit un développement sur les jades et les vases chinois. — Voir également « Aegti Somnia » (Pr., p. 892), sur le vide et le vase
(1937). Page 808.
1. L’on ne sait s'il faut lire Darius Milhaud; l’expression étonnerait. La note du moins se rapporte aux démélés avec Reinhardt 4 propos de Christophe Colomb. Claudel fait peut-étre allusion a la question posée pat Milhaud (Cah. C/. III, p. 87) : quels moyens Reinhardt mettra-t-il 4 sa disposition ?envisage-t-il
de signer un contrat? Finalement, Milhaud écrita sa partition sans se soucier de Reinhardt. 2. Citation faussée de Rimbaud, Une Saison en enfer, « Adieu »:
« ... Si nous sommes engagés a la découverte de la clarté divine. » Claudel commettait déja la méme erreur, bien significative, dans une lettre 4 Gide en 1911 (Gide, p. 188). 3. Claudel fait allusion 4 cette lettre de Benoist-Méchin en écrivant 4 Milhaud le 24 avril : « Benoist-Méchin m’a écrit une lettre enthousiaste de l’audition que vous lui avez donnée. »
Abril-Mai 1928
1429
Page 809.
1, Claudel se souviendra de ce voyage; lorsqu’il reprendra I’Echange en 1952, il le situera dans ce décor. 2. Marin écossais qui participa 4 la guerre d’Indépendance
du cété des Américains. 3. Probablement l’amiral d’Estaing, qui commandait une flotte francaise au cours de la méme guerre. 4. Huguenot francais qui au xvi siécle fut envoyé par ses coreligionnaites pour étudier les possibilités d’installation d’une colonie en Amérique. _5. Les « moqueuts », espéece de merle. 6. Les habitants de l’Acadie (Canada) d’origine frangaise quittérent leur pays lors de sa cession a l’Angleterre au xvuire siécle pour venir s’installer en Louisiane. 7. Héroine d’un poéme de Longfellow, épisode de l’émigration et de la déportation des Acadiens.
Page 810. 1. Plus exactement
Lafite. Nicolas Lafite, corsaire francais,
exilé 4 La Nouvelle-Orléans, participa 4 la guerre d’Indépendance.
2. Toujours a propos du Christophe Colomb. Page 811. 1. Eugéne Meyer, direfteur du Washington Post. Claudel se liera
dune grande amitié avec Agnés E. Meyer (voir p. 843, n. 4). — Il évoque cette visite dans Conversations dans le Loir-et-Cher,
« Samedi» (Pr., p. 787): «... une chasse avec un mélange de pourpres juxtaposées... et cet unique buffle noir qui fournissait
a Veil la récréation nécessaite...» (1928). Il dit toutefois : « J’ai vu un de ces tapis l’année derniére... » alors que la conversation est datée du 16 mats 1928; il faut donc admettre ou une erreur de date sur le manuscrit ou une reprise postérieure importante. 2. Représentations données dans une mise en scéne de Gémier; la premiére avait eu lieu fin mars.
Page 812. 1. Notes utilisées également dans « Samedi » des Conversations dans Je Loir-et-Cher (Pr., p. 792-793; voit p. 811, n. 1): «... le Niagara a pris un aspect nettement industriel. C’est un engin au milieu des autres... »
2. Article paru dans /e Figaro du 29 avril 1928. La datation
des notes du Journal est donc bien exaéte.
1430
Cahier VI
3. Poéme publié sous le titre « Pauline Jaricot » dans Poésies diverses (Po., p. 864). 4. Retour en arriére, la note suivante étant du 13 mai, d’aprés Vindication « 5° dimanche aprés Paques » (Paques était le 8 avril cette année-la). Page 813.
1. « Celui, au contraite, qui se penche attentivement sur la Loi parfaite, la Loi de liberté, et qui s’attache 4 elle, celui qui ne lécoute pas distraitement, mais la fait passer dans sa vie, celui-la trouvera son bonheur a la pratiquer.» La fin de la citation est reprise du début de lépitre, I, 22 : « Mettez en pratique la parole de Dieu et ne vous contentez pas de l’écouter. » 2. L’évangile du méme dimanche, S. Jean, chap. xvi : « Si vous demandez quelque chose au Pére en mon nom, il vous Paccordera. » 3. Réflexion évidemment inspirée par le texte de S. Jacques. 4. Sanctuaire. 5. InStauratio magna, T° partie, De Dignitate scientiarum libri novem, liv. 1, chap. v, § 1.
et augmentis
Page 814. 1. Voir Conversations dans le Loir-et-Cher, « Samedi» (Pr., p. 792) : « [L’Amérique] est vide. L’intérieur est creux avec les
Lacs et cette énorme dépression du Mississipi ». 2. Voir p. 811. Claudel reviendra sur ce théme. En fait les ressemblances entre le roman de Balzac et /’O/age sont vraiment tres lointaines. 3. Il faut sans doute lite : « 20 mai.» Page 8ry. 1. Cant., Il, 9: « Regardant travers les treillis. »
par les fenétres, observant
2. Julien Lanoé, Vacances, Grasset, « les Amis verts », 1928, p. 58.
a
des Cahiers
3. Ibid., p. 60 : « Nos actions sont comme des bouts-rimés que chacun fait rapporter 4 ce quil lui plait. La Rochefoucauld n’a tien écrit de plus terrible (c’est-a-dite de plus exaé). A quoi riment donc tous nos efforts?» (La Rochefoucauld, Maximes, 382; rétablir : /es). 4. Lire sans doute Eve Francis et Charles Lacoste; ce dernier était un peintre ami de Jammes (voir Cah. C/. III, p. 71 et 286; Jammes, p. 118).
Mai- Juin 1928
1431
5. Jean, XIV, 18 : « Je ne vous laisserai pas orphelins. Je viendrai 4 vous. » — Pour la seconde partie du texte, rétablir : _ Qui autem diligit me, diligetur a patre meo; et ego diligam eum et _manifestabo ei meipsum: « Celui qui m’aime sera aimé de mon pere, et je Vaimerai aussi, et je me manifesterai a lui. » 6. Jean, XIV, 26: « [L’Esprit saint] vous rappellera tout ce que je vous ai dit. » Claudel joue sur les sens de suggere/. Page 816.
. Voir p. 774. Claudel écrivait alors « Lina Beillans ». . L’ Art romantique, « Théophile Gautier », Pléiade, p. 1043. . La bouche; svile, le sourire. . Claudel a écrit « mai». . Discours conservé dans les archives MM DN RW
de Paul Claudel.
Page 817. v1. Coupure de journal collée. Il s’agit de Védition publiée en 1928 par les éditions Excelsior. 2. Voir « Mort de Judas» (Pr., p. 909): «... ma dépouille éviscérée. » 3. Claudel a écrit en surcharge, a une date postérieure au-dessus de « sans vent »: « protégé ». Page 818.
1. Hymne de la féte de S. Jean-Baptiste : « Mais sitét né, tu lui rendis l’organe de sa voix perdue. » 2. Jérémie, I, 6: « Je répondis a a a, Seigneur Dieu, regarde, je ne sais pas parler, je ne suis qu'un enfant. Et le Seigneur reprit : “Ne dis pas que tu es un enfant, car tu itas partout ot je tenverrai; et tout ce que je t’indiquerai, tu le répéteras. Sois sans ctainte en leur présence, car je suis avec toi pour te protéger’. Ainsi parla le Seigneur. Puis le Seigneur étendit la main, me toucha la bouche et me dit : “Voici que je place mes paroles dans ta bouche : je t’établis aujourd’hui sur les nations et sut les royaumes, pour atracher et détruire, pour disperser et renverser, pour batir et planter’’. » 3. Ethique, I, théoréme 43, scholie, fin du paragraphe 1 : « Le vrai se révéle soi-méme. » Page 819. 1. Voir des réflexions proches, p. 877. 2. Idée utilisée dans « la Légende de Prakriti ».
1432
Cahier VI
3. A propos des dettes frangaises 4 l’égard de l Amérique. 4. Loss and gain, The Story of a convert, de John Henry Newman, Londres, Burns and Oates, 1881, p. 97-98. Claudel extrait quelques phrases de la conversation entre Charles Reding, Mary et Mr. Malcolm, Ie partie, chap. xz. Trad. : « Les parfums sont plus intelle€tuels que les autres sensations — Ls ont la longueur sans la largeur — Ils sont sans forme, comme les Anges — Les parfums sont complets en eux-mémes, sans étre composés de patties — Songez combien la senteur d’une rose différe de celle d’un ceillet, etc. Tous ces parfums sont parfaitement distinéts
un
de Vautre,
et sui generis;
jamais
de confusion
possible; pourtant chacun est communiqué a la perception en un instant. Les regards embrassent un grand espace, un mot est une succession de sons; mais les parfums sont immédiatement
spécifiés et complets, quoique indivisibles. Peut-on dissocier un patfum? Ils n’ont besoin ni de temps ni d’espace : ainsi ils sont immatériels ou spirituels. » Page 820. 1. « Lucioles. » 2. Surcharge depuis « Derriére... ». 3. Le jugement sur Bismarck sera tout autre dans les ouvtages exégétiques, ot le Chancelier sera souvent assimilé 4 PAntéchrist (O. C., t. XXV, p. 64, Paul Claudel interroge l’Apocalypse). —En revanche, dans «l’Année 1912» (article de 1936) (Cah. Cl. IV, p. 242), on retrouve le jugement du diplomate : « Une admiration sans bornes pour le génie, le jugement infaillible, la lucidité, Vinformation immense, la virtuosité magistrale de ce grand homme qui fut certainement le plus
rematquable diplomate que |’Histoire ait jamais contempleé. » Sur
ces
contradictions,
voir
Pierre
Brunel,
« Der
Krieg »,
les Lettres modernes, Claudel 4, 1967/1. Page 821. 1. Voir la correspondance avec Jammes et Frizeau (Jammes, Pp. 315-324), jusqu’a la dissolution de la « Coopétative de priéres». 2. Marc, VIII, 2 : « Car voila trois jouts qu’ils sont avec moi.» 3. Sur «laffreuse nuit de la Sexagésime a Fou-tchéou », voir p. 24, n. 6. Pour ces poémes, brilés en 1923 4 Tokyo, voit p. 606. Claudel a ajouté aprés coup, en travers de la page, sans que l’on sache s’ils appartenaient 4 ces poémes, deux vers : Et je jetine jusqu’a Paques le caréme
Mais ce n’est pas demain, c’et aujourd’ hui méme.
Juillet- Aout 1928
1433
Page 822.
1. La signature aura lieu un peu plus tard (voir p. 826). 2. Claudel reprendra cet « idéogramme » dans « l’Harmonie imitative » (1933) (Pr., p. 103). 3. Jean de Mesnace, juif converti, entrera dans lordre de S. Dominique;
il écrira Quand
Israél
aime
Dieu,
Plon, «le
Roseau d’or », 1931, livre pour lequel Claudel aura une grand admiration (voir Cah. C/. II, p. 193). . Page 823.
1. Verset 2 : « Dieu s’est fait connaitre en Judée; son nom est grand en Israél. » 2. Ps. LXXX, 11 : « Elargis ta bouche et je la remplirai. » 3. Il y a peut-étre ici une téminiscence de Rimbaud, Une Saison en enfer, « Nuit de Venfer » : « ... des tresses brunes au flanc dune vague d’émetraude. » 4. Depuis « Quelqu’un » est une addition postérieure. Page $24.
1. Quelques lignes supprimées, écrites par Marie Claudel la veille de son mariage. 2. Claudel a voulu écrire « frére de la mére du marié». Page 82). 1. Paul Perrin, Vainé des neuf enfants de Gabriel Perrin, _ avocat, frére de l’architete. 2. Sans doute eét-ce la lettre 83, Cab. C/. III, p. 100, datée
@aoit 1928. 3. Géorgiques, 1, 359. Trad. : « Et dans les bois le grondement ne cesse de grandir. » Trad. H. Geelzer, les Belles Lettres. 4. Christ in the Church, A volume of religious essays, by the very tev. Monsignor Robert Hugh Benson, Longmans, Green ' and Co., London, 1912. L’indication (infra) de la page 133 permet de penser que Claudel a lu le livre dans cette édition. | Une traduétion francaise a paru en 1928, Paris, Perrin (trad. Thellier et Paul Deron) : « Il n’est a la mesure ni du ciel ni de la | terre, c’est pourquoi il est suspendu entre les deux. » 5. Ibid., le partie, chap. m1, Judas, éd. frangaise, p. 173. « Comme tout soldat porte dans son sac un baton de maréchal, ainsi tout chrétien porte sur ses lévres la possibilité d'un baiser de Judas. » 6. Ibid., chap. tv, Caiphe, éd. frangaise, p. 177. Cf. Chesterton,
la Sphere et la Croix.
« Le monde
est un
globe, le symbole
1434
Cahier VI
méme de la complétude et de la suffisance; il ne suggére rien au-dela de lui-méme, il ne peut s’étendte indéfiniment sans éclater. Mais la Croix est le symbole de I’expansion absolument sans limites; elle n’est jamais satisfaite; elle est tendue
a tout
jamais vers quatre points qui s’éloignent indéfiniment. » Page 826.
1. En surcharge : « relaye ». 2. Rencontre 4 noter, car la derniére lettre de la correspondance avec Lugné-Poe, Cah. Cl. V, eSt de juin 1928; Claudel y disait son regret de ne pouvoir confier au metteur en scéne le Christophe Colomb. 3. Voir p. 832 le développement de cette idée, projet avorté d’une quatfiéme piéce faisant suite 4 la « Trilogie », et en note les explications de Claudel. 4. Ministre allemand des Affaires étrangéres; signature du pacte multilatéral entre la France et l’Allemagne (voir p. 822). 5. « Choqués » est en surcharge. Page 827. 1. Léger était chef de cabinet de Briand. — En haut de cette page Claudel a collé une photographie : « Ma fille Chouchette le 7 aoat », jour de son mariage.
2. Frangois Porché et sa femme. 3. Trad. : « Les Grecs surtout, pout qui la beauté d’un midi d’été passait facilement au terrible : c’était ’heure ot ils “voyaient les nymphes”’, et ot le ricanement de Pan hérissait ses cheveux et échauffait son sang » (Pére Martindale, Vie de R.-H. Benson). 4. Gal., V, 16 : « Marchez selon l’esprit. »
5. Sut cette page photogtaphie collée avec cette légende imprimée : « Chaleurs d’été aux Etats-Unis, la plage de Coney Island envahie par les baigneuts le 14 juillet », et de la main de Claudel : « Illustration de la derniére Conversation dans le Loir-et-Cher. Un peuple va se laver dans Océan.» Voir « Samedi » (Pr., p. 805): «... ces masses d’hommes et de femmes nus chaque été sans savoir ce qu’ils font, qui vont se purifier dans l’Océan. » 6. Premier verset du Psaume CIX, aux vépres du dimanche : « Le Seigneur a dit 4 mon Seigneur. » Page 828.
1. Claudel aimait cette ti (voir p. 829). Voir aussi « Note sur l’Art chrétien » (1932) : « A partir du xrxé siécle, les édifices
Aout-Oltobre 1928 religieux prennent un caraétére concordataire. Ce sont batiments affeétés 4 un service public... » (Pr., p. 132).
1435 des
2. Cf. da Ville (Th. L, p. 312) : « La contenance, la barbe, le
feu de l’ceil décélent / Saturne, patron des ingénieurs et des lieux plantés d’arbres. » 3. Au-dessus de « tuée », Claudel a écrit :« blessée seulement ». — Voir dans Stendhal, Romans et nouvelles, Pléiade, I, p. 715-730, le compte rendu du procés d’Antoine Berthet qui avait blessé d’un coup de pistolet Mme Michoud dans l’église de Brangues. — Claudel reviendra sur cette histoire dans «le Drame de _ Brangues » (1942), publié en appendice a Seigneur, apprenez-nous ~a prier (O. C., t. XXIII, p. 63). Page 829. 1. CEwvres oratoires, éd. Lebatq, Hachette, 1923, t. VI, p. 73-74. Il s’agit du sermon prononcé pat Bossuet devant le Roi a Saint-Germain le jour de Paques 1681. 2. Vraisemblablement Benoist-Méchin. ' 3, Phrase en surcharge.
4. Description reprise textuellement pour certaines phrases dans les Vitraux del’ Apocalypse (O. C., t. XXVI, p. 108).
Page 830. 1. Claudel fera allusion 4 ce peintre dans « Morestel » (Pr.,
Pp. 1337):
2. Voit p. 548, n. 5.
Page 831.
1. Coupute de quelques lignes, 4 caractére familial. 2. Evangile et épitre du 19@ dimanche aprés la Pentecdte. L’épitre est tirée de Eph., IV, 23 : « Il faut... revétir Phomme nouveau. » — Claudel a déja en 1925 ébauché un oratorio, «la Parabole du Festin»; il y reviendra plus tard avec /e Festin de la Sagesse (voir Th, Il, p. 1189 sq.). | Page 832.
. « Lundi » est en surcharge. . Deux mots illisibles : « les (2) ». . Voir TA. I, p. 493. . Cf. Mémoires, p. 249 : « Jai cru un moment [...] j’étais a la DN RW Guadeloupe, a ce moment-la, je me rappelle, une nuit de tempéte effroyable, des torrents d’eau qui tombaient [...] il
1436
Cahier VI
m’a semblé saisir une possibilité d’une quatriéme piéce qui terminerait la Trilogie, et quand le jour est venu, ¢a s‘était dissipé, je suis resté court.» — Voir p. 826 : comme Claudel le note ici, il avait déja réfléchi 4 cette piéce a Brangues. Page 833.
1. En face de cette ligne, Claudel a écrit sur la page en face : « Ce lit vient de S. Barthélemy et a servi au roi de Suéde. » 2. Tous ces noms : Le Gosier, Sainte-Anne, Le Moule, les Habitants, le Baillif, Trois-Riviéres, Le Lamentin, Morne a l’Eau, Les Abymes, sont ceux de villes ou de lieux de la Guadeloupe.
Page 834.
~
1. Rature : S. Paul.
Page 835. 1. Un mot illisible.
Page 836. 1. Depuis « Mis... », surcharge; ajouté sur la page suivante. 2. Note écrite en marge d’une photographie de « Chief Jammes Coffey »; pour le renvoi, voir p. 766, n. 6. Page 837.
1. The complete works of Thomas Lowell Beddoes, Londres, 1929, p. 328. — Claudel a traduit ce poéme le 18 septembre 1930 (Po., p. 323). Voici cette traduction : « A une grappe de raisin en train de mitrir 4 ma fenétre « Grappes de grains gonflées, elles se pressent — et s’offrent toutes chaudes aux lévres — ainsi que des ceufs d’or dans un nid de cristal —- couvés sous le cceur léger de Zéphyr — tout au long
de la patiente saison. — Ou dirai-je larmes d’ambre de ces vierges éplorées — qui lamentent un frére déshérité — suspendues entremélées aux boucles éclatantes — de ce gracieux arbuste dont la vrille en zigzag — les entrelace l'une a l’autre — Ou silencieux essaims d’abeilles jaunes — dont le corsage de velours s’entr’ouvte — aux bouffées odorantes de cette brise qui colle — assoupies 4 la branche ensommeillée — pendant que la joue de septembre s’empourpre. — Ou tayons de soleil liquide, capturés dans le réseau — de quelque fadette friponne, — pareils a de petites lampes mimiques — disposées en fraiches
Novembre 1928
1437
guirlandes, globes d’eau, — pour jouer au clair de lune — Bulles de lumiére toutes gonflées de délices! — Balles de jus brillant, dont la brise s’amuse et jongle! — J’étudie avec émerveillement — votre embonpoint qui s’enrichit de petites taches, — colorées pat le rude regard du soleil en extase — et bientét j’espére vous voir de toutes parts — fuser en jets de feu! — Alors, tout enfumées d’une ombre mystique, — nous vous tecueillerons dans notre coupe civilisée, — 6 netar dans nos veines, 6 parfum de la pensée, — qui exhale jusqu’A nos joues animées pat le plaisir — un souffle impalpable. » 2. En haut de la page, photographie collée de Reine Claudel. 3. Claudel songe sans doute déja a son commentaire de PApocalypse; des assimilations de ce genre y seront trés fréquentes. 4. Romains, X, 17 : « On entend par la parole du Christ. » La suite semble étre une glose : « Nous n’entendons pas la parole, c’est la parole qui nous fait entendre. » 5. Ps. L, r1 : « Détournez votre face de mes péchés. » 1 6. Jean, XIX, 30; rétablit : ¢radidit spiritum: « ayant incliné la téte il rendit Pesprit ». 7. Ps. L, 14 : « Affermissez-moi pat un esprit généreux. »
Page 838. x. Rom., XIII, 11 : « Le salut est plus prés de nous [qu’a VPheure ot nous avons commencé de croite]. » — Luc, XXI, 28:
« Votre délivrance approche. » 2. Luc, tbid., 25 : « Les peuples seront terrifiés par le fracas de la mer en furie. » 3. Ici un signe qui parait renvoyer 4a la troisiéme note de la page suivante. 4. Luc, ibid.: « Le courts des astres seta bouleversé. » Tout ce texte est un commentaire de l’évangile du 1¢7 dimanche de Avent. 5. « Jésus ptit cette comparaison : Voyez le figuier et les autres atbres. Quand se forment leurs fruits vous savez que l’été approche. Eh bien, lorsque vous vertrez ces événements se ptoduire, sachez que le Royaume de Dieu est proche. » 6. Claudel teprendra cette explication dans Au milieu des hg deI’Apocalypse (O. C., t. X XVI, p. 19). 7. « Tous ceux qui comptent sut ta venue ne seront pas décus. » 8. « La Vérité est grande et elle l’emporteta. » Apoc., III, 20 :
« Voici, je me tiens a la porte et je frappe.» Claudel a déja commenté ce texte dans une lettre 4 l’abbé Totsuka, en 1922 (O. C., XV, p. 264).
1438
Cahier VI
Page 839.
1. Claudel lit le tome VII de Histoire littéraire du sentiment religieux, «1a Métaphysique des saints», Bloud et Gay, 1928; le chapitre 111 est intitulé « Frangois de Sales et Pierre de Bétulle : de la “fine pointe” aux “états” ». — Au lieu d’écrire « cceur », Claudel a dessiné un coeur,
2. XVII, 15 : « Les eaux [que tu as vues...] sont des peuples, des nations et des langues.» P. 76 du manuscrit, le renvoi est fait a Pastérisque; voit ici p. 838. Page 840. 1. Coupure de journal collée; les notes précédentes page 77 sont en marge de cette coupure. — Trad.:
de la
« Sayonara, Diplomate-Poete
« Avec regret et tristesse le peuple du Japon a fait “‘sayonara”’ [ses adieux] 4 S. E. M. Paul Claudel, ambassadeur de France dans notre pays, qui quittera prochainement nos rivages pour Washington, son nouveau poste diplomatique. — L’ambassadeur Claudel est connu du peuple japonais comme le « Shijin-Taishi » ou le « Diplomate-Poéte », et il a plus d’amis parmi les artistes, musiciens et écrivains japonais qu’aucun autre étranger vivant ou mott n’en a jamais eu, sans méme excepter le regretté Koisumi
Yagumo, qui en Occident est connu sous le nom de Lafcadio Hearn. Son génie littéraire et artistique lui a permis de pénétrer plus profondément dans les recoins cachés de la vie et de l’art du Japon qu’aucun homme de |’Ouest pourrait jamais espérer le faire, et le résultat de ses recherches et de ses études a enrichi la vie et l’art de ’Occident et ravivé notre propre intérét pour Part et la musique de Pancien Japon. — Sa création littéraire la Femme et son ombre restera longtemps dans nos mémoites aprés son départ de notre pays. L’influence qu’il a exercée sur le monde littéraire du Japon répandra sa lumiére pendant de longues années.
« Le Diplomate-Poete
a été lun des interprétes les plus
pénétrants du Japon et de la vie japonaise aprés la mort de Lafcadio Hearn. D’une certaine facgon il a représenté l’Occident et la civilisation occidentale plutét que son propre pays. Non seulement il a rapproché la culture de Ouest et celle de |’Est, mais il a encore enrichi notte propre civilisation par sa grande contribution 4 notre univers artistique et littéraire. « Sincérement et affeCtueusement, nous lui disons bon voyage pour sa traversée du Pacifique ot son bateau le ménera 4 un poste plus important et aux responsabilités plus étendues. »
e
Décembre 1928
1439
2. I Cor., v1, 17: « Celui qui s’unit au Seigneur est un méme esprit avec lui. » 3. Jean, XIV, 23 : « Nous ferons chez lui notre demeutre. » Page 841. 1. Le P. Claude Séguenot, oratorien, a publié en 1634 un _ petit livre intitulé Conduite d’oraison pour les dmes qui n’y ont pas facilité (peut-étre d’aprés des manuscrits de Condren), Les textes cités sont dans Bremond, ibid., p. 119-120,
124, 129, 131, 138.
~ 2. Idée développée dans Au milieu des vitraux de 1’Apocalypse (0. C., t. XXVI, p. 20) : « Si vraiment il fallait prendre ce texte a la lettre et qu’il n’y avait plus de temps, alors il n’y aurait pas non plus d’espace puisque l’espace ne peut s’apprécier que par le temps que nous mettons 4 le parcourir. » 3. J.-B. Noulleau (1604-1672), apud Bremond, sbid., p. 197265.
Page 842.
1. Ibid., p. 251. Ce texte est relevé en haut de la page, comme si Claudel Vavait copié antérieurement. Le texte qui précéde, depuis « ineffable », est en bas de la méme page. 2. Paul Léautaud, Dialogues, Montherlant, « Epilogue aux Fontaines du desir». 3. Cf. Lettre 4 Milhaud, Cas. C/. II, p.112:« Je suis tellement dégoité de la N.R.F., qui est devenue une maison carrément pornographique, que je me demande si je ne vais pas réaliser
dorénavant mes ceuvres, pour échapper au contrat, sous forme allemande ou anglaise. » 4. La Chute d’un ange, 3° vision, v. 21-22. Rétablir : « Et les oiseaux privés dont... » Le vers de Delille est cité dans « l’Harmonie imitative» (Pr., p. 104), en méme temps que celui de Lamartine (texte de 1933). 5. Voir Cah. C/. IIL, p. 112: « J’ai trouvé ici un jeune peintre francais qui travaille depuis huit ans au Mexique ou il est
employé
dans
les fouilles
archéologiques.
Il s’appelle
Jean
Charlot et a vraiment beaucoup de talent. » Claudel écrita en juin 1931 un texte pour servir de préface 4 un catalogue d’exposition de Jean Charlot (voir Pr., p. 296). Il semble que Charlot
soit linterlocuteur introduit sur la fin des Vitraux de 1’ Apocalypse (voit O. C., t. XX VI,p.244). Il illustrera l’édition anglaise de Christophe Colomb.
1440
Cahier VI
Page 843. 1. Jean Aumont, /e Vigneron mystique de Montmorency (voit Beton! op. cit., t. VII, p. 358) : « A chaque aéte, faites une petite pause, pour vous laisser pénétrer de l’esprit de la vertu. » « Pauses d’amortissement », dit Bremond.
En fait, ces textes,
inspirés de Jean Aumont, sont extraits de /’Ecole spirituelle et de perfection, petit catéchisme du P. Victorin, récollet. 2. 22: « ll étend les cieux comme un rideau. » 3. XLI, 1: « Que les iles se taisent devant moi. » 4. Premiére mention d’Agnés Meyer. Femme d’Eugéne Meyer, directeur du Washington Post, Claudel Pavait rencontrée aupatavant, mais c’est en 1929 qu’elle devint pour lui une grande amie. Voir dans Positions (O. C., XV, p. 213 sq.), les Cing lettres a Mme A. M.; voir surtout, dans Cahiers Canadiens Claudel II,
« Claudel et Amérique», l’article d’Eugéne Roberto, « Une amitié washingtonienne », Des fragments de la correspondance inédite y sont publiés. 5. Rappelons que le troisiéme et le quatriéme livre d’ BES
figurent dans de nombreuses éditions de la Vulgate, in fine, mais ne sont pas classés dans les livres canoniques. Trad. : « L’arbre de vie aura pour eux l’odeur d’un parfum. » — « Et tu as donné a Adam un corps mottel.» — « Et ta gloire a passé quatre portes, le feu, le tremblement de terre et lesprit et le froid... » (Ces deux textes sont extraits du chapitre m1.) — « Cette femme que tu as vue, c’est Sion que tu verras maintenant comme une cité construite. »
6. Nom illisible. Page 844. 1. Pierre Chardon, dominicain, auteur de /a Croix de Jésus; voit Bremond, op. cit., t. VIII, p. 34, qui cite ce texte comme typique du « faux brillant dans toute sa splendeur métallique » : « Du simili. Rien ne prouve que Judas ait eu ce doux monopole. Tout nous incline et 4 désirer et 4 croire le contraire. » Ce n’est
certainement pas l’opinion de Claudel (voir « Mort de Judas »). —
Sous « auta», une rature : a. 2. Du néant 2 Dieu, Perrin, 5° éd., 1930, p. 97 (la 1?e édition est de 1921) : « L’adoration monte comme la fumée et retombe comme la foudre. Elle embrasse, elle dévore, ed/e est universelle, parce quelle est centrale» (souligné dans le texte), 3. Ibid., p. 96 : « Celui qui refuse d’aimer quelqu’un refuse d’aimer Dieu en celui-la. »
4. « D’un resserrement de l’espace vers le haut. » 5. Ps. CXLVII, 17: « Il lance sa glace par morceaux », traduit
Fillion. Claudel conserve l’image de buccellas.
Janvier-Février 1929
1441
r929
; Page 845. 1. Luc, I, 10: « Voici que je vous annonce une grande joie. »
2. Apud Bremond, ibid., p. 34. _ 3. lbid., p. 47. Claudel a omis « et de longueur ». Allusion a Ephés., III, 18.
~ Page 846. We Ch. OC, XVilllp. 27250et) br, ps 14092 « Gest. Claudel qui est un barbare, avec une riche imagination et une espéce de génie, mais la “‘matiére’’ de ses versets est laide, au sens des peintres, et il n’a pas le son frangais; on le dirait toujours traduit de Pongro-finnois ou du tartare-mandchou. » Voir Pr., ibid., et O. C., XVIII, la réponse de Claudel, publiée dans /es Nouvelles
littéraires du 19 février. 2, Ex., II, 1: « Au fond du désert. » 3. Gen., III, 9 : « Adam, ot es-tu? » 4. Claudel cite de mémoirte;le texte est « Ob sont les enfants ?»,
la Maison de Claudine, chap. 1°". — Toute la seconde partie de la note semble a peine postérieute, de l’écriture de la note suivante. 5. « La souris ne se fie pas a une seule cachette. » Page 847.
1. 2. dans 3.
« Pour que réconfortés par vos sacrements divins. » A la Chambre de commetce francaise, discours conservé les archives de Paul Claudel. La parenthese a été ajoutée.
Page 848.
1. Claudel cite Hans André dans les Vitraux de 1’Apocalypse (OS Gots XLVI p47 307): 2. LVIII, 6 : « Décharge les fardeaux accablants. »
3. Edition publiée par la N.R.F., plus complete que celle de 1927 aux éditions Excelsior. 4. Voit p. 700, n. 5.
5. Rature : Plus d’espérance que de lune. 6. Claudel cite de mémoire. Si « renardiens » qu’ils soient, ces mots ne pataissent pas avoir été écrits textuellement J. Renard.
par
1442
Cahier VI
Page 849.
1. Robert Casadesus, né a Paris en 1899, pianiste et compositeur. 2. « Moderne » est en surcharge. Léon-Paul Fargue (1876-
1947) publiait 4 cette époque des poémes dans la revue Commerce, qu'il dirigeait avec Paul Valéry et Valery Larbaud. Claudel avait écrit en hommage a Fargue Nascuntur poetae, en 1927; il publiera en 1947 /e Maitre du tumulte 4 la mort de Fargue; ce dernier texte est proche de ces notes. Les deux sont repris dans Pr., p. 591. 3. Commentaire de Gen., XX VII, épitre du samedi de la deuxiéme semaine de Caréme. On lit également ce texte a Voffice du 2€ dimanche de Caréme, avec un commentaire S. Augustin. 4. Gen, XXV, 30: « ce mets rouge».
de
Page 850.
1. «Comment as-tu pu trouver si t6t du gibier? — Dieu a voulu que se présente tout de suite devant moi ce que je désirais. » 2. « Viens ici que je te touche, mon fils. — La voix est certainement la voix de Jacob, mais les mains sont les mains d’Esati. — C’est toi, mon fils, Esaii? —
C’est moi. »
3. Jean, XVIII, 4-5 : « Qui cherchez-vous? — Jésus de Nazareth. — C’est moi. » Ce n’est pas 4 Caiphe que Jésus répond,
mais aux soldats qui viennent l’arréter. 4. Rétablir : ecce odor filii mei sicut odor agri pleni: « Voici VPodeur de mon fils, pareille 4 l’odeur d’un champ riche. » 5. « Tu trouveras ta bénédiftion dans une terre féconde et dans une pluie qui descend du ciel. » 6. Claudel reprendra l’essentiel du commentaire ébauché ici dans Présence et Prophétie (O. C., XX, p. 244). Page 851.
1. Ce peut étre comme pour Une ténébreuse affaire, de Balzac, un cas de mémoire inconsciente. Claudel avait lu sans doute une notice sur le P. Ignace de Azévédo et ses compagnons mattyrs (féte liturgique dans la Compagnie de Jésus le 15 juillet). 2. Coupure de journal collée. C’est un article de Léo Larguier, « charmant poéte » (Pr., 95) qui conduita Claudel 4 lire de Piis, pour I’ « Harmonie imitative ». 3. Dessins utilisés dans l’édition anglaise (voir p. 876). 4. Ici Claudel a collé une photographie représentant un prétre enseignant le catéchisme a des enfants chinois; de sa main, il a
Mars-Abvril 1929
1443
écrit 4 une date postérieure : « Ce prétre est le P. Caravaggio assassiné pat les brigands en février 1930. » 5. « La forme premieére de I’art. » 6. La fin du nom est illisible. Page 852.
1. Cf. « Mort de Judas » (Pr., p. 905). 2. Rature : sait. 3. Depuis Sweep... ajouté avec un signe de renvoi, aprés la ~~ note du 26 mats.
4. Il existe dans les archives de Claudel un texte de quatre pages « Sur la mort du Maréchal Foch ». 5. A&., discours de S, Pierre, X, 39 : « Nous sommes témoins »; 40-41 : rétablir Deus [...] dedit eum manifestum fieri,
non omni populo, sed testibus praeordinatis a Deo: « Dieu a permis qu’il se manifestat, non 4 tout le peuple, mais aux témoins choisis d’avance par Dieu. » Page 853. 1. Lapsus : lire Isabelle Riviére.
2. Belle de Jour est un roman par la N.R.F.
de J. Kessel, publié en 1929
3. Ce discours du 6 avril est conservé dans les archives
de
Paul Claudel. 4. Claudel avait écrit 4 Prague en 1910 « la Physique de PEucharistie » (O. C., XV, p. 169); il reprendra cette question dans une lettre 4 Agnés Meyer le 19 avril 1930 (ébid., p. 221). 5. Coupure de journal collée. J. de Maistre, De /’Eglise gallicane (O. C., t. III, Lyon, Vitte et Perrussel, 18809, liv. I, chap. vr,
p. 46). Claudel développera cette distinétion dans « Sur la grammaite », 18 mats 1930 (O. C., XVIII, p. 274).
Page 854. 1. Trad. :« Le visage de quelqu’un qui rentre son souffle pour chanter. » 2. La parenthése est postérieure.
3. Trad.
: « Les limites extrémes
de la furie humaine
ne
peuvent étre atteintes avant qu’un ami des deux parties n’intervienne avec délicatesse. »
1444
Cahier VI
4. Coupute collée. Trad. : FRANCHIR LA BARRE
(hymne de Tennyson)
Soleil couchant et étoile du soir et un clair appel pour moi! Et qu’il n’y ait point de barre gémissante quand je prendrai la mer, Mais une marée si lente qu’elle semble endormie, assez haute pour n’avoir ni fracas ni écume, Quand ce qui est sorti de l’abime infini retoutnera a son origine. Crépuscule et cloche du soir, et aprés cela la nuit! Et que Vadieu soit sans tristesse quand je m’embarquerai; Car, si loin de nos limites de temps et d’espace que le flot puisse m’entrainer, Jespére voit mon Pilote face a face quand j’aurai franchi la barre. Page 855.
Ly Olt p02. 2. Ce discouts conservé dans les archives de Paul Claudel a pour titre « Jeanne d’Arc et PAmérique ». Page 856.
1. « Impression de limbes » a été ajouté au crayon. — Sur cette page, photographie collée, sans indication, représentant un jeune homme vétu de blanc. 2. Contrebandier d’alcool. 3. Sculpteur. Voir Cahier Canadien Claudel LI. 4. « Surnaturel, mystérieux. » Page 857.
1. Sans doute un mot japonais ou chinois mal transposé. — Nous n’avons pu éclairer Vallusion. 2, Allusion au poéme d’Edgar Poe qui porte ce titre (voir déja p. 782). 3. « Se nourissent de cadavres. »
Mai- Juin 1929
1445
Page 858.
1. Claudel prononce alors le discours « Aux aéteuts catholiques de New York » publié dans Positions (O. C., XV, p. 150). 2. Accident eSt un toman publié en 1926, réédité en 1929; la premiere phrase citée est au chapitre m1, p. 12; la seconde au chapitre xi1, p. 116, édition de 1929. 3. Rétablir gui coepit esse habitator...: « qui commengait a habiter au centre de la terre ». Claudel conserve l’image « le nombril de la terre », comme
le montrent
les deux notes sui-
_ vantes. 4. Cette note est plus bas dans la page, avec renvoi a cette place. 5. Les deux mots dans Vinscription grecque se lisent horizontalement et verticalement. Page 859. 1. « Donne-moi les ames, enléve-moi tout le reéte. »
' 2. X XIX, 12 : « Et on donnera ce livre 4 un homme qui ne sait pas lire et on Jui dira : Lis. » ,
Page 860.
1. « Les derniéres paroles... Baviere » est de la main de Claudel. Le texte qui suit est une coupure de journal. Lorsque Claudel, quelques années plus tard, commentera les « Sept paroles » dans Un poéte regarde la Croix, il se référera aux récits évangéliques, sans allusion a ces « révélations ». 2. « Toute la terre est habitée et elle est en repos... Voici déja la soixante-dixiéme année. » 11-12 : Rétablir annus au lieu de dies.
Page 861. 1.
«Comment
allez-vous,
ma
chére?
—
Bien
mieux
qu'il
ne convient 4 une dame. » 2. Cow: vache; rabbit: lapin.
3. En réalité LIX, 4 : « Vous avez ébranlé la terre et vous Vavez troublée. Guérissez ces blessures car elle est ébranleée. » 4. Au-dessus de ces noms, Claudel a écrit « de Malartic » sans que l’on sache ot devait se placer ce nom. 5. Voir «le Chant religieux» (O. C., XVI, p. 205) : «les ineptes divagations d’un orgue intempestif»; « le Monastére in corde maris » (ibid., p. 371): « [explosion] non moins douloureuse de l’orgue »; et encore Seigneur, apprenez-nous a prier (O. C., XXIII, p. 27-28).
1446
Cahier VI
6. Il s’agit sans doute de John C. Davies, professeur de francais 4 Queen’s University, Belfast, qui présentera en 1955 une thése de doétorat sur « l’ceuvre critique d’Albert Thibaudet ». Page 862.
1. Surcharge, semble-t-il, depuis « langant ». 2. La derniére lettre conservée de la correspondance entre Claudel et Henri Bremond est un peu antérieure ; voir A. Blanchet, Etudes, septembre 1965.
3. Claudel tentera une exégése de ce passage de la Bible, dans les Vitraux de 1’Apocalypse (voir O. C., t. XXVI, p. 181). 4. Depuis « ressemblant... » est en surcharge. Page 863.
1. La premiéte étymologie autres sont plus discutables;
est communément toutes
sont données
admise;
les
par Littré.
2. « Flamber. » Cette étymologie figure dans Littré. 3. Claudel a laissé dans son cahier sans le coller ce télégramme : « Mére décédée. Tendresses. Reine. » Page 864.
1. Cf. Mémoires, p. 13 et 245. 2. Ps. V,11, et XIII, 3 : « Leur gosier est un sépulcre ouvert. » 3. « Violente averse. » Page 865. 1. Cette parenthése semble se rapporter au signe x placé aprés multiplicabo, rappel des deux morceaux de bois, du signe de la multiplication et de la croix. 2. « Et toi, fils de ’?homme, prends un morceau de bois, et écris dessus : pout Judas et pour les enfants d’Israél qui lui sont associés. Prends encore un autre morceau de bois et écris dessus : Pour Joseph, bois d’Ephraim, et de toute la maison
d'Israél, et de ceux qui lui sont associés. —
17. Puis joins-les
Vun a Pautre en un seul morceau, et ils seront unis dans ta main. — 19. Ainsi parle le Seigneur; voici je prendrai le bois de
Joseph qui est dans la main d’Ephraim et les tribus d’Israél qui lui sont associées, et je le joindrai avec le bois de Juda, et jen ferai un seul bois, et ils seront un seul bois dans sa main. — 20. Les morceaux de bois sur lesquels tu auras écrit seront dans ta main, sous leurs yeux... — 22.... et ils ne formeront pas désormais deux peuples, et ils ne seront plus divisés en deux royaumes. — 23. ... et ils seront mon peuple et je serai leur
Juin- Juillet 1929 Dieu.
—
24. ... et il y aura
un seul
1447
pasteur pour
eux tous.
— 26. Je ferai avec eux une alliance de paix, et il y aura une alliance éternelle avec eux, je les établitai solidement, je les multiplierai et je placerai mon san€tuaire au milieu d’eux pour toujours. — 27. Mon tabernacle sera parmi eux... — 28. Et les nations sauront que je suis le Seigneur, le sanéificateur d'Israél, lorsque mon sanétuaire sera au milieu d’eux pour toujours. » 3. « Jenverrai le feu sur Magog, et sur ceux qui habitent en sécurité dans les iles. » 4. Matth., V, 13 : « Mais si le sel s’affadit avec quoi le salera~ t-on?»
Page 866. 1. Ch. du Bos, /e Dialogue avec André Gide, Au
Sans Pareil,
1929, p. 115 : « Ce texte de Fénelon, écrit du Bos, me semble le chef-d’ceuvre de expression chrétienne du néant de la personne humaine [...] par sa forme il est 4 mes yeux le verre d’eau le plus pur, le plus limpide que je sache dans toute la littérature franGaise. » 2. Voit p. 757. 3. Voir p. 218, n. 3. Texte cité en épigraphe du Pain dur. 4. Epitre de la féte, A&., XII : « Léve-toi vite... Enveloppe-
toi de ton manteau. » 5. LXXII, 26 : « Ma chair et mon ceeur ont défailli, 6 Dieu,
qui étes le Dieu de mon cceur, et mon partage pour l’éternité. » 6. Voir p. 862. Page 867.
1. « Contrebandiers. » 2. Suivent quelques lettres illisibles. Page 868. 1. «Et moi, Daniel, je regardai, et voici comme deux autres hommes étaient debout : l’un en deca, sur une rive du fleuve,
Vautre au-dela, sur l’autre rive du fleuve. — Et j’entendis Vhomme vétu de lin qui se tenait sur les eaux du fleuve, élevant au ciel la main droite et la main gauche, il jura par celui qui vit éternellement que ce serait dans un temps, deux temps et la moitié d’un temps, et que toutes ces choses seraient accomplies, lorsque la dispersion de |’assemblée du peuple serait achevée. » 2. « 2, Je regardais dans ma vision noéturne, et voici, les quatre vents du ciel se combattaient sur la grande mer. — 3. Et quatre gtandes bétes différentes les unes des autres montaient hors de CLAUDEL
V - 49
49
1448
Cahier VI
la mer. — 7. Aprés cela je regardais dans cette vision noéturne, et voici, il y avait une quatriéme béte, terrible et étonnante, et extraordinairement forte; elle avait de grandes dents de fer; elle
dévorait, mettait en piéces et foulait aux pieds ce qui restait; elle différait des autres bétes que j’avais vues avant elle, et elle avait dix cornes. » — Ces notes sont prises en vue du commentaire de |’Apocalypse que Claudel rédige alors. 3. Cousine et marraine de Claudel. 4. « Un calcul secret de l’4me qui ne sait pas qu’elle compte. » 5. Conflit consécutif 4 la rupture du Kouo-min-tang avec les communiéstes; les Chinois provoquent des incidents en mai 1929, les Russes répliquent par une opération militaire que Pintervention améticaine fera cesser en décembre. 6. Sur les dettes frangaises. 7. Rom., X, 17 : « La foi vient de ce que lon a entendu. » — 14: « Comment entendront-ils s’il n’y a pas de prédicateur? » —15:« Et comment précheront-ils s’ils ne sont pas envoyés ? »
Page 869. 1. C’est le méme mot pris (par exemple Luc, XVI, 9 et 13) tantot dans son sens de richesse, tant6t comme un nom propre. 2. « La forme de la foule. » 3. Faits rapportés dans I Reg., 1, o4 Claudel prend tous les détails qu’il cite ici. 4. Voit p. 846.
5. Ps. LX XIII, 4: « Ils ont placé leurs étendards comme étendards. » Claudel pense aux passages de I’Apocalypse ov il est question du signe de Dieu et de celui de la Béte.
Page 870. 1. Ps, LX XIII, 20 : « Car les lieux sombres du pays sont remplis de repaires d’iniquité. » 2. Dans son ouvrage Out of these roots, publié en 1955, Mrs. Meyer rapporte que Claudel « se moquait » « de ses ceuvres sociales », « me pressant de chercher le salut de mon 4me non dans le dévouement au bien-étre d’autres, mais dans la conversion
au catholicisme » (fragment publié dans /e Monde, 2 avril 1957, trad. S. Mandel). 3. « Nous nous réconcilions. » Page 871. 1. On pourrait lire aussi : « piéce ». 2. Cf. Hermann de Keyserling, Psychanalyse Stock, 1930.
de |’ Amérique,
Juillet-Aott 1929 _
3. «Ma lumiere. » _Car je suis “aucun mal
1449
nuit n’a pas d’obscurité, mais tout y resplendit de — Rétablit : Noli timere quia ego sum: « Ne crains pas avec toi. Si tu passes par la flamme, elle ne te fera et l’odeur du feu ne seta pas en toi. »
Page 872. 1. Ecrit au crayon. 2. « Et quand tu auras achevé de lire ce livre, tu y attacheras une pierre, et tu le jetteras au milieu de l’Euphrate, et tu diras: - c'est ainsi que Babylone sera submergée et elle ne se relevera ~ pas de V’affliétion que je vais amener sur elle, et elle sera détruite. » 3. Ibid., 13: « Ta fin eS venue, tu es sur le point d’étre détruite. » 4.
~Tout
homme
est devenu
insensé
par sa science,
tout
fondeur a été confondu par sa Statue, car leur cuvre est mensongére et n’a pas de vie. — Ce sont des ouvrages vains et dignes de risée; ils périront au temps ot Dieu les visitera. »
Page 874. I. «25. Voici que je vais a toi, montagne pestilentielle, dit le Seigneur, a toi qui corromps toute la terre; j’étendrai les mains sur toi et je t’arracherai d’entre les rochers et je ferai de toi une montagne embrasée. — 26. Et on ne tirera de toi ni pierre angulaire, ni pierre pour les fondements, mais tu seras a jamais détruite, dit le Seigneur. — 27. ... Faites venir les chevaux comme des sauterelles hérissées. — 34. Nabuchodonosor, roi de Babylone, m’a mangée, il m’a dévorée, il a fait de moi comme
un vase vide; il m’a absorbée comme
un dragon,
il a rempli son ventre de ce que j’avais de délicieux et il m’a chassée. — 39. Quand ils auront chaud je Jes ferai boire et je
les enivrerai, afin qu’ils s’assoupissent et qu’ils dorment d’un sommeil éternel et qu’ils ne se relévent pas... — 53. Quand Babylone serait montée au ciel, et qu’elle aurait afferrni sa force sur les hauteurs, je lui enverrais des dévaStateurs... — 57. J’enivrerai ses princes, et ses sages et ses chefs... et ils dormiront d’un sommeil éternel et ils ne se réveilleront pas... — 58. ... et les travaux des peuples seront réduits 4 néant et ceux des nations livrés au feu périront. » «1. Voici que je susciterai contre Babylone et contre ses habitants, gui ont élevé leur cceur contre moi, comme un vent pestilentiel. — 2. Et... » « L, 3. Car une nation monte contre elle de l’aquilon... ils se sont mis en mouvement et ils sont partis. — 6. Mon peuple est devenu un troupeau de brebis perdues; leurs pasteurs les ont séduits et ils les ont fait errer par les montagnes; ils ont passé
1450
Cahier VI
des montagnes sur les collines, ils ont oubli¢é leur demeure. — 8. Retirez-vous du milieu de Babylone, sortez du pays des Chaldéens et soyez comme les boucs 4 la téte des troupeaux. — Parce que vous étes dans l’allégresse et que vous parlez insolemment en pillant mon héritage; parce que vous avez bondi comme des veaux sur l’herbe et que vous avez mugi comme des taureaux. — 12. Votre mére a été couvette de confusion, celle qui vous a enfantés a été également a la poussiére... — 15. ... ses fondements se sont écroulés, ses murs se sont renversés...
— 16. ... Devant le glaive de la colombe chacun retournera a son peuple, et ils fuiront tous dans leur pays. — 17. Israél est un troupeau dispersé, les lions l’ont chassé; le roi d’Assur Va dévoré
le premier;
ce dernier,
Babylone, lyi a brisé les os. — sa demeure;
Nabuchodonosor,
roi de
19. Et je raménerai Israél dans
il paitra sur le Carmel et dans Basan, et son 4me
se rassasiera sur la montagne d’Ephraim et dans Galaad. — 22. Bruit de guerre dans le pays et grand désastre. — 23. Comment le marteau de toute la terre a-t-il été brisé et broyé?... — 24. Je t’ai tendu un piége et tu as été prise, Babylone, sans t’en étre apercue; tu as été atteinte et saisie, parce que tu as provoqué le Seigneur... — 25. Le Seigneur a ouvert son trésor et il ena tiré les armes de sa colére... — 26. Venez contre elle des extré-
mités du monde, ouvrez pour faire sortir ceux qui la fouleront aux pieds; dtez les pierres des chemins et faites-en des monceaux;
massactez-la et qu’il ne reste rien. — 28. Bruit des fuyards et de ceux qui se sont échappés du pays de Babylone... — 31. Voici que je viens a toi, orgueilleux... — 33. ... les enfants d’Israél et les enfants de Judas, tous ceux qui les ont pris les retiennent et ne veulent point les relacher. — 38. La sécheresse viendta sur ses eaux et elles se dessécheront, cat c’est un pays d’idoles, et ils se glorifient en des monstres. — 41. Voici qu’un peuple vient de Aquilon; une grande nation et des rois nombreux s’éléveront des extrémités de la terre. — 42. ... Ils sont cruels et impitoyables... — 44. Voici comme un lion il montera de Vorgueil du Jourdain contre la puissante beauté.... — 46. Au bruit de la prise de Babylone, toute la terre a été ébranlée. » « XLIX, 12. Voici, ceux qui n’étaient pas condamnés 4 boire la coupe la boiront, et toi [tu demeurerais] comme si tu étais innocent? Non... tu boitas cettainement. » « XLVI, 7. Quel est celui qui monte comme un fleuve et dont les flots se gonflent comme ceux des grandes riviéres? — 15. Pourquoi ton héros est-il pourti?... — 28. Et toi ne crains pas, mon serviteur Jacob, dit le Seigneur, car je suis avec toi et je détruirai toutes les nations parmi lesquelles je t’ai banni; pour toi, je ne te détruirai pas, mais je te chatierai avec équité, sans t’épargner comme si tu étais innocent. »
Aott-Septembre 1929
I4jI
« XLVI, 3. A cause du bruit éclatant des armes et de ses guetriers, de l’agitation de ses chars et de la multitude de ses roues... — 2. Voici que des eaux montent de l’aquilon... elles couvriront le pays et tout ce que contient la terre. » « XLVI, 11. ... On ne l’a pas fait passer d’un vase dans un autre... et c’est pourquoi son gotit est resté et son odeur ne s’est pas changée. — 25. La corne de Moab a été coupée... — 38. ... patce que j’ai brisé Moab comme un vase inutile... » 2. La traduction frangaise par André Jundt du livre de Rudolf Otto venait de paraitre sous le titre : /e Sacré, l’élément non rationnel dans I’idée de divin et sa relation avec le rationnel, Payot, 1929. — Sur le « numineux », voir chap. 1 et 1. Page 875. 1. Voir page suivante, n. I. 2. En réalité Josué, XXIV. 3. Jér., XLVI, 15; rétablir : Quare « Pourquoi ton héros est-il pourri? »
computruit fortis tuus?
Page 876.
1. Cette note est écrite en marge d’un dessin, découpé dans une revue, représentant le globe terrestre couvert par le signe $ : Europe sees the world covered with the dollar sign. — Cf. Au milien des vitraux del’ Apocalypse (O. C., t. XXVI, p. 133) : « Dollar, le signe sacro-saint [...] est-ce que ce n’est pas les cornes et la queue du diable, la marque de la Béte par excellence... » 2. L’esprit, la mesure, le mois. 3. Ps. CXIX, 6: « Mon 4me a été longtemps exilée. » — 5: « J’ai demeuré avec les habitants de Cédar. » 4. Ps. II, 9 : « Tu les gouverneras avec une verge de fer et tu les briseras comme le vase du potier. » 5. « Et tout esprit qui divise Jésus n’est pas de Dieu, et c’est 1a Vantichrist, dont vous avez entendu dire qu’il vient et maintenant déja il est dans le monde. » Page 877.
1. Compléter liv. II, cap. xv, n° 45 (P. L., XXXII, col. 1265) : « Aucune chose ne peut se former elle-méme, car aucune ne peut se donner ce qu’elle n’a pas. » 2. « Qui, pourquoi, quoi? » 3. Discours publié dans Cah. Cl. IV, p. 211. 4. Voir p. 819. 5. Rature : acquises.
1452
Cahier VI
Page 878.
1. Oraison du Salve Regina, aux priéres aprés la messe : « Jetez un regard favorable sur le peuple qui crie vers vous. » 2. Ex., IV, 6-7. Claudel commentera le double geste demandé a Moise dans les Vitraux de 1’Apocalypse (O. C., t. XXVI, p. 158): « Mettre sa main dans son sein, n’est-ce pas ’homme qui se tegarde, s’étudie et s’admire lui-méme, qui met sa main a sa propre Statue. Mers-la de nouveau dans ton sein et elle redeviendra saine, n’est-ce pas 1a le regard intérieur de la pénitence, la main droite, instrument de la création, qui écarte les enveloppes et qui vient prendre contaét avec le cceur? » 3. Etudes et documents pour servir a l'histoire du sentiment religieux. Introduttion a la philosophie de la priére (textes choisis), Bloud et Gay, 1929, p. 216. Page 879.
1. Surcharge depuis « Nous allons... ». 2. Ex., IV, 23 : « Renvoie mon fils Israél. »
3. Claudel a d’abord écrit : /e désordre de la chair plus que celui de l’esprit, puis raturé. 4. Claudel traduit librement le passage de S. Augustin qui s’appuie sur I Cor., xv, 41; Luc, X, 12; Matth., XXIII, 15.
5. S. Augustin commente I Tim., u, 5 : «... Jésus-Christ qui s’est donné lui-méme pour la rédemption de tous.» (P. L. XLIV, col. 230.) Page 880.
1. Trad. : « Chaque ame, en chaque étte humain, a sa place divinement assignée (Newman) et pour sa souffrance finale, elle doit avoir dépassé et déjoué le dessein spécial et particulier de Dieu sur elle. Elle brile, pressée par deux contraintes opposées, la contrainte ou leffort naturel de l’esprit cherchant a sortir de
lui-méme pour aller 4 Dieu “qui est sa fin” et la contrainte de cette armure...» Limitless: Yinfini. 2. II Cor., v,
4: « Nous ne voulons pas étre dépouillés, mais
revétus par-dessus. » 3. Voir p. 861 et en particulier le texte de Seigneur, appreneznous a prier: «... Cest pour cela que lorgue a été inventé, expressément pour nous empécher de prier, pour remplacer la priere par ’engourdissement de la conscience. » 4. Cité par H. Bremond, Introduction a la philosophie de la priere, p. 278 : « Il faut savoir que Dieu a coutume de cacher a lame son union, et que le voile dont il se sert trés souvent sont les distractions qui, 4 la fagon d’un nuage, lui sont mises devant les yeux. »
Septembre-Olfobre 1929 5. Rature : ayant lair. 6. Depuis « Une autre
Judith », semble
1453 ajouté postérieure-
ment. Page 88&r. 1. Zacharie, I, 15 : « Et j’éprouve une grande colére contre les nations puissantes; car je n’étais qu’un peu irrité, mais elles ont contribué au mal. » 2. « L’éducation est ce qui reste quand nous avons oublié ce | que nous avons appris. » 3. Threnes, IV, 20; rétablir: Spiritus oris nostri, Christus Dominus captus est...: « Le souffle de notte a été pris... »
bouche, l’Oint, le Seigneur,
4. Arsenal de Pagoda-Anchorage dirigé par des Francais a la suite de l’accord conclu par Claudel en 1896 avec les autorités chinoises. Page 882.
1. Discours daté du 15 oftobre, conservé dans les archives de Claudel. 2. Charles Panzera, baryton, né en 1896, auteur de /’Amour de chanter et 1’Art de chanter; il est question de lui dans Cad.
Cl. IIL; Claudel pensait 4 lui en écrivant Pan et Syrinx (ibid., p.212). 3. Suit un mot illisible. Page 883.
1. Cf. Mémoires, p. 179 : 2 Amrouche qui lui demande : « Egt-ce que vous avez souffert de ce silence du public et de la critique? » Claudel répond : « Je suis ainsi fait que j’en ai souffert... On souffre de parler dans la ouate tout le temps. » 2. Aprés la démission de Poincaré en juillet 1929, Briand, alors ministre des Affaires étrangeres, forme un ministére qui ne dure que quelques mois. Fin oétobre, il est remplacé par Tardieu, qui le maintient toutefois au Quai d’Orsay. 3. Matth.,
IV, 6, et Luc, IV, 11; rétablir so//ent au lieu de
portabunt : « Ils te potteront dans leurs mains de peur que tu ne heurtes ton pied contre une pierre. » 4. « Prenez garde 4 la marche, Excellence! » 5. Tobie, XII, 19: « Je me nourris d’un mets invisible et d’un breuvage [qui ne peut étre vu par les hommes]. »
1454
Cahier VI
Page 884.
1. Ps. XVI, 3 : « Vous m’avez éprouvé par le feu. » — XXV, 2:« Passez au feu mon cceur et mes reins. »
2. « Afin que la punition mit le comble 4 ce qui manquait a leurs supplices. » 3. 5 : « Et que votre peuple passat merveilleusement alors quwils trouvaient eux-mémes [les impies] un nouveau genre de
mott. » 4. 6 : « Toutes les créatures prenaient, comme a Vorigine, chacune en son gente, une nouvelle forme, obéissant a vos otdres. » — 17 : « Lorsque les éléments changent d’ordre entre eux, comme dans un instrument de musique ot la qualité des sons est transformée, sans que rien perde l’harmonie qui lui est propte : c’est ce qu’on peut voir clairement par ce qui arriva. » 5. « As-tu saisi les extrémités de la terre, la secouant pour en rejeter les impies? » 6. « Car la substance créée par vous montrait la douceur que vous avez envets vos enfants, puisque, s’accommodant 4 la volonté de chacun d’eux, elle se changeait en tout ce qu'il voulait. » 7. « Ils se sont en outre imaginé que notre vie est un jeu, et qu'il n’y a d’autre but de Vexistence que le gain, et qu’il faut acquérir par tous les moyens, méme par le mal. » 8. « Cest pourquoi se transformant alors en toutes sortes [de gotts] elle obéissait 4 votre grace qui est la nourriciére de tous, selon la volonté de ceux qui vous exprimaient leurs désirts. » Page 886.
Sur Wolf Dhorn, voir p. 256 et 272. . Depuis « Deux... », surcharge. . « Le sommeil. » . Rature : @ Providence. Pp wWwWRN Page 887.
1. XI, 7 : « Interroge les animaux et ils t’enseigneront; les oiseaux du ciel, et ils t’instruiront. » — Claudel citera ce texte au début du Beffiaire spirituel (Pr., p. 982). 2. « Car, parce que le mal a été doux a sa bouche, il le cachera sous sa langue. » 3. Cf. le Soulier de Satin (Th. I, p. 920) : « Je veux la belle pomme parfaite. — Quelle pomme? — Le Globe! Une pomme qu’on peut tenir dans sa main. » 4. 32: « I sera porté lui-méme au tombeau et il veillera parmi
Novembre 1929
1455
la foule des morts. » — 33 : « Sa présence a été agréable aux sables du Cocyte, il y entrainera tous les hommes aprés lui et une foule innombrable l’a précédé. » — XXVI, 5 : «Les géants mémes et ceux qui habitent avec eux gémissent sous les eaux. » — 6: « Le séjour des morts est 4 nu devant lui et l’abime sans aucun voile.» — 11 : « Les colonnes du ciel tremblent et s’effrayent au moindte signe. » — 13 : « Son esprit a orné les cieux et l’adresse de sa main a fait paraitre le serpent plein de replis.» — XXVI, 4 : « Qui veux-tu instruire? N’est-ce pas celui qui a créé le souffle de la vie? » Page 888. 1.6: «.,. Le Trés-Haut en a donné la science aux hommes
afin qu’ils soient honorés pat ses metveilles.» — 9 : « fils, si tu tombes malade, ne te néglige pas toi-méme.» «Il viendra un temps ot tu tomberas entre leurs mains. 2. 36: « Sans eux tous aucune ville ne serait batie. » — « Mais ils maintiennent
les choses de ce monde
Mon 13 : » 39:
et leur priére
‘a pout objet les travaux de l’art; ils y appliquent leur Ame et ils tachent de vivre selon la loi du Trés-Haut. » 3. Voir dans Pr., p. 1485, une lettre 4 Louis Gillet sur Joyce. — Et ici t. I, avril 1942. a 889.
. Sur Eve Lavalliére, voir supra, p. 672, n. 4. 2. Cette note accompagne un dessin sur papier a lettres du Dr James Botdley, Professional Building, 330, N. Charles St[reet]. 3. « fresques » est en surcharge. 4. Cf. Cah. Cl. II, p. 123; Claudel parle 4 Milhaud de cette demande et de son refus, « les deux piéces n’ayant aucunement la méme atmosphére et /’Annonce a elle seule exigeant quatre ou cinq heures ».
5.
«Comme
qui y tegardent;
on voit briller dans l’eau le visage de ceux ainsi les cceurs des hommes
sont dévoilés aux
sages. » 6. Gaston Rageot, né en 1872, avait publié en 1928 /’Homme Standard, Plon, et Prises de vues : les meurs d’aprés le thédtre, Nouvelle
Revue critique; il a publié également des articles sur le théatre dans /a Revue bleue. — Alfred Fabre-Luce avait publié en 1927 Russie chez Grasset et un article dans la Revue hebdomadaire (XII, p. 46-53) : « Visites chez les bolcheviks. » 7. Jeu sur le passage de Matth., VII, 6, ov il est question de la « perle », « margarita », jetée aux porcs.
1456
Cahier VI
Page 890.
1. Sur les variations du jugement de Claudel sur Rodin, voir (Pr.) les deux articles sur Camille et « Rodin ou Homme de génie ». 2. Voir Espiau de La Mestre, Claudel et la musique (les Lettres romanes, t. XIII, 1959, p. 175). — Cependant, dans un texte de 1936, « A la louange de |’Autriche » (Pr., p. 1087), Claudel écrita : « Cette méme élégance, cette suavité, cette mélodie, cette amabilité, cette communion
dans la suavité
et dans la
douceur, n’est-elle pas l’Ame de la musique de Mozart?» 3. Missia Sert. 4. Voit p. 766, n. 2. Discours conservé dans les archives de Claudel, publié fragmentairement dans Pr., p. 1444. 5. Voir p. 884. Il s’agit sans doute d’une seconde lettre.
Page 891. 1. G. R. Tabouis, /e Pharaon Tout Ank
Amon,
sa vie et son
temps, Payot, 1928, chap. x. Claudel a commis quelques omissions. Il a cité ce texte dans les Vitraux de l’Apocalypse (O. C., t. XXVI, p. 350), en note au développement sur « les plaies
d’Egypte ». 2. 3. 4. 5.
Rature : inaltérable. Lapsus; lire sans doute : « en tant qu’effet... ». Ps. X,5:« Sespaupiéres examinentlesenfantsdeshommes. » La deuxieme lettre a Mme A. E. M[eyer], Positions (O. C.,
XV, p. 216), datée du 17 décembre 1929, développe cette note. Page 892. 1. Prov., VIII, 27 : « Lorsqu’il préparait les cieux j’étais 1a », texte lu a l’épitre le 8 décembre. 2. Cf. « Un regard en arriére », préface pour Jacques Madaule, 1935 (O. C., XVIII, 147) : « Le voici donc de nouveau avec moi, ce P. C., ce P. P.C. que j’étais si heureux de croire définitivement englouti sous les ruines fumantes 4 Tokyo de sa cabane diplomatique!» Claudel aimera a reprendre ce jeu de mots (cf. Th. II, p. 1480): «... ce P. C. qui bientét... se sentira le droit de signet.>. Ps [email protected])» 3. Note ajoutée au-dessus de la suivante et en rapport avec elle (voir p. 743). Page 893.
1. Ill, 11: « Il a fait toutes choses bonnes en leur temps et il a livré le monde a leurs disputes, sans que l’homme puisse découvrir l’ceuvre que Dieu a faite depuis le commencement
Décembre 1929
1457
jusqu’a la fin.» — 14: « J’ai appris que toutes les ceuvres que Dieu a créées demeurent a perpétuité; nous ne pouvons rien ajouter et rien retrancher...» — VII, 24 : « La sagesse... s’est retitée loin de moi.» — 25 : « ... beaucoup plus qu’elle n’était aupatavant. Sa profondeur est grande; qui la trouvera?» — 26:« J’ai examiné toutes choses [dans mon esprit, pour savoir et pour considérer]...» — 27 : « Et j’ai trouvé plus amére que la mort la femme, qui est un filet de chasseur et dont le cceur est un rets, et dont les mains sont des liens. » 2. I, 8 : « Toutes choses sont difficiles; homme ne peut les
expliquer par la parole. L’ceil ne se rassasie pas de voir et l’oreille ne se lasse pas d’entendre. » 3. En réalité, I, 15 : « Jusqu’a ce que le Seigneur mette vos fréres en repos, comme il vous y a mis, et qu’ils possédent aussi eux-mémes la terre que le Seigneur notre Dieu doit leur donner; et aprés cela vous reviendrez dans le pays que vous possédez pout y habiter comme dans le lieu que Moise, serviteur du Seigneur, vous a donné au-dela du Jourdain vers le soleil levant. » , 4. Eccli., XXIV,
40 : « Je suis la sagesse qui ai fait couler
les fleuves. » — 41 : « Je suis comme le chemin par ou s’écoule Peau immense d’un fleuve, comme le canal d’une riviére, et comme un aqueduc qui sort du paradis.» — 39 : « Car ses pensées sont plus vastes que la mer et ses conseils plus profonds
que le grand abime. » 5. Il Thess., 11, 3 : « Que personne ne vous séduise en aucune maniére : car il faut que Vapostasie arrive auparavant, et qu’on ait vu paraitre l’homme de péché, le fils de la perdition. » — 4: « L’adversaire qui s’éléve au-dessus de tout ce qui est appelé Dieu, ou qui est adoré jusqu’a s’asseoir dans le temple de Dieu, se faisant lui-méme passer pour Dieu. » — 6 : « Et maintenant vous savez ce qui le tretient afin qu’il ne paraisse qu’en son
temps. » Page 894. en Getie xoxo
Lear.
2. Quelques jours plus tard, le 11 janvier, Claudel écrira a Darius Milhaud : « Connaissez-vous un gratte-papier du nom d’Emmanuel Berl? » (Cah. C/. III, p. 128). Le propos n’est pas nécessairement péjoratif, il peut masquer une certaine satisfaétion : Claudel est épargné et méme traité avec éloge dans la Mort de la pensée bourgeoise, rééditée en 1929 : « Claudel, le seul poéte francais dont le génie soit évident pour moi... » Pour une citation plus longue, voir Cah, C/. III, p. 309-310. 3. Surcharge : « dans un puits ».
1458
Cahier VI 1930
Page 89).
1. Cette lettre ne figure pas parmi celles publiées dans Positions (O. C., t. XV). 2. Hymne de la féte du Saint Nom de Jésus : « Jésus, espoir du repenti, Que tu es tendre 4 qui te prie! Que tu es bon pour qui te cherche! Mais que diront ceux qui te trouvent! » 3. Opera patrum apostolicorum, edidit F. X. Funck, vol. I,
Tubingue, 1887, p. 89, § 8 (et non 4) du chapitre xv. Page 896.
1. Il est vraisemblable que Claudel a pris cette note dans P. Fr. Bruno de J.-M., Saint Jean de la Croix, préface de J. Maritain, Plon, 1929, citation de la p. 240; Cantique, Strophe
xxxvi : « Entrons plus avant dans lépaisseur. » 2. Ibid., p. 10: « Jean de Yepes, petit de taille (1 m. 55). La Mora de Ubada, Mauresque géante de Grenade», p. 261. Page 897.
1. Voir p. 176, n. 2. Deux lettres de Claudel 4 Michel Graillet, vraisemblablement écrites en 1901, ont été publiées dans le Bulletin de la Société Paul Claudel, n° 9, févriet 1962, p. 8-11. 2. Ala N.R.F. Il avait paru auparavant en édition restreinte en quatre volumes.
3. Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 756 sq.). 4. Jét., XII, 11 : « Tout le pays est dans une extréme désolation, parce qu’il n’y a personne qui ait le cceur attentif. » Page 898. 1. Marie de l’Incarnation, ursuline de Tours, fondatrice des Ursulines de la Nouvelle-France, Ecrits spirituels et hiftoriques, publiés par dom Claude Martin, réédités par dom Albert Jamet, Desclée de Brouwer, 1929, t. I, p. 247, n. 15. Aprés « mariage », Claudel a omis : « Ce symbole est cher aux prophétes, comme Von sait. » 2. Ibid.,; p. 248, n. 18. 3. A peine. atténuées, on retrouve ces idées dans « Camille Claudel » (1951) (Pr., p. 279). 4. 17: « Le Seigneur a exaucé le désir des pauvres; votre oreille a entendu la priére de leur cceur. »
Janvier-Mars 1930
1459
5. Reétifier : Guy de Fontgalland est mort le 24 janvier 1925. Plusieuts livres avaient paru récemment, ceux d’Henri Perroy, de Callé et de E. Dévaud. — Saint-Louis de Gonzague, collége des Jésuites de Paris. Page 899.
1. Au-dessus : « lendemain ». 2. Claudel résume Marie de l’Incarnation, op. cit., p. 296.
3. Beau-pére de Marie Claudel. 4. Trad. : « L’indifférence de notre public et la nature cupide . de nos exploiteurs nous ont condamnés a4 un enfer. On dirait que nous avons tous perdu le sens... que l’égoisme de quelques accapareurs d’argent ait ruiné toute la beauté de notre paysage et pollué nos alentouts naguére purs et délicieux. » 5. « True-to-type », conforme au genre. — Cet article parut dans /e Temps le 24 janvier 1930; on en trouvera l’analyse dans P. Brunel, «le Soulier de Satin» devant la critique, 1964, p. 34 Sq. Claudel gardera le souvenir de cet article, particuli¢rement incomprthensif (cf. Mémoires, p. 283). ' 6. Claudel évoque Mei Lan Fan dans « le Drame et la musique » (1930) (cf. Pr., p. 150): « Le fameux Mei Lan Fan. Mei Lan Fan ne joue que des réles de femme ou de jeune fille. [...] Ce n’est pas un homme et ce n’est pas une femme, c’est un sylphe. » Page 900.
1. Cette conférence, publiée d’abord en anglais dans The Yale Review, t. XX, automne 1930, parut également dans /a Revue de Paris en mai 1930; elle a été reprise dans /’Gii/ écoute (cf. Pr., p. 143). C'est une présentation du Christophe Colomb opposé au drame wagnérien. z. Yale University Press, texte anglais. 3. Ce mot est en surcharge. 4. Sans doute Gigette. 5. Cité dans les Vitraux de l’ Apocalypse (O. C., t. X XVI, p. 264). 6. Souvenirs de Sceur Elisabeth de la Trinité (1880-1906), Carmel de Dijon, édition de 1930: « ... je regagnais notre cellule avec ma souffrance. — Qu’y faisiez-vous?P — Je cherchais a m’élever au-dessus ou 4 me glisser dessous... » (p. 171). Page got. 1. Voir
Etienne-Marie
Lajeunie,
éd. de la Vie spirituelle, Desclée, 1927.
O.P.,
Anne
de
Guigné,
1460
Cahier V1
2. Ps. XC, 5 : « Tu ne craindras pas les frayeurs de la nuit. » 3. Ibid., 6: «... ni la fléche qui vole pendant le jour, ni les maux qui s’avancent dans les ténébres, ni les attaques du démon de midi. » Page 902. 1. Claudel rapproche la parole du Christ sur la croix, Sitio: « J’ai soif », de Matth., IV, 2: « [Et lorsquw’il eut jeuné quarante jours] il eut faim.» — Au-dessus de cette note, en marge : « assidu »; on ne sait a quoi se rapporte ce mot. 2. « La terre [retourne] a la terre, la cendre a la cendre, — mais la flamme de méme [s’unit] a la flamme, amour a Vamout — le verbe au verbe — le souffle au souffle — le verbe [engendre] Te soufle — le devenir l’élan — le temps [mene] a Péternité. » 3. 14 : « Vous
avez
avec
vous
Aaron
et Hur; s'il survient
quelque difficulté, vous vous en rapporterez a eux. » 4. Cet article de Thibaudet semble n’avoir jamais été signaleé. Nous ne l’avons pas tetrouvé. Page 903.
1. Coupure de journal collée. 2. « Par un retour... », surcharge. 3. Cette note est utilisée presque textuellement dans « Sur la gtammaire » (18 mats 1930) (voit O. C., t. XVIII, p. 280). Voir ici p. 188, 853 et 976.
4. En 1930, le 19 mats était le mercredi aprés le 2@ dimanche de Caréme; le texte de l’épitre est emprunté a Esther, XIII, 8-11 et 15-17. — L’épitre de la féte de S. Joseph eét tiré de Eccli., XLV, 1-6.
Page 904.
1. Claudel commence, en évoquant cette conversation, le chapitre xvi des Vitraux de I’ Apocalypse (O. C., XVI, p. 265). 2. 5 : « Maudit soit ’homme qui se confie dans Phomme [...] et dont le cceur se retire du Seigneur. » — 6 : « Il sera comme les bruyeres dans le désert, et il ne verra pas arriver le bonheur; mais il habitera au désert dans la sécheresse, dans une tetre de
sel et inhabitable » (épitre, jeudi de la 2@ semaine de Caréme). 3. Luc, XV, 13 : « pour un pays lointain » (évangile, samedi de la 2& semaine de Caréme).
Mars-Abril 1930
1461
Page 905.
1. Rature : c’esf. _
2. Claudel écrit « Quoi» et « Qui» en donnant au Q majuscule sa forme traditionnelle — ronde ou batarde — qui le fait ressem-
bler a un point d’interrogation. 3. Chef d’orchestre italien, né en
1867, mort
4 New
York
en 1957. 4. Sur Jean Charlot, voir p. 842, n. 5. Aristide Maillol, le
sculpteur frangais, et le peintre allemand Paul Klee.
~ Page 906. 1. C'est au Staatsoper de Berlin que devait étre créé Christophe Colomb, Milhaud en avait parlé a Claudel en juillet 1929 (voir Gah. Clo I, “p. 117): 2. V. 537-539. Trad. :« Sa touche inspirée, Dans son vol léger, remonte, redescend toute l’échelle des sons, Et a travers tous les tons, poursuit sa fugue sonore. »
' 3. « Voyez en quels caractéres je vous ai écrit de ma main. » 4. Cette note se trouve un peu plus bas, aprés la citation de Job, avec un signe de renvoi. L’interprétation donnée ici se trouve par exemple dans Fillion. 5. 5 : «Mon oreille avait entendu patler de vous, mais maintenant c’est mon ceil qui vous voit. » Page 907.
1. On en trouvera une liste dans le livre cité de P. Brunel, p. 37. Trés justement, P. Brunel remarque que Claudel oubliera ces atticles; aAmrouche il dira en 1952 :« A peu prés personne n’en a parlé, sauf André Thérive » (Mémoires, p. 329).
2. 13: «... parce quils ont abandonné le Seigneur, la source des eaux vives. » — 15 : « Ot est la parole du Seigneur? Qu’elle vienne! » — 16: « Et moi je n’ai pas été troublé en vous suivant comme mon pasteur, et je n’ai pas désiré le jour de ’homme, vous le savez : ce qui est sorti de mes lévres a été droit devant vous. » — Ce texte est lu a l’épitre le vendredi de la Passion. 3. Jean, XI, 52 : « Et non seulement pour la nation, mais pout rassembler en un seul corps les enfants de Dieu qui étaient dispersés » (évangile du vendredi de la Passion). 4. « Connaissance du Temps », I. De la Cause (Po., p. 132). Page 908.
1. Une fléche semble renvoyer a la note un peu antérieure : « Un vieux fou qui passe son temps... »
1462
Cahier VI
2. Oraison qui suit, aprés la bénédi€tion du feu, la troisiéme leG@ture : « O Dieu, puissance invariable
et lumiére
éternelle,
jetez un regard favorable sur les merveilles de votre Eglise et daignez opérer le salut du genre humain par leffet de votre éternelle résolution; en sorte que le monde entier éprouve et voie que ce qui était abattu est relevé, que ce qui était envieilli est renouvelé, que tout est rétabli dans son intégrité premiére par celui qui est le commencement de tout... » 3. En tealites Von. 4. « Vous tous qui avez soif, venez aux eaux, et vous qui n’avez pas d’argent, hatez-vous, achetez et mangez; venez, achetez sans argent et sans aucun échange le vin et le lait. » — 2:« Pourquoi employez-vous votre argent ace qui ne peut nourtit et yotre travail 4 ce qui ne peut rassasier? Ecoutezmoi bien, et mangez ce qui est bon, et votre 4me se déleftera de mets
savouteux.»
—
3 : « Prétez
Voreille
et venez
a moi;
écoutez-moi et votre 4me vivra; et je conclurai avec vous une alliance éternelle, pour rendre Stable la miséricorde promise a David... [...] Cherchez le Seigneur pendant qu’on peut le trouver, invoquez-le pendant qu’il est proche. » Cinquiéme le€ture du Samedi-Saint;
Perreur se trouve
d’ailleurs dans les missels qui
donnent Isaie, LIV. 5. Baruch, III, 14 : « Apprends ot est la prudence, ot est la
force, ot est Vintelligence. » — 27 : « Le Seigneur ne les a pas choisis et ils n’ont pas trouvé la voie de la sagesse, c’est pour cela qu’ils ont péri. » — 30 : « Qui a passé la mer et l’a trouvée et l’a apportée de préférence a Vor le plus pur? » — 31: «Il n’y a personne qui puisse connaitre ses voies, ni qui découvre ses sentiets. » — 32 : « Mais celui qui sait tout la connait... » — 38: « Aprés cela il a été vu sur la terre et il a conversé avec les hommes. »
Page 909.
1.
«Ce Verbe divin que Platon souhaitait comme un guide
plus sir, dans la vie, que humaine raison. »
2. 12 : «... Vous avez déchiré mon sac et yous m/’avez envitonné de joie. » 3. Cité dans les Vitraux de I’Apocalypse, p. 3.46. 4. I, ur, 21 : « Non pas en enlevant les souillures de la chair, mais pat l’engagement d’une bonne conscience envers Dieu, gtaice a la résurrection de Jésus-Christ » (épitre du vendredi
de Paques). 5. I Jean, v, 8 : « L’esprit, Peau et le sang, et ces trois sont un» (épitre du 1¢™ dimanche aprés Paques).
Avril-Mai 1930 6. L’ Art romantique, Pléiade, p. 1051. « indivisible » et non pas « indivise ».
1463 Baudelaite
a écrit
Page g11. 1. Surcharge depuis « promoteut... ». 2. Ce nom de lecture difficile est en surcharge. Page 912. 1. 2. 3. « La 4.
Voit Cah. Ci. III, p. 138, pour ce rapide voyage a Berlin. La générale aura lieu le 19 mai. Pour Louis Chaigne, voir p. 777. — Imitation, 1, xx, 5 : cellule qu’on quitte peu devient douce » (trad. Lamennais). Surcharge : « de cet interstice ».
5. Luc,
X XI, 25, dans annonce des derniers temps.
Page 913. 1. Léopold Stokovski, né en 1882 a Londres, dirigea pendant prés de trente ans le Philadelphia Harmonia; il y eut (voir Cah. Cl. III) des projets avec lui pour Christophe Colomb. 2. Cant., II, 14 : « Léve-toi, mon amie... dans les creux de la
pierre et dans les enfoncements de la muraille. » 3. Voir Cah. Cl. Ill, p. 141.
Page 914.
1. Ibid., p. 141 et sq. La lettre du 29 mai ébauche la partition de /’ Annonce telle que Claudel voudrait la voir réalisée par Darius Milhaud. 2. Rodolphe Hoornaert, Sainte Thérése écrivain, son milieu, ses facultés, son euvre, Université de Louvain, Desclée de Brouwer,
1922, Pp. 202. 3. Cah. Cl. UI, p. 140 et 141, lettres des 28 et 29 mai 1930. 4. Almanach des champs, dans lequel a paru « Mardi» des Conversations dans le Loir-et-Cher (mai-novembte 1930). 5. Georges de Traz, dit Francois Fosca, Tintoret, Albin Michel,
1929. ce « Le Dieu des dieux, le Seigneur a parlé, et il a appelé la terre. » FouV Olt p17
251s 4
Page 91}.
1. Claudel note 4 nouveau Pintéresse fort.
ce projet qui le préoccupe
et
1464
Cahier VI
2. Articles a propos du Soulier de Satin ou des représentations de /’Ozage. Claudel, une fois de plus, boude et se montre plus sensible aux critiques qu’aux éloges; il n’a rien dit de larticle élogieux de Georges Batault, de ceux tout récents de Gabriel Marcel, Stanislas Fumet, Jacques Madaule...
3. Coupure de neuf mots, de caraétére familial. 4. Sans doute Mme de Fels. 5. « Toi, qui es-tu?» (Jean, VIII, 25); sbid., 53 : « Qui prétends-tu étre? » 6. Dans /a Vie du Pére Mary, Paul Labutte cite plusieurs fragments de lettres de Claudel ot il est question de Paul Petit (p. 161, 165, 166). 7. Ils’agit d’Au milieu des vitraux del’ Apocalypse, qui demeurera inédit jusqu’en 1966. Page 916.
1. Fille de Jacques Riviere. Page 917.
1. A Béon (voir p. 510, n. 3). 2. Claudel note de mémoire cette phrase de S. Pierre Chrysologue (Sermon LX X XVI) qu’il a sans doute lue dans le sermon de Bossuet sur l’unité de l’Eglise, 3° point. Le texte exa&t est Hoc accipit dottor quod meretur auditor: « Le do&eur regoit ce que métite son auditeur. » 3. « Montrer tout son visage. » 4. Sermon sur lunité de ’Eglise, 9 novembre 1681, CEuores oratoires, éd. Lebarq, t. VI, Hachette, 1°? point, p. 118 : « Que vous étes donc terrible, 6 Eglise sainte, lorsque vous matchez [...] prenant les petits de Babylone et les hérésies naissantes, et les brisant contre votre pierre... » (Ps. CXX XVI, 9). 5. I Jean, v, 19 : « Le monde entier est sous l’empite du malin.» — v, 29 : « Cat jamais personne n’a hai sa propre chair. » Page 918. 1. Rom., XI, 36: « Car c’est de lui et par lui et en lui que sont toutes choses. » Page 979.
1. Vincenzi Pallotti, béatifié par Pie XII en 1950; fondateur de la « Société apostolique catholique », il édifia 4 Londres en 1848 une église pour les émigrants italiens.
Juin- Juillet 1930
1465
2. Voir p. 29, n. 4.
3. Rature : et demi. 4. Souvenir
de la Cantate,
mais
aussi amorce
d’un
theme
repris dans « Brangues » (Pr., p. 1339) : «... on m’a donné un autre Rhéne dans le ciel...» (texte de 1943). 5. Cité dans les Vitraux de 1’Apocalypse, p. 400.
Page 920, 1. Cf. « Mort de Judas » (Pr., p. 902) : « Quand j’entends dire | qu’il faut [...] maudire son figuier parce qu’il ne produit pas des -abticots au mois de mars [...] évidemment je fais la part de Péloquence et de lexagération, mais je n’aime pas ga, je suis froissé. » 2. Lytton Strachey, Elisabeth et le comte d’Essex, histoire tragique, traduit de l’anglais par Jacques Heurgon, Gallimard, 1929, p. 264 et 270-273. 3. Rature : De méme. , 4. CEwvres de Plutarque, traduites par Jacques Amyot, t. XI, (Euvres morales, p. 385-480 : « Des oracles qui ont cessé et pourquoi. » 5. Remarque déja faite dans les Conversations dans le Loir-etCher, « Samedi » (Pr., p. 789). 6. Daniel, V, 5 : « Et le roi voyait les doigts de la main qui écrivait. » 7. « L’4me de vos ennemis sera agitée, comme une pierre qui est lancée par une fronde avec grand effort. » 8. « Car celui qui aura combattu et celui qui sera demeuré aux bagages auront la méme part du butin. » Page 921. 1. Ill Reg., m1, 8 : « Et votre serviteur se trouve au milieu
du peuple que vous avez choisi, d’un peuple infini, qui est innombrable a cause de sa multitude. » — 9 : « Donnez donc 4 votre serviteur un cceur docile, afin qu’il puisse juger votre peuple [...] ce peuple si nombreux. » Le second verset est mal recopié, le texte est : ut populum tuum judicare possit et discernere inter bonum et malum... 2. Voir p. 904. Claudel ajoute en surcharge : « Jérémie ». 3. « Tu as multiplié les énigmes et les paraboles. » 4. Sur Pabbé Jean-Pierre Altermann, voir p. 480, n. 2. Sen Olt, P, O22>)i).eTs 6. 31.« Réprimez les bétes sauvages des roseaux. » La seconde partie du texte est la glose de Menochius : « Description allé-
1466
Cahier V1
gorique des démons qui viennent volontiers parmi les hommes légers et vains, et dans les lieux bas ot régne la luxure. » Page 922. 1. Voir p. 644, n. 3, la lettre 4 Léon Guichard. Herbert Dickmann préparait un ouvrage sur Claudel (voit p. 693, n. 1). 2. « Selon la fertilité de sa terre, il a été fécond en idoles. » — En haut de la page 143, photographie collée de Marcel Schwob. 3. « Toi aussi, par le sang de ton alliance, tu as fait sortir les captifs de la fosse ot il n’y a pas d’eau. » 4. Nom illisible. 5. 19 : « Vous avez tecu des présents parmi les hommes. » 6. VI, 2; les deux mots
sont
séparés dans le verset : « ils
se tenaient » et « ils volaient ». Page 923.
1. Ces deux mots en surcharge. 2. 4: «On amassera vos dépouilles comme on amasse les sauterelles, dont on remplit des fosses entiéres. » 3. « Et le sommet du Carmel sera desséché. » 4. « J’ai desséché avec la plante de mes pieds toutes les eaux qui étaient fermées. » 5. Surcharge : « quels partis pris ». 6. LI, 21: « J’ai prété doucement Voreille et je l’ai recueillie. » 7. « Et le soir je pergai de ma main la muraille. » Page 924. 1. «{Un jour qui] ne sera ni jour ni nuit et sur le soir la lumiére paraitra. » 2. C’est au tableau de Delacroix, 4 Saint-Sulpice, que songe
Claudel; il y fera plus tard allusion dans Seigneur, apprenez-nous a@prier (O. C., t. XXIII). 3. Le texte de la Vulgate est en effet exacerbaverunt: « ils irritérent le Saint d’Israél»; le texte hébreu assez généralement
cité dans les commentaites est : « ils limitérent le Saint d’Israél.» Page 92).
1. Compléter : XI, 2, 3. 2. VII, 21, 27, premiére et derniére phrase.
Juillet- Aott 1930
1467
Page 926.
1. Denzinger-Banwart, Enchiridion, n° 693 (Concile de Florence, décret pour les Grecs). 2. Voit p. 740. 3. Deut., XX XIII, 23 : « Il possédera la mer et le midi. » Page 927.
1. Mme Fumet.
2. Sur Jean de Mesnace, voir p. 822, n. 3. Page 928.
1. Tout ce texte sera utilisé dans le chapitre x11 des Vitraux del’ Apocalypse (O. C., X XVI, p. 206). 2. Voir «le Poison wagnérien » (1938) (Pr., p. 371) : «la sinistre Cosima. » 3. Deut., III, 27-29. , 4. Cf. « Samedi», Conversations dans le Loir-et-Cher (Pr., p. 801) : « Toutes cesautos, ces cargaisons d’hommes et de
femmes qu’on transporte 4 toute vitesse dans les chars-a-bancs qu’il y a quelque chose d’important
mécaniques, c’est donc a leur montrer... » Page 929.
1. Surcharge : « et ébouriffé ». 2. Buste souvent reproduit, exécuté par Camille Claudel. Page 930.
1. Surcharge : « en ricanant ». 2. Claudel résume deux phrases du « Colloque entre Monos et Una » (Pléiade, p. 481 et 482). Page 931.
1. Salle du chateau de Brangues; les tapisseries (voir plus loin) en avait été conservées par l’ancien propriétaire, le marquis de Virieu. Claudel fera allusion 4 ces « réveries» dans les Vitraux del’ Apocalypse (O. C., t. XXVI, p. 199) : «On Vappelait aussi la chambre de la belle Judith a cause des tapisseries qui la décoraient autrefois : maintenant il n’y a plus que des grands panneaux de platre délabrés, sur lesquels je peux projeter a mon aise toutes les fresques de mon imagination... » 2. « Puissant et doux. »
1468
Cahier VI
Page 932.
1. Ps. LXVIII, 3 : « Je suis enfoncé dans une boue profonde, ou il n’y a pas de consistance. » 2. Surcharge : « et consolation ». 3. Rature : Le /ende. Aa VO1f Pr28Oy tele Page 933.
1. 2. 3. téte,
Enchiridion, n° 1782. Sut le hai-kai, voir Pr., p. 1163-1164. Ps. CXXXII, 2 : « Cest comme le parfum répandu sur la qui descend sur la barbe, la barbe d’Aaron. »
4. Hamlet, V, I, scéne du cimetiére : « Hélas, pauvre Yorick! »
Page 934. 1. « A une grappe de raisin»; voir ici p. 837, n. 1, et Po.,
Pp. 323. 2. Essays, Macmillan, Londres, chap. xu, p. 105. Trad. : « Les personnes Agées objectent trop, délibérent trop longtemps, risquent trop peu, se repentent trop vite, et conduisent rarement leurs entreprises 4 leur terme absolu, mais elles se contentent
d’une réussite médiocre. » 3. 11 : « Et voici qu'il vint une femme possédée d’un esprit qui la rendait infirme depuis dix-huit ans; et elle était courbée et ne pouvait pas du tout regarder en haut.» — 12: « Jésus, la voyant, l’appela auprés de lui et lui dit : Femme, tu es délivrée de ton infirmité. » — 13 : « Et il lui imposa les mains; et aussitdt elle redevint droite, et elle glorifiait Dieu. » — 14 : « Mais le chef de la synagogue prit la parole, indigné de ce que Jésus avait opéré cette guérison un jour de sabbat; et il disait 4 la foule : I y a six jouts pendant lesquels on doit travailler; venez donc en
ces jours-la et faites-vous guérir, et non pas le jour du sabbat. » — 15: «Le Seigneur lui répondit en disant : Hypocrites, est-ce que chacun de vous, le jour du sabbat, ne délie pas son beeuf et son 4ne de la créche et ne les méne pas boire?»» — 16: « Et
cette fille d’Abraham, que Satan avait liée voici dix-huit ans, ne fallait-il pas la délivrer de ce lien le jour du sabbat? » Page 935. 1. Rature : depuis. 2. Surcharge : « repassé le méme chemin ».
C e —
Septembre-Oltobre 1930
1469
Page 936.
1. Rature : reprendre. 2. En réalité 32-33 : « Voici que je chasse les démons et que jopére des guérisons aujourd’hui et demain, et le troisiéme jour tout sera consommé pour moi. Cependant il faut que je matche aujourd’hui et demain, car il ne convient pas qu’un prophéte périsse hors de Jérusalem. » Les mots grecs cités entre parenthéses se trouvent dans la glose de Menochius et aussi dans les notes de Fillion. Il n’egt done pas possible de savoir si Claudel utilise encore cette derniére bible ou celle de Carriéres-~Menochius. «Qui l’assistaient de leurs biens. » 3.
Page 937. 1. « Laine. » 2. De fide orthodoxa, L, 1, 4.
Page 938. 1. Ia, q. I, art. 10, trad. Sertillanges, Somme théologique, Desclée,
1925, t. I, p. 59.
2. Rature : /ivre. 3. P. 220, avec quelques omissions dans la copie.
Page 939. 1. Jean, I, 4: « En lui était la vie et la vie était la lumiére
des hommes. » 2. I Cor., xur, 12 : «[nous verrons] face a face», « alors je connaitrai comme je suis connu. » 3. Surcharge depuis : « et encore...» 4. Voit p. 937. Claudel reprendta ces explications dans le premier chapitre de Présence et Prophétie (O. C., t. XX, p. 223): « Cest un lieu commun de la théologie depuis saint Denys PAréopagite que tout ce que nous pouvons connaitre en ce monde de Dieu, c’est qu’I/ esf et ce qu’I/ n’est pas. Mais de cette proposition antithétique i] nous faut faire bien attention de ne pas exagétet le sens, ni dire que nous ne connaissons Dieu que par des négations, Le suspendant dans le vide et Le dégageant de tous rapports avec ce monde qu’Il a fait... » 5. Cité dans les Vitraux de |’Apocalypse (O. C., t. XXVI, p. 90) avec plus de virulence : « Je le revois 4 la fin de sa vie, énorme et hilare, pareil 4 un porc monstrueux, 4 un animal primé de concours agricole, tout décoré de roses en papier et de flots de rubans roses... »
1470
Cahier VI
6. « Levez-vous, prenez l’enfant et tenez-le par la main. » Page 940.
1. « Hélas! fausse nouvelle! » addition postérieure. 2. Ici trois photographies collées de Marie Claudel et de son fils. 3. Matth., XI, 28 : « Je vous soulagerai.»» —
Ps. XXII, 2 :
« Il m’a amené prés d’une eau fortifiante. » Rétablir : educavit. 4. « L’ayant baisé plusieurs fois, il le mena en sa maison. » — 15 : « Faut-il que vous me serviez gratuitement parce que
vous étes mon frére? » — pour elle était grande. »
20 : « Tant l’affeCtion qu’il avait
Page 941.
1. « Extase. » 2. Rétablir : ... videntis me. Ipse eft inter...: « Alors Agar invoqua le nom du Seigneur qui lui parlait, et elle dit : Vous étes le Dieu qui m’avez vue. Car il est certain, ajouta-t-elle, que jai vu ici par-derriére celui qui me voit.» — 14 : « C’est pourquoi elle appela ce puits, le puits de celui qui est vivant et qui me
voit. C’est le puits qui est entre Cadés et Barad. » 3. Voir la lettre que Claudel a écrite pour Chestertoniana, plaquette d’hommage 4 Chesterton pour son passage aux EtatsUnis (Pr., p. 1492). Elle est datée de quelques jours avant cette conférence, 11 novembre 1930. Page 942. 1. et n. 2. et ne 3.
Voit les Vitraux de I’ Apocalypse (O. C., t. XXVI, p. 184 4). 9:« Et ils ont publié hautement leur péché comme Sodome l’ont point caché. » Idée longuement développée dans un article de 1936 :
« A la louange de l’Autriche » (Pr., p. 1085). Page 943.
1. Nicolas Assouad, O.F.M., Polysema sunt sacra Biblia, S. Mauritii in Helvetia typis op. S. Augustini, 1917. Le texte cité du De potentia est en exergue. 2. Claudel cite ce texte dans /es Cing premiéres plaies d’ Egypte, Commerce, XXVIII, été 1931, p. 34. Cet article est le chapitre vir des Vitraux de I’Apocalypse; on retrouve cette citation, O. C., t. XXVI, p. 348.
Novembre-Décembre 1930
1471
3. « Le bien tend a se ptopager. » 4. Claudel résume plusieurs pages du tome II, étude XII, chap. 1, § 2 et 3, p. 448-451, et chap. 11, § 4, p. 496. — L’adage de la note précédente est cité passim dans l’étude XII.
Page 94). 1. Trad. : « Une Dame fort belle et distinguée se vit dans un réve dans la situation d’Hercule a la croisée des routes, comme a
Pentrée d’un théatre ou d’un café-concert. L’une a gauche était un escalier raide, étroit, et assez sale, éclairé par des becs de
“gaz grossiers et vulgaires conduisant sans aucun doute aux places bon marché du ‘Paradis’. L’autre a main droite était un porche large, spacieux et digne, avec d’épais tapis, des fleurs, des tapissetries, de gracieuses statues. Tous les gens bien habillés, dames et messieuts, se dirigeaient de ce cété-la, riant et bavardant, tout préts a s’amuser et 4 se donner du bon temps. La Dame trés belle et distinguée n’eut pas la moindre hésitation a prendre la méme direftion. De souriantes ouvreuses accueillaient tous ces gens chatmants et prenaient leurs tickets. La Dame distinguée montta le sien, il n’était pas de la méme couleur que les autres, mais les ouvreuses ne firent aucune rematque et Vintroduisitent en s’inclinant. Et en somme ce n’était pas un théatre ou une salle de café-concetrt, c’était une sotte d’immense salle d’attente, ou quelque chose évoquant une Cour. Des milliers et des milliers d’hommes et de femmes étaient 1a, tous silencieux ou se partlant doucement. La Dame distinguée prit son face-a-main et fut trés satisfaite de voir la tous ses amis et relations, mais tous avaient l’air plutét déprimés et ne répondirent pas, ou seulement quelques mots étranges, quand elle s’adressa joyeusement 4 eux ou s’excusa de les déranger pour trouver sa place. Beaucoup aussi étaient la qu’elle n’avait pas vus depuis fort longtemps. Que c’était agréable et charmant! Mais aptés tout ce n’était pas du tout agréable ni charmant! C’était plut6t une impression sombre et morne qui
se dégageait et devenait d’un instant a lautre plus sombre et plus morne. De l’autre cété de la piéce, autant qu’on pouvait voir, se trouvaient toutes sortes de gens impossibles et vulgaires, et la Dame distinguée se demandait comment ils avaient pu étre admis. Ils étaient au surplus tout 4 fait frustes, bruyants, tapageurs, tandis que de son cété les gens paraissaient silencieux, raides, délicatement choqués et figés dans une attitude de dignité bless¢e. La Dame distinguée se sentit mal a l’aise et pas a sa place. D’autant plus que son ticket portait un chiffre lisible et qu’elle n’atrivait pas 4 trouver une place libre. A ce moment elle entendit une ouvreuse criant son nom comme un groom
1472
Cahier VI
dans le hall d’un hotel. “Je suis 1a, cria-t-elle, oui je suis Madame Une telle.” L’ouvreuse prit son ticket et eut lair surprise : “Eh bien, madame, je vous cherchais justement, mais comment se fait-il que vous vous trouviez 4 la gauche de Sa Seigneurie, alors que vous deviez étre 4 sa droite? — Je ne sais de quelle Seigneurie vous patlez. J’ai vu deux chemins 4a l’entrée de cette représentation [sic] et naturellement j’ai pris celui de droite. Toute ma vie j’ai été habituée 4 faire les choses droites. On m’a
toujours dit que je serais dans le droit chemin si je faisais les choses droites, si je prenais la voie droite, si j’insistais sur mes droits, si je prenais la droite dire€tion, si j’observais ce qui était
écrit pour tous les ages dans l’Immortelle Déclaration des Droits.” Et louvreuse répondit : A// right (“Trés bien”). Et la Dame digtinguée dit : “Si donc tout est bien (a// right) en ce qui me concerne, ot est ma droite et due place dans la représentation, car je ne la trouve pas.” Et Pouvreuse dit : ““Ma chére Dame, le fait est qu’en faisant toujours dans votre vie ce qui vous semblait droit, en prenant toujours le droit, en mettant toujours votte confiance dans votre imm (incomplete) déclaration des droits, le fait est que vous étes arrivée non 4 la droite de Sa Seigneurie mais 4 sa gauche. Si vous aviez bien regardé votre ticket, vous auriez vu qu’a lentrée vous auriez da prendre non a main droite mais 4 main gauche, et ainsi vous seriez arrivée a la droite du Juge ou une petite place douillette et confortable vous était réservée. Cela n’a aucune importance, dit la belle Dame et peut étre trés facilement réparé. — Je suis désolée, dit Pouvreuse, mais vous devez rester ol vous étes jusqu’a la venue de Sa Seigneurie. — Et qu’arrivera-t-il, dit la Dame distinguée, quand, comme vous dites, Sa Seigneurie viendra ?— Je ne puis vous le dire, dit ’ouvreuse, mais je peux seulement
vous pfomettre que votre vie.” » 2. Isaie, XXX, 20 Pangoisse et eau de do&teur mais tes yeux
vous
aurez
certainement
la surprise de
: « Le Seigneur vous donnera le pain de affliction; il n’éloignera plus de toi ton verront celui qui t’enseigne. »
Page 946.
t. Claudel cite un autre passage de cet ouvrage dans les Vitraux de l’Apocalypse, p. 338. « Sit James dans /e Mystérieux Univers : mon sens les lois auxquelles la nature obéit font moins penser a celles auxquelles une machine obéit dans sa marche qu’a celles auxquelles un musicien obéit en écrivant une
fugue ou un poéte en composant un sonnet. — Les mouvements des électrons et des atomes ressemblent moins a ceux des piéces dune locomotive qu’a ceux des danseurs d’un cotillon. —
Décembre 1930
1473
Aujourd’hui il y a un large accord, qui sur le plan des sciences physiques touche 4 l’unanimité sur ce point : le flot des connaissances conduit vers une réalité de caraétére non mécanique; Univers commence 4 ressembler davantage a une grande pensée qu’a une grande machine. L’esprit n’apparait plus désormais comme une intrusion accidentelle dans le royaume de la matiére : nous commengons 4 soupgonner que nous devrions plutot le saluer comme le créateur et le gouverneur du royaume de la matiére. Nous découvrons que l’Univers manifeste une puissance de dessein ou de conttdle qui a quelque chose de | commun avec nos proptes esprits individuels. » 2. « Des fantémes et des esprits, et des bétes 4 la taille fantastique qui galopent dans la nuit (délivrez-nous, Seigneur). Litanie écossaise. » 3. Nom supprimé.
4. « Ephémeére. »
Page 947. ’ 1. Father John Banister Tabb, Out of bounds, Londres, 1928,
« Christmas », p. 203. Trad. : Un petit gar¢on né dans Le ciel, Mais aujourd’hui loin de son pays, Descend chercher son ballon, la Terre,
Que le péché a lancé trés loin. O mes camarades, joignons nos efforts, tous et chacun,
Pour Lui rapporter son ballon. 2. Trad. : « L’élément spirituel dans notre expérience est l’élément créateur, et si nous l’écartons, comme nous essayons de le faire en physique pour cette raison qu’il crée toujours une illusion,
nous ne pouvons qu’atteindre ce qui était au commencement : le Chaos. — Pour moi il est trés important de concevoir Dieu comme Celui par qui arrive la puissance et la direction » (Sir Arthur Eddington). 3. Trad. :« Sir James Jean, aprés avoir expliqué que |’Univers matériel tout entier se réduit 4 des ondes et que ces ondes sont de deux espéces — des ondes encapsulées que nous appelons matiére et des ondes libres que nous appelons radiations ou lumiére —, ajoute : Ces concepts raménent Univers entier a un monde de lumiére potentielle ou existante, de sorte que Vhistoire compléte de sa création peut étre racontée avec une exactitude et une plénitude parfaites dans les six mots : Dieu dit : Que la Lumiére soit! — Ce Créateur est moins un ingénieur qu’un mathématicien, c’est-a-dire quelqu’un qui vit dans le royaume de la pute pensée, et, ce qui est aussi important, qui
1474
Cahier VI
est hors de l’espace et du temps — qui sont des parties de sa création — comme l’artiste est hors de sa toile : Ce n’est pas dans le temps mais avec le temps que Dieu a créé le monde. » 4. Poésies, de Michel-Ange,
Paris, Hesse,
1826,
sonnet
1,
1&f quattain : « Le parfait artiste ne peut concevoir une image qui ne renferme avec soi le superflu du marbre, mais seul sait Ven extraire la main qui obéit 4 V’intelligence ». Trad. M. Dormoy, Paris, 1935, p. 62.
1931
Page 948. 1. Discours conservé dans les archives de Paul Claudel. 2. Le Pére Emmanuel d’Alzon, né au Vigan le 30 aoat 1810, mort 4 Nimes le 21 novembre 1880, fondateur de la Congrégation des Augustins de ’Assomption. Claudel a pu lire la phrase citée dans une revue ou un journal a propos de l’ouverture en 1930 du procés d’information canonique en vue de la cause de béatification du P. d’Alzon, ou dans la brochure du P. Cayré, la Spiritualité des religieux del’ Assomption, Desclée, 1931. 3. Rature : événement. Page 949. 1. 2. 3. 4.
Rature : ce que, Rature : ¢’esf. Rature: e//e s’. Rature : conforme.
Page 950. 1. Rature : disons. 2. Lecanuet, Ja Vie de l’Eglise sous Léon XIII, Alcan, 1930. Voir surtout les chapitres vi et virr sur la question biblique, Met d’Huslt, Loisy et ’encyclique Providentissimus, p. 318-383. Claudel développera ses idées 4 maintes reprises et notamment dans « Du sens figuré de l’Ecriture » (O. C.,t. XX), et dans les
Vitraux de |’ Apocalypse (O. C., t. XXVI, p. 37 8q.). 3. « Les verts paturages »; Claudel parlera longuement de cette représentation dans son « Deuxiéme discours aux Hommes de lettres belges » (décembre 1933) (Pr., p. 1231): « ... une piéce [...] que je considére comme une espéce de chef-d’ceuvre. » 4. Claudel prononce a cette occasion un discouts consetvé dans ses archives.
Janvier-Février 1931
1475
5. «La situation de l’Autriche est désespérée, mais pas sérieuse. »> 6. Voir Cah. Cl. III, p. 171 sq. 7. Joachim Hopper, né 4 Sueeck (Belgique) le 11 novembre 1523, mort a Madrid en 1576; juriste, auteur de Paraphrasis in Psalmos davidicos. Claudel a lu le texte qu’il cite dans le commentaire de Menochius (Bible de Carriéres), Ps. I, 1 : « Heureux homme qui n’a point matché dans le conseil des impies, qui ne s’est pas artrété dans la voie des pécheurs et qui ne s’est point assis dans la chaire de pestilence. — Dans ce vers sont notés trois étapes dans le péché, ceux qui commencent, ceux qui persistent, ceux qui sont déja avancés dans le mauvais chemin : ils vont,
ils s’arrétent,
ils s’assoient.
Admirable
gradation
par laquelle en trois étapes on s’éloigne du mal : en n’y entrant pas, ce qui est l’étape de la séduction;en ne s’y arrétant pas,ce qui est l’étape de VPattrait; en ne s’asseyant pas, ce qui est l’étape du consentement. Le conseil, c’est le début; la voie, c’est l’avancée;
la chaire, c’est Pacte. Les impies sont ceux qui n’ont pas 4 l’égard ,de Dieu de bons sentiments; les pécheurs sont ceux qui agissent ‘mal a son égard; les moqueurs, ceux qui V’attaquent.» Le commentaire reprend pour le dernier mot la version de l’hébreu. 8. « Quand vous ouvrirez la bouche pour commander, tout le peuple vous obéira.» Le texte qui suit est la version de VPhébreu : « Et tout mon peuple baisera ta bouche. » 9. XXIV, 26 : «Il baise les levres, celui qui répond des paroles justes. » Texte signalé a propos du texte hébreu qui ptécéde. Page 951. 1. Il s’agit sans doute de l’ouvrage d’Hubert Colleye, qui potte ce titre, publié chez Desclée de Brouwer en 1930. 2. « A toute créature.» Ps. XVIII, 5 : « Leur bruit s’est répandu dans toute la terre et leurs accents jusqu’aux extrémités du monde. » 3. Ce quatrain est écrit au haut de la page, a ’envers.
Page 952. 1. Coupure de joutnal collée, avec une lacune dans le découpage. Trad. : « La premiétre cosmologie d’ Hinftein. — Les cosmologues modernes se divisent en trois groupes principaux, ceux qui tiennent que l’Univers dans son sens le plus englobant — a savoir le continuum espace-temps de la relativité — est Statique et uniforme; ceux qui croient qu’il est uniforme mais non Statique, et ceux qui tiennent qu’il est a la fois non Statique et non untforme.
1476
Cahier VI
« Par le terme “‘statique’’ on veut dire que l’univers a toujours été et reStera toujours le méme quant 4 sa dimension ou dans son occupation de l’espace; Je terme “uniforme” veut dire distribution symétrique de la matiére de l’univers dans l’espace qu il occupe. « La premiére cosmologie d’Einstein en dehors de sa théorie de la relativité, tenait que l’espace n’était pas indépendant de la matiére; par suite, selon le raisonnement d’Hinstein, la matiére,
le total qu’elle constitue, déterminait la dimension de lunivers dans l’espace. Dans ces mémes perspectives le progres du raisonnement le conduisait 4 adopter ’hypothése que lunivers et Pespace qu’il occupait étaient a la fois Statiques et uniformes. « De Sitter fit Vhypothése que l’espace n’était pas dépendant
de la matiére. Ce qui lui fit renverser sens dessus dessous la cosmologie d’Einstein : au lieu d’une matiére déterminant Pespace, c’était l’espace qui déterminait la matiére et par suite également la dimension de l’univers. D’ot cette conclusion que, tandis que univers était Statique, il n’était pas uniforme. « Le Dr Tolman, de l'Institut de Technologie de Californie, suggéra la théorie que Vunivers était non Statique, quoique réparti uniformément dans espace. Ce qui l’aida a atteindre ces conclusions, ce furent les observations astronomiques du Dr Hubble qui étudia le ‘‘déplacement de la raie rouge” dans le spectre des nébuleuses spirales éloignées, dont certaines sont au moins a 300 millions d’années-lumiére. « On avait cru que ces nébuleuses spirales sont uniformément réparties a travers l’espace a des distances moyennes sépatées par 1 500 000 années-lumiére. Le Dr Hubble interpréta ce déplacement pour indiquer que ces nébuleuses s’éloignent de la terre a des vitesses atteignant 8 ooo miles a la seconde. « La “Course 4 Pabime” de l’Univers. — Les cosmologues ont conclu que l’univers est non Statique, c’est-a-dire qu’il continue a se dilater de plus en plus et qu’éventuellement il se perdra complétement dans un vide insondable... prouvant que Punivers est a la fois non Statique et non uniforme, qu’il se dilate dans Vespace, et, d’aprés ce que nous pouvons savoir actuellement, continueta 4 se dilater indéfiniment.
« De la plus récente preuve fournie par l’observation le Dr Shapley a dit qu’elle fournirait une image de l’univers comme étant irréguli¢rement, non uniformément distribué. II] y aurait des étendues illimitées d’espace vide, et ¢a et la une supergalaxie de millions d’années-lumiére de diamétre. « Quant au taux de cette expression, le Dr Shapley dit que dans les deux derniers milliards d’années, une durée correspondant a l’age de la terre, l’univers tout entier avait doublé ses dimensions ou son étendue dans l’espace. »
Pévrier-Mars 1931
1477
Page 973.
1. Rétablir LIV, 23 : curam au lieu de cogitationem: « Jette ton souci sur le Seigneur, et lui-méme il te nourtira. » 2. XIII, 3 : « Ils sont devenus inutiles. » 3. Trad. : « Je vous vends la mer, je vous vends l’horizon, je vous vends |’Inconnu. » 4. 3: « Le jour proclame son message au jour et la nuit en donne connaissance 4 la nuit. » 5. 5 : «Or il y avait la un homme qui était malade depuis _
trente-huit ans.»
—
Deutér., II, 14 : « Or le temps que nous
~ mimes a marcher depuis Cadesbarné jusqu’au passage du torrent de Zared fut de trente-huit ans, jusqu’a ce que toute la race des guetriers eit été exterminée du camp, selon que le Seigneur Vavait juré. — 15: Car sa main a été sur eux pour les faire tous périr du milieu du camp. »
Page 954. » 1. « Jésus les toucha point]. » Claudel note concordances a fango— disant : Je le veux, sois et la fiévre la quitta.»
et leur dit :Levez-vous [et ne craignez ensuite les passages signalés par les tetigit. Matth., VIII, 3 : « Il le toucha en purifié. » — 15 : « Il lui toucha la main — Marc, V, 30: « Qui a touché mes
vétements?» — Luc, VIII, 45 : « Les foules vous pressent et vous accablent et vous dites : Qui a touché mes vétements. »
| |
|
— 46 : « Quelqu’un m/’a touché. » — Marc, VII, 33 : « Il lui toucha la langue avec de la salive. » — Luc, VI, 19: « Toute la foule cherchait a le toucher. » — Jean, XX, 17: « Ne me touchez pas!» — Marc, VI, 56 : « Tous ceux qui le touchaient étaient guéris. » 2. «Ils étaient une multitude innombrable... et gataient tout par ot ils passaient » (littéralement : tout ce qu’ils touchaient). 3. I Cor., 1x, 27 : « Je réduis mon corps en servitude. » 4. Jean, VIII, 26 : « J’ai beaucoup de choses 4 dire de vous
et a juger. » Page 955. 1. « Et tous ces imbéciles qui nous parlent d’un Dieu d’un Dieu jaloux, oui, tant que vous vyoudrez! C’est ¢a que nous L’aimons » (J’aime la Bible, O. C., XXI, p. 2. Voir note dans les Vitraux del’ Apocalypse (O. C., t.
P- 337).
féroce, comme 379). XX VI,
3. Tiré de Gen., XX XVII, 31-32 : « Ayant teint la robe de Joseph dans le sang d’un agneau, ils l’envoyérent a leur pére, lui faisant dire: Voyez si c’est celle de votre fils, ou non? »
1478
Cahier VI
4. I Cor., rx, 9 : « Tu ne lieras pas la bouche au beeuf qui
foule les grains. » 5. Lire Isaie, LX, 9 : « Car les iles m’attendent et les vaisseaux de la mer depuis longtemps... » Page 956.
1. Ibid., 7 : « Tous les troupeaux de Cédar se rassembleront pour moi, les béliers de Nabajoth seront a ton service. » — 9: « Avec leur argent et leur or pour le consacrer au nom du Seigneur. » 2. «Et aprés qu’il eut tout dépensé (consummatum eft) une grande famine survint... » Consummatum est suggeére le rapprochement entre l’Enfant prodigue et le Christ (voir p. 904). 3, XXX, 24 : « Que le Seigneur me donne un second fils », et XLIX, 22 : « Joseph croitra et se multipliera... » 4. Cf. Lettre 4 Milhaud du 21 mars : « ... Stokovsky que j’ai vu retour du Mexique, 4 Philadelphie ot j’étais allé pour la représentation de Wozzek d’Alban Berg, qui m’a beaucoup intéressé » (Cah. Cl. III, p. 178). Page 957.
1. Le discours que prononga alors Claudel est conservé dans ses archives. 2. Cf. Alexis Carrel, /e Voyage de Lourdes, Plon, 1949. 3. Edmund Waller (1606-1687). Trad. : « Nous connaissons le gout des chaudes épices d’Arabie, sans avoir 4 subir le soleil brdlant qui fait vieillir. Sans avoir besoin des vers, nous nous parons de la soie de la Perse. Sans planter, nous buvons: de tous les vins. Nous ne fatiguons pas nos membres 4 travailler pour notre bien-étre. L’or, bien que ce soit un métal lourd, flotte jusqu’ici. La moisson nous appartient, que fauchent les Indiens. Nous labourons la mer et nous moissonnons ce que les autres sément. » 4. Voit p. 913. Claudel lui dédiera le poéme« Saint Tarcisius » (Po., p. 823), qu’il écrit le 12 mai de cette méme année. 5. 14: « La neige du Liban disparaitra-t-elle des rochers des champs? Ou peut-on faire tarir les eaux qui s’élancent, fraiches et courantes?» La version du texte hébreu pourrait se traduire par : « Est-ce que le voyageur abandonneta son chemin a cause de l’escarpement ou de la neige du Liban, ou abandonnera-t-il les eaux courantes 4 cause du gel? » Page 958.
1. « Le naufrage m/a pris sut cette mer. » 2. A&., X, 40, discours
de Pierre
: « Il a permis qu’il se
Abril-Mai 1931
1479
manifestat, non a tout le peuple, mais aux témoins choisis d’avance par Dieu, a nous qui avons mangé et bu avec lui aprés quwil fat ressuscité d’entre les morts. »
_ -
3. CEwres de S. Francois de Sales, Annecy, Niérat, 1894, t. 1V; Traité de l’amour de Dieu, vol. 1, p. 53; De Divinis nominibus, chap. Iv. 4. Discours conservé dans les archives de Paul Claudel.
5. Cest dans le catalogue de cette exposition qu’a paru le texte publié dans Pr., p. 296. 6. « Celui qui dit : cela suffit — ila péti. » 7. Noté d’aprés le Traité de l’amour de Dieu, chap. xu1, loc. cit., p- 67-72. Remarquer que « la Troisieme rencontre », Positions, II (O. C.,t. XV, p.310-318), ow le traité est cité, est datée d’avril
1931. Page 959. 1. Coupure de quatre mots, a caractére familial. ; 2. Loe. cit., chap. xiv, p. 73. Rétablir « en mon 4me » au lieu de « en moi » (De divinis nominibus, chap. Iv). 3. Discours conservé dans les archives de Paul Claudel. 4. Coupure de trois mots, a cara¢tére familial.
Page 960. 1. Odes, I, xt, 36-37; rétablir animaeque: « Et Paul prodigue
de sa gtande ame » (Budé, trad. F. Villeneuve). 2. Ibid., VV, 11, 27-32 : « Mais moi, a la maniére habituelle de
Vabeille du Matinus, qui butine avec effort le thym parfume, je me ptoméne dans le bois épais et sur les rives du frais Tibur, faconnant modestement des vers laborieux. » 3. Trad. : « L’astronome moderne considére |’Univers comme un espace clos et fini, aussi fini que la surface de la terre, et s’il n’est pas encore familier de l’Univers entier, ila de bonnes raisons @espérer qu’il le sera d’ici peu. De nos jours nous ne concevons plus de vastes profondeurs d’espace inconnues et inexplorées (comme Kant, Théorie des cieuwx, 1755) s’étendant a partir de nous dans toutes les direftions. Nous commengons 4 concevoir l’Univets comme Colomb et Magellan et Drake concevaient la terre, quelque chose de fabuleusement énorme, mais pourtant pas indéfiniment énorme : quelque chose dont nous pouvons fixer la limite: quelque chose susceptible d’étre imaginé et étudié comme un tout complet et unique : quelque chose dont on peut opérer la circumnavigation, si l’on peut dire (Jeans, /a Course des étoiles). »» CLAUDEL
V - 50
50°
1480
Cahier VI
Page 961. 1, Op. ciz., liv. ILy-chap. x1, p. 20r2. Op. cit., liv. IV, chap. 111, p. 210. Page 962. 1. Marc, XVI, 17 : « Voici les miracles qui accompagneront ceux qui autont ctu; en mon
nom
ils chasseront les démons,
ils parleront des langues nouvelles.» — 18 : «Ils prendront les serpents et s’ils boivent quelque breuvage mortel, il ne leur fera pas de mal. Ils imposeront les mains sur les malades et ils seront guétis. »
2. En haut de cette page 179, Claudel a collé une coupure de journal représentant une médaille trouvée dans les fouilles de Palestine, avec ce texte (en anglais) : « Trouvé dans un vase d’argile au courts de fouilles en Palestine pour une construction nouvelle, ce sicle d’argent a été présenté par F. Vester a la Société nationale de Géographie, au nom de la colonie amérticaine de Palestine. Cette piéce est de l’espéce dont il est fait mention dans le Nouveau Testament, 4 propos des trente piéces d’argent versées 4 Judas pout livrer le Christ. Cette piéce porte sur une face un vase sacté, peut-étre un pot de manne, décoré de pierreties, et au-dessus la date hébraique. Sur autre face : ““Jérusalem la Sainte” et une fleur emblématique que l’on croit étre la représentation Stylisée de la verge d’Aaron. Cette piéce est légérement plus petite qu'une piéce américaine de 25 cents, mais beaucoup plus épaisse. » Il a écrit, de part et d’autre de cette coupute : « La coupe trouvée dans le sac de Benjamin » et : « Cela peut étre aussi la coupe et le froment. Remarquer la tige avec ses trois fleurs ou épis, chacun divisé en trois excroissances. 30 shekel étaient le tarif de rachat légal, le prix du sang. » Page 963.
1. Quadragesimo anno, encyclique de Pie X] du 15 mai 1931. Page 964.
1. « Une marmite que l’on surveille ne bout jamais. » 2s VOU PATS Tee Le 3. Cf. Charles du Bos, Journal, t. IV, 1928, Corréa,
1950,
p. 93; sut le retour de Wust au catholicisme sous l’influence du livre de Curtius, Die Wegbereiter des modernen Frankreichs et « tout particuli¢rement de l’étude sur Claudel». « Je fus tout remué lorsqu’il me lapprit; le matin qui suivit son arrivée a Paris — il est ici pour la premiére fois — se rendant a 9 heures
Juin- Juillet 1931
1481
a Notre-Dame, il gagna aussitét le pilier que Claudel lui-méme désigne comme le lieu de sa conversion le jour de Noél 1886. » _ 4. « Mais votre concupiscence sera sous vous et vous la dominerez. »
5. « Je me souviendrai dans ma mémoire et mon desséchera en moi. »
Ame se
6. Voir la notice sur Menochius au début de la Bible de Carrieres, t. I, p. x1. On y lit que Menochius naquit en 1576. 7. Université catholique de Washington, ot lui est conféré le titre de doéteur en droit. — Sur la page 182, Claudel a collé .. trois photographies du Saint Suaire de Turin. Voir « le Visage du Christ » (O. C., t. XVI, p. 232). — A partir de la page 183, ila omis de paginer les vetsos; on retrouvera donc Vindication 193, 193 Vi.
Page 965.
1. « Ce qui a été subsiste encore; ce qui doit étre a déja été; et Dieu raméne ce qui est passé. » Rectifier : Eccl.
Page 966. 1. Trad. : « Jehoshuah. — Le tétragramme — le Nom divin et en son centre le SH — le Shin hébreu — Le Shin, comme dit le Zohat, est une des trois Méres d’ot vient toute création — Shin
— quatre barres — Une croix a été insérée dans le milieu du nom de Dieu en hébreu, qui fait de ce nom le nom du Messie» (Dr Werfel, /e Cur pur, p. 392). 2. « vtaie » et « pat soi » sont les termes mémes du Concile de Vienne (1311-1312). Cf. Enchiridion, n° 481. 3. Claudel taconteta cette « aventute » de sa carriére diplomatique dans « Quelques réflexions sur le métier diplomatique » (texte de 1941) (Pr., p. 1259). 4. Voit Cah, C/. VI, p. 161 sq. Page 967.
iy OD; Giz, YONG 1s fos Bo 2. Horace, Art poétique, 139 : Parturiunt montes, nascitur ridiculus mus: « Les montagnes accouchent, il en nait un rat ridicule. » 3. In Joan, trak. LXXX, 3: « La parole s’ajoute a l’élément,
et fait le sacrement. » Page 968. 1. Depuis « entre les graines... » ajouté sur la page suivante avec renvoi.
1482
Cahier VI
2. Voir Po., p. 977, quelques-uns Claudel a tirés de ces notes.
des petits poémes
que
Page 969.
1. Voir p. 683. 2. « La prostituée. » Page 970. 1. Deux lettres de Claudel 4 Arthur Fontaine (Tientsin, 1906, et Prague, 1910) ont été publiées dans Positions, I1 (O. C., t. XV, p. 226). 2. Lapsus ou emploi du mot dans son sens ancien; il faut lire « petit-fils ». 3. Voir p. 766 et Ioro. 4. Cette note semble avoir été ajoutée postérieurement; elle est en marge, entre la précédente et la suivante.
Page 971. 1. Albert Thomas, homme politique, ancien ministre; Henti
Ponsot, diplomate frangais. 2. Voit p. 970, n. 4. 3. Rature: Tours. Page 972. 1. Claudel reprendra cette idée dans « Note sur l’art chrétien »
(Pr., p. 128, note; texte de 1932). Page 973.
1. Panégyrique
de
S. Francois
édit. Lebarq, t. I, Hachette,
d’Assise,
CEuvres
oratoires,
1914, p. 200. Les trois premiéres
phrases ne sont pas 4 la suite dans le texte de Bossuet; a partir de « Leurs murmutes... », Claudel résume. La citation de S. Paul n’est pas dans Bossuet; elle est extraite de II Cor., vit, 14 : « pout quil y ait égalité ». 2. Voit Cah. Ci. II, p. 166. 3. Surcharge : « et maquignon ». 4. Ps. L, 14: « Affermissez-moi pat un esptit généreux. » 5. Rature : Dans.
Page 974. 1. Ps. L, 3 : «Selon la multitude LV, 7: « Il est large 4 pardonner. » 2. 27. « Ils périront eux aussi. »
de vos bontés.»
Isaie,
Aoit-Novembre 1931
1483
3. Voit p. 689, n. 2. 4. Initiales difficiles 4 interpréter. La seconde : Dieu? 5. Voir ce que Claudel notait déja dans « Propositions sur le vers frangais » (1925) (Pr., p. 42): « Il est compréhensible que les le&teurs aujourd’hui refusent de s’engager dans ces déserts centimétriques, du genre de /a Henriade, de Jocelyn ou du
Runoia, interminablement jalonnés de rimes alternatives et que blanchissent les ossements des explorateurs. »
Page 975. 1. Lire : « Docelles » (Vosges). 2. « Perrons. » 3. Voir H. Bremond, Histoire Jittéraire..., t. IX, chrétienne sous |’Ancien Régime », p. 164-176. 4. « Note fondamentale et note finale. »
«la
Vie
Page 976. ?
1. Allusion au deuxiéme texte, « Réflexions supplémentaires » : « Il y a des moments ot l’on a impression qu’on a surpris la nature en pleine préparation d’une de ces énormes plaisanteries archi-connues et qu’elle est pétrifiée de confusion, eh! grande vache! » (Po., p. 747). 2. Une
Saison
en
enfer, « VImpossible»,
Pléiade,
p.
226.
Claudel cite de mémoire : « Mais je m’apercois que mon esprit dort. / S’il était bien éveillé toujours a partir de ce moment, nous setions bientét a la vérité, qui peut-étre nous entoure avec ses anges pleurant. / C’est cette minute d’éveil qui m’a donné la vision de la pureté. » 3. Voir p. 822. Le 19 novembre, Claudel parle de ce livre a Milhaud, avec admiration : « Il y a la des choses splendides, dignes des plus grands myStiques, entre autres des passages sut l’exil de la Shekinah et sur la création par retrait de Dieu (zimzoun)...» (Cah. Cl. IL, p. 193). Il s’agit de Quand Israél aime Dieu, Plon.
4. Cité dans la « Conversation sur Jean Racine» (Pr., p. 460) : « La langue de l’amout, barbare pout les autres. » 5. Voit p. 903. 6. Claudel cite de mémoire : « Pour arriver, il faut mettre de eau dans son vin, jusqu’a ce qu’il n’y ait plus de vin»
(Journal, 3 juillet 1894). Page 977. 1. S. Maximi scholia in librum de Coelesti hierarchia, in cap. 1, § 2 (P. G., IV, col. 32,) : « Le grand esprit, le chef de Babylone. »
1484
Cahier VI
2. Surcharge : « tout échauffé ». 3. Député qui joua un certain rdle dans le probleme des dettes; Claudel le ridiculise dans « Quelques réflexions sur le meétier diplomatique » (Pr., p. 1258). 4. Les principaux ouvrages du philosophe Vasubandhu ont été traduits en francais par Louis de La Vallée-Poussin et par Sylvain Lévi. 5. Lire « Epitre de Jude », verset 6: « Et les anges qui n’ont pas conservé leur dignité, mais qui ont abandonné leur propre demeute, ont été réservés par lui pour le jugement du grand jour, liés par des chaines éternelles, dans les ténébres. » Page 978. 1. Judith, hs 2:«... le sectet de son dessein»; 5 : « Allez attaquet tous les toyaumes d’Occident. » — III, 6 : « Venez a nous comme un maitre pacifique et faites usage de nos services comme il vous plaira »; 13 : « Nabuchodonosor lui avait commandé d’exterminer tous les dieux de la terre. » — V, 5: « ... qui habite les montagnes. » — VIII, 29 : « Priez pour nous parce que vous étes une femme sainte. » —
IX, 4 : « Car c’est vous
qui avez fait ces anciennes metveilles et qui avez résolu celles qui sont venues aprés »; 13 :« Qu’il soit pris par ses yeux comme pat un piége en me regatdant, et frappez-le par la suavité de mes lévres »; 14 : « Donnez-moi la congstance dans le cceut pour le mépriser et la force pout le perdte...»; 15 : « Que la main d’une femme l’ait renversé...»; 17 : « Dieu des cieux, créateur des eaux, exaucez-moi,
misérable...»
—
X, 4 : « Le Seigneur méme
lui
ajouta un nouvel éclat, parce que tout cet ajustement avait pour principe non la passion, mais la vertu. C’est pourquoi le Seigneur lui augmenta sa beauté, afin qu’elle apparit aux yeux de tous avec un éclat incomparable »; 13 : «... pour lui découvrir leurs secrets »; 18 : « Qui pourrait mépriser le peuple des Hébreux qui ont des femmes si belles...»; 20 : « Elle jeta les yeux sur son visage [celui d’Holopherne]. » — XI, 6 : « Car la sagesse de votre esprit est célébre dans toutes les nations. » — XIII, 27 : « Dieu a coupé lui-méme cette nuit par ma main la téte
de tous les infidéles. » — XIV, 16 : « Voici qu’Holopherne est étendu 4 terre et sa téte n’est plus avec son corps. » — XV, Io: « Vous étes la gloite de Jérusalem, vous étes la joie d’Israél; vous étes l’honneur de notre peuple.» — XVI, 8 : «Il n’a point été frappé par les fils des Titans... mais Judith, fille de Mérari, a tenversé par la beauté de son visage. » 2. Allusion a la Judith de Giraudoux qui venait d’étre représentée; c’est en maniére de protestation que Claudel écrit le poéme Judith, diretement inspité des notes qui précédent
Décembre 1931
1485
et daté du 17 décembre 1931 (Po., p. 785). — Voit a ce propos les lettres 4 Milhaud des 19 novembre et 16 décembre 1931, Cah. Cl. II, p. 192 et 198. Page 979.
1. Note en marge du livre de Jean de Mesnace, Quand Israé] aime Dieu (voit p. 976). 2. Sans doute « Psaume», c’est moins une référence que Vindication d’une attitude. 3. Nikita Balief, chef d’orchestre russe, direfteur d’un - théatre
4 Moscou avant la Révolution.
4. Voit page précédente. 5. En surcharge : «le beeuf sur la langue... espagnole ». — Claudel teprendta cette plaisanterie dans « le Vieux quai @Orsay » (Pr., p. 1253; texte de 1937). 6. Rature : devient menagant. Page 980. 1. Voit « Sut la présence de Dieu » (O. C., t. XX, p. 224).
Page 98.
1. Coupute de journal collée. Trad. : « La daétylo championne du monde, Miss Stella Willins, de Brooklyn, N. Y., a tapé 124 mots parfaits a la minute pendant une bonne heute, mais si chaque homme, femme et enfant sur
la surface de la planéte pouvait taper aussi vite que Miss Willins, cela ne ferait pas une grande différence... c’est-a-dire s7ils s’efforgaient de faire toutes les combinaisons possibles sur une machine a\ écrite. S’ils tapaient tous nuit et jour durant un
quadrillon d’années, ils auraient 4 peine commence
a écrite
toutes les combinaisons. Sut une machine 4 écrire ordinaire, il n’y a pas moins de 1 405 006 117 752 879 898 543 142 606 244 §1I 596 936 384 000 000 000 combinaisons possibles, sans compter la touche de manceuvre.
« Huxley déclara un jour que six singes dressés a taper n’importe comment sur des machines 4 écrire pendant des millions d’années en viendtaient 4 écrite tous les livres du British
Museum.
C’est
la une
déclaration
sensationnelle;
il
semble cependant que ce ne serait pas impossible en un temps indéfini. Mais le nombre de combinaisons de lettres, de mots,
de blancs est aussi infini. L’éditeur de Science et Invention dit que Vaffirmation de Huxley serait impossible 4 prouver. C’est le probléme de tenter de résoudte un probléme infini dans une durée infinie.
1486
Cahier VI
«Il y a 403 291 461 126 605 635 584 000 000 combinaisons
des 26 lettres du seul alphabet. Supposons qu’un singe décide de frapper la lettre 2 ou une autre lettre un million de fois avant de la grouper avec d’auttes lettres. Par un coup de chance une page entiére d’histoire pourrait étre écrite, mais une seule petite erreur pourrait la gacher, et les chances de faire cette seule erreur sont infinies. » 2. V. 476-479 :
Combien charmante est la divine philosophie ! Elle n'est pas réche ni rébarbative comme le croient les sots et les obtus,
Mais une musique qui rivalise avec le luth d’Apollon, Et un régal perpétuel de douceurs et de nectar. 3. Lucain, Pharsale, v. 179-180 : « La série infinie des événements s’étale; ’avenir entier tend vers la lumieére. »
4. « Vie de Périclés », tradution d’Amyot : « Voila pourquoi les ouvrages que fit alors Périclés sont plus esmerveillables, attendu qu’ils ont esté parfaits en si peu de temps et ont duré si longuement ;pour ce que chacun diceux dés lors qu’il fut parfait, sentait déja son antique quant a la beauté, et néanmoins quant a la grace et vigueur il semble jusqu -aujourd? hui qu’"il vienne tout fraichement d’étre fait et parfait, tant y a je ne sais quoi de florissante nouveauté, qui empéche que Vinjure du temps n’en empite la vue, comme si chacun desdits ouvrages avait au dedans un esprit toujours renjeunissant et une 4me non jamais vieillis-
sante qui les entretint en celle vigueur. » Page 982.
1. « Comme une rose imparfaite. — Imparfaite mais odorante. » 2. Voir Vexégése de ce tableau dans « Introduction 4 la peinture hollandaise » (Pr., p. 183).
3. Peintre né a Douai en 1570. 4. Une telle notation n’est pas sans rapport avec la composition des Vitraux de l’Apocalypse; elle donne a ce commentaire sa résonance; Claudel a le sentiment qu’une telle étude n’est pas sans rapport avec le monde ot il vit et les citconstances historiques. 5. CXXXVIII, 16 : « Vous déterminez leurs jours avant qu’aucun deux n’existe. » — CXL, 4: «... pour chercher des excuses au péché. » — CXLIII, 12: « Leurs filles sont parées et
otnées a la maniére d’un temple. » — CXLVI, 4-5 : « Il compte la multitude des étoiles et il leur donne des noms 4 toutes. Et sa sagesse n’a point de bornes. »
Décembre 1931 - Janvier 1932
1487
1932 Page 983. 1. Mme Meyer est auteur d’un ouvrage sur la peinture chinoise que Claudel citera dans «la Poésie francaise et PExtréme-Orient » (Pr., p. 1041). |
Page 984.
1. Sermo XV super Cantica, matines de la Féte Jésus, 6° legon : « Jésus est miel pour la bouche, Poreille, jubilation pour le cceur. » 2. Voit p. 430. 3. Note écrite en marge dune teproduétion Vermeer (voir la note 2, p. 982). 4. Nursery Rhymes, rétablit : With silver... And in a row, Trad. :
du S. Nom de mélodie pour du tableau de pretty maids all
Marie, Marie, tout au contraire, Comment pousse votre jardin ?
Clochettes d’argent et coquillages Et jolies filles sur un seul rang. Page 985.
1. Voir p. 188. 2. Claudel a collé sur cette page deux photographies : Former secretary of war Newton D. Baker et Archibishop of Mexico. — Traduétion de ce texte : « Tous les protestants vont-ils en enfer? — Jen’en suis pas sar, mais je l’espére. — Pourquoi? — Je suis sar que le ciel leur paraitra un endroit bien ralenti, triste et arriéré. Je suis str qu’ils trouveront en enfer une atmosphére qui leur conviendta bien mieux, quelque chose de plus chaud (intime) si vous me permettez l’expression, de plus familier, avec quoi toutes leurs expériences passées, toutes leurs idées et leurs sentiments s’adapteront merveilleusement — toute cette remarquable préparation ne peut pas étre pour frien. Notre doux moi trouvera une place qui est enti¢rement sienne, qui est entiérement son ceuvre et sa rémunération, compléetement a labri de ce dieu génant et importun qui intervenait si désagréablement dans notre intimité. » 3. Rature: Que notre petite saur. 4. Claudel écrira toute une série de petits poémes sur Sainte Agnés (voir Po., « Poémes retrouvés »). 5. Voir « les Ailes voient » (Po., p. 882).
1488
Cahier VI
i 986.
. Claudel parle de ce concert 4 Milhaud, lettre du 14 janvier be isCol (GIANT joe BOS 2. Laval
forme
aussit6t
un
autte
gouvetnement
qui
ne
dureta que quelques mois, ce qui explique Vaddition « le 1°7 ». 3. Voit Po., p. 872; ces vers sont insérés dans « Pour la féte de Sainte Agnes ». 4. Coupure de journal collée; ce texte est cité en note a la fin de la Lettre sur S. Joseph écrite le 24 mars 1911 et adressée a S. Pitt; il est probable que Claudel l’a ajouté au moment de Pédition dans Positions, I.
5. Surcharge depuis « ne laissant... » .
Page 987.
1. Claudel préfacera le livre de Michel Vieuchange, Swara, Plon, 1933; voit Figures et paraboles (O. C., t. V, p. 225).
Page 988. nN
1. Coupute de journal collée a cdté de la photographie (sans légende) d’une téte de guerrier grec. Trad. : « Pourquoi m’appelez-vous Seigneur, et ne faites-vous pas ce que je dis? (Luc, VI, 46).
« Trés émouvante plaque de l’ancienne « Vous m’appelez « Vous m’appelez « Vous m’appelez « Vous m’appelez « Vous m’appelez « Vous m’appelez « Vous m’appelez « Vous m’appelez « Vous m’appelez « Vous m’appelez
est cette étrange inscription sur une vieille cathédrale de Lubeck : Maitre, et vous ne m’obéissez pas; Lumiere, et vous ne me voyez pas; Chemin, et vous ne m’empruntez pas; Vie, et vous ne me désitez pas; Sage, et vous ne me suivez pas; Aimable, et vous ne m’aimez pas; Riche, et vous ne m’interrogez pas; Eternel, et vous ne me cherchez pas; Généreux, et vous ne me faites pas confiance; Noble, et vous ne me servez pas;
« Vous m’appelez Puissant, et vous ne m’honotez pas; « Vous m’appelez Juste, et vous ne me craignez pas;
« Si je vous condamne, ne me blamez pas. » 2. Les Japonais venaient de faire une tentative d’invasion, a Shanghai en particulier, ot Ja bataille était trés violente. 3. « Mieux vaut la fin d’un discours que son commencement. » e « Ne sois pas trop juste. » : . « Jai examiné toutes choses dains mon dibcie pour savoir,
Janvier-Février 1932
1489
et pout considéter, et pour chercher la sagesse et la raison... » D’aprés le commentaire de Menochius, numerum ttaduit rationem,
mais Claudel a remplacé operum Dei du méme commentaire pat Angelorum. 6. De quantitate animae, cap. xxx,
44 (P. L., XXXII,
col.
1060) : « Les yeux ... [tu peux] assimiler leur vision A cette baguette. » Trad. P. de Labriolle, Desclée de Brouwer. 7. De musica, lib. VI, cap. v, 14 (P. L., ébéd., col. 1171). Claudel a omis : ef nondum extintlus in memoria esse dicitur : « Le mouvement
de l’Ame gardant son élan [et n’étant pas encore éteint, dit-on, _
dans] la mémoite, et quand Vesprit fait attention a autre chose... » Trad. Finaert, Desclée de Brouwer. 8. Ibid., cap. v1, 16 : « Les rythmes... que nous observons
dans l’activité de ame, lorsque silencieusement sans tecourir a la mémoire, elle produit en soi un mouvement rythmé selon les intervalles du temps. » 9. Ibid. : « Nombres de jugement, nombres proférés, nombres entendus, nombres de mémoite, nombres sonotes. » Page 989.
1. Ibid., cap. x11, 38 : «... [dans] le son lui-méme qui est comme la lumiére de ces sortes d’harmonies et auquel s’oppose le silence, comme les ténébrtes aux couleuts. » 2. Ibid., 41. Claudel a écrit autem au lieu de igitur : « Or, ce
que l’ame désire, c’est de se soumettre d’autres 4mes, non pas des ames d’animaux... mais des 4mes raisonnables, ses compagnes dont elle partage le sort sous une loi commune.» — « Ces | harmonies et ces mouvements par lesquels les Ames agissent | sut les autres 4mes. » 3. Ibid., cap. xv, col. 1189 : «... nous sentirons sans nulle | inquiétude et pleins de joie les rythmes par lesquels nous donnons le mouvement a nos corps. » 4. Ibid., cap. xvu, 56 (col. 1191) : Deus autem summe bonus et | ' summe justus, nulli invidet pulchritudini: « Dieu souverainement bon, souvetainement juste, ne condamne aucune beauteé. »
5. Ibid. (col. 1192). 6. Ibid. S. Augustin écrit corrationalitas. 7. Ibid., 58 : « Au-dessus d’elle se répand la nature des eaux tendant elle aussi vers l’unité, nature plus belle et plus transparente a cause de la plus grande ressemblance de ses parties, et gardant la place convenable a son rang et a sa conservation. » 8. Ibid. (col. 1193) : « Les harmonies rationnelles et intelligibles des Ames saintes et bienheureuses, accueillant sans aucun intermédiaire la loi de Dieu, sans laquelle nulle feuille ne tombe de l’arbre, et pour laquelle les cheveux de nos tétes sont comptés,
1490
Cahier VI
transmettent cette loi jusqu’a ordre établi sur terre et dans les enfers. » 9. « Trapu, tamassé. » 10. Sur cette page, photographie d’une coupe chinoise. 11. Isaie, LVIII, 9 : « Si tu éloignes la chaine du milieu de toi»; le texte donne si abstuleris...
Page 990.
1. Sutcharge : « ternes onyx». 2. « Et lorsqu’il fut entré dans Jérusalem toute la ville fut émue et disait : Quel est celui-ci? » — Cette note est liée par une fléche 4 une photographie. « Au couvent de la Conception a Malaga, aptés le pillage du dortoir interrompu par! “apparition” d’un Christ que figuraient les plis dune étoffe prés d’une fenétre. » 3. Trad. : « Voici, toutes les 4mes sont a moi.» 4. Voit « En Papouasie » (O. C., t. XVI, p. 265). 5. « Qui lit dans la pensée. » 6. Claudel copie ces vers page 992. Page 991.
1. Cynthia’s Revels, I, 1 (coupure collée). Trad. : Lentement, lentement, 6 source fraiche, coule en mesure avec mes larmes [salées
Encore plus Ecoutez les Le malheur Courbez la
lentement, languissantes et douces fontaines, sombres accents de la musique, regle ses pleurs sur ses mouvements quand elle chante, téte, herbes et fleurs,
Chagrin, déverse tes ondées,
Car nos beautés ne sont pas nétres. Ah ! que ne puis-je encore Comme la neige fondue sur quelque colline rocailleuse, Laisser tomber, tomber, tomber mes larmes
Quand l’orgueil de la nature n'est plus qu’une jonquille desséchée. 2. de la 3. 4.
Epitaphe de Ben Johnson, notée par Claudel en marge photographie du poéte collée en haut de la page a gauche. Au-dessus de la note, un mot difficile a lire : « Harmone. » « Faites Vaumone de votte bien. »
Page 992.
1. « Epitre a Messieurs de l’Académie francaise sur cette question : L’étude fait-elle le bonheur dans toutes les situations de la vie? » v. 63-94 (CEuvres complétes, t. V, Paris, Didier, 1846,
p. 296).
Mars- Abril 1932
1491
2. Cette note se tapporte 4 une photographie collée de Savants in the schoolroom — The Stars learn about astronomy. Page 993.
1. Surcharge : « Insull. » 2. Surcharge : « Daily news. » 3. Discours conservé dans les archives de Claudel. y
Page 994. 1. Cette note est en haut de la page 197, donc copiée un peu
avant la précédente; Claudel a poursuivi le texte de la page 196 sut le reste, encore libre, de la page. 2. « L’éternité n’est pas le temps sans fin mais le temps actuel sans mouvement. » 3. A Vencre rouge dans le manuscrit. 5 : «La voix du Seigneur brise les cédres... — 6 : Il les mettra en piéces comme un jeune tauteau du Liban. » ?
Page 995. 1. Id., ibid. : « et le bien-aimé est comme le petit des licornes. » 2. Id., 9 : « La voix du Seigneur prépare les cerfs. » 3. Id., ibid. : « elle découvre les lieux sombres. » 4. XLI, 2 : «Comme le cerf soupire [aprés les sources des eaux]. » 5. XXVIII, 10 : « Le Seigneur fait persister le déluge. » A Vencre rouge sur le manuscrit. 6. En rouge, pour les textes latins. [did., 7 : « La voix du Seigneur fait jaillir les flammes du feu.» — 8 : « La voix du Seigneur ébranle le désert. »» —
Num., XX, 6 : « Ouvrez-leur
votre trésor, la source d’eau vive.» — Le commentaire que Claudel a fait du Psaume XXVIII (O. C., t. XIX, p. 113) est daté de mai 1932. Page 996.
1. Traduétion de l’ouvrage anglais The Unreality of the world and the Vedanta, Calcutta, Examiner Press, 1925; compleéter le titre Essai sur l’acosmisme de l’Advaita. 2. Voir p. 913. Isabelle Riviere publiera, dans la Vie inte/lectuelle du 10 juin 1932, une étude sur Maria Blanchard. 3. Lu dans H. Bremond, Hi. /itt..., t. IX, p. 20, « Tradition
de l’Eglise sur les Bénédiétins
de Jean de Sainte-Beuve? »
Claudel a omis le point d’interrogation.
1492
Cahier VI
4. spancité dans « Mort de Judas » (Pr., p. 907). 5. Ibid., p. 904 : « Vous étes un homme, monsieur Geethe!
Helas! eae ce n’était qu’un surhomme, c’est-a-dire un pauvre diable! » — L’article de Suarés a paru dans la N.R.F. de mats 1932, numéro spécial sur Geethe, sous le titre « Goethe Puniversel ». Claudel lui écrira de Bruxelles, le 23 décembre 1933 : « Votre admitation pour Gathe et pout Stendhal me laisse interdit, ne pattageant ce sentiment 4 aucun degté » (p. 186).
Page 997. 1. Cf. Jammes, p. 333, lettre dans laquelle Jammes annonce a Claudel cette nouvelle. 2. Voit Bremond, Hist. /itt..., t. IX, chap. u, § 1. Pour S. Francois de Sales, ibid., p. 112 sq. 3. Claudel se méprend sur la pensée de Bremond; 4 cette époque il commence visiblement a se détacher de lui. 4. A cette réunion des sociétés huguenotes, Claudel prononga un discouts consetvé dans ses archives. — Sur cette page deux photographies collées : « le serviteur de Dieu Don Auguste Czattoryski » et « le serviteur de Dieu Don André Beltrami ». 5. Trad. : « Mesdames, Messieuts, je veux vous introduire dans le paradis de la dure réalité. »
Page 998.
1. Idée sur laquelle Claudel aime 4 revenir; voir, par exemple ONG toy illllenp.ezsoF
>
2. En réalité Amos, VU, 4: « ce feu dévora le grand ab}me. »
3. Voir « Ma sceur Camille » (Pr., p. 279): « Le nez? Disons plutét une trompe de sanglier... » 4. « Carrés de pourpre. » 5. Mot réécrit sur « enragé », semble-t-il. 6. En surcharge depuis « et de... ». Un mot illisible. 7. Surcharge : « elle fait la sourde oteille. »
Page 999.
t. Notes utilisées parfois littéralement dans « la Légende de Prakriti » (Pr., p. 963--964). 2. « Parce que tu m’as vu, Thomas, tu as ctu. »
3. Ed. des Bénédi&ins Vromant,
de S. Paul de Wisques, Bruxelles,
1919, p. 124. La copie comporte
une omission
quelques lignes aprés « C'est une vie supérieure... ».
de
Abril- Juin 1932
1493
4. Sut cette page, deux photographies : Anne de Guigné et Guy de Fontgalland. 5. I, 20: « Car la colere de ’homme n’accomplit pas la justice de Dieu. » — colére. »
19 : « [Que tout homme soit] lent 4 se mettre en
Page 1000. 1. Cette note semble avoir été raturée par Claudel; nous Vavons toutefois maintenue. 2. « Fleurs de pommier. » 3. Les articles de Charles du Bos sur Geethe, parus dans les 6€ et 7° séties d’_ Approximations, ont été écrits pour la plupart en 1932. Claudel a lu Il’ « Apergu sur Goethe» dans le premier cahier de Vigile, 1932; il s’ouvte par un commentaire de I’ « ode a la Persénlichkeit ». 4. Claudel avait déja écrit de Goethe « le grand Ane solennel » dans « Sainte Genevieve » (Po., p. 642). ,
5. Ill, 6: « La langue est un monde d’iniquités. »
' 6. Enfer, X XVI, 125 : « De nos rames nous fimes des ailes a notre vol insensé. » Rétablir : De remi facemmo ali al folle volo. 7. En marge, en travers de la page. Page roor. 1. Claudel a collé la note daétylographiée qui suit dans son Journal. z. « Et vous aussi vous rendrez témoignage parce que vous étes avec moi depuis le commencement. » Page 1002.
1. Notes utilisées, comme celles auxquelles renvoie Claudel (p. 998), dans « la Légende de Prakriti » (Pr., p. 964). 2. La Vie de Jules Lemaitre, de Myriam Harry, ne paraitra qu’en 1946, Flammarion; on y trouvera ces détails p. 294, 296 et 307. 3. Premier ministre du Japon, assassiné par les nationalistes. Page 1003.
1. « L’esprit lui-méme trend témoignage a notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. » 2. « Un instrument dont joue PEsprit-Saint. » 3. « A Pétre présent et intelligible 4 soi-méme, la présence de la chose suffit sous quelque mode que ce soit. »
1494
Cahier VI
4. Comment. in I Sent., dist. 11, q. Iv, sol.: « D’ou, puisqu’il
y a une seule ame dans laquelle toutes les puissances de connaissance ont leur source, la tension de cette seule et méme
4me
est demandée pour |’a&tion de toutes les puissances de connaissance; et donc, comme |’4me se tend tout entiére pour faire agir une seule puissance, l’>homme est empéché de faire agir une autre puissance. » 5. XVI, 17: « Celui qui s’unit au Seigneur fait un seul esprit avec lui. » 6. Au-dessus de cette page Claudel a collé la photographie de sa fille Reine jouant au tennis, publiée par un journal amé-
ticain. Page 1004.
~
1. Ps. CII, 32 :« Il touche les montagnes et elles fument. » 2. Journal spirituel de Lucie Christine (1870-1908) publié par Auguste Poulain, Beauchesne, 1910, hors commerce. Lucie Christine est le pseudonyme d’une mystique, mére de famille; le texte cité se trouve p. 233, daté du 15 novembre 1887. 3. Début du De genesi ad litteram (P. L., XXXIV, col. 246247) : « Dans les Livres saints il faut voir le message éternel, le récit des faits, les prophéties, les conseils. » 4. Cité bid. (col. 247) : « Toutes ces choses leur arrivaient en figures. )» Page 100s.
1. « Une créature qui par des mouvements montte que le temps lui-méme est une créature. »
incorporels
2. Gen., I, 14; rétablir : in signa, et tempora: « [Que les astres setvent] de signes pour marquer les temps... » 3. Voir « le Cygne » (Po., p. 869). 4. « Mes os ne vous sont point cachés a vous qui les avez faits dans le secret, non plus que ma substance, formée comme au fond de la terre.» — 16 : « Vos yeux m’ont vu lorsque j’étais encote informe, et tous les hommes sont écrits dans votre livre.
Vous déterminez leurs jours avant qu’aucun n’existe. » 5. Matth., XXVII, 5 : « Judas alla se pendre.» Tout le commentaire est utilisé dans « Mort de Judas » (Pr., p. 908). 6. Claudel a collé (p. 203) une coupute du Washington Herald, photographie de ses deux filles Reine et Renée sur le bateau au moment de leur départ.
Juin-Aont 1932
1495
Page 1006. 1. Voir Po., p. 897, « le Delphinium » et « la Fleur bleue », et aussi « le Cygne » écrit 4 la méme époque. 2. Homélie dite [He épitre, x11, 2, éd. Hemmer, Paris, Picard,
1909, Pp. 154.
3. Hermas, /e Pasteur, Paris, Picard, 1912.
3° vision,
3° tableau, éd. Lelong,
Page 1007. 1. Claudel pense sans doute a Gide (cf. p. 977). 2. « Si le sel perd sa saveur, dit ’Evangile, avec quoi le salera-t-on? Les catholiques modetnes répondent d’une seule voix : Avec du sucre» (« le Goat du fade», Pr., p. 114, texte de
1934).
3. Claudel reprendra ces idées dans un article de 1939, réponse a Maritain et Mauriac, « Attendez que l’ivraie ait mari » (voir Pr.,p.1326).— En haut de cette page ila collé une coupure ‘de journal, photographie d’une gravure chinoise : Shan’s piéturization of a jungle legend about five Chinese who met a tiger while walking in the jungle. Ouickly the Chinese formed themselves into the shape of an elephant, and the tiger, frightened, slunk away. Page roo8.
1. Ces vers sont écrits dans la marge. 2. « Trompe-l’cil. » Page 1009.
1. Il s’agit bien entendu du commentaire demeuré inédit et publié en 1966 : Au milieu des vitraux del’ Apocalypse. 2. « Criardes. » 3. Ces vets sont écrits dans la marge. 4. C’est au cours de cette nuit en chemin de fer que Claudel a composé « la Pérégrination noéturne » (Pr., p. 923). 5. Voir O. C., XVI, p. 232 et 362: « le Visage du Christ ». Page roo. 1. Voit p. 380, n. 9. 2. Voit Po., p. 867 : « Poéme a Marion Cartier ». 3. Isaie, LXII, 12. Le sens est différent : « Cité recherchée {non délaissée]. » 4. En note dans l’édition Brunschwicg, p. 621; le texte cité est de l Amgustinus de Jansénius. Rétablir : « Suivant la formule
1496
Cahier VI
de Jansénius, le Nouveau est caché dans |’Ancien, |’Ancien est manifesté par le Nouveau. In veteri...» (Augustinus, De Gratia Christi, Yl, vu).
Page rort.
1. Ibid., p. 621-643. — Cf. « Du sens figuré de l’Ecriture » (O. C., t. XX) : « La clef de ce chiffre dont parle Pascal », et sbid. sut l’accord des contraires. 2. Ps. XCI, 11: senetus mea in misericordia uberi : « ma vieillesse dans votre abondante miséricorde. » — Ex., XX, 12 : « pour gue vous viviez longtemps sur la terre. » 3. La référence est inexacte. Le passage rappelle plutdt Jér., XLIV, 8. « Ces choses qui ne sont pas des dieux » sont des idoles. y 4. Voit Cah. Cl. II, p. 209 sq. Page 1012.
1. Préface aux Leftres du centurion; voit Po., p. 845, et dans H. Psichari, Des jours et des hommes, Grasset, 1962, p. 142, une lettre a ce sujet. 2. Marion Cartier (voir p. 1010),
3. Rature : et naturel. Page 10173.
1. Surcharge : « cela fait. » 2. Depuis « en tappott... », sur la page suivante avec renvoi. Page rord. 1. « Cest seulement dans la religion révélée qu’une mauvaise traduction améliore le sens. » 2. Ps. XXXIII, 9 : « Gottez et voyez combien le Seigneur est doux. » Page rors.
1. Luc, II, 49 : « Ne savez-vous pas qu’il faut que je sois aux affaires de mon Pete? » 2 AVOID OAR AED. Page roré.
1. Cette note accompagne un portrait 4 la plume. A cédté, une photographie de Mrs. Agnés Meyer.
Septembre-Novembre 1932
1497
2. Ps. XXII, 4 : « Votte houlette et votre baton console. » 3. Cf. « la Légende de Prakriti » (Pr., p. 955, note).
m’ont
4. Discours de Pie XI du 27 oétobre 1932, a inauguration
de la nouvelle Pinacothéque vaticane (Aéfa apostolicae sedis, 1932,
Pp. 355).
5. Le premier et le dernier texte : « Es-tu roi? Mon royaume n’est pas de ce monde» sont extraits de Jean, XVIII, 33-37, évangile du jour. Le second de Zacharie, IX, 9 : « Voici que ton roi vient... monté sur le poulain d’une Anesse. »
Page 1017. 1. Porphyrii philosophi platonici opuscula selefla, éd. Nauck, Leipzig, 1886. 2. L’Enéide, VIII, 429 : « Trois rayons d’une gréle foudroyante. » 3. Devise de |’Autriche : «Il appartient a l’Autriche de égner sut le monde. » ' 4. XII, x1, 11. « Seigneur, vous avez dit de votre puissante voix 4 Voreille de mon 4me [...] que nul péché [...] ne trouble Pordre de votre empire, ni au sommet, ni a la base. »
5. 6. 7. n’est avec
Mme Claudel et sa fille cadette. « Glissement de terrain. » Ps. XX XVII, 11 : « Et la lumiére méme de mes yeux plus avec moi. » Claudel a ajouté la suite : « puisque tu es moi. »
Page 1018.
1. Claudel songe sans doute a « la Salle d’attente » (Pr., p. 925). Le manuscrit porte en sous-titre « Parabole » (voir p. 1522). 2. « Jai appris que toutes les ceuvres que Dieu a créées demeurtent a perpétuité; nous ne pouvons rien y ajouter, ni rien retrancher 4 ce que Dieu a fait afin qu’on le craigne. » — Claudel a commis un lapsus; il faut lire évidemment « mon beau-pére ». 3. Note pour « la Légende de Prakriti ». Page 1079. 1. Il, 4: « dans le cellier 4 vin »; VIII, 2 : « une coupe de vin
parfumeé » (rétablir ex vino condito). 2. « Bien que je sois gai, j’ai beaucoup de...» derniers mots sont douteux. 3. Surcharge : « Une toute petite... claire. »
Les deux
1498
Cabier VI
4. Jean, I, 38 : « Que cherchez-vous... Maitre,out habites-tu? »
— 39: « Venez et voyez! » Rétablir : Quid... Page 1020. 1. Vie des Péres, des Martyrs et des autres principaux saints, d’Alban Butler, ouvrage traduit librement de l’anglais par VPabbé Godescart, 20 vol., Lille, Lefort, 1834. — Cf. « Mon Pays » (Pr., p. 1006) et « Conversation sur Jean Racine » (Pr.,
Pp. 464).
2. Rature : erré.
3. Surcharge : « pauvre».
4. Ps. XXIII, 7 : « Elevez-vous, portes éternelles. » 5. Depuis « S. Simon...» addition postérieure. 6. I, 19 : « Si vous m’écoutez, vous mangerez
les biens de
la terre. » 7. Il, 7: « Leur terre est remplie d’or et d’argent et il n’y a pas de fin 4 leurs trésors. » — 8 : « Leur pays est plein de chevaux et leurs chars sont innombrables. Et leur pays est rempli d’idoles, ils ont adoré l’ceuvre de leurs mains, qu’ils avaient formée de leurs doigts.» — 9 : « L;>homme du peuple s’est abaissé et les grands se sont humiliés. » Page r02r.
1. Ill, 1: « Le Seigneur des armées va 6ter de Juda homme valide et homme fort, toute la force du pain et la force de l’eau,
VPhomme fort et homme de guerre, le juge et le prophéte, le devin et le vieillard, le chef de cinquante et ’homme au visage vénérable,
le conseiller, les plus sages d’entre les architeétes
et ceux qui ont Vintelligence des paroles mystiques. Et je leur donnerai des enfants pour princes et des efféminés domineront
sur eux. » 2. Voit p. 1018.
3. 21.« Vous les cacherez dans le secret de votre face a l’abri du tumulte des hommes. » 4. Fétes des 6 et 7 décembre. 5. Au-dessus de cette note Claudel a écrit: « mur, macon, masse, massacte? »
6. Outil en forme de peigne. Page 1022.
1. La premiére phrase n’est pas du livre des Proverbes; elle est un tépons de matines, au Commun des fétes de la Vierge, 2 lecon; le reste est tiré de la Le€ture du méme office : « Félicitez-
Décembre 1932
1499
moi, vous qui aimez le Seigneur, car alors que j’étais toute petite, j'ai plu au Trés-Haut, et de mon sein j’ai engendré un Dieu-homme. — Si quelqu’un est tout petit qu’il vienne a moi. Et aux insensés elle a dit : Venez et mangez de mon pain, et buvez du vin que je vous ai préparé. » 2. « Les enfants mémes de Memphis t’ont souillée jusqu’a la téte. » 3. « Les cavernes seront a jamais couvertes d’épaisses ténébres. » (Fillion ne traduit pas palpatio qui suggére l’idée de tatonnement. ) 4. Surcharge : « contemporain de Voltaire. » 5. Cf. Cantique des Cantiques: « Je laisse a d’autres le soin de parler de Bach, mais comment ne pas se souvenir avec tendresse de Rembrandt et de ce prodige en plein xvmié siécle, en pleine Angleterre protestante, le Messie de Hendel » (O. C., t. XXII, p. 449). Page 1023.
Ts Wome Tyra (oy, UATE. 2. Epitre
du
21
décembre,
S. Thomas:
Eph., II, 20-21.
Claudel change a peine le texte : « Le Christ est la pierre angulaire sut laquelle tout l’édifice, bien coordonné, grandit pour étre un temple saint dans le Seigneur; en lui, vous aussi, vous entrez,
pour étre une habitation de Dieu par Esprit. »
3. Sans doute René Bazin, mort en 1932.
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