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French Pages 180 [96] Year 1971
ÉTUDES SONG SUNG STUDIES SER. I
2
Library of Congress Catalog Card Number : j6-i ;o j68
ÉCOLE SIXIÈME
PRATIQUE SECTION
DES
HAUTES
: SCIENCES
ÉTUDES
—
ÉCONOMIQUES
SORBONNE
ET
SUNG STUDIES IN MEMORIAM ETIENNE BALAZS edited by FRANÇOISE
AUBIN
SERIES J HISTORY AND
INSTITUTIONS
2
MOUTON & GO
SOCIALES
ÉCOLE SIXIÈME
PRATIQUE SECTION
DES
HAUTES
: SCIENCES
ÉTUDES
ÉCONOMIQUES
ÉTUDES
—
SORBONNE
ET
SONG
IN MEMORIAM ETIENNE BALAZS éditées par FRANÇOISE
AUBIN
SÉRIE I HISTOIRE ET
INSTITUTIONS
2
MOUTON & CO
SOCIALES
Deux séries d'Études Song sont prévues : l r e série : Histoire et Institutions 2 m e série : Civilisation Chaque série paraîtra sous forme de fascicules à périodicité irrégulière. Un index général viendra clore chaque série, qui présentera ainsi l'équivalent d'un volume.
LES CARACTÈRES CHINOIS DE CE FASCICULE ET DU PRÉCÉDENT ONT ÉTÉ TRACÉS PAR MONSIEUR CHU CH'ENG
© 1971, Mouton & Co and École Pratique des Hautes
Printed in France
Études.
TABLE DES MATIÈRES *
Abréviations Histoire
96 diplomatique
Les guerres entre les Sung du Nord et le Hsi-Hsia, par E. I. Kyëanov. Histoire
militaire
L'artillerie de jet à l'époque Sung, par S.A. Skoli ar. Histoire
103
des soulèvements
119
populaires
La révolte de la société secrète du Mi-lê-chiao Wang Tsê (1047-1048), par G. J a . Smolin.
conduite par
143
Y a-t-il eu deux Sung Chiang ?, par I. Miyazaki.
171
Table des matières générale de la série.
179
* Les articles du présent fascicule ont été traduits par F. Aubin : ceux de MM. Kyèanov, Skoljar et Smolin, du russe (celui de M. Smolin en collaboration avec l'auteur), et celui de M. Miyazaki, du japonais.
ABRÉVIATIONS
ABRÉVIATIONS A.
BIBLIOGRAPHIQUES1
SOURCES
1. CS 2. CTKC
Chin-shih (sauf indication contraire, édition Po-na-pen). Ch'i-tan kuo-chih par Yeh Lung-li (mort après 1267), en 27 ch. 3. CYTC Chien-yen i-lai cVao-yeh tsa-chi par Li Hsin-ch'uan (1166-1243), en 40 ch. 4. CYYL Chien-yen i-lai hsi-nien yao-lu par Li Hsin-ch'uan, en 200 ch., terminé en 1210. 5. HTC Hsu Tzu-chih t'ung-chien par Pi Yiian (1730-1797), en 220 ch., imprimé en 1801. 6. HTCCP Hsil Tzu-chih t'ung-chien ch'ang-pien par Li Tao (11151184), en 520 + 60 ch., terminé en 1174. 7. HWHTK Hsu Wen-hsien t'ung-k'ao par Wang Ch'i (fin 16e siècle), en 254 ch., terminé en 1586. 8. LS Liao-shih (sauf indication contraire, édition Po-na-pen). 9. SCHP San-ch'ao pei-mêng hui-pien par Hsii Mêng-hsin (11261207), en 250 ch., terminé ca. 1190. 10. SHC Shui-huchuan ou roman Au bord de l'eau. 11. SHY Sung Hui-yao chi-kao, en 200 ts'ê (sauf indication contraire, réimpression Chung-hua shu-chii, Pékin, 1958, 8 vol.). 12. SLC Sung Ta-chao ling-chi. 13. SS Sung-shih (sauf indication contraire, édition Po-na-pen). 1. Conventions suivies pour les références bibliographiques : pour un ouvrage chinois, 3 /2b signifie chiian 3, p. 2 verso (dans la pagination chinoise), et ch. 3, p. 2 signifie chiian 3, p. 2 (dans la pagination à l'européenne); pour un périodique, XII /2 signifie tome XII, fascicule ou numéro 2.
97
ABRÉVIATIONS
14. SSPM 15. TCCL 16. TCKC 17. TFL 18. TTSL 19. WCTY 20. WHTK 21. YS 22. YWL
Sung-shih chi-shih pen-mo par Fêng Ch'i-yiian et Ch'en Pang-chan (époque Ming), en 109 ch. Ta Chin chi-li par Chang Wei et autres, en 40 ch. Ta Chin-kuo chih par Yu-wen Mou-chao en 1234 (?), en 41 ch. (cf. Index du Ta Kin kouo tche, Peiping, 1949). Ta Chin tiao-fa lu, anonyme, en 4 ch. Tung-tu shih-lio par Wang Ch'eng (mort ca. 1200), terminé en 1184. Wu-ching tsung-yao (cWien-chï) par Tseng Kung-liang (998-1078) et Ting Tu (990-1053), en 20 + 20 ch. Wen-hsien t'ung-kao par Ma Tuan-lin (ca. 1250ca. 1325), en 348 ch. Yuan-shih (sauf indication contraire, édition Po-na-pen). Yiian-wen lei (ou Kuo-ch'ao wen-lei) par Su T'ienchiieh (1294-1352), en 70 ch., terminé en 1334.
B . P É R I O D I Q U E S ET OUVRAGES DE REFERENCE
1. Bull. Ac. Sinica 2. BEFEO 3. CHHP 4. Comm. Press 5. DKWJT 6. HJAS 7. JA 8. JNCB.RAS 9. LSYC 10. MCB 11. SHCK 12. SK 13.
SKWC
14. Shina... yôran 15. THG 16. THGH 17. TK 18. TLTC
Academia Sinica, Bulletin. Bulletin de VÉcole Française d'Extrême-Orient. ChHng-hua hsueh-pao. Edition de la Commercial Press. Daikanwa-jiten, dictionnaire en 12 volumes de Morohashi. Harvard Journal of Asiatic Studies. Journal Asiatique. Journal of the North China Branch of the Royal Asiatic Society. Li-shih yen-chiu. Mélanges Chinois et Bouddhiques. Shih-hsiieh chi-k,an. Ssu-ku ch'iian-shu tsung-mu t'i-yao ou catalogue, impérial de 1782 (édition Comm. Press, Shanghai 1933, 4 vol.). Ssu-ku wei-shou shu-mu t'i-yao, supplément au SK par Juan Yuan (1764-1849), 5 ch., terminé en 1822 (éd. Ta-tung shu-chu, 1930, vol. IX). [Tokushi hôyo kiyô sakuin] Shina rekidai chimei yôran par Aoyama Sadao (Tokyo, 1933). Tôhôgaku. TÔhôgakuhô. Tôyôshi-kenkyû. Ta-lu tsa-chih.
98
ÉTUDES
SONG
/ SUNG
19. TP 20. TYGH 21. Têng-Biggerstaff
STUDIES
Toung Pao. Töyögakuhö. An annotated bibliography of selected Chinese reference works (Harvard University Press, revised edition, 1950). 22. Weng T'ung-wen Répertoire des dates des hommes célèbres des Song (Paris-La Haye, 1962).
LISTE DES ABRÉVIATIONS a. act. anc. Ann. art. biogr. ca. Capit. ch. chap. coll. descr. éd. ép. extr. f. H. Hist. Dyn. (ré)impr. inf. inscr. fun. jL. m. mérid. mod. monogr. Mt(s) n.h. nouv. ouvr. P-
année (dans les dates données à la chinoise) actuel ancien Annales Principales des Hist. Dyn. article biographie circa Capitale chiian ( = chapitre des ouvrages chinois) chapitre collection description édition époque extrait feuillet hao (pseudonyme d'un personnage) Histoires Dynastiques (ré)impression de... inférieur inscription funéraire jour (dans les dates données à la chinoise) Lune (dans les dates données à la chinoise) mort en... méridional moderne monographie mont(s) ou montagne(s) nien-hao ( = nom d'ère) nouveau ouvrage page
ABRÉVIATIONS
99
pér. préf. préf. sup. princ. prov.
période préfecture ( = chou) préfecture supérieure ( = / « ) principal province ( = lu à l'époque Sung, sheng à l'époque moderne) ou provincial riv. rivière Sites Hist. Sites Historiques (une section des Monographies Locales) sous-préfecture ( = hsien) s. préf. supérieur sup. suppl. supplément T. tzu (surnom d'un personnage) Tabi. Éch. Amb. Tableaux des Échanges d'ambassadeurs Tr. Écon. Traité Économique (dans les Hist. Dyn.) Traité des Fonctionnaires (dans les Hist. Dyn.) Tr. Fonct. Trait Géographique (dans les Hist. Dyn.) Tr. Géogr.
AUTRES CONVENTIONS — Les noms des provinces Sung sont donnés en deux mots (ex. Ching-hsi) et les noms des provinces modernes en un mot (ex. Shantung) 1 . — Pour les noms géographiques modernes (y compris les provinces), la transcription Wade-Giles a été uniformément suivie, excepté pour Pékin et Nanking. — Nous avons rendu les noms de peuple Ch'i-tan et Ju-chen par la restitution la plus en faveur parmi les altaïsants : Kitan et Jiircen (que nous employons sans modification de genre ni de nombre). — Les dates chinoises sont données, dans les textes français, sous la forme suivante : 9 e j., X I e L., 3 e a. ch'ing-li, c'est-à-dire le 9 e jour de la X I e Lune de la 3 e année ch'ing-li. —• Sauf disposition contraire des auteurs, il n'a pas été tenu compte du chevauchement de l'année lunaire chinoise sur l'année occidentale suivante, et chaque année chinoise est désignée par l'année du calendrier chrétien à laquelle une dizaine de mois de l'année chinoise correspond. — Dans les index, les noms de personne sont en petites capitales les noms de lieux en minuscules romaines. 1. Selon les indications qu'avait données Étienne Balazs, nous écrivons Liang-Chê (et non Liang-chê), Hsi-Hsia (et non Hsi-hsia).
100
ÉTUDES
CARACTÈRES
SONG / SUNG
CHINOIS
A . SOURCES
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2.CTKC 3. CYTC 4.
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B . PÉRIODIQUES ET OUVRAGES DE RÉFÉRENCE 3.
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STUDIES
101
ABRÉVIATIONS
12. SK 13. SKWC
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14. Shina... yôron
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Ling-chou: villes: nom ancien « nom moderne
(Ling-wu)
(lorsque les noms a n c i e n s et modernes sont identiques, un seul figure sur la carte)
X localisation approximative 100 1
200
300 km i
La zone des hostilités entre les Sung et les
Hsi-Hsia.
HISTOIRE DIPLOMATIQUE
Institut d'Études
EYGENIJ
IVANOVLC
KYCANOV
orientales de l'Académie des sciences Leningrad
d'U.R.S.S.,
LES GUERRES ENTRE LES SUNG DU NORD ET LE HSI-HSIA SOMMAIRE
Introduction: I.
La montée de la puissance tangut.
104
Les guerres entre les Sung et les Tangut. 1. 1 « guerre (982-1004). a. Hostilités Sung-Tangut. b. Hostilités Tangut-Tibétains et Uigur. c. Conditions de paix. 2. 2 e guerre (1040-1044). 3. 3 e guerre (1070-1072). 4. 4e guerre (1081-1086). 5. 5e guerre (1096-1099). 6. 6« guerre (1102-1107). 7. 7 e guerre (1114-1119).
106 106 106 107 107 109 111 111 113 114 114
I I . Conclusion: Résultats des guerres sino-tangut. 1. Régularisation des rapports diplomatiques. 2. Dissensions territoriales. 3. Effets internes.
115 115 116 116
SOURCES PRINCIPALES
1
ET
ABRÉVIATIONS
Hsi-Hsia chi, par Tai Hsi-chang (éd. Pékin, 1924). Hsi-Hsia shu-shih, par Wu Kuang-ch'eng (éd. Pékin, 1935, d'après l'édition de 1885). HTCCP: Hsii Tzu-chih t'ung-chien cWang-pien, par Li Tao (éd. Chô-chiang shu-chü, 1881). 1. Pour les histoires dynastiques ( L S et SS), le chiffre donné entre parenthèses renvoie à la pagination de l'édition Ssu-pu pei-yao.
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ÉTUDES
SONG
/ HISTOIRE
DIPLOMATIQUE
Lung-p'ing chi, par Tseng Kung (éd. 1708 en 20 ch.). LS: Liao-shih (éd. Po-na-pen). SS: Sung-shih, ch. 485 et 486 (éd. Po-na-pen).
Les guerres longues et sanglantes, qui opposèrent la Chine des Sung et le royaume t a n g u t du Hsia occidental ou Grand Hsia 1 de la fin du 10 e au début du 12 e siècle, sont des événements importants mais mal étudiés dans l'histoire de l'Extrême-Orient. J u s q u ' à m a i n t e n a n t , non seulement on n ' a pas dégagé les conséquences lointaines que ces guerres ont eues sur la vie économique et politique des deux pays, mais même, en pratique, on n ' a pas relevé systématiquement les renseignements les concernant dans les sources chinoises, ni étudié la lutte diplomatique qui les a accompagnées et le déroulement des actions militaires. Dans le présent article, nous tenterons seulement de m e t t r e en évidence les guerres principales entre Sung du Nord et Hsi-Hsia, et d'en donner limitativement les brèves caractéristiques 2 . Il ne fait pas de doute que la source des guerres f u t l'apparition même, sur la scène historique, du royaume tangut. Historiquement, les T a n g u t (qui s'appelaient eux-mêmes Minag) étaient formés, dans leur grande majorité, à la fin du 10 e siècle, p a r l a population des régions centrales de l'actuel Ordos. Le niveau de développement économique de ces tribus était relativement élevé, et dans leur vie sociale, outre le maintien de quelques vieilles institutions claniques, une inégalité des biens et des rangs sociaux s'était affirmée et les prémices de la notion de souveraineté étaient apparus. L'indépendance et la puissance militaire des tribus t a n g u t s'étaient développées d u r a n t l'affaiblissement des T ' a n g et le gouvernement des Cinq Dynasties. E n 873, u n des chefs t a n g u t ,
1. Le royaume tangut fut appelé Hsi-Hsia (Hsia occidental) en Chine depuis le début du 11 e siècle. La dénomination officielle, proprement tangut, du royaume — « Grand Hsia » — fut promulguée en 1038. Cependant, il n'est pas exclu en principe que jusqu'en 1038 les Tangut eux-mêmes aient nommé leur État « Hsia occidental », mais les témoignages à ce sujet n'ont pas été conservés ou n'ont pas été encore trouvés. 2. On trouvera une analyse détaillée de l'histoire Hsi-Hsia et de l'ensemble des rapports sino-tangut dans le récent ouvrage de l'auteur : OZerk istorii tangutskogo gosudarstva (Essai sur l'histoire du royaume tangut), Moscou, Nauka, 1968, 355 pp. Pour un relevé complet des nien-hao et des souverains Hsi-Hsia, voir dans le dernier fascicule de cette série la liste établie par Peter Olbricht. (F.A.)
EVGENIJ
105
KYCANOV
Toba Ssu-kung (?-886) s'empara de la ville de l'Ordos la plus importante à l'époque, Hsia chou 1 et en devint le souverain. Quelques années plus tard, il se distingua lors de la répression du soulèvement de Huang Ch'ao et en 881 il fut nommé, par l'empereur T'ang, chieh-tu-shih de l'armée Ting-nan, c'est-à-dire en fait gouverneur de toute la région de l'Ordos central, puis en 884, il reçut le titre de wang de Hsia. La charge de chieh-tu-shih et le titre de wang se transmirent héréditairement dans la famille Toba. Après la chute des T'ang, au milieu du 10 e siècle, les Chinois perdirent tout contrôle sur l'Ordos central. Un facteur essentiel du renforcement de l'indépendance des Tangut fut au nord, l'apparition simultanée, du tout-puissant royaume kitan. Après leur arrivée au pouvoir en Chine, en 960, les empereurs Sung reconnurent à la maison des Toba le droit de gouverner les territoires tangut et le titre de wang de Hsia. E n 979, les armées Sung conquirent la principauté des Han septentrionaux (dans l'actuel Shanhsi et partie du Shenhsi). Les troupes tangut, sous le commandement de Toba K'ejui (?-968) et de Toba Chi-yiin (?-980), aidèrent les Sung et il n'est pas exclu que ces derniers, en commençant la même année la guerre contre les Kitan, n'espéraient pas là aussi l'aide des Tangut. C'est pourquoi, les Sung ne portèrent pas alors atteinte aux droits des Tangut, se contentant de recevoir des wang de Hsia la reconnaissance habituelle de préséance de l'empereur Sung. Mais la guerre contre les Kitan fut défavorable à la Chine, et les routes du nord lui furent bel et bien fermées. Aussi elle ne pouvait pas ne pas essayer de prendre sa revanche à l'ouest, là où la voie lui était ouverte, depuis la chute des Han septentrionaux. La situation était favorable à ce projet, car des différends commençaient à diviser les milieux dirigeants tangut. E n 980, le pouvoir sur les terres tangut était passé à Toba Chi-p'êng (?-1004), mais nombre de chefs refusant de le reconnaître, l'affaire dégénéra en conflit armé. Comme il ne pouvait pas, par ses propres forces, en finir avec l'opposition, Chi-p'êng se résolut à faire appel aux Chinois, et, en 982, il remit aux Sung la pleine direction du territoire de l'armée Ting-nan a . Le résultat fut que dans les principales villes de la région — Hsia chou, Yin chou 3 , Y u chou 4 , Y e n chou (a) 5 , etc. —
1. Hsia chou: ville détruite par les Mongols, dans la région del'act. Yii-lin, à l'ouest du fleuve Wu-ting et au nord des Monts Heng-shan (Shenhsi). 2. Lung-p'ing chi, 20/3b. 3. Yin chou : ville détruite par les Mongols, dans la région de l'act. Mi-chih (Shenhsi). 4. Yu chou: ville détruite par les Mongols, au sud des Monts Heng-shan et à l'est du lac Wu-ch'ih (Shenhsi). 5. Yen-chou (a) : ville détruite par les Mongols, dans la région du lac act. Yen-ch'ih (Shenhsi). 2
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ÉTUDES
SONG / HISTOIRE
DIPLOMATIQUE
apparurent des garnisons chinoises. Chi-p'eng lui-même se trouva comme prisonnier de marque à Pien, la capitale Sung ; son nom et les noms de ses parents furent inclus dans la liste des souverains reconnaissant la préséance des Sung 1 et tous les chefs de la maison Toba reçurent aussi l'ordre de se présenter à la cour. Mais la majorité des chefs tangut refusèrent de reconnaître le pouvoir Sung. En 982, sous la conduite de Chi-ch'ien (Tai-tsu, 963 /965?-1004), premier souverain régnant de la dynastie Hsia, ils commencèrent contre la Chine une lutte que soutinrent la plus grande partie des tribus tangut. La première guerre sino-tangut, qui avait commencé ainsi en 982, dura avec des interruptions jusqu'en 1004, la paix n'étant conclue qu'en 1006. Pour les Tangut, ce fut une lutte pour l'indépendance et la reconnaissance de leur souveraineté propre ; elle permit la consolidation de leurs tribus, le renforcement des capacités militaires de leur armée et, dans le cours des combats, naquit un État tangut indépendant. Quant aux Chinois, ils dirigeaient leurs efforts vers l'écrasement de l'indépendance tangut et l'établissement de leur propre contrôle sur l'Ordos, car un Etat tangut souverain aurait été une menace constante pour les régions occidentales de la Chine. De plus, l'Ordos était une voie important et commode pour les relations commerciales et diplomatiques avec l'Occident. La route septentrionale était déjà coupée par les Kitan ; la route méridionale, passant par les Nan-shan, possession des tribus tibétaines, était peu accessible. En cas de menace permanente de la part des Kitan, l'Ordos était une place stratégique essentielle pour la défense des Sung. Enfin, les terres tangut présentaient pour la Chine une nette valeur économique, car elles étaient riches en bétail et abondaient en sel. Les armées chinoises, bien équipées, ne furent pas en mesure de venir à bout des Tangut. Elles étaient peu mobiles et préféraient rester à l'abri des villes et des forteresses. Toutefois, leur défaut principal était l'absence d'une bonne cavalerie, type de troupes pour lesquelles les Tangut avaient sur elles une supériorité décisive. Au total, les Chinois non seulement ne purent garder l'ancien territoire de l'armée Ting-nan (fin 997), mais au printemps 1002, ils perdirent aussi le centre stratégique principal de cette région, Ling chou 2. Il serait insuffisant d'expliquer la victoire des Tangut par leurs seuls succès militaires. Ils avaient habilement sut tirer parti de l'hostilité entre Liao et Sung. En 986, lors de la guerre, infructueuse pour les Sung, entre Chinois et Kitan, les Tangut avaient fait alliance avec ces derniers et Chi-ch'ien obtint de l'empereur kitan en 990 sa reconnais-
1. Lung-p'ing chi, 20 /4a. 2. Ling chou: act. Ling-wu (région autonome de Ning-hsia-Hui).
EVGENIJ
KYCANOV
107
sance comme wang du royaume de Hsia 1 . Les Kitan lui envoyèrent une attestation de titre. De son côté, Chi-ch'ien reconnut la préséance de l'empereur kitan, à l'égal de l'empereur Sung, et tomba sous son patronage, ce qui lui donnait aussi le droit de demander son soutien. L'apparition d'un Etat tangut lésait les intérêts d'autres peuples voisins des tribus tangut et, durant les dernières années, Tibétains et Uigur furent impliqués dans la guerre. Le royaume tangut menaçait en effet l'indépendance des tribus tibétaines orientales, car, tout en menant leur guerre contre les Sung, les Tangut firent plus d'une fois des raids de pillage chez les Tibétains et tentèrent de les assujettir à leur contrôle. La chute de Ling chou ouvrait aux Tangut le chemin direct vers Liang chou 2 le centre des possessions tibétaines au nordest, et privait les Tibétains de Liang chou de contacts directs avec les Sung. C'est pourquoi, à la fin de 1001, Fan-lo-chih (?-1004), le commandant des Tibétains de Liang chou, proposa à la Chine une alliance militaire contre les Tangut, et les troupes tibétaines pénétrèrent dans la région de Ling chou pour faire leur jonction avec l'armée chinoise s . Pour une raison identique, doublée d'une haine séculaire contre les Tangut, en 1001 également, les Uigur de Kan chou proposèrent leur alliance aux Sung 4 . L'action des alliés fut un insuccès. Tenant Ling chou, les Tangut défirent Fan-lo-chih et occupèrent la région de Liang chou mais ils ne purent s'affermir dans les terres tibétaines. L'armée tangut fut soudain battue par les Tibétains soulevés contre elle, et son chef, le souverain tangut Chi-ch'ien, périt d'une blessure reçue au combat. Les batailles devant Liang chou furent les derniers faits importants de la guerre de 982-1004. Il est possible que les Chinois aient voulu tirer parti de la défaite des Tangut et de la mort de leur chef Chi-ch'ien, mais l'invasion des Kitan en cette même année les priva de toute possibilité de continuer la lutte à l'ouest. En 1005, les Chinois conclurent avec les Kitan le traité de Shan-yiian désavantageux pour les Sung, puis, en 1006, un traité de paix avec les Tangut, dressant le bilan de la longue guerre de 982-1004. Les Chinois proposèrent à Tê-ming (Tai-tsung, 1004-1032), le nouveau souverain tangut, des conditions de paix humiliantes : il devait restituer le territoire de Ling chou, licencier son armée, envoyer son fils et son frère cadet comme otages, conclure personnellement le traité
1. 2. 3. 4. 5.
LS, 13 /2a (p. 53), sous 8 e a. t'ung-ho, X I I e L., keng-hsu. Liang chou: act. Wu-wei (Kansu). SS, 492/6a (p. 3836), sous 4 e a. chien-p'ing. SS, 490 /14a (p. 3822), sous article Hui-hu, 4 e a. hsien-ping. HTCCP, 55/16b.
108
ÉTUDES
SONG / HISTOIRE
DIPLOMATIQUE
avec le représentant des Sung, rendre les prisonniers, et désormais faire connaître t o u t préparatif d ' a t t a q u e des tribus locales contre la Chine. E n échange, on lui promettait la charge héréditaire de chieh-tu-shih de l'armée de Ting-nan avec les émoluments correspondants, le titre de Hsi-p'ing wang, la remise annuelle de 40 000 liang d'or, 40 000 rouleaux de soie, 40 000 ligatures de monnaie et 20 000 chin de thé, la suppression de l'interdiction de vendre du sel en Chine, la liberté des relations (c'est-à-dire du commerce) avec la cour Sung 1 . E n fait, ces conditions signifiaient que Tê-ming restait seulement administrateur des territoires que gouvernaient déjà ses ancêtres à la fin des T ' a n g et sous les Cinq Dynasties ; elles le privaient du droit d'avoir son armée ; p a r l'envoi d'otages, elles restreignaient sa liberté d'action ; enfin, elles ne le reconnaissaient pas comme souverain d ' u n É t a t indépendant puisqu'elles lui donnaient le titre, non pas de wang de l ' E t a t de Hsia, mais simplement de « wang pacificateur de l'Ouest » (Hsi-p'ing wang) et qu'elles lui attribuaient sa fonction avec émoluments, le c o m p t a n t lui-même comme personne au service des Sung, devant s'abaisser jusqu'à signer personnellement le traité avec le représentant du pouvoir Sung. Pour toutes ces concessions, on promettait de lui verser de l'or, de la soie et du thé. Malheureusement, nous ne connaissons pas le détail du déroulement des pourparlers, ni les conditions finales du traité de paix. Tê-ming, depuis son élévation au trône et durant t o u t son règne, suivit une politique de paix avec les Sung et de guerres à l'ouest contre les Tibétains et les Uigur. C'est pourquoi il conclut la paix. Il y a des indications selon lesquelles il accepta toutes les conditions des Sung sauf deux — la restitution de Ling chou et l'envoi d'otages. Cependant, la paix f u t visiblement conclue sur la base de quelques autres conditions. Les Tangut gardèrent tous les territoires conquis, ils n'envoyèrent pas d'otages et ne licencièrent pas leur armée, c'est-à-dire qu'en pratique ils gardèrent leur pleine indépendance et la souveraineté qu'ils avaient acquise dans les combats, ce que les Chinois f u r e n t obligés de reconnaître par le fait qu'ils signèrent un traité de paix avec les Hsia et en informèrent les E t a t s voisins — Kitan, Tibétains, Uigur. D ' a u t r e p a r t , Tê-ming, souhaitant la paix, fit quelques concessions. Il accepta la charge de chieh-tu-shih et le titre de Hsi-p'ing wang avec les paiements correspondants de la p a r t des Chinois, et ainsi reconnut non seulement la préséance de l'empereur Sung, mais sa propre position de wang, consist a n t dans le service de sa charge de chieh-tu-shih. Outre des considérations tactiques et matérielles, cette concession f u t vraisemblablement déter-
1. Hsi-Hsia
shu-shih, 8 /10a-b ; Lung-p'ing
chi, 20 /4b.
EVGENIJ
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minée, dans une certaine mesure, par le fait que les K i t a n aussi reconnaissaient Tê-ming non pas comme wang de l ' E t a t de Hsia, ainsi que son père, mais seulement comme Hsi-p'ing wang. Pour Tê-ming, cette concession signifia en pratique un certain abaissement de son prestige, mais elle n'eut pas d'influence sur sa position de souverain indépendant des Tangut, dont le pouvoir f u t bientôt entouré, en fait, d'un cérémonial égal à celui des empereurs Sung et Liao. Mais pour les Sung, cette concession de Tê-ming avait en fait une signification essentielle. Les Chinois étaient prêts à payer — et ils payèrent — pour une reconnaissance formelle de leur suprématie, b u t qui f u t la pierre angulaire de leur diplomatie à l'époque médiévale et de leurs doctrines en politique internationale, et qu'ils poursuivirent par tous les moyens. Il leur était impossible d'anéantir le royaume t a n g u t . C'est pourquoi il leur fallait l'inclure dans ce système de soumission hiérarchique créé par les hommes politiques Sung pour l'établissement des rapports avec les autres pays et les autres peuples : la lutte ultérieure entre les Sung et les Hsia devait se poursuivre — et elle se poursuivit effectivement — pour la reconnaissance du droit à l'existence de l ' E t a t t a n g u t d'une p a r t , et, d'autre p a r t , pour le titre que les empereurs Sung accordaient à son souverain. La guerre sino-tangut de 1040-1044 f u t justement causée p a r une querelle de titulature. A cette époque, l ' É t a t t a n g u t était consolidé. Le fils de Tê-ming, Yüan-hao (Ching-tsung, 1032-1048) avait écrasé les Tibétains de Liang chou et les Uigur, et étendu à l'ouest les frontières du Hsi-Hsia jusqu'à l'oasis de Hami. Il avait réalisé toute une série de réformes, constituant, entre autre, le mécanisme étatique t a n g u t , organisant les forces armées, faisant créer une écriture t a n g u t . Le 10 novembre 1038, dans une ambiance solennelle, il prit le titre d ' E m p e reur et nomma son E t a t « Grand Hsia ». L'empereur Sung en f u t informé p a r lettre officielle. Les Chinois rompirent promptement les r a p p o r t s diplomatiques avec le Hsia. D u r a n t toute l'année 1039, les deux parties se préparèrent à la guerre, et en 1040 les Chinois prirent l'offensive. L'action f u t menée mollement, chacun des adversaires se limitant à des incursions dans les villes et les forteresses frontalières. Cependant, au printemps 1041, les Tangut envahirent le territoire Sung avec des forces importantes et firent peser une menace sur toute la vallée de la rivière Wei. Des combats meurtriers s'engagèrent, au cours desquels, au dire du Sung-shih, les Chinois perdirent plus de 300 000 hommes 1 . Yüan-hao fit des ouvertures de paix auxquelles la cour Sung acquiesca. Les Chinois exigèrent, en premier lieu, que Yüan-hao renonce a u titre d'Empereur. Ils lui proposèrent en échange le titre de shan-yii, de khan ou quelque autre titre étranger, pourvu qu'il cessât de s'appe1. SS, 485 /17a sq. (p. 3787), sous l r « a. ch'ing-li.
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1er a Fils du Ciel » x. Ils menaçaient, en cas de refus, d'envoyer aussitôt à l ' a t t a q u e du Hsia 400 000 soldats. E n réponse, les Tangut entamèrent des pourparlers avec les K i t a n en vue d'une guerre conjointe contre les Sung. Il f u t décidé d ' a t t e n d r e l'hiver. Les K i t a n promirent de se jeter sur les Sung quand les eaux du Huang-ho seraient prises 2 . E n liaison avec ce plan, les T a n g u t réalisèrent une a t t a q u e victorieuse à la frontière occidentale des Sung. Les Chinois réussirent péniblement à arrêter la nouvelle offensive des Tangut. Vint l'hiver, mais les K i t a n ne voulaient plus se b a t t r e . Profit a n t des difficultés des Sung, ils exigèrent d'eux, en 1042, des cessions territoriales et ils en obtinrent une augmentation de leurs versements annuels de 100 000 ligatures de monnaie et de 100 000 rouleaux de soie. La guerre entre les Sung et les Hsia se poursuivit ; 100 000 soldats Tangut envahirent le district de Wei chou 3 . La bataille devant Wei chou marque la fin des grands combats de cette guerre. De longues négociations s'ouvrirent, entrecoupées de petites échauffourées frontalières. Yüan-hao accepta de prendre le titre de wu-tsu(a) (en t a n g u t « empereur ») 4 et de fils, et dans ses rapports avec le souverain Sung, d'appeler celui-ci « Empereur des Grands Sung » et père s . Les Chinois qui, jusqu'alors, avaient proposé à Yüan-hao de prendre n'importe quel titre étranger, refusèrent celui-ci avec u n extrême embarras pour un motif fort curieux : le terme t a n g u t wu-tsu(à) donnait en chinois wu-tsu(b) « mon aïeul » ! Ce f u t considéré comme u n affront et les Chinois, r o m p a n t les pourparlers, reprirent les opérations militaires 6 . A la fin de 1043, u n compromis f u t enfin trouvé : Yüan-hao accepta de s'adresser à l'empereur Sung en s'appelant lui-même « souverain du royaume de Hsia », Hsia-kuo chu, mais il exigea pour cette concession une compensation annuelle en argent et en soie. Les Chinois étaient prêts à payer. La discussion sur le m o n t a n t des redevances annuelles s'acheva en 1044 par l'accord de la Chine de verser annuellement aux Tangut 255 000 liang d'argent, de soie et de thé 7 . Les deux parties en revinrent à leurs frontières primitives. Les résultats de la guerre f u r e n t les suivants : les Tangut en tirèrent un net avantage matériel, les versements annuels des Chinois constituant u n pourcentage notable du budget des Hsia. Mais la victoire 1. HTCCP, 130 /6a-10b ; Hsi-Hsia chi, 8/2a-7b. 2. HTCCP, 134/2b. 3. Wei chou: act. P'ing-liang (Kansu). 4. N.A. Nevskij, Tangutskaja filologija, issledovanija i slovar' v dvukh knigakh (Philologie tangut, étude et dictionnaire en deux volumes), Moscou, 1960, T. 1, pp. 4950. 5. Lung-p'ing chi, 20/6a. 6. SS, 485/19b. 7. SS, 485 /19b-20a (p. 3787).
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morale resta a u x Chinois. Ils avaient réussi à obtenir q u e le souverain Hsia, t o u t en se n o m m a n t E m p e r e u r dans ses propres possessions, renonçât au t i t r e impérial lorsqu'il s'adressait à l ' E m p e r e u r Sung e t , se n o m m a n t seulement seigneur, reconnût a u souverain Sung u n t i t r e supérieur au sien. D a n s cette guerre p o u r u n t i t r e , la victoire Sung f u t définitive, et les guerres sino-tangut ultérieures n a q u i r e n t de contestations territoriales. La guerre de 1070-1072 f u t précédée p a r de longs pourparlers concern a n t la frontière, et p a r la prise i n a t t e n d u e , à la fin de 1067, de la ville t a n g u t de Sui chou1 p a r les Chinois. L a m o r t d u fils de Yiian-hao, le souverain Liang-tsu (I-tsung, 1049-1067), empêcha les T a n g u t de commencer la guerre r a p i d e m e n t après l'affaire de Sui chou. E t , à la cour chinoise, il y e u t de longues discussions p o u r décider s'il ne fallait pas profiter d u changement de souverain chez les Hsia et de la prise de Sui chou p o u r mener u n e guerre d'anéantissement t o t a l de l ' E t a t t a n g u t . Au d é b u t de 1070, les T a n g u t commencèrent le siège de Sui chou, que les Chinois avaient n o m m é Sui-tê. N e r e m p o r t a n t pas de succès, ils envahirent, à la f i n de l'été, les districts Sung de H u a n chou 2 e t de Ch'in chou3. E n 1071, les opérations militaires f u r e n t dirigées au n o r d , vers la forteresse Lo-wu 4 , dans la région des Monts Heng-shan. L à se déroulèrent des combats acharnés, qui dévastèrent t o t a l e m e n t le pays : « Sur u n e distance de 300 li, les maisons et les puits f u r e n t a b a n donnés et incendiés. Vieillards et e n f a n t s erraient sans asile. » 5 Cepend a n t , les T a n g u t ne p u r e n t pas reprendre ainsi Sui chou. E n 1072, la paix f u t conclue, sans q u e les litiges territoriaux f u s s e n t résolus. E n 1081, en Hsia, le souverain Ping-ch'ang (Hui-tsung, 1068-1086) f u t écarté du gouvernement. Le pouvoir passa à sa mère, la souveraine Liang, et à sa famille 6 . Ce coup d ' E t a t f u t considéré p a r les Sung comme u n p r é t e x t e commode p o u r u n e guerre de complet anéantissement d u r o y a u m e t a n g u t . U n dignitaire chinois écrivait à la cour : « I l y a m a i n t e n a n t motif à u n envoi de troupes. Le Ciel d é t r u i r a ce r o y a u m e aussi facilement que l'on p e u t briser u n b a m b o u . » Le p l a n m i n u t i e u x de la guerre à venir f u t étudié et u n édit officiel f u t promulgué p o u r q u e commence la grande campagne contre le Hsia 8 . La guerre sino-tangut de 1081-1086 f u t u n e des plus acharnées dans l'histoire des guerres e n t r e Sung et Hsia. L'effectif des troupes envoyées 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8.
Sui chou: act. Sui-tê (Shenhsi). Huan chou: act. Huan-hsien (Kansu). Ch'in chou: act. Ch'in-an (Kansu). Lo-wu : forteresse dans les Monts Heng-shan (Shenhsi). Hsi-Hsia chi, 14/23a. SS, 486 /4b (p. 3792). SS, 333 /7b (p. 2802), biographie de Yu Ch'ung. SS, 486/4b (p. 3792).
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par les Chinois et la direction de leurs attaques principales visaient au démembrement et au plein anéantissement de l ' É t a t tangut. Près de 300 000 soldats chinois soutenus par les troupes tibétaines, pénétrèrent en cinq colonnes sur le territoire Hsia. E n octobre 1081, les Chinois s'emparèrent de Lan chou1 et commencèrent à investir Ling chou. Le dix-neuvième jour du siège, les Tangut rompirent les digues du Huang-ho qui régularisaient la distribution de l'eau dans les canaux d'irrigation, et inondèrent le camp chinois. Il fallut suspendre le siège. Dans le cours de l'hiver, toute l'armée chinoise, a y a n t souffert d'énormes pertes, abandonna le territoire Hsia. Même les compilateurs du Sung-shih, qui sont réservés dans leurs appréciations, sont obligés de remarquer, lors de leurs descriptions de ces événements, que « les troupes Sung périrent en vain » 2 . E n 1082, dans les combats devant Yung-lê 3 , les Chinois perdirent de nouveau près de 200 000 hommes 4 . Le bilan de deux années de guerre était lamentable pour les Sung. cc Les troupes chinoises ont pris en t o u t six forteresses (pao): Chia-lu 5, Wu-pao 6 , I-ho 7 , Mi-chih 8 , F u - t ' u 9 et Sai-men 1 0 , mais dans les seuls combats de Ling chou et de Yung-lê, elles ont perdu 600 000 hommes — soldats volontaires et Ch'iang soumis. E t a u t a n t de dizaines de milliers [de ligatures] de monnaie, [de livres] de grains, [de pièces] d'argent, [de rouleaux] de soie [qu'on ait utilisés], on n ' a pas p u trouver u n plan pour vaincre ! » 11 La guerre entraîna des désastres sans nombre pour les Tangut aussi. Dans les régions qui avaient subi l'invasion, « toute l'économie était à l'abandon et personne n'osait labourer. Les gens mouraient de faim » Le conflit dura, avec des interruptions, jusqu'en 1086. Les pourparlers de paix, qui avaient commencé au cours des dernières années des hostilités, n'arrivèrent pas à conclusion a v a n t la mort du souverain Sung, Shen-tsung, au printemps 1086 et du souverain t a n g u t Ping-ch'ang durant l'été 1086 13. L'échange d'ambassadeurs pour l'expression des 1. Lan chou: act. ville du même nom (Kansu). 2. SS, 486/6a (p. 3792). 3. Yung-lê : forteresse dans la région des Monts Heng-shan près de Yu chou (cf. p. 105, n. 4). 4. SS, 486 /6b-7b (p. 3792). 5. Chia-lu : act. Chia-hsien (Shenshi). 6. Wu-pao : act. ville du même nom (Shenhsi). 7. I-ho : forteresse, act. I-ho-chen (Shenhsi). 8. Mi-chih : act. ville du même nom (Shenhsi). 9. Fu-t'u : forteresse, dans la région de l'act. Sui-tê (Shenhsi). 10. Sai-men chai : forteresse au nord-ouest de l'act. Yen-an (Shenhsi). 11. SS, 486/7b (p. 3792). 12. Hsi-Hsia chi, 17/14a. 13. SS, 486/10-a-b.
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condoléances entraîna une suspension progressive des opérations. Aucune condition de paix ne fut élaborée. Tout juste, vers le milieu de 1089, les Tangut échangèrent-ils des prisonniers chinois contre quatre forteresses : Chia-lu, Mi-chih, Fu-t'u et An-chiang 1 . Les contestations territoriales entre les deux pays et la perte de Lan chou par les Tangut laissèrent à la frontière une situation tendue. Une correspondance fut échangée pour les délimitations et les échanges de territoires, interrompue plus d'une fois par des échauffourées militaires. A la fin de 1095, les pourparlers furent suspendus par les Chinois. A la cour, tous les partisans d'une guerre nouvelle contre le Hsia l'emportaient. L'un d'eux, Hsieh Ching-wen (T. : Shih-chih, 1011-1088), déclara : « Il convient de cesser les délimitations de frontières. Que les traces laissées par la cavalerie qui passe deviennent notre frontière. » 2 Irrités par la rupture des pourparlers, les Tangut se jetèrent sur la frontière Sung. Une nouvelle grande guerre commença, celle de 1096-1099. A l'automne de 1096, les Tangut s'emparèrent de la forteresse de Chin-ming 3 . Les opérations militaires se poursuivirent en 1097 avec un succès variable. Vers la fin de l'année, les Chinois remportèrent toute une série de victoires : ils détruisirent Hung chou 4 , les murs de Yen chou (a) 5 , et s'emparèrent des forteresses de Chia-lu et de Anchiang 8 . Ce n'est qu'au milieu de 1098 que les Tangut réussirent à arrêter l'avance des troupes Sung. L'armée tangut franchit la frontière Sung et assiégea P'ing-hsia 7 . Mais une tempête, qui se leva soudainement, causa de grandes pertes à l'armée tangut et l'obligea à battre en retraite. Les résultats de trois années de guerre furent lourds pour le Hsia. « Sur une étendue de plusieurs centaines de li, toutes les maisons furent brûlées et les réserves en vivres anéanties. Le pays perdit son ardeur guerrière. » 8 Au début de 1099, des changements se produisirent au Hsia. L'impératrice-régente Liang mourut et le pouvoir réel passa aux mains de son fils, le souverain Ch'ien-shun (Ch'ung-tsung, 1086-1139). Celui-ci, par l'entremise des Kitan, se mit à rechercher activement la paix avec les Sung. Dans sa lettre à la cour Sung, il rejeta toute la responsabilité de la reprise de la guerre sur sa grand'mère et ses oncles de la famille Liang, dont l'obstination avait forcé les Chinois « à recourir à des mesures extrêmes — campagne punitive et cessation de l'envoi des paiements 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8.
S S , 486 / l i a (p. 3793) ; An-chiang : forteresse au nord de l'act. Ch'in-yang ( K a n s u ) . SS, 295 /19b (p. 2549). S S , 486 /12a-b ; Chin-ming chai : forteresse au nord-ouest de l'act. Yen-an. Hung chou : une des villes Hsia se trouvant au sud-ouest de Yu-chou. Yen chou (6) : act. Yen-an (Shenhsi). Hsi-Hsia chi, 20 /25 b, 26b, 27a. P'ing-hsia : forteresse à l'ouest de Wei chou (act. P'ing-liang, Kansu). Hsi-Hsia chi, 21/10b.
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annuels (c'est-à-dire conduite de la guerre contre le Hsia) » 1 . Les T a n g u t offrirent de conclure la paix sur la base des conditions du traité de 1044, et, à la fin de 1099, l'entente était atteinte à ce sujet. Mais pas une seule des questions litigieuses à propos des frontières ne f u t résolue. Sui chou et Lan chou restèrent du côté chinois. De la sorte, cette paix, qui dressait aussi le bilan des guerres de 1070-1072 et 1081-1086, était favorable aux Sung et portait préjudice aux Hsia. Les contestations territoriales pendantes et le désir d'une partie des fonctionnaires chinois locaux d'arracher aux Hsia de nouvelles régions firent que la paix de 1099 f u t , elle aussi, éphémère. D u r a n t l'été de 1102, les troupes frontalières Sung a t t a q u è r e n t le Hsia. C'était le début d'une nouvelle guerre, qui dura de 1102 à 1107. Les Tangut pillèrent les districts Sung de Yen chou (b), Wei chou et Ch'in chou, et à l'ouest aidèrent les Tibétains qui étaient aussi en guerre contre les Sung pour conserver leurs terres. E n 1105, les Chinois prirent la forteresse t a n g u t de Yin-ch'uan 2 . Les opérations militaires se prolongèrent jusqu'à la fin de 1106 et ce n'est q u ' a u début de 1107 qu'intervint u n armistice, lequel, une fois encore, ne réglait pas les questions litigieuses entre les Sung et les Hsia 3 . Jusqu'en 1114, les Tangut essayèrent de résoudre le contentieux territorial par la voie diplomatique, grâce à l'entremise des Kitan. « Pour moi qui vénère l'autel de mes ancêtres, écrivait Ch'ien-shun à l'empereur Liao, ne pas restituer les anciens territoires de la dynastie est une infamie. » 4 Mais les K i t a n n'étaient déjà plus en mesure d'aider les Tangut et ceux-ci décidèrent d'agir par leurs propres forces. E n 1114. l'armée T a n g u t envahissait le territoire Sung et assiégeait la forteresse de Ting-yiian 5 . Ainsi commençait la dernière guerre des T a n g u t contre les Sung du Nord, la guerre de 1114-1119. Au printemps 1115, 200 000 Chinois pénétraient à leur tour en territoire Hsia et dévastaient le sud du pays. Cependant, à l'automne de la même année, les Chinois essuyaient une grande défaite à la forteresse de Tsang-ti-ho 8 . La guerre dura jusqu'en 1119, année où les Tangut réussirent à tailler en pièces une grande armée chinoise commandée par Liu F a (?-1119). Aucun des deux pays n'avait intérêt à la prolongation du conflit, car leur attention était accaparée par la menace que faisaient peser au nord les Jiircen qui infligeaient défaite sur défaite à l'armée K i t a n . A partir de 1115, les Chinois accordèrent leur soutien aux Jiircen contre les Liao, et les 1. HTCCP, 515 / l a . 2. Yin-ch'uan : région de Yin chou (cf. p. 105, n. 3). 3. Hsi-Hsia chi, 22 /11b, 12a. 4. Hsi-Hsia shu-shih, 32 /10b-lla. 5. Ting-yiian : ville au sud-ouest de l'act. Ling-wu. 6. Tsang-ti-ho ch'eng : à la frontière du Pao-an chiin des Sung, entre l'act. Yen-an et act. Ch'in-yang.
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Tangut, au contraire, aidèrent les Kitan. E n 1119, un armistice f u t conclu entre les Sung et les Hsia, sans régler les discussions, mais m e t t a n t fin à la dernière guerre entre les deux E t a t s . Bientôt les Jiircen conquéraient toute la Chine du Nord, et le royaume t a n g u t cessait d'être directement voisin de celui des Sung. De la sorte, si nous ne tenons pas compte des menus incidents de frontières, nous pouvons délimiter sept guerres principales entre les Sung du Nord et les Hsia : 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7.
982-1004 (paix en 1006). 1040-1044 (état de guerre réel depuis 1039). 1070-1072. 1081-1086. 1096-1099. 1102-1107. 1114-1119.
Donc, sur 167 années de voisinage entre les Tangut et les Sung du Nord, 54 ont été occupées par un état de guerre et de combats auxquels ont pris part, de chaque côté, des dizaines et des centaines de milliers d'hommes. La cause première et principale de ces guerres était la répugnance des Sung du Nord à admettre l'existence du Hsi-Hsia. Les autres causes étaient, par degré d'importance, la l u t t e à propos du caractère des rapports mutuels et, du titre enfin les contestations territoriales. Après la guerre de 982-1004 et la paix de 1006, les Chinois admirent en fait l'apparition d'un É t a t tangut indépendant et se mirent à régulariser leurs rapports avec lui. Ils ne renoncèrent pas cependant à leurs tentatives d'anéantir le Hsia et proclamèrent ouvertement ce b u t lors de la guerre de 1081-1086, la plus sanglante des guerres sino-tangut. La régularisation des rapports mutuels, conformément aux normes diplomatiques de l'époque, découle de la guerre de 1040-1044. Selon la paix de 1044, les Tangut reconnaissaient la préséance de l'empereur Sung et les Chinois étaient tenus de payer annuellement pour cette reconnaissance — et ils payèrent. Comme il y avait encore au nord u n E t a t puissant, celui des Liao, les rapports de suzeraineté entre les trois É t a t s s'exprimaient au 11 e siècle selon le schéma suivant : EMPEREUR SUNG
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HISTOIRE
SERGEJ ALEKSANDROVLC
Institut
d'Études
orientales
de VAcadémie Léningrad
MILITAIRE
SKOLJAR
des
Sciences
d'U.R.S.S.,
L'ARTILLERIE DE JET A L'ÉPOQUE SUNG SOMMAIRE
I. Intérêt du I I . Historique
121
problème. des armes de jet prê-Sung
et
123
terminologie.
I I I . Structure des pierriers Sung. 1. Le mécanisme de lancement. 2. Le support.
125 126 128
IV. Fonctionnement
129 134
V. Les
des divers
types.
projectiles.
V I . A propos de l'utilisation
de la poudre et des « canons musulmans
V I I . Les pierriers dans la tactique du siège.
»
137 139
*
B I B L I O G R A P H I E ET
I.
ABRÉVIATIONS
Sources.
1. CS: Chin-shih (éd. Po-na-pen). 2. Hsiang-yang shou-ch'eng lu, p a r Chao Wan-nien (éd. 1836). 3. Hsin-ssu ch'i Ch'i lu, p a r Chao Yii-jung (éd. Ts'ung-shu chi-ch'eng, n ° 3895, Shanghai, 1939). 4. HTC: Hsiï Tzu-chih t'ung-chien, p a r Pi Y u a n (éd. Ssu-pu pei-yao, ts'é 108-112). 5. HTCCP: Hsii Tzu-chih t'ung-chien ch'ang-pien, p a r Li Tao (éd. Chô-chiang shuchu, 1881). 6. Hu-ch'ien-ching, p a r Hsii Tung (éd. Ts'ung-shu chi-ch'eng, n° 945-946, Shanghai, 1936). 7. Mo-tzu, annoté p a r P i Y u a n (éd. Ts'ung-shu chi-ch'eng, n° 576, Shanghai, 1939). 8. SCHP: San-ch'ao pei-mêng hui-pien, p a r Hsii Mêng-hsin (éd. 1878). 9. San-kuo-chih, p a r Ch'en Shou (éd. Ssu-pu pei-yao, ts'ê 56, Shanghai, 1936). 10. Shou-ch'eng-lu, p a r Ch'en Kuei et T ' a n g Shu (éd. Tsung-shu chi-ch'eng, n° 857, Shanghai, 1939). I I . Shuo-wen chiai-tzu [chen-pen], p a r Hsii Shen (éd. Ssu-pu pei-yao, ts'é 42).
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SONG
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MILITAIRE
12. SC : Sung-shih (éd. Po-na-pen). 13. T'ai-po yin-ching : Shen-chi chih-ti T'ai-po yin-ching, par Li Ch'üan (éd. Ts'ungshu chi-ch'eng, n° 943-944, Shanghai, 1937). 14. Tso-chuan : Tso-chuan Cheng-i, par Tso Ch'iu-ming (éd. Shanghai, 1928.) 15. T'ung-tien, par T u Yu (éd. Wan-yu wen-k'u, Comm. Press, Shanghai, 1935). 16. IVei-kung ping-fa chi-pen, édité par Li Ching (ou Li Wei-kung, 7 e siècle), reconstitué par Wang Tsung-i (éd. Ts'ung-shu chi-ch'eng, n° 941, Shanghai, 1937). 17. WCTY : Wu-ching tsung-yao [ch'ien-chi], par Tseng Kung-liang et Ting Tu (éd. Chung-kuo ku-tai k'o-chi t'u-lu ts'ung-pien ch'u-chi, IV, Chung-hua shu-chii Shanghai, 1959). 18. Yuan-ch'ao cheng Mien lu (éd. Ts'ung-shu chi-ch'eng, n° 3911, Shanghai, 1936). 19. YS : Yuan-shih (éd. Po-na-pen). 20. YWL : Kuo-ch'ao vien-lei (ou Yiian-wen-lei), par Su T'ien-chüeh (éd. Ssu-put s'ungk'an), « Cheng-tien hsii », ch. 41. I I . Études en chinois et en
japonais.
21. Chao I (dyn. Ch'ing), Kai-ch'u ts'ung k'ao (éd. Comm. Press, Shanghai, 1957), ch. 30. 22. Chien Po-tsan, éd., Chung-kuo shih kang-yao (éd. Jen-min ch'u-pan-shê, ts'ê 2, Pékin, 1963). 23. Chou Wei, Chung-kuo ping-ch'i shih-kao (éd. San-lien shu-tien, Pékin, 1957). 24. Fêng Chia-sheng, 1947, « Huo-yao ti fa-hsien chi ch'i ch'uan-pu », SHCK, V, (Pei-p'ing, 1947), pp. 29-84. 25. Fêng Chia-sheng, 1950, « Hui-chiao-kuo wei huo-yao yu Chung-kuo ch'uan-ju Ou-chou ti ch'iao-liang », SHCK, VI (Pékin, 1950), pp. 1-51. 26. Lu Mou-tê, « Chung-kuo-jen fa-ming huo-yao huo-p'ao k'ao », CHHP, V / l , 1928, pp. 1489-1499. (Cf. Lu Mau-Dê sous I I I : Études en langues occidentales.) 27. Matsui : Matsui Hitoshi, « Shina no h ö to höseki », TYGH, 1 /3 (1911), pp. 395-406. 28. Tiao-yii-ch'eng shih-shih k'ao-ch'a (éd. Hsi-nan shih-fan hsüeh-yüan li-shih hsipien, Ssu-ch'uan jen-min ch'u-pan-shê, Ch'eng-tu, 1961). 29. Ts'en Chung-mien, Mê-tzu-ch'eng shou ko-p'ien chien-chu (éd. Ku-chi ch'u-pan-shê, Pékin, 1958). I I I . Études en langues occidentales. Goodrich-Fêng : L.C. Goodrich and Fêng Chia-sheng, « The early development of firearms in China », Isis, X X X V I , pt. 2, n° 104 (1946), pp. 114-123 ; add., ibid., pt. 3-4, n° 105-106, pp. 250-251. Huuri : K . Huuri, « Zur Geschichte des mittelalterlichen Geschützwesens aus orientalischen Quellen », Studio Orientalia, IX/3 (Helsinki, 1941). Karaev : G.N. Karaev, Voennoe iskusstvo drevnego Kitaja (L'art militaire de la Chine ancienne), Moscou, 1959. Kirpiinikov : A. N. KirpiCnikov, « Metatel'naja artillerija drevnej Busi (iz istorii srednevekogo oruzija VI-XV vekov) » (L'artillerie de jet de l'ancienne Russie ; à propos de l'histoire de l'armement médiéval du 6 e au 15e siècle), Materialy i issledovanija po arkheologii SSSR, n° 77 (1958), pp. 7-51. Lu Mau-dê : Lu Mau-dê, « Untersuchung über die Erfindung der Geschütze und des Schiesspulvers in China, übers, von Liao Bao-Seing », Zeitschrift Sinica, X I I I (1938). (Cf. Lu Mou-tê sous I I : Études en chinois et en japonais.) Mayers : W. F. Mayers, « On the introduction and use of gunpowder and firearms among the Chinese. With notes on some engines of warfare and illustrâtion », JNCB.RAS, N.S. VI (Shanghai, 1970), pp. 73-104. Moule : A.C. Moule, « The siege of Saianfu and the murder of Achmach Bailo (two chapters of Marco Polo) », JNCB.RAS, L V I I I (1927), pp. 1-35. (Reproduit avec addendas et corrections dans Quinsai, with others notes on Marco Polo, Cambridge, 1957, p. 70-78. F. A.)
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Needham : J . Needham, Science and Civilization in China, Vol. IV : Physics and Physical Technology, pt. 2 : Mechanical engineering, Cambridge, 1965. Parker : E . H. Parker, « Military engineering », China Review, XV ¡4 (1886-87), p. 253. PruSek : J . PrùSek, « Quelques remarques sur l'emploi de la poudre de canon en Chine », Archiv orientalni, X X /1-2 (1952), pp. 250-277. Schlegel : G. Schlegel, « On the invention and use of firearms and gunpowder in China prior to the arrival of Europeans », TP, 2 e série, I I I (1902), pp. 1-11. Wang Ling : Wang Ling, « On the invention and use of gunpowder and firearms in China », Isis, XXXVII/3-4, n° 109-110 (1947), pp. 160-175. Wittfogel-Fêng : K. A. Wittfogel and Feng Chia-sheng, History of Chinese Society Liao (907-1125), Transactions of the American philosophical society, N.S. 36, Philadelphie, 1949. Yule : The book of Ser Marco Polo, the Venetian, translated and edited with notes by colonel sir Henry Yule, 3rd ed., revised by H . Cordier, vol. 2, Londres, 1903. •
Les problèmes d'histoire des techniques militaires de la Chine médiévale n ' o n t pas encore trouvé u n écho suffisant dans la littérature scientifique, ce qui s'explique, dans une certaine mesure, par le fait que les sources ne sont pas exploitées. L'attention des chercheurs européens a été surtout attirée, j u s q u ' à présent, par le problème de l'apparition de la poudre et par le problème conjoint des phases particulières de l'histoire des armes de jet dans la Chine médiévale. Mais on ne s'est pas encore occupé, dans sa totalité, de l'étude de l'artillerie antérieure aux armes à feu, bien que quelques auteurs aient maintes fois souligné l'importance et la nécessité de telles recherches 1 . L'étude de l'armement à j e t de pierre présente un grand intérêt, a v a n t t o u t , pour l'histoire militaire de la Chine même. É t a n t le moyen le plus efficace d'anéantir à distance forces vives, matériel militaire et fortifications ennemies, les armes à projectiles de pierre apparurent de fait dans la Chine des 10 e -13 e siècles comme les mécanismes essentiels pour décider du succès du siège et de la défense des ouvrages permanents et fortifiés de campagne. L'accroissement de la quantité, de la puissance et, par conséquent, de l'efficacité des armes de j e t exerça une grande influence sur le développement de la fortification dans la Chine médiévale. L'emploi intensif d'armes à projectiles de pierre marqua aussi un moment décisif dans le perfectionnement des méthodes tactiques de siège et de défense des forteresses, branche importante de l ' a r t militaire chinois. Les caractéristiques de l'armement de j e t dans l'Europe occidentale et le Moyen-Orient f u r e n t les armes à torsion qui utilisaient l'énergie de tendons animaux élastiques, et, plus t a r d , les machines à contrepoids qui projetaient les boulets grâce à la pesanteur de contrepoids 1. Cf. Huuri, pp. 1, 17, Kirpiônikov, pp. 9, 16. 3
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»'exerçant sur un levier de lancement 1 . Les particularités de construction de ces armes, leurs données techniques ainsi que leur application aux conditions de combat ont été déjà bien étudiées en prenant pour modèle les machines européennes 2 . Dans les pays d'ExtrêmeOrient, dans l'ensemble, un troisième type d'armes de jet était répandu : des armes bandées, projetant le boulet par l'énergie élastique du levier de lancement lui-même, qu'on recourbait à l'aide de cordes ou de courroies tendues, fixées à l'un des bras. Aussi, l'étude des problèmes liés à la création, au développement, à la construction des pierriers bandés et à leur application militaire, sur la base des matériaux chinois, serait extrêmement précieuse pour caractériser un des types les moins étudiés d'arme de jet antérieure à l'arme à feu. Il ne faut pas oublier non plus une invention dont on ne peut méconnaître la signification dans l'histoire de l'humanité et que les Chinois considèrent de droit comme une des réussites les plus remarquables de leur science et de leur technique : il s'agit de l'apparition aux 10 e 13 e siècles, sur le territoire de la Chine actuelle, des premiers spécimens de catapultes utilisant des mélanges de poudres comme corps incendiaire ou explosif et, plus tard, comme moyen de lancement. Le développement de ces engins fut étroitement lié, dans la première étape de leur emploi, à la technique du jet de pierre, ce qui souligne encore mieux la signification des recherches sur les armes de jet en Chine, en particulier aux 10 e -13 e siècles, durant la période transitoire précédant l'apparition des armes à feu. Dans le présent article, sont exposés quelques résultats d'une étude sur l'artillerie chinoise à jet de pierre aux 10e-13e siècles 3 . C'est à cette époque précisément que les armes à jet atteignirent en Chine leur plus haut développement, que leurs formes se fixèrent définitivement, ne devant plus se modifier dans leurs grandes lignes au cours de leur existence (jusqu'aux 16 e -17 e siècles), et que leur utilisation massive en fit l'instrument le plus important de la guerre de siège. Comme matériel de recherche, nous avons utilisé les diverses sources chinoises, en commençant par les histoires dynastiques et en finissant par les chroniques des événements militaires des 12 e -13 e siècles, mais surtout les traités militaires Sung, parmi lesquels le Wu-ching tsung-yao (1044) occupe le premier plan.
1. Huuri, p. 14. 2. Huuri, pp. 248-254, bibliogr. 3. Nous n'examinerons pas ici un autre grand groupe d'armes de jet : les arbalètes et les balistes sur chevalet lançant des flèches, dont l'étude représente un problème indépendant.
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Il faut avant tout dire quelques mots sur les armes à jet de pierre de la Chine ancienne, dans la mesure où les armes de jet pré-Sung permettent d'expliquer l'existence d'une série de particularités matérielles de l'artillerie Sung. On considère, en général, que la première notation sur l'emploi de pierriers en Chine se trouve dans le Shih-ching et la première notation datée dans le Tso-chuan, en 707 av. n . è . 1 Cependant, selon nombre de commentateurs chinois, il n'y a pas une base suffisante pour une telle affirmation, car le caractère kuai signifiant à l'époque ancienne « pierrier », doit plutôt être compris dans ces textes comme « drapeau », « étendard ». Cet argument nous semble assez convaincant. Visiblement le premier témoignage incontestable sur l'emploi en Chine des pierriers se trouve dans une mention conservée dans un fragment, parvenu jusqu'à nous, d'un traité militaire, le Fan Li ping-fa, composé par Fan Li, militaire et homme politique de l'époque Ch'unch'iu 2 , ainsi que dans la description des pierriers dans le traité de Motzu (5 e -4 e siècles av. n.è.) 3 , et dans le célèbre dictionnaire de Hsii Shen, le Shuo-wen (1 er siècle av. n.è.) 4 Les notations de Fan Li et de Hsii Shen sur les pierriers sont déjà connues et le mérite de l'identification du mécanisme chieh-ch'ê, décrit par Mo-tzu, avec les anciennes armes de jet revient à l'historien chinois Ts'en Chung-mien 6 . Dans les trois brefs témoignages sur les anciens pierriers chinois cités ci-dessus, on remarquera l'existence des caractères chi et fu, désignant la perche souple de lancement. Quelques auteurs, pour traduire l'expression fa-chi dans les textes de Fan Li et de Hsii Shen, s'appuient sur le sens moderne du caractère chi, « mécanisme », « machine », et attribuent à l'ancien pierrier chinois un certain dispositif complémentaire pour permettre, soi-disant, le lancement 6 — considérant d'ailleurs que ce dispositif repose sur la torsion 7. Nous pensons qu'en l'occurence il faut partir de l'ancien sens de chi : « agir par la libération de l'énergie intérieure propre, par les forces de l'élasticité des fibres du bois » 8 . La perche chi était non seulement un instrument de lancement, mais aussi une source d'énergie élastique grâce à laquelle se produisait le lancement. 1. Chao I, p. 630 ; Lu Mou-tê, p. 1490 ; Huuri, p. 200. 2. Tso-chuan, ch. 6. Fan Li appartient aux premières décennies du 5 e s. av. n.è. 3. Mo-tzu, p. 172. 4. Shuo-wen chiai-tzu, ch. 7. 5. Ts'en Chung-mien, p. 35. 6. Ainsi nous lisons dans la traduction allemande de la citation de Hsii Shen : « werden Steine... mit Hilfe einer Vorrichtung abgeschossen » (Lu Mau-dê, p. 26) ; Huuri, p. 200. 7. Karaev, pp. 155-156. 8. Shuo-wen chiai-tzu, ch. 6.
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Les indications données par Fan Li, Mo-tzu et Hsii Shen permettent d'établir avec une précision suffisante que la perche-levier de lancement élastique, qui appartient immanquablement aux armes de jet chinoises plus tardives, a donc une origine ancienne. L'existence d'un levier, partie agissante principale des armes de jet de la période T'ang-Yûan, fait penser que la caractéristique du développement de ces armes en Chine, au cours de plusieurs siècles, f u t le maintien de la perche-levier comme source de la force de lancement et comme instrument de jet. On peut désigner les pierriers chinois du mot allemand Bleide, terme réservé aux machines de jet à levier. A l'époque pré-T'ang, nous rencontrons dans les sources de nombreuses mentions de l'utilisation des armes de j e t 1 . L'analyse de ces témoignages permet d'affirmer que tous les pierriers alors en usage et connus sous les dénominations de fa-shih-ch,ê, shih-ch'ê, ch'ueh-cK'ê, p,ai-ch,ê, p'ao-ch'ê, lei-shih-cK'ê, fa-shih-chi, etc., se présentaient comme des Bleide bandés à levier, agencés selon le principe des anciennes armes de jet. L'unique exception f u t l'emploi d'un pierrier préparé par Ma Chiin ( l r e moitié du 3 e siècle ap. n.è.) sous forme d'une roue de lancement 2 , mais cet épisode f u t isolé et, dans l'histoire de l'artillerie antérieure aux armes à feu, il n'y a plus aucun autre témoignage sur l'utilisation d'une roue comme arme de jet. A l'époque T'ang, les mentions d'utilisation, dans les opérations militaires, d'une arme de jet se rencontrent assez souvent et sont plus détaillées. La dénomination la plus répandue pour les pierriers T'ang est le terme p,ao pour lequel on emploie les caractères (a) ou (6) et plus tard une variante de ce dernier caractère (c) 3 . Maintes œuvres militaires des T'ang ont conservé des descriptions de l'aménagement de types particuliers d'armes de jet 4 . Ces descriptions montrent que, vers cette époque, les traits fondamentaux des formes de l'artillerie antérieure aux armes à feu étaient déjà fixés. Certes, à l'époque Sung — âge d'or des armes de jet —, s'opéra un développement des mécanismes de lancement, qui f u t causé, en particulier, par les caractéristiques de l'emploi tactique des pierriers, mais les principes fondamentaux et les formes de construction restèrent sans modification essentielle, ne subissant qu'un perfectionnement technique. Les opérations militaires continuelles du 10 e au 13 e siècle entre la 1. On trouvera les principales indications à ce sujet dans Lu Mau-dê, Mayers, Wang Ling, etc. 2. San-kuo-chih : Wei chih, ch. 29. 3. L'opinion de Schlegel (p. 5), selon laquelle le caractère p'ao (a) fut remplacé par (6) ou (c) lorsque les pierres de jet furent mises dans le tube (il s'agit du corps des armes à feu) est dépourvue de base et n'est pas confirmée par les sources. 4. Wei-kung ping-fa chi-pen, ch. hsia ; T'ai-po yin-ching, ch. 4 ; T'ung-tien, ch. 60; Hu-cVien-ching, ch. 6, etc.
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Chine des Sung et les peuples du nord et du nord-est amenèrent les K i t a n , les Tangut, les Jiircen et, plus t a r d , les Mongols à connaître les techniques militaires chinoises, à les assimiler et à utiliser en particulier les armes de j e t dans la guerre de siège. E n pratique, les armes d ' a t t a q u e et de défense des places fortes f u r e n t , à cette époque, à niveau égal chez les divers antagonistes ainsi que le confirment les sources Sung. On remarque — mais à la vérité parcimonieusement — des indices isolés de la préparation de nouveaux types d'armes de jet 2 , mais visiblement ceux-ci ne f u r e n t pas, en principe, différents des pierriers courants. Le plus souvent, il est question dans les sources de la prépondérance quantitative de types particuliers de la technique de lancement et de leur meilleure utilisation par tel ou tel belligérant. Ceci nous donne le droit de poursuivre notre étude de la technique du jet de t y p e chinois en l'élargissant à l'équipement des armes kitan, t a n g u t , jiirëen et, plus t a r d , mongoles 3 . Le problème le plus complexe et le moins étudié de l'histoire de l'artillerie de j e t est l'agencement des armes et leurs particularités techniques. J u s q u ' à maintenant, on n ' a pas spécialement considéré les mentions concernant la construction des armes de j e t du 7 e au 13 e siècle dans les t r a v a u x des auteurs chinois. Ceux-ci ne traitent que du nombre d'armes en service, de la portée du jet et du poids des projectiles de quelques armes de jet Sung 4 . Les spécialistes européens, cependant, se bornent à emprunter ces indications dans les matériaux chinois traduits en langues européennes 6 et ne t e n t e n t pas de connaître les données de la construction des Bleide directement d'après les sources chinoises. Peut-être est-ce à cause des difficultés que présentent la traduction des termes, l'explication des désignations et de la disposition des détails. Néanmoins, comme le montre notre essai, une compréhension de t o u t le complexe des données, appuyée par une analyse technique simple, permet d'atteindre à des conclusions incontestables sur l'agencement, les principes d'action, les caractéristiques tactiques et techniques des pierriers Sung. Pour cela, les illustrations conservées dans les sources chinoise jouent u n rôle important. L'abondance de la documentation se r a p p o r t a n t au mécanisme des pierriers (et, en premier lieu, les nombreuses données chiffrées 1. Wittfogel-Fêng, pp. 519, 566, 569. 2. Voir, par exemple, CS, ch. 111, sur l'invention par Ch'iang Shen de nouvelles armes de jet o-pao. 3. La pénétration des armes de jet du type chinois au Japon en passant par la Corée (Matsui, pp. 395-396) et en Asie centrale (Huuri, pp. 203-204) remonte au 7 e siècle. Leur utilisation en Annam, en Birmanie (Yiian-ch'ao cheng-Mien lu, p. 6), à Java ( YS, ch. 210) date du 13e siècle et est visiblement liée aux campagnes de Qubilai. 4. Cf., par exemple, les travaux de Lu Mou-tê, Wang Ling, Fêng Chia-sheng, etc. 5. Cf. Huuri, pp. 200-202, Kirpiînikov, pp. 16-17, n. 76.
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fournies par le WCTY) nécessite, pour en étudier la construction, un classement des éléments clairement diversifiés. Le pierrier chinois se composait de deux parties essentielles : 1. Le mécanisme de lancement avec un levier élastique et le dispositif qui s'y rapporte ; 2. L'équipement de support. A travers toute la diversité des types de pierriers chinois, le principe général du lancement — par levier élastique — déterminait un modèle unique du système de lancement. Les principales différences de construction concernaient donc les dispositifs d'appui dont la structure avait une influence directe sur le mode d'action de l'arme et sur son usage tactique. Observons d'abord la structure du mécanisme de lancement. L'essentiel du levier de lancement, était formé de perches élastiques flexibles (shao), longues de 5,60 à 8,40 m et davantage, et ayant, à leurs extrémités, des sections de 12,5 et 7 cm 1 . Leur technique de préparation, décrite dans le Shou-ch,eng-lu des Sung 2 , était assez compliquée, car elles devaient présenter une élasticité et une solidité élevées, ainsi que la faculté de garder longtemps ces qualités. Quelques perches étaient réunies en faisceau conique rappelant un ressort composé, du type du ressort moderne. Naturellement, cette comparaison est tout à fait conventionnelle, mais, sans aucun doute, le levier de lancement possédait d'autant mieux les propriétés essentielles d'un ressort composé qu'il était formé d'un plus grand nombre de perches. Les pierriers les plus répandus à l'époque Sung avaient un levier formé de 1 à 10 perches mais on connaît des armes plus puissantes qui en avaient 13 3 et même 15 4 . A l'extrémité la plus fine du levier, était fixé sur des fils de fer un « nid » de cuir (p'i-wo), en forme de fronde, ayant jusqu'à 50 cm de diamètre, pour y loger le boulet de pierre ou le projectile d'un poids allant de 1 à 60 kg 5 . Du côté de l'extrémité la plus grosse, le levier était fixé à un axe transversal (chu) qui lui servait d'appui pour la rotation et le divisait en deux bras : un bras court et un bras long, cinq ou six fois plus long que le précédent dans les pierriers légers, deux ou trois fois plus long dans les pierriers puissants 6 . L'axe était placé 1. WCTY, ch. 12. 2. Shou-ch'eng-lu, pp. 16-17. 3. HTCCP, ch. 166. 4. YWL, ch. 41. 5. WCTY, ch. 12. Dans d'autres sources, on parle de projectiles d'un poids encore plus élevé. 6. En effet, les leviers des pierriers puissants étant formés d'un assemblage de plusieurs perches, le fléchissement du bras long aurait exigé une trop grande force s'il avait été, comme dans les pierriers légers, cinq ou six fois plus long que le bras court.
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sur des supports disposés dans le système d'appui du pierrier. (Cf. Fig. 1 et 2.)
Fig. 1. — Levier des pierriers légers.
Le fléchissement du levier, c'est-à-dire la « tension » du Bleide, était réalisé grâce à des cordes de chanvre (chuai-so), longues de 12,40 à 15,50 m et épaisses de 16 m m , fixées par u n dispositif spécial à l'extrémité la plus grosse du levier. La quantité de cordes (de 40 à 125) déterminait l'importance de la force élastique du levier. Son extrémité la plus mince, avec le projectile logé dans la fronde, était fixée à la partie inférieure du système d'appui du pierrier. Des personnes spécialement entraînées, les « tireurs » (chuai-p'ao-jen) — dont le nombre, en rapport avec la puissance du pierrier était de 40 à 250 et davantage — tiraient les cordes et recourbaient le levier. Quand on libérait celui-ci de l'attache le bras le plus long du levier se détendait et communiquait au projectile la vitesse nécessaire à son vol (cf. Fig. 3). L'opération était commandée
Fig. 3. — Schéma montrant l'action de la fronde de lancement. (D'après A.N. Kirpicnikov.)
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par un ou deux artilleurs (p , ao-shou), spécialistes non seulement du tir mais aussi de la fabrication des pierriers.
F i g . 4. — Pierrier mobile du premier type, dit « en tourbillon ». (D'après le WCTY.) Selon les caractères du système de support, nous pouvons diviser les pierriers Sung en trois groupes. Dans le premier groupe rentrent les armes à action circulaire sur une colonne d'appui. Leur aspect extérieur rappelait un chadouf de puits. L a particularité de leur construction était un cadre tournant monté sur un pied et auquel était directement fixé le levier de lancement. E n tournant autour de l'axe vertical, le cadre permettait au mécanisme de lancement de balayer le plan horizontal et de conduire un tir circulaire. L'appellation de ce type d'appa-
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reil en témoigne : hsiian-fêng-p'ao (c'est à-dire Bleide « en tourbillon »). Dans le WCTY deux d'entre eux sont décrits et six sont donnés en illustration 1 (cf. Fig. 4). Il faut classer dans le deuxième groupe les pierriers dont le levier de lancement était monté sur un bâti porteur en forme de prisme. Leur aspect extérieur rappelait la silhouette d'un animal assis sur ses pattes de derrière, d'où les noms de hu-tun-p'ao (« assis comme un tigre »), (cf. Fig. 5), kou-tun-p'ao (« assis comme un chien »), etc. Le pan avant du prisme faisait légèrement saillie vers le haut et servait d'appui pour l'axe du mécanisme de lancement. A la différence des pierriers « en tourbillon », l'axe du levier des appareils de ce groupe, étant inséré dans une entaille fixe du support, ne pouvait tourner sur le plan horizontal. Le lancement n'avait lieu que vers l'avant et la direction du tir ne pouvait se modifier que par un déplacement de tout l'appareil. Leur poids allait de 3,8 à 4 t pour une hauteur du support de 5,60 m. Dans le WCTY il y en a une description et trois dessins. Le groupe le plus nombreux était le troisième, celui des pierriers à chevalet sur base pyramidale. Le support avait la forme d'une pyramide tronquée, au faîte de laquelle était installé un levier puissant. Pour une hauteur allant jusqu'à 8 m, le support pesait plus de 5 t. Tous les mécanismes de lancement de grande puissance étaient disposés sur de tels chevalets, comme en témoignent les noms de ces pierriers : shuang-shao-p'ao (« pierrier à deux perches »), san-shao-p'ao (« à trois perches »), ch,i-shao-p''ao (« à 7 perches »), chiu-shao-p''ao (« à 9 perches »), etc. Dans le WCTY cinq sont décrits et six sont dessinés (cf. Fig. 6.). Nous pouvons supposer qu'entre le développement historique des pierriers chinois et leurs particularités techniques existe un lien défini. Les pierriers « en tourbillon » du premier groupe ont représenté la forme la plus ancienne de l'arme de jet en Chine. Leur type s'est formé au début de notre ère et leurs premières descriptions apparaissent déjà à l'époque T'ang. Leur légèreté relative et la finesse de leurs accessoires en limitaient la force de frappe mais, étant donné le niveau qu'avait alors atteint la technique de la guerre et des fortifications, ce défaut n'était pas ressenti avec acuité durant les premiers temps de l'artillerie de jet. Après l'apparition d'appareils plus puissants et plus robustes par suite du perfectionnement des méthodes de défense et de fortifications, les pierriers du premier type, qui comptaient aussi des variantes ambulantes, restèrent vraisemblablement pour remplir des tâches liées à une grande mobilité et à la rapidité de l'action. L'accroissement de la force de frappe des pierriers devait nécessairement entraîner un changement dans le mécanisme de lancement, comme dans le système 1. WCTY, ch. 12.
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Fig. 5. — Pierrier du deuxième type, dit WCTY.) a assis comme un tigre ». (D'après le
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à cinq percftes(wu-shao-p'ao). (D'après le
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du support. C'est ainsi qu'apparurent de nouvelles variantes d'appui, sous forme du chevalet primastique et pyramidal. Q u a n t au renforcem e n t du levier, il se fit par la multiplication des perches qui le formaient. Dans la construction et l'utilisation des pierriers à chevalet des deuxième et troisième groupes, il y a beaucoup de points communs, mais aussi une différence essentielle. Les armes à base prismatique avaient une particularité qui réagissait sur leur emploi tactique : le déplacement du centre de gravité quelque peu en arrière permettait d'effectuer le lancement d'une manière plus vive, avec u n accroissement de la vitesse initiale du vol du projectile et de l'angle de braquage du levier, de sorte que l'angle de chute de la trajectoire était considérablement réduit, tandis que s'accroissaient la force de frappe d u projectile et l'exactitude de sa visée. A notre avis, c'est précisément cette particularité qu'a en vue l'auteur d'une oeuvre militaire Sung, Shih Mao-liang, lorsqu'il souligne que « parmi les pierriers employés près des murs de fortification, les hu-tun-p'ao causent le plus grand mal » 1 . Quant au système d'appui de forme pyramidale des pierriers du troisième groupe, il jouissait d'une meilleure force de résistance aux charges à directions multiples et d'une plus grande stabilité dans le tir. Le lancement était plus lourd, ce qui permettait d'accroître le poids des projectiles et d'atteindre des buts couverts. Les armes les plus puissantes et les plus robustes avaient habituellement une base pyramidale, mieux adaptée que les autres à une augmentation de la puissance de combat et à l'efficacité de l'action destructrice. De telles armes étaient principalement destinées à l'anéantissement des gros ouvrages de défense ou de soutien p a r des projectiles lancés en masse et elles f u r e n t les plus répandues dans l'artillerie Sung. E n étudiant sur le plan théorique les divers types de pierriers médiév a u x , K . Huuri suppose que les pierriers bandés devaient avoir certains avantages p a r rapport aux appareils à torsion et à contre poids utilisés dans les autres régions de l'Eurasie 2 . L'analyse des données techniques des pierriers bandés chinois montre la justesse de cette assertion. Les armes bandées avaient une plus grande vitesse de tir que les appareils à contre-poids et, visiblement, une vitesse initiale du vol du projectile supérieure. Ils l'emportaient aussi par la force de f r a p p e des projectiles. D'autre p a r t , les pierriers bandés chinois, grâce aux particularités de leur construction, disposaient de plus grandes possibilités pour l'accroissement de la force de lancement, et cela de deux manières : pour les pierriers légers sur colonne de soutien, par l'allongement du bras le plus fin du levier et, de la sorte, par l'augmentation de la force
1. Voir SCHP, ch. 168. 2. Huuri, pp. 14-15.
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centrifuge de sa rotation lors de l'opération du lancement 1 ; pour les pierriers lourds par le développement de la puissance du levier luimême, grâce à la multiplication des perches qui le composaient. La forme du chevalet des pierriers du troisième groupe, qui avait une grande réserve de stabilité, permettait de varier, au cours du combat, les leviers de lancement sur un seul et même support en transformant, par exemple, le pierrier à cinq perches (wu-shao-p'ao) en pierrier à sept perches (ch'i-shao-p'ao) et inversement. Étant donné leur simplicité de construction, les armes bandées chinoises avaient entre elles, sans aucun doute, des points communs par les dimensions, non seulement de leurs parties essentielles, mais aussi des éléments séparés constitutifs de ces parties. Un changement arbitraire de dimension ou de position des parties principales ou des détails aurait entraîné une transformation de leur fonctionnement, se reflétant essentiellement sur l'efficacité du lancement. Aussi K . Huuri a-t-il tort lorsque, ignorant le détail de la structure et des particularités techniques des pierriers chinois, il estime qu'en cas de nécessité le système de support « pouvait être élevé ou abaissé » 2 . Un changement de hauteur du chevalet devait influer sur les charges dynamiques, le degré de tension du levier, la stabilité du pierrier, c'est-à-dire, en fin de compte, sur l'efficacité de l'opération de lancement. Il était également impossible de changer arbitrairement la longueur du levier de lancement, ce qui aurait entraîné un amenuisement du champ de tir et, dans l'ensemble, de toute la capacité de jet du pierrier. Nous trouvons dans les sources chinoises une confirmation suffisante de cette opinion 3 . Les indications des traités militaires chinois sur la portée et le poids des projectiles des pierriers chinois des 10 e -13 e siècles ont déjà fait l'objet de quelques travaux 4 . Cependant, le rayon d'action de 75 m, cité par le] WCTY comme distance identique pour presque toutes les armes et qu'on peut comprendre comme un chiffre absolu, est donné, selon nous, comme grandeur normative en fonction de laquelle on déterminait le poids des projectiles et le nombre des tireurs. Selon 1. Il faut parler ici d'une erreur commise par M. Needham qui — dans son Science and Civilization in China, T. IV, 2 e partie — donne un schéma de navire à roues de l'époque Sung, reconstitué par lui, avec un équipement de pierriers (pl. CCXLIV, fig. 634). Les pierriers « en tourbillon » qu'il a représentés ont un bras long et fort avec les cordes tendues et un bras court et mince avec la fronde, c'est-à-dire que la disposition des bras du levier de lancement est à l'inverse de ce qu'elle était en réalité. On comprend facilement qu'un tel levier non seulement n'aurait pu jouer effectivement son rôle, mais que c'est à peine s'il aurait été en état d'assurer le moindre lancement. 2. Huuri, p. 145. 3. SCHP,
ch. 205 ; CS, ch. 124.
4. Huuri, p. 200 ; Fêng Chia-sheng, 1950. p. 43.
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toute vraisemblance, la meilleure distance s'étendait de 75 à 150 m, mais elle pouvait varier en fonction du poids du projectile et du but tactique. Selon d'autres sources, les pierriers Sung à grande portée pouvaient atteindre des buts à plus de 500 m 1 . Dans les sources chinoises liées à la construction des pierriers, on voit nettement la tendance des techniciens militaires Sung à la standardisation des armes et à l'unification de leurs accessoires. Les détails de la structure des supports et des mécanismes de lancement ont, dans les appareils des divers groupes, des mesures et des poids identiques et sont préparés avec les mêmes matériaux. Cela simplifiait et hâtait la préparation et le montage des armes de jet dans les conditions du combat, et permettait de changer rapidement les accessoires hors de service. Grâce à la standardisation et à l'unification des détails, la production des pierriers bandés chinois atteignit des proportions énormes pour l'époque. Ainsi en 979, sur ordre de l'empereur T'ai-tsung, 800 pierriers bandés furent construits 2 . L'utilisation de part et d'autre dans une seule bataille de plusieurs dizaines — et même centaines — de pierriers était, dans la Chine des Sung, un phénomène courant. Lors du siège de K'ai-fêng par les Jiircen en 1126-1127, on employa, du seul côté chinois, plus de 500 armes de jet pour la défense de la ville 3 . Aussi n'y a-t-il pas lieu de mettre en doute la véracité de mentions portant sur le grand nombre des détachements d'artilleurs dans les troupes Sung et plus tard mongoles. Selon les données des historiens persans, dans l'armée de Cinggis-khan, qui n'était équipée au début qu'avec un armement chinois, le détachement des servants des pierriers comptait 10 000 hommes 4 ; les successeurs de Cinggis-khan disposaient déjà de dizaines de milliers d'artilleurs B. Des chiffres aussi imposants sont tout à fait naturels si l'on tient compte de la quantité de servants qu'exigeaient les appareils chinois, spécialement les armes lourdes de jet. Les principaux objets de jet dans l'artillerie Sung étaient des boulets d'une seule pièce en matériaux durs. Pour leur fabrication on utilisait, le plus souvent, diverses espèces de pierre. La prédominance des projectiles de forme sphérique 6 s'explique visiblement par le fait que, depuis longtemps, on connaissait bien en Chine quelques règles de balistique externe. Ainsi dans le Shou-ch'eng-lu, nous lisons : « Si le 1. Shou-ch'eng-lu, p. 16. 2. HTCCP, ch. 20. 3. SCHP, ch. 58.
i. Yule, p. 168. 5. CS, ch. 124 ; YS, ch. 122, 151. 6. CS, ch. 113.
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poids des projectiles est identique, leurs coups sur les objets seront précis ; s'ils sont de forme ronde, ils voleront loin. » 1 En cas de pénurie de boulets, on utilisait des meules, des rouleaux de pierre d'usage domestique 2 , etc. Les défectuosités fréquentes ou le manque de pierres pour boulets obligeaient parfois les artilleurs à remplacer, avec grande ingéniosité, les projectiles par d'autres matériaux durs : on coulait des projectiles en métal 3 , on en taillait dans de la glace 4 , on remplissait de brique cassée des pots de cuisine en fonte 5 ou des sacs de cuir 6 ; fréquemment on les faisait entièrement en terre cuite (ni-p'ao) ou avec le noyau d'une brique (chuan-p'ao) 7. Outre les boulets durs destinés à frapper des cibles vivantes, on utilisait, au Moyen Age dans de nombreux pays, pour détruire le matériel et les fortifications de l'adversaire, des projectiles enflammés, intoxiquants et autres. Avec le temps, leurs possibilités destructrices se perfectionnèrent, mais il ne semble pas qu'on trouve, hors de la Chine, dans les textes des 10 e -13 e siècles, cette diversité de projectiles spéciaux que connaissaient les Sung, surtout avec l'emploi précoce de mélanges de poudres aux propriétés variées. Les problèmes de pyrotechnie à l'époque Sung ont déjà fait l'objet d'une abondante littérature 8 , qui a réuni un grand nombre de témoignages sur l'utilisation ancienne de la poudre en Chine, spécialement dans les projectiles de l'artillerie de jet. Dans la plupart des documents écrits chinois, les projectiles à poudre des Sung s'appelaient en général huo-p'ao (« projectiles de feu »), mais parfois ils se différenciaient selon le caractère de leur action. Dans le WCTY, on trouve mention de projectiles à poudre incendiaire (huo-chHu, « boule de feu » ; chi-li huo-chHu, « boule de feu à pointes » [cf. Fig. 7] ; y in huo-chHu, « boule de feu réglable » ; chu-huo-yao, « épervier de feu en bambou » [cf. Fig. 8] ; fieh-tsui huo-yao, « épervier de feu à bec de fer »), de projectiles explosifs à fragmentation (pH-li huo-ch'iu, « boule de feu tonnante » [cf. Fig. 9] j , de projectiles à action toxique (yen-ch , iu, « boule de fumée » ; tu-yao yen-ch'iu, « boule de fumée empoisonnée » ; fen-p,ao-kuan,
1. Shou-cVeng-lu, p. 17. 2. SCHP, ch. 66, 68. 3. CS, ch. 124. 4. SS, ch. 324. 5. SS, ch. 323. 6. Hsin-ssu ch'i Ch'i lu, ch. 1. 7. Shou-ch'eng-lu, p. 3 ; Hsiang-yang shou-ch'eng-lu, i. 28. 8. Parmi les travaux fondamentaux en langues européennes, citons les articles de Mayers, Parker, Schlegel, Goodrich, Wang Ling, Lu Mau-dê, PrûSek ; dans la grande masse des travaux chinois, les nombreuses recherches de Fêng Chia-sheng publiées de 1947 à 1957 méritent une attention particulière.
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FIG. 7. — Projectile à poudre incendiaire, du type « boule de feu à pointes ». (D'après le WCTY.)
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FIG. 8. — Projectile poudre incendiaire, type « êpervier de feu bambou ». (D'après WCTY.)
FIG. 9. — Projectile explosif à fragmentation, dit « boule de feu tonnante ». (D'après le WCTY.)
à du en le
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« pot projeté avec des excréments ») 1 . Il y entre aussi trois formules de composition de poudre pour les divers projectiles enflammés : ce sont les plus anciennes formules connues au monde 2 . Dans les autres sources, on mentionne toute cette variété de projectiles que nous venons de citer, souvent sous d'autres noms, mais avec une action analogue à celle décrite dans le WCTY. Plus tard, aux 12 e -13 e siècles, les divers projectiles à action explosive et à fragmentation ont connu une grande diffusion, sous la dénomination générale de t'ieh-huo-p'ao («projectiles de feu, en fer »), bourrés également de poudre. L'analyse des nombreuses données concernant les huo-p'ao du 10 e au 13 e siècle permet de conclure que ce terme — qui, soit dit en passant, n'apparaît dans les documents qu'à partir du 10 e siècle, — est étroitement lié à l'usage de la poudre à des fins militaires. La dénomination de huo-p'ao du 10 e au 14 e siècle s'employait seulement pour désigner les projectiles de jet antérieurs aux armes à feu et contenant un mélange de poudres ; elle s'employait plus rarement pour désigner les pierriers lançant de tels projectiles. L'opinion selon laquelle les huo-p'ao des 10 e -13 e siècles sont des armes à feu n'est pas justifiée. Ce n'est qu'aux 12 e -13 e siècles qu'apparaissent en Chine les premiers appareils primitifs utilisant les propriétés projetantes de la poudre et ayant des dénominations spécifiques 3 . Au 15 e siècle, le terme huo-p'ao passa aux armes à feu et ce n'est que de ce moment qu'il devient prédominant pour désigner les bouches à feu. Une compréhension correcte de la réalité du sens de huo-p'ao, sous les Sung et plus tard, est importante pour l'histoire de l'artillerie antérieure aux armes à feu et utilisant la poudre. L'avoir sous-estimé jusqu'à maintenant a souvent conduit les chercheurs à des conclusions erronées. A ce propos, on ne peut pas ne pas soulever la question du caractère de ce qu'on a appelé « les canons musulmans » (Hui-hui p'ao), construits en 1271-72 par les artisans persans des troupes de Qubilai et bientôt adoptés pour l'équipement des armées chinoises des Sung du Sud 4 . Au cours de la polémique qui s'est élevée à ce sujet, comme on le sait, deux points de vue se sont dessinés : un groupe d'auteurs (Chao I, Lu Mou-tê, Chou Wei, Chien Po-tsan, Goodrich-Fêng, etc.) considère que les « canons musulmans » sont des bouches à feu ; l'autre groupe (Yule, Moule, Huuri, Wang Ling, etc.) est enclin à voir en ces canons des pierriers à contrepoids. Cependant les partisans de la première opinion n'ont pas été en mesure d'apporter des arguments suffisants 1. WCTY, ch. 11 et 12. 2. Wang Ling (p. 168) mentionne ces formules. Fêng Chia-sheng (1947, pp. 4952) analyse en détail leur composition. 3. Pour plus de détails, voir Fêng Chia-sheng. 4. SS, ch. 197 ; YS, ch. 203. 4
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à la confirmation de leur théorie, tandis que le jugement du deuxième groupe trouve des bases sérieuses, avant tout dans les sources chinoises elles-mêmes. On peut penser que la discussion est close avec les travaux de Fêng Chia-sheng, lequel, s'appuyant sur d'abondants matériaux basés sur les faits réels, a renoncé à son premier point de vue et a prouvé que ces armes étaient des pierriers à contre-poids Comme nous acceptons totalement la conclusion de Fêng Chia-sheng, nous ne voudrions que la développer sur quelques points. Il faut tout d'abord remarquer que l'apparition, dans la deuxième moitié du 13 e siècle, de grandes bouches à feu ayant une puissance destructrice particulière et capables de lancer des projectiles d'un poids de quelque 90 kg 2 est exclue, tant par le développement historique même des armes à feu que par l'absence des possibilités techniques, indispensables dans le domaine de la métallurgie et dans celui de la pyrotechnie. Le développement des armes à feu alla du simple au complexe, des petites formes des armes à main aux grandes bouches à feu, et non à l'inverse. De son côté le développement de la métallurgie et de la pyrotechnie au 13 e siècle, n'atteignait nulle part encore un niveau tel qu'il eût permis la construction de bouches à feu géantes. Ce n'est pas par hasard qu'il n'y a, ni dans les sources musulmanes ni dans les sources chinoises de l'époque, aucune indication directe ou indirecte qui nous fonderait à supposer l'existence de « canons musulmans » à feu à puissance renforcée. Dans les sources historiques chinoises qui concernent les « canons musulmans » 3 , l'expression fa-chi attire l'attention. Cette formule, comme nous l'avons remarqué, désignait habituellement dans les textes anciens, la mise en action de l'énergie de la perche de lancement dans les pierriers chinois. En conséquence, dans les « canons musulmans », il y avait visiblement aussi un levier de lancement, semblable à ceux en usage dans les pierriers des Sung. Un passage de l'œuvre de Cheng Ssu-hsiao, que Goodrich et Fêng Chia-sheng eurent peine à traduire 4 , devient clair si l'on a en vue la construction d'un pierrier à contrepoids, et il autorise à affirmer que le « canon musulman » était un modèle ambulant à contrepoids. 1. Fêng Chia-sheng, 1950, section « Qu'est-ce que les canons musulmans? », pp. 34-51. (Signalons une récente communication sur le thème des « canons musulmans » présentée par M. Skoljar à la session annuelle de Mai 1967 de l'Institut d'Études orientales de Leningrad. On en trouvera le résumé dans les Actes de la session, Pis'mennye pamjatniki i problemy istorii kul'tury narodov Vostoka (Sources écrites et problèmes d'histoire de la culture des peuples d'Orient), Léningrad, 1967, pp. 66-68. F.A.) 2. Poids des projectiles des « canons musulmans ». 3. Fêng Chia-sheng, op. cit., pp. 40-48. 4. Goodrich-Fêng, p. 119.
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Enfin, assurer que c'était des armes à feu seulement sur la foi du terme huo-p'ao, qu'on rencontre dans les textes qui s'y rapportent, est inconsistant. A notre avis, ce ne peut témoigner que de l'usage de grands pierriers à contrepoids employant, pour le lancement, des projectiles enflammés avec des mélanges de poudres. Les sources de l'époque Sung font connaître une foule de faits historiques permettant de juger de la grande variété de l'utilisation tactique de l'artillerie de jet. Ce qui est caractéristique, c'est que la disposition des pierriers sur les lignes de combat, les buts tactiques qui leur étaient assignés, l'aspect du tir et ses résultats présentent une grande similitude avec ceux des armes à feu aux époques ultérieures. Arrêtons-nous donc seulement à quelques questions essentielles de la tactique des pierriers. Les pierriers s'utilisaient principalement dans la guerre de places fortes. La distance relativement courte du tir nécessitait la disposition des pierriers à proximité immédiate de l'objectif à atteindre. Lors de l'attaque de la place forte, quelques dizaines de pierriers étaient disposés en groupes ou en ligne sur l'esplanade, face aux angles du mur fortifié, aux portes, aux tours de guet. Les défenseurs, de leur côté, installaient leurs pièces sur des plates-formes spéciales de la muraille (p'ao-t'ai), dans les tours surmontant les portes, aux coins de la muraille pour conduire un tir de flanc, etc. En 1127-1132, en défendant Tê-an, le commandant de la place Ch'en Kuei disposa ses canons au pied de la muraille, à l'intérieur de la forteresse, et conduisit le tir depuis cette position couverte avec l'aide d'observateurs au tir. Remarquons que dans l'œuvre de Ch'en Kua, qui attache une grande importance à l'artillerie de jet, se trouvent des préceptes détaillés sur la tactique de la catapulte dans la défense 1 . Les objectifs essentiels du tir lors de l'attaque étaient les ouvrages défensifs sur les murs fortifiés, l'armement parant à l'assaut et les rassemblements de forces vives de l'adversaire dans la place forte. Quant aux canons de la défense, ils détruisaient en premier lieu le matériel d'approche des attaquants, leur artillerie et ils anéantissaient les fantassins attaquant la muraille. Pour cela, l'emploi des divers projectiles enflammés était d'un grand effet. Le tir s'effectuait par salves avec pointage et concentration sur un but unique ; parfois assiégeants et assiégés menaient un duel d'artillerie. La durée et la puissance du tir étaient souvent très grandes : il se prolongeait parfois plusieurs jours sans interruption, causant de grandes destructions et anéantissant plusieurs milliers de personnes. Dans les sources, on trouve des dizaines de mentions de généraux en vue ou de membres de la famille impériale tombés victimes des tirs d'artillerie. 1. Shou-ch'eng-lu,
ch. 1 et 2.
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D'un grand intérêt pour notre sujet est le témoignage des chroniques chinoises locales selon lesquelles Môngke-khan mourut des suites d'une grave blessure causée par un boulet en 1259, alors qu'il assiégeait la place forte de Tiao-yii ch'eng Les dommages dus aux canons obligeaient les adversaires à recourir à diverses méthodes de défense contre les boulets de pierre et les projectiles enflammés. Assaillants et défenseurs utilisaient des rideaux et des écrans protecteurs faits de solides filets de corde ainsi que des palissades tressées (hu-p'i li-so) 2 . Les pierriers eux-mêmes étaient entourés sur trois côtés par des boucliers spéciaux en bois pour les protéger contre les coups des projectiles. Outre les batailles de siège, l'artillerie Sung trouva un large emploi dans la défense des camps, la protection des traversées de rivières, et comme moyen d'anéantissement des flottes fluviales et maritimes. Les vaisseaux étaient équipés de pierriers courts et légers (tuan-p'ao), ce qui permettait de mener le combat d'artillerie sur l'eau 3 en utilisant, le plus souvent, des projectiles enflammés 4. L'analyse de la tactique du combat avec l'emploi de l'artillerie avant les armes à feu montre que l'emploi tactique du pierrier dans la Chine des 10 e -13 e siècles ne s'est distingué en rien, dans ses traits généraux, des méthodes employées pour les armes de jet dans les autres région de l'Eurasie. E n Chine, l'artillerie antérieure aux armes à feu ne se signalait, peut-être, que par une plus large utilisation du pierrier et une efficacité plus grande de son action. Nous avons vu quelques problèmes essentiels relatifs à la construction, aux particularités tactiques et techniques, à l'emploi de l'artillerie de jet de l'époque Sung. L'utilisation des données nombreuses et variées des sources chinoises permet de caractériser assez bien le rôle de l'artillerie antérieure aux armes de jet dans les guerres qui ont eu lieu du 10 e au 13 e siècle sur le territoire de la Chine actuelle, la signification et la place qu'occupent les armes de jet chinoises dans l'histoire de l'armement. Le travail devrait, sans doute, être poursuivi dans cette direction, avant tout sur la base des données documentaires des matériaux historiques chinois. Leningrad, Novembre 1967.
1. Cf. Tiao-yii-ch'eng shih-shih k'ao-ch'a, pp. 56-61. Jusqu'à présent, on ne trouve ni dans les sources ni dans les études une opinion clairement exprimée sur les causes de la mort de Môngke-khan. L'utilisation des matériaux chinois jette la lumière sur cette question. 2. Moule retient à tort la possibilité d'un jeu de mots avec le nom de Qubilai. 3. SS, ch. 309. 4. YWL, ch. 41.
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CARACTÈRES
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CHINOIS
1. AUTEURS ET OUVRAGES (suivant la numérotation de la bibliographie des sources et des études en chinois et en japonais, supra p. 119). 1. Sources
2.
(voir aussi
pp.
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HISTOIRE DES SOULÈVEMENTS POPULAIRES
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JAKOVLEVLC
Université
de
SMOLIN
Leningrad
LA REVOLTE DE LA SOCIÉTÉ SECRÈTE DU MI-LË-CHIAO CONDUITE PAR WANG TSË (1047-1048) SOMMAIRE
Introduction.
145
1. Conditions et causes des soulèvements populaires au 11 e siècle. 2. Les révoltes de soldats. I.
II.
146 149
Les prémices de la révolte.
151
1. Rôle d u Mi-lê-chiao d a n s la révolte. 2. Position de Pei chou. 3. Préparation de la révolte.
152 154 155
Le 1. 2. 3.
156 156 158 160
soulèvement armé à Pei chou. Prise du pouvoir p a r les insurgés. Base sociale d u m o u v e m e n t . Opposition interne au m o u v e m e n t .
I I I . Les soulèvements IV. La 1. 2. 3.
DATES e
hors de Pei chou.
répression gouvernementale. A t t i t u d e des dirigeants. Opérations de répression militaire. Pacification et réformes.
PRINCIPALES
7 a. ch'ing-li (1047). X I e L . 28 e j. (j. wu-hsii — 17 décembre) : D é b u t d u soulèvement de W a n g Tsê à Pei chou. Proclamation de l ' É t a t insurgé d'An-yang.
163 164 165 166 167
J
tCho-chou (cho'hsien)
Pao-chou# (Ch'ing-yvan)
Shen-chou*' (Shen-/isrenj9
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TABLE DES MATIÈRES GÉNÉRALE* DE LA SÉRIE "HISTOIRE ET INSTITUTIONS" * Étienne Balazs (24 janvier 1905-29 novembre 1963). Jn
memoriam,
par P. Démiéville. * Abréviations. * Introduction à la série « Histoire et Institutions », par F. Aubin. * Avertissement. I.
Démographie An estimate of the total population of Sung-Chin China, par Ping-ti Ho.
II.
Histoire diplomatique 1. Treaties between Sung and Chin, par H. Franke. 2. Les guerres entre les Sung du Nord et le Hsi-Hsia, par E. I. Kycanov.
III.
Histoire militaire L'artillerie de jet à l'époque Sung, par S.A fikoljar.
IV.
Histoire des soulèvements populaires 1. La révolte de la société secrète du Mi-lê-chiao conduite par Wang Tsê (1047-1048), par G. Ja. Smolin. 2. Y a-t-il eu deux Sung Chiang?, par I. Miyazaki.
* Les articles constituant la matière du premier fascicule sont précédés d'un astérisque ; ceux du présent fascicule, de deux astérisques.
180
ÉTUDES
SONG / SUNG
STUDIES
V.
Figures eminentes 1. Historical precedent or accidental repetition? K'ou Chun in 1004 and Yü Ch'ien in 1449, par W. Franke. 2. Chu Hsi as an administrator, par C. Schirokauer.
VI.
Institutions 1. The Ministry of Ceremony, li-pu (transi, from Sung-shih, ch. 163), par W. Eichhorn. 2. The inauguration of tH-chii hsiieh-shih ssu (Education Intendants) during the Northern Sung dynasty, par T. Grimm.
VII.
Histoire économique 1. Une carte 'des centres commerciaux de la Chine à la fin du 11e siècle, par Ë. Balazs. 2. Le développement des transports fluviaux sous les Sung, par S. Aoyama.
VIII. Histoire urbaine Bibliographie sommaire des sources pouvant servir à l'étude de la vie urbaine à l'époque Sung, par E . Balazs. IX.
Un journal de route de Vêpoque Sung Le Lan-p,ei lu, journal de voyage de Fan Ch'eng-ta (1170). Texte établi, traduit et annoté par Dzo Ching-chuan.
X.
Instruments de travail pour l'histoire Sung 1. Généalogie des Empereurs Sung, par M. van der Loon. 2. Listes alphabétiques des nien-hao et des Empereurs A. Sung B. Liao C. Chin D. Hsi-Hsia (par P. Olbricht). 3. Tableaux de l'administration Sung, par E. A. Kracke .[).
ERRATUM ser. 1 n° 1 — 29, 1. 6 supprimer « lui aussi » 1. 7 lire « 62 ans » et non « 58 ans »
ACHEVÉ LE
16
D'IMPRIMER JUILLET
SUR LES
PRESSES
L'IMPRIMERIE A
ÉVREUX
1971 DE
HÉRISSEY (EURE)
N° d'imprimeur : 10191 Dépôt légal : 3 e trimestre 1971