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French Pages 592 [593] Year 2003
FRAGMENTS D'HISTORIENS GRECS AUTOUR DE DENYS D'HALICARNASSE
sous la direction de Sylvie Pittia
ÉCOLE FRANÇAISE DE ROME 2002
Fragments d'historiens grecs : autour de Denys d'Halicarnasse / sous la direction de Sylvie Pittia. Rome : &oie française de Rome, 2002.
(Collection de )'&oie française de Rome, ISSN 0223-5099; 298) ISBN 2-7283-0663-X 1. Dionysius, of Halicamassus - Criticism and interpretation. 2. Historians - Greece. 3. Rome - Historiography. 1. Pittia, Sylvie. Il. Series. CIP - Bibliotlreque de l'&ole française de Rome
© - &oie française de Rome - 2002
ISSN 0223-5099 ISBN 2-7283-0663-X
SCUOLA TIPOGRAFICA S. PIO X- VIA DEGU ETRUSCHI, 7-9 ROMA
SYLVIE PITI1A
INTRODUCTION
Ce livre résulte d'un séminaire consacré aux derniers livres des Antiquités romaines•. La rencontre était centrée sur D. H. mais elle fut plus largement tournée vers ceux des historiens grecs connus, pour partie au moins, à travers des fragments et plus généralement à un échange sur les spécificités de leur édition et de leur commentaire historique. Pendant ces débats, nous avions à la fois discuté des questions de méthode, soumis à la critique des hypothèses, confronté surtout des difficultés communes. Ce séminaire avait réuni des chercheurs qui, quels que soient les auteurs ou les périodes sur lesquels ils avaient travaillé, avaient au moins un point commun : ils éditaient, traduisaient ou commentaient des textes historiques en sortant du cadre disciplinaire étroit auquel ils sont réputés appartenir. S'il est commode de classer les uns ou les autres des participants sous l'étiquette «philologue• ou «historien•, les intervenants partageaient l'idée que les séparations étroites entre les disciplines doivent être récusées, convaincus que les éditions des œuvres historiques antiques ne peuvent plus guère être le travail d'un savant isolé, mais qu'elles nécessitent la collaboration de compétences croisées et la coopération de disciplines bien artificiellement opposées : la philologie et l'histoire. Dans le prolongement de ce séminaire, nous avons sollicité quelques spécialistes qui viennent élargir notre réflexion sur la forme historique fragmentaire : Maria Teresa Schettino et Dominique Lenfant ont accepté d'apporter leur contribution, étendant ainsi le cercle des auteurs antiques étudiés et le cadre de nos comparaisons. Pourquoi avions-nous choisi D. H.? Pourquoi spécifiquement les fragments des derniers livres? Il y avait une certaine actualité du sujet, liée à la publication, par un groupe de travail de l'Université d'Aix-Marseille 1, d'une édition et d'un commentaire historique des
Les fragments historiques de Denys d'Halicarnasse: des oies du Capitoleaux 1/éphantsde Pyrrhus, Séminaire d'histoire ancienne, École française de Rome, 1011novembre 2000. Les participants en étaient : D. Briquel, E. Caire, M. Casevitz, S. Collin Bouffier, P. Corbier, S. Crouzet, B. Flusin, V. Fromentin, X. Lafon, R. Mouren, É. Parmentier, S. Pittia et R. Robert. 1
Sylvie Pittia, Université d'Aix-Marseille 1.
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SYLVIE PITilA
livres 14-20 des Antiquités romaines 2• Ce livre est un exemple, parmi d'autres, de travail collectif, associant des spécialistes du monde grec et du monde romain, des historiens et des philologues. Une entreprise résolument interdisciplinaire comme celle que nous avions constituée depuis 1996 rencontrait assurément dans les fragments de D. H. un terrain favorable: travailler sur un historien de langue grecque qui ambitionnait de présenter à un public grec combien les Romains, par leur histoire, étaient des Grecs. L'exploration du fonds philologique ancien des grandes bibliothèques italiennes (Bibliothèque Vaticane, Biblioteca Angelica, Bibliothèque Ambrosienne, Bibliothèque Laurentienne) avait enrichi la préparation de ce volume d'une documentation nouvelle : il y avait matière à organiser un séminaire sur D. H. à Rome même, où nous avons pu, de surcroit, grâce à l'obligeance des responsables de la Biblioteca Angelica, comparer concrètement les premières grandes éditions des fragments dionysiens. Pourquoi les fragments de D. H.? Sur les vingt livres que comportaient les Antiquités romaines de D. H., la partie qui traite des origines se trouve être la mieux conservée et la· plus étudiée : les onze premiers livres se présentent sous une forme continue. À l'inverse, les livres qui portaient sur les périodes les plus récentes sont les plus mutilés. Ils ont longtemps paru offrir moins d'intérêt que ceux traitant des origines de Rome; ils avaient pour particularité de n'avoir jamais été édités ni traduits en français, de n'être connus qu'à l'état de fragments, pour une bonne part via des compilations byzantines. Or l'édition des fragments dionysiens appelle des ·méthodes assez différentes de celles que requiert le travail sur les premiers livres. Elle passe par une confrontation permanente avec les fragments des autres historiens grecs connus par le même type de tradition manuscrite et elle suppose, plus que ne le font les éditeurs des livres complets des A. R., un élargissement de l'enquête vers le monde byzantin. · Nous avions aussi sélectionné les derniers livres des A. R.. parce qu'ils couvraient la période dite de la République moyenne (en fait l'ensemble du IVe et le début du IIIe siècle avant J.-C.); ce choix restrictif donnait une cohérence à l'étude historique, inscrite entre les invasions gauloises et la conquête de l'Italie par Rome jusqu'aux len-
2 Denys d'Halicarnasse, Rome et la conquite de l'Italie aux W• et III• siècles (Antiquités romai1_1es,livres 14-20), texte grec, traduction et commentaire, S. Pittia et alii éd., Paris, 2002 (Fragments). Voir aussi les contributions historiques rassemblées sous le titre «Denys d'Halicarnasse historien de 11talie. Étude des fragments des livres 14-20• (Table ronde d'Aix~n-Provence, 28 avril 1999), dans Pallas, 53, 2000, p. 143-272.
INTR.ODUCTION
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demains de la prise de Tarente. D. H. s'an-êtait là où Polybe avait commencé. La partie conseivée de son œuvre se termine en 269, donc très peu de temps avant la première guerre Punique. Ainsi, le sous-titre donné à ce séminaire se trouve explicité : nous avions centré nos efforts sur la période comprise entre les oies du Capitole et les éléphants de Pyrrhus. Trop souvent méconnus ou mal utilisés, les fragments des derniers livres peuvent pourtant concourir avec profit au renouvellement de l'histoire des IVe et Ille siècles. Les articles publiés récemment dans Pallas (n° 53, 2000) tendent précisément à mesurer sur plusieurs thèmes la part relative de l'anachronisme et à réhabiliter en quelque sorte, la source dionysienne, dans laquelle il ne faut pas seulement voir une manifestation de la propagande augustéenne. Sans négliger cette dimension qui nous ramène à l'histoire des idées, les livres dionysiens constituent une source fiable pour la République moyenne et l'on ne saurait réduire l'histoire de ces périodes à la lecture qu'en donne Tite-Live. Mais notre projet était bel et bien d'étudier un certain type de texte historique, la forme fragmentaire, en insistant sur les rapports entre la philologie et l'histoire, en testant les zones frontières, là où l'enquête historique est aussi enquête philologique, là où chacune des deux vient à son tour selVir l'autre. Ce séminaire avait donc plusieurs objectifs qu'il est utile de retracer brièvement: réouvrir l'enquête sur l'histoire du texte dionysien, la constitution et la composition interne de ce corpus; éclairer cette étude et les choix qu'elle implique par des comparaisons avec les autres historiens grecs connus par la même tradition manuscrite; en dégager des conséquences au plan du commentaire historique. · - présenter l'histoire du texte dionysien, les conditions de sa transmission, de sa redécouverte, de sa publication : le corpus des A R. n'est pas clos, l'origine ou l'attribution de certains fragments font objet de débats. Revenir sur l'histoire du texte est un point de passage obligé pour vérifier la validité du classement traditionnel des fragments et voir comment insérer quelques ajouts empruntés par exemple aux citations des lexicographes. Notre travail avait abouti à des remises en cause sur l'ordre même des fragments. Dès lors sur quels fondements philologiques et historiques avançonsnous d'autres propositions? - ce travail sur l'établissement du corpus dionysien ne peut être entrepris sans perspective comparatiste. D'autres historiens grecs, Polybe, Diodore de Sicile, Nicolas de Damas, Appien ou Dion Cassius par exemple nous sont pour partie connus selon une tradition manuscrite comparable, où intelViennent des sélections multiples : celle opérée dès l'Antiquité, celle ajoutée par les compilateurs byzantins, celle des lexicographes aussi. Pour avoir une idée des modes de
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sélection, du caractère plus ou moins abrégé de la documentation parvenue, des conditions dans lesquelles la sélection thématique s'est opérée, nous ne pouvons que procéder par analogie. De surcroit, toute une série de travaux récents (dont ceux de G. W. Most ou G. Schepens) sont venus enrichir la bibliographie sur la forme fragmentaire historique. Dès lors, quel sort réserver aux excerpta dionysiens dans ce débat? - si le corpus est revu, voire enrichi, quelles sont les incidences sur le commentaire historique? La chronologie absolue mais aussi la chronologie relative, celle de D. H. par rapport à Tite-Live principalement, mais aussi Diodore de Sicile ou Appien, Plutarque ou Dion Cassius s'en trouvent reconsidérées. Certains épisodes liés aux invasions gauloises, les guerres samnites elles-mêmes (et la célèbre défaite des fourches Caudines), d'autres événements ponctuels comme la loi Pœtelia sur l'esclavage pour dettes, la révolte de la légion romaine à Rhégion, tous ces événements sont datés pour tout ou partie grâce aux fragments dionysiens et en fonction de l'ordre dans lequel ces textes sont édités. Dès lors si cet ordre peut être valablement remis en cause, la chronologie même de ces décennies en est reprécisée, tantôt confortée, tantôt infirmée. La dimension philologique de notre démarche avait des ambitions restreintes. Elle reposait sur l'idée qu'il était moins urgent d'établir la validité ponctuelle de telle ou telle leçon que de proposer des éclairages permettant d'utiliser de façon renouvelée la documentation historique que présentent les derniers livres des Antiquités romaines. À la lumière de notre propre expérience d'éditeur, nous ne faisons pas nôtre la définition étroite (et à notre sens contestable) de la philologie, dont trop d'historiens ont l'image et que quelques philologues contribuent à entretenir. L'historien qui travaille sur les textes conduit assurément son enquête philologique comme un préalable à la production du commentaire historique; cette démarche n'est pas une finalité en soi, non plus qu'une pure description. Elle ne saurait être séparée de l'histoire tout court, de la réception du texte, de sa recontextualisation, en un mot d'une histoire culturelle qui sache sortir des limites de l'Antiquité. Aussi avons-nous regroupé dans une première partie les articles qui éclairent l'histoire même du texte dionysien, la constitution du corpus, les étapes tumultueuses de son édition. Mais ces considérations demeurent liées à l'enquête historique sur la République romaine des IVe et IIIe siècles. Les contributions de la seconde section du volume sont consacrées aux épisodes historiques abordés par les derniers livres des A. R. et elles sont porteuses d'interprétations renouvelées. La diversité des sujets traités (la présentation du monde grec dans les A R.; D. H. et les Gaulois; la lec-
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INTRODUCTION
ture comparée des sources sur l'épisode central de la deuxième sam-
nite; les dimensions culturelles et esthétiques de la vie politique romaine; les portraits des grands acteurs de la vie civile et militaire; la désobéissance sans doute «manipulée,. de la légion romaine à Rhégion) reflète la variété des centres d'intérêt qui étaient ceux de l'œuvre et qui furent aussi ceux des excerpteurs. Enfin la troisième partie de ce volume s'inscrit dans une dimension comparatiste : les fragments des autres historiens grecs soulèvent des questions comparables quant à la fiabilité de leur témoignage, la constitution même de leur corpus, les confusions dont celui-ci a fait l'objet. Ces éclairages complémentaires attirent aussi notre attention sur les influences mutuelles que les historiens antiques exerçaient les uns sur les autres. Leur œuvre était inscrite dans une réflexion plus large sur l'historiographie; leurs débats, leurs désaccords, avaient rejailli sur l'écriture originelle des œuvres : qu'en reste-t-il après que les sélections byzantines ont opéré leur choix et transformé le matériau? Pour le mesurer, la connaissance des méthodes que suivaient les excerpteurs est indispensable. L'histoire des textes antiques gagne à fréquenter celle du monde byzantin, qui vient expliquer dans la transmission du texte ce qui releva non des hasards et des fractures, mais d'une conception originale de l'histoire universelle. Ce volume, s'il présente des résultats, contient aussi bien des questions, il ouvre des enquêtes, suggère quelques voies à explorer. En tout état de cause, il s'est voulu un moment de dialogue entre philologie et histoire, au confluent de deux disciplines que par raison autant que par affinité, nous ne pouvons dissocier. Qu'il nous soit permis, dans ce propos liminaire, de rappeler la conviction qui a accompagné notre travail. Sylvie PrrnA
AVERTISSEMENT
Denys d'Halicarnasse voit son nom abrégé en D. H. Les Antiquités romaines sont abrégées en A R. Toutes les dates, sauf mention contraire, s'entendent avant Jésus-Christ. Les abréviations des auteurs et des œuvres antiques sont empruntées au Greek-English Lexicon (E. G. Liddell-R. Scott-H. S. Jones, 19999) et à l'Oxford lAtin Dictionary (P. G. W. Glare et alii, 1968). Les abréviations des revues sont celles en usage dans l'Année philologique et celles des inscriptions sont empruntées à l'Année épigraphique. Les fragments dionysiens des livres 14-20 sont désignés par le numéro du livre suivi d'une lettre majuscule•. Deux tableaux de concordance (p. 7-8) donnent l'équivalence avec la numérotation de l'édition K. Jacoby (1905), à laquelle nous renvoyons par le numéro du livre suivi du numéro de fragment en chiffres arabes. ANRW: W. Haase-H.Temporini (éd.), Aufstieg und Niedergang der rlJmischen Welt, Berlin, 1972-. BAM : Biblioteca Ambrosiana, Milan. BA V : Biblioteca Apostolica Vaticana. BNN: Biblioteca Nazionale Vittorio Emmanuele Il, Naples. BSB : Bayerische Staatsbibliothek, Munich. FGrH: F. Jacoby, Die Fragmente der grieschiechen Historiker, Berlin, 19231958. FHG : C. Müller, Fragmenta Historicorum Grœcorum, 5 vol., Paris, 18411870. L1VR: E. M. Steinby, Lexicon topographicum urbis Romœ, 6 vol., Rome, 1993-2000. RE: A. Pauly-G. Wissowa (et al.), Real Encycloplidie der Klassischen Altertumwissenschaft, Berlin, 1894SVNC : A. Mai, Scriptorum ueterum noua col/ectio e uaticanis codicibus edita, 2, Rome, 1827.
Nous renvoyons à Denys d'Halicarnasse, Rome et la conquite de l'Italie aux IVv. siana car conseivés dans deux manuscrits de la Bibliothèque de Milan, le Q 13 sup. et l'A 80 sup. : il ne s'agit pas, comme pour les excerpta constantiniens, d'extraits thématiquement classés, mais d'un abrégé (épitomè) de l'ensemble des Antiquités Romaines Oivres 1 à 20), dont l'origine est très discutée 2• Enfin, s'ajoutent à
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Le livre 11 est mutilé sur la fin dans tous les manuscrits qui nous l'ont
transmis.
Voir sur ce point : Denys d'Halicarnasse, Antiquités Romaines tome /, Introduction gh,érak et livre /, éd. V. Fromentin, Paris, Belles Lettres, 1998, Notice du livre 1, p. 62-66. 2
Valérie Fromentin, Université de Bordeaux 3.
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VALÉRIEFROMENTIN
ces deux grands massifs les quelques notices de la Souda et de Stéphane de Byzance qui citent tel mot ou tel passage des Antiquités. Outre leur caractère hétérogène, ces divers témoignages présentent trois difficultés majeures. Tout d'abord, ils ne se recoupent entre eux que de façon exceptionnelle, ce qui voue pratiquement à l'échec toute tentative pour évaluer l'authenticité et la fidélité du texte qu'ils transmettent; ensuite, nous n'avons pas, pour aucun de ces fragments, d'indication sur la partie de l'œuvre dont il est extrait, sauf dans le cas des notices de Stéphane de Byzance qui mentionnent presque toujours le livre des A. R. d'où est tirée la citation; enfin, alors que dans les excerpta constantiniens les fragments sont séparés les uns des autres par un ott introductif, dans les excerpta Ambrosiana en revanche, ils se succèdent à pleine page et à pleine ligne, sans autre séparation qu'une ponctuation anarchique; c'est dire combien, dans ce cas, le repérage et le découpage de séquences signifiantes s'avèrent problématiques; c'est dire aussi, de façon plus générale, quel défi représentent pour un éditeur moderne - soumis à des exigences scientifiques rigoureuses - le regroupement et l'interclassement de ces différents excerpta pour reconstituer la partie perdue de l'histoire de Denys. Je ne prétends pas ici proposer des réponses définitives à ces questions difficiles; je voudrais seulement, en me plaçant dans la perspective qui est celle des organisateurs de ce séminaire, c'est-àdire l'élaboration d'une traduction commentée des livres 12 à 20 à partir d'une édition critique déjà existante, celle de K. Jacoby, m'interroger sur la fiabilité et la qualité du texte grec proposé par Jacoby. Pour cela, je commencerai par retracer l'histoire des découvertes et des publications successives dont l'édition Jacoby, très dépendante de celle de son prédécesseur A. Kiessling, constitue le point d'aboutissement; puis j'essaierai de mettre en évidence les choix, les faiblesses et les lacunes qui caractérisent cette édition, quelles que soient par ailleurs ses incontestables qualités. 1-
LES ÉDITIONS
DES LIVRES
12 A 20 DES A. R.
DE KlESSLING
ANTÉRIEURES
À CELLE
(1870)
A. Les manuscrits des excerpta historiques : brève histoire de leur découverte L'édition des fragments des livres perdus de Denys (12-20) est étroitement liée à la découverte et à la publication, à partir du XVJe siècle, de différents recueils d'excerpta d'historiens grecs. On distinguera ici cinq étapes majeures (voir tableau A donné en annexe).
LA TRADmON DES FRAGMENTS DES ANTIQUITÉS ROMAINES
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La première correspond à la publication, en 1582, des excerpta constantiniens 1tepi 1tpeal3euî>V (De l.egationibus) par Fulvio Orsini 3 d'après deux manuscrits que lui avait fournis l'évêque de Tarragone, Antonio Agustfn; ces deux manuscrits, qui sont aujourd'hui conservés, l'un au Vatican (Vaticanus grœcus 1418),l'autre à Naples (Neapopar le biais d'une copie litanus III B 15)4,remontent-probablement intermédiaire réalisée par le scribe André Darmarios 5- à un exemsiècles?) qui appartenait à Don Juan Paez de Casplaire (des xe.x11e tro; mais ce modèle ancien n'existe malheureusement plus car il brilla dans l'incendie de la bibliothèque de l'Escurial en 16716 • Je ne dirai rien de plus de cette édition d'Orsini ni de ses sources grecques, puisqu'elles doivent faire l'objet d'une communication spécifique dans le cadre de ce séminaire; je préciserai seulement que si Orsini amenda abondamment le texte des manuscrits envoyés par Agustfn car il le jugeait plein de fautes, il ne modifia pas en revanche, s'agissant de Denys d'Halicarnasse en tout cas, l'ordre dans lequel se succédaient les fragments répertoriés sous le nom de cet auteur dans le manuscrit concerné, le Vaticanus gr. 1418.La liste de ces fragments, dans l'ordre du manuscrit, est donnée dans le tableau B en annexe. La deuxième date importante est celle de la publication par Henri de Valois d'un autre recueil d'excerpta constantiniens, le 1tepl (De uirtutibus et uitiis), contenu dans un manuscipetflç 1eal1ea1Ciaç crit acheté à Chypre en 1627 par Nicolas Pereisc, et qui est aujourd'hui conservé à Tours : il s'agit du Turonensis C 980, datable des Xe-XIesiècles. Dans ce codex, comme dans les manuscrits du nepl 1tpeal3eili>vdont il a été question plus haut, les fragments sont classés par auteur, mais à l'intérieur de chaque auteur ils se succèdent à pleine page, sans que soit donnée la moindre indication sur le livre ou la partie de l'œuvre d'où ils sont tirés; le seul moyen de les séparer est le on qui sert d'introduction à chacun d'eux. L'editio princeps qu'en a donnée H. de Valois est une édition sélective, qui ne publie pas la totalité des fragments conservés par ce
3 Voici le titre complet de cette édition qui se présente d'abord comme une édition de fragments inédits de Polybe : Ex libris Polybii Megalopolitani selecta de legationibus et alia quœ sequenti pagina indicantur (... ) insunt prœter Polybiana excerpta ex Dionysio Halicarnasseo Diodoro Appiano Dione Cassio. 4 C'est à C. de Boor (Excerpta de legationibus, pars/, Excerpta de legationibus Romano,um ad gentes, Berlin, 1903, Prœfatio, p. XIII sq.) que l'on doit l'identification des manuscrits d'Orsini avec le Vaticanus gr. 1418 et le Neapolitanus III B
15.
Voir C. de Boor, Excerpta de legationibus, pars / ... , Prœfatio p. XIII et XV. •Voir P. de Nolhac, La Bibliothique de Fulvio Orsini, Paris, 1887, p. 47 sq. Voir Ch. Graux, Essai sur les origines du fonds grec de l'Escurial, Paris, 1880, p. 93 sq. 5
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VALÉUE FROMENTIN
codex, mais uniquement les textes encore inédits; par exemple, dans le cas des A. R., Henri de Valois néglige le premier des extraits cités par le manuscrit parce qu'il s'agit d'un passage du livre 8 (c. 61-62), connu par d'autres sources manuscrites; il ne commence qu'avec le second extrait (on Map1eoçCl)ouptoç... ), parce qu'il ne peut le ratta• cher à aucun des onze livres des A. R. conseivés et qu'il croit pouvoir le rapporter au livre 127• Par ailleurs, H. de Valois modifie l'ordre dans lequel les historiens grecs sont classés pour lui substituer l'ordo temporis, de sorte que Denys, qui occupe la onzième place dans le manuscrit (après Arrien et avant Polybe), se retrouve dans l'édition en quatrième position, après Polybe, Diodore et Nicolas de Damas. En revanche, H. de Valois se garde bien, pour chaque auteur, de toucher à l'ordre dans lequel les fragments - à lui attribués - se suc• cèdent 8 • On se reportera au tableau C, qui donne la liste des frag. ments de Denys dans l'ordre du manuscrit. La troisième date remarquable est celle de 1816,qui vit la puhli• cation par le Cardinal Angelo Mai de ce qu'on appelle les excerpta Ambrosiana. Comme je l'ai dit plus haut, ces excerpta n'appar• tiennent pas à la collection des extraits compilés sur l'ordre de Constantin Porphyrogénète; il s'agit d'une Épitomè des vingt livres des Antiquités Romaines, conseivée dans deux manuscrits de la hi• bliothèque ambrosienne de Milan, le Q 13 sup. et l'A 80 sup., le se• cond étant probablement une copie du premier. A. Mai était convaincu que cette Épitomè n'était autre que l'Épitomè des A. R. de Denys mentionnée par Photius et Stéphane de Byzance, mais c'est en fait peu probable 9 • En revanche, j'ai pu montrer, pour le livre 1 des Antiquités du moins, que l'auteur de cette Épitomè, qui tantôt ré• sume le texte en le réécrivant, tantôt le cite littéralement, mais obéit dans tous les cas à des principes de sélection, suit une source grecque dont on peut dire qu'elle est antérieure à la séparation des manuscrits de la tradition directe en deux branches, celle du manus• crit A des AR. (Chisianus R VIII 60) et celle du manuscrit B (Urbi• nas gr. 105), c'est•à.œre antérieure au JXc siècle; ce qui signifie que la rédaction de cette Épitomè est à peu près contemporaine de l'en• treprise de compilation de Constantin Porphyrogénète, même si rien ne permet, en l'état actuel de nos recherches, de prétendre qu'elle s'y rattache ou qu'elle en dérive. Il importe par ailleurs de souligner que dans l'A 80 sup., comme dans le Q. 13 sup., le texte est copié à pleine page, sans titre ni sous•titre, sans indication de livre; les extraits se «Hœc ad librum XII pertinere censui, quœ enim in exemplari nostro prœcedebant fragmenta, ea ad priores libros Dionysii spectabant, quœ quia in editis exstabant, consulta prœtermissi • (notes en fin de volume, p. 74). 7
• Sauf dans le cas de Dion Cassius. 9 Sur ces deux manuscrits, voir supra note 2.
LA TRADMON DES FRAGMENTSDES ANTIQUITIJ.SROMAINES
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succèdent - à l'intérieur d'une même ligne - sans autre séparation entre eux qu'un point en bas (ou en haut!), sans être introduits, comme c'est le cas pour les excerpta constantiniens, par O'tt. Le résultat est un texte en apparence monolithique et homogène, mais qui s'avère incohérent et incompréhensible quand on en fait une lecture cursive. Angelo Mai s'est livré sur ces excerpta à un travail en deux temps, marqué par deux éditions successives, l'un en 1816,l'autre en 1829. Je n'évoquerai pour l'instant que la première de ces deux éditions: il s'agit non pas d'une édition complète de l'Épitomè (qui couvre, je le rappelle, les livres 1 à 20), mais d'une édition des seuls fragments inédits, c'est-à-dire imputables aux livres non conservés des A. R. (12-20). Cette édition a le mérite - ou le défaut - de proposer un premier découpage du texte des manuscrits en séquences intelligibles, en fragments, numérotés de façon continue, le cardinal Mai se contentant de suivre l'ordre du texte dans les manuscrits, sans jamais le modifier. Je serai beaucoup plus rapide concernant l'étape suivante, la quatrième, à savoir la découverte et la publication par C. Müller en 1847 des excerpta 1tepi 1toÀ.1op1c:1éi'>v conservés dans un manuscrit du mont Athos (d'où le sigle Ath. pour le désigner, dans les éditions de Kiessling et de Jacoby); il existe un apographe de ce manuscrit, du XIX., siècle, de la main du Grec Mynas, qui se trouve conservé à la Bibliothèque nationale de France sous la cote Parisinus grœcus 485. J'ai consulté ce manuscrit qui contient, outre Denys, des fragments de Polyen, Dexippe, Polybe et Eusèbe; il comporte un détail remarquable: le titre qui figure en tête des fragments de Denys (folio 1•) indique qu'il s'agit d'extraits tirés de la deuxième décade (P) et du livre 20 (1e')des A. R. 10 C'est encore à C. Müller que l'on doit, semble-t-il, la première édition, en 1848, dans le tome II de ses Fragmenta Historicorum Grœcorum, d'une quatrième catégorie d'excerpta, appartenant eux aussi à la compilation constantinienne, le 1tepl è1t1Jiou).ibv(De insidiis ), d'après un manuscrit de l'Escurial, le n I 11(sigle Scor. des éditions Kiessling et Jacoby). Mais comme une autre édition des mêmes extraits tirés du même manuscrit fut donnée presque simultanément la même année par C. Feder, à Darmstadt, on ne sait exactement à qui des deux, Müller ou Feder, attribuer la primeur de la découverte 11• Quoi qu'il en soit, le codex n I 11de l'Escurial offre les mêmes particularités de présentation que les autres manuscrits 10
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IouÂ.1tl1Ciou. Sur ce point voir C. de Boor, Excerpta de insidiis, Berlin, 1905, Prœfatio, p. VII sq. 11
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contenant les autres recueils d'excerpta constantiniens: classement par auteur, écriture à pleine page, introduction de chaque fragment par on.Il comporte par ailleurs une interpolation - signalée du reste par les premiers éditeurs - qui s'explique probablement par un déplacement de folio dans son modèle : un passage du livre 15 de Polybe (fr. 25 a = µ&Tà6è Tp&tç,; 't&'t'tapaç... 't6't&6è 'tibv... ) se trouve inséré12au beau milieu d'un extrait de Denys (fragment 1 du livre 12, p. 212, 1. 12 éd. Jacoby). On peut se reporter au tableau D qui donne la liste de ces excerpta De insidiis, suivant l'ordre qui figure dans le manuscrit, ordre que Müller et Feder ont du reste respecté. B. Incidence de ces découvertes sur les éditions des Antiquités romaines: Au fur et à mesure qu'ils furent découverts et publiés, ces divers excerpta, Constantiniana et Ambrosiana, furent intégrés aux éditions successives des Antiquités romaines. On peut à cet égard distinguer trois grands moments. Dans un premier temps, tant que seuls furent connus les excerpta De legationibus, les fragments correspondant aux livres 12 à 20 des A. R. furent reproduits, tels qu'il figuraient dans l'editio princeps d'Orsini, à la suite des livres des A. R. conservés intégralement. C'est ainsi que F. Sylburg, dans son édition des A. R. de 1586, donna en annexe les excerpta De legationibus dans la recension de Fulvio Orsini, mais accompagnés d'une nouvelle traduction latine dont il était lui-même l'auteur. De même, l'un des grands traducteurs des A. R. en latin, Émile Portus 13, publia en 1592, en complément à sa traduction des livres 1 à 11, pas moins de trois traductions latines des excerpta d'Orsini : celle de Sylburg, celle d'Henri Estienne, le fils de Robert, et la sienne propre. Puis, dans un deuxième temps, à partir du moment où s'ajoutèrent aux excerpta Ursiniana les excerpta Valesiana, la nécessité d'un interclassement de ces différents extraits se fit sentir. C'est John Hudson, dans son édition des A. R. de 1704 (Oxford), qui s'y risqua le premier, en proposant le classement que j'ai fait figurer dans le tableau E en annexe. Mais c'est surtout A. Mai, en 1829, dans le cadre d'une édition complète des A. R. en 4 volumes, qui fit faire à l'édition des fragments des livres perdus de Denys un grand bond en avant, puisque non seulement il rassembla et classa les uns par rapport aux autres suivant un ordre chronologique tous les excerpta alors connus ( Ursiniana, Valesiana et Ambrosiana), mais aussi les répartit entre les Ff. 188v,1. 15-190-,1. 7. Émile Portus se fonde (pour les livres 1 à 11) sur le texte grec de l'editio princeps de Robert Estienne de 1546-1547. 12
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livres 12 à 20. On n'a donc plus, comme dans la première édition de 1816, une numérotation continue des seuls fragments ambrosiens, sans séparation entre les différents livres des A. R., mais un classement par livre de tous les fragments, avec une numérotation interne à chaque livre. Si l'on se reporte au tableau F qui reproduit le classement de Mai, on mesure d'un seul coup d' œil l'importance considérable, sur le plan quantitatif, des excerpta Ambrosiana : à eux seuls ils fournissent plus de texte que tous les autres excerpta réunis; d'autre part, contrairement aux excerpta constantiniens thématiques, qui sélectionnent ici et là des morceaux souvent chronologiquement très éloignés les uns des autres, les excerpta Ambrosiana, parce qu'ils couvrent l'ensemble des livres perdus, permettent de reconstituer une trame événementielle, et rendent théoriquement possible un interclassement de tous les fragments conseivés. On comprend mieux dès lors l'enthousiasme qui s'empara de leur inventeur, le cardinal Mai, et la fierté que lui inspirait sa découverte! II -
LES ÉDITIONS
DE KlESSLING
ET DE JACOBY
A. Rapports entre les éditions de Mai, Kiessling et Jacoby J'en viens maintenant aux deux éditions les plus récentes des A. R., celle d'Adolph Kiessling (1860-70) et celle de Karl Jacoby (1885-1905), parues toutes les deux dans la Bibliotheca Teubneriana. Alors que, pour les livres 1 à 11, Jacoby cherche à se démarquer de Kiessling notamment en se fondant sur une nouvelle collation des deux manuscrits principaux (A et B), pour les livres 12 à 20, en revanche, on ne constate que de très faibles différences entre le volume 4 de son édition, paru en 1905, et le volume 4 de celle de son prédécesseur, paru en 1870. L'écart principal résulte du fait que Jacoby tient compte, pour les excerpta De legationibus de la toute récente édition (1903) due à C. de Boor, et qui repose sur la collation de nouveaux témoins : pour les fragments de Denys, de Boor a utilisé, outre le Vaticanus gr. 1418 de F. Orsini, cinq autres manuscrits (le Scorialensis R III 14, le Vaticanus grœcus 1418, le Bruxellensis 11301-16,le Vaticanus Palatinus grœcus 413 et le Monacensis 267) qui, s'ils ne révèlent pas de nouveaux extraits, permettent d'établir un texte nettement supérieur à la recension d'Orsini14 • Mais le problème des excerpta De legationibus mis à part, l'édition de Jacoby ne constitue qu'une reprise de celle de Kiessling. C'est donc cette dernière qu'il nous faut examiner maintenant, pour voir en quoi elle innove par rapport aux précédentes et en particulier par rapport à celle de Mai de 1829. 14
Voir supra note 4.
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VAŒRIE FROMENTIN
L'innovation la plus facilement repérable réside dans le fait que Kiessling regroupe généralement dans un même fragment plusieurs fragments consécutifs de Mai; je dis «la plus facilement repérable» parce que Kiessling donne systématiquement entre parenthèses la numérotation de Mai, à côté de la sienne. On peut donc aisément comparer les deux et s'apercevoir par là même que le nouveau découpage des fragments dtl à Kiessling a au moins un avantage : celui d'éviter un trop grand émiettement de la matière. Mais la différence essentielle entre Mai et Kiessling ne devient vraiment perceptible que si l'on distingue deux grands massifs, les livres 12 à 15 d'une part, et les livres 16 à 20 d'autre part, et si l'on se reporte au tableau F, dans lequel je donne le classement de Mai avec, pour chaque fragment, le numéro correspondant dans l'édition Kiessling-Jacoby (sigle KJ). On voit d'abord que, pour les livres 12 à 20, Kiessling reproduit l'interclassement des fragments élaboré par Mai et adopte la même répartition de ces fragments entre les différents livres des A. R., et cela en dépit du fait qu'il a ajouté de nouveaux fragments par rapport à Mai, en insérant - au sein du livre 12 et du livre 15 - les extraits du nepi èmJ3ouÀil>v qui n'étaient pas connus de Mai, puisque, comme nous l'avons vu, ils ne furent découverts qu'en 1848 par Müller. Pour les livres 16 à 20 au contraire, Kiessling se démarque de son prédécesseur : il rejette une partie des fragments que Mai rapportait au livre 16 dans les livres 17 et 18 et se refuse par ailleurs à distinguer entre ces deux derniers livres; quant aux fragments que Mai attribuait à ces mêmes livres 17 et 18, Kiessling les déplace dans le livre 19; enfin, les fragments du livre 19 dans l'édition Mai servent chez Kiessling à reconstituer ce qui reste du livre 20. Ce déplacement se justifiait à yeux de Kiessling par plusieurs arguments qu'il ne m'incombe pas d'exposer ici. Mais il en est un, au moins, qui relève de la tradition manuscrite et que j'ai déjà évoqué; en effet, dans le Pari.sinus gr. 485, qui donne les fragments du nepl 1toÀ.1op1C1c:i>v (sigle Ath.), inconnu de Mai et découvert par Müller, le titre qui précède ces fragments les rattache tous explicitement au livre 20 en tant qu'ils concernent «Pyrrhus et les consuls Publius Decius et Publius Sulpicius» 15• C'est une des raisons pour lesquelles Kiessling a cru bon de regrouper dans le livre 20 non seulement tous les fragments du nepl noÀ.1op1C1c:i>v, mais aussi les fragments du nepi èmJ3ouÀ.c:i>v mentionnant ces trois personnages, et les excerpta Ambrosiana et Valesiana relatifs à la guerre de Pyrrhus contre Rome.
is Cf. supra note 10 et l'édition Kiessling, vol. 4, p. 251 (= éd. Jacoby, vol. 4, p. 313) qui reproduit ce titre partiellement.
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B. Fiabilité de l'édition Kiessling-Jacoby Cela étant posé, quelle valeur, quelle fiabilité pouvons-nous accorder à l'édition Kiessling-Jacoby, pour notre connaissance des livres 12 à 20? Je n'envisage pas ici le problème du classement des · fragments ni celui de leur répartition entre les différents livres perdus des A. R., mais celui de l'établissement du texte de chacun des fragments. Il s'avère à cet égard que cette édition présente trois faiblesses majeures: 1. Pour les excerpta Ambrosiana, l'édition de Kiessling repose sur une nouvelle collation du manuscrit Q 13 sup, ce qui lui permet d'éliminer un bon nombre des erreurs de lecture faites par Mai. Mais, à l'inverse, Kiessling a aussi adopté une grande partie des multiples corrections orthographiques et syntaxiques proposées par Struve à l'édition de Mai16 • Ces corrections aboutissent à une normalisation de la langue des excerpta Ambrosiana, destinée à la rendre le plus conforme possible au grec atticisant de Denys. Cette attitude est à mon avis très dommageable car elle présuppose que les excerpta Ambrosiana seraient une sorte de centon de citations littérales des A R.; or, il n'en est rien; en effet quand on compare, d'une part, pour les livres conservés des A. R., le texte des excerpta Ambrosiana avec celui transmis par la tradition directe, et quand on confronte d'autre part, pour les livres perdus, la version des excerpta Ambrosiana avec la version des excerpta constantiniens, dans les rares cas où elles sont superposables 17, on constate que ces excerpta Ambrosiana résultent en fait, le plus souvent, d'un véritable travail de réécriture par abrègement, même si l'on y trouve aussi, incidemment, des citations littérales; les excerpta constantiniens, quant à eux, procèdent d'une sélection, mais citent fidèlement le texte original". 2. Cette remarque m'amène à la suivante, qui concerne précisément la nature hétérogène des excerpta des livres 12 à 20. L'édition Kiessling, en mettant sur le même plan les excerpta constantiniens et les excerpta Ambrosiana, autorise du même coup des analyses communes et globales de ces fragments, portant sur tous les aspects qui touchent à la langue et au style. Or il me semble que cet amalgame, possible et probablement nécessaire dans le cadre d'une étude purement historique (chronologique, événementielle) de ces fragments, peut s'avérer dangereux quand il s'agit de solliciter ces mêmes fragments à propos de problèmes idéologiques et de questions de vocabulaire ou de style. Voir C. L. Struve, Opuscula selecta, vol. 1. Leipzig, 1854, p. 162 sq. Par ex. en A R. 20.5.3 (= p. 324, l. 18 sq. de l'édition Jacoby). 11 Comme on peut le voir notamment avec le fragment des c. 61-62 du livre 8, conservé à la fois par la tradition manuscrite directe des A R. et par les excerpta Valesiana (cf. éd. Büttner-Wobst citée infra, pars Il, p. 73 sq.). 16
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VALÉRIEFROMENTIN
3. Enfin, et c'est là à mes yeux le point le plus important, les éditions de Kiessling et de Jacoby ont été publiées avant la parution de la magistrale édition en 2 volumes des excerpta De uirtutibus et uitiis par Büttner-Wobst (1906-1910). Or cette édition, qui repose sur une nouvelle collation du manuscrit grec Turonensis C 980, a le grand mérite de débarrasser la vulgate d'une grande partie des corrections et des conjectures qui s'étaient multipliées à son endroit depuis l'édition de Henri de Valois. D'autre part, cette édition s'appuie aussi sur une collation des manuscrits de la Souda, rendue nécessaire par le fait que le témoignage de cette dernière se superpose parlois à celui des excerpta Valesiana 19• Il me semble donc que, pour ces excerpta au moins, le travail de traduction que l'équipe animée par Sylvie Pittia se propose de publier ne devrait pas se fonder aveuglément sur le texte de l'édition Kiessling-Jacoby, mais tenir compte aussi des progrès accomplis par l'édition Büttner-Wobst, et en particulier de son apparat critique, qui distingue soigneusement les leçons des différents témoins et les conjectures érudites. Ces quelques remarques sur la tradition imprimée et manuscrite des fragments des livres 12-20 des A. R. sont évidemment ellesmêmes très fragmentaires car je n'ai de cette question qu'une connaissance imparlaite. Cependant, les recherches que j'ai entreprises sur les manuscrits des fragments de Denys me laissent penser que nous sommes loin de connaitre toutes les ressources actuellement disponibles dans les bibliothèques d'Europe : on trouve plusieurs fragmenta historica d'auteurs connus ou des extraits adespotes dans des manuscrits de miscellanea, à Paris ou à la Vaticane notamment; certains se rattachent à la tradition constantinienne, d'autres pas; j'en ai pour ma part récolté quelques-uns, qu'il me faut identifier avec certitude, avant de pouvoir éventuellement les verser au dossier complexe et abondant que vous avez ouvert. Valérie
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Voir par ex. éd. Jacoby 16.4 (p. 280) et 17-18.4 (p. 286).
FROMENTIN
DOCUMENTS
Tableau A 1546-1547 (R. Estienne) : editio princeps des A. R. (livres 1-11). 1582 (F. Orsini) : editio princeps des excerpta De legationibus. 1586 (F. Sylburg) : édition des livres 1 à 11 des A. R., complétés par les excerpta De legationibus (d'après l'édition d'Orsini). Traduction latine des excerpta par F. Sylburg. 1592 (É. Portus) : Traduction latine des A. R. (1-11) par Portus et triple traduction latine des excerpta De legationibus par F. Sylburg, par H. Estienne et par É. Portus. 1634 (H. de Valois) : editio princeps des excerpta De uirtutibus et uitiis, avec traduction latine de l'éditeur. 1704 (J. Hudson) : édition des A. R. (livres 1-11) et des excerpta De legationibus (d'après l'édition d'Orsini) et De uirtutibus et uitiis (d'après l'édition de H. de Valois). Première tentative d'interclassement des fragments. 1816 (A. Mai): editio princeps des excerpta Ambrosiana. 1829 (A. Mai) : édition complète des 11 premiers livres des A. R., accompagnés des extraits (Vrsiniana, Valesiana et Ambrosiana) des livres 12 à 20, classés chronologiquement et distribués par livres. 1847 (C. Müller) : editio princeps des excerpta tttpi ttOÀ.lOpKlli>v. 1848 (C. Müller) : editio princeps des excerpta tttpi tmj3ouÀ.li>v (FHG, t. 2) 1860-70 (A. Kiessling) : édition des livres 1-20 des A. R. (livres 10-20, vol. 4, 1870). Utilise tous les excerpta connus; nouvel interclassement; nouvelle répartition entre les livres. 1885-1905 (K. Jacoby) : édition des livres 1-20 des A. R. (livres 10-20, vol. 4, 1905). 1903 (C. de Boor): édition complète des excerpta De legationibus Romanorum
ad gentes.
1905 (C. de Boor): édition complète des excerpta De insidiis. 1906-10 (Th. Büttner-Wobst): édition complète des excerpta De uirtutibus et uitiis (2 vol.).
Tableau B: excerpta De legationibus (dans l'ordre du Vat. gr. 1418 de F. Orsini); KJ = édition Kiessling et édition Jacoby.
= ordre Fr. Fr. Fr. Fr. Fr.
1 ciUà Kai 6l6n toi>ç cp{À.ouç ... tl3ou)...:691i(= KJ XV, V et VI). 2 6tl µa86vttç o( "Pmµatol ... IauV\tucli>v6pmv (= KJ XV, VII, VIII, IX). 3 6tl 6 IaUV\'tllCOÇ ... ICUtt-ypacpovto(= KJ XVU/XVIll, I, II, III). 4 6n IlOvàçtouvtcov (= KJ XX, IX, X, XI, XII, §1-2).
Tableau D : ordre des excerpta De insidiis dans le Scorial.ensis O I 11 (= éd. Müller).
Fr. Fr. Fr. Fr.
1 6n À.tµoOKatà tT}V... t'l''lv 1eai Cl>st6T1vaicov ... 6toç 1Cattat'106v Ambr. (= KJ XII, V) Fr. 3 6sutspov Ûfl:atsuovtoç ... a{nov Ambr. (= KJ XII, VI) Fr. 4 oùK t661Csl ... aùtotç ùn:apxoumv Ambr. (= KJ XII, VI) Fr. 5 ci>c; fµaOs ... KataÀ.a~taOat Ambr. (= KJ XII, VI) Fr. 6 'Ayp{n:n:aç M6V\lVlOÇ... tK toO 6T1µooiou Ambr. (= KJ XII, VI) Fr. 7 fCJJtsu6s tàv n:6À.sµov .. , àn:oOavstv Ambr. (= KJ XII, VII) Fr. 8 tv 'Pci>µnxstµli>voç ... q,umç Ambr. (= KJ XII, VIII). Fr. 9 toptàç ~yov ... ùxo6sx6µsvot Ambr. (= KJ XII, IX) Fr. 10 n:siacov 6t ... 6\à tàç µtOaç Ambr. (= KJ XII, IX) Fr. 11 Oùtsvtavoùç ... t!;aimov Ambr. (= KJ XII, X) Fr. 12 toOto µaOovtsç ... Oson:p6n:ouçAmbr. (= KJ XII, X) Fr. 13 tv 6t t'i\ µsta!;ù ... àn:t'ltt Ambr. (= KJ XII, XI)
LA TRADmON DES FRAGMENTS DES ANTIQUJT~ ROMAINES
Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr.
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14 t116" tçflc; ... atpat01t&6ovAmbr. (= KJ XII, XI) 15 toOtov tàv 4v6pa ... &ipt11etvatAmbr. (= KJ XII, XII) 16 tv totaut11 6' àµ11xavi1J... X&tpot&xvuc; Ambr. (= KJ XII, XII) 17·cbç6t taut· f\1eoooav... à1topal.&tt&Ambr. (= KJ XII, XIII) 18 µ&tà 6t Ppaxi>... tautouç Ambr. (= KJ XII, XIII) 19 6 &t 6t1etat(l)pKaµtUoç ... wx11c;Ambr. (= KJ XII, XIV) 20 f1t&tt"tv8uµ118&\ç... µ&tpt0>t«t11v Ambr. (= KJ XII, XIV). 21 ~v 6t Oùt&vtav«>v... 1epatiat(l)VAmbr. (= KJ XII, XV) 22 Aivdav Uyoucn ... 6tat11p&tvAmbr. (= KJ XII, XVI) 23 t1r6µ&voç6t totc; ... yevta8at Ambr. (= KJ XII, XVI) Livre 13
Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr. Fr.
1 Kaµillou ri)v ... 1tpo&oa{açAmbr. (= KJ XIII, 1) 2 6 6t Kaµtlloç ... ri)v 1t6Â.tvAmbr. (= KJ XIII, II) 3 6 aùtoç Kaµtlloç ... T\KOOOav Ambr. (= KJ XIII, m) 4 tv 6t tfl àPXfl ... oott(l)v Ambr. (= KJ XIII, IV) 5 µet· où 1toÂ.ù... tflc; 1t6Â.&roç Ambr. (= KJ XIII, V) 6 y&voµ&VOÇ 6t ... cbx,&tO Ambr. ( = KJ XIII, V) 7 &JtTlKOooav 6t aùtoO ... Katacpuy&tv Ambr. ( = KJ XIII, VI) 8 ù1totUXèov·6t... 1eattcrcpaç&v Ambr. (= KJ XIII, VI) 9 ttt 6' ouv ... tp«ff(l)vtat Ambr. (= KJ XIII, VII) 10 f\6116t t6>v,tpcot(l)V... tv&ottpcp Ambr. (= KJ XIII, VII) 11 tv8a6& ne; ... tpocpT)V Ambr. (= KJ XIII, VIII) 12 xepi 6t t6>v... 1t6Â.tvAmbr. (= KJ XIII, VIII) 13 t1td 6t tà 6p1eta ... ci>çtcpaµ&vAmbr. (= KJ XIII, IX) 14 l'i 6t aida ... xapitaç Ambr. (= KJ XIII, X) 15 OUtouyo0v ... cruv aüt(fl Ambr. (= KJ XVI, I) 4 tv to0t6 as ... nµai Ambr. (= KJ XVI, II) 5 cptps 611... axsipyovtai Ambr. (= KJ XVI, II) 6 6i' 11µtpaç µèv ... d6oi>ç Ambr. (= KJ XVI, III) 7 totç 6è 1eatà ... VS(J)già il Stobœo in foglio• : Fulvio Orsini à Piero Vettori, Rome, 3 février 1580, éd. P. de Nolhac, Prero Vettori et Carlo Sigonio ... , p. 36-37. n «( ... )mail male èche le vie sono tanto pericolose et lunghe da mandare simili volumi, che io non posso dire a V. S. quando siamo per haverlo, se bene il Plantino lo sollecita, et son certo che lo stamparà quanto prima• : Fulvio Orsini à Piero Vettori, Rome, 3 février 1580, éd. P. de Nolhac, Prero Vettori et Carlo Sigonio ... , p. 36-37.
LA RED~COUVERTE DES FRAGMENTSDE DENYS
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en réalité n'avait pas encore envoyé le manuscrit à Plantin, qui était en train d'éditer ses notes sur Cicéron. Il cherchait le moyen de trouver une route sOre pour le lui faire parvenir 78 • Le 25 février, le livre avait été envoyé 79• Bien entendu, Plantin, ayant, disait-il, reçu l'ordre d'imprimer incontinent «ce fragment de Polybe» reçu d'Orsini, avait aussi envoyé un essai d'impression au cardinal de Granvelle, en lui demandant son avis sur les caractères et la forme 80 • En mai 1581, Granvelle apprit la mort de Plantin 81; la nouvelle était fausse. Mais aussitôt il s'informa auprès des héritiers, pour éviter que les deux livres en cours d'Orsini, Cicéron et Polybe, ne se perdissent. Craignant que l'impression ne fOt arrêtée, il chercha à se faire envoyer tout ce qui avait déjà été fait 82• Il apprit que Plantin n'était pas mort, tant mieux! mais début juin, Plantin se préparait seulement à imprimer ce livre 83• En juillet, Orsini pensait que l'édition était terminée 84 • Les «fragmenta Polybiis Dionis etc. eaque Grœce cum notis Fuluii Vrsini • étaient finalement en cours d'impression en septembre 158185, alors qu'Orsini pressait encore Plantin de finir l'ouvrage 86 • Pourquoi encore un an s'était-il passé depuis le premier essai? Plantin, qui soignait malgré tout beaucoup Orsini, lui écrivit pour le lui expliquer: tout le monde dans l'atelier, à commencer par lui-même, avait été très malade, et l'était d'ailleurs encore. Ce qui
n «Fra tanto and.ara vedendo se mi si presentasse occasione di mandarli il Polybio sicuramente• : Fulvio Orsini à Piero Vettori, Rome, 3 février 1580, éd. P. de Nolhac, Piero Vettori et Carlo Sigonio ... , p. 36-37. 79 Fulvio Orsini à Piero Vettori, Rome, 26 février 1580, éd. P. de Nolhac, Piero Vettori et Carlo Sigonio ... , p. 38: «Ho mandata il Polybio in Anversa». 80 Christophe Plantin à Antoine de Granvelle, 12 décembre 1579, Archives plantiniennes, X, f. 11, éd. J. Denucé, Correspondance de Christophe Plantin, 6, Anvers, De Nederlandsche Boekhandel, 1916 (Uitgaven der Antwerpsche Bibliophilen, 31), n° 853, p. 118-119. 11 Antoine de Granvelle à Fulvio Orsini, Madrid, 17 mai 1581, BAV, Vat. lat. 4104, f. 197. ■.z Antoine de Granvelle à Fulvio Orsini, Madrid, 13 juin et 12 juillet 1581, éd. M. Van Ourme, Suppliment à la correspondance de Christophe Plantin, Anvers, De Nederlandsche Boekhandel, 1955, n° 160 et 161; 7 octobre 1581, BAV, Vat. lat. 4104, f. 191. 13 Fulvio Orsini à Gianvincenzo Pinelli, Rome, 12 ao0t 1581, BAM, Ambr. D. 423 inf. (cit. P. de Nolhac, Piero Vettori et Carlo Sigonio ... , p. 49 n. 2). 14 Fulvio Orsini à Antonio Agustfn, Rome, 24 juillet 1581, éd. J. P. Wickersham Crawford, Inedited letters of Fulvio Orsini..., p. 589. 15 Christophe Plantin à Calvete Stella, 12 septembre 1581, Archives plantiniennes, X, f. 32v, éd. J. Denucé, Correspondance de Christophe Plantin ... , 6, n° 941, p. 294-296 (295). "Antoine de Granvelle à Fulvio Orsini, Madrid, 27 sept. 1581, éd. M. Van Dwme, Supplément à la Correspondance de Christophe Plantin ... , n° 163. 4
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RAP~LE
MOUREN
fait que Plantin, qui espérait finir ce livre pour la foire d'automne, le renvoyait maintenant à la prochaine, gardant toujours l'idée de finir ce livre au plus vite 87 • Il fit même écrire au cardinal pour expliquer son retard 88 • Il envoya en décembre huit feuilles, puis treize autres. Il donna même à Orsini le nom du typographe qui avait composé le texte: il s'agissait du fils d'un ancien typographe réputé pour son travail sur les auteurs anciens 89 • Le 14 janvier 1582, Granvelle se réjouissait d'apprendre que l'édition était presque terminée. Il s'apprêtait à demander un exemplaire à Plantin, et promettait à Orsini de lui faire connaître rapidement ses instructions concernant l'épître dédicatoire, qui lui était adressée90.Orsini data son épître dédicatoire du 20 décembre 1581 : il n'avait donc pas trop tardé à l'écrire après avoir reçu les premiers feuillets. Le 21 mars 1582, Granvelle informait Orsini qu'il avait reçu de Paris «quatre ou cinq cahiers de ce que [Plantin] a déjà imprimé des fragments de Polybe». Plantin demandait encore l'épître dédicatoire91. Une fois le livre finalement édité, il ne restait plus qu'à le confier aux aléas de la route : la balle de librairie partit le teravril 1582 et arriva à Rome au milieu du mois de juillet 92. Agustfn accusa réception du livre en Espagne le 12 janvier 158393. Orsini ne rompit pas les ponts avec Plantin, qui l'avait malgré tout bien servi. Il publia chez lui en 1595 les fragments des historiens romains, accompagnés de ses commentaires 94 • Christophe Plantin à Fulvio Orsini, Archives plantiniennes, X, fo 32v, éd. J. Denucé, Correspondance de Christophe Plantin ... , 6, n° 942 p. 296-297. 99 Christophe Plantin à Isuardo Capello, 1• novembre 1581, Archives plantiniennes, X, f. 36v, éd. J. Denucé, Correspondance de Christophe Plantin, 1, Anvers, De Nederlandsche Boekhandel, 1918 (Uitgaven der Antwerpsche Bibliophilen, 32), n° 956 p. 1-2. 19 Christophe Plantin à Fulvio Orsini, non datée (17-19 décembre 1581), Archives plantiniennes, X, f. 40v, éd. J. Denucé, Correspondance de Christophe Plantin ... , 1, n° 966, p. 19. 90 Antoine de Granvelle à Fulvio Orsini, Madrid, 14 janvier 1582, BAV, Vat. lat. 4104, f. 92. 91 Antoine de Granvelle à Fulvio Orsini, Madrid, 21 mars 1582, BAV, Vat. lat. 4104, f. 190. 92 P. de Nolhac, La bibliothèque de Fulvio Orsini..., p. 47 n. 3, d'après deux lettres d'Orsini à Pinelli, Rome, 13 avril et 5 mai 1582, BAM, Ambr. D. 423 inf. Le 19 mai, dans une lettre écrite semble-t-il en plusieurs fois, Granvelle indiquait à Orsini qu'il avait reçu encore des feuillets, que Plantin réclamait encore l'épître, puis disait que celle-ci avait été imprimée et contrôlée par lui : Antoine de Granvelle à Fulvio Orsini, Madrid, 19 mai 1582, BAV, Vat. lat. 4104, f. 221. 93 Antonio Agustfn à Fulvio Orsini, Tarragone, 12 janvier 1583, BAV, Vat. lat. 4104, f. 109-110. 94 Fragmenta historicorum collecta ab Antonio Augustino, emendata a Fuluio Vrsino, Fuluii Vrsini notœ ad Sallustium, Cœsarem, Iiuium, Velleium, ad Tacitum, 97
LA REDÉCOUVERTE DES FRAGMENTS DE DENYS
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E. Les annotations Les annotations qu'a rédigées Orsini sur le De legationibus sont réunies en volume avec le texte. Elles cherchent à expliquer celui-ci, donnant des indications historiques, géographiques ou autres. Orsini y justifie parlois aussi ses corrections 95 • Orsini ajouta à la fin de son volume des «Fuluii Vrsini emendationes in Polybium, impressum Basileœ per Ioannem Heruagium » : c'est une liste de variantes, de propositions de corrections, à l'édition de 1549 dont il possédait un exemplaire 96 • Orsini en revanche a fait la sourde oreille aux attentes d' Agustin, qui croyait voir le texte traduit. En 1577, l'Espagnol se réjouissait d'apprendre que «les fragments grecs» seraient traduits et imprimés97. Il semble qu'il ne puisse parler dans cette lettre que des Ambassades, alors qu'aucune traduction antérieure à celle de Sylburg ne nous est connue. Déjà en 1575, il envoyait à Rome les derniers feuillets manquants de la copie en cours pour les imprimer et les traduire98. Alors qu'Agustln a toujours cru qu'Orsini traduirait ces extraits, ce dernier a décidé d'éditer et commenter les fragments, sans proposer de traduction latine. Granvelle, qui joua un rôle si important dans cette édition, aurait sans doute aimé lui aussi que le texte fftt accompagné d'une traduction; il lisait manifestement mal ou pas du tout le grec, et dut se faire traduire le De legationibus pour pouvoir le lire.
F. La réception
Orsini et ses correspondants désignèrent toujours son livre sous le nom de Polybe, sans doute parce que c'était l'auteur qui représentait la plus grande partie de l'ouvrage. Il en décrivit ainsi le contenu à Piero Vettori en 1580 : Suetonium, Spartianum et alios, Antverpiœ, ex officina Plantiniana apud uiduam et Joan. Moretum, 1595. 95 Voir en annexe 3.1 l'édition de ses commentaires, à partir du manuscrit original d'Orsini (BAV, Vat. gr. 1419), collationné avec l'édition. "Polybii Megalopolitani Historiarum libri priores quinque, Nicolao Perotto Sipontino interprete. Item, epitome sequentium librorum, usque ad Decimumseptimum, Vuofgango Musculo interprete. Rerum, & uerborum in hisce memorabilium Indu, Basileœ, per Ioannem Heruagium, 1549, 2°. L'exemplaire de la biblioteca Angelica de Rome porte sur le deuxième feuillet de garde la mention manuscrite : «u libris Fuluii Vrsini». La table des matières au verso de la page de titre de l'édition de 1582 porte par erreur la mention: «1529». w «Ho ancom piacer di saper che li fragmenti Greci si traducono e si stampino• : Antonio Agustfn à Fulvio Orsini, Lerida, 24 avril [1577), BAV, Vat. lat. 4104,
f. 116. " «Di fragmenti ho havuto caro saper che vi si.ano capitati, et forse con questa fate vi mandan>il resto, dâ stamparli et tradurli et fame arrosto aksso et in g~to
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Ce Polybe sera composé de plus de cent cinquante fragments, parmi lesquels il y en a de beaucoup plus longs que celui qu'a vu Votre Seigneurie, au point qu'avec les fragments de Denys d'Halicarnasse, Diodore de Sicile, Appien d'Alexandrie et Dion, que j'ai commande d'éditer tous ensemble, et avec mes annotations, ce sera un bon volume, que je pense très utile pour l'histoire des choses humaines99.
En novembre 1579 déjà, il lui avait annoncé la publication d'un livre dans lequel on reconnaît difficilement notre De legationibus, tellement la description fait attendre un autre ouvrage : Je suis sur le point de publier un Polybe corrigé en plus de deux mille endroits, et enrichi de plus de vingt-cinq fragments jamais vus auparavant, où il y a la quatrième et la cinquième décades de Tite• Live tout entières ( ... ) 11111
Vettori s'était renseigné par ailleurs sur ce mystérieux texte et expliqua ainsi son contenu au grand-duc : Ce livre est sorti d'Espagne, où il était peu (n'était pas] connu, en sorte qu'il est venu dans les mains, à ce que me disent d'autres personnes, à peu de prix. Ce qu'il appelle fragments, comme on le voit bien pour le grand nombre qui a été imprimé auparavant, ce ne sont pas réellement des fragments, mais ce qu'il faut estimer davantage, des passages tirés et copiés de ces histoires, comment dire, discours, oraisons, descriptions de lieux, faits d'armes, batailles navales et choses du genre choisies, et claires 101•
Cette appellation porte encore tort à Orsini car on trouve parfois l'édition complète des œuvres de Denys d'Halicarnasse, publiée peu
a modo vostro» : Antonio Agustfn à Fulvio Orsini, Lerida, 28 février 1575, BAV, Vat. lat. 4104, f. 147. 99 «Il quale [Polybio] sarà di piu di cento cinquanta fragmenti, {ra li quali ne sono de moûo maggiori CM quello V. S. a veduto, talmente cM con li fragmntti de Dionysia Halicamasseo, Diodoro Siculo, Appiano Alexandrino e Dione, CM io ho in ordine di mandare tutti insieme, et con le mie annotationi, sara un buono volume, ma si corne io stimo utilissimo perla historia delle cose Romane• : Fulvio Orsini à Piero Vettori, Rome, 3 février 1580, éd. P. de Nolhac, Piero Vettori et Carlo Sigonio ... , p. 37. 100 «lo sono ,,er mandar fuora un Polybio emendato in piu di dua milia luoghi, et cresciuto di piu di 25 fragmenti non mai piu veduti, nelli quali è tutta la quarta et la quinta deca di T. Livia ( ... )». 101 «Questo libro è uscito di Spagna., dov'egl'era mal [poco] conosciuto, tal CM gl'è venuto nelle mani, seconda CM intendo da altri, per poco pre'l.ZIJ.Quelli cM e chiama fragmenti, corne si vede chiaro per moûi che prima erano stampati, non sono veramente fragmenti, ma quello che è da stimare molto piu, luoghi cappati [et scritti] di quelle historie, came dire, discorsi, orationi, descritioni di luoghi, fatti d'arme, pugne navali e simili case elette, et chiare» : Piero Vettori à Francesco 1°, Florence, 19 novembre 1579, BSB, Aut~phensammlung, Victorius Petrus.
LA REDé.COUVERTE DES FRAGMENTSDE DENYS
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après par Friedrich Sylburg, mentionnée comme l'editio princeps des extraits dionysiens du De legationibus 102• Je n'ai cherché des mentions de cet ouvrage que dans la correspondance d'Orsini, ce qui fausse le point de vue. Son ami Janos Zsâmboky (Sambucus), qui avait rencontré Orsini lors de son séjour romain en 1563, avait beaucoup aimé l'ouvrage, et envoya un exemplaire à l'érudit polonais (mais formé en Italie) Andreas Patricius, comme il l'écrivit à Orsini le teraoüt 1582 103 ; en novembre 1583 il lui disait encore qu'il avait envoyé des exemplaires d'«il Polybio di Vostra Signoria-. en Pologne «ad alchuni dotti gentilhuomini • 104• David Hoeschel, qui édita les Ambassades aux Romains en 1603 105, et non pas les Ambassades des Romains comme Orsini, se réclamait pourtant, dans son épître dédicatoire, d'Orsini et d'un manuscrit d'Andreas Schott, alors qu'il n'avait pas pu, et pour cause, utiliser cette editio princeps. Le recueil constitué par Orsini, contenant une partie des Ambassades, ne fut plus édité entier, mais les fragments furent réunis aux œuvres de chacun des auteurs qui le composaient. Les discours de Denys d'Halicarnasse furent intégrés dans ses œuvres complètes, qui connurent plusieurs éditions, sans cesse enrichies par de nouvelles découvertes, tout au long du XVIesiècle. Les éditeurs ne donnèrent pas toujours d'indication sur le manuscrit qu'ils avaient utilisé : des quatre copies de Darmarios, une était restée en Espagne, la seconde, on l'a vu, passa de la collection d'Orsini à la bibliothèque Vaticane; Sylburg disposa d'un manuscrit appartenant à Julius Pacius 106• Un autre manuscrit appartenait à Andreas Schott lorsqu1saac Casau102 R. J. W. Evans, The Wechel Presses: Humanism and Calvinism in Central Europe /572-1627, Oxford, The Past and Present Society, 1975 (Past and Present Supplement, 2), p. 7. 3 io Janos Zsamboky à Fulvio Orsini, Vienne, I• aoOt 1582 : «Legationibus Polybianis me et amicos, quorum studium in anti.quitatibus haud obscurum uidetur, adeo excitasti, ut quœ eius argumenti a,romrauµa-ra sancte mihique intus quasi tuebar, ilico proiecerim mi -rà xpooera complexus sim. Misi exemplum ad Patricium nostrum (... )•:éd.Hans Gerstinger, Die Briefe des Johannes Sambucus (Zsamboky) 1554-1584, mit einem Anhang Die Sambucusbriefe im Kreisarchiv von Trnava, von Anton Vantuch, Wien, H. Bôhlaus, Graz-Wien-Kôln, Kommissionsverlag der ôsterreichischen Akademie der Wissenschaften, 1968 (ôsterreichische Akademie der Wissenschaften, Philosophisch-Historische Klasse, Sitzungsberichte, 255), p. 267. •04 Janos Zsamboky à Fulvio Orsini, Vienne, 15 novembre 1583, éd. H. Gerstinger, Die Briefe des Johannes Sambucus (Zsdmboky) ... , p. 278. I05 Eclogœ legationum. Dexiphii Atheniensis. Eunapii Sardiani. Petri Patricii et magistri. Prisci sophistœ. Malchi Philadelphensis. Menandri Protectoris. Cum cor• rolario Excerptorum e libris Diodori Siculi amissis, XXI, XXII, XXIII, XXIV, XXV, XXVI, omnia e mss cod. a Davide Hoeschelio Augustano edita, Augustz Vindelicorum, Typis Ioannis Pnetorii, 1603. I06 Sur Iulius Pacius voir infra note 119.
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bon préparait son édition de Polybe, parue en 1609. Il y incorpora les fragments des Ambassades, à partir de ce manuscrit 107 • III -
L'ÉDITION
DE SYLBURG
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A. La préparation du texte Friedrich Sylburg, d'une certaine façon, était un compilateur plus qu'un éditeur. Il n'établissait pas lui-même tous les textes qu'il éditait, mais reprenait des éditions antérieures. C'était l'homme des œuvres complètes: il n'était pas le premier à éditer celles de Denys d'Halicarnasse, le corpus s'étant enrichi tout au long du siècle, mais il édita pour le moins les œuvres complètes connues à ce moment-là. Il a pu lui paraître intéressant de réunir les deux aspects séparés de Denys, les textes historiques et les œuvres rhétoriques. Il fit aussi imprimer les œuvres complètes d'Aristote, en onze volumes. Il composa aussi des recueils: les Historiœ Romanœ scriptores Latini (et Grœci) minores, entre 1588 et 1590. Il n'était pas tout à fait spécialisé dans les historiens, puisqu'à côté de la description de la Grèce de Pausanias (1583), d'Hérodote (1584), et des ouvrages cités, il édita aussi en 1590 le De syntaxi d'Apollonius Dyscole•09 • Sylburg ne refit pas l'édition du texte. Mais il ne recopia pas non plus à l'identique les éditions précédentes : il demanda à Orsini de l'aider, par l'intermédiaire de Janos Zsâmboky, celui qui avait tant apprécié le livre. L'affaire dura plusieurs mois, et plusieurs per01 •
lloÀv/Jiov roO AvKopra Meya).o,roU-rov icnop1â)v-ràC,O,Çoµeva, Polybii Lycortœ f. Megalopolitani Historiarum libri qui supersunt, Isaacus Casaubonus ex antiquis libris emendauit, latine uertit, & commentariis illustrauit( ... ), Parisüs, apud Hieronymum Drouardum, 1609, 2°, f. ü 6 : «In tertia parte multa emendauimus nec pauca suppleuimus e codice manuscripto llepi ,rpeafJeui)vuiri eruditissimi Andrea Schotti : qui etiam fragmenta quœdam e Theodosii Parui Excerptis descripta ad nos misit : quœ tamen uulgata prius fuerant, uerum aliis locis; quœdam etiam in Il parte. Eorumpse &cerptorum tomum primum inuenimus in splendidissima librorum suppellectile uiri genere illustris, dignitate amplissimi, uirtute, doctrina & sapientia ma.ximi, lacobi Augusti Thuani, in suprema Regni Curia prœsidis. Certe in prima fronte eius libri erant hœc uerba, etsi diuersœ manus, D tpaviaaç TO,rapov. 9co86moç tcniv oµucpoçde quo plura in commentariis». Le manuscrit des Ambassades de Schott est l'actuel manuscrit bruxellois 11301-16. 108 K. Presendanz, Zur iiltesten Ausgabe des Dionysios von Halikarnass, dans Gutenberg-Jahrbuch, 1928, p. 110-114; id., Friedrich Sylburg ais Verlagsberater, dans Gutenberg-Jahrbuch, 1937, p. 193-201.Voir la description de l'ouvrage en annexe 1. 109 Apollonii Alexandrini de syntaxi seu constructione orationis Libri /Ill, a Francisco Porto ante aliquot annos (... ) correcti ( ... ) nunc denuo a Frid. Sylburgio cum bonis exemplaribus collati ( ... ). Francofurti, apud A. Wecheli heredes, C. Marnium et J. Aubrium, 1590, 4°.
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sonnes y étaient impliquées. Zsamboky servit d'intermédiaire. Le 15 novembre 1583, il écrivait à Orsini : J'ai eu la réponse de Votre Seigneurie; j'ai écrit à Sylburg et comme à ce moment était là son patron Jean Aubri, héritier de Wechel 110, je lui racontai fidèlement votre offre généreuse etc., et j'ai conclu avec lui que Votre Seigneurie envoie ses leçons sur l'Halicarnasse ici, que lui aussitôt a placées avec les Vies d'Isée et Dinarque 111 avec la préface de Votre Seigneurie sur du beau papier( ... ). Et que [Votre Seigneurie] envoie au plus vite les corrections de l'Halicarnasse112.
Dans la même lettre, Zsambocky parle du «Polybio di Vostra Signoria •, ce qui laisse supposer qu'Orsini avait proposé à Sylburg autre chose que les discours des Ambassades. Orsini lui-même, d'après l'étude de Pierre de Nolhac, décrivit les étapes de sa collaboration au Denys de Sylburg à son ami Gianvincenzo Pinelli : «après avoir tardé assez longtemps, Orsini se décida à envoyer son manuscrit par l'entremise de Pinelli; mais il arriva un peu tard, quand l'impression était assez avancée, et on ne put en utiliser qu'une petite partie,. 113• L'épître au lecteur de Sylburg décrit la collaboration d'Orsini; l'éditeur écrivit à Rome, lui demandant de chercher dans cette ville des manuscrits du texte, de corriger les passages qu'il avait relevés, et de lui faire connaître tout ce qu'il pouvait trouver. Orsini lui procura des leçons d'un manuscrit romain (le sien), et lui fit connaître toutes les corrections qu'il pensait devoir être apportées 114• 110
Johannes Aubry ou Aubri, l'un des deux gendres de Wechel, avait pris la suite de l'éditeur mort en 1581. 111 Les Vies d'Jsée et de Dinarque, deux extraits des Vies des orateurs attiques écrites par Denys, avaient été retrouvées et éditées en 1581par Piero Vettori : .d10vvaiov 'Al1Kapvaaatœç 'Jaalov Kai .dtivapxoç, Vitœ Jsœi & Dinarchi, magnorum Grœciœ oratorum, a Dionysio Halicarnasseo scriptœ : quœ nunc primum studio ac diligentia P. Victorii in lucem produnt, ex uetustissima & optima Medicea bibliotheca, Lugduni, apud Io. Tomresium, Typogr. regium, 1581,4°, 37 f. Elles furent reproduites par Sylburg dans le deuxième volume des œuvres de Denys, ainsi que l'épître dédicatoire originale de Vettori à Lorenzo Giacomini. 112 «La. risposta di Vostra Signoria hebbi scrissi al Sylburgio et alhora essendo quivi suo Patrone Giovanni Aubri, hœrededel Wechelio; li contai fuie/mente l'vos~ libuak offerte etc. con il quai ho transacto, che Vostra Signoria manda le lectione sue del Halycarnasseo in qua, che lui subito a poste con quella vita d'Jseo e Dinarcho accomodata e con prefatione di Vostra Signoria in bella carta. (... ) Et mandi [Vostra Signoria] quanta prima con le correttione del Halycarnasseo» : Janos Zsamboky à Fulvio Orsini, Vienne, 15 novembre 1583, BAV, Vat. lat. 4104, f. 113, éd. H. Gerstinger, Die Briefe des Johannes Sambucus (Zsdmboky) ... , p. 278. m P. de Nolhac, La.bibliothèque de Fulvio Orsini ... , p. 63, à partir d'une lettre d'Orsini à Pinelli, 26 janvier 1585 (BAM, Ambr. D. 422 inf.). La lettre originale n'a pas été vue. 11• Atowaiou ·Alucapvaaatroç ... , f. *V : «Porro ut textus uterque corrigeretur,
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_ En 1584, Sylburg demanda l'aide de Piero Vettori, éditeur lui aussi d'une partie des œuvres de Denys : lui écrivant pour lui demander de participer à l'édition d'Aristote, il lui parlait de son projet d'éditer Denys d'Halicarnasse, et lui demandait, s'il avait quoi que ce soit de cet auteur, de le lui envoyer 115• Il répéta sa demande en janvier 1585, et lui envoya même un specimen en lui demandant son avis 116• Bizarrement, en avril 1588, Sylburg écrivait de nouveau à Orsini pour lui demander si dans Diodore, Polybe, Dion, Appien il avait autre chose que ce qu'il avait publié chez Plantin plusieurs années auparavant, «nam de his quoque breui cogitamus» 117• Dans la même lettre il lui demandait encore son aide pour l'édition de l'Histoire Auguste et de Zosime; Orsini ne l'aida pas à préparer ces deux textes, mais, en 1593, il collabora à l'édition d'un texte de Théodoret 118•
Grœcum cum Latino contendendum censui, atque alterum ex altero emendandum. In qua collatione cum deprehenderem Grœcum textum plurimis in locis deprauatum esse, in nonnullis etiam plane mancum, ita ut sine ueterum codicum ope sanari non posset, ad Jtalicas mihi bibliothecas confugiendum existimaui, atque ex ülis perenda remedia. Primum ergo Venetias ad Nara.km Comitem, deinde Romam ad Fuluium Vrsinum litteras dedi, atque a doctissimis & clarissimis uiris petii, ut ex ueteribus libris qui in Veneta & Romana bibliotheca exstarent, locos a me notatos corrigerent, & si quid prœterea inuenirent, id nobis & reip. litterwiœ impertirent. (... ) Sed longe plura & grauiora e Romano codice nobis suppeditauit Fuluius Vrsinus; qui cum rem litterariam pro singulari sua eruditione in multis aliis magna cum laude sœpe iuuerit, hac quoque in parte nobis deesse noluit ( ... )». Voir V. Fromentin, Introduction, dans Denys d'Halicarnasse, Antiquités romaines, tome 1, Paris, 1998 (CUF), p. XCI-XCII. 115 Friedrich Sylburg à Piero Vettori, Francfort, 13 octobre 1584, éd. Angelo Maria Bandini, Cl[arorum] ltalorum et Germanorum epistolœ ad Petrum Victorium, senatorem Florentinum nunc primum ex archetypis in lucem erutœ recensuit Victorii uitam adiecit et animaduersionibus illustrauit Ang. Mar. Bandinius 1. V. D. Laurentianœ basilicœ canonicus et ibidem S. C. M. Regius bibliothecar. et publ. Biblioth. Marucell. Prœ(ectus &c., trois tomes en deux volumes, Florentiœ, prœsidium facultate, 1758-1760, tome 2, p. 165. 116 Friedrich Sylburg à Piero Vettori, Francfort, 25 janvier 1585, éd. A. M. Bandini, Cl[arorum] ltalorum et Germanorum epistolœ ad Petrum Victorium ... , p. 169 : «Dionysii nostri specimen, quod cum his ad te mitto, rogo diligenter examines, & quœ desiderari in eo existimaueris, de iis nos commune facias; simul etiam mittas quidquid emendationum in eum auctorem uel ipse habes, uel aliunde conquirere potes». 117 Il ajoute: «Quod autem aliquantum mihi succenset de Dionysianis, si accurate rem consideres, culpa me carere comperies; nam quœ tempestiue aduenerunt, suis quoque locis fideliter sunt inserta; quœ uero post operis absolutionem a te sunt missa, spicilegio reseruantur, cuius maturandi breui se offeret ampla occasio, nisi me amicorum promissiones fallunt» : Friedrich Sylburg à Fulvio Orsini, Francfort, 18 avril 1588, BAM, Ambr. D. 422 inf., f. 242, éd. P. de Nolhac, Lo. bibliothèque de Fulvio Orsini ... , p. 442-443. 111 Friedrich Sylburg à Fulvio Orsini, Francfort, 19 avril 1593, éd. P. de Nolhac, Lo. bibliothèque de Fulvio Orsini..., p. 443-444.
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Sylburg réédita les excerpta à partir de l'édition d'Orsini et d'un nouveau manuscrit, appartenant à l'italien Iulius Pacius 119• Il intégra peu de corrections dans le texte, préférant les proposer dans ses annotations120.Dans celles-ci (p. 82-86 du premier volume), il mélangea ses annotations à celles d'Orsini, qu'il reproduisit; mais il différencia bien les deux en faisant suivre celles d'Orsini de la mention de leur auteur. Il commença d'ailleurs par rappeler qu'Orsini avait édité ce texte le premier. Il nota les leçons divergentes de son manuscrit, ainsi que les corrections qu'il proposait. Il appuya souvent celles-ci sur des renvois au texte des Antiquités romaines, édité dans le même volume : il justifiait ainsi ses propositions de correction par une utilisation semblable du même mot, de la même expression, ou de la même construction syntaxique, dans une autre œuvre de Denys121. Sylburg ajouta au texte du De kgationibus une traduction latine, la première à être publiée. B. Friedrich Sylburg et les Wechel La question de l'éditeur ne se posa pas à Sylburg, qui, après avoir été professeur de grec à Marburg, fut correcteur à partir de 1582 ou 1583 chez les Wechel, avec qui il avait déjà travaillé en . Les Wechel étaient sans doute au courant dès le début du 1577 122 projet d'éditer Denys, si même ils ne l'avaient pas provoqué. Après la mort d'André Wechel en 1581, son atelier, dirigé par ses deux gendres, restait tout aussi productif et prospère 123 . Francfort, où ils étaient installés, était devenu un lieu central de l'édition en Europe, grâce en particulier à la foire qui existe encore de nos jours. Denys d'Halicarnasse entrait dans leurs intérêts, puisque les presses des Wechel ont édité, pendant tout le temps de leur activité, un nombre très important d'auteurs antiques, souvent accompagnés d'annotations d'érudits contemporains. Ils publiaient aussi de très nombreux ouvrages concernant l'histoire antique et contemporaine, qui for-
Julius Pacius (1550-1635), protestant italien, enseigna la jurisprudence puis le droit à Heidelberg, Montpellier, Valence et un moment Padoue. Il écrivit plusieurs ouvrages, en particulier sur le Corpus iuris ciuilis, qu'il édita, ainsi que l'Organon d'Aristote. uoIl insista lui-même sur ce choix d'édition dans sa préface, Alowaiou AÀl· 119
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Kapvaootmç ...• f. *V.
Ces annotations, qui mélangent à celles d'Orsini les ajouts de Sylburg, sont éditées en annexe 3.2. 122 I. Maclean, André Wechel at Frankfurt, 1572-1581, dans Gutenberg-Jahrbuch, 63, 1988, p. 146-176 (n. 17 p. 149). '" R. J. W. Evans, 1'he Wechel Presses ... , p. 3. 121
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ment un ensemble harmonieux et volontairement construit 124• .iEmilius Portus, né en Italie mais dont le père Franciscus, venu de Crète, avait enseigné le grec à Genève à partir de 1561, publia avec les Wechel des historiens grecs. Les Wechel étaient des commerçants, qui éditaient les livres pour les vendre : ils pensaient donc que cette énorme édition était un produit éditorial pour lequel il existait un public. Le De legationibus a connu, en l'espace de quatre ans, deux éditions, chez les deux plus grands imprimeurs du temps, du moins ceux qui avaient la plus grande emprise géographique, les deux presses les plus connues du nord de l'Europe, touchant un énorme public : les Wechel et surtout les érudits qui imprimaient chez eux, même s'ils étaient installés dans une ville luthérienne, occupaient une place importante à la cour des Habsbourg. Sylburg envoya au moins un exemplaire de son livre à la cour impériale, à Hugo Blotius, bibliothécaire impérial 125, et Zsâmboky était l'historiographe impérial. Ces imprimeurs étaient aussi parmi les principaux distributeurs de livres internationaux, grâce aux foires de Francfort. IV -
L'ÉDmON
o'HENRI
EsTIENNE
(1588) 126
Henri Estienne, dont le père Robert avait édité avec son aide en 1546-1547 les œuvres de Denys d'Halicarnasse, s'intéressa à nouveau en 1588 à cet auteur. Toutefois, il ne chercha pas à proposer de nouveau des œuvres complètes : celles-ci, publiées deux ans plus tôt par Sylburg, étaient peut-être suffisantes pour le marché du livre, et une nouvelle édition aurait été un risque éditorial. Estienne se contenta de la traduction des Antiquités romaines, complétée par diverses an: notations d'érudits, de textes permettant de compléter la lecture de Denys, et du De legationibus, seul texte du volume édité dans sa langue originale. C'est sans doute pour des raisons financières (la situation économique d'Estienne était précaire depuis plusieurs années) qu'il s'associa à Eustache Vignon, gendre de l'imprimeur Jean Crespin qui, arrivé à Genève en 1550 en même temps que les Estienne, avait été leur concurrent dans l'édition de langue grecque 127• La lecture de la page de titre et de l'avertissement au lecteur ne permet pas de savoir dans quelle mesure Estienne a pris part à l'édiR. J. W. Evans, The Wechel Presses ... , p. 10-12; liste des publications des Wechel de 1573 à 1627, ibid., p. 54-74. 125 R. J. W. Evans, The Wechel Presses ... , p. 34. Lettre de Friedrich Sylburg à Hugo Blotius : Vienne, ôsterreichische Nationalbibliothek, ms. 9737•17. f. 20. 126 Voir la description de l'ouvrage en annexe 1. 127 Voir O. Reverdin, Figures de l'hellénisme d Genève, dans Homère chez Calvin : figures de l'hellénisme d Genève, Genève, Droz, 2000, p. 27-101 (spéc. 40-47). 124
LA REDtCOUVERTE DES FRAGMENTS DE DENYS
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tion. Le titre porte le nom de deux personnes : Estienne lui-même, et ..Emilius Portus, qui y est crédité d'une traduction et de notes. Il est sO.rau moins qu'Henri Estienne avait lu avec attention le De legationibus. Il le commenta dans l'édition mais en traita aussi dans ses Schediasmatum uariorum, id est, Obseruationum, Emendationum, Expositionum, Disquisitionum ... alii libri tres parus la même année. Il y parla beaucoup de Denys d'Halicarnasse, ce qui laisse supposer qu'il suivait l'édition en cours, et revint en particulier sur le De legationibus, traitant d'une question de texte : Orsini s'était trompé dans le quatrième fragment, parce qu'il n'avait pas lu le 11zesaurusGrœcœ linguœ d'Estienne lui-même. Orsini, suivi par tout le monde, s'était trompé par ignorance 128• L'ignorance était peut-être volontaire: Agustfn, dans une lettre à Orsini de 1572, avait montré tout le mépris qu'il portait à ce 11zesaurus129• Dans les pièces liminaires se trouve une épitre adressée par le «typographe» au lecteur, non signée. Estienne signait volontiers ce type de pièces, mais il lui est arrivé à plusieurs reprises de manquer d'honnêteté dans ses rapports avec les auteurs qui travaillaient avec lui. Le mystérieux typographe, donc, qu'il s'agisse d'Estienne ou de l'imprimeur cité sur la page de titre, Eustache Vignon, indiquait au lecteur qu'il avait souhaité enrichir son édition des œuvres de Denys en y ajoutant le De legationibus, traduit (redditus) par Henri Estienne; surtout, il était obligé de renvoyer cette édition à la prochaine foire d'automne, où il pourrait offrir au lecteur non seulement le De legationibus, mais aussi les commentaires d'Estienne et d'Isaac Casaubon sur Denys 130• La composition même du livre 121
Henrici Stephani Schediasmatum uariorum, id est, Obseruationum, Emendationum, Expositionum, Disquisitionum, alii libri Ires, qui sunt Pensa succisiuarum horarum Aprilis, Maii, /unii, Excudebat Henricus Stephanus, 1589, 8, livre 5, schediasma 29, p. 262-263 : «Legimus enim inter ilJa ex Dionysio excerpta De legationibus, in ea historia quœ ordine proponitur quarta, àvaavpv lloÂ.v{Jlov îOO MeyaÂ.01ro).frovt,c:).oyai ,repi ,cpecrfJerœv. Ex libris Polybii Megalopolitani selecta De legationibus, et alia quœ sequenti pagina Geist aus Ba.slerPressm, Universitlltsbibliothek Basel 4. Juli bis 22 August 1992 ( ... ), éd. Franck Hieronymµs, Bâle, Universitlltsbibliothek Basel, 1992 (Publikationen der Universitlltsbibliothek Basel. 15), p. 361-362). 1• Familiœ Romanœ quœ reperiuntur in antiquis numismatibus ab Vrbe condita ad tempora diui Augusti, ex bibliotheca Fului Vrsini, adiunctis familiis XXX ex libro Antonii Augustini ep. Ilerdensis, Ro1Il2, curantibus heredib. Francisci Tramezini [Apud Iosephum de Angelis], 1577, 2°.
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indicantur : nunc primum in lucem ed.ita. Ex bibliotheca Fului Vrsini, Antverpiœ, ex officina Christophori Plantini, 1582, p. 102-109 (pagination indiquée en itaUque). B. Biblioteca apostolica Vaticana, Vat. gr. 1419 : manuscrit du De legationibus de Fulvio Orsini.
(f. 85r I p. 102)
Leg.I [15.H = 15.5-6 KJ] 'Ail.à acai ôi6t1 toi>v Kap1tavoùç 1t0Uà acai µ&ycii..af~MlJttov] Deest fragmenti principium, in quo belli Palzpolitani, ut uidetur, origo referebatur, de eo sic Liuius libro vm : Palœpolis fuit haud
procul inde, ubi nunc Neapolis sita est : duabus urbibus populus idem habitabat. Cumis erant oriundi, Cumani Chalcide Euboica originem trahunt. Classe qua aduecti ab domo fuerant, multum in ora maris eius, quod accolunt, potuere. Primum in insulas /Enariam, & Pi.thecusas egressi, deinde in continentem ausi sedes transferre. Hœc ciuitas cum suis uiribus, tum Samnitium inf,.da aduersus Romanos societate freta, siue pestilentiœ, quœ Romanam urbem adorta nuntiabatur, fuJ.ens, multa hostilia aduersus Romanos agrum Campanum, Falemumque incolentes fecit. Igitur L Cornelio Lentulo, Q. Publilio Philone iterum consulibus fetialibus Palœpolim ad res repetendas missis, cum relatum esset a Grœcis, gente lingua magis strenua, quam factis, ferox responsum : ex auctoritate patrum populus Palœpolitanis bellum fum iussit, etc. 19 Ex bis autem Livii uerbis corrigitur locus Strabonis in libro 5. Qui ut legi debet, tan Neacorrectus, ipsa Liuii uerba uicissim illustrat : µerà ôt .d.1Ka1apziav
n-o.tiçKvµaiœv iknepov ôt ,cai Xa.t1e1ôerçtmt,K71aav,cai ll19TJ,coooaiœvnvtç ,cai Nean-o.tiçt1e.t179TJ ôià roOrc,20.Mendose enim ·A9ttKai Aivapitœv, v'Pmµaicov, Kaµxavci>vxollaaciç tµcpaviÇ6vtcovacai à,roôupoµtvcov acatà tli>vNtaJtoÂ.itli>v]Adverbium acatà deest in exemplari : uidetur tamen ad sensum necessario requiri, paulo post pro tà µri 1tpoat11Covta.Male in exemplari tà µri 1tpov àcp1çoµtvn ~ 118tiq.)Ita emendauimus cum 185' in exemplari àcpaviÇoµtvn corrupte scriptum esset pro àcp1çoµtvn. Confirmant banc lectionem Liuiana uerba ex eodem libro : itaque cum a Tarento et a Samnitibus fama esset noua auxüia uentura etc. 22 - ci>çà1tfatou acai 1'03 ôoi..{ou] In exemplari scriptum est à1tiatouç 1e:aiôoi..fouç.
Liv. 8.22. Str. 5.4.7.1. 11 Liv. 8.22 (voir annotation précédente). 11 Liv. 8.25. 19
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- Et mox toùç NEanoÂ.itaç pro totç N&anoÂ.ha1ç etc. ut nos emendauimus.
- àu.à 1eàicdvo1ç]icàicdvouç erat in exemplari. -Alà ta6'taç tàç ainaç T) Pv 'Pcoµaimv 1eal ~opµ1avlbv bcavol PoT18Etvaûtotç tcsµ&v, tàv icatacscp&tt:p1v6µ.cpd, 6cnu:p->tvt1re1raOvo..toVO'l('Q)v trrverolO. Notum est autem uel ex Festi auctoritate, Opicos et Oscos eosdem esse 31; Sidicinosque inter Oscos Campaniae uetustos populos numerari a Strabone lib. 5 t,pel;flç K&iµevov, cuius sunt haec: rô yàp Ttavov YIHro KaÀ.ovµevovE1S1K1vov tK roOt1r16trov S11..toOra1 Sion rd>vE1S1K1vd>v tcmv St ·0ax-01 Kaµ1ravd>v t9voç tKÀ.&À.OltrOVÇetc. 32
- Kai 1rpal;e1ç,r4cn S1Sova1t,ri rolç 1ro..teµio1ç evroxerç. lta uidetur legendum, cum in exemplari 1Cai.1tpaç&1&v mlm 6\66va1 totç 1toÀ.&µ{01ç &ùruxdv corrupte ut uidetur, scriptum sit. Paulo supra àpatç pro àpàç. Et Kattxu.: pro tUX6vt&çmendose in manuscripto legebatur. - tn:&tt'aùtotç 0 tà d1C6ta cruvtP11n:a8dv] Locus, ut apparet, mendosus potest aliquo modo corrigi si ita legatur. - ilv dx.: Kopvi)À.toç] Liuius ibidem : Cornelius altero e.xercitu Samniti-
bus; si qua se mouerent, oppositus, etc. 33 I""'
Leg. III (17.A = 17.1-3KJ] cruv&t66t&ǵtv tautotç tv.:ooµtvotç éiçn:p6npov tnotitaavto n:poç aùtoùç 6µoÀ.oy{aç,tv afç cptÀ.iavcruvt8&vto Kai.cruµµaxiav] De Lucanis fœdere in amicitiam P. R. primum acceptis meminit Liuius li. VIII : Lucani, inquit, atque Apuli, quibus gentibus nihil ad eam diem cum Romano po-
pulo fuerat, in fùlem uenerunt, arma, uirosque ad bellum pollicentes. Fœdere ergo in amicitiam accepti, etc. 34 Fuit is annus urbis CDXXVII, L. Papirio Mugillano, C. Pœtelio Libone Visolo ter cos. - oùK àn:o-yv6vt&ç6t cruµn:da&tv aùtoûç, tàv tç àJtŒOTIÇ tf\ç n:6À.&ox; toùç tn:icpav&atatouç n:at6aç 6µitpouç dµa totç n:p&aP&utatçàn:0atdÀ.O>Olv.&t&pa>Kai. 6tx.:cruvtP11,àcptKoµtvcovyàp tlbv n:ptap.:cov 1Cai.1t0Uà 6.:oµtvrov, 1't&h1 j3ouÀT} a8m tà 6µ11pa fyvco Kal tT}VqnÀ.iavn:poç toùç J\&uicavoùç cruvavai, ical 6 6f\µoç t1t&1CUpcoa& tà 'l'llcpta8tvta ùn:' aùtf\c;] In exemplari pro cruµn:&{a&tv scriptum est cruµn:&adv, ut uidetur, corrupte. De Lucanis in P. R. amicitiam iterum re-
Manutianis, 1572, p. 94; le commentaire de Sigonio, Caroli Sigonii scholia, quibus T. Iiuii Patauini historiœ et earum epitomœ paratim emendantur partim etiam explanantur multis in locis aucta (... ), Venetiis, in zdibus Manutianis, 1572, f. 27, est le suivant : «Satis apparet ex locorum descriptione, Sidicinorum legendum, qui populi fuerunt inter Volscos & Campanos, non Signinorum, quœ urbs fuit in Latio •. Les éditions contemporaines conservent avec les manuscrits Segninorum (voir l'apparat explicatif de l'édition de Tite-Live, livre 8, Oxford, Clarendon Press, 19513 [Oxford Classical Texts] et Paris, 1987 [Collection des Universités de France]). 30 St. Byz. p. 671, 1. 15-17, s. u. cJ>pty&lla (éd. Meineke). 31 Fest. p. 218 1. 11 Lindsay : Oscos quos dicimus ait Verrius Opscos antea dictas teste Ennio. 32 Str. 5.3.9.33. 33 Liv. 8.22. M Liv. 8.25.
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ceptis, ita scribit Liuius li. x: Principio huius anni, (qui fuit urbis CDLV, L. Cornelio Scipione, Cn. Fulvio Maximo Centumalo cos.) oro.tores Lucanorum ad nouos consuks uenerunt questum: «quia conditionibus perlicere se nequiuerint ad societatem armorum Samnites infesta exercitu ingressos fines suos uastare : belloque ad bellum cogere. Lucano populo satis, superque erratum quondam nunc ita obstinatos animos esse, ut omnia ferre, ac pati tolerabilius ducant, quam ut unquam postea nomen Romanum uiolent. Orare patres, ut et Lucanos in ful.em accipiant, et uim, atque iniuriam ab se Samnitium arceant. Se, quanquam bello cum Samnitibus suscepto necessaria iam {acta aduersus Romanos fùJes sit, tamen absides dare paratos esse». Breuis consultatio senatus fuit. Ad unum omnes iungendum fœdus cum Lucanis, resque repetendas ab Samnitibus censent. Benigne responsum Lucanis : 1105 ictumque fœdus. Fœtiales missi, qui Samnitem decedereagro sociorum, ac deducere e.un:itum finibus Lucanis iuberent. Quibus obuiam missi a Samnitibus, qui denuntiarent, « si quod adissent in Samnio concilium, haud inuiolatos habituros ». Hœc postquam audita sunt Romœ, bellum Samnitibus et patres censuerunt, et populus iussit, etc. 35 111r - Kal µ'16èv tn 1tpchts1v tp-ywv 1toÂ.t:µ{0>v] tp-yov magis placeret. - 6-tt toùç ÛJt'IICOO~6µoÀ.O'Yl'laavtac; t1tsa6a1] Vide num tosa6a1 : quamuis t1tsa6a1 possit etiam feni. - totç à611eouµtvo1ç1eal 1Catacpsu-yo001v] Ita omnino legendum cum in manuscripto corrupte sit, totc; à611eouµtvo1ç1eal JCatacpsu-yovtac; et mox tJtl JtM:tov pro txl 1tÀ.d0>ut est in manuscripto.
Leg.IV [19.K = 19.5-6 KJ] -0n TIOO"t6µ1oço 1tptofhçJ>&O"taÀ.'fl1tpoç Tapavt{vo~] Legatos Romanos pulsatos fuisse a Tarentinis, et prœter alias grauissimas iniurias acceptas, unum etiam urina respersum fuisse, scribit Valerius Maximus li. n cap. n, Liuius in epitoma li. xn, Florus li. 1 cap. xvm" 136, Orosius li. IV cap. 1, Appianus et Dio in fragmentis, et Zonaras ex Dione 37 • - 1eal tEÀ.Euttbvtsçt!;tPcû,ov tJC toO 8eatpou] In exemplari scriptum est tEÀ.St>ttbv ex quo nos tEÀ.Euttbvtsçfecimus : quod si minus placeat tEÀ.Et>tatov omnino scribendum sit. - àvaO"UpaµsvoçtTIVJtEptfk>À.flV] lta restituimus, cum in exemplari esset àvafk>À.flV, corrupte. Vsus est eadem uoce Dionysius in fragmento n, cum inetc. 31 quit, njv -rs ,rspi/JoÀ.r,vKa-rà KEq,a).flçEi'Â.KVvapxovta te\) CZ,Uuptx:i(&), x:al tTIV riyt:µovuiv toO TuppTJVlKOO 1toÂ.tµou tx6vtam>] Ex bis uerbis apparet Q. tEmilio Papo, Etruriam prouinciam, C. Fabricio, Samnites obuenisse; de quibus triumphauit. Fuerunt autem consules C. Fabricius et Q. tEmilius anno CDLXXI.
- Kal n. KopviJÂ.tov, ôç tviautc\) tt:ttipt(&) 1tp6tt:pov ü1tatt:ûcov, 1101 Kt:Â.tlbv f9voc; ôÂ.ov toOc; x:ŒÂ.ouµtvouçl:tvcovaç, tx8{0"tol>Ç'Proµa{rov 6vtaç, 11:oÂ.t:µlbv d1tavtaç riP116ovx:attacpaçt:v] De bac P. Comelii Dolabellœ uictoria ex Gallis Senonibus ita scribit Florus : Post aliquot annos omnes reli-
quias Gallorum in Etruria ad lacum Vadimonis Dolabella deleuit, ne quis extaret in ea gente, qui incensam a se Romanam urbem gloriaretur50• Et Eutropius : interiectis aliquot annis iterum se Gallorum copiœ contra Romanos Tuscis, Samnitibusque iunxerunt. Sed cum Romam tenderent, a P. Cornelio Dolabella cum Cn. Domitio Caluino anno cLXX51• In exemplari manuscripto mendose erat vtrovaç pro l:tvrovaç et ôÂ.oupro 6Â.Ov.Et mox 52, ut nos emendauimus : est enim sententia 1t6Â.t:cov habebat pro 11:0Â.tµrov sumpta ex fragmento Polybii xxrn 53• - ECtt: cipyt'.>piovâvtl tibv aixµŒÂ.œtcovtpouÂ.t:to Â.apt:tv] In exemplari scriptum est at>tlbv pro âvti. Huc pertinent illa jl8v Ennii apud Ciceronem : Nec mi aurum posco, etc. 54 - nuv8tivoµa{ at: x:ptinO"tov]lta legendum cum in exemplari desit at:. - Et mox µ116èvciµt:tvov tibv Jtt:Vt:O'ttitrovpouÂ.t:utéi)v]Videtur legendum cum in exemplari µ116tva scriptum sit.
"' Liv. Per. 12. 49 Plin. Nat. 34.32. 50 Fior. Epit. 1.8.3 [1.13] 51 Eutrope 2.10 (avec une variante). 52 x:al tax&tat tci>V no).tµcov : D. H. 19.S (19.13 KJ). 51 Polybe, De leg. fr. 23 (Inc. ·on 6 'Avdoxoc; µ&tà tTJVKatà tTJVvauµaz{av ... ): tci>v6&1t6À.t:c.ov, µTJtàç Katà tTJVAioi..{6a,Kal tTJV'Ic.oviavµ6vov... Il indique dans ses annotations (p. 25) : tci>vnoÀ.t:µ{c.ov, pro tci>v1t6À.t:c.ov. Il s'agit d'un passagedu livre 21.13, où est rappelée la défaite que la flotte romaine fait subir en 190 à celle d'Antiochos m. 54 Enn. Ann. 6.183; Cie. Off. 1.38.
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RAPll.\21.EMOUREN
- ·nç tµoO µtÂ.Â.OvtOÇda&a8al Kal. µ&yciÂ.T1V
in exemplari mendose legebatur. - Kal. t'IV 7tpa,t1'1V v&Vl"TIK6cn] Quamuis V&Vl"TIKOO'l ad uocem Tapavrlvo1ç arcem referri possit, placeret tamen v&Vl"TIKOtlut ad Pyrrhum referatur. - 'Pcoµaiouç 7to1iJaa1vtoq> cp{Â.ouç]Corrupte legebatur in exemplari 'Pcoµaîo1 Jto1riaa1vto cpiÂ.01. Suspicor autem aliquid uitii inesse uerbo &lva1etc. - Et 6t nm tè>tilç PumÂ.&iaçovoµa] Corrupta haec erant in exemplari. Et Â.tyt1çsine dubio legendum. - Où6t y& 11:&pl tilç 7t&viaçon µ01 yti6tov µ11Cpovtan Koµ16fl, Kal. cpaOÂ.Ov oiKi6tov] De Fabricii parsimonia uidendus Plinius li. XXXIII cap. xn 55 • - Où6&vè,çtç&yiv&to] Vide num rectius sit tç&ytv&to. - Paulo post legendum, ut nos emendauimus, ôç dPXO>t& tàç µ&yimaç àpxàç, Kal 7tp&aP&ootàç tmcpav&mcitaç 7tp&aP&iaçKal a&Puaµ{ouç] pro eis autem quae sequuntur i&p&v t& 1t1at&6oµa1 tàç ciY1eotcitaçi&pma6vaç] in exemplari i&p&v7tlat&ooµa1 toùç ciy1eotcitouçscriptum erat sine i&pma6vaç uerbo, quod necessario requiritur. - 'AlltiÂ.01ç•>Caouç] lta legendum, cum male à.Â.Â.TJÂ.OUÇ sit in exemplari. - on oùx Caouç uµîv tJtoiria& toîç PumÂ.&Omv]Vox Caouç deest in exemplari : uidetur tamen necessaria. - Kal t7tl toOto µÉ'Y\atov cppovli'>]Placet t7tl tot>tQl. - Et mox uidetur legendum tlv dv tè>v Â.1µè,vaK&6civxpriµcitmv aCnoç &l 7tpiaa0a1] Non uideo quid uelit uerbum afnoç nisi pro eo 7tpé,8uµoç uel tale aliquod reponamus. - Ei 6t 6&î ,cal. tà µaÂ.iata 6tà tàç &u&py&aiaçtli'>v6&oµtvcov tà 11:6Ua K&tetfla8a1xptiµata] Aliter hic locus in exemplari habetur, et baud scio an recte. Sic enim in eo scriptum est : &i 6t 6'1 ,cal tà µUÀ.1ata6tà tàç &u&py&mciç tli'>v6&oµtvcov tè>1t6Ua 1C&Ktfja8a1 1tpciyµata. - Et mox µa,capiov toutouç u1tflpx.&vmutauimus in µaKapiov toOto u1tflpx.&v.Si quis autem nostras emendationes minus probauerit, poterit ex antiqua scriptura, eam quae magis placeat, lectionem elicere. - i1cicp·cov aùtè,ç tKtriaaµriv ICaÀCY>V] Magis placeret ICa.Â.li'>Ç ut respondeat prœcedenti aduerbio aiaxp&ç. Sed nec KaÀCY>v displicet. - MUÀ.1ata6't1ti :Eauvitaç Kal A&uKavoùç,cal Bp&ttl.ouç atpatiav dymv tataÂ.TIVt&taptQ) 1tp6t&pov tv1aut4'> t'IV ü1tatov àPX'IV txmv] Videtur legendum tpitQ) 1tp6t&pov tv1aut4'>ex historia et ex loco superiore in quo est: ôç tVlautcf, tpitQl 7tpot&pov u1tat&oov :Eauv{taç ,cal. A&uKavoùç ,cal. Bp&ttl.ouç tv{,cqa&1>µ&yaÀ.mç µaxaiç etc. 56
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Plin. Nat. 33.153. D. H. 19.S (= 19.13 KJ).
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- Ilollàç 6! ICŒi&ù&xiµovaç1t6Â.&1c; ICŒtàICpatoc;tç&Â.à>V tç&1t6p8Tiaa,tç cov'tTIVc:npatiav 41taaav t1tÂ.Out11aa, ICŒi tàc; &iacpopàc; totc; i6uîna1c;,ac;⁣tôv 119v ci1t&OO>ICŒ, ICŒit&tpa1C6a1au)tUÂ.ŒVtŒ µ&tà tCÎ)V K6Â.&µov,r:poafJv&ylCŒV, 8piaµf3œv⁣tô taµ1&tov&iafJv&y1ea] Ex hoc Dionysio loco satis manifeste apparet, in supplendo Capitolino fragmento 57 , quod est ante triumphum O. Mardi consulis, feliciorem Panuinii coniecturam fuisse, qui C. Fabricium, ad quem sine dubio pertinet illud fragmentum, de Samnitibus, Lucaneis, Brutteisque triumphasse, scripsit 51 ; quam ea fuerit, qua ductus Sigonius, de Etrusceis, Galleisque eum egisse triumphum affirmauit 59 • Hic quidem Polybü secutus auctoritatem : ille uero Liuiarue epitomœ testimo-
Les Fastes capitolins, ou fastes consulaires, inscription portant la liste des consuls romains, furent découverts sur le Forum en 1546-1547. Ds furent édités par Carlo Sigonio en 1550, puis par Onofrio Panvinio en 1557-1558 (voir notes 58 et 59). 51 Onuphrii Panuinii Veronensis (ranis eremitœ Augustiniani Fastorum libri V a Romulo rege usque ad imp. Cœsarem Carolum V Austrium Augustum, eiusdem in Fastorum libros commentarii, Venetiis, ex officina Erasmiana Vincentii Valgrisii, 1558, p. 468 : «C. Fabricium priore hoc consulatu triumphasse ex Capitolinis fragmentis intellexi : primum quia eundem consulem iterum triumphasse iterum scribunt, deinde quia uestigia extant etiam prioris triumphi : nam syllabœ illœ EISQVE, quœ sunt proximœ ante triumphum Q. Marcii consulis, sine dubio ad hune C. Fabricium pertinent; qui in consulatu prœcessit Q. Marcium. Triumphasse autem Fabricium scripsi de Samnitibus, Lucaneis, Brutiisque quod Florus libro XII ita scribit : Aduersus Samnites, Lucanos, Bruttios, & Etruscos bene pugnatum a compluribus ducibus». 59 Sigonio édita pour la première fois les Fastes capitolins en 1550, en les complétant à l'aide de sources littéraires : Regum, consulum, dictatorum ac censorum Romanorum Fasti, una cum actis triumphorum a Romulo rege usque ad Tiberium Cœsarem, Carola Sigonio auctore, Mutinœ, excud. A. Gadaidin, 1550. Édition consultée : Carolii Sigonii Mutinensis in Fastos consulares, ac triumphos Romanos, Commentarius, ab Aurore nunc recens recognitus & auctus, Basilere, apud Nicolaum Episcopium Iuniorem, 1559, p. 100-101 : «DE COS. AN. CDLXXI. C. Fabricium, Q. tEmilium consules subiicit Cassiodorus, Luscinum, & Papum Siculi (asti. Horum autem sic meminit Cicero in Lœlio : «Videmus Papum k:milium C. Luscino familiarem fuisse». Sic a patribus accepimus, bis una consules, & collegas in censum. Prœterea C. Fabricii, & Q. tEmilii Papi meminit etiam Valerius capite de paupertate. tEmilium mendose Paulum uocat Plutarchus in Parallelis. Pater est L tEmilii Q. F. Cn. N. Papi consulis anno DXXVII. C. Fabricius descriptus est ex secundo ipsius Capitolino consulatu. De triumpho C. Fabricii Lucinii cos. de Etruscis, & Gallis. C. Fabricium priore hoc consulatu triumphasse ex Capitolinis fragmentis colligo. Primum, quia eundem consulem iterum triumphasse iterum scriptum est, de inde, quia uestigia extant etiam prioris triumphi. Nam syllabœ illœ EISQVE, quœ sunt proxime ante triumphum Q. Marcii consulis, sine dubio pertinent ad C. Fabricium, qui consul Q. Marcium consulem prœcedit. Triumphasse autem Fabricum scripsi de Etruscis, Gallisque quod Polybius anno postquam ad lacum Vadimonem cum Etruscis Boii deleti fuerant, eosdem nouo delectu habito arma mouisse, arque uictos pacem petiisse a Romanis tertio ante Pyrrhi in Italiam aduentum anno scribit. Vt ex eo intelligi possit, ne Boios quidem, atque Etruscos clade priore perculsos hoc anno ocium habuisse. ln epitome quidem XII etiam scriptum est aduersus Bruttios, & Lucanos & Etruscos aliquot prœliis a compluribus ducibus bene esse pugnatum •· 57
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RAPHA:21.EMOUREN
nium"°. Quod apud eos, qui Romanos triumphos post Sigonium et Panuinium ediderunt, non fuit tanti, ut Polybianis monumentis pneferendum putarint, itaque ipsi quoque C. Fabricium C. F. Luscinum cos. ann. CDLXXI, de Etrusceis Galleisque triumphasse tradiderunt 61 • Sed in tantis Romanae historiz tenebris doctissimos etiam uiros offendisse aliquando, non est mirandum; ad quorum manus si Dionysii fragmentum, quod nobis uidere licuit, peruenisset, satis ex eo intellexissent, C. Fabricio, Q. A!milio consulibus creatis; A!milio Etruriam prouinciam: Fabricio, Samnites hello persequendos obuenisse : 1'09 sed de Etruscis A!milium, rebus aliquoties prospere gestis, non tamen triumphasse : Fabricium uero, Samnitibus, Lucaneis, Bruttieisque hello szpius superatis, agro uastato, urbibus captis, argenti talentis in A!rarium populi Romani quadringentis relatis, pneda militibus auctis, stiinsignem hune, qui in pendia plebi, quod in hellum contulerat, reddito 19°'" Capitolino lapide desideratur, egisse triumphum. - 'Allaçoµat tT)Vxeipova] lta scrihendum cum àÂÂ. dçoµmv>uerbum mendose sit in exemplari. - ·A1tavtcov 1tapovtcov] Deest finis orationis Fabricü ad Pyrrhum regemw). 0
a Ilc) deest a Ild) deest a Ile) o,n&pa IlOtni t' aùtotç a Il a) 6t 11µmv a Ilb) Cl>ouv6avébv o,n&pa Ilh) 'qtE a Ili) Iloatoi>µtoça Ilj) nptaj3tç editiones : 1tptal3uça Ilk) sic pro XIII II l) Iauvttt'bv a Ilm) àxt:iprotoç~vin mtllR· A Iln) ax6vta a Ilo) fü'oùK: µà fü' B (f. 107r) 6oo&plV corr. Vrsinus B1• mars.6oo&plVA pro 6uv&plV 11 OÙKa II p) 6uv&plV q) 1to111aavtaa Il r) àUitÂ.ouça Ils) 1t&pi&atwa Il t) tviK11aaa Ilu) notatur u. Ilv) àUitçoµm a et in editione Ilw) f. 90v uacat. g)
3.2. Commentaires de Friedrich Sylburg 62 Sylburg donne la référence à la page et la ligne de sa propre édition avant chaque commentaire. Sylburg modifiant parfois le texte d'Orsini, il est difficile d'indiquer clairement ses ajouts : on comparera les deux textes.
- P. 738, v. l, fragmenta hzc Dionysiana cum Polybii, Dionis, Appiani, & Diodori fragmentis, a Fuluio Orsino ante nos edita sunt, cum eiusdem
Vrsini Notis doctissimis, quas hic deinceps subiungam; sed ita ut etiam meas quasdam adnotatiunculas illis interferam, inter quas ut discrimen teneatur, Vrsini Notis in fine suum nomen apponam; meis nullum signum adiiciam. Vt igitur ad rem accedam, in codice manuscripto Iulii Pacii 63 , iurisconsulti & philosophi clarissimi, alius his ttloyatç pnefixus est titulus,
Liv. Per. 13.12. La source polybienne indiquée par Fulvio Orsini n'est pas identifiable. 61 Une partie du commentaire de Carlos Sigonio semble avoir été reprise par Onofrio Panvinio : voir notes 58 et 59 («C. Fabricium priore hoc consulatu ... prœcessit Q. Marcium / Q. Marcium consulem prœredit-. Fulvio Orsini cite sur le même plan ces deux éditeurs, qu'il oppose aux éditeurs successifs. À ses yeux, les sources antiques concordantes corroborent la valeur des deux éditeurs. 62 Voir description de l'ouvrage annexe 1. In Dionysii Halicam. Antiquitates Romanas notœ Frid. Sylburgii, p. 57-59. 63 Sur Pacius voir supra n. 119, p. 51. 60
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·po,µa{o,v ,rpoçtOviKovç, tK hic scilicet : llepi ,rptafko,v (rectius 1tp&crP&1lbv) tflç xpovudJç 'Jcoavvov icrropiaç. Quasi non e Dionysii Arcluoologia, sed e Ioannis Antiocheni Chronico, hzc Legationum collectanea sint excerpta. Sed Dionysio ea tribuit eiusdem codicis 1t&ptOXTl generalis : in qua hoc 1t&pi 1tp&crPt1lbv t&Oxoçcontextum esse dicitur t,c tlbv u,rot&tayµtvcov xpov1,clbv·a, Ilttpou ,ratpudou ,cal µayicrtpou· p, reœpyiou µovaxoo xpovucflç· y, 1coovvou "Avnoxtcoç· 6, A1ovooiou AÀ.ucapvacrcrtcoç"Pmµai,cflçàpxa10À.oyiaç· &,crt, IloÀ.uPiouM&yaÀ.01toÀ.itou ,cal ·A,rmavoO. & Dionysiana dictio ex his ipsis collectaneis satis euidenter elucet, ut ex Dionysio desumpta esse non sit dubium. In eodem Pacii libro post titulum supra expositum, subiiciuntur hzc : -orr 0
tJri AevKiov nocrrovµlov Kai I'alov ILJ.avolov v,rarœv, Tapavrivoiç µtv a,ro{Koiç ovmv "EU.17vœv,oiKot'Jcn ôt rflç ·1taMaç rà tuxara, ·po,µafoi ,roleµerv trw>aav, 6t1 ô'i/ ,rpea/Jevràç uq,ô>v,rapà rôv Koivôv a,ravrœv avOpœ,rœvvoµov, Âoyo1ç re mi tp-yoiç aux.11µ0011rep1v/Jp1cmv,nocrrovµlov re rolJ vavapx11cmvroç r,;,v 'r'7/Jevvov.Sed ea neque huius loci sunt, & pr.eterea in consulum no-
minatione habent uitium, ut infra ex Vrsini Notis intelliges ad 743, 22 64 • - [15.H = 15.5-6 KJ] V. 4, deest fragmenti principium, in quo belli Palzpolitani (ut uidetur) origo referebatur. De eo sic Liuius libro 8: Palœpolis fuit haud. procul inde, ubi nunc Neapolis sita est : du.abus urbibus populus
idem habitabat : Cumis erant oriundi, Cumani Chalcide Euboica originem trahunt. Classe qua aduecti ab domo fuerant, multum in ora maris eius, quod accolu.nt, potuere. Primum in insulas /Enariam, & Pithecusas egressi, deinde in continentem ausi sedes transferre. Hœc ciuitas cum suis uiribus, tum Samnitium infida aduersus Romanos soci.etatefreta, siue pestilentiœ, quœ Romanam urbem adorta nuntiabatur, fulens, multa hostüia aduersus Romanos agrum Campanum, Falernumque incolentes fecit. lgitur L. Cornelio Lentulo, Q. Publilio Phüone bis cos. Fetialibus Palœpolim ad res repetendas missis, cum relatum esset a Grœcis, gente lingua magis strenua, quam factis, ferox responsum : ex auctoritate patrum populus Palœpolitanus bellum fieri iussit. Ex his autem Liuii uerbis corrigitur locus Strabonis in libro 5. Qui ut legi debet, correctus, ipsa Liuii uerba uicissim illustrat : µerà ôt L11Ka1apxiavterri Nea,roÂ.iç Kvµaiœv oorepov ôt Kai XaÂ.K1ôerçtmi>K11aavKai ll10,,Koooaiœv r1vi:ç Kai Nea1roÂ.1çt,c).170,,ôià ro1Jrd'5 • Mendose enim "AOliKai Aivapitœv, COOTe vakov in uulgatis Strabonis editionibus scriptum est, pro Aivap1tmv. Eam-
que scripturam secuti interpretes, male Atheni.ensium, pro /Enari.ensium uerterunt. Nos autem eius loci correctionem, Liuianz recenti lectioni debemus. Vrs. - V. 7, Aduerbium ,catà deest in exemplari: uidetur tamen ad sensum necessario requiri. Vrs. - Ibid. à1ttcrt&1À.& paulo supra reposuimus, pro à1t0crt&îMI1quod est in manuscripto, ut uidetur, mendose. Vrs. - V. 10, forsan conuenientius &i n 6\acp [tpovtat].
64
o. H.
65
Str. 5.4.7.1
19.K (19.S KJ) :
tTJV
où
Â.&-y&a8al ltp<OOOQV.
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RAPHAl!LEMOUREN
- V. 11, aûµPoÀ.a pro contractibus repetitur etiam paulo post, v. 23 66 : & in superioribus quoque sic usurpatum 245, 38 67 • Sed frequentius pro eodem usurpatur auµJ)ol.ata, tum alibi passim, tum 679, 43 68 ; 680, 32 69 • - V. 12, 1Calhic otiosa est: aut uersu pneced. legendum 1tot11aaa8at. Vrs. - V. 14, male in exemplari legebatur tà µTt1tpocni1C&tv. - V. 15, rectius 8&pa1tdatç, dandi casu: & mox futuro tempore 1tapaa1C&ooaovtatut v. 8 ~tcooov-raç. Intellegendum enim hoc participium de legatis Romanis, non de Neapolitanis ciuibus. - V. 28, Pacii codex habet 7ttat&6ovtat : uerior scriptura est 1ttat&6ovtaç, fretos. Sequenti uersu in utroque manuscripto corrupte legitur à.cpavil;oµtvn. Nostram scripturam confirmant Liuiana uerba ex eodem libro : itaque cum a Tarento et a Samnitibus fama esset noua auxüia uentura etc. Vrs. - V. 32, pro 6è Pacii codex rectius habet oùv. Malim etiam ibidem cum articulo t1'ç Poul.1'ç. Sequenti uersu ai 1tp&a~&tattropice positum pro oi itpta~&tç. - V. 42, malim 6tt!;litaav, ut supra multis in locis. Sequenti uersu in utroque codice scriptum est à.matouç Kal 6ol.iouç· parum congruenter. - V. 44, supra sœpe habuimus t&À.&uttbvt&ç toO À.O'yoO : ut 642, 170 ; 738, 71 44 • Sequenti uersu in exemplari scriptum toix; Nta1toÀ.(taç. Vrs. - P. 739, v. 2, si mendo caret locus, 1CatayytÀ.&1v in ambiendi significatione accipiendum fuerit, hoc sensu : non tantum suis copiis fauorem eorum ambientes. Sed cum ea lectio sit durior, potius legendum uidetur, où µ6vov -rotç i6fotç -rtÀ.&atatpat&oo&a8at 1Catayytl.ov-r&ç uel, Ka-rayytÀ.Ovt&ç -rotç i6(01ç tatç tautlbv 6a1tétva1çatpat&u&aOcn. - Sequenti uersu in utroque codice scriptum 1Cà.1Cdvo1ç: contra regulam syntacticam. - V. 11, sensus tale quidpiam postulat, t!; ~ç oi Kaµitavo(, v,à.cpdÀ.ovto. - V. 14, Pacii codex habet auv&À.étµ~vov,pluraliter, ut v. 14 t'l!;(ouv. - V. 20, sic legendum esse docent hzc Liuiana in eodem libro: ex auctori.tatepatrum populus Pa/œpolitanis bellum fr.eriiussit. Vrs.
Leg. II [15.1 = 15.7-10 KJ] V. 22, Liuius libro vm. Ab utroque consule exiguam spem pacis cum Samnitibus esse certior sit senatus. Publilius, duo milia Nolanorum militum, et quattuor Samnitium, magis No/anis cogentibus, quam uoluntate Grœcorum recepta Palœpoli, miserat Romam. Compertum Cornelius dilectum indictum a magistratibus : uniuersum Samnium erectum; ac uici-
D. H. D. H. 63 D. H. 69 D. H. 70 D. H. 71 D. H. 66
67
19.K (= 19.5 KJ) : cruµpoï..arco111aaµtvouçrcpàç aù,ouç ... 4.43.1. 10.55.5. 10.57.2. 10.15.7. 15.H (= 15.6 KJ) : t&Â.EUtèovt&ç 6t toù i..6you.
LA RED~COUVERTE DES FRAGMENTS DE DENYS
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nos populos, Priuernatem, Fundanumque & Formianum, haud ambigue sollicitari ob hœc cum /egatos mitti placuisset prius ad Samnites, quam bellum fieret, responsum redditur a Samnitibus ferox. Sic enim uidetur legendus Liuü locus ex fide uetustissimi exemplaris. Vrs. - V. 24, forsan rectius tic t&v l3ou)..tméi>v,seu téi>vj3ooÀ.tottic&v·uel tic toO j3ooÀ.66µatoç. - V. 34, Pacii codex tmÀ.Cl8oµtvo1: congruentius. Sequenti etiam uersu conuenientibus aorist. tY1Cat&À.bt&t&. - & mox, tv t4) npè>çAativo1ç noÀ.tµq>icai npè>çOùoÀ.06c.nco1ç aootavt1 : uel saltem aootavtaç (ut colligitur ex Samnitum responso, 740, 20 72 & v. 37, ica8· 6µ6'.)v,in secunda persona 73 ). - V. 39, malet forsan aliquis civaôtl;ao8a1. Sed civaô&tl;a1 in simili loquendi genere usurpatum etiam supra 179, 4174 : 399, 5 75 • Opinor aûto{ pro aûtibv legendum esse. Vrs. - Sequenti uersu rectius fortasse ciy&ipovt&ç,cogentes : ut paulo ante, v. 2276 & supra 723, 1177 • P. 740, v. 5, ficp1vav positum hoc loco pro ficp1v&v1'!j3ooÀ.f1 icai 6 ôflµoç téi>v·pcoµa{œv. - V. 7, forsan rectius 1tpo1CUÀ.06µ&8a, ut supra tum alibi, tum 699, 7 78 , uel 79 1tapaicaÀ.06µ&8a,ut supra 736, 44 & infra 742, 20 80 • - V. 24, in uulgatis exemplaribus scriptum t1tT1x8tvt&ç, in Pacii libro t,nx8tvt&ç & tnax8tvt&ç : perperam. - V. 38, commation istud icai ay&1v,abest ab utroque codice manuscripto: sed Vrsino sic legendum uidetur. Alioqui pro cptp&1vscribendum foret cicpa1pdv, 1tpoa&ta1p{Ç&o8a1:uel reponendum aliud uerbum quod pelliciendi & sollicitandi significationem habeat; ut innuunt sequentia, & przcedentia, 740, 1. - V. 39, avw Cl)ouv6av&vicai Cl)opµ1avibviicavoi Po118dv aûtotç taµtv, ut Liuius loco iam citato : Nec Fundanum, Formianumue a se sollicitatos. quippe minime pœnitere se uirium suarum, si bellum placeat. Vrs. - V. 43, in exemplari est 61acpoÀ.aicatç: mihi placet ut legatur ô1à cpoÀ.aKflçVrs. - Ibid., ciVtlicaÀ.06µt8a positum pro civt11tpoicaÀ.06µ&8a,seu ciVtl1tapaicaÀ.06µ&8a,aut civtaito6µ&8a. P. 741, 1, Pacü codex habet Cl>À.oytU11ç:et mox Tjv06 nponoUoO: mendose. Liuius loco iam citato : Ceterum non posse dissimulare, œgre pali ciuitatem Samnitium, quod Fregellasex Volscis captas dirutasque ab se, restituent Romanus populus. De Fregellana colonia paulo supra ita scribit idem
n D. H. 15.1 (= 15.8 KJ) : toO µtv O'!'laµoO tàv t1tl tàv icatà Aativcov ... 73 D. H. 15.1 (= 15.7 KJ): où pouÂ.Oµ&VOl toO ica8' flµci)V. 74 75
D. H. 3.39.3.
D. D. 77 D. 71 D. 79 D. • D. 76
H. H. H. H. H. H.
6. 75.2. 15.I (= 15.7 KJ) : ~onµa86vn:ç oi 'Pcoµato1 ûzuvitaç ... 11.42.4 11.17.4 11.62.4 17.A (= 17.1 KJ) : 1tapaicaUaovt&Ç ci1to6tô6va1.
76
RAPHA2LE MOUREN
Liuius : Fregellas (Signinorum is ager, deinde Volscorum (uerat) cokmia deducta. Sed pro Signinorum, omnino Sidicinorum (ut corre:xit Sigonius, licet repugnante libro uetustissimo), uidetur legendum ex ipsa locorum descriptione. Vt autem banc correctionem uehementer probem, facit Stephani lo,rolrç "lraÀ.{aç ,j ro . eus, cuius uerba sunt fere ex Liuio translata, tllptrella µtv apx.arov ,fv ·0,ruc@v t1re1ra 0voÀ.ol}(J'J('œv tyrvero. Notum est autem uel ex Festi auctoritate, Opicos et Oscos eosdem esse; Sidicinosque inter Oscos Campaniœ uetustos populos numerari a Strabone lib. 5 cuius sunt hzc ro ràp Ttavov ro KaÀ.ovµevov Et6tKtvov tq,eçflç Keiµevov, tK roO tmOtrov ôJJÀ.00rai 616n r@v Ei6tKtvd>v tariv- ovroi 6t ·0mcoi Kaµ,ravd>v tOvoç ttl&À.011roç. Vrs.
- V. 2, pro 6't&p rectius legemus ômt&p,qui. - V. 5, malim ri6ucfla8al, tempore pneterito. tèv - V. 8, sententia talem quampiam lectionem requirit, fJuÂ.&u&a8al &1tttva1: uel àµu"Pmµa{mv6flµov àvtuiaaa8al : ut àvruiaaa8at sit oi>V61tÂ.Otç vaa8at. Apud Liuium, lib. 1, fetialis, post negata sibi ab hoste postulata, banc usurpat formulam : Audi Jupiter, & tu Juno, Quirine, diique omnes cœl.estes; uosque terrestres, uosque inferni audite: Ego uos testor, populum ilium (quicumque est, nominat) iniustum esse, neque ius persoluere. Sed de istis rebus in patria maiores natu consulemus quo pacto ius nostrum adipiscamur' 1• Et qui primus sententiam rogatur, in hzc uerba ibidem respondet; Puro pioque duello quœrendas (s. res populo Quiritium debitas) censeo, itaque consentio consciscoque 12• - V. 10, inclusa, ta. t&, absunt a manuscripto Pacii, recte : hoc nimirum sensu; omnia enim ex sacrarum & patriarum legum prœscripto prœstitit quœ tum diuina tum humana iura postulant. - V. 14, icatà ic&cpaÂ.flç &Â.icooatsignificare uidetur e capite detrahere, ut 743, icatà nttpaç phvai, e saxo deiicere : & inf. àvaaupaa8al 'tllV1t&plfJÂ.qv, 20 83• Sed huic sententiœ refragari uidentur hœc Liuianœ, lib. 1 : Legatus ubi ad fines eorum uenit unde res repetuntur, capite uelato (frlum lame uelamen est) Audi Jupiter, inquit, audite fines 84 • Vnde suspicetur aliquis Katà K&cpaÂ.flç &0..icoo&v hoc loco significare capiti obduxit. Quemadmodum infra in Origine gentis Romanœ 775, 7 85 ab iE.nea posteris hic sacrificandi mos traditus esse fertur, ut in sacris peragendis caput uelamento obducerent. - V. 16, àpatç] pro àpàç in manuscripto mendose legebatur àpatç et Ka-
81
Liv. 1.32.
•2
Liv. 1.32. D. H. 19.K (= 19.5 KJ) : âvacrupaµ&voçtTIV lt&ptfk>Â.TIV, 84 Liv. 1.32. 13
Venius Flaccus (Origo gentis Romana a Iano et Satumo conditoribus (... ) digesta ex auctoribus Verrio Flacco (... ) tum ex annalibus Pontificum, dein Cnœo Egnatio Veratio, Fabio Pictore, lm:inio t Macro, Varrone, Cœsare, Tuberone ( ... ): «Cum interim immolata sue in litore sacrificium perageret, trr.u:liturforte aduertisse Argiuam classem, in qua Vlvces erat : cumque uereretur ne ab hoste cognitus periculum subiret, itemque rem diuinam interrumpere summum nefas duceret, caput uelamento obduxisse, atque ita pkno ritu sacra perfecisse : inde posteris trr.u:litum morem ita sacrificandi, ut scribit Man:us Octauius lib. I ( ... )•. 15
LA REDéCOUVERTE DES FRAGMENTSDE DENYS
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't&l&'t& pro 'tUXOV't&Ç Vrsinus. Liuiana imprecationis formula, cum aliis non-
nullis solennibus, supra annotata est ad 131, 44 16• - V. 20, uterque codex manuscriptus habet, 7tpaçt:1&v,rftcn 6i66va1 "totç ,rouµio1ç &ùruxt:tv : corrupte. Nos Vrsini editionem secuti sumus, qui in tex: in Notis uero, Totç 7tOÀ&µlo1ç, casu tu accusandi casu scripsit toùç 7tOÀ.&µiouç datiuo, & clarior foret ea ipsa lectio, si addita pnepositione legeremus 7tpa~t:lÇ tv K4cn, successus in omnibus. - V. 21, nota hic 7tÀ'1JlJl&À.t:lv cum solo accusatiuo sine pnepositione : ut supra 725, 15, Kal 'tOVatpanO)'tlKOVriat:PT1KO't0>V 6pKov17 • - V. 30, in manuscripto perperam est t7tl t'aùtotç. Vrsini mauult f7t&1t' aùtotiç.
- V. 37, Pacii codex 1&1µ&p«;oooa.Ad sequentia Vrsinus adnotat hzc Liuii: Cornelius altero exercitu Samnitibus; si qua se mouenmt, oppositus.
Leg. III [17.A = 17.1-3 KJ] V. 38, Pacii codex tauv1T(bv opo,v: ut supra tv Aadvo1ç opo1ç 617, 38". - V. 43, Pacii codex 6pµT18&vtaç,accusatiuo casu : perperam. - V. 45, uel deest comma quodpiam, uel sine 't& legendum tè>v7tOÂ.&µov 6itcp{&pov]. - P. 742, v. 2, indusa µèv addita e Pacii codice. - V. 4, de Lucanis fœdere in amicitiam Populi Romani primum acceptis meminit Liuius li. 8. Lucani (inquit) atque Apuli, quibus gentibus nihil ad eam diem cum Romano populo fuerat, in fulem uenerunt, arma uirosque ad bellum pollicentes. Fœdere ergo in amicitiam accepti 19 • Fuit is annus Vrbis CDXXVII, L. Papirio Mugillano, C. Pœtelio Libone Visolo III consule. Vrs. - V. 7, in exemplari pro O"Uµ7t&iO'&lV scriptum est O"Uµ7t&a&tv, ut uidetur, corrupte. De Lucanis uero in P. R. amicitiam iterum receptis, ita scribit Liuius li. 10: principio huius anni, (qui fuit Vrbis CDLV, L. Cornelio Scipione, Cn. Fuluio Maximo Centumalo conss.) oratores Lucanorum ad nouos conss. uenerunt questum : quia conditionibus perlicere se nequiuerint ad societatem armorum Samnites infesta exercitu ingressos fines suos uastare : belk,que ad bellum cogere. Lucano populo satis superque erratum quondam nunc ita obstinatos animas esse, ut omnia ferre, ac pati tolerabüius ducant, quam ut umquam postea nomen Romanum uiolent. Orare patres, ut et Lucanos in {idem accipiant, et uim, atque iniuriam ab se Samnitium arceant. Se, quamquam bello cum Samnitibus suscepto necessaria iam (acta aduersus Romanos fuies sit, tamen absides tiare paratos esse. Breuis consultatio senatus fuit. Ad unum
D. H. 2. 72.6. Annotation de Sylburg, p. 20 : «deFetialum tTCLKf1pvKeiQ insignis est Liuii locus, quem ad cognoscendasantiquitatis formulas hue transcribere libuit : [il cite le même passage de Tite-Live]•. 16
D. H. 11.44.5. .. D. H. 9.60.7. 17
"Liv. 8.25.
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RAPHA2LE MOUREN
omnes iungendum fœdus cum Lucanis, resque repetendas ab Samnitibus censent. Benigne responsum Lucanis : ictumque fœdus. Fœtioles missi, qui Samnitem decedere agro sociorum, ac deducere exercitum finibus Lucanis iuberent. Quibus obuiam missi a Samnitibus, qui denuntiarent, si quod a.dissent in Samnio concilium, haud inuiolatos abituros. Hœc postquam audita sunt Romœ, bellum Samnitibus et patres censuerunt, et·populus iussit 90 • Vrs. ex unaquaque - V. 7, uel expuncto articula legendum tç à1tav ex quo cum Vrsino tEÀ.tutêI>vtsçfeci : quod si minus placeat, scribendum erit to t&À.tutalov· ut itidem Vrs. adnotauit. v. 17, pro 61to malim à1to.
90
Liv. 10.11-12.·
91
D. H. 9.3.5.
LA REDéCOUVERTE DES FRAGMENTS DE DENYS
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- V. 20, in exemplari est àvafk,)..i)v: corrupte 7t&p\fk,)..fjç uoce supra quoque Dionysius in secundo fragmento (741, 14), cum inquit, tT)Vt& 7t&p\fk,)..i)v ICatà IC&q,aÀ.fjç &0..ICOO& Vrs. - V. 22, ut Dionysius dicit, Ti)v où Uy&o8cl\nptnoooav à1eap8apcrlav,ita Florus, per obscenam, turpemque dictu contumeliam. Vt uideatur ad uerbum ex Dionysio transtulisse. Vrs. - Pro i&pdçto8fjtoç, quod mox sequitur, tYIP&vvalegitur apud Ioannem in fragmento Chronicorum, cuius exstat hoc principium 6rr ttri Aevdov nocnovµlov ,cal I'alov KJ.av6{ov v,rarœv, Tapavrivoiç µtv à,ro{,co,ç oJmv "E.Urjvcov, oi,coOcnBt rflç "lraÂ.{aç rà lax,ara, "Pœµaro, ,roùµerv lyvœaav, 6r1 8-q ,cpeafJevràç a(pd)v ,rapà ,co1vov àteavrœv àv9po,,rœv v6µov, À.oyoiç re ml lpyo1ç àax,Jjµoi 1rep1vfJp1aav,nocnovµ{ov re roO vavapx,jaavroç r-qv njfJevvav.
ro
Sed consulum nomina apud loannem mendosa sunt. Non enim L. Postumio, C. Claudio, quorum consulatus ne memoria quidem exstat, sed L. IE.milio Barbula, et O. Marcio Philippo conss. bellum contra Tarantinos susceptum est. Constat hoc cum ex aliis, tum ex ipso Dionysio, cuius in hoc fragmento uerba sunt (v. 40) : dpr1 Bt Aiµ1Mov BapfJovJ..a t,r(tl11mv r-qv apx'i/v ,rape1À.11qxjroç, ,rapfJaav oi ovv rq>noaroµiq, ,reµq,Otvreç eiç rov Tapavra 1rptafJe1ç.Ex iis autem, quz supra adduximus, Ioannis uerbis, colligere etiam possumus, Postumium, qui hoc anno legatus Romanus a Tarentinis pulsatus dicitur, priore anno C. Fabricio, Q. IE.milio cons. przfectum classis fuisse cum P. Cornelio, eo, quem duumvirum naualem a Tarentinis occisum scribit Liuius in epitoma lib. 12 de qua quidem iniuria, legatus a senatu, ut quereretur, ad Tarentinos missus, urina respersus fuit : id enim est, quod dicit Liuius, legatos pulsatos fuisse. Valet enim pulsatos, non (ut amicus meus, homo doctissimus existimauit), percussos et uerberatos: sed uiolatos, et ut interpretatur Seruius, fractis fœderibus lzsos, Virgilii uersum explicans, qui est in libro 12 :
Pulsatos refemu infecta fœdere diuos. - Vsus est autem Liuius hoc uerbo, eadem significatione, in epitoma Ji. 51 cum inquit, legatos populi Romani ab Achzis pulsatos fuisse. Ouam contumeliam exprimens Cicero in oratione pro lege Manilia, Corinthum euersam dixit, quod legati appellati fuerint superbius. Vrs. - V. 26, forsan rectius przs. temp. 6&x6µ&8a,accipimus. - V. 39, non minus apte legitur à1to8&crn:{oavt&ç, ut supra 347, 792 • - V. 40, Pacii liber habet Bappo)..a, & seq. u. Ilootoµicp, omisso u. quz scriptura, si Latinam syllabarum quantitatem spectemus, est longe conuenientior: sicut etiam Noµdv, Noµ{tcopa, Ao1e6µcova,l:n6p1ov, A&tepT)nov,& huius generis alia supra habuimus. - V. 44, procul dubio legendum ùpp1crµtv0\. nam ùJto\crµtvo1 uix usquam inueniri puto. Sed u. Pacii liber iterum monophthongo habet Ilootoµ{ou· recte. - P. 744, v. 7, in uulg. exempl. est ci>µo)..oyoOv· errore ambiguo. Nostrum ll0)..6-youv e Pacii libro desumptum est. Seq. v. pro ùn · aùtoùç rectius legemus 67t· aùtlbv, uel tn · aùtoùç. 92
D. H. 6.8.2.
80
RAPHA.2LEMOUREN
- V. 12, In exemplari pro àx&iponoç mendose scriptum àXO>PTITOÇ. Referuntur autem illa ex Epitoma libri 13 R.esprœterea contra Etruscos, Lucanos et Bruttios et Samnites prospere gestas continet. Vrs. - V. 14, inclusa 6è e Pacii libro addita, supra quoque in similibus loquendi generibus usurpata frequentissime. - V. 18, idem Pacii liber compos. habet füap18µda8a1· quod & ipsum supra usurpatum aliquoties. - V. 20, Katpoùç additum ex eodem Pacii libro. Leg. V
[19.S = 19.13-15 KJ] V. 22, malim pluraliter 'H1tt:1ponêi)v, Epirotarum. In Pacii libro margini rubrica hoc adscriptum est scholion, Ç,jn;1 tv rq) ,repi cnpar11rr,µarœv. In Polyami tamen Stratagematis, quz hic uidentur intelligi, nullum Pyrrhi stratagemata est quod ad przsentem historiam faciat, przter hoc in quo Pyrrhus non uictor, ut hic, sed uictus inducitur : llûppoç ,jrT1]8&lç û,ro 'Pœµaiœv, roùç t,îéq,avraç ànoÂ.éaaç, ,rpoç 'A vrlyovov, ,rp&u/3&000:µ&voçn&pi croµµaxiaç, ànorvxœv, npoutra~&. Torç np&a/3&vrarç ràvavria npoç dnavraç àyyéÂ.&iv, ç'A vriyovoç µ&yaÂ.nôvvtiµ&i f3o118,ju&1vvntax11ra1. ·acn& oi Tapavrrvoi ,cai ouoi IiK&.w>v ,cai 'JraÀ.â)vuûµµaxoi rov llvppov ,caraÂ.in&lv f3ov,îoµ&voi, crovtµ&ivav t,înio, 'Avr,yovov croµµaxiaç' 3 • Porro hzc e posterioribus Di-
onysii libris deprompta esse, ex eo colligitur, quod, cum Dionysius in przfa. tione (7, 10) 94 dicat se historiam suam deduxisse usque ad primum bellum Punicum, quod incidit in annum urbis ccccLXXXVIn, Pyrrhi uictoria quz in hoc fragmenta narratur, quindecim annis bello Punico prior est, & clades Pyrrhi, cuius Polyznus meminit, decem dumtaxat annis idem bellum antecessit. - V. 23, tf}ouÀ.Eooato hic usurpatum, ut tKptvav supra 740, 59S: pro Kai 6 6f\µoç. Vel legendum, Tl PouÀ.TJ 1tpEatPouÀ.Eooato Tl 'Proµa{rovPouÀ.TJ Pwtàç à1tâatEtÀE. - V. 24, Pacii codex TI6ppov, accusatiuo casu : non male. - V. 25, in uulg. exemplari est àv61tlÀ.aç6µEvov: errore ambiguo. Si enim àvn61UÀ.À.açaµEvov cum Pacii libro nolis, (quo tamen supra quoque 96 usus est auctor, 71, 2 ) legi potest àVTallal;aµEvov. - V. 28, videntur hue pertinere Liuiana illa ex Epitoma libri 12 : Samnites defecerunt : aduersus eos et Lucanos et Bruttios et Etruscos aliquot prœliis a compluribus ducibus bene pugnatum est. Vrs. - V. 30, C. Fabricium a Thuriis statua donatum, quod eos obsidione exemisset, tradit Plinius, apud quem male Thurini pro Thurii scriptum est. Eius uerba sunt ex libro 34 cap. 4. Publice autem ab exteris posita est Romœ C. JF.liotr. pl. lege perlata in Stenium Statüium Lucanum, qui Thurios bis infestauerat : ob id JF.lium Thurii statua et corona aurea donauerunt. /idem postea Fabricium donauere statua, liberati obsidione. - Ex eo uero quod mox sequitur, K6tVTovAiµ{À.1ovtè>v(Jl)Vapl;.Tc\'.) Cl>.ap-
93
Polyœn. 6.6.1.
D. H. 1.8.2. 9 s D. H. 15.1 (= 15.7 KJ) : npè>çuµtiç fKpivav.
94
96
D. H. 1.84.2.
LA RED~COUVERTE DES FRAGMENTS DE DENYS
81
Papo, Etruriam prouinciam, C. Fabricio, Samnites obueparet, Q. ~io nisse; de quibus triumphauit. Fuerunt autem consules C. Fabricius et Q. iEmilius anno V. c. col.XXI. Vrs. - V. 31, in utroque codice manuscripto legitur cJ>aupudQ):scriptura minus consentanea. - V. 32, de hac P. Comelii Dolabellae uictoria ex Gallis Senonibus ita scribit Florus : Post aliquot annos omnes reliquias Gallorum in Etruria ad lacum Vadimonis Dolabella deleuit, ne quis exstaret in ea gente, qui incensam a se Romanam urbem gloriaretur. Et Eutropius : interiectis aliquot annis iterum se Gallorum copiœ contra Romanos Tuscis, Samnitibusque iunxerunt. Sed cum Romam tenderent, a P. Cornelio Dolabella cons. deletœ sunt. Fuit autem consul P. Cornelius Dolabella cum Cn. Domitio Caluino, anno V. c. CDLXX. Vrs. - V. 34, in manuscripto exemplari mendose est oÂ.Ou,genitiuo casu restringenda uero ea uox ad istam Galliœ gentem solam, non ad Galliarum gentem uniuersam; ut manifestum est ex Eutropii & Flori uerbis modo citatis. - Ibidem mox Pacii codex habet -ytcovaç·Vrsini liber manuscriptus vtcovaç· mendose uterque pro Itvcovaç. - V. 35, in iisdem manuscriptis codicibus pro 11:oÀ.&µcf>v legitur 1t6À.&cov. Quod ferri non potest nisi addatur ci1taa6>v·ut significet Senones Romanis omnium populorum infensissimos fuisse hostes. Sed non minus apte mutapopulo Romato uocabuli numero legeris, tx8(mouç 'Pcoµaicovovtaç 1t6À.&coç, no infensissimos. - V. 38, Pacii codex pro 1toÀ.tµcov habet 1t6À.&cov : parum apte. Tp&1taluero, quod mox ibidem sequitur, retinere nihil uetat. Si quis tamen po,tal malit, fruatur suo iudicio. - V. 41, in utroque manuscripto exemplari pro civti scriptum est amli>v: perperam. Pertinent autem illa Ennii apud Ciceronem lib. I De officiis : Nec mi aurum posco, nec mi pretium dederitis. 1Nec cauponantes bellum, sed belligerantes, 1Ferro, non auro uitam cernamus utrique, 1 Vosne uelit, an me regnare hera; quidue ferat fors, 1Virtute experiamur. Et hoc simul accipe dictum; 1Quorum uirtuti belli fortuna pepercit, 1Eorundem libertati me parcere certum est. 1Dono, ducite; doque, uolentibus cum magnis diis. Vrs. - P. 745, v. 1, malim PoûÀ.&a8&, uultis. - V. 9, a& post ,ruv8avoµa1, cum deesset in exemplari; Vrsinus inferendum censuit. Pacii codex pronomen hoc habet initio periodi : nam in eo pro 6è, legitur t-yci> a&. Alioqui non inepte legitur aè 6t, cp11alv,cocJ>aPpiuulg. t-yci> lCl&, ,ruv8. ICp. - V. 10, cillaç, pro uulg. oÀ.açe Pacii codice repositum, alioqui legendum foret to oÂ.Ov.Seq. u. pro t& malim 6t. Ibidem mox uel tÀ.aaaoûµ&vov legendum, uel tÀ.aaaci>11&vov. - V. 12, 11µ6èvdµ&1vovlegendum uidetur, cum in manuscripto exemplari sit µ116tva. Vrs. - V. 21, si 6T}malis pro 6è, facile assentiar. - V. 22, in uulg. exemplari est µttaax& : in Pacii libro µiJtax&· coITUpte utrobique, nam uel µtt&X&nobiscum legendum, uel µ&tciCJX&Ç. - V. 23, pro &ia&a8a1uterque manuscriptus liber habet da&tal. In sequentibus desunt nonnulla uerba; quae diuinare non licet. Itaque punctis locum notauimus. Vrs. - V. 29, uox 6ûcrt&p1vin exemplari mendose legebatur. Vrs.
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RAPH.U!LE MOUREN
- V. 32, malim oüç, accus. casu: ut non a przced. uerbo regatur, sed a sequenti. - V. 34, in utroque manuscripto libro est vevucT11COOt. Ouod quamuis ad uocem Tapavtivotç referri possit, magis tamen placet V8Vl1CT11Cérr1 ut referatur ad Pyrrhum. Vrs. - V. 39, Vrsinus suspicatur aliquid uiti inesse uerbo eivat. Ouod si mendo caret, positum est pro fut. dae0'8a1. - Ibidem mox Vrsini manuscriptus liber habet ·pcoµato1 1to111aavtacpiÂ.Ol: Pacii codex, "Pcoµato11to1itaatvto cpii..ot;perperam utaque. Verior lectio est ·pcoµaiouç 1to111aavt1cpii..ouc;,dandi casu : ut respondeat pneced. dat. µ6vcp. - V. 40, Pacii codex i..tysiç ef6T1.Vrsinus quoque adnotauit, corrupta hzc fuisse in suo exemplari : et Â.&YllÇ sine dubio legendum. Forsan etiam ibid. aliquis pro -ràc;fMimi..daç malet tlbv j3ami..tcov: quia mox v. 42 sequitur f'tepoi nveç, s. j3ami..etç. - V. 43, uulg. exemplar habet -re1eµatp6µtvot: Pacii liber u1eµa1p6µevoc;. Verum esse nostrum te1eµmpoµtvo1ç, satis arguit przced. dat. -rmi. P. 746, v. 9, tx· tµau-ro0 positum hic pro àx· tµauto0· cuius generis exempla in superioribus quoque (ni fallor) habuimus. - V. 10, de Fabricii parsimonia uidendus Plinius li. xxxm cap. xn. Vrs. - V. 13, forsan rectius xepi 1tmcov: uel simpliciter to0-ro, hoc, sine pnepositione. - V. 18, forsan legitur xapà -ro, ut. v. 42 xapà to0-ro, pro 6tà to0-ro. uel gen. casu xapà to0, id est t1e to0. - V. 23, minus recte in manuscripto est tçeytveto. Vrs. - V. 25, Vrsinus hune locum sic legendum putat: 1eai1tpsal3sl)(I)tàc; tmcpaveatataç 1tpeal3Eiaç 1eai aej3aaµiouç, iEplbv tE mateûoµat tàc; tiytCO't'ataç iepcocruvaç.Sed cum in utroque codice manuscripto sit ieplbv 1tlatEOO)µa1 'tOÙÇ ayteotatouç, sine coniunctione 'tE, et sine iepcocruvaçuerbo, ego locum unius dumtaxat litterœ deletione sine corrigendum arbitror; 1eai1tpEal3El)(I) tàc; tmcpaveatataç 1tpeal3eiaç, 1eai aej3aaµoix; tlbv ieplbv 1t1atsuoµat toùç àytCOTa-rouc;. - V. 37, hune quoque locum exigua mutatione sic legendum opinor: 1Caiyvci>µTIV ayopEUE\Vaç1ouµevoç KEpi tlbv ŒVŒYJCŒlOtCl'tCOV, ICaÂ.O0µattv q> 1tpOO"tT)1CEt µEt61tq>,txmvo0µai 't8 1eai ÇT1Â.O0µa1. Id est, cumque de, rebu.s summe necessariis mea petitur sententia, rogor eo quo me rogari conuenit loco, laudorque ac color. Fuisse autem certum in sententiarum rogatione ordinem, tum ex aliis locis cognoscere est, tum ex 668, 22 97 , 690, 1291 , 702, 42 99 , 734, 4u,o_ - V. 39, txaçiCOCJlvrepositum e Pacii libro. Sed ferri potest etiam uulg. à1taç{comv,.quo supra quoque usus est auctor 335, 6 101• - V. 41, male in exemplari est àlliti..ouc; Caouc;.Vrs. - V. 43, Pacii liber habet otix tiµtv t1toiT1CJE. Sicut Vrs. quoque adnot. uocem Caouç in suo exemplari defuisse; quz tamen uideatur necessaria. Malim 97
D. H. 10.43.2.
D. H. 11.6.3. D. H. 11.21.4. 100 D. H. 11.58.4. 101 D. H. 5.71.2. 91 99
LA REDacoUVERTE DES FRAGMENTS DE DENYS
83
ego singul. num. où,c:Caovüµtv txoiriat:. Posses etiam legere: où,c:ùµtv t~iacoat: totc; p. - P. 747, v. 2, tµautov e Pacii libro additum. Seq. u. mihi quoque cum Vrsino magis placet tnl to6tQl, quam quod in manuscripto est, txl toOto. - V. 7, Vrsino uidetur legendum; il dv tov À.lµovv6t:oµtvc:ovto x6À.À.a 1c:t:IC'tf\cs8m xpayµata. - Et mox µa1c:aptovtoutouc; uxflpxt:v. In Pacii quoque libro xpayµata pro xpt\µata scriptum est; omisso tt: post 6t:oµtvmv. In eodem pro µa,c:aptov toOto legitur µa,c:aptc:otatouc;,quod si in µa,c:apuirtatov uertas, erit aliquanto tolerabilius. - V. 39, in utroque manuscripto exemplari est 1c:ŒÀ.lbv· quod etsi non prorsus displicet, magis tamen placet ICŒÀ.lbÇ : ut respondeat przcedenti aduerbio aiaxplbc;. Vrs. - V. 32, post µaÀ.tcna 6t desideratur temporale aduerb. ott:, cum. Sequenti uersu legendum uidetur tpitcp xp6tt:pov tVlautii), ex historia et ex loco superiore in quo est (744, 28) : tVlautii) tpitcp xp6tt:pov uxatt:uc:ovl:auvitac; ,cal At:u1c:avoùc; ,cal Bpt:tdouc; tvi1c:ricst: µt:yt'û..aic;µaxaic;. Vrs. Pacii liber habet t/;t:À.Ci.lv tx6p8Ticsa, quod ni placeat, legere poteris tÀ.Ci.lv tl;t:x6p8riaa. - V. 40, Pacii liber habet taµtt:tov· melius. Porro ex hoc Dionysii loco,
102
D. H. 19.S (= 19.14 KJ) : ëto1µ6ç tiµt ôiôovat.
84
RAP~LEMOUREN
quo Fabricius dicit se u · tŒMlvta µttà tcbv 8puiµjkov &iç to taµt&tov &ia&vt"(lCat,satis manifeste apparet, in supplendo Capitolino fragmento, quod est ante triumphum O. Mareil consulis, feliciorem Panuinii coniecturam fuisse, qui C. Fabricium, ad quem sine dubio pertinet illud fragmentum, de Samnitibus, Lucaneis, Bruttieisque triumphasse, scripsit; quam ea fuerit, qua ductus Sigonius, de Etrusceis, Galleisque eum egisse triumphum affinnauit. Hic quidem Polybii secutus auctoritatem : ille uero Liuiarue Epitomz testimonium. Ouod apud eos qui Romanos triumphos post Sigonium et Panuinium ediderunt, non fuit tanti, ut Polybianis monumentis prreferendum putarint, itaque ipsi quoque C. Fabricium C. F. Luscinum cos. ann. CDLXXJ, de Etrusceis Galleisque triumphasse tradiderunt. Sed in tantis historiz Romanz tenebris doctissimos etiam uiros offendisse aliquando, non est mirandum; ad quorum manus si Dionysii fragmentum, quod nobis uidere licuit, peruenisset, satis ex eo intellexissent, C. Fabricio, O. !Emilio consulibus creatis, !Emilio Etruriam prouinciam, Fabricio, Samnites hello persequendos obuenisse : sed de Etruscis .tEmilium, rebus aliquoties prospere gestis, non tamen triumphasse : Fabricium uero, Samnitibus, Lucaneis, Bruttieisque hello szpius superatis, agro uastato, urbibus captis, argenti talentis in zrarium populi Romani quadringentis relatis, prreda militibus auctis, stipendio plebi, quod in bellum contulerat, reddito insignem hune, qui in Capitolino lapide desideratur, egisse triumphum. Vrs. - V. 41, malim 6opuctfttœv, per t. - Sequenti uersu in uulg. exempl. est ~ui..6µ11v· errore ambiguo. Nostrum ~ui..oiµ11v e Pacii codice repositum. - P. 748, v. 1, redundat alterutrum, 1tÂ.dmot, uel GUXVOi. & cum dicat 1tpoç toutotc;, uidentur post Valerium Poplicolam deesse aliorum Romanorum nomina, qui gloriz quam opum studiosores fuerint. - Sequenti uersu Pacii codex cum uulg. exempl. habet 6t!;mµat, subiunctiuo uerbi modo. - V. 3, in manuscripto exemplari mendose scriptum à.i..i..ft!;oµat.Vrs. v. 5. rectius 1tpoçt,dandi casu. Sequenti uersu Pacii liber habet 1too6v : minus conuenienter. 1tpomov durius est. - V. 8, rectius J3apuvovta, neutro gen. sensus postulat icai411 seu icai..oi11. - V. 10, pro ica.Â.éi>v - Deest finis orationis Fabricü ad Pyrrhum regem. Vrs.
SYLVIE PITIIA
POUR UN NOUVEAU CLASSEMENT DES FRAGMENTS HISTORIQUES DE DENYS D'HALICARNASSE (ANTIQUITÉS ROMAINES, LIVRES 14-20)
Cette étude entend décrire comment le corpus des derniers livres historiques de D. H. a été transmis, reconstitué et surtout classé. Elle aboutit à de nouvelles propositions concernant l'ordre des fragments, en se concentrant sur les livres 14 à 20. L'histoire du texte est riche de recompositions et tous les éditeurs de D. H. ont regretté de ne point parvenir à une solution satisfaisante. Ainsi, en 1905, K. Jacoby concédait, à la fin de sa préface•, qu'il avait négligé l'étude des manuscrits en se contentant de reproduire l'état de la question, tel qu'A. Kiessling l'avait livré en 18702 • Ces regrets portaient sur le recensement des manuscrits eux-mêmes et de fait, on a pu depuis verser au dossier d'autres sources et d'autres fragments: le classement s'en trouve dès lors remis en cause. Plus récemment, E. Cary, exprimait un surcroît de repentirs: «L'ordre dans lequel sont imprimés les fragments est celui de Kiessling, suivi par Jacoby et il est fondé sur la collation du manuscrit ambrosien. Dans quelques passages, l'exactitude de cet ordre prête K. Jacoby, Dionysius Halicarnasseus, Antiquitates Romanœ, Teubner, Leipzig, 4 vol., 1885-1905. Cf. spécialement t. 4, 1905, prœfatio p. XII. Nous citons dans la suite le seul volume 4. Karl-Sigismund Jacoby, élève de Ritschl, a fourni sur le texte un travail nouveau par rapport à son devancier Kiessling, quoique n'ayant pas lui-même w les manuscrits. Ceci étant, K. Jacoby n'a pu bénéficier pleinement des éditions alors en cours de réalisation sur les excerpta constantiniens. Seuls les fragments du De legationibus étaient parus dans une nouvelle édition en 1903 (voir note 5). Le volume 4, qui nous intéresse plus spécialement, est en réalité sorti seulement au printemps 1906 (voir la recension de H. Kallenberg dans Berliner Philologische Wochenschrift, 1"'juillet 1907, 22, p. 673-683). 2 A. Kiessling, Dionysi Halicarnensis Antiquitates Romanœ quœ supersunt, Teubner, Leipzig, 4 vol., 1860-1870. Les fragments figurent au tome 4 (1870), auquel nous faisons seul référence désormais, Pour la présentation des manuscrits, voir prœfatio, p. XXIV-XXV. L'édition ultérieure à laquelle il avait collaboré n'offre qu'assez peu d'intérêt pour notre enquête. Elle comporte une traduction latine : A Kiessling-V. Prou, Dionysi Halicarnensis Antiquitatum Romanarum quœ supersunt, Paris, 1886. 1
Sylvie Pittia, Université d'Aix-Marseille 1.
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SYLVIEPITrlA
sérieusement à discussion. Stéphane de Byzance, en citant précisément les livres des Antiquités romaines dans lesquels il trouve cités divers lieux et noms de peuples, rend possible le classement de presque tous les extraits dans leur livre d'origine; mais les références des livres 17 et 18 sont confuses et il reste difficile de dire où passait la division entre les livres» 3• E. Cary, moins soucieux que K. Jacoby de l'établissement du texte lui-même, mettait l'accent sur une deuxième difficulté : l'ordre même des fragments, et accessoirement, la division interne de l'ouvrage en livres. Pareille insatisfaction fut exprimée chez les savants qui se sont consacrés à la tradition des excerpta byzantins et ont édité la partie du corpus dionysien transmise par ce canal; ils reconnurent l'inachèvement de leur entreprise: ainsi, A. G. Roos4, qui mena à terme une partie de la grande édition qu'avait entamée Th. BüttnerWobst5, avait ouvert la voie et formulé maintes propositions de reclassement, dont E. Cary n'a pas tenu compte, alors même que nombre d'entre elles, appuyées sur une bonne comparaison des sources historiques, étaient judicieuses. Notre enquête, il faut le concéder d'entrée, porte sur une partie seulement des passages fragmentaires de D. H. et elle examine le cas des livres 14-20: ce choix est lié à la publication d'une édition commentée de ces livres, qui concernent les IV• et IIIe siècles avant Jésus-Christ et trouvent leur unité dans l'histoire de la conquête romaine de l'Italie 6 • Les livres 12-13appelleront à eux seuls un examen tout à la fois comparable et spécifique : comparable parce que la transmission de ces fragments s'est réalisée dans des conditions voisines, les manuscrits sont communs; spécifique cependant pour deux
1 E. Cary, The Roman Antiquities of Dionysius Halicarnassus with an English translation, 7 vol., Loeb Classical Library, Cambridge, 1937-1950. Les fragments figurent au t. 7 (1950), auquel nous renvoyons systématiquement à partir de maintenant. Pour la citation, voir prœfatio, p. IX. 4 A. G. Roos, De fragmentis nonnullis e Dionysi Halicarnassensis Antiquitatum Romanarum libris postremis, dans Mnemosyne, 38, 1910, p. 281-290. 5 Ph. Boissevain, Th. Büttner-Wobst, C. de Boor, 1903-10 : Excerpta historica iussu lmperatoris Constantini Porphyrogeniti confecta, 4 vol. en 6 tomes, Berlin. Vol. l, Excerpta de legationibus, éd. C. de Boor, 1903; vol. 2, Excerpta de uirtutibus et uitiis, éd. U. Ph. Boissevain, C. de Boor, Th. Büttner-Wobst, 1906-1910 [pars /, éd. Th. Büttner-Wobst et A. G. Roos, 1906; pars Il, éd. A. G. Roos, 1910]; vol. 3, Excerpta de insidiis, éd. C. de Boor, 1905; vol. 4, Excerpta de sententiis, éd. U.-Ph. Boissevain, 1906. 6 Denys d'Halicarnasse, Rome et la conquite de l'Italie awc W• et III• sikles (Antiquités romaines, livres 14-20), texte grec, traduction et commentaire, S. Pittia et alii éd., Paris, 2002 (Fragments). Les fragments des livres 14-20 sont cités par référence au classement dans cette édition, un tableau de concordance avec l'ordre suivi par A. Kiessling (1870) et K. Jacoby (1905) est donné p. 7-8.
POUR UN NOUVEAU CIASSEMENT DES FRAGMENTS lllSTORIOUES
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raisons essentielles, d'abord le contexte historique est celui du ve siècle et requiert un tout autre traitement, et surtout, certains fragments du livre 13, bien qu'issus de la même tradition, paraissent avoir été intervertis sur un archétype que nous avons perdu 7, et ce n'est pas cette fois le classement opéré par les éditeurs qui est en cause. Notre entreprise est complexe, elle fait appel à l'histoire autant qu'à la philologie et, pour mieux recomposer la succession des fragments dionysiens, elle entend privilégier la transmission et la réception du texte, tout ce que, selon les époques, le pouvoir politique autant que les hommes de lettres ou les savants ont-choisi, au sein du corpus dionysien, de conserver, de citer, d'exploiter à des fins jamais anodines. Les Antiquités romaines, et au sein de l'œuvre, les derniers livres tout particulièrement, ont eu classiquement une destinée littéraire, mais ce matériau historique a aussi connu une utilisation politique. Le désordre et les erreurs dans la classification des fragments tiennent bien sQr très banalement aux hasards et aux fractures dans l'histoire du texte; concurremment, d'autres facteurs ont joué, ils intéressent l'histoire culturelle et dépassent largement le cadre antique. C'est ce qui a donné à cette enquête sa dimension transversale : par delà l'Antiquité vers l'histoire byzantine et celle de l'Italie contemporaine, pour mieux revenir à la compréhension des événements antiques; par delà le commentaire historique vers la codicologie, la philologie, l'histoire des textes, pour échapper au classement certes pérennisé mais à l'évidence insatisfaisant qu'ont déploré les précédents éditeurs. À coup sQr, les propositions avancées ne prétendent pas offrir une solution définitive, le texte lui-même n'a pas fini d'être enrichi. Cette étude entend ouvrir des pistes nouvelles pour le classement, elle avance, non sans précaution ni risque, quelques hypothèses inédites, qui doivent, pour être validées, être confrontées à l'intégralité de la documentation historique dionysienne et de sa tradition manuscrite. Il nous faut commencer par ce qui a fait naître l'interrogation sur la validité du classement traditionnel, à savoir d'une part l'enquête sur l'histoire du texte et sa double contextualisation, d'autre part l'histoire de ses éditions successives et leurs contradictions. De
A. Kiessling le note dans sa préface (1870, p. xxv) : Noua fragmenta quœ ex Escorial.ensiet Parisino libro accesserunt suis locis inserui, ordine uolgato plerum7
que seruato, quem si emendare uoluissem, certe XIII, 10- fin. ante XIII, 6 collocanda erant. Nolui autem eclogarii Ambrosiani consilium corrigere. C'est la comparai-
son avec la chronologie livienne qui autorise cette hypothèse d'une inverque nous avons perdu et sur lequel une permutation de cahiers est possible est celui des manuscrits ambrosiens, unique source dans la tradition du livre 13. sion. L'~
88
SYLVIE. Pl1TIA
là, sont nées des objections au classement actuel et la proposition d'une refonte appuyée sur des principes qu'il faudra expliciter et illustrer. Enfin nous envisagerons les conséquences de ces choix au plan du commentaire historique. Le lecteur s'étonnera légitimement que nous ayons donné à cet article une longueur inhabituelle : nous avons voulu livrer ici, avec autant d'exhaustivité que possible, la documentation rassemblée sur un dossier complexe. La publication concomittante des livres 14-20 à laquelle nous avons collaboré ne pouvait accueillir l'ensemble des données et des résultats, non plus qu'exprimer les doutes que nous conservons. Conséquemment la présente étude se veut le complément de cette édition commentée et collective. Elle s'appuie naturellement beaucoup sur les travaux menés par le groupe universitaire aixois sur Denys d'Halicarnasse : je dis ici toute ma dette envers les collègues du séminaire•. Pour autant, il va de soi qu'ils sont exonérés des critiques que susciteront les propositions avancées pour ce nouveau classement. 1 - LA TRANSMISSION DIONYSIENS:
MANUSCRITE DES DERNIERS LIVRES PAR QUI? POURQUOI? POUR QUI?
A. Œuvre complète ou résumé?
Nous ne savons presque rien sur la fortune qu'ont connue les Antiquités romaines après la mort de D. H. et sommes encore moins renseignés sur celle des derniers livres. L'ouvrage original paraît avoir circulé sous deux formes, l'une intégrale et l'autre résumée. Les A. R. sont citées par le grammairien /Elius Hérodien, un contemporain de Marc-Aurèle, auquel a probablement emprunté le lexicographe du VJcsiècle Stéphane de Byzance, sans qu'on sache bien si ce dernier lisait directement D. H. ou déjà des citations de D. H. 9 Des discussions stimulantes avec Emmanuèle Caire et Renaud Robert ont tout particulièrement nouni cette enquête, qui leur doit bien des améliorations. J'exprime aussi mes remerciements, pour leur collaboration, à Édith Parmentier, qui a vérifié certaines leçons du manuscrit Tur. C 980 à la Bibliothèque municipale de Tours, ainsi qu'à Raphaële Mouren, qui a contrôlé à la BSB de Munich le Mon. B 267. 9 Les œuvres d'Hérodien sont éditées selon des principes très contestés : le corpus Herodianum est connu par des épitomai, et pour partie par l'intermédiaire de sources postérieures qui l'utilisent - tout particulièrement Stéphane de Byzance; la dimension originale de la source n'est pas facile à repérer. Les passages tirés de D. H. proviennent de diverses œuvres du grammairien : Ka9oÀ.llCTI7tpoocp6ia; TTepi6p9oypacpiaç;et peut-être un nepi naprovuµmv.Les ouvrages d'...EliusHerodien sont rassemblés par A. Lentz, Herodiani Technici reliquiœ, dans Gmmmatici Grœci, 3, Leipzig, 1867-1870. Sur le grammairien et la complexe question du 8
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L'œuvre intégrale et l'abrégé étaient encore lus au IXe siècle par Photius qui les commente dans sa Bibliothèque Historique 10• Quant au résumé en cinq livres, dont parlent respectivement Stéphane de Byzance11et Photius, l'auteur en est incertain et plusieurs hypothèses ont été défendues à leur tour par les chercheurs: primo D. H. luimême aurait abrégé son œuvre quoiqu'il refusât ce type d'épitomè dans la préface du livre 1 des A. R. 12; secundo l'auteur serait un rhéteur homonyme et son lointain parent qui vécut au nesiècle après Jésus-Christ; tertio on aurait affaire à un autre abréviateur tardif, resté totalement inconnu. Quarto la possibilité d'une confusion entre l'épitomè et le liber 1tt:plxpovmv13 a été envisagée par J. Hudson le premier, suivi par Boivin l'aîné 14• Contre cette dernière hypothèse, signalons un passage de la Souda 15, où figure la mention des Chronika de D. H. pour un auteur, Euripide, qui ne paraît pas mentionné dans ce que nous possédons des A. R. Dès lors les Chronika et l'épitomè seraient bien deux ouvrages distincts. Il paraît en tout cas peu probable, pour D. H. comme pour Polybe par exemple, que nous lisions des excerpta réalisés dès l'Antiquité et transmis comme tels 16• corpus Herodianum, voir H. Schultz, RE, VIII, 1, 1912, p. 959-973, s. u. Herodianus n° 4; A. R. Dyck, .-Elius Herodian : Recent Studies and Prospects for Future Research dans ANRW, 34.1, 1993, p. 772-794. '°Phot. Bibl 83-84. 11 Pour les fragments qui nous concernent, les notices des Ethnica consacrées à Koriolla (KopioUa p. 374, 1.9-11) et Arikia ('Ap1Kia p. 118, 1.10-11) sont réputées appartenir au livre 5 de l'épitomè dionysienne. Nous renvoyons à l'édition A. Meineke, Berlin, 1849. Sur la constitution de ce lexique, voir encore E. Honigmann, RE, ID, A, 2, 1929, p. 2369-2399, s. u. Stephanos Byzantios n° 12. 12 D. H. 1.5.4, 1.63 et 11.1.3 : l'auteur se démarque des tct:cpaÀ.111coot:1ç t1ntoµal ncivu Ppaxeta1, «les résumés sommaires et presque succints• de ses devanciers; il veut écrire une histoire détaillée (à1Cp1J3ci>ç ypacpdoa iotopia). 13 D. H. l'utilise lui-même en 1.74-75 et Clément d'Alexandrie en fait mention (Strom. 1.102.1). 14 J. Hudson, Dionysii Halicamo.ssensis opera omnia grœce et latine in duos tomos distributa, 2 vol., 1, AIONYJ:IOY TOY AAIKAPNAD:Eru: nu: POMAIKtu: APXAIOAOrlAl: TA UlZOMENA, Dionysii Halicamassensis Antiquitatum Romanarum Libri quotquot supersunt, e Theatro Sheldoniano, Oxford, 1704. Boivin l'aîné reprend l'idée d'une confusion des deux œuvres {«Chronologie de Denys d'Halicarnasse» dans Mémoires de littérature tirés des registres de l'Académie royaledes inscriptions et belles-lettres, Depuis le renouvellement de cette Académie jusqu'en 1710,tome 2, Paris, Imprimerie royale, 1736, p. 373-409, spéc. p. 380-381; repris et résumé en latin par J.-A. Fabricius, Bibliotheca Grœca, Hambourg, 17954,4, p. 394) : Epitomen il/am et librum de temporibus fuisse unum idemque opus, aut librum quemdam epitomes fuisse canonem temporis. 15 Suidas 2.3694, p. 468, éd. A. Adler, 1928, s. u. Eùp1ni~f1Ç. 16 Isaac Casaubon avait soutenu cette idée à propos des livres polybiens, rappelant, sur la foi d'un passage de Plutarque (Brutus 4.8), que, durant la bataille de Pharsale, Brutus avait rédigé une VO'!'lÇde Polybe. Cette hypothèse n'est pas validée par les chen:heurs (cf. J. Moore, Polybiana, dans GRBS, 12, 1971, p. 412-449, spéc. p. 435-436).
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Ces débats sur l'existence d'une version abrégée de l'œuvre dionysienne ont été alimentés par la découverte, due à Angelo Mai, de larges extraits figurant dans deux manuscrits ambrosiens 17• Pour quelques passages, ces copies présentaient des résumés d'épisodes plus amplement connus par d'autres traditions manuscrites; du coup, l'inventeur, dans un premier temps, a cru, à tort, avoir découvert une version de l'épitomè dionysienne. Nous reviendrons en détail sur la complexe nature des extraits ambrosiens. Ce que nous voulions rappeler dans ce préambule, ce sont les quelques informations que nous possédons sur la survie antique du texte dionysien. Finalement, les Antiquités romaines ne sont que rarement citées sous l'Empire; pourtant Plutarque leur emprunte (par exemple dans sa Vie de Pyrrhus) et Appien surtout y puise largement dans les livres qu'il consacre aux guerres samnites ou aux guerres galliques. Il est rare que la version d'Appien soit en discordance avec la version dionysienne et l'historien du nesiècle est bien utile pour suppléer certaines lacunes des A. R. Quelle explication à cela? Comme le rappelle Michel Casevitz 18, si aucun poète ou aucun philosophe ne rendent obsolète l'œuvre de leurs devanciers, il n'en est pas de même pour les historiens, dont les continuateurs reprennent et poursuivent les travaux, les frappant de péremption et les vouant à l'oubli. Les livres de D. H. ont connu manifestement deux traitements différents : les dix premiers livres, et bon an mal an, le onzième livre, qui portaient sur les origines de Rome et les débuts de la République, ont rencontré plus d'engouement - ou moins connu l'injure du temps; les neuf derniers, en revanche, peuvent avoir pâti de la comparaison avec Tite-Live ou bien avoir été considérés comme dépassés par certains livres d'Appien ou par les débuts de /'Histoire romaine de Dion Cassius. Dans la réflexion sur la transmission du corpus, il ne faut pas perdre de vue ces critères, qui intéressent la réception du texte dionysien, son utilisation et, pourraiton dire, sa dilution dans les œuvres d'historiens postérieurs. B. Les anthologies byzantines du
xesiècle
Le tournant dans la transmission du texte - laissons de côté sa
translittération en minuscules, dont nous ignorons tout - fut son intégration à l'Encyclopédie que Constantin VII Porphyrogénète fit réaliser à Byzance entre les années 945 et 959. Ce projet reposait sur une division thématique selon cinquante-trois grands sujets entre
Ambr.Q 13 sup. et A 80 sup. Voir dans ·ce volume, M. Casevitz, Sur les fragments des historiens grecs, particulièrement Diodore de Sicile, p. 449-460, spéc. p. 453. 17 11
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lesquels l'œuvre des historiens anciens était distribuée 19• Le primat désormais était accordé à une organisation thématique des œuvres historiques, parce que jugée seule capable de démêler le foisonnement des événements narrés chronologiquement. L'histoire était d'abord recherchée pour son efficacité pédagogique, donc amputée d'une partie de sa matière au profit d'une sélection. Les deux modèles, tant celui de la chorographie, que celui des histoires universelles, avaient fait faillite. L'anthologie thématique répondait avec pragmatisme aux finalités morales que le pouvoir politique assignait à la discipline. L'édition des fragments que nous lisons de nos jours est le résultat de cette double infidélité : d'abord, l'infidélité des érudits byzantins à l'œuvre de D. H., qu'ils abrégèrent en effaçant l'unité narrative et la logique structurelle des Antiquités romaines; ensuite, celle des éditeurs modernes, qui, tout en prétendant reconstituer l'ordre dionysien, trahirent la construction thématique byzantine, en son temps cohérente et aujourd'hui démembrée. Une bonne moitié des fragments dionysiens qui nous sont connus ont cette origine constantinienne. Ils ont fait l'objet de sélections multiples et de filtres successifs : ceux de la transmission antique mais aussi des compilateurs byzantins qui étaient chargés de composer les anthologies. Il nous faut donc ici souligner une spécificité des fragments : ils ont finalement plusieurs auteurs et ont été adressés successivement à plusieurs publics. Parler des destinataires des A. R. n'a pas la même signification selon que l'on parle des premiers livres de l'œuvre ou des fragments. Bien sftr, la question des lecteurs grecs auxquels D. H. montrerait que les Romains sont des Grecs a ses fondements dans la perspective première des A. R.; mais pour la partie de l'œuvre connue par des anthologies diverses, sans prétendre que la question n'a plus du tout de sens, il faut avoir en tête les compilateurs et leurs lecteurs du monde byzantin, qui viennent se surajouter aux vues initiales de l'auteur antique. Quand nous lisons ceux des fragments de D. H. qui sont connus par la compilation constantinienne, nous en apprenons autant sur les goO.ts et les centres d'intérêt des Byzantins du x~siècle, que sur l'idéologie des historiens augustéens. En l'espèce, nous sommes face à une anthologie qui serait de plus privée de certaines pages. Les Byzantins ont prélevé des extraits dans le corpus historique grec pour présenter, selon le mot d'A. Dain 20 , un digest. Voir dans ce volume, B. Flusin, Les Excerpta constantiniens : logique d'une anti-histoire, p. 537-559, spéc. p. 553-555. JO A. Dain, L'encyclopulie de Constantin Porphyrogénète, dans BAGB, 4, 1953, p. 64-81. Une expression voisine est reprise par P. Brunt, On Historical Fragments and Epitomes, dans CQ, 30-2, 1980, p. 477-494, spéc. p. 483 («a sort of lwuier's Historical Digest aminged by topics • ). 19
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Sur les cinquante-trois thèmes que le souverain byzantin avait choisis, très peu sont conservés et seulement trois sont particulièrement bien représentés dans la tradition manuscrite dionysienne : le traité sur les Ambassades desRomains auprès desnations étrangères; celui sur les Vices et vertus; celui sur les Complots. Sans parcourir ici l'histoire de ces trois traditions manuscrites, bien connue, nous voudrions mettre l'accent sur les particularités qui affectent les fragments dionysiens 21. - Le traité sur les Ambassades L'ouvrage est divisé en ambassades des Romains auprès des nations étrangères d'un côté (Ilepi 1tpeaptrov téi>v'Proµairov 1tpoç f8vt1eouç/De legationibus Romanorum ad gentes) et en ambassades des nations étrangères auprès des Romains de l'autre (Ilepl 1tpeaptrov t8vi1erov1tpoç 'Proµaiouç/ De legationibus gentium ad Romanos) 22 • Les fragments dionysiens ne gardent trace que des premières, ce qui importe pour l'identification des manuscrits car il s'agit bien de deux traditions manuscrites distinctes, tantôt combinées mais souvent séparées23. Depuis le XVIe siècle, il est remarquable que le titre luimême de l'œuvre a été transformé : là où le grec évoquait un traité sur les Ambassadeurs, la tradition latine a imposé les Ambassades. Sans doute D. H. figurait-il à l'origine dans le traité des Ambassades
21 Sur les conditions dans lesquelles les compilations étaient copiées, il faut revenir aux articles classiques de J. lrigoin, Pour une étude des centres decopie bylllntins (2), dans Scriptorium, 13-2, 1959, p. 177-209; Id., Centre decopies et bibliothèques, dans Byl.llntine Books and Bookmen. A Dumbarton Oaks Colloquium, Washington, 1975, p. 17-27. 22 L'essentiel sur cette tradition manuscrite, avant même la présentation dans l'édition Büttner-Wobst, figurait déjà dans U.-Ph. Boissevain, Cassii Dionis Cocceiani historiaru.m Romanaru.m quœ supersunt, Berlin, 1895, vol. 1, prœfatio. Les Ambassades des étrangers auprès des Romains comportent aujourd'hui dixneuf auteurs (Polybe, Flavius Josèphe, Zosime, Dexippe, Socrates, Pierre le Patrice, Diodore de Sicile, Dion Cassius, Hérodote, Thucydide, Agathias, Ménandre, Théophylacte, Procope, Arrien, Appien, Malchus, Priscus et Eunape); les Ambassades des Romains auprès des étrangers conservent seize auteurs (Pierre le Patrice, Georges le Moine, Jean d'Antioche, Denys, Polybe, Appien, Zosime, Flavius Josèphe. Diodore de Sicile, Dion Cassius, Arrien, Procope, Priscus, Malchus, Ménandre et Théophylacte). Sur les excerpta contantiniens réalisés à partir des historiens grecs classiques, voir O. Zosel, De excerptis historicis Constantini Prophyrogenneti iussu confectis quœstiones Herodotœ, Thucydideœ, Xenophonteœ, Gryphiz, 1913. 21 Pour le De legationibus Romanoru.m ad gentes, les témoins de la tradition sont les manuscrits Brux. 11301-11316;Mon. B 267; Pal. gr. 413; Par. gr. 2463; Scor. R III 14; Vat. gr. 1418. Nous renvoyons à notre édition collective des livres 14-20 de D. H. pour de plus amples détails sur la partie dionysienne de ce traité.
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étrangères auprès des Romains, mais les copies qui en sont parvenues sont mutilées 24• La question des critères de sélection se pose. C'est une interrogation récurrente pour chaque série de fragments et parlois, nous avons un début de réponse. Dans le cas des textes dionysiens, nous avons conservé cinq récits d'ambassades : ils intéressent la deuxième guerre samnite et le conflit avec Néapolis en 327; le déclenchement de la troisième guerre samnite en 298; l'ambassade de Postumius Megellus à Tarente en 282; une partie de l'ambassade de Fabricius auprès de Pyrrhus en 280; l'ambassade des Romains auprès de Ptolémée Philadelphe en 273. Pourquoi ces cinq ambassades avaient-elles précisément été conservées? D'autant que a contrario, nous pouvons nous étonner que d'autres ambassades très connues, qui se déroulent dans la même tranche chronologique, soient totalement absentes de la source dionysienne telle que nous pouvons aujourd'hui la lire. Prenons un exemple précis: s'il est une ambassade célèbre lors de la guerre entre Pyrrhus et Rome, c'est bien celle de Cinéas. Or nous ne lisons plus une ligne sur le sujet et le nom même de Cinéas a totalement disparu des extraits dionysiens - alors qu'il figure par exemple chez Plutarque ou chez Appien, dont les A. R constituent en l'espèce la principale source -, tandis que d'autres fragments dionysiens conservent le nom de conseillers ou de compagnons de Pyrrhus que nous sommes bien en peine de connaître par ailleurs. L'absence des épisodes liés à Cinéas est en réalité tout à fait normale, prévisible même: il s'agissait d'une ambassade conduite par des étrangers auprès des Romains (donc de la seconde des traditions thématiques à sujet diplomatique). Le nom même de D. H. ne figure pas, ou ne figure plus, dans la liste des dix-neuf auteurs compilés sur ce thème alors qu'il est mentionné parmi les seize historiens compilés sur le thème des ambassades romaines (certains noms apparaissent dans les deux séries : Polybe, Diodore, Appien, Dion). D. H. parlait très probablement de l'ambassade de Cinéas, et de Cinéas lui-même 25 • L'excerpteur n'a pas pour autant mal fait son
Pour le De legationibus gentium ad Romanos, les représentants de la tradition sont les manuscrits Ambr. N 135 sup.; Brux. 11317-11321;Mon. A 185; Scor. R III 21 et R III 13; Neap. III B 15. Ce dernier manuscrit est celui qu'A. Agustin avait expédié à F. Orsini, qui préparait l'editio princeps du traité (voir L. Pernot, La collection de manuscrits grecs de la maison Famese, dans MEFRM, 1979, 1, p. 457-506 et spéc. p. 488-489). Le Vat. gr. 1418 contient dans son début des extraits des Ambassades des nations étrangères auprès des Romains, mais il s'agit seulement des fragments polybiens. Pour le détail de ces questions, que nous cherchons pas reprendre ici, il reste commode de se reporter à la préface de l'édition Büttner-Wobst, 1903, p. IX-XIV. 15 Un des fragments (20:E = 20.6.3 KJ) pourrait bien se rapporter à la deuxième ambassade de Cinéas en 278, mais il est connu par la tradition ambro24
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travail au contraire : il a respecté la définition de son thème; et il ne faut pas davantage évoquer une mauvaise conservation des textes, du moins pour le traité De legationibus Romanorum ad gentes. L'excerpteur des Ambassades chez les Romains, de son côté, garde bien trace de l'ambassade de Cinéas chez Appien, qui figurait dans la liste des dix-neuf. Dès lors, et à supposer bien siir que cette liste de dixneuf auteurs soit aujourd'hui lacunaire et que D. H. en ait fait partie, deux hypothèses sont en présence: ou bien l'excerpteur du De legationibus gentium ad Romanos avait choisi ses textes en empruntant aux deux auteurs et nous avons perdu ce qui venait de D. H.; ou bien le récit d'Appien venait remplacer celui de D. H. et on n'empruntait plus à ce dernier la narration de l'épisode. Une autre des difficultés que présentent les textes consacrés aux Ambassades - tous issus de l'archétype possédé par Juan Paez de Castro, irrémédiablement perdu depuis l'incendie de l'Escorial en 167126 - tient à l'identification même de notre auteur car le début des extraits dionysiens sélectionnés pour le De legationibus est vraisemblablement perdu. Ainsi dans le principal témoin que nous avons conservé, le manuscrit Vat. gr. 1418, si le nom de D. H. figure bien dans la liste des auteurs que la préface du traité des Ambassades comporte (folios 82v et 83•), l'incipit des fragments dionysiens n'est pas identifé avec certitude. Au folio 9()r, figure un court extrait de Jean d'Antioche et à la suite, sans alinéa, sans annotation de la main du copiste, vient le début du fragment attribué à D. H. La séparation même entre les deux auteurs est variable selon les éditeurs 27 • Quel
sienne. Un rapprochement avec Appien (Sam. 11.1-2) autorise cette hypothèse: Appien montre l'ambassadeur d'Épire apportant force cadeaux à Rome, destinés aux hommes et aux femmes, et ces dernières sont présentées comme plus wlnérables face au luxe. Il reste que la réalité d'une deuxième ambassade de Cinéas a été discutée, du fait de la contradiction entre les sources. Il nous a paru que D. H. serait la source principale d'Appien, tandis qu'au livre 9, Dion Cassius(= Zonar. 8.4) a pu suivre une autre tradition qui fond deux épisodes en un, comme c'est le cas chez Plutarque (Pyrrh. 18.4-5). Voir Denys d'Halicarnasse, Rome et la conqtdte ... , p. 433-434. 26 Voir dans ce volume, l'article de R. Mouren, La re.découvertedes fragments de Denys... , p. 28-31. Nous possédons encore la description de cet original dans les catalogues les plus anciens de l'Escorial; voir G. De Andres, Catalogo de los codices griegos desaparecidos de la real Biblioteca de El Escorial, Madrid, 1968, n° 77, [= Scor. BI 4]. Ce parchemin était présenté comme pouvant dater du XI• siècle et comportant 305 folios. Les notices anciennes précisaient qu'il était mutilé à la fin. 27 F. Orsini (1582) considère que le cilla appartient au texte dionysien. Il ajoute un icai et enchaine sur 6i6tt toùç cpU.Ouç. C. de Boor (Excerpta de legationibus ... , 1903) garde le icaipourtant absent du manuscrit Vat. gr. 1418et commence sur ical 6i6tt. Le choix d'Orsini est repris par A. Kiessling (1870), K. Jacoby (1905), ou E. Cary (1950). Or le cilla peut aller avec la fin du fragment de Jean
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que soit le choix opéré, le premier des fragments dits dionysiens serait le seul de toutes les Ambassades à ne pas commencer par le traditionnel 6-n, qui marque le début d'une section dans les excerpta constantiniens, ou du moins celui-ci ne figurait-il qu'au début du fragment de Jean d'Antioche. Cette particularité ne trouve pas d'explication satisfaisante, sauf à dire que presque tous les extraits de Jean d'Antioche sont perdus, ainsi que les excerpta des livres dionysiens antérieurs au livre 15 (et ils le sont déjà sur l'exemplaire de Paez vraisemblablement). De fait, les copies tirées du même archétype présentent des caractéristiques comparables 28 • Si la mention spécifique du début manque, qu'en est-il de la mention marquant traditionnellement la fin d'un auteur, laquelle pourrait constituer un repère d'identification? Une seule, parmi les copies exécutées par Andreas Darmarios et tirées de l'archétype appartenant à Paez de Castro, présente la mention to téÂ.oç tflç icnop{aç Atovua{ou29 , comme si les excerpta du traité étaient nettement achevés pour cet auteur. Sur cet exemplaire (f. 3v-4r), la liste des auteurs qui suit 1'6fl:68.:mçdu traité contient sans équivoque le nom de D. H. entre Jean d'Antioche et Polybe (c'est aussi le cas pour l'exemplaire du Vatican). Mais ie copiste a marqué d'un blanc la fin du texte de Jean d'Antioche, il a signalé la lacune et entamé l'extrait dionysien sur un nouveau folio. Le début et la fin de ces épisodes dionysiens étaientils mieux repérés sur l'archétype? Nul ne peut désormais le dire. L'exemplaire du texte présent dans le Pal. gr. 413 (f. 7v_22r)offre une intéressante comparaison. Ce manuscrit n'appartient pas à la série copiée par A. Darmarios. Le scribe est lacopos Episcopopoulos, qui travailla au service de la bibliothèque Vaticane dans la deuxième d'Antioche et l'ajout du 1ea{est alors sans fondement. L'incipit du passage dionysien, de toute façon amputé, doit selon nous être plutôt replacé à 6l6tl. Seule une des copies exécutées par A. Darmarios (voir note 29) laisse croire que le 1ea{fait partie du texte dionysien. Dans un cas comme dans l'autre, c'est l'absence d'un incipit par ôtl qui est importante. 21 C'est aussi le cas pour le Mon. B 267, où les fragments dionysiens sont copiés sous le seul nom de Jean d'Antioche. Sur ce manuscrit et celui qui contient les Ambassades des nations étrang~res auprès des Romains (Mon. A 185), voir H. Nissen, Kritische Untersuchungen aber die Quellen der vierten und fanften Delcadedes Uvius, Berlin, 1863, Anhang W. Die lconstantinischen Gesandschaftsuurpte, p. 313-323 (spécialement p. 313-314). 29 Scor. R m 14 f. 32v. Ceci étant, le début de l'extrait (f. 12•)commence bien par 1ea{6l6n, sans mention de D. H., dont le texte s'enchaîne à la suite de Jean d'Antioche. Une mention marginale (f. 11•,donc après l'auteur précédant D. H.) signalait un passage effacé: t~iTl'IÀovrjv U1to tflç àpxai6t11toç. Mais la lacune porte autant sur la fin de Jean d'Antioche que sur le début de D. H. Ce manuscrit, quoique copié aussi par A. Dannarios, ne compte pas parmi les exemplaires d'Agustfn (des copies restées en Espagne et entrées à la mort d'Agustfn dans le fonds de l'Escorial ont par ailleurs également brOlé en 1671): il s'agit d'un exemplaire ayant appartenu à Antoine de Covarrubias.
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moitié du XVJe siècle 30• La coupure entre le texte de Jean d'Antioche et le début des fragments attribués à D. H. n'est marquée par aucune annotation, et le blanc qui pourrait indiquer une lacune ou un changement d'auteur passe après àW. Là encore, si la préface reproduit bien le nom de D. H. (f. 2v), celui-ci ne figure pas dans le texte. La mention tè>ttÂ.oç tflç ia,;opiaç l\10VUuvons comparer le texte original et la compilation byzantine 42 • A l'évidence le cahier où figuraient les premiers extraits de D. H. est perdu 43 • Or pour les autres traités thémaByzance et les fragments des A. R., que ni K.iessling ni Jacoby n'avaient relevés, y sont signalés. 39 H. de Valois, Polybii, Diodori Siculi, Nicolai Damasceni, Dionysii Halicar., Appiani Alexandr. Dionis et /oannis Antiocheni Excerpta ex Collectaneis Constantini Augusti Porphyrogenetœ, Sumptibus Mathurinis Du Puis, Paris, 1634. 40 Sur l'histoire du manuscrit et sa complexe pagination (dues à des reliures successives et pour partie malencontreuses), voir entre autres : E. Gros éd., Dion Cassius, Histoire romaine, t. 1. Paris, 1845, p. LVII-LXXXIV; A. Dorange, Catalogue des manuscrits de la Bibliothèque de Tours, Tours, 1875, p. 428-429; H. Omont, Catalogue des manuscrits grecs des départements, Paris, 1886, p. 63-65; Th. Büttner-Wobst, Excerpta de uirtutibus et uitiis, t. 2-1, 1906, prœfatio, spéc. p. IX-XX (et les compléments d'A. G. Roos, t. 2-2, 1910,prœ{atio); Th. Büttner-Wobst, Der codex Peirescianus. Ein Betrag zur Kenntniss der Excerpta desKonstantinos Porphyrogennetos, dans Berichte aber die Verhandlung der kiJniglich slichsischen Gesellschaft der Wissenschaften zu Leipzig, Philologisch-historische Klasse, 45, 1893, p. 261-352 (spéc. p. 312 sq.); M. Collon, Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France, Départements, 37, 2, Tours, Paris, 1905, p. 704706; J. Irigoin, Pour une étude des centres de copie byzantins, dans Scriptorium, 13, 1959, p. 177-209 (spéc. p. 178-181et planche 17). Signalons qu'un apographe partiel du Tur. C 980, le manuscrit Barb. gr. 231 f. 104•-105•(XVII• siècle), comporte un extrait du livre 20.1 de D. H. (depuis ·0ti tqn1xavoOvratôv Il6ppov jusqu'à t!;tppaaev); cette copie fut faite sur ordre de Peiresc pour Holstein (J. Mogenet, Codices Barberiniani Grœci, vol. 2, Rome, 1989, p. 82-83). 41 Voir dans ce volume, É. Parmentier-Morin, us fragments de Denys d'Halicarnasse attribués à Nicolas de Damas ... , p. 461-479. 42 D. H. 8.61.1-62.3 (partim). 43 Si l'on se fie au fait qu'en moyenne, la partie consetvée du manuscrit comporte quatre cahiers par auteur et à supposer que les extraits aient été de longueur totale comparable, il manquerait à peu près les deux-tiers des pages tirées de D. H. dans le De uirtutibus. Nous donnons cette estimation à titre indicatif,
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tiques, il est frappant de constater que les excerpta ne concernent jamais la première décade dionysienne, mais toujours la seconde. L'hypothèse d'une séparation à date haute de l'œuvre en deux branches manuscrites coïncidant peu ou prou avec les deux décades est-elle plausible (peu importe à notre raisonnement le livre 11et les particularités de sa transmission)? Pourquoi les excerpteurs constantiniens n'ont-ils pas également compilé le début des A. R., ou du moins pourquoi semblent-ils l'avoir fait si peu? Nous sommes de nouveau confrontés à la méthode des excerpteurs, à leurs choix, tout autant qu'aux simples hasards de la transmission des textes 44 • L'œuvre dionysienne a joué de malchance dans au moins deux cas : nous avons vu pour de De legationibus que le début et sans doute la fin manquaient. Pour le De uirtutibus et uitiis, à tout le moins les premiers extraits des A. R. sont perdus. Mais rien ne dit que les premiers livres de l'œuvre fussent largement excerptés et la sur-représentation des derniers livres peut trouver une explication plausible : dans la division générale de l'histoire opérée pour l'entreprise constantinienne, l'histoire biblique venait avant l'histoire grecque qui elle-même précédait l'histoire romaine. Il devenait logique d'utiliser de façon spécifique tel auteur plutôt que tel autre pour une période précise, dans une histoire des mondes vue comme une histoire successive et non présentée comme une histoire parallèle. Parmi les auteurs grecs, D. H. servait assurément à retracer les périodes antérieures à la première guerre punique, avant que l'œuvre polybienne ne prit le relais et n'éclairât l'âge d'or de la République romaine. En théorie, D. H. était le meilleur historien grec qu'on pût utiliser pour la période haute du monde romain, celle de la Rome royale et de la République naissante; mais pour ces siècles, une lecture sélective de l'histoire des peuples ne plaçait pas le monde romain au premier plan. Que pouvaient peser la Rome royale et les débuts de la République face à l'apogée de la Grèce classique? Il est dès lors logique que la sélection constantinienne ait surtout puisé dans les livres dionysiens qui portaient sur des périodes plus tardives de l'histoire romaine, celle de la République moyenne. Cette explication ne contredit pas les évidences de la codicologie : nous avons perdu de larges pans des A. R. compilées au Xe siècle. Mais ce qui a disparu est sans doute assez largement centré sur la deuxième moitié de la première décade et le début de la deuxième
pour souligner l'ampleur de la perte. La fin des extraits dionysiens est en revanche plus sl'.ire: la mention to ttM>Çtflç iatop{aç Alovooiou ·AÀ.ucupVT1CJÇ figure au f. 256•. 44 Voir dans ce volume, B. Flusin, Les Excerpta constantiniens, logique d'une «anti-histoire» ... , p. 540-544.
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décade des A. R., pour des raisons chronologiques (en clair pour des raisons qui tiennent à la chronologie universelle vue par Constantin VII); nous ne croyons guère à une perte de texte ayant affecté uniformément l'ensemble de l'œuvre historique dionysienne. Les premiers livres de D. H. pouvaient à moindre titre s'insérer dans la succession des mondes antiques que la compilation constantinienne recréait, tandis que la deuxième moitié de l'œuvre pouvait être le pilier de la partie consacrée aux origines et au développement de Rome. - Le traité sur les Complots, De insidiis La redécouverte de ces fragments fut tardive et elle ne fut pas immédiatement suivie d'une publication. Un seul manuscrit a conservé ce traité 45, copié au XVJesiècle par Johannes Mauro mates de Corfou 46 pour don Diego Hurtado de Mendoza 47 • Le De insidiis est demeuré près de deux siècles et demi dans la bibliothèque de }'Escorial, il fut connu d'humanistes espagnols qui ne le signalèrent pas au monde savant et des publications partielles de son contenu Scor. n I 11, f. 193'-196•. Sur son histoire, voir : Ch. Graux, Essai sur le fonds grec de l'Escorial, 1880, p. 22; G. De Andres, Catalogo de los Codices griegos de la Real Biblioteca de El Escorial, t. 3, Madrid, 1967, p. 131-133. 46 Sur l'identification de ce copiste (né entre 1510 et 1520 et mort vers 1573), voir E. Gamillscheg, D. Harlfinger, Repertorium der Griechischen Kopisten, Vienne, 1981, 1A,p. 98-99; A. Cataldi Palau, Il copista loannes Mauromates, dans G. Prato, l manoscritti greci tra riflessione e dibattito, Alti del V Colloquio Internationale di PaleografraGreca (Cremona, 4-10 ottobre 1998), 2 vol. texte et 1 vol. planches, Florence, 2000, p. 335-399 (spécialement p. 339 n. 18 pour l'attribution des folios concernés dans ce manuscrit). 47 Né en 1503, il vécut longtemps en Italie. Ayant acquis la confiance de Charles-Quint, il avait été dès 1527 son ambassadeur à Venise, pendant près de vingt ans, et en 1542, un de ses représentants au concile de Trente. Mendoza avait réuni à Venise une riche collection de manuscrits grecs et latins. Ioannes Mauromates était un de ses copistes ordinaires (le manuscrit Scor. n I 11 fut copié en 1543). La colJection de Diego Hurtado de Mendoza fut transportée par bateaux vers l'Espagne en 1552; il mourut en 1575 et ses livres entrèrent en 1576 à l'Escorial. Philippe II avait accepté le don de sa bibliothèque en échange du règlement des dettes qui grevaient sa succession (sur le fonds Mendoza, voir Ch. Graux, Essai sur le fonds ... , p. 163-273). Cette prestigieuse collection comportait à la fois des manuscrits copiés par des Orientaux pour des Orientaux, et des transcriptions effectuées par des Grecs fugitifs en Italie. Mendoza avait acquis nombre de manuscrits en Orient et en avait reçu de Soliman le Magnifique (pour avoir payé la rançon de son fils). Sur ce collectionneur : A. Bravo Garcia, Pedro Camabacas y el fondo Hurtado de Mendol.tl de la Biblioteca de El Escorial: Nuevas atribu~ y correcciones, dans la Ciudad de Dios, 195, 1982, p. 489-494; T. J. Dadson, El mundo cultural de un Mendol.tl del Renacimiento : la bilioteca de Diego Hurtado ~ Mendol.tl, l conde de Melito, dans Bolet(n de la Real Academia Espano/a, 73, 1993, p. 383-432; A. Hobson, Renaissance Book Collecting, Jean Grolier and Diego Hurtado de Mendota, their Books and Bindings, Cambridge, 1999. 45
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n'aboutirent pas 48• Sa redécouverte au XIXe siècle est elle-même entourée de polémiques sur son antériorité : E. Miller, durant la mission qu'il conduisit en Espagne en 1843, identifia le manuscrit mais ne put pas même le copier 9 • Les tensions entre le clergé espagnol carliste et le gouvernement français jugé pro-libéral y firent principalement obstacle. Comme le démontre E. Caire 50 , ce qui paraît en l'espèce avoir intéressé les excerpteurs, c'est moins le détail des Complots que leur déclenchement et leur issue. Ceci est vérifié aussi bien pour l'épisode de la révolte campanienne de 342, que pour la révolte de la legio Campana à Rhégion (280 probablement), même si la seconde est conservée plus en détail. À l'évidence là encore, tous les extraits dionysiens n'ont pas été conservés intégralement dans le seul manuscrit qui donne à connaître ce traité. La traduction même du titre en français nous a paru devoir être revue : la traduction habituelle par «pièges» n'avait pas de pertinence, il s'agit essentiellement de révoltes militaires ou de complots .
.
- Les autres traités constantiniens Quoi qu'on ait cru au début du XIXe siècle à propos des extraits ambrosiens, il n'est pas de texte dionysien qui relève du traité De sententiis (A. Mai en avait fait un temps l'hypothèse 51). En revanche des mentions manuscrites insérées à la fin de certains fragments Ce qui intéressa surtout ces érudits espagnols fut la Vita Cœsaris de Nicolas de Damas. Francisco Pérez Bayer (1711-1794) et Rafael Casalb6n y GeJJ (t1785) voulurent livrer une partie du manuscrit à l'impression. Le premier de ces savants est une figure assez connue, éditeur de Salluste et auteur de travaux sur la langue phénicienne (IA conjuracion de Catilina y la guerra de Jugurta, incluant Del alfabeto y lengua de los Fenices, Madrid, 1772). Mais les conditions générales n'étaient guère favorables à la publication de textes grecs dans l'Espagne du XVIII• siècle. Malgré tout, Pérez Bayer était directeur de la Bibliothèque Royale au moment où ceJJe-ci avait mis au point différents jeux typographiques pour des éditions soignées d'ouvrages scientifiques. Il semblerait, donc, que s'il avait tenu à faire imprimer sa traduction, il aurait eu des facilités (voir M. L. L6pez-Vidriero dans H. Escolar éd., Historia Uustradadel libro espaflol, Fundaci6n Germân Sânchez Ruipérez, Madrid, 1994). Sur toutes ces questions concernant l'histoire culturelJe de l'Espagne moderne, je suis tout particulièrement redevable envers Anna Gudayol (Biblioteca de Catalunya, Seccfo de manuscrits), qui m'a très obligemment fourni son aide. 49 Bibliothécaire du Corps législatif, et lui-même membre de l'Institut, il fut chargé d'une mission d'archives par le Ministère français de 11nstruction publique. Sur le contexte de la mission, voir É. Parmentier, Nicolas de Damas, monarchiste ou républicain, dans Ch. Avlami éd., L'Antiquité classique au XIX•siicle, Un exemplum contesté?, Paris, 2000, p. 313-335, spéc. p. 315-316 et 327-328. 50 Dans ce volume, E. Caire, Causalité et explication historique ... , p. 505-535, spéc. p. 529. 51 A. Mai, Scriptorum ueterum noua col/ectio, 2, 1827, prœfatio, p. xvn. 41
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évoquent la présence de citations dionysiennes dans le traité Ilepl A11µrrrop1li>v, Sur les discours au peuple 52 • Il en est de même pour le Ilepl CJtpŒtT)î'lµatli>v, Sur lesstratagèmes 53 • Ces thèmes ne nous sont pas paivenus. Pour le dernier, il ne s'agit vraisemblablement pas des mêmes sélections que celles dont nous avons trace au livre 20 des A R. (voir infra). - Les stratègèmata, «l'art du général• Volontairement, nous n'avons pas abordé sous la rubrique constantinienne les passages du livre 20 consacrés à la bataille d'Ausculum, qui opposa Pyrrhus et les Romains 54 • L'origine de ce récit, connu par un manuscrit rapporté du mont Athos par Minoïde Minas 55 , a été diversement interprétée. Ce manuscrit a une histoire compliquée 56 : pour la partie centrale, la plus ancienne, où figurent les passages dionysiens, il remonte au xesiècle mais-d'autres folios sont datés du XVIe siècle, époque où furent reliés ensemble ces difD. H. 12.1; 15.G. n D. H. 15.G; 19.K. 54 D. H. 20.C. ss Par. Suppl. gr. 607 f. 88•-90-. Ces passages figurent aussi dans un apographe copié au XIX• par Minoïde Minas (Par. gr. 485, f. 1-6), directement sur le codex précité et non sur un éventuel autre exemplaire. Minoi'.de Minas avait été chargé de mission par le ministre de 11nstruction publique pour rapporter d'Orient des manuscrits. Dans son rapport, il datait le Par. Suppl. gr. 607 du XII• siècle, ce qui est erroné (cf. infra). Des extraits de ce rapport sont cités par C. Müller au début de l'appendice où il donne l'editio princeps du manuscrit (C. Müller, Sièges de différentes villes, Fragments du livre XX de Denys d'Halicarnasse, 001\IOPKJAI âlA4IOPON noAEnN, EK nu: âlONYl:IOY ŒTOPIAl: BIBA. K' dans Opera Flavii Josephi, vol. 2, Appendice, Paris, 1847); il fut en fait publié dans le Moniteur (5 janvier 1844). La correspondance de Minoi'.deMinas pendant sa mission en Orient (1839-1843) est conservée dans le Par. Suppl. gr. 1251. 56 H. Schône (überden Mynascodex der grieschichen Kriegsschrifrsteller in der PanserNationalbibliothek, dans RhM, 1898, p. 432-447, spécialement p. 445-447) a retracé l'histoire du manuscrit et de ses différentes composantes. Il remarque que parmi les 238 manuscrits rapportés de Byzance à Venise par Giovanni Aurispa au printemps 1423, il y en avait un comportant des illustrations et contenant le H. Schône identifiait les folios 18-87 du codex livre d'Athénée Il&pi MT1X«VT)µatrov. Par. Suppl. gr. 607 (car aucune autre des copies de ce traité d'Athénée n'offre ce type d'illustrations). Par la suite, ces feuilles auraient été assemblées avec les autres folios dans la bibliothèque de Matthias Corvin (1458-1490; sur ce grand collectionneur, voir A. Hevesy, La Bibliothèque du roi Matthias Corvin, Paris, 1923). Les collections du roi de Hongrie furent éparpillées à sa mort, et le manuscrit sur les Stratagèmes fait partie de ceux qui, après le pillage de Buda en 1529 (consécutif à la victoire des Turcs à Mohacs en 1526) furent emportés à Constantinople. On ne sait quelle circonstance le fit concrètement arriver vers le couvent de Vatopède au Mont Athos, sans doute au milieu du XVI• siècle. Après son •achah par Minas (qui pourrait l'avoir tout simplement volé), et à la mort de ce dernier, il passa à la Bibliothèque impériale française en 1864. 52
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férentes composantes 57• C. Wescher, dans sa préface 58, estimait que la partie centrale du manuscrit datait du début du xesiècle, donc situait probablement cette copie avant l'entreprise constantinienne. S'appuyant sur l'écriture et les particularités de l'orthographe, sur celles des abréviations, analysant les erreurs du copiste, C. Wescher voyait dans les extraits historiques de la partie centrale du codex une transcription directe d'un original en onciales, écrite sous la dictée 59 • À l'inverse, J. Moore 60 reliait cette série de textes consacrés à la poliorcétique à l'entreprise constantinienne; il y voyait deux segments, un nepi vmaµtvov O A 6m>l6µ&vov Struve, edd. v&aVl&ooµtvou edd. 19.R: v&aVl&uµtvou Q A 19.T : ~v 6 6f\µoç O A iiv 6 6f\µoç edd. Il est sOr que le manuscrit Q 13 sup. n'est pas directement le cahier sur lequel l'excerpteur a travaillé mais en constitue à tout le moins une copie: ainsi en 16.Cet 16.D,la faute commise par le copiste n'est pas compréhensible par rapport aux A. R. mais par rapport à leur version excerptée 86 • L'anticipation du participe àyrovlÇoµ&volà la fin du paragraphe 16.C ne se comprend que par rapport à la ligne suivante, où il figure bel et bien, mais les deux passages n'étaient à l'évidence pas immédiatement successifs dans le texte complet des A. R. Les manuscrits ambrosiens ne sont pas tout à fait jumeaux : certes ils n'offrent qu'assez peu de variantes mais si les deux codices dérivent bien du même archétype, ce qui paraît très probable, le maS'ils dérivaient l'un de l'autre, le manuscrit A 80 sup. dériverait forcément du Q 13 sup. dans la mesure où ce dernier contient de plus longs extraits. Dans le ~e sens, J.-H. Sautel, Sur un Épitomi des Antiquités romaines de Denys d'Halicarnasse : les Ambrosiani A 80 sup. et Q 13 sup. Complément à l'idition du livrt Ill, dans RHT, 30, 2000, p. 71-92, spéc. p. 78, n. 18; uide contra V. Fromentin, Les manuscrits récents du livre / et l'Epitomè des Antiquités romaines de Denys d'Halicarnasse, dans RHT, 1994, p. 93-115,spécialement p. 112,où, se fondant surie livre 1, l'auteur faisait de l'Ambr. A 80 le modèle du Q 13 sup. Le manuscrit A 80 sup. ne contient aucun texte qui ne figure aussi dans l'autre codex. Il faut, à notre sens, renoncer à faire dériver un manuscrit de l'autre et en rester à l'hypothèse prudente selon laquelle les deux manuscrits milanais dérivent d'un même modèle. 15 Il n'est pas possible de conduire ici une étude de tous les lieux variants entre les deux manuscrits. Signalons que cette étude est minutieusement conduite par J.-H. Sautel à propos du livre 3 (Sur un Épitomi ... , p. 83-88). 16 oùt& 6lO')IC6µ&VOloùt& ciy0>VlÇ6µ&VOlMlOµ&VOl' ciymVlÇ6µ&vot est marqué comme suspect par le copiste, qui entoure le mot en pointillés dans le manuscrit 0 13 sup, f. 82• (le manuscrit A 80 sup. ne présente pas la faute). 14
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SYLVIE PITl1A
nuscrit A 80 sup. est incontestablement une sélection de son modèle87.Qui a décidé de tronquer ces passages? Le copiste? L'excerpteur qui fait ensuite réaliser une copie partielle de son travail? Nul ne sait. En second lieu, la question de savoir pourquoi le texte copié s'achève au milieu du livre 20 des A. R. demeure aussi sans réponse. Quant aux fautes qu'on peut relever par rapport à la langue classique que les premiers livres de D. H. nous donnent à connaître, il faut mettre à part tout ce qui relève de l'orthographe, d'une notation influencée par la prononciation byzantine (les confusions récurrentes entre àn&tvatet àn{&vaten sont un exemple très banal 88). De même, il est difficile de tirer parti de confusions ordinaires entre des préfixes 89. En revanche, il vaudrait la peine, pour les manuscrits ambrosiens, comme pour les autres excerpta des A. R., d'entreprendre une étude fine de la déformation sur les noms propres: l'excerpteur lui-même et en tout cas les copistes qui l'ont repris ne sont pas des familiers de l'histoire romaine. Ainsi au livre 14, Titus Quinctius est-il désigné comme T{toç K6tVtOÇpar les deux codices 90 ; au livre 1991, Fabricius en Cl>aest cité sous Cllaupitctoç;enfin il faut au livre 20 corriger Cl>atctoç 92, tandis que le l}toç et reconnaître un Ogulnius dans 'A).yoûÂ.vtoç Bruttium (Bp&ttia) est confondu avec Kp&&tia93. En l'espèce, il ne s'agit pas de variantes orthographiques ou de banales fautes de copie mais d'une indication sur la mauvaise connaissance par l'excerpteur - ou le(s) copiste(s) de son anthologie-de la prosopographie romaine et, à moindre titre, de la géographie de l'Italie antique. La compréhension des fragments ambrosiens nous parait devoir s'appuyer sur une étude de la méthode qu'a utilisée l'excerpteur pour sélectionner les passages. Quels centres d'intérêt avait-il 94 ? Quelle Par rapport au manuscrit O 13 sup., des fragments sont lacunaires (16.E; 16.G; 20.D) ou manquants (16.F; 16.H-J; 18.H; 19.1; 19.J; 19.L-M; 20.B; 20.F-G; 17
20.N-R).
Pour ne citer qu'un exemple, en 19.T, tout à la fin du discours de Fabricius (0 13 sup. f. 88• et A 80 sup. f. 350--): les codices contiennent àxt:tvai, repris par Mai (1816) et corrigé logiquement en àxievai par Kiessling puis Jacoby (sans mention dans l'apparat critique). 19 Ainsi la divergence 1tpojk>À.flç/1tpoojk>À.f'tç en 14.K (0 13 sup. f. 77•/A 80 sup. f. 341'). 90 D. H. 14.H. (0 13 sup. f. 77'/A 80 sup. f. 340'). 91 D. H. 19.T (0 13 sup. f. 87'). 92 D. H. 20.0 (0 13 sup. f. 90"). 93 D. H. 20.P (0 13 sup. f. 90"). 94 Voir V. Fromentin, Les manuscrits rkents du livre 1 et l'Epitomè des Antiquités romaines de Denys d'Halicarnasse, dans RHT, 1994, p. 93-115 : à propos des principes qui ont guidé l'auteur de la sélection, V. Fromentin relève qu'il avait une prédilection pour les thaumasia (prodiges, naissances semi-divines, mythologie), et les étymologies (Italie, Tibre, lupa). Il ne s'intéressait nullement à l'histoire de Rome et de ses premiers fondateurs, Aborigènes et Pélasges. Le résumé du livre 1 ne commence qu'au chapitre 35, avec la geste d'Héraclès en Italie (ce 11
POURUN NOUVEAUCLASSEMENTDES FRAGMENTStnSTORIOUES
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est sa fidélité à l'original? Peut-on l'identifier? Si on compare sur quelques passages tirés des premiers livres, le texte complet des AR. et les passages ambrosiens 95 , on trouve des similitudes fortes sans que jamais on paraisse lire exactement une copie d'un exemplaire «ordinaire• de l'œuvre 96 • ~férences
Anthologie ambrosienne
Texte des A R.
1.9.2
EJti totç ôp&oiv roicouv dv&u tni totç ôp&mv cpicouvdv&u t&txci>v t&txci)vJC(l)µ'f16è>V icai crnopa6&ç... JC(l)µ'f16àv icai crnopa6&ç...
1.35.1-3
TiJv 'ltaÂ.{av, oi µtv àn" àv6poç 1taÂ.(a 6t àvà xp6vov cbvoµaa8'fl 6uvaotou 'ltaÂ.oO ôvoµaa8flva( tn· àv6pàç 6uvétotou ovoµa "ltaci>ç"Hpa- ÀoO... 'EÀÀaVllCOÇ6t ô Atol3t6ç cpamv· oi 6t ÀÉYO\lO"lV JCÀtOUÇtàÇ r'flpUÔVO\l l300ç cp'flot v · H paic>..ta tàç r'l pu6vou t>..auvovtoç, &iç 6étµaÂ.tç ànoo- l300ç àn&Àauvovta &iç •Apyoç, IClptftoaç tflç àyt>..'flÇ, OVtOÇ tn&t6ft ttç aùt(l) 6étµaÀtç àxoo'HpaicÀ.Éouç tv "ltaÂ.iQ,tàv µ&- ictptftoaç tflç àytÀ'flÇ tv "ltaÀiQ. taçù 6taV'flçétµ&voç 1t6pov tflç t6vtt j\6TJq>&t>y(l)V 6tflp& tiJv àictiJv 8aÂ.cittTJÇ&iç ·1raUav àcphc&to. icai tàv µuaçù 6taV'flçciµ&voç1t6ToO 6t tp(l)tibvtoç, ica8' oüç pov tflç 8aÂ.cittTJÇ&iç I:tic&Àiavàcp(ticétotot& yivono, dxou tiç tàv ic&to, tp6µ&vov à&l. toùç tmx6étµaÀtv &(l)paicci>ç d'fl, tic&tvOl (l)piouç ica8' oûç ticétotot& yivo,to tàv 6étµaÂ.tvd 7tftnç aùtàv tflç "Ellét6oç q>(l)vflçô>..iya au- 6ui>JC(l)V d'fl, tCÎ)Vtfl6& àv8pro7t(l)V vttvt&ç, oùitou>..ov tfl 1tatpicp &(l)palCci>ç Cj)(l)vfl h:a.Àouv tàv 6étµaÂ.tv ... 'E>..>..a6oçµtv y>..cottTJÇ6Uya O"\l• vitvt(l)V, tfl 6t natp(cp Cj)(l)vfl icatà tàç µ'flVOO&lÇ toO ÇcpouicaÂ.ot>vt(l)V tOV 6étµaÂ.lVOÙltO\lÀOV, C001t&pical. vOv >..ty&tat, tJti toO Çcpou tiJv Ô 6étxcopav ôvoµétoat 1tlloav OOTJV µaÀtç 6tflÀ8&vOùttou>..(av... (à suivre)
qui est inexact puisque l'incipit de l'anthologie est une courte citation adaptée du livre 1.9). Pour V. Fromentin, cette sélection ne peut être imputée à D. H. car elle n'offre qu'un reflet très déformé du livre 1. En particulier, la thèse de l'origine grecque des Romains, dont le premier livre des A. R se veut la démonstration, n'apparait plus dans le résumé qui ne s'intéresse qu'aux anecdotes secondaires. 95 Nous l'avons fait à partir du manuscrit qui offre la plus grande quantité de texte (0 13 sup.). 96 Nous reproduisons le texte du manuscrit sans chercher à le corriger et, à l'exception des majuscules aux noms propres, sans retoucher sa ponctuation, souvent illogique. Pour la version complète des A. R., nous citons le texte de l'édition K. Jacoby (1885-1905), en renonçant à reproduire l'apparat critique des passages concer~- Ce qui nous importe, c'est la technique de l'excerpteur ambrosien. Quelques rapprochements sont esquissés par V. Fromentin à propos du livre 1 (us manuscrits récents du livre 1 et l'Epitomè des Antiquités romaines dl! Denys d'Halicarnasse, dansRHT, 1994,p. 93-115,spéc. p. 112-HS)etdescomparaisonssontconduitesplus précisément par J.-H. Sautel à propos du livre 3 (Sur un Épitomé ... , spéc. p. 81-82).
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SYLVIE PITrlA
M~rences
Anthologie ambrosienne
Texte des A. R.
3.10.6
ofç ûµ&tç tàvavda àç,oOvu:ç 7tpatt&lV, OÙIC 6p8ibç 71:0l&tt&.
5.10.7
fn&1ta tyti> tcilv riµcY,voû cp&uni- fn:<· tyti> tcilv tµcilv OÙ cp&lv, aoO cpdaoµa1 ttJCVCDvaoO cp&iaoµOl, Kou.attv&, KoU.attv&; ôç tà acilµa µtv ôç tà µtv acilµa n:ap· t'!µtv fX&lÇ, fX&lÇ n:apà 11µtv, tT)V 6t 'l'UXTJV tl)V 6t 'l'UXTJVn:apà totç n:0Àt:µ{01ç, n:apà totç n:oi..&µi01ç; ,cal toùç ,cal toùç µtv n:po66taç tflç n:atpi6oç µtv n:po6,66vtaç tiJv n:atpi6a aci>Ç&lÇ, tµt 6t tOV ûntp aùtflç àymaci>Ç&,ç,tµt 6t tàv ûn:tp atrrflç vtÇ6µ&vov àn:oJCt&iv&iç;n:68&v; noi..àymv,Ç6µ&vov àn:oJCt&ivnç; i..oOy& ,cal 6&t· n:68&v; nolloO y& 6&t.
10.59
JCatà a&À.T)V"IV~yov 'Pmµato, ~yov 6t toùç µflvaç Katà a&À.T)V"IV, toùç µflvaç Kal cruvtn:1n:t&v &iç Kal cruvtn,n:t&v &iç tàç &i6oùç ri tàç ûn:' aùtcilv KCIÀ.ouµtvaç &i- navati.. "IVOÇ. ooùç ri n:ava&À.TIVOÇ.
ofç ûµ&tç tàvavtia 6p8ibç 71:0l&tt&.
àç,oOvt&Ç où,c
On peut évidemment tenir deux discours sur ces extraits. Soit on souligne la parenté des textes; à l'évidence, l'auteur de la sélection ambrosienne copie des extraits de D. H. et il emprunte aux A. R. Soit on met l'accent sur l'infidélité de ce manuscrit par rapport à la tradition classique des A. R. 97 Qu'en est-il des autres points de comparaison? Parmi les fragments des derniers livres, nous trouvons plusieurs situations : - tantôt nous pouvons mettre en parallèle des passages extraits des traités constantiniens et des excerpta ambrosiens et nous trouvons bel et bien d'authentiques résumés. C'est le cas pour trois passages (18.F; 19.K; 20.B 98 ). - tantôt, toujours dans une mise en parallèle avec les traités constantiniens, nous trouvons deux extraits qui se recoupent et le texte ambrosien montre au contraire une grande fidélité; il s'agit d'une copie, avec de faibles différences, tout au plus quelques mots de liaisons (19.S99 ). D faudrait mener, comme l'a esquissée J.-H. Sautel pour le livre 3, une étude fine sur le voeabulaire des extraits ambrosiens : tantôt proche du grec classique, tantôt plus marqué par les usages patristiques voire byzantins (Sur un Épitomé ... , p. 82). 98 Nous ne les reproduisons pas ici, ils sont accessibles aisément aussi bien dans les éditions A. Mai (1816, 1817, 1827) que dans celle de K. Jacoby (1905) ou celle du groupe de recherche aixois (Les Belles Lettres, collection Fragments, Paris, 2002). 99 Voir note 37. 97
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- tantôt il peut même aniver que le texte ambrosien, loin d'être un résumé, soit légèrement plus long que les leçons présentées dans les traités thématiques. C'est le cas pour le fragment 20.J 100 : Anthologie ambrosienne
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pèce, la présence d'une glose ne soit pas à exclure formellement. Ce passage autorise cependant une hypothèse nouvelle : le modèle des manuscrits ambrosiens pourrait avoir été plus proche de l'original dionysien que le modèle dont disposaient les compilateurs de Constantin VII Porphyrogénète, en tout cas il pourrait bien avoir été différent et pas forcément moins bon 101• Outre ces comparaisons sur la littéralité du texte, notre enquête gagne à examiner plus en détails les choix opérés et les centres d'intérêts de l'excerpteur ambrosien. Nous avons effectué ce travail pour les derniers livres, il va de soi qu'il serait à compléter, mais les résultats nous paraissent significatifs. À première vue, cette sélection ambrosienne paraît hétéroclite et irréductible à une logique, il arrive même que certaines citations soient des phrases tronquées102 • Prenons quelques exemples de ce que nous y lisons : - des extraits d'intérêt géographique : description de la Celtique (14.A); la forêt de la Sila èt ses ressources (20.P). - des prodiges : le bâton de Romulus échappant à l'incendie (14.B); Marcus Curtius se jettant dans le gouffre (14.L); un corbeau appuyant Valerius («futur» Corvinus) au combat (15.A); la foudre avant les fourches Caudines (16.A); les tremblements de terre (18.H); oracles indiquant les fondations de cités (19.B et 19.C); le vol des oiseaux annonciateur de l'avenir (19.L); les rêves de Pyrrhus (20.J). - des réparties ou des aphorismes : Licinius Stolon reprochant à la plèbe son ingratitude (14.N); le consul Marcius répliquant aux Privernates (14.0); l'or des rois et sa force invincible (19.E); le Tarentin Méton devant les ambassadeurs romains (19.0). V. Fromentin, en se fondant sur les passages du livre 1arrivait à une conclusion similaire mais confortée par une possiblité de comparaison beaucoup plus large (Les manuscrits récents du livre 1 et l'Epitomè des Antiquités romaines de Denys d'Halicarnasse, dans RHT, 1994, p. 93-115,spéc. p. 114) : l'épitomè comporte de nombreuses fautes de minuscules qu'on ne retrouve dans aucun autre manuscrit du livre 1.Les manuscrits ambrosiens s'accordent tantôt avec A (Chis. gr. R VIII 60) et tantôt avec B (Vrb. gr. 105) et sa famille, mais ces accords se font toujours sur les bonnes leçons et jamais sur les mauvaises. L'épitomè présente parfois des leçons meilleures que celles des autres témoins en certains endroits. Donc le manuscrit qui a servi de source au rédacteur de cette épitomè est antérieur à la séparation en deux branches des familles manuscrites, laquelle séparation s'est faite au moment de la translittération au IX• siècle. Ainsi l'épitomè présente un intérêt pour l'établissement du texte du premier livre des A. R. et ses leçons doivent être citées chaque fois que possible et confrontées aux quatre témoins principaux (Chis. gr. R VIII 60; Vrb. gr. 105; Marc. gr. 372; et la trad. latine de Lapus Biragus Lat. 1). 102 cf. incipit du manuscrit Q 13 sup. qui enchaîne curieusement la citation du paragraphe 1.9 et celle du 1.35. De même, les paragraphes 15.C, 15.D (= 15.2 KJ). Ces fragments pourraient être des sortes d'aide-mémoire, car ils ne forment pas forcément des phrases complètes. C'est une des principales caractéristiques de l'anthologie qui figure dans les manuscrits milanais. 101
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- des pans de discours : Camille exhortant ses troupes avant d'affronter les Gaulois (14.K); le Samnite Pontius implorant la clémence (16.C); l'échange de lettres entre Pyrrhus et le consul ùevinus (19.P); Fabricius refusant de passer dans le camp de Pyrrhus (19.T). - de belles conduites ou des actes répréhensibles : Caïus ùetorius condamné pour harcèlement sexuel (18.F); le Tarentin Philonidès outrageant les ambassadeurs romains (19.K); la trahison de Decius et de sa légion à Rhégion (20.B). - des notations d'intérêt militaire : notations tactiques (16.H); l'infanterie romaine en manœuvres ou au combat (19.F; 20.F; 20G); la cavalerie éléphantine de Pyrrhus (20.J). - des notations sur le calendrier : réforme du calendrier romain (16.G). - citations d'intérêt lexicographique: sens du mot cœcus (16.E); sens du mot pô'.),toçpour les peintures murales (16.F); étymologie des noms de ville (19.A; 19.B; 19.C); sens de l'adjectif crn:epµoÂ.6yoç (19.J). À ce stade de notre réflexion, nous pouvons récapituler les éléments qui permettent d'aborder à nouveau la nature de ce texte. Nous avons un excerpteur qui dispose d'un exemplaire complet des A. R. et y puise tantôt des citations littérales longues, tantôt des citations courtes qui sont des sortes d'aide-mémoire; en d'autres occasions, il résume tout un passage en adaptant librement l'épisode. Cet excerpteur écrit sans peine le grec classique car son style n'est pas en soi repérable par son exotisme (il ne faut pas imputer à l'excerpteur, qui est à l'origine de la sélection, des fautes qui relèvent du ou des copistes ultérieurs). Les relevés faits sur les livres 14-20 ne contredisent pas sur ce point les études menées sur les livres 1 et 3. Connaissons-nous pour d'autres auteurs antiques des sélections de ce type? Des rapprochements sont-ils possibles? Dans l'absolu, nous connaissons pour l'époque byzantine divers florilèges de citations d'auteurs antiques. Ainsi Maxime Planude en a réalisé un. Mais ces excerpta furent à tort imputés à Dion Cassius par A. Mai dans une première édition 103, et sans doute empruntés plutôt à divers historiens antiques dans une sélection thématique
A. Mai, Scriptorum ueterum noua collectio, 2, 1827. Les extraits de Maxime Planude (1260-1310) sont en réalité empruntés à divers auteurs grecs. A. Mai les avait attribués à Dion Cassius suivi par certains éditeurs de Dion (Sturz, Bekker ou Dindorf) qui leur avaient ajouté d'autres fragments. Mais Th. Mommsen le premier (Ober die dem Cassius Dio beigelegten Teile der Planudischen und Constantinischen Excerpte, dans Hermes, 6, 1871, p. 82-89, repris dans Gesammelte Schriften, Berlin, 1905-1913,t. 7, Philologische Schriften, 1909, n. 74, p. 700-709), a rejeté l'attribution à Dion et considéré qu'il fallait les attribuer à Jean d'Antioche tandis que Boissevain estimait en tout cas qu'ils n'étaient pas de Dion et probablement pas même de Jean d'Antioche. 101
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sur les vices et vertus. On pourrait aussi penser, comme l'avance J.H. Sautel, à des excerpta à l'origine comparables dans leur nature à ceux qui furent réalisés sur Polybe sans doute au xesiècle, et connus sous le nom d'excerpta antiqua• 04 , mais ayant connu une deuxième sélection 1°5 • L'hypothèse de J.-H. Sautel revient à supposer une anthologie initiale qui remonterait au Xe siècle, œuvre assez fidèle et réalisée par un bon helléniste, que les générations successives de copistes ont plus ou moins altérée, et surtout remaniée en abrégeant à nouveau les passages jugés trop longs du premier résumé. Certes, le rapprochement avec les excerpta antiqua de Polybe est assez séduisant, mais l'état des fragments ambrosiens présente trop d'incohérences et il faut alors imaginer une deuxième intervention d'abréviateurs plus tardifs. Et supposer deux «strates» d'excerpteurs pour les textes ambrosiens ne va pas sans difficulté. L'idée que cette deuxième génération d'abréviateurs aurait inséré des transitions et des résumés de l'anthologie initiale est acceptable, mais l'idée qu'ils auraient ajouté «de leur cru» 106 des remarques de vocabulaire est moins convaincante : admettons qu'ils aient pu ne retenir du résumé initial que les passages offrant moins d'intérêt historique et plus d'intérêt lexical. Mais comment supposer que ces excerpteurs de la seconde génération aient pu ajouter au texte du premier résumé des commentaires propres? Et sur quoi travaillaient-ils dès lors: uniquement la version déjà abrégée de D. H. par le premier excerpteur sans disposer d'aucune autre comparaison - d'où tiraient-ils donc les insertions lexicales? Sont-ce des gloses? - ou bien sur d'autres versions du texte dionysien - dans sa version étendue ou sa version abrégée selon une logique thématique - et il faut de toute façon supposer qu'il en circulait au moins une copie quasi complète que nous n'avons plus? Les réticences face à cette hypothèse tiennent à une autre raison : les étapes d'une recomposition de l'épitomè ambrosienne (ou cosi de.tta) peuvent difficilement avoir été nombreuses, tant la proximité entre les deux manuscrits ambrosiens est grande, tant aussi la coïncidence entre les fragments les plus longs des excerpta ambrosiens et les passages connus par la version constantinienne est frappante. Nous ne minimisons pas du tout l'intérêt que présente le rapprochement opéré par J.-H. Sautel avec le modèle des excerpta antiqua polybiens mais, compte tenu des incohérences des
Voir J. Moore, The Manuscript tradition of Polybius, Cambridge, 1965. J.-H. Sautel, Sur un Épitomé des Antiquités romaines de Denys d'Halicarnasse : les Arnbrosiani A 80 sup. et Q 13 sup. Complément d l'édition du livre Ill, dans RHT, 30, 2000, p. 71-92, spéc. p. 80-81 sur les couches rédactionnelles et p. 88-92 sur les origines de l'épitomè. 106 J.-H. Sautel, Sur un Épitomé ... , p. 81. 104 195
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fragments ambrosiens, il faut compléter cette idée, comme il y est obligé, par l'hypothèse de couches rédactionnelles successives : et là, les réseIVes sont plus marquées. Quelle autre piste explorer? En l'espèce, nous avons affaire à un excerpteur qui ne puise pas à diverses sources pour reconstituer l'histoire d'une époque ou rassembler des illustrations autour d'un thème, mais à un excerpteur qui sélectionne dans une source unique des passages, qui ressemblent tantôt à des prises de notes, à une sorte d'aidemémoire, tantôt à des citations littérales ou «aménagées». Dans cette perspective, à notre sens, un parallèle mérite examen, pour une période très tardive de l'histoire byzantine. Georges Gémiste Pléthon pourrait-il être à l'origine de ces sélections dionysiennes? Pourquoi cette hypothèse? Il faut d'ailleurs signaler que A. Mai lui-même, qui connaissait les travaux de Pléthon, avançait le nom dans sa préface de l'édition de 1827; Pléthon était cité dans la longue liste des abréviateurs depuis !'Antiquité, mais pour des raisons qui tiennent à ses erreurs éditoriales antérieures (voir infra p. 169), A. Mai ne poussa pas plus avant de possibles rapprochements 107• Nous disposons de sélections réalisées par Pléthon sur divers auteurs grecs ainsi que des textes originaux. Dès lors, nous pouvons confronter la méthode du savant avec ce que nous entrevoyons sur les extraits ambrosiens. De plus, l'œuvre propre de l'érudit est bien connue, sa biographie également et il faudra les rapprocher des centres d'intérêt que laissent entrevoir les fragments ambrosiens. Enfin le contenu des manuscrits, la liste des œuvres qui y sont reproduites nous ramènent aux sujets d'étude chers à Pléthon et à ses disciples. Pour ce qui est de la méthode, nous savons que Gémiste Pléthon a excerpté divers auteurs, pour préparer ses propres livres, ou il a fait réaliser des anthologies par ses élèves. La liste des auteurs classiques que Pléthon connaissait a été pour la première fois reconstituée par Leone Allaci 108• On y trouve Appien; Strabon; Théophraste; Aristote; Diodore de Sicile; Xénophon; Denys d'Halicarnasse; Prodicos (le sophiste); Arrien; Polybe; Zonaras; Flavius Josèphe. À cette liste, les chercheurs contemporains, tout particulièrement A. Diller•09 , parcourant d'autres manuscrits, ont ajouté de nouveaux noms : ceux d'histoA. Mai, 1827, prœfatio, p. XI: à propos de Diodore de Sicile il est vrai. • La notice de Leone Allaci sur l'ensemble des œuvres de Pléthon est d'abord parue sous forme d'une monographie : L. Allatios, De Georgis et eorum scriptis diatriba, Paris, 1651. Elle est reprise par J.-A. Fabricius Bibliotheca Grœca ... , 12, p. 85-102 (spéc. p. 90-91 pour les excerpta) puis par J.-P. Migne, PG 160, p. 773-792 (spéc. p. 779). Elle a depuis été complétée, en particulier dans R. et F. Masai, L'œuvre de Georges Gémiste Pléthon, Rapport sur des trouvaü/es réCfflles: autograplres et traités inidits, dans Bull. Acad. Royale de &lgique, 5• série, L 40, fasc. 7, 1954, p. 536-555. I09 A. Diller, The Autographs of Georgius Gemistus Pletho, dans Scriptorium, I07
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riens de l'Antiquité (Thucydide) ou de l'époque byzantine (Procope, Cedrenos); des biographes (Plutarque, Diogène Laërce); des moralistes (Lucien); des géographes et astronomes (Geminos, Ptolémée); des spécialistes de musique (Aristoxène); des spécialistes de sciences naturelles (Élien, Galien); des rhéteurs (Hermogène); des poètes (Homère, Hésiode, Solon, Pindare); des auteurs tragiques (Euripide); sans oublier des citations des Vers d'Or pythagoriciens, des Hymnes orphiques. Pléthon pratiqua ces sélections à divers âges de sa vie, et jusqu'à la fin de celle-ci. Le but de ces résumés et anthologies est directement lié à son enseignement et à la préparation de ses livres. Ayons en tête, de façon très banale, que ni les étudiants, ni même les enseignants ne disposaient avant l'invention et surtout la généralisation de l'imprimerie, d'ouvrages complets sur lesquels ils pouvaient à loisir travailler. Ces morceaux choisis répondaient à une finalité pratique, ils pouvaient exister sous plusieurs formes, être copiés; un même passage pouvait être repris à l'occasion de la préparation d'une autre anthologie. Il ne s'agit pas de transmettre un texte complet à la postérité, ni même de réaliser une sélection thématique cohérente; il s'agissait de prise de notes personnelles ou destinées à un cercle de disciples et de proches, certaines nous sont parvenues sous forme autographe 110• L'enseignement pléthonien privilégiait la forme orale et ces cahiers de notes en constituaient un support. Le titre même des œuvres excerptées n'avait plus guère d'importance et tantôt elles portent le nom même de Pléthon, tantôt elles sont anonymes, tantôt leur titre antique a été modifié : ainsi dérive très probablement de Thucydide une «Oraison funèbre sur les soldats tués lors de la guerre du Péloponnèse», tout comme des extraits de Ptolémée sont transmis sous le titre de «Description du Péloponnèse tout entier, régions côtières et intérieur», ou encore des passages de Strabon circulent sous le titre «Topographie de la Thessalie». L'exemple le plus connu est l'ouvrage communément désigné sous le titre de «Sur les événements chez les Grecs après la bataille de Mantinée» 111, qui est une compilation d'ex-
10, 1956, p. 27-41 (repris dans Studies in Greek Manu.script Tradition, Amsterdam, p. 1983, p. 389-403). 110 D. Dedes, Die Handschriften und das Werk des G. Gemistos, dans 'Ell11vuca, 33.l, 1981, p. 66-81. Les autographes que nous possèdons paraissent plutôt appartenir à la fin de la vie de Pléthon, mais il peut avoir tardivement recopié des cahiers (A. Diller, The Autographs ...• p. 34). 111Marc. gr. 406 f. 2•-125•.Voir aussi le manuscrit Matrit. N 10 qui comporte des extraits livres 15 et 16 de Diodore excerptés par Pléthon (f. 76•-86•et 86•-106•). De cet ouvrage, il faut signaler une édition aldine ( 1503) et une traduction latine : De gestis Grœcorum post pugnam ad Mantineam per capita tractatio, par M. Antonius Antimachus, Bâle, 1540. Elle contient aussi le pseudo-Denys De oratione panegyrica, De oratione Nuptiali, De oratione Natalitia, De Epithalamiis (ces œuvres du Il• siècle sont naturellement apocryphes). À l'édition H. G. Reichard, très cri-
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cerpta de Plutarque 112et de Diodore de Sicile 113• Il faut relever que Pléthon ne pratiqua pas cette méthode pour les grands textes de la philosophie et en particulier sur le corpus platonicien, non plus que sur les ouvrages juridiques ou théologiques. Pour revenir aux historiens, on a la certitude que des extraits de D. H. furent recopiés par Pléthon sous formes de morceaux choisis; ceux qui sont aujourd'hui identifiés sont, il est vrai, assez brefs par rapport aux autres fragments connus des historiens ou des géographes grecs. Certains extraits dionysiens ont aujourd'hui disparu 11•; d'autres ont fait l'objet d'une identification erronée et furent à tort attribués à D. H. 115• D'autres encore sont assez mal repérés par les éditeurs de D. H. : ainsi la lettre de Pyrrhus à Lrevinus116,qui figure au livre 19.P des A. R., est connue par une tradition manuscrite multiple. Outre les manuscrits ambrosiens, cette correspondance est reproduite dans un manuscrit copié par Demetrios Raoul Cabacès 117, qui contient aussi de façon très mêlée des œuvres de tiquée au plan philologique comme au plan du commentaire (Georgii Gemistoni Plethonis de iis quœ post pugnam Mantinensem apud Grœcos gesta sunt libri duo, Leipzig, 1770), il faut substituer une publication récente : Georgius Gemistus Pletho, Opuscula de historia grœca, éd. E. Maltese, Leipzig, 1989. 112 M. Manfredini, G. Gemisto Pletone e la tradizione greca di Plutarco, dans ASNP, 3.2.2, 1972, p. 569-581. • 0 De façon générale, sur la valeur des excerpta pléthoniens réalisés sur le texte de Diodore et la mise en rapport avec les autres branches de la tradition manuscrite de la Bibliothè,que historique, voir E. V. Maltese, ln margine alla tradizione manoscritta di Diodoro: gli excerpta di Giorgio Gemisto Plethone, dans SIFC, 77-3a-2, 1984, p. 217-234. La comparaison se fonde sur des excerpta de Diodore connus par le manuscrit Scor. T II 1 (f. 57•-73•), qui remonte au Marc. gr. 406 (f. 94•-114•).Il existe un autre apographe Mon. gr. 48 416•-485•(a. 1551).Voir note 168. 114 Signalons parmi les codices disparus, le Scor. L II 2 (G. De Andres, Catalogo de los codices griegos desaparecidos de la real Biblioteca de El Escorial, Madrid, 1968, n° 565, p. 254; XV• siècle) qui comportait au f. 159un passage sur la grécité des Romains tiré de D. H. Il est possible que les passages croisent d'autresexce,pta pléthoniens sur le sujet, qui sont bien conservés à la Bibliothèque Marcienne, par exemple le Marc. gr. 406 f. 117•-119'.Ces derniers portent sur la grécité des Romains. 115 Le Vat. gr. 1949, copié au XV• siècle de la main de Demetrios Rhalles Cabaces, disciple de Pléthon, comporte aux folios 334• et 335• des extraits attribués à D. H. Le premier fragment est bien un passage authentique. (A. R. 2.26.4-5); en revanche le second doit être attribué à Diodore de Sicile 1.5.1(partim, depuis ànà ~t t&v Tpcouc&v... npaç&iç). La notice du catalogue de la BAV est sur ce point particulier erronée (P. Canart, Codices Vaticani Grœci, Codices 1745-1962, 2 vol., Rome, 1970-1973, p. 753). 116 Sur le caractère apocryphe de cette correspondance, nous renvoyons à E. J. Bickermann, Apocryphal Correspondence of Pyrrhus dans CPh, 42, 1947, p. 137-146; pour un commentaire détaillé des passages du fragment 19.P, voir Denys d'Halicarnasse, Rome et la conquite de l'Italie ... , p. 333-334. 117 Sur ce copiste et l'attribution du manuscrit, voir E. Gamillscheg, D. Harlfinger, Repertorium der Griechischen Kopisten, Vienne, 1981, 1A, p. 69, n° 95; iidem et P. Eleutheri, Repertorium ... , 1997, 3A, p. 73-74, n° 162. Élève de Plethon à Mistra, il effectua un passage à la cour de Constantin XI Paléologue puis vint à
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George Gemiste Plethon et des extraits divers d'auteurs antiques 118• Ce manuscrit avait pourtant été repéré par A. Mai qui signalait l'existence dans son édition de 1827119• De même il existe une copie de la lettre dans un manuscrit de la Bibliothèque Laurentienne à Florence, copie qui, elle aussi, a curieusement échappé aux éditeurs récents 120• Ces deux manuscrits comportent, outre les extraits dionysiens, des titres qu'on retrouve constamment dans la série des codices liés aux excerpta pléthoniens, dont les Vers d'or pythagoriciens. Et force est de constater la présence récurrente de quelques textes communs aux manuscrits ambrosiens et aux copies des excerpta pléthoniens. Nous y reviendrons après avoir examiné la méthode pléthonienne de sélection des extraits à travers quelques exemples. Les sélections pléthoniennes sur les auteurs classiques grecs nous sont parvenues via de nombreux manuscrits, dont certains sont autographes, conservés pour l'essentiel à la Bibliothèque Marcienne, mais dont les principales copies existent à Munich et à la Bibliothèque Vaticane 121• Comparons maintenant quelques extraits de la sélection pléthonienne avec les passages originaux. Nous avons choisi les exemples dans l'intention d'illustrer la variété des techniques adoptées par Pléthon dans ses excerpta : Rome à partir de 1466. Il fut lié à Bessarion, autre grand disciple de Pléthon. Le Vat. gr. 2236 (tout comme le Vat. gr. 1949) est attribué sans discussion à Demetrios Raoul Cabaces et daté de 1487, année probable de sa mort. 11• Vat. gr. 2236, f. 86•. Le codex contient la lettre de Pyrrhus à Lœvinus (depuis nem>0'8a,µtv) jusqu'au début de la réponse de Lœvinus (tv6eucv6µevoç). 119 Au folio 34•, une annotation manuscrite de Mai rappelle cette identification, qu'il a signalée dans la Scriptorum ueterum noua colkctio, 2, 1827, p. 506, n. 1. Le codex LXXXV qu'il mentionne est bien l'actuel Vat. gr. 2236 : ce numéro est celui de l'inventaire des manuscrits de la collection Colonna (Vat. lat. 9579, f. 145•). Pour une description complète, voir S. Lilla, Codices Vaticani Grœci, codices 2162-2254, Rome, 1985, p. 348-359. 120 Laur. Plut. 10.22, f. 71•-72•.Il est à noter que le texte fut faussement attribué à Plutarque par A. Bandini (Catalogus codicum Lalinorum bibliothuœ l.aurentianœ, 5 vol., Florence, 1774-1777),qui datait le manuscrit du XIV• siècle (cette datation n'est pas remise en cause par P. Derron, Inventaire desmanuscrits desVers d'or pythagoriciens dans RHT, 22, 1992, p. 1-18, spéc. p. 7, mais on ne sait sur quelles bases). Chez Robert de Montfaucon, Bibliotheca Bibliothecarum manuscriptorum noua, Paris, 1739, 1, p. 266, le manuscrit était seulement décrit et le fragment n'était pas attribué à Plutarque. Il s'agit sans conteste du texte dionysien, les variantes par rapport aux leçons des manuscrits ambrosiens sont mineures. 121 Marc. gr. 379 f. 1-341•;406, f. 62-72•; 417, f. 119•-120-(enoutre, y figurent les Prœcepta de Démétrios de Phalère, la préface du De re militari de Polyen); Mon. 490 f. 153-155; Vat. gr. 1759 f. 249'"-260-;2236 f. 17•-19'. Dans la mesure du possible, nous reproduisons dans les exemples ci-dessous le texte de manuscrits que nous avons pu directement consulter, en ne corrigeant quelques banales fautes de copie (accentuation, ponctuation). Sur les sélections présentes dans le Vat. gr. 1759, voir spécialement B. Bilinski, De Gemisto Pkthone Strabonis et Plutarchi (Quœst. gr.) epitomatore in cod. Vaticano gr. 1759 seruato, dans Eos, 43, 1948-1949, p. 78-85.
• RéUrences du manuscrit
Vat. gr. 1756
f. 129' 1. 1-11
Texte excerp~ par Pléthon
Texte original de référence
Références du texte original et éléments de comparaison
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Références du manuscrit
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Texte excetpté par Pléthon
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Texte original de référence
1Références du texte 1 or;cnal et élé!Dents e companuson
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Vat. gr. 2236 f. 181" mars. les lacunes en fin de ligne sont complétées par comparaison avec le manuscrit de Venise.
·on 6 11c:apoç6 IlriÀ.6miç xcitrip ·o 6t ritv 'AÀ.KµatoviooYPll'l'UÇ,·1icap(ou tOO nrivt:- Strabon 10.2.9 T l6cipt:CD toO ·EÀ.t:vInatpàç À.6JtTIÇ xatpoç ui&tçyt:vtaeai 6ûo, ·AÀ.\(ta 1c:alAt:u1c:ci-C 452 24-28 et ci6&À.cpoç j1CUIciµcproAaKloo(-6tov, 6' tv tfl 'A1c:apvavi11 to6touç µ&tà toO xatpé>ç· 10.2.24 C 461 15oùv txCDv6µouç tàç x6À.t:lÇ'EcpopoçÀ.&yt:a8al6o- 22 (éd. Meineke, µovoç tKxI µotpciv ttva tOl>t(l)V 'A1c:apvaviac;I1c:attcrxov,dI Tuv- 1C&t. 1853) 6cip&m tç Ala1c:&6a(µova1c:att:À.ltoç,611c:apoç t11c:apvavi111c:att:µdvt:v.
Vat. gr. 17591 Kal Ilpo6t1c:àç6t 6 crocpàçtv t4) croy- Kai Ilpo611c:àç6t 6 aocpàç tv t4) croyypaµan t4> x&pi Xénophon Mem. f. 245•, l. 25-28 ypaµati teî>xt:pl 'Hpawouç ôxt:p 6it 'Hpa1CÀ.&ouç6nt:p 6it Kai xÀ.&iatoiç tx16t:ivuta1, 2.1.21 1c:aixÀ.&iatotç tx16&ivutat, aa6tCDÇ aa6tCDÇ nt:pi tflç cipt:tflç cinocpa{vt:tat Citation litérale. Vt:tU\ 7t&pitflÇcip&tflÇQ,tocpa(
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POUR UN NOUVEAU CLASSEMENT DES FRAGMENTS HISTORIQUES
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Que dire de la méthode suivie par Pléthon? Tantôt il s'agit d'une adaptation libre, qui ne renonce pas à des citations textuelles mais effectue des coupures dans le texte et aménage des transitions. Le vocabulaire lui-même est adapté. Tantôt au contraire, la fidélité est beaucoup plus grande : les discordances peuvent tenir à des divergences entre les manuscrits sources possédés par l'excerpteur et ceux dont nous disposons pour les éditions modernes. Tantôt nous avons des citations pures et simples, totalement coïncidentes avec la version du texte original que nous connaissons par ailleurs 122• Sans entrer dans le détail de ces textes, relevons que parmi les excerpta pléthoniens, d'aucuns résistent à une identification formelle avec des passages connus : ainsi des citations de Théophraste paraissent tirées de l'Historia plantarum mais ne correspondent à aucun des passages précis de l'œuvre dont nous disposons; il s'agit de passage sur la poix et son utilisation 123• De même un compendium de exercitu terrestri échappe à une identification claire 124• Le passage pourrait être un extrait de Polyen; pourtant il ne figure ni dans les textes connus de cet auteur, ni parmi les pages authentifiées d'~ien le Tacticien. Ces deux exemples pratiquement adespotes ou du moins mal assignés à une œuvre, laissent croire que parmi les extraits excerptés de façon sfu-e par Pléthon, nous pouvons puiser quelques fragments mal assignés ou quelques leçons intéressantes
122 Pour d'autres parallèles sur la méthode pléthonienne, en particulier sur les excerpta en langue grecque à partir de la traduction latine des Commentaires d'Averroès sur le De anima d'Aristote, voir D. Dedes, Die Handschriften und das Werlcdn G. Gemistos, dans 'EUrivuca, 33.l, 1981, spéc. p. 74-75. w Vat. gr. 1759 f. 246' 1. 1-15 : Tflç Yflç1'!µtv 1ti&tpaTl6t i..&7t't6y&coç 1eal1'!µtv yi..tazpà i\ 6" 61tovaµoç 1eal1'!µtv µ&i..ayy&coç, i\ 6' 67t6i..&1>1eoç, il 6" 67t&pu8poç.Kal 1'! µtv i..&tµoviat& 1eal6i..o>çfvt1eµoç,Tl6t ;ripa. Kal Tlµtv cpopà,Tl6t cipyti..oç.Kal Tl µtv t&paµœv, 1'!6" àt&paµrov. Kal 1'!µtv &ûX&iµ&poç, 1'!6t 6uaxdµ&poç 6puoç d6ri, .-ryoç, 1'!µ&plç,ài..icpi..otoç, aiyU.œv. 'Op8ocpu&atat11 6· aünt 1ealÙ'f'f1Â.otat11 7taoc71v. IlU.Ov6t to tatç 6poolv è7ttcpl>Ôµ&vov èp&c116eç µai..a1eov,cp7tpoçtàç è1et&v 7tl>p&kov
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Sur ce sujet, voir B. Einarson, The Mss of Theophrastus' 'Historia plantarum', dans CPh, 71-1, 1976, p. 67-76 (spéc. p. 75-76). Les extraits choisis par Pléthon sont connus par quatre manuscrits : Marc. gr. 406 f. 74-76 de la main de Pléthon; Mon. gr. 48 f. 440-441• de la main de Petros Kameades, dérive du manuscrit de Venise; Vat. gr. 1759 f. 246-248• (cité en entier par J. G. Schneider, Th«,phrasti Eresii Qua supersunt omnia, vol. 5, Leipzig, 1821,p. 185-188);Par. gr. 2080 f. 282'-286'. 124 Vat. gr. 1759 f. 245....(nous reproduisons l'incipit; il faut rapprocher cette citation de la version figurant dans le Marc. gr. 406 114•-115'): Tc!lvatpano>td'>voi 1ealtc71v7t&Çc71v aù oi µtv 11ftÂ.O{,oi 6t 1t&Â. taatai oi 6t 61ti..ita\· µtv 7t&~oi,oi 6t {1t1t&tç ytÂ.Olµtv oi 7tavtwv 1eoucpotcit11 xproµevot 1tapaf!· à1epoj3oi..tatal6vt&ç to 1toi..ù ~v6ovritat, il t~6tat il à1eovttata{· 6ditat 6t oi 7tavtwvl3aputcit11tfl 1tapaft XpcDf.16VO\. Tà t& 4lla 1ealcitcitalç1eal66pam µa1epotatoiç aapiaatç ... desinit tOÙǵtv oùv l'jy&µ6vaçtc!lvatixcov 7tavtaç 7tpoatataç &iva\.
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SYLVIEPITfIA
dans la mesure où Pléthon, à l'évidence, a disposé de manuscrits que nous n'avons plus. Il vaudrait d'explorer méthodiquement les excerpta pléthoniens, tout particulièrement les séquences isolées, dans la perspective éventuelle d'accroître le corpus dionysien. De la sorte, il nous paraît plausible d'établir un parallèle entre la méthode ou plutôt les habitudes de Gémiste Pléthon excerpteur de textes classiques, et celles de l'excerpteur ambrosien. Pour conforter cette hypothèse, il faut confronter les centres d'intérêt du savant dans ses propres œuvres, dans les excerpta qui lui sont sans conteste attribués, et ceux que les fragments des A R. laissent voir. Notre enquête doit ici retracer quelques éléments du contexte culturel qui est celui de Georges Gémiste Pléthon 125• Nous avons une idée de sa vie, de son éducation, de son rôle d'enseignant essentiellement à travers deux canaux : d'un côté nous sommes renseignés par les oraisons funèbres qui lui sont consacrées, et dans la même veine, par les lettres du cardinal Bessarion, dont il fut le maître, surtout celles adressées à ses fils; d'un autre côté, nous disposons de l'œuvre même du savant, assez bien conservée 126• Rappelons sommairement qu'il est originaire de Constantinople, qu'on ne sait trop ce qu'il fit entre ses études à Constantinople et son arrivée à Mistra, dès 1407 ou peut-être seulement en 1413 (cet éloignement de la capitale paraît lié aux persécutions dont fut victime son maître Élisée 127). Pléthon mourut à un âge très avancé en 1452. Il avait rédigé vers 1415-1416 les discours sur le Péloponnèse, après la visite de l'empereur Manuel Il Quoiqu'il filt un anatolikos, il bénéficia en Morée de concessions de terres renouvelées 128• Il accepta de suivre la délégation de l'empereur en Italie et participa en 1438-1439 au concile de Ferrare puis de Florence, qu'il quitta avant son terme 129 : outre la part qu'il
Dans une bibliographie abondante, signalons : B. Knôs, Gémisthe Pléthon et son souvenir, dans BAGB, 9, 1950, p. 97-184; Fr. Masai, Plithon et le platon~ de Mistra, Paris, 1956. Et surtout, C. M. Woodhouse, The la.si of the Hellenes, Oxford, 1986. 126 Pour une édition traduite en allemand, accompagnée d'un commentaire, voir Georgios Gemistos Plethon, Poütilc,Philosophreund Rhetorik im spdtbyumtinischen Reich (1355-1452), éd. W. Blum, Bibliothek der griechischen Literatur, 25, Stuttgart, 1988. m Élisée, juif d'origine mais en fait païen et polythéiste, expliquait Aristote d'après Averroès et les autres exégètes arabes. Il initia Pléthon à Zoroastre. 128 Gémiste Pléthon et ses fils furent bénéficiaires de plusieurs fiefs en Morée; ils appartenaient aux familles les plus puissantes, détentrices de grandes propriétés rurales (voir D. Zaltythinos, Le despotat grec de Marie, 2 vol., 1932, 1, p. 122; 207; 240). 129 Quand il vit que le concile allait aboutir à une union aux dépens des Églises grecques, il quitta Florence et se retira à Venise en juin 1439 avec le despote Demetrios et Gennadios Scholarios. Il paraît de retour en Morée en 1441. 125
POUR UN NOUVEAU CUSSEME.NT DES FRAGMENTS HISTORIQUES
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prit aux débats (traitant de graves sujets dogmatiques comme la procession du Saint-Esprit ou le feu du purgatoire), il rédigea en Italie son traité sur les différences entre Platon et Aristote; il fit, durant ce séjour, lors des nombreux contacts qu'il eut en marge des débats du concile, grand effet sur les milieux intellectuels italiens 130• Ses controverses avec Bessarion et Gennadios Scholarios furent nombreuses après 1440131• Il reçut en 1447-1448 à Mistra la visite de Cyriaque d'Ancône, avec lequel il se lia d'amitié. Il rédigea en 1450 l'éloge funèbre de l'impératrice douairière Hélène; il écrivit une Adresse à Demetrios en 1451. Ses œuvres et en particulier Les Lois, furent confisquées après sa mort sur ordre du despote de Morée Demetrios et de sa femme Theodora, qui, ayant eu de l'amitié pour Pléthon, ne prirent pas la responsabilité de les condamner et les firent envoyer à Constantinople. Elles furent livrées aux flammes, sur l'ordre du patriarche Gennadios Scholarios. Le néo-paganisme de Pléthon était promis à la destruction dans un monde hellénique conquis par les Turcs, dans lequel les Grecs tentaient désormais de préserver leur identité en se repliant sur l'orthodoxie chrétienne 132• Pléthon toucha à toutes les disciplines: l'art oratoire, la grammaire, la géographie, les mathématiques, l'astronomie 133, il eut en projet un nouveau calendrier ... Outre les notes qu'il prit sur les auteurs classiques, il rédigea des essais philosophiques et politiques. Pour reprendre les mots de R. et F. Masai, Pléthon fut «à Mistra, le cerveau du mouvement national grec, tandis qu'il était en Italie, par ses conférences, ses amitiés et ses élèves, l'animateur de la renaissance platonicienne et païenne» 134• Sans entrer dans le détail de ces Do En particulier avec Francesco Filelfo. Pléthon fut véritablement à l'origine de l'Académie platonicienne créée par Cosme de Médicis à Florence. m E. Garin, Le Zodiaque de la vie, Polémiques antiastrologiques à la Renaissance, trad. fr. J. Carlier, Paris, 1991 [1976]. spéc. p. 75-81. Gennadios Scholarios devint patriarche après la mort de Pléthon. Di C. M. Woodhouse, 77rel.ast of the Hellenes, Oxford, 1986. m Sur les Mayucà i..6y1atlbv lino Zropoâfare. Nel fausto incontro che S. M. l'Augustissimo nostro Sovrano onorè> della sua presenza la Biblioteca Ambrosiana, esternè> altresl il desiderio che si trovasse nei codici, che gli si mostravano, qualche pezzo di storia antica. Io mi diedi tosto premura di secondare i pensieri di Sua Maestà, e fatto esame di qualche codice, già da me veduto, in un' udienza ottenuta da S. Maestà, le esposi di aver trovato de' pezzi insigni di Dionigi d'Alicarnasso non ancor publicati, i quali io bramava di dedicare al glorioso nome di S. Maestà. Acconsentl clementemente il Sovrano, e prima di partire da Milano accetè> benignamente anche un Saggio di stampa dell'anzidetta opera che io gli presentai. Ora io attendo supplichevolmente dalla Eccellenza Vostra la grazi di poter rendere pubblico il lavoro già preparato, e col più profondo rispetto ed ubbidienza la inchino». 192 G. Gervasoni, L'ambiente letterario mil.anese nef seconda decennio dell'ottocento, Angelo Mai ail.aBiblioteca Ambrosiana, Florence, 1936, spéc. p. 27-28.
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partie détourné de son objet scientifique. Aucun savant ne jouissait à ce moment d'un prestige aussi grand que Mai et ses découvertes agitèrent non seulement le milieu universitaire, académique (donc un cercle restreint), mais aussi les assemblées et les sociétés savantes 193• Mai avait besoin de cette collaboration avec le pouvoir, il était pris par des contraintes diverses : la volonté de publier fidèlement les textes retrouvés, l'urgence de les diffuser rapidement, la nécessité de trouver des fonds pour y faire face. Et de fait, Milan comptait des mécènes généreux mais ils ne suffisaient pas. A. Mai, s'il a profité des structures d'État (Imprimerie royale puis impériale) n'a pas été totalement financé par elles et a dO trouver en propre les fonds pour couvrir nombre de ses entreprises éditoriales 19-4. Il n'en demeure pas moins qu'il put disposer des presses de l'imprimerie royale puis impériale, moins par amour du grec que par calcul politique du pouvoir en place, moins par reconnaissance envers une découverte philologique que parce que les typographes étaient tout bonnement désœuvrés et que les officiels s'inquiétaient qu'on payât les ouvriers à chômer. Le contexte était encore pesant, en particulier la censure faisait porter ses restrictions sur la diffusion des œuvres culturelles. En obtenant de faire publier sa découverte par l'imprimerie d'État, Mai se mettait à l'abri de ces difficultés. Parallèlement, le gouvernement autrichien réorganisait son enseignement public, y diminuant considérablement la part du latin et y favorisant le grec, jugé politiquement plus neutre 195• Vingt-deux D. Rota, Cultura, politica, diplomazia nella restaurazione : Angelo Mai, Giacomo Mellerio, Alfonso Castiglioni, Scandicci, 1991. spéc. p. 7-8. 194 A. Mai règla le 14 aofit 1817 au Caissier de l'imprimerie d'État, Giuseppe Sardi, le papier et les frais de reliure correspondant au volume des fragments dionysiens. Les pièces du dossier comptable de cette édition sont conservées à l'Archivio di Stato de Milan (Studi, parte modema, cartella 236). Elles sont en partie publiées par D. Rota, Cultura, politica, diplomazia ... , p. 31-42, spéc. pour cette question des frais éditoriaux p. 33. l9S Dans les premières années de la Restauration, les territoires italiens sous domination autrichienne connurent diverses mutations de leur organisation, au premier rang desquels l'instruction publique, où se mettait en place un système très hiérarchisé de l'élémentaire à l'université; l'instruction publique fut totalement refondue sur le modèle des écoles autrichiennes. L'autorité autrichienne avait constaté le niveau dramatiquement faible de l'instruction publique dès 1814, l'absence d'école pour les filles, l'analphabétisme répandu. D'où la volonté de rendre obligatoire l'acquisition des rudiments d'instruction pour tous et gratuitement. Le système fut réorganisé de façon très centralisatrice par Vienne, la direction locale de 11nstruction publique ayant surtout un rôle de contrôle et une vo- . cation exécutive. Les écoles et lycées n'avaient pas du tout d'autonomie (ni dans les programmes, ni dans les livres, qui devaient être approuvés par l'autorité autrichienne). Avant la Restauration autrichienne, les écoles italiennes étaient essentiellement communales, et surtout privées et diocésaines. Elles n'avaient aucune organisation unitaire. Dès 1816, les autorités autrichiennes mirent en place 193
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SYLVIE Pl1TIA
exemplaires de l'édition dionysienne de Mai furent achetés par l'État autrichien pour les bibliothèques et lycées 196 alors que dans le même temps, les pouvoirs publics autrichiens refusaient collectivement l'achat public des éditions latines du même A. Mai197• Des exemplaires de D. H. furent envoyés à la Chancellerie de la Cour tandis que Mai échoua ensuite, avant son départ pour Rome en 1819, à faire acquérir par les lycées et bibliothèques les neuf volumes de ses œuvres complètes. Pourquoi ce revirement? Les pouvoirs publics autrichiens désavouèrent-ils tardivement un savant à qui ses publications avaient valu de déclencher une polémique dans toute l'Europe savante198?Non, l'intérêt philologique et historique du texte n'avait jamais compté. Seules des raisons contingentes et politiques avaient permis de publier les fragments de D. H. Et quand la direction de la comptabilité de 11nstruction publique oppose à Mai un refus, en 1819,c'est pour des raisons politiques: les œuvres de Mai étaient en majorité des publications latines. L'édition des fragments dionysiens fut véritablement l'exception qui confirme la règle. Les nobles milanais les plus en vue au moun système d'étatisation et de politisation de l'institution scolaire, instrument de première importance pour le contrôle et la gestion du pouvoir. Dans ce contexte eut lieu une importante réforme du latin : le lycée ayant été porté de deux à trois ans, le latin ne fut plus étudié que la troisième année (les auteurs classiques) alors que tous les enseignements, y compris la philosophie, devaient être donnés en italien (ils l'étaient en latin jusqu'alors). Le latin cédait le pas devant le grec (langue jugée politiquement plus neutre), présent sur les trois années du cursus au lycée. Prédominait l'histoire comme discipline phare, surtout l'histoire des États autrichiens et de 11talie (matière obligatoire pour tous ceux qui voulaient accéder à la plus prestigieuse des universités, celle de droit). Le latin devenait réservé au milieu masculin (les écoles élémentaires mineures et majeures étaient ouvertes à égalité aux deux sexes à une exception près : les garçons apprenaient le latin et les filles les travaux féminins). Sur toutes ces questions, voir D. Rota, Cuttura, politica, diptomazia ... , p. 21-23. 196 Imperiale Regia Commissione Aulica centrale di Organizzazione, décret impérial du 1..-novembre 1817.Pour les documents comptables officiels sur la diffusion des vingt-deux exemplaires et la réponse du comte Saurau (3 décembre 1817),donnant son accord pour l'acquisition au prix de 30 lires le volume et mentionnant la liste des établissements concernés (un exemplaire à l'université de Padoue; six exemplaires aux lycées du gouvernement lombard; quatre exemplaires aux lycées du gouvernement de Vénétie; un exemplaire au lycée de Lubjana et un à Innsbruck; les autres à la Commissione Aulica Centrale di Organizzazione, à charge pour elle de les répartir), voir D. Rota, Cuttura, potitica, diplomaz,ia ... , p. 35-39. Une lettre de Mai adressée au gouvernement de Lombardie, le remercie pour cette acquisition des vingt-deux volumes (A. Mai, Epistolario, G. Gervasoni éd., 1, Florence, 1954, lettre 168, p. 237, 24 janvier 1818). Faut-il exclure que Mai ait lui-même sollicité les autorités pour ces achats? 197 D. Rota, Cuttura, politica, diplomazia ... , p. 10-12. 191 La réponse définitive ne fut donnée que le 7 avril 1820, alors même que Mai avait déjà quitté Milan pour Rome (31 octobre 1819), appelé par Pie VII et le cardinal Consalvi, secrétaire d'État, à diriger la Bibliothèque Vaticane.
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ment de la disnapoleoniuazione furent les financiers qui aidèrent Mai à publier : Giacomo Mellerio, vice-gouverneur aux côtés de Saurau, futur responsable de la chancellerie morave à Vienne 199, ou encore le marquis de Trivulzio, homme de lettres autant que mécène. Dans le même temps, on enterrait, après avoir différé de trois mois ses obsèques, le duc Melzi d'Eril, grand protecteur et connaisseur des lettres antiques (c'est à lui qu'avait été dédiée la Collezione di Classici latini publiée entre 1804 et 1814) : on attendit que l'empereur d'Autriche fat parti pour célébrer la cérémonie funèbre d'un noble milanais lettré trop compromis avec les Français. La revue culturelle qui défendit le plus A. Mai fut la Biblioteca Italiana, dont la création avait été encouragée par les autorités politiques autrichiennes et en sous-main financée par elles 200 • La parution de son premier numéro a lieu précisément au premier trimestre 1816 (avec le fameux article de Madame de Staël sur la manière et l'utilité des traductions) 201 • Longtemps après que D. H. eut directement seIVi la propagande impériale augustéenne, longtemps après que ses livres eurent été instrumentalisés et que des sélections eurent été opérées sur l'œuvre selon les indications d'un souverain byzantin, le texte dionysien devenait de nouveau un enjeu politique et culturel dans une capitale lombarde reprise en mains par les Habsbourg. Ce que Mai édita dans la précipitation peu de temps après sa découverte ce fut la partie inédite des fragments ambrosiens, la pars hactenus desiderata. Il chercha à introduire dans le texte dionysien un découpage en livres et en paragraphes. Cette édition fut précipitée et ses résultats contestés, mais elle valut à A. Mai dès mai 1816, un mois avant la parution du livre, sa promotion comme docteur de l'Ambrosienne (avec une rémunération plus substantielle). Surtout elle déchaina les passions dans toute l'Europe. La polémique naquit d'un philologue italien Sebastiano Ciampi 202 , elle fut alimentée par les plus grands noms de la philologie, ainsi que l'attestent les revues "'Giacomo Mellerio (1777-1847) eut un rôle financier mais il fréquentait luiles bibliothèques et conçut un intérêt véritable pour les publications de
~
Mai. - Sur les rapports de Mai avec cette revue, voir G. Gervasoni, Angelo Mai e la •siblioteca italiana", dans Be,gomum, 25, fasc. 3, 1931, p. 163-187. Le premier numéro de la revue avait paru au premier trimestre 1816, discrètement appuyé par les autorités autrichiennes, qui avaient interdit parallèlement deux journaux politiques à Milan juste avant la visite impériale, Il Giomale italiano et Il Corriere milanese . .. Les textes intéressant ces querelles sont repris dans E. Bellorini, Discussioni e pokmiclw sui romantismo (1816-1816),2 vol. Bari, 1943. - S. Ciampi, Estratto delle osservazioni sopra la Epitome di Dionisio d'Alicarnasso lette in Firen~ nella seduta dell'imperiak e realeAteneo italiano il dl 21 ~tt~ 1816, Pise, 1816 (12 pages,Ranieri Prosperi imprimeur). L'opuscule est dédicacé au comte Viaro di Capo d1stria.
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savantes mais aussi les correspondances privées: Pietro Giordani 203 répondit à Ciampi pour défendre A. Mai, le débat vit prendre position Ennio Quirino Visconti 204 ou Barthold-Georg Niebuhr 205; August Schlegel ou Guillaume Favre Bertrand 206 s'en mêlèrent, tout comme Giambattista Canova 207 ou Bartholomaus Kopitar 208• Gia-
Abbé, Ciampi fut professeur de littérature antique à l'Université de Pise (1803-1817), puis à l'Université de Varsovie (1817-1822) où il fut appelé par le tsar Alexandre Jer.Il a surtout traduit du grec (Pausanias, Plutarque) mais il s'est aussi occupé des relations de 11talie avec la Russie et la Pologne. Il mourut fou. 203 Voir note 182. 204 C'est incontestablement le savant qui fit autorité dans la querelle. E. O. Visconti (Rome, 1751; Paris, février 1818) était historien de l'art et archéologue; son nom est particulièrement associé à la description des collections du Musée Pio Clementino. Il fut sous-bibliothécaire de la Vaticane (1771), bibliothécaire de la Chigiana et cameri.ered'onore de Pie VI. Nommé ministre de 11ntérieur par les Français en 1807, il vint, l'année suivante, après la révolte de Naples, s'établir à Paris. Il fut alors professeur au Musée du Louvre et dirigea, mandaté par Napoléon, les collections d'art antique. Voir P. Treves, Lo Studio dell'Antichità nell'Ottocento, Milan, 1962, p. 3-16. 205 Il y avait eu une âpre polémique entre les deux hommes à propos de la Correspondance do Fronton. B. G. Niebuhr devient ambassadeur de Prusse auprès du Saint-Siège en 1816 : les relations entre les deux savants sont aussi très tendues quand Mai va devenir Préfet de la Vaticane. Il ne faut pas oublier que Bonaparte avait fait stipuler dans le traité de Tolentino, en 1797, la cession à la France par le pape Pie VI de 500 manuscrits de la Vaticane. Niebuhr, encore jeune et alors secrétaire de la Bibliothèque royale de Copenhagen, rencontra Grouvelle qui le pria, vu sa connaissance des manuscrits, de dresser une liste (cette liste est publiée dans le tome 4 de la traduction française que Golbéry donna de l'Histoire romaine de Niebuhr, Bruxelles, 1842, p. 314-323, sous le titre Notice pour servir d'instruction au commissaire de la République qui sera chargé de faire à Rome le choix de 500 manuscrits qui doivent itre tirés des bibliothèques du pape). Elle fut remise à Charles Delacroix, ministre des relations diplomatiques. L'hostilité des savants avait aussi pour arrière-plan ces querelles intéressant la politique culturelle des États. Leur rivalité philologique ne fut pas exempte de coups bas, et malgré la régularité de leurs échanges scientifiques, les deux hommes se détestaient cordialement. De façon générale, voir G. Gervasoni, Le prime scoperte di Angelo Mai nella Biblioteca Vaticana ed i suoi rapporti con B. G. Niebuhr, dans Athenœum, 6, 1, 1928, p. 55-84. L'article est évidemment plutôt consacré aux découvertes des années 1819 et suivantes, mais il revient sur la période milanaise du Bibliothécaire, spéc. p. 74-75 pour D. H. Voir aussi A. Pertusi, Angelo Mai scopritore ed editore di testi greci classici e bi1,antini, dans &rgomum, 28, fasc. 4, 1954, p. 167-193, spéc. p. 183, n. 30. 206 Cet homme de lettres français (1770-1851) fut très lié à Mme de Staêl et prit part à nombre de débats artistiques, à travers ses échanges épistolaires et ses articles, tout spécialement dans la Bibliothèque Universelle de Genève. Voir infra p. 160. 207 G.-B. Canova (1775-1858) était le frère utérin du sculpteur, Antonio Canova, qu'il a suivi dans ses pérégrinations artistiques en Italie et en Europe. C'était un savant reconnu en lettres grecques et latines. 208 Bartholomaus Kopitar (1780-1844) était un grand philologue slave. Il a collaboré à partir de 1818 aux Jahrbacher der Literatur.
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como Leopardi lui-même y fut fortement impliqué et entreprit de publier non seulement une dissertation plaidoyer en faveur de Mai mais encore une traduction des fragments mis au jour par le bibliothécaire209. Cette polémique avait trois objets essentiels : - le texte retrouvé était-il bien de D. H.? était-il même authentiquement une découverte de Mai comme le contesta Niebuhr? - le texte était-il un résumé ou une anthologie? - le texte était-il convenablement édité? S. Ciampi, professeur à l'Université de Pise, prononça à Florence une conférence le 21 septembre 1816, dans laquelle il opposa à A. Mai plusieurs objections; il fit ensuite diffuser son libelle dans toute l'Europe et Mai en eut vite connaissance 210• Les excerpta ambrosiens ne pouvaient pas selon Ciampi être l'épitomè de D. H. car on rencontre des expressions qui ne sont pas celles de D. H. Deuxièmement, D. H. ne pouvait être l'auteur de l'épitomè car en certains passages des A. R. et de ses autres œuvres, il se montre hostile à la méthode des compilateurs 211• Troisièmement, la citation par Mai de Nous y consacrons le dossier annexe p. 199-224. La correspondance en atteste (A. Mai, Epistolario, G. Gervasoni éd., vol. 1 (juin 1799-octobrel819), Florence, 1954). Une lettre du 18 décembre 1816adressée à Milan à Giuseppe Acerbi (qui était le directeur de la Biblioteca italiana) comporte des remerciements pour lui avoir communiqué l'opuscule de Ciampi. Mai indique que Giordani prépare des réponses et il souhaite qu'elles soient publiées dans la Biblioteca italiana (lettre 107, p. 166). Sur le même sujet, Mai indique le 10 février (1817] au marquis de Trivulzio qu'il prépare sa réponse (lettre 114, p. 170). Acerbi semble avoir lui-même offert de répondre à Ciampi mais Mai, le 18 mai [1817], dit attendre la contre-offensive de Giordani {lettre 122, p. 182184): «Ho penetrato se male non mi appongo, le di Lei intenzioni amichevoli verso di me nel mandarmi offerire di scrivere sopra l'Opuscolo del Ciampi, il quale scrittore nè da me conosciuto nè da me offeso ha attacato il mio Dionigi contradicendo apertamente aile mie opinioni. Non di meno io sto a vedere corne si porta il Ciampi dopo che avrà veduto lo scritto contrario del Sig. Giordani. Presentemente non pare che stia bene lodare il Ciampi nè contradirgli-. Les articles que préparaient Giordani prirent finalement la forme d'une lettre adressée à G.B. Canova, voir infra note 214. La Biblioteca italiana prit certes parti pour Giordani contre Ciampi, mais elle recensa les critiques de Ciampi en même temps que l'opuscule de Giordani qui les réfute (BI, 1817, 2, t. 8, p. 225-237; la recension est anonyme). 211 S. Ciampi (Estratto delk osservazioni ... , p. 3) cite aussi l'hostilité de D. H. envers les abrégés, rappelée au livre 1.5 et 1.63 des A. R., ainsi qu'au livre 5.48.1 (à propos des grands capitaines et du récit de leur vie) : nav-toç µai..1ata TOO'tovoµ{l;cov7tpoV tinCJ't11µ0>v 11y1:µ6voov 6L1:ç,tva1. .. aÂ.À.à ,cal Toùç l3iouç am&v ... tm6Eiicvoo8a1(«Je considère comme le principal devoir des historiens de ne pas seulement rapporter les exploits militaires des généraux expérimentés,( ... ) mais aussi de mettre en valeur leur vie privée•). 209
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la notice de Photius n'est pas suffisante et des raisons stylistiques témoignent en sens contraire. Pour Ciampi, D. H. ne peut avoir renié les principes exposés dans les A R. quand il aurait fait l'épitomè, laissant ici de côté la vie des grands capitaines et ne racontant que leurs exploits. Il rappelle qu'Henri Estienne croyait aussi à une erreur de Photius attribuant cette synopsis à D. H. alors qu'elle aurait été réalisée à partir de l'œuvre de D. H. Après une longue exégèse du texte de Photius, Ciampi l'interprète comme l'indication que D. H. n'est pas l'auteur de l'épitomè mais que celle-ci est composée après la mort de D. H. par le D. H. atticiste, rhéteur et grand lettré vivant à l'époque d'Hadrien, dont D. H. l'historien fut l'ancêtre. Ce D. H. là est l'auteur de diverses œuvres dont celles sur la musique et pourrait avoir été l'auteur de l'épitomè selon Ciampi 212• Ce dernier avance qu'il ne faut pas intituler ce livre épitomè mais excerpta, pour désigner le rassemblement modérément ordonné de faits décousus (ce ne sont pas à ses yeux des épisodes mis dans l'ordre chronologique). Ciampi observe qu'on rencontre des digressions et discours, bien plus que dans un résumé ordinaire (cf.la description de la Gaule, le passage sur la foudre, l'olivier sacré d'Athènes). De plus il y a des lacunes de plusieurs années, parce que le compilateur a sauté des passages. Il conclut donc que cette épitomè n'est pas dionysienne et Ciampi remercie Mai d'avoir «édité quelque chose», mais qui n'est ni du D. H. authentique ni les A R. résumées par lui. La défense de Mai fut essentiellement assumée par Pietro Giordani d'abord dans un article court en 1816213 puis dans une lettre en 1817214• Le premier article est très descriptif: il présente D. H., son œuvre, les anthologies contantiniennes qui faisaient connaître les précédents fragments; il décrit les manuscrits ambrosiens, traduit une partie de la préface latine que Mai avait donnée en 1816. Dans l'ensemble, cet article ne fait que reprendre en italien les arguments avancés par le philologue dans son livre et Giordani n'ajoute presque
A. Mai réfuta cette hypothèse comme l'atteste sa correspondance (Epistolario... , lettre du 5 juin 1817à Giuseppe Acerbi, n ° 129, p. 189-190).Parmi les critiques, il voulut surtout faire un sort à celles qui niaient que D. H. f1ltl'auteur des fragments. P. Giordani exprima un désaccord semblable, soulignant que Photius connaissait D. H. l'Atticiste et il est peu probable qu'il eOt commis la confusion (voir note 214). m P. Giordani, L'Alicamasseo del Mai, s. 1.,[1816]. Cet article assez court est repris dans les Opere, éd. revue et corrigée [s. n.], Florence, 1846, p. 337-347. S'agit-il d'un des articles parus dans les journaux milanais et dont fait état la correspondance? En tout cas il est daté de 1816 dans l'édition revue sur les notes de Giordani (sans que l'auteur des corrections soit mentionné). 21 ◄ P. Giordani, ùttera al Chiarissimo Abate Giambattista Canova sopra il Dionigi trovato dall'abate Mai, Milan, éd. G. Silvestri, 1817. La lettre est datée du 1erjuin. 212
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rien: l'imitation du modèle le pousse à reprendre l'illustation qui représentait D. H. écrivant la préface des Antiquités romaines, habillé en costume oriental 215 , et à paraphraser en italien la préface latine où la visite de l'empereur d'Autriche était racontée par Mai. Il semble en fait qu'il ait ignoré le libelle de Ciampi au moment de cette première publication. Dans la Lettre à Canova de 1817, en revanche, les éléments de la polémique sont connus : Giordani dit l'utilité des questions posées par Ciampi sur la détermination de l'auteur, la nature du texte. Il souligne la prudence de Mai, qui n'a pas touché à l'ordre des fragments tel qu'il se présente dans les manuscrits. Giordani penche, comme Mai, pour une épitomè, qui raconterait en substance les propos de l'original tout en les réduisant : les passages sur la conduite de uetorius Mergus lui paraissent sur ce point significatifs. Le texte serait une narration abrégée mais respectant l'ordre de l'original dionysien. Giordani s'appuie sur les fragments du livre 1, pour lesquels la comparaison avec la version étendue est possible. Il tire parti des dissemblances entre les titres de l'œuvre dans les deux manuscrits et conclut qu'ils ne sont pas copiés l'un sur l'autre, qu'ils ne sont pas davantage tirés d'un même archétype, mais qu'ils ont une origine différente : il donne au plus long des deux, jugé le plus ancien, le plus de valeur. En tout état de cause, le texte est à ses yeux authentique, même s'il s'agit d'une version abrégée des A. R. La même année, P. Giordani publia une édition italienne des fragments ambrosiens, avec quelques rares notes, comportant des sélections pour les premiers livres et pour les derniers, certains des fragments nouveaux 216• Mais la suite de la querelle 215 Cette image figure d'une part dans certains manuscrits des premiers livres de D. H., peinte en couleurs vives : c'est le cas du Chisian. gr. R VIII 60 (X• siècle; contient les dix premiers livres des A. R.), on la trouve au folio de garde anté-
rieur III (dimensions ca 300 x 200 mm). Une reproduction de qualité médiocre figure dans le manuscrit Vat. gr. 133 (XV• siècle; contient les onze premiers livres des A. R.; l'image de D. H. est présente au folio de garde antérieur IV). Une gravure semblable se trouve dans un manuscrit parent du précédent, l'Ambr. A 159 sup. (XV• siècle; contient les livres 1-5 et une partie du 11) et elle est reproduite chez R. de Montfaucon (Palœographia grœca, tab. adv. p. 24; cf. aussi Diarium ltalicum, 1702, p. 238). L'image sert également de frontispice à l'édition Mai de 1816. Nous l'avons reprise sur la couverture du livre. 21• P. Giordani, Frammenti di Dionigi Alicarnasseo nelle Antichità romane, 1817, republié dans Opere, éd. revue et corrigée [s. n.], Florence, 1846, p. 491-516. Cette publication comporte : A R. 1.9; 1.35-38 (partim); 5.56; les extraits qui figurent dans les Ambassades à propos de Postumius à Tarente; les extraits qui figurent dans les Vices et vertus à propos de Caïus Lztorius; des fragments des livres retrouvés par Mai (livres 14.A à 14.K partim, puis de 19.0 à 19.T). Giordani signale quelques divergences philologiques par rapport à Mai. Nous avons pu seulement consulter la réédition de 1846, qui ne permet pas de préciser où s'était faite l'édition originale, qui devait comporter de plus larges extraits des textes ambrosiens, voire leur totalité (voir note 217).
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fit paraître à Giordani que Mai n'avait pas raison sur bien de points (comme il l'admit lui-même d'ailleurs) : ainsi quand furent éditées ses œuvres complètes en 1846, il reconnut que si le sujet et les mots étaient bien de D. H., les manuscrits ambrosiens contenaient des morceaux choisis et non un résumé 217 . On connaît la réaction de Ciampi à l'argumentaire de Giordani, il fut peu convaincu par la réplique218: pour trancher entre les deux savants, il fallait une autorité incontestée au sein de la communauté scientifique : Ennio Quirino Visconti. Toutes les grandes revues européennes alimentèrent la polémique par des articles et E. Q. Visconti fut l'arbitre du conflit entre A. Mai et les philologues italiens dans le premier numéro du Journal des Savans qui reparut après la longue coupure révolutionnaire (il
217 P. Giordani, Opere, éd. revue et corrigée [s. n.], Florence, 1846. Page 514, l'éditeur souligne que la dissertation de Giordani publiée en 1817 par Silvestri fut réimprimée dans la raccolta des œuvres de Giordani publiée à Naples, puis à Palerme et avant dans celle de Brighenti. Mais quand Silvestri a voulu, en 1842, faire imprimer en 5 volumes les ouvrages complets, Giordani conseilla lui-même de ne pas inclure cette dissertation, qui lui paraissait intéresser très peu de lecteurs, et de ne conserver que la traduction de quelques-uns des fragments, en laissant aussi de côté les notes concernant les fragments nouveaux. Les arguments avancés étaient que la longue dissertation contenait trop de grec. La question de la nature des fragments paraissait résolue pour les milieux savants et il n'était plus nécessaire de reproduire la dissertation. Au contraire, il restait profitable de remettre les notes philologiques qui accompagnaient la traduction des fragments nouveaux : ceux-ci justifiaient des choix de traduction et pouvaient intéresser ceux qui ont souci du grec. Il paraissait plaisant, aux dires de l'éditeur (Felice Le Monnier), de faire revivre les travaux des savants milanais, de retracer la gloire montante de Mai et de rire de la jalousie dont il était victime. 211 On connaît par une lettre écrite par G. Acerbi à Mai le 25 juin 1817 la teneur des réactions de Ciampi, retranscrites confidentiellement (G. Cozza Luzi, Epistolario del cardinale Angelo Mai, Bergamo, 1883, p. 4-6) : «In fatto poi dell'argomento trovo da distinguere due cose. 1° Che sia stile e materia di Dionisio è mostrato con dottrina e con forza, nè a questo mi opposi, supponendo che quelle voci ibride e nuove vi fossero intruse od anche dal medesimo Dionisio usate. La via di giustificarle per analogia o per approssimazione non è tale da assicurarsi senza esitanza; e la supposizione che possano esser voci e maniere nuove lascia la questione del medesimo piede per un lato e per l'altro. 2° Che poi sia lavoro di Dionisio rimane, a senso mio, un punto tutto questionabile, intendo parlar del compendio non già del fondo della materia. La spiegazione di quel luogo di Fozio è l'unica che puô darsi, quando non si ammette la mia; ma credo spassionatamente parlando, non sia tale da escludere ogni dubbio in contrario. Il confronto dei due codici è dotto e diligente ... In somma il libro dal signor Mai pubblicato, non questionando di nomi, è utile, e son convinto che la materia nel totale è di Dionisio; che poi sia un compendio fatto da lui medesimo non ne ho una pari persuasione. Eccole parlato jwcta conscientiam ... Tra i due questionanti vedremo corne nè giudicherà Visconti essendo sui suo tavolo gli argomenti dell'uno e dell'altro. Aspetto con ansietà le nuove scoperte del dotto, industrioso e benemerito signor Mai».
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était interrompu depuis 1792)219• Visconti repoussait l'idée que les manuscrits édités par Mai pussent être l'épitomè dont Photius a fait mention. Ces excerpta étaient, pour le savant, du même genre que ceux publiés par Orsini et Valois. On y trouve en effet, dit-il, des harangues entières, des descriptions faites avec soin, de longues observations morales. Visconti le premier, fit remarquer que, à deux reprises, le manuscrit ambrosien est plus long que les passages connus par les autres traités. Cè ne pouvait être un résumé du texte dionysien d'autant qu'au dire de Photius, l'épitomè présentait un caractère très sobre et concis, sans ornement. Au contraire, dans les manuscrits ambrosiens, on cherche à extraire les morceaux les plus brillants. Visconti pensait que le manuscrit original dont avaient été tirées les deux copies retrouvées à l'Ambrosienne était en majuscules comme le montraient quelques erreurs de transcription. Tout comme Giordani, Visconti confirma le bien fondé de l'ordre dans lequel Mai avait édité les fragments, mais il lui fit reproche de la division en livres et chapitres (p. 367) : «La distribution que l'auteur a faite en neuf livres, ainsi que l'insertion de chaque fragment plutôt dans un livre que dans un autre, n'est point autorisée par les manuscrits et est simplement conjecturale; malgré cela, on ne peut contester à l'éditeur d'avoir disposé la plupart de ces fragments dans un ordre chronologique très souvent certain et toujours soutenable». Visconti discuta les critiques formulées par S. Ciampi et concéda à Mai que la deuxième objection de Ciampi sur la rédaction par D. H. lui-même de l'épitomè, portait faiblement. Visconti sur la base d'un article de Boivin 220, pensait que la synopsis et la chronique étaient un même ouvrage. Visconti globalement accordait donc à Mai que les fragments étaient bien de D. H. et le bibliothécaire en tira parti : il le fit savoir à l'Europe savante, par exemple en sollicitant de~ prises de position publiques ou des articles de soutien auprès de Favre Bertrand 221, de Giambattista Ca119 E. O. Visconti, [«Compte-rendu de l'édition des fragments de Denys d'Halicarnasse par A. Mai (Milan, 1816) et des Observations sur l'Epitomè de Denys d'Halicarnasse, par S. Ciampi»], Journal des Savans, 1817, p. 361-370. La correspondance de Mai montre que ]'affaire est assez compliquée (Epistolario ... , lettre 133, p. 193-194): il écrivit à Visconti Je 14 juin 1817 parce qu'il avait appris que ce dernier aurait promis à Ciampi de faire insérer dans le Journal des Savans ses observations contre la publication de Mai. Le bibliothécaire demanda que si une telle publication avait lieu, lui fOt adjointe la réponse de Giordani. Il semble que finalement, l'artide de Visconti était un moyen d'éviter la publication contradictoire et de rendre l'arbitrage entre les savants. L'article parut en juin 1817 et Visconti, déjà malade, mourut quelques mois après, en février 1818. uo Voir note 14. ui Voir Epistolario ... , lettre 134, p. 195-197, à GuiUaume Favre Bertrand, Genève; 18 juin 1817 (Mai lui envoie en même temps ses livres, l'artide de Giordani et mentionne la polémique avec Ciampi, signalant que Visconti a tranché sur
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nova 222 , de Bartholomaus Kopitar 223 , d'universitaires italiens comme Luigi Rezzi ou Domenico Scinà 224• Et surtout, à Milan même, il avait besoin de faire savoir auprès des intellectuels que ses travaux étaient en quelque sorte réhabilités par Visconti, comme le prouve un long argumentaire adressé à Giuseppe Acerbi 225 • A. Mai met l'accent sur les réfutations des arguments de Ciampi, et concurremment sur les vues de Visconti coïncidant avec les siennes. Il admet qu'il ne s'agit pas d'un résumé mais de morceaux choisis, met l'accent sur leur authenticité là encore, fait largement siennes les corrections philologiques que Visconti suggère226.Mai remercia directement Visconti et, par la suite, ajouta quelques lignes des conclusions du savant dans l'édition de ses propres livres 227 . Il poursuivit le débat dans les mois qui suivirent l'authenticité dionysienne des fragments) : «Il professore Ciampi, da me nè conosciuto nè offeso si studia in tutti i modi di screditare il mio Dionigi, ed ha sparso per tutta l'Europa le sue vane Osservazioni sopra di quello. Ella poi saprà che anche Visconti nel giugno del Journal des Savans ha deciso che questo infallibilmente è Dionigi, ed ha rigettato le ragioni o apparenze del Ciampi-. Les sollicitations de Mai sont appuyées puisqu'il adresse à Favre Bertrand au moins deux autres courriers (Epistolario ... , lettre 155, p. 220-222, 20 septembre 1817, où il demande la réaction de Favre sur l'article de Giordani; lettre 160, p. 225-226, du 26 novembre 1817, où Mai décrit le generak applauso en réaction à sa publication). Au bout du compte, Favre Bertrand publie un compte rendu dans la Bibliothèque Universelle (janvier 1818, t. 7, p. 28-38 «Denys d'Halicarnasse. Analyse d'une publication de l'abbé A. Mai, qui contient plusieurs fragments inédits de cet historien (Milan, 1816, in-4°)») où il admet que les fragments sont plutôt des extraits qu'un abrégé. Finalement, Mai parait se satisfaire de cet article (Epistolario ... , lettre 176, p. 246, à Guillaume Favre Bertrand, Genève; 28 février 1818). 222 Epistolario ... , lettre 153, p. 219, à Giambattista Canova Sartori, Rome; 10 septembre 1817: Mai remercie Canova pour son arbitrage en faveur de Giordani contre Ciampi. m Epistolario ... , lettre 164, p. 230, à Bartholomâus Kopitar, Vienne; 13 janvier 1818 : Mai espère que la dissertatio Italica concernant D. H. est connue de lui. U s'agit à l'évidence de la défense écrite par Giordani. m Epistolario ... , lettre 187, p. 258-260, à Luigi Rezzi, Rome; 13 juin 1818 : Mai a envoyé l'article de Giordani à Domenico Scinà, professeur à l'Université de Palerme (1765-1837), qui était un collaborateur du Giomak Arcadico. Luigi Rezzi était lui-même un Jésuite et a enseigné à Naples et à Palerme, avant de devenir bibliothécaire de la Barberiniana puis de la Corsiniana (1785-1857). 225 Epistolario ... , lettre 139, p. 200-204, à Giuseppe Acerbi; Milan, 25/30 juin 1817. Voir annexe C p. 224-227, où nous reproduisons le texte, qui est en réalité la seule véritable défense argumentée de Mai, encore qu'elle ne fOt pas destinée à être publiée. Comme le lui a reproché Ciampi, Mai fit appel à des tiers pour défendre ses choix éditoriaux. 226 Il les cite largement en notes dans l'édition de la Scriptorum ueterum noua collectio, Rome, 2, 1827 et les reprend à son compte. m A. Mai montra sa reconnaissance en lui dédicaçant prestement le livre consacré à la polémique sur les fragments de Fronton et de Cicéron (De editionibus principibus mediolanensibus fragmentorum Ciceronis atque operum Frontonis commentationes, Milan, 1817): « ... E.quidem scio, te Dionysium quoque Halicar-
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en répondant aux objections sur l'impression en caractères majuscules, bientôt abandonnée 228• La polémique avec Ciampi avait elle aussi dans le même temps connu un second souffle, bien que le philologue fftt désormais éloigné du théâtre italien des opérations. Les deux hommes ne se connaissaient point avant la publication du premier libelle; outre les publications savantes, des articles de presse anonymes avaient alimenté la brouille 229 , et malgré les tentatives de médiation sans doute conduites par Acerbi, ils n'avaient pu véritablement dialoguer 230 • La nasseum in iis, quœ ego nuper edidi, Supplementis magno cum gaudio atque honorificentia salutauisse, eidemque clarissimum grauissimumque testimonium dedisse » (Epistolario ... , lettre 144, p. 208-209, à Ennio Quirino Visconti, Milan; I• aotlt 1817). Et dans le livre, Mai adjoint à la dédicace un extrait du Journal des Savans, juin 1817, p. 370: « ... Les fragments publiés par M. l'abbé Mai sont si évidemment conformes aux fragrnens des livres perdus de Denis (sic) d'Halicarnasse que d'autres critiques avaient retrouvés, et en général au style de cet inestimable écrivain, que l'AtrrHENTICJrt et le MtRITE de ces morceaux ne pourront être remis en question par aucun critique qui les lira et les examinera avec attention». Mai le remercie de nouveau pour son jugement dans le Journal des Savans et lui adresse le volume des fragments de Cicéron; il a désormais entendu parler de la maladie de Visconti (Epistolario ... , lettre 147, p. 211-212, à Ennio Quirino Visconti, Milan; 14 aoOt 1817) : « .. .io commincio dal ringraziarla per lo Articolo tanto a me favorevole sopra il Dionigi che ho letto nel Giornale dei Dotti. Questo Articolo non poteva essere per me più consolante, vedendo io deciso dal massimo de' Letterati che i Pezzi da me stampati, sono veramente di Dionigi; perocchè l'altro punto degli Estratti o della Epitome {almeno in parte) assai meno importava; anzi corne Ella graziosamente mi dice, io devo desiderare che siano Estratth. 228 Epistolario ... , lettre 152, p. 216-219, à Ennio Quirino Visconti; Milan, 10 septembre 1817 : do scelsi pel Dionigi, i caratteri majuscoli perdue motivi, uno fu l'aver veduto alcune edizioni antichissime con tali lettere ( ... ), l'altro motivo fu che dedicando all1mperatore presente in Milano il Dionigi, mi parve che l'edizione in majuscoli riuscisse più speciosa. Tuttavia non sono per seguire altra volta questi avvish. Dans la même lettre, Mai demande à Visconti de transmettre la lettre de défense écrite par Giordani à la Quarter/y Review de Londres (elle ne parait pas avoir été publiée, au vu de nos dépouillements; voir note 240). ll9 Un article non signé avait paru dans le Spettatore. Nous n'avons pu le retrouver. Ce journal avait commencé à paraitre en mai 1814 grâce à Anton Fortunato Stella (l'éditeur de Leopardi). Il s'agissait d'une imitation en langue italienne du journal parisien u Spectateur ou Variétés historiques, littéraires, critiques, politiques et morales par M. Malte Brun, publié entre avril 1814 et juin 1815 par le géographe danois Konrad Malthe Bruun (1775-1826), naturalisé français sous le nom de Malte Brun. Au bout d'un an, Stella chercha à en faire un journal original en italien. En décembre 1818, il fut remplacé par Il Raccoglitore, dans lequel David Bertolotti jouait un grand rôle (voir M. Berengo, lntellettuali e librai ne1laMüano t.kl/a R.estaurazione, Turin, 1980, spéc. p. 205). 2J0 En témoigne leur échange épistolaire empoisonné (Epistolario ... , lettre 146, p. 210-211, à Sebastiano Ciampi, Florence; 9 aoOt 1817): relevant qu'il n'y a pas eu de relation épistolaire entre eux avant, Mai dit son admiration au savant malgré leur différend et lui annonce la réimpression augmentée de son Cicéron, et la lui adresse {Ciampi y est même cité car il avait publié un article sur le Somnium Scipionis). Mai propose d'inviter Ciampi à une rencontre littéraire. Mais le
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rupture était même consommée, la querelle s'envenima. Depuis la Pologne et ses sociétés savantes, Ciampi fit le procès non plus du livre mais de l'homme et de ses soutiens 231• Reprenant le débat lancé par ses propres observations et l'article de Visconti dans le Journal des Savans, Ciampi évoque ceux qui ont pris part à la querelle et son témoignage est précieux car il nous révèle, de façon partisane et assez agressive certes, les dessous d'une cabale, éclairant les liens entre les acteurs et leurs intérêts. Ciampi reproche à Mai, non sans fondement, d'avoir fait pression dans ses lettres sur Visconti, pour qu'il tranche en sa faveur. Mai redoutait un jugement qui aurait condamné son travail et espérait d'un avis favorable qu'il entraînerait l'accord de tous. Il lui fait grief d'avoir détourné le sens des paroles de Visconti en occultant le passage le plus dur, qui infirme catégoriquement l'hypothèse d'un Abrégé. Ciampi crie au mensonge de Mai qui faisait une citation tronquée de Visconti, et après avoir rappelé ses propres propos, il cite à l'appui l'article de Favre Bertrand dans la Bibliothèque Universelle de Genève 232 : «Je pense donc que le nouveau Denys est une suite d'Extraits indépendants les uns des autres, qu'ils ont été souvent raccourcis par le copiste». De même, il revient sur la phrase cinglante de Visconti et insiste sur la formule qui condamne l'idée de Mai sur le compendium : « ... ne peut se soutenir un seul instant» 233• contenu de cette lettre fut rendu public à l'insu de Mai dans le Giorna/e di letteratura e belle arti (1817, 2, p. 124-128). Ciampi répondit par ailleurs au bibliothécaire (et le contenu de sa lettre est en totale discordance avec ce qu'il affirme plus tard dans les Feriœ. Cette lettre (Florence, le terseptembre 1817) remercie Mai de sa courtoisie et de son urbanité. Ciampi souhaite désormais entretenir avec lui une correspondance littéraire. Il lui parle d'Asconius puis revient sur l'article de Visconti, regrettant que Visconti se soit perdu dans les détails et n'ait pas répondu sur les grandes lignes du débat. Diverses polémiques sont ensuite mentionnées : une publication défavorable à Mai dans le journal Lo Spettatore (Ciampi nie l'avoir sollicité et dit ignorer qui l'a écrite); il dément avoir donné en premier son libelle à Visconti, auquel Schlegel aurait en réalité prêté le fascicule. La lettre se conclut par divers échanges de politesses. 231 S. Ciampi, Feriœ Varsevienses, Varsovie, 1818, n° 3, «De iUis quœ pro cl. Angelo Maio allata sunt contra Observationes in Epitomen Dionysianam Pisis editas, examen criticum-historicum ab Observationum Auctore institutum ad usum studiosœ Polonœ Juventutis». 232 Bibliothèque Universelle de Genève, 1818, t. 7, p. 36. m Sur quelques points cependant, Ciampi fait un peu machine arrière quant à l'authenticité et porte l'accent sur la nature du texte, excerpta ou épitomè, réaffirmant sa position propre: ni une épitomè, ni la synopsis dont parle Photius. Il relève l'assentiment de Visconti («une certaine apparence de raison») et celui de la Bibliothèque Universelle (p. 32 : «cette objection a quelque chose de frappant»). Ciampi exprime son désaccord par rapport à Visconti concernant un passage de la préface à propos d'une «chronique de l'histoire universelle». Il pense plutôt à une chronographie au sens où ce serait un tableau chronologique synoptique. L'essentiel de la critique porte sur la personne même de Mai et ses méthodes.
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Mai n'a pas assumé lui-même la controverse et est intervenu en sous-mains en faisant écrire ses amis. Ciampi évoque la lettre que Mai lui a envoyée, et qui élude le sujet, accompagnée de flatteries diverses. Mai savait que le professeur partait en Pologne, cette invitation était ridicule; le bibliothécaire a choisi de se taire quand Ciampi était en Italie et de proposer une recontre une fois qu'il a été parti en Pologne. Qui plus est, il n'a pas reçu la seconde édition du Cicéron, promise par Mai, et Ciampi se l'est achetée lui-même! Ciampi insiste sur le rôle des riches mécènes qui ont aidé Mai à Milan et qui lui ont permis d'éditer ses œuvres. Et c'est là qu'il est le plus virulent, fustigeant les mécènes de Mai, G. Mellerio et le marquis de Trivulzio 234 : «Je félicite l'abbé Mai d'avoir trouvé un si grand protecteur, et je forme le vœu que pendant très longtemps, de ses yeux de lynx et avec habileté, il explore les manuscrits et surtout les palimpsestes, qu'il enquête, qu'il transcrive : qu'il publie des livres riches de ses inventions, augmentés de ses préfaces et de ses notes interminables, qu'il se prévale de sa bonne fortune, de son travail, de sa science; mais qu'il veuille bien garder toujours sous ses yeux ce que contient le texte grec•. Et Ciampi achève de ruiner les travaux de Mai en citant quelques lettres d'érudits qui ont pris parti dans la querelle : il produit le témoignage de G. F. Napione 235 , J. Morelli236, C. Lucchesini 237 en Ita"' Toute la fin du libelle est une attaque contre Mai et ses protecteurs : •Dum igitur gratulor cl. Maio pro tanto adinuento Patrono, precor diutissime linœis oculis et callide Codices, palimpsestos prœsertim, rimet, inuestiget, exscribat : Libros e.dat suis inuentis locupletes, prœfationibus, notisque ornatos quantum libet utensis, glomtur fortuna, labore, et doctrina sua; prœ oculis tamen semper habere uâit quod est in grœcis •·
n 5 G. F. Galeani Napione (1748-1830) appartenait au milieu intellectuel piémontais. 2l6 Jacopo Morelli (qui mourut peu de temps après à Venise, le 5 mai 1819) avait été nommé en 1778 conservateur de la bibliothèque de Saint-Marc, adjoint du bibliothécaire patricien. À la chute de la République en 1797, il devint unique responsable de cette institution. Érudit de réputation européenne, membre de l'Académie française à titre étranger, il a décrit les fonds Farsetti, Pinelli et Nani de la bibliothèque Marcienne, à laquelle il a légué ses ouvrages (une soixantaine d'essais érudits). Incontestablement, il était, quoique d'une génération antérieure, une des figures les plus respectées de la philologie italienne, grâce aux manuscrits qu'il avait publiés dans ses fonctions à la Marcienne. m Le marquis Lucchesini (1756-1832) avait adressé un courrier de félicitation à Ciampi au sujet de son article concernant Mai (lettre du 12 décembre 1816): «Ho ricevuto il suo opuscolo sopra /'opera attribuita dal Mai a Dionisio d'Alicarnasso. Mi è molto piaciuto perla (on.a delle ragioni. Mi pare molto forte l'Osservavone che Ella fa alla pag.8 riguarda alla perittologia di Fozio, quando le opere fossero dello stesso Autore ... aile ragioni che adduce mi pare si possa aggiungere che lo stile del Compendio veduto da Fozio era molto ricercato, e non mi pare che questa taccia si passa tiareal publicato dal Mai. Ho veduto poi con piacere che a lei prima di me era venuta in mente il dubbio che l'opera sia una specie di EXCERPTA•. Une
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lie; Âkerblad 238 (en Suède); August Schlegel 219 (en Allemagne); Glernberv240(en Angleterre sans doute). autre lettre abondait dans le même sens (7 aoOt 1816): «Mi conferma nel mio primo sospetta che l'Opera pubblicata da1Mai sia Excerpta d'un Anonimo dell'Opera grande di Dionisio; il che Ella pure a toccato nelle sue Osservazioni •· Un dernier courrier (sans date) approuvait les opinions de Ciampi : « Veramente la calumnia pubblicata nello Spettatore, e la sorpresa che volle (arsi al Publico mi sdegnô. Anchè il paralogismo, nel quale cade l'Autore della lettera all'ab.Canova non mi dü saggio di gran (on.a di ragionare. E che? vuol provarsi che i nuovi (rammenti sono il compendio di cui Stefano, e Fozio favellarono, a ciô per {are si spendono molle pagine, mostrando che le parole, le (rasi, e lo stile di quelli, colle parole, frasi e stile di quello pienamente concordano, e non s'avvidde l'autore aver Fozio appunto affermato che nel Compendio Dionisio era ,coµy,6,epoç roO tav.oO (cioè in qualunque senso si voglia premier quella voce, pualtro indicherà sempre esser diverso nel compendio e nella storia). Se dunque al tutto i (rammenti concordano con !'Opera : se lo stile di questi e di que/Jo è lo stesso : dunque i (rammenti non appartengono al compendio veduto da Fozio •· "'Lettre d'Âkerblad, IV Kal. Julias 1817 : «Ho letto l'articolo di Visconti sopra il Dionisio del Maio e sopra le di lei Osservazioni, e vedo non senza piacae che il nostro gran filologo romano è della stessa opinione, che cioè non Epitomè, ma bmsi Excerpta della storia dell'Alicarnasseo deve stimarssi l'opera pubblicata da1 Maio •. Cet échange épistolaire n'est pas autrement connu. 239 Voir infra p. 172. 240 Lettre de Glemberv XV Kal. Julii 1817 : « ... il vosto dotto e dimostrativo discorso sopra l'Epitomè Dionysiana ha avuto qui il successo dovuto ... ne è parlato nell'ultimo numero d'uno dei due piu celebri giornali di wndra con elogio •· n reste bien difficile d'identifier ce personnage, sauf à dépouiller les rewes savantes londoniennes pour cette période. Et on lit avec intérêt un article dans The Quarterly Review (oct. 1816-janv. 1817, vol. 16, Londres, 1817), article non signé, occupant les p. 288 à 337 [= la livraison du fascicule de janvier 1817], qui énumère toutes les grandes publications des années 1814 à 1816. Le pied de page de la revue est sous-titré Ambrosian Manuscripts, et l'auteur (Glemberv?) recense les publications des fragments de Cicéron en 1814,de Symmaque, de Fronton, de Plaute, de Themistius et de Denys d'Halicarnasse en 1816 (p. 335-336). L'auteur de l'article présente la dernière publication de Mai et souligne qu'il s'agit de la portion de l'œuvre non connue. Le manuscrit dont provient cette épitomè est présenté comme une découverte récente. Mai a eu tort de ne pas publier la partie du texte qui relevait des onze premiers livres (in doing which he has, in our opinion, acted injudiciously). Le rédacteur complète: «He supposes that this Epitome is the~ as that which is said by Photius to have been made by Dionysius himsel(; but it seems pretty clear that this is not the work to which Photius and Stephanus Byzantinus allude; for, as an Italian scholar, Professor Ciampi, has judiciously observed, it is not properly speaking, an Epitome, but should rather be entitled Excerpta. lt is obviously made upon the same plan with the Excerpta de legationibus etc. which were first published by Fulvius Vrsinus. These fragments are given to the world in a most unscholar-lilce manner, in capital letters, without any accents and spirits, which are frequently of the greatest consequence in determining the true reading, and for omitting which there was no reason, as the MS. is not old enough to be without them. We are presented, as a matter of course, with a long discussion of tM merits of Dionysius, which the leamed editor, with an excusable partiality, estimates more highly than perhaps they /Üserve•. Après avoir cité la préface latine de Mai, il conclut (p. 336): «On the whole, although the discoveries which Mr. Mai
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La part prise par B. G. Niebuhr à ce débat est également active, et les tensions entre lui et Mai se nourrissaient de bien d'autres sujets que la publication dionysienne. Niebuhr avait eu rapidement connaissance de la publication de 1816; la nouveauté typologique de ces fragments l'avait étonné et il doutait dès le début de leur authen, il ticité241.Dans le compte rendu qu'il fit à l'Académie berlinoise 242 minimise la découverte de Mai (qualifiée de « prétendue publication des livres manquants de D. H.») en avançant toute une série d'arguIras made in the Ambrosian Library, are curious and interesting to the classical antiquary, there are not of that importance which the learned editor himself attaches to them; nor do they satisfy the expectations which the first intelligence of them had ucited in our mimis. We fear that no further hopeis to be entertained, of recovering now which Irasfor now so many years be.en lost». Le contenu de l'article, sa date, la réputation dans les milieux savants de la rewe où il est paru incitent à penser qu'il s'agit bien de l'article de Glemberv dont parle Ciampi dans les Feriœ. 241 Nous donnons les références de la correspondance par n°. du volume, n°. de la lettre, page de l'extrait cité, destinataire, date, en renvoyant à B. G. Niebuhr, Briefe, éd. E. Vischer, Bern, 1981-. Niebuhr annonce qu'il prépare une communication sur le sujet à l'Académie de Berlin (1.1, n° 6, 68, Savigny, Venise le 4 septembre 1816) : «[Mai] - so heisst unser Maius - hat wieder etwas entdeckt, von Dionysius Halic. : man hat es hier noch nicht, es soll aus der Geschichte seyn; das hâtte mir doch gebührt. ( ... ) Nachschrift. Mit dem Dionysius v. Hal. ist es nichts : es sind Excerpte aus einem ganz Historiker [ ... illisible]. Ich werde darüber nichstens an die Akademie berichten•. 242 B. G. Niebuhr, Briefe ... (1.1, n° 7, 76, an Phil-hist. Klasse der Akademie, Florence, le 23 septembre 1816): «Dass Mai angeblich die fehlenden Bücher des Dionysius von Halicarnassus herausgegeben, habe ich bereits an Savigny geschrieben. Es verhâlt sich damit folgendermassen. Schon Montfaucon hat bemerkt, dass in der Ambrosiana eine Handschrift vorhanden sey : Excerpte aus Dionys. v. H. - und auch Tomasinus hat sie gekannt. Für mehr ais Excerpte geben sie sich durch ihren Tite) nicht aus : sie haben die gewühnliche Form ôttund hângen nicht im geringsten zusammen. Sie gehen, wie es scheint, vom Anfang der Archâologie bis zum ersten punischen Kriege, wo diese Geschichte allerdings aufhôrte. Sieht man aber die Sprache an, so erkennt man auf den ersten Blick, dass die Excerpte welche den Zeitraum der 9 letzten Bücher angeben, und welche allein Mai hat drucken lassen, einer alten Zeit gar nicht angehüren kônnen- dies beweist freilich nicht, dass sie nicht aus Dionysius genommen seyn künnen, da die Griicitiit der Excerpte des Diodor noch weit schlechter ist. Dafür redet, dass ein Stück darunter vorkommt welches auch in den Exc. de virt. et vit. vorkommt : und aus einem solchen byzantinischen Eklogentomus kaon es am ersten excerptirt scheinen. Aber es sind ictiCJElÇ der Stiidte in Grossgriechenland darin von einer Absurditiit wie Dionys gewiss nicht schrieb. Für die rômische Geschichte ist hôchstens ein einziges Factum eine kleine Ausbeute : Alles übrige ist taubes Erz. Maius hat sie in die neun Bücher (von 12-20) eingetheilt : die Urs. und Vales. Excerpte eingeflickt, und thut ais ob er nun alles hergestellt habe. Diese Thorheit macht unwillig - und es môchte wohl Pflicht seyn die Erwartungen etwas niederzuschlagen. Sonst ist es gewiss, dass man freilich den Debit der Werke italienischer Gelehrter nicht beeintriichtigen darf : vielmehr fôrdem sollte--wie es damit zusteht, davon haben wir jenseits der Berge gar keinen Begriff. In der Regel verlieren die Gelehrten bei jedem Buche gradehin was sie drueken lassen: und im ganzen mages dem Mai nicht besser gehen•.
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ments: d'abord il rappelle les citations des grands catalogues de l'époque moderne, soulignant la confusion possible avec un manuscrit padouan déjà connu 243 . Il fait observer que ce ne sont rien d'autre que des excerpta comme le montre l'incipit traditionnel par on. Un simple coup d'œil sur la langue montre que ce ne sont pas des textes antiques, même s'ils peuvent avoir été tirés de D. H. Le rapprochement avec un des passages du De uirtutibus, qui croise cette tradition, le démontre. À propos des pages sur les fondations des cités grecques, Niebuhr nie que D. H. ait jamais écrit quoi que ce soit sur le sujet. Quant à distribuer les fragments entre les neuf derniers livres des A. R., c'est pure perte, d'autant que Mai a interclassé les passages comme si toutes les sélections avaient été élaborées ensemble. C'est une sottise qui fâche, laisse tomber Niebuhr, et cette publication porte tort à la science italienne dans son ensemble : bien des progrès restent à faire, or chaque publication de Mai est une régression. Une autre lettre de Niebuhr, adressée en 1817 à Immanuel Bekker244,porte un jugement tout aussi sévère sur la publication et sur le texte même : une «camelote» qui ne vaut pas son argent pour les trois notices utiles qu'elle contient 245 . Et la confusion avec des Voir supra p. 107-108. En réalité Mai mentionne bien dans la préface de l'édition de 1816,p. XVII l'existence du manuscrit de Padoue mais le rapporte à un résumé du Traité de rhétorique. 244 Il s'agit du grand éditeur de textes, connu entre autres pour ses travaux sur Polybe et sur Dion Cassius. 245 B. G. Niebuhr, Briefe... (1.1, n° 70, 223, à Bekker le 29 aoQt [18171): «Dass Hr. Mai Sie wenigstens kalt aufnehmen werde liess sich allerdings voraussehn u. der Schuldige hat mit einer heimlichen Angst schon langst daran gedacht. Es ist )eider doch ein Pflicht den Dummkôpfen nicht ohne hôchste Noth zu sagen was sie sind. Wo hat denn die Berl. Akademie sich Ober seinen Dionysius ausgesprochen? Roba fatturata ist es nun freilich nicht : was es ist u. oh irgend etwas von Dionysius darin stecke lasst sich sehr schwer sagen, zumal wenn man nicht 30 fr. for den Schofel ausgegeben mag der hôchstens 2-3 brauchbare Notizen enthâlt. Aus der besagten Ursache dass ich die 30 fr. nicht wegwerfen mag kaon ich die Vermuthung dass es Stocke aus dem Iohannes Antiochenos den Konstantinus Porf. auch excerp[t]iren Hess nicht recht auf die Probe bringen. Uicherlicher aber ais Mai bei dieser Ausgabe kaon man sich doch in unsrer Wissenschaft nicht leicht machen. Hlitte er das Zeug auf 4-5 Bogen mit keinen Anmerkungen nur den nôthigsten critischen abdrucken lassen, wer hâtte es ihn nicht Dank gewusst aber bei der ungeheuem Windbeutelei die er damit getrieben kaon er da den Geisseln entgehn? Ich will ihn nicht antasten [anfassen?] obgleich gewiss kein lebender Mensch den Dionysius so viel gelesen hat u. sich daher so sehr versucht fohlen kônnte. Es wlire nur auf den Fall dass ich einmal eine Ausgabe der Archâologie machte, wozu der so ganz verwilderte Text die Leichtigkeit ihn zu einem hohen Grad der Richtigkeit zu bringen u. die hiesigen vortrefflichen Handschr. sehr in Versuchung bringen, zumal wenn Sie mir in Hinsicht der Sprachbemerkungen helfen wollten, bei denen ich nur vom Talet geleitet werde, u. den ung)Ocklichen Nachtheil empfinde gar zu wenig von Schriften und Korn243
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extraits de Jean d'Antioche n'est pas à exclure. Mais quand Mai découvrit les fragments du De sententiis en 1820, Niebuhr, conscient de la valeur scientifique des découvertes, quoique doutant de la capacité de Mai à les publier, apporta son concours au plan philologique, et aussi son soutien par des recommandations visant à faciliter l'entreprise éditoriale. Les fragments parurent en 1827 dans la Scriptorum ueterum noua collectio, en même temps que Mai rééditait les derniers livres de la compilation ambrosienne des A. R. 246 • À la réception de l'ouvrage en 1828, Niebuhr dit son enthousiasme à la lecture, spécialement celle des fragments de Polybe, et relève les difficultés ... de l'ordinamento, proposant quelques corrections sur les fragments de Dion Cassius 247 • mentaren gelesen zu haben oder auch nur zu kennen die sich hauptsâchlich auf den Sprachgebrauch beziehn. Diese Schriftsteller, die die klassische Sprache nur aus Büchem lemten u daher gar keine Einheit derselben haben u. denen in der buntsdùlckigen Mischung der Redensarten aus attischen Schriftstellem ganz verschiedener Zeiten auch mintunter arge Trivialitliten der Redensarten ihrer Zeit einlaufen haben für mich etwas piquantes zu Sprachuntersuchungen, môchten sie es auch für solche haben die mehr darin leisten kônnen, u. sich nicht scheuen müssten ein Feld zu betreten wo sie nicht schulgerecht sind•. La première phrase contient une allusion aux polémiques sur l'édition de Fronton. D faut signaler qu'il n'y pas trace d'une session de l'Académie berlinoise consacrée aux fragments publiés par Mai. Sans doute le compte rendu de Niebuhr fut-il simplement lu mais A. Mai paraît s'être vanté que l'Académie lui ait consacré une séance. 246 Sur l'ensemble de ce dossier, sa correspondance est un témoignage de premier plan. Voir B. G. Niebuhr, Briefe ... , : 1.2, n° 283, 575, an die phil.-hist. K1asseder Akademie, 7 octobre 1820; 1.2, n° 379, 695, an Savigny, 20 octobre 1821; 1.2, n° 411, 720, an Colchester, 6 mars 1822; 1.2, n° 416, 729-731, an Colchester, 22 àvril 1822; 1.2, n° 508, 863, an Peyron, 5 mars 1823; 1.2, n° 532, 896, an Brandis, 14 avril 1823; 2, n° 630, 210, an Schrader, termai 1824; 2, n° 674, 261, an Mai, 22 juillet 1824; 2, n° 732, 339, an Bunsen, 23 janvier 1825; 3, n° 915, 116, an Bekker, 31 mars 1827; 3, n° 955, 180-181,an Jacobs, 13 ao0t 1827; 3, n° 957, 195, an Bunsen, 4/26 ao0t 1827; 3, n° 978, 231-232, an F. Walter, 20 octobre 1827; 3, n° 979, 232, an Bunsen, [fin octobre] 1827; 3, n° 982, 236, an Bekker, 7 décembre 1827; 3, n° 994, 244, an Bekker, 24 janvier 1828; 3, n° 1026, 304, an Bekker, 15 mai 1828. Il faut compléter par des lettres à Mai, éditées anciennement par H. Schône, Sechs Briefe B. G. Niebuhr's an A. Mai, dans Mélanges O. Hirschfeld, Berlin, 1903, p. 492-513 (il s'agit des lettres conservées sous la cote Vat. lat. 9555 et 9589). Elles montrent bien les tentatives de Niebuhr pour faciliter, y compris auprès des souverains et des gouvernements, la publication du traité constantinien De sententiis : lettres du 30 avril 1824, de Bonn (en italien), p. 492-495; du 22 juillet 1824, de Bonn, p. 495-499; du 22 janvier 1825, de Berlin, p. 499-502; du 25 aoOt 1827, de Bonn, p. 502-505; du 25 février 1828, de Bonn, p. 505-511. 247 D. C. 8 fr. 36.33 et 37.2. Ces deux fragments croisent le texte dionysien car il s'agit de Rufinus expulsé du sénat par Fabricius en 275 (20.L) et des tensions sociales de 287 (18.G). E. Cary (Dio's Roman History, t. 1, Loeb Classical Library, 1914) reproduisait l'ordre de Mai qui, à l'évidence, est chronologiquement inacceptable. Pour ces périodes, l'ensemble des fragments dbistoriens grecs connus par ces traités appellerait une révision conjointe de l'ordonnancement des textes.
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Les fragments de D. H., leur publication par Mai alimentèrent de façon déraisonnée les rumeurs et les passions. Les rivalités n' étaient pas moins celles des philologues que celles des nations, les choix éditoriaux étaient moins scientifiques qu'ils n'étaient politiques. Là encore, la double contextualisation des œuvres et de leur publication est indispensable. Mais on a peine à se représenter le retentissement que connut la publication des fragments dionysiens par Mai en 1816. Beaucoup de ses livres déclenchèrent des polémiques, y compris par la suite, mais les fragments ambrosiens eurent un écho vraiment inattendu. Aujourd'hui la nature des polémiques laisse l'éditeur assez indifférent car la question de l'attribution à D. H. des fragments n'est pas mise en doute (même s'ils sont en partie réécrits), de même que la nature du texte, épitomè ou excerpta, parait tranchée en faveur de la seconde hypothèse. Mais si le philologue peut évacuer ce débat pour la raison qu'il est dépassé, l'historien y trouve grand intérêt, pour la connaissance des milieux savants italiens du début du XIX" siècle, de leurs relations, de leurs réseaux, de leurs financements. Tant de haine étonne à propos de l'édition d'un texte ancien, qui, s'il présente un certain intérêt, n'est pas une œuvre majeure de la littérature antique. Tant de mauvaise foi, de mensonges, de passions paraissent disproportionnés, aussi bien pour discréditer les travaux de Mai que pour les réhabiliter. Mais sa collusion avec le pouvoir autrichien y est pour beaucoup, tout comme ses erreurs antérieures. Il s'agissait pour certains de prouver, quoiqu'il fllt un grand découvreur de manuscrits, qu'il se trompait toujours quand il était question de les éditer. Et il faut relever, parmi les erreurs de Mai, une rectification qui n'est pas sans rapport avec notre dossier. En cette même année 1816,Mai avait publié à Milan un traité Sur la vertu, qu'il avait attribué à Philon d'Alexandrie 248 • Or ce traité n'était pas de Philon mais de Pléthon,
J.a ll existe deux publications qui portent la même année d'édition. En réalité, seule la première est réellement parue en 1816. Elle avait pour titre: A. Mai, f>IJ\ONO:E TOY IOYâAIOY nEPI APETH:E KAI mN TAYTH:E MOPION, Philonis Iudaei de uirtute eiusque partibus inuenit et interpretatus est ... Prœponitur dissertatio cum descriptione librorum aliquot incognitorum Philonis cumque partibus nonnullis Chronici inediti Eusebii Pamphili et aliorum operum notitia e codicibus armeniacis petita, Milan, 1816. Une seconde parution comportant deux volumes en un est en réalité parue en 1817 (sans qu'il faille la confondre avec la véritable parution rectificative, voir note 250) : A. Mai, nOPf>YPIOY f>IJ\O:EOCIIOYnPO:t MAPKEJ\J\AN, Porphyrii philosophi ad Marcellam inuenit interpretatione notisque declarauit, Acceditque eiusdem Porphyrii et Eusebii Pamphilii fragmentum, Milan, 1816; De Philonis Iudaei et Eusebii Pamphili scriptis ineditis aliorumque libris ex armeniaca lingua conuertendis dissertatio cum ipsorum operum Philonis ac praesertim Eusebii speciminibus ... ex notitia ... ab armeniacorum codicum dominis impertita, Milan, 1816.
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comme Francesco Reina l'expliqua à Mai 249 • Et quand Mai republie en 1817, il change le titre et rectifie l'attribution 250• Entre-temps, la presse a fait état largement de la bévue, en particulier à travers le rectificatif que publie Stella 251 dans le Spettatore et la Gazetta (2 mai 1817) : AVVISO AL PUBBLICO
L'Editore del opuscolo greco intomo alla virtù e sue parti (il quale da un codice milanese è attribuito a Filone Ebreo) avendo conosciuto che viene detto da Giorgio Gemisto in altri codici, e che sono state eseguite alcune edizioni sotto tal nome, si affretta a dare avviso ch'egli toglie del catalogo delle sue edizioni l'anzidetto opuscolo che stampo unitamente ad alcune opere inedite, e del quale non si sono distribuiti che pochi esemplari. Si potrebbe per avventura non senza qualche ragione disputare intomo all'autore di questo scritto : 1. per l'autorità del codice rnilanese che lo dà a Filone; 2. perchè lo stile non pare indegno de'tempi antichi, corne hanno stirnato parecchi dotti grecisti; 3. perchè e noto che Giorgio Gemisto prese dagli antichi autori, corne da Aristotele, Teofrasto, Senofonte, Diodoro Siciliano, Strabone, Plutarco, Appiano ed altri, parecchi pezzi di cose notabili, che essè>publico sotto il suo nome (corne appare nei codici) per uso del suo secolo; 4. perchè Filone Ebreo scrisse veramente de' libri (che ora parte non esistono) intomo alla virtù. Nondimeno l'editore non volendo entrare in una infruttuosa e vana disputa sopra tale argomento co' dotti, e bramando che il suo catalogo sia puro di ogni dubiezza, ha stimato bene di escludere questo opuscolo, e di avvertime il rispettabile publico letterato.
Mai admit cette fois son erreur et écrivit à Acerbi 252 • Le détail de sa retractatio n'est pas sans intérêt pour nous : Une lettre adressée le 10 mai 1817 à Daniele Franceschoni (1770-1825), bibliothécaire de 11Jniversitéde Padoue, vient en apporter la confirmation (L. Cor249
tesi, Epistolario di Angelo Mai. Additamenta all'edizione Ge,vasoni : lettere inedite fino al 1819, dans Bergomum, 1983, fasc. 1-2, p. 175-303; lettre 120D, p. 220-221): «Oggi il Sig.r Reina mi ha awisato con un suo viglietto, che l'opuscolo attribuito dal codice ambrosiano a Filone e da me pubblicato came inedito, è stampato collo Stobeo del 1575 sotto il nome di Pletone. Resterà a vedere di chi è veramente, già che Pletone non era che un copiatore per lo più degli antichi geografi ed altri autori. Tuttavia è stampato ... •· Voir L. Cortesi, Cronobiografia essenziale degli anni 17821819, dans Bergomum, 1983, fasc. 1-2, p. 66-174, spéc. p. 116. Sur les publications de 1816, voir aussi A. Pertusi, Angelo Mai scopritore ed editore di testi grec;classici e bi1J.1ntini,dans Bergomum, 28, fasc. 4, 1954, p. 167-193, spéc. p. 172-174 sur Philon et p. 174-176 sur D. H. 250 A. Mai, rEOPnOY rEMŒTOY H ru; EN AMBPO:tlANOI BIBAIOI ~IAnNOl: nEPI APETHJ: KAI TilN TAYTHl: MOPION, Milan, 1817. 251 L'éditeur milanais Antonio Fortunato Stella s'occupait à la fois de typographie et de commerce de livres. Ce fut Stella qui introduisit G. Leopardi dans le cercle de la Biblioteca italiar,a. 252 Billets des 18 et 19 mai 1817; publiés dans G. Gervasoni, L'ambiente letterario milanese nel secondo decennio del ottocento, Angelo Mai alla biblioteca ambrosiana, Florence, 1936, p. 39-40.
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Nella edizione dell' opuscolo cosl detto di Filone io ho commesso uno sbaglio credendo inedito questo scritto, cosl ingannato e travolto dal titolo del codice milanese. Tuttavia mi conforto, perchè si è ottenuto di farlo conoscere in Italia, dove era si puô dire ignoto, e di fare una chiara e discreta traduzione, poichè l'anticha è assai barbara, e finalmente di dare il testo assai più corretto. Si è guadagnato altresl una nuova cognizione per la letteratura producendo un codice che lo dà a Filone. Inoltre perchè Gemisto dava sotto il suo nome (corne dimostrano anche i codici dell'Ambrosiana) varii estratti ad uerbum degli antichi, chi sache il suo trattato sopra la virtù non sia veramente di Filone. Iole compiego l'avviso pubblicato nello Spettatore e nel foglio per mia insinuazione ed opera, acciochè se ne serva, piacendole, per la Biblioteca. Mi pare che riunendo le cose dette nel mio viglietto a Lei, e quelle del manifesto (che è più pieno manoscritto che stampato) si potrebbe fare una piccola apologia di questa edizione. ( ... )
Mai avait commis en 1816 une grossière erreur d'attribution en présentant comme inédit un ouvrage d'un auteur antique, là où il publiait l'œuvre connue d'un byzantin 253 • Or il avait dédicacé la première édition à son protecteur et mécène Trivulzio 254, vis-à-vis duquel il se trouvait dans l'embarras. Pire encore, il avait adressé le livre à Mellerio, sur le point de partir pour la cour d'Autriche, le chargeant d'en offrir un exemplaire à Riedler: ce dernier avait loué les qualités de l'édition dionysienne de Mai et occupait un poste en vue puisqu'il était le précepteur des archiduchesses d'Autriche 255 • On espère qu'elles ne durent point apprendre le grec à partir des frag-
m Le De uirtute avait déjà été édité, quoi que ce fOt une édition discutable, avec les Eclogai de Stobée par Plantin à Anvers (1575) et même avant par Adolfo Occone (Bâle, 1552 et 1557). Mai reconnaît donc son erreur, fait stopper la diffusion du livre dont des exemplaires ont déjà été distribués et le fait retirer du catalogue. Il fait refaire le frontispice et la première page, réordonner l'ouvrage et l'édition nouvelle paraît en juin 1817(même si elle porte la date 1816,voir note 248), toujours dédicacée à Trivulzio. Elle comprenait deux parties : Porphyre et Philon/Eusèbe. C'est seulement après qu'il fait paraître sous le nom de Pléthon le traité. 254 Epistolario ... , lettre 121,p. 181-182: il s'agit d'une lettre d'excuses à Trivulzio, à qui il avait dédicacé la première édition, où Mai reconnaît qu'il lui a dédié un livre pseudépigraphe. m L. Cortesi, Epistolario di Angelo Mai. Additamenta all'edizione Gervasoni : lettere inedite fino al 1819, dans Bergomum, 1983, fasc. 1-2, p. 175-303. Voir lettre 120A, p. 218, au comte Mellerio (8 avril 1817) : «Ho veduto della Gazetta [di Milano] di domenica, che lessi ieri, l'articolo del Sig.r Riedler, nel quale si parla eziandio del Dionigi. Questo Riedler, per quanto intesi da/ Bar. di Menys, è l'istitutore delle Archiduchesse. Non sapendo io come mostrare la mia gratitudine alla gentilezza di questo Signore che mi ha fatto encomii non meritati, prego la E. V. di reca,gli un Filone che a tal fine le mando a casa con questa lettera •·
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ments édités par Mai! Toujours est-il que la confusion de Mai sur Philon/Pléthon ne pouvait échapper à un vaste public de savants mais aussi de lettrés, ou tout simplement aux milieux cultivés. On s'étonne ainsi un peu moins de l'attitude de Mai, lorsqu'il revient bien des années après sur la controverse dionysienne, et abandonne l'idée d'une épitomè, parle désormais d'un florilège tiré de l'œuvre intégrale (1827). Entre temps il a découvert un manuscrit du De sententiis à Rome et il est enclin à rapporter les fragments ambrosiens à une sélection constantinienne 256 • D'autres hypothèses pouvaient pourtant être avancées : parmi elles, celle d'un florilège tardo-byzantin, les excerpta pléthoniens sont connus de lui, il les mentionne 257 • Mais, parmi les auteurs à propos desquel Mai vient précisément déjà de se tromper lourdement, il y a Pléthon. Nous n'entendons pas prêter à Mai des pensées: rien ne confirme formellement qu'il a songé à rapporter les fragments ambrosiens à une sélection pléthonienne et nous-mêmes envisageons cette hypothèse avec précaution. Disons simplement que Mai a pu l'éliminer sur la base d'un contexte éditorial qui concernait davantage sa propre œuvre d'éditeur, que l'étude raisonnée des fragments dionysiens. Les erreurs de Mai dénoncées vigoureusement par ses contemporains ne le privèrent pas des honneurs, comme on le voit en France : à l'instigation de Giordani, et sans doute à l'initiative de Leopoldo Cicognara, A. Mai fut nommé en 1819 correspondant de 11nstitut 258 , et préfet de la Vaticane à la fin de la même année. Les fragments historiques du Vat. gr. 73 sont publiés dans A. Mai, SVNC, 1827, 2, prœfatio, p. XVII : «una in re me falsum existimo, quod Dionysii putaui epitomen, quœ sunt exce,pta, ursinianis ualesianis atque his uaticanis prorsus simüia, a Constantini eclogariis profecta. Causa mihi erroris fuit, quod ab ipso Dionysia f actam operis sui epitomen Photius et Stephanus Byll,lntinus legisse aiunt. Ego igi.tur materiam codicum ambrosianorum contractam idemtidem uidens, de uaere prœdicta epitome statim cogi.taui : donec il/am opinionem paulatim exui, partim doctorum hominum contradictione commotus, qui se purum Dionysium, non eius compendium, in partibus a me uulgatis cernere aiebant; partim aliorum exce,ptorum comparatione et prœsertim uaticanorum, quorum rationem ambrosianis simillimam esse uideo. Ergo nouam sententiam Libenteramplector, et pro laceri compendii partibus, partes integri operis lœtus saluto. (... ) Quas ego uulgaui eclogas, Di,onysium prorsus habere parentem, nemo credo prudens et dionysiani stüi peritus dubitabit. Mihi certe uel inde exploratissimum est, quod codices a me tractati, non solum partis ineditœ uerum etiam cognitœ, id est uniuersœ historiœ dionysianœ, eclogas continent. lamuero partis cognitœ excerpta cum editionibus publicis ad uerbum plerumque conspirant; ergo etiam excerpta inedita cum integro Di,onysio, si is superesset, prorsus congruerent. (... ) quidem omnes ad constantinianum titulum De sententiis pertinere mihi uidetur». 257 A. Mai, SVNC, 1827, 2, prœfatio, p. XI. 251 Epistolario ... , lettre 218, p. 287-288, du baron Joseph Dacier, Paris; [5] février 1819: Cette lettre n'est pas la nomination officielle mais une annonce que Dacier, en tant que secrétaire perpétuel de l'Académie royale des Inscriptions et 256
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Les polémiques ont fait qu' A. Mai s'y reprit en plusieurs fois et proposa plusieurs éditions successives avec des remords dans la présentation du texte, dans l'identification de sa nature. Il renonça même au découpage en livres. Ces corrections et ces revirements ne sont pas le propre des fragments dionysiens : ses éditions des fragments cicéroniens connaissent le même type de contradictions. Mais la diversité des éditions, leurs variantes valent d'être précisées car elles ont prêté à des confusions : - L'édition milanaise de 1816259 : elle offre une division en livres et chapitres; cette édition comprend une traduction latine et l'ensemble des fragments connus à ce jour pour les livres 12 à 20, avec une abondante préface et un texte grec imprimé en majuscules capitales. Il y a donc interclassement. - Mai republie son livre en Allemagne, à Francfort dès 1817260 , sous une forme différente puisqu'il n'y a pas de traduction latine, que les lettres majuscules sont abandonnées, que la préface aussi bien que les notes ont été sensiblement abrégées. Le texte, interclassé, est distribué en livres et en paragraphes, comme en 1816. Mai indique en note des titres en latin, pour résumer de façon thématique ces paragraphes. - Il fait rééditer, sans doute dès 1818, chez Tauchnitz à Leipzig une version complète de I'œuvre dionysienne en six volumes dont quatre pour les œuvres historiques 261• Cette édition, qui est une édition complète de D. H. connut une diffusion large, elle fut probable-
Belles Lettres, a signée pour informer Mai au plus vite. Leopoldo Cicognara (1767-1834), après la mort de Visconti, représentait en France la nouvelle «autorité• scientifique dans le domaine de l'histoire de l'art italien, il était autant connu comme amateur d'art que comme peintre spécialisé dans les paysages. Comme Visconti, il avait détenu des charges officielles : Ministre à la cour de Turin, membre du corps législatif de la République Cisalpine, Conseiller d'Etat du royaume d1talie, Président de l'Académie vénitienne des Beaux-Arts. Ce grand collectionneur était un ami de Canova : on retrouve le réseau des soutiens de Mai. 259A.
Mai,
AIONYl:IOY AAIKAPNAD:Enl: A, Dionysii Halicamassei
PnMAIKHl:
APXAIOAOrIAJ:
TA MEXPI
Romanarum Antiquitatum pars hactenus desiderata nunc denique ope codicum Ambrosianorum ... quantum licuit restituta, Regii Typis, Milan, 1816. 260A. Mai, AIONYl:IOY AAIKAPNAD:Enl: POMAIKHl: APXAIOAOrlAl: TA MEXPI TOYAE EAAEmONTA, Dionysii Halicamassei Romanarum Antiquitatum pars hactenus desiderata nunc denique ope codicum Ambrosianorum ... quantum licuit restituta, ad editionem principem Mediolanensem regii typis M.DCCCXVI, in Libraria Hermanniana, Francfort-sur-le-Main, 1817. 261 A. Mai, Dionysii Halicamassensis opera omnia quibus etiam accedunt fragmenta nuper reperta, 6 vol., Leipzig, 1829 (editio stereotypa ex editionibus 1818, TOYAE EAAEmoNT
1823).
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ment réimprimée en 1823 si on en croit l'article bibliographique de Jacoby, et en tout cas c'est elle qui est réimprimée en 1829 (avec clairement la mention editio stereotypa sur la page de titre) 262 • Elle comprend une division en livres et chapitres, des intertitres en latin, mais n'offre aucun apparat critique et ne présente pas de traduction. Ces trois éditions, 1816, 1817et 1818, qu'elles comportent ou non les premiers livres des A. R., intercalent les fragments ambrosiens entre les extraits déjà connus. 1 • - Il importe de signaler surtout les remords de Mai, avec la publication qui figurait dans le volume 2 de la Scriptorum ueterum noua collectio (1827)263 : c'est là véritablement une édition des fragments ambrosiens pour eux mêmes, numérotés en continu. Cette édition comporte une traduction latine. Elle ne reproduit pas les fragments issus des autres traditions manuscrites à l'exception notable du discours de Fabricius, dont le début est connu par le De /.egationibus, pour lequel il y a recoupement sur quelques lignes entre ce traité constantinien et l'anthologie ambrosienne, tandis que la fin du discours nous est seulement connue par les manuscrits de Milan. Dans les multiples éditions Mai, il y a en fait deux familles finalement, auxquels sont réductibles les variantes et les hésitations successives. Pour simplifier, il y a d'un côté les éditions où A. Mai publie D. H., tout ou partie, avec ou sans traduction latine et avec des commentaires plus ou moins longs voire sans notes. Il introduit des numéros de livres, un découpage en paragraphes. Et d'un autre
Voir C. C. G. Kayser, Deutsche Bücherkunde oder alphabetisches Verzeichniss der von 1750 bis 1823 erschienen Bacher, welche in Deutschland und in den d.urch Sprache und li.teratur damit verwandten Liindern, gedruckt worden sind, 3 vol., Leipzig, 1825. Dans cette bibliographie rétrospective, C. C. G. Kayser (vol. 1, p. 284) indique une première édition en 1818. C'est probablement par approximation que K. Jacoby mentionne dans un état de la question bibliographique et philologique (Die griechischen Historiker der spiiteren üit, I. Dionysius von Halikarnass, dans Philologus, 36, 1877, p. 129-164 et 529-561; 37, 1877, p. 325-342, spéc. fasc. 36, p. 129) une editio stereotypa de 1823 et une autre en 1829, sans qu'on comprenne clairement de quand date l'édition princeps. On voit mal qu'il s'agisse d'un autre ouvrage que celui en six volumes reparu chez Tauchnitz en 1829. Je n'ai pas trouvé trace d'éditions des fragments dionysiens par Mai chez un autre imprimeur: voir L. Brieger, Ein Jahrhundert deutscher Erstausgaben... von etwa 1750 bis etwa 1880, Stuttgart, 1925 (ce catalogue est, il est vrai, fondé sur les ventes aux enchères). L'examen du livre d'A. Bonnetty n'apporte pas d'élément de réponse (Table alphabétique, analytique et misonnée de tous les auteurs sacrés et profanes découverts et édités rkemment dans les 43 volumes publi.és par S. E. le Cardinal Mai, Paris, 1850). 263 A. Mai (éd.), Scriptorum ueterum noua collectio e uaticanis codicibus edita, t. 2, Typis Vaticanis, Rome, 1827, p. 465-526 (spéc. 487 sq. pour les livres 1420 de D. H.) [début de la série en 1825-]. 262
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côté, il édite les manuscrits ambrosiens tels qu'ils se présentent pour la partie inédite des livres 12 à 20, en renonçant à retrouver les livres originels. La confusion vient de ce que les éditeurs du XIXe et du :XXen'ont pas toujours regardé dans le détail ces revirements, ont suivi et recopié la plupart des erreurs initiales. Si nous avons si longuement insisté sur l'édition de Mai, c'est qu'elle apporte au corpus dionysien pratiquement la moitié du volume de texte et qua, malgré de rares découvertes par la suite, qui se réduisent à quelques pages, malgré aussi la révision opérée sur le découpage en livres qu'avait proposé Mai, les éditeurs postérieurs ont tous largement repris l'ordre 1816, au sein duquel ils ont interclassé de rares éléments nouveaux, tout en retouchant il est vrai la distribution en livres. Ce qui sert de base aux éditions Teubner sur lesquelles nous vivons, c'est un livre publié à la hâte en 1816 par un érudit qui fut un grand découvreur mais un piètre éditeur, un savant dont même ses contemporains ont contesté les méthodes et les manières d'agir. Il n'est que de citer quelques uns des jugements portés sur Mai par ses contemporains : ainsi le mot d' August Schlegel en octobre 1817 (qui commentait il est vrai l'édition par A. Mai de l'itinéraire d'Alexandre): «Il me semble que M. Mai a fait de la bibliothèque Ambrosienne une espèce d'étable d'Augias; mais il ne s'ensuit pas de là qu'il soit un Hercule 264 ». Les voyageurs lettrés du XIXe n'ont pas laissé d'A. Mai un portrait sympathique : la réputation de l'homme fut détestable, autant qu'étaient critiqués ses travaux. Signalons au passage la charge de Lady Morgan. Dans le journal de voyage qu'elle tient entre 1819 et 1821, cette Américaine consacre plusieurs chapitres à Milan. Elle y 264 A. W. Schlegel, Lettre du 24 octobre 1817 à Guillaume Favre Bertrand (dans G. Favre, Mélanges d'histoire littéraire avec des lettres inédites d'A. G. Schlegel et A. Mai, J. Adert éd., Genève, 1856). Dans un autre courrier, adressé le 23 janvier 1817, Schlegel commentait avec sévérité la publication par Mai de l'Itiniraire d'Alexandre :... «l'abbé Mai a agi avec une singulière précipitation et n'a point montré l'étendue de connaissances qu'on peut exiger d'un éditeur de pièces inédites. Quand on publie un àvtKôotov, qui l'est resté précisément à cause de sa valeur médiocre, il faudrait au moins donner quelque chose de complet et s'informer des meilleurs manuscrits, au lieu d'imprimer le premier qui vous tombe sous la main•. Schlegel ne commente pas à proprement parler les éditions dionysiennes de Mai, mais il ne perd pas une occasion pour critiquer systématiquement la méthode suivie par le philologue, pour Julius Valerius, pour Asconius et Cicéron. Favre Bertrand en revanche, a publié divers articles dans la Bibliot~ue Universelle, où il commente les œuvres publiées par Mai: en 1816 (numéro de novembre et décembre) sur les fragments de Cicéron, Fronton, de Plaute, discours d1sée et de Thémiste; en 1817, une lettre de vingt pages adressée aux rédacteurs de la BU (datée de Genève, teraot1t 1817 et publiée en septembre), analyse en détail les publications par Mai de Philon, Eusèbe, Porphyre et des Oracles Sibyllins; en janvier 1818 surtout, Favre fait paraître un compte rendu de l'édition dionysienne (Milan, 1816, in-4°) et de la Vie d'Alexandre le Grand (Milan, 1817, in-8°).
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fait le portrait des gens qui comptent dans la société milanaise (les nobles en particulier), elle porte un jugement sur l'empreinte napoléonienne, sur le gouvernement des Autrichiens et elle fait un assez long portrait de Mai (plutôt plus long que celui d'autres Milanais), qu'elle a rencontré personnellement à la fin de son séjour milanais (avant qu'il ne parte à Rome, mais la date exacte n'est pas donnée) tandis qu'elle visitait !'Ambrosienne et ensuite elle le rencontre à nouveau au Vatican. Le portrait paraît le concentré des deux car on ne retrouve pas, dans les chapitres sur Rome, d'allusion à Mai. Mai y est décrit comme un être suffisant, un grand découvreur certes, mais un savant enfermé dans sa bibliothèque et vivant hors du monde, échappant dès lors à son évolution 265 • On mesure à travers ce portrait ce qu'était la réputation de Mai internationale de Mai, dans les milieux cultivés mais non érudits.
Voir Lady Sydney Morgan, Italy, 2 vol., New York, 1821, spéc. 1, p. 104105 : • We had the advantage of visiting the Ambrosian Library with one by whom it was always an advantage to be accompanied, the Abate Breme, and of being presented by him to the leamed librarian, Mai, whom we afterwards met at Rome as Monsignore Mai, librarian of the Vatican. The Abate Mai had long made himself known in Europe, by the lost works which he had drawn from the dust and the obscurity of ancient libraries. (... ) We found the diligent and erudite divine buried in the retirement of his library, and still in ail the first triumph of his new discoveries. The MSS. lay before him, on a high antique desk, and the light which beamed from the narrow gothic window, falling on his fine head, was reflected from a large gold cross which hung over his black habit. His figure, as he stood with his finger pointed, and his large dark eye bent on his beloved MS., presented in its transparent paleness, and strongly-marked features, one of those splendid originals, which Italy atone supplies to the genius of painting. It was in vain that Monsignore Mai had the goodness to talk tome (unsconscious of the ignorance he adressed) of the Mœsogothic translation of the protocanonic Epistles of St. Paul, by Ulphilas, the Moses of his Age, of the Codex Argenteus of Upsala, and of other works referable to his own recent and valuable discoveries : I was still more occupied with the scene, in which he was so prominent a figure, than with the leamed discoveries which he has since imparted to the world. The life of this leamed man has been little more than a passive transportation from one ancient library to another. He lives with the ages that are gone, and is illumined by lights that gleam only for those resemble him. With the present age such modes of existence give no sympathy. Steam-engines are invented, vaccination is discovered, safety-lamps hum, and Congreve rockets fly, empires are overthrown, and society proceeds in its career of knowledge and improvement, without disturbing the peace or deranging the occupations of men thus plunged in antiquity, and busied in unearthing the errors of their remotest ancestors. Such, however, are the characters, which, among other rare and curious objects, give to this old tract of wom-out Europe its peculiar tint and aspect; and whatever Italy may gain from modem science and progressive illumination, the poet, the painter, and the novellist, will lament the day when Ambrosian libraries are no longer ruled by such persone as Abate Mai•. Pour les monuments milanais, voir le volume 1 (musées, théâtres, monuments, p. 85 à 185); pour le portrait du comte Saurau en particulier (p. 172). 265
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L'homme était admiré pour ses découvertes, contesté par certains savants, détesté par presque tout le monde, mais il détenait à la fois un pouvoir institutionnel (par les responsabilités qu'il occupa à !'Ambrosienne puis à la Vaticane) et une certaine autorité, que le prestige des découvertes lui avait value. Une publication de Mai pouvait bien déchaîner la polémique, elle orientait les débats, fftt-ce par ses erreurs, elle pesait sur la science philologique et historique pour bien des années. Quelques années après quand Mai est devenu préfet de la Vaticane, Stendhal, à qui il a refusé un manuscrit, lui consacre une notice farouche 266 : «Nous avons terminé notre visite en Vatican par l'examen de la bibliothèque. Il est singulier de voir le chef d'une religion, qui voudrait anéantir tous leslivres, avoir une bibliothèque. Aussi, il faut voir de quelle façon on y reçoit lesétrangers curieux, lesFrançais surtout. (... ) Monsignor Majo est le seul homme grossier que j'ai trouvé à Rome; il sera bientôt cardinal 261, et, si l'on voit durer le système de Léon XII, lesplaintes des étrangers h4teront son avancement•. La personne même du découvreur, les éditions de Mai, auxquelles Kiessling et les autres grands éditeurs de D. H. sont restés globalement fidèles, présentent à notre sens un grand intérêt : pour la connaissance de D. H. bien stlr, mais peut-être moins pour elle que pour l'histoire culturelle du XIXe siècle. C. Les derniers ajustements du XJXe siècle
Enfin, après les tumultueuses polémiques milanaises, ce fut la publication concomitante par C. Feder 261 et C. Müller 269 des fragments trouvés à !'Escorial et extraits du traité sur les Complots (De insidiis). Peu de fragments sont issus de cette tradition, ils concernent deux révoltes de la légion romaine, à Capoue (342) et à Rhégion (en 282 ou 280 probablement). Us appartenaient au traité sur les Complots et complétaient modestement le texte dionysien. Les fragments de !'Escorial constituent la dernière des mises au jour dionysiennes. C. Müller les insérait dans son classement à une Stendhal, Promenades dans Ro~. J 1 mars 1828. Cf.aussi 22 février 1829. De fait, après avoir été Préfet de la Vaticane, Mai poursuivit sa canià"e comme Secrétaire de la congrégation ~ propaganJa fùk en 1833 et il fut 6levé au cardinalat en 1838. Il mourut en 1854. 261 C.A. L. Feder, Excerpta e Polybio, Diodoro, Dionysia Halicamassensi atque Nicolao Damasceno e magno imperatoris Constantini Porphy,ogeniti d~torum opere libri OEPI EOIBOYMlN inscripti reliquiœ, E codice Escurialensi a se transscripta interpretatione Latina et obseruationibus criticis comilatus, pars I, Polybii, Diodori atque Dionysii fragmenta, Darmstadt, 1848. 269 Dans les Fragmenta Historicorum Grœcorum, vol. 2, 1848, Paris. Des compléments et rectificatifs sont apportés par C. Müller, FHG, vol. 4, Paris, 1868. 266 267
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place qui n'est pas celle que choisit finalement A. Kiessling suivi par K.. Jacoby. Notre proposition est sur ce point non pas strictement identique mais plus proche de la proposition de C. Müller. Tous les éléments étaient désormais réunis pour une publication complète intégrant les textes retrouvés depuis les découvertes de A. Mai. Le premier à republier l'intégralité du texte dionysien fut en effet A. Kiessling pour la collection Teubner. Il reprit à un détail près le classement de A. Mai en 1816, ajouta les fragments nouveaux mais modifia le découpage des livres; Kiessling dans sa préface signalait des erreurs dans le livre 13 mais renonçait à modifier l'ordre traditionnel hérité de Mai. C'est sur cette base que K. Jacoby travailla à son tour pour publier l'édition de 1905 dont nous dépendons toujours. E. Cary n'eut pas davantage d'audace et depuis, les rares éditeurs (F. Cantarelli, E. Sanchez 270 ) ont suivi cette vulgate. Plus grave, les historiens qui utilisent le texte dionysien ne la remettent pas en cause et se fondent sur elle pour leurs analyses chronologiques. Or elle appelle de multiples objections. 3 -
OBJECTIONS AU CLASSEMENT ACTUEL ET PRINCIPES 1 D UN NOUVEAU CLASSEMENT
Au terme de ces réflexions, il était logique de proposer à notre tour un reclassement des fragments dionysiens pour les livres 14-20 (voir tableaux p. 7-8). Il fallait affronter les paradoxes de la tradition manuscrite autant qu'éditoriale, ne pas éluder le débat sur le sens même qu'on peut donner à l'unité fragmentaire, mettre en avant des principes de division ou de regroupement des séquences textuelles qui nous sont parvenues. A. Les paradoxes - Le premier paradoxe : d'un côté des éditeurs ont vu des manuscrits mais ne s'intéressaient pas à D. H. en tant que tel; sans méconnaître son œuvre, ils n'aspiraient pas à l'éditer pour elle-même mais donnaient au public, dans les délais les plus rapides, un texte nouvellement découvert : Orsini, Valois, Mai, Feder et Müller. D'un autre côté des éditeurs qui ne voyaient pas les manuscrits ou un tout petit nombre d'entre eux, voulaient éditer D. H. complètement. Ils travaillaient d'après les éditions imprimées de ces mano Dionisio di Alicamasso, Storia di Roma arcaica (Le antichità romane). éd. F. Cantarelli Milan, 1984; Dionisio de Halicamasso, Historia antigua ~ Roma, éd. E. Jiménez-E. Sanchez, Biblioteca clâsica Gredos, 124 (livres 10-20), Madrid, 1988. Les derniers livres sont édités par E. Sanchez.
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nuscrits, faisaient au mieux contrôler certains d'entre eux. C'est le cas de Kiessling ou de Jacoby. Kiessling a vu lui-même un seul exemplaire du manuscrit des Ambassades, celui de Munich, et les manuscrits de Milan. Quant à Jacoby, il ne paraît pas voir lui-même le moindre manuscrit pour les fragments, il travaille uniquement sur des sources imprimées et parfois il s'emmêle dans l'apparat critique. Ainsi cet éditeur cite-t-il à plusieurs reprises des corrections pour des extraits des Ambassades en renvoyant à une copie qui se trouve aujourd'hui conservée à Paris (Paris. gr. 2463) ~ c'est le cas pour les fragments 15.5-6 KJ (15.H), 17.1 (17.A) et 19.16 (19.S). Or il dit lui-même dans son introduction que ce manuscrit s'arrête au fragment 15.6, et de fait, les deux derniers passages pour lesquels il le cite sont carrément absents du manuscrit parisien. L'apparat critique de Jacoby renvoie à des pages blanches. - Le deuxième paradoxe : on a d'un côté des philologues qui ont au mieux donné une traduction de D. H. mais jamais commenté son œuvre de façon exhaustive et de l'autre côté des historiens qui l'utilisent ou la commentent sans se soucier jamais de la fiabilité du texte qu'ils exploitent. Les éditions de A. Kiessling ou de K. Jacoby, celles, bilingues, de E. Cary, ou encore plus récemment de F. Cantarelli ou E. Sanchez, donnent le texte, éventuellement accompagné de sa traduction, mais ne relient pas leur entreprise d'édition à un commentaire historique approfondi de la documentation dionysienne. Or la réflexion sur l'ordre même des fragments ne peut pas être conduite sur la base des seuls critères philologiques, qui pèsent nécessairement sur la réflexion mais ne suffisent pas à trancher la difficulté pour nombre d'interclassements. - Le troisième paradoxe : on a chez les éditeurs le souci de retrouver le découpage en livres de l'original et on a dans les manuscrits une seule et unique mention d'une appartenance à un livre précis de l'original. Les éditeurs, depuis Hudson au moins, sont loin d'ignorer les éléments extérieurs qui peuvent aider au classement des fragments et à leur assignation en livres : mais soit ils connaissent presque tous les fragments de Stéphane de Byzance ou de la Souda qui citent D. H. et aident à le classer, et ils ne les utilisent pas car ils renoncent à classer (Hudson, Reiske). Soit ils veulent classer mais laissent de côté ces éléments extérieurs qui contredisent leur propre théorie (Mai cite Stéphane de Byzance dans sa préface mais pour expliquer qu'il n'en tient pas compte). Soit enfin, et c'est plus surprenant, mais c'est le cas de l'édition Teubner depuis Kiessling, ils omettent des passages citant D. H. empruntés à ces lexicographes. Nous verrons plus loin quel appui nous pouvons prendre sur l'ensemble des citations de Stéphane de Byzance. De même, les morceaux du texte qui sont aussi cités dans la Souda sont beaucoup plus nombreux que ne le disent Kiessling et Jacoby. Sans doute ce corpus
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des citations dionysiennes dans la Souda n'est-il pas clos: G. Zecchini271a signalé quelques attributions à D. H. et A. Favuzzi a ré; nous avons nouscemment identifié deux fragments du livre 17272 mêmes relevé quelques coïncidences entre la Souda et les fragments dionysiens. B. Prendre en compte la polysémie du mot «fragment» Les travaux sur la forme fragmentaire ont depuis peu été considérablement enrichis. Force est de reconnaître que longtemps, il a fallu s'en tenir à la définition qu'avait avancée Felix Jacoby lorsqu'il lança sa grande entreprise éditoriale des FGrH, à savoir qu'en gros, un fragment comportait une référence formelle à la source, auteur ou œuvre, dont il était tiré. Ce préalable élimine par principe les situations tangentes où l'éditeur se trouve face à des extraits apocryphes et surtout les cas où la fidélité à la source citée est objet de doute. De plus, la définition de F. Jacoby laisse de côté les fragments adespotes et aussi les emprunts non reconnus à des auteurs, des citations non signalées. Dans le cas de D. H., la plupart des fragments ne font pas difficulté quant à leur attribution à l'auteur ou aux A. R. précisément. Toutefois, si le corpus peut s'enrichir de citations empruntées par exemple aux lexicographes (Stéphane de Byzance, la Souda) ou aux amateurs de florilèges (Maxime Planude), il faudra bien revenir à ce débat. Le projet formé par les FGrH impliquait que fût posée la question même de la reconstruction de l'œuvre. Avait-elle un sens? Était-elle le but assigné à la collation des extraits épars? F. Jacoby évolua sur la question entre la préface du premier volume et celle du second, où il admit que des reconstitutions pouvaient être tentées pour les auteurs les plus importants273. Assurément sa réflexion se fondait essentiellement sur l'étude d'auteurs pour lesquels l'œuvre n'est pas conservée sous sa forme étendue. Dans le cas de D. H., peut-on envisager une édition qui loin de reconstruire l'œuvre, présenterait en parallèle les extraits en fonction des traditions manuscrites qui la font connaître, donc en partie selon des critères de classement thématique? Une G. Zecchini. La storia romana nella Suda dans G. Zecchini éd., Il kssico Suda e la memoria del passato a Bizancio (Atti della giornata di studio, Milano 29 aprile 1998), Bari, 1999, p. 75-88. 272 A. Favuzzi, Su due frammenti storici adespoti della Suda, dans AFLB, 42, 1999, p. 119-127. 273 FGrH 1, 1923, prœfatio p. vm ( «Für den nachlass der einzelnen die selbstverstândliche erwilgung massgebend, dass eine fragmentsammlung nicht rekonstruieren kaon und soll, sondem dass sie unter môglichster ausschaltung aller subjektiven ansichten die überlieferung vorzulegen hat») et 2A, 1926, prœfatio, 271
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telle entreprise simplifierait la question de l'ordre des fragments mais serait impuissante à rendre la cohérence de l'original, que nous ne renonçons pas à approcher, tout en mesurant l'impossibilité de sa restitution certaine. Ceci étant, une présentation confrontée des traditions manuscrites serait sans doute la meilleure pour les passages dionysiens qui portent sur les mêmes épisodes et sont rapportés par deux canaux: on pense à l'épisode de Lœtorius Mergus, à l'ambassade de Postumius à Tarente, et bien sOr à la révolte de la garnison de Rhégion. Dans le dernier cas surtout, la mise en parallèle des deux sources codicologiques éviterait d'avoir à présenter de façon successive les deux récits sur l'épisode, ce qui crée l'illusion d'un doublet. L'article de P. Brunt 274 a depuis lors constitué un réflexion de référence. Brunt y distinguait les reliquiœ des fragments stricto sensu, qu'il associe à la citation littérale. Or, comme il fait remarquer, les collections de fragments mélangent les simples allusions, la paraphrase, le résumé, les citations, les transcriptions pures, «which are inadequate mirrors of what the lost historians actually wrote •. Brunt engageait le débat sous l'angle de la fiabilité du témoignage (quel reflet subsiste du style, de la méthode, des informations historiques ... ?), soulignant par exemple que les épitomai ne forment pas forcément un «faithful miniature of the original as a whole» 215• Brunt mettait l'accent sur ce que nous vérifions à chaque pas de l'enquête dionysienne : les fragments ou les épitomai reflètent plus l'intérêt de ceux qui citent l'œuvre originale que ses caractéristiques propres. À ses yeux, seul un gros volume de texte fragmentaire garantit la représentativité du témoignage. Tout cela est convaincant mais l'historien de l'antiquité n'a parfois plus d'alternative : les derniers livres de D. H. sont sur certains épisodes la source unique ou en tout cas majeure. Il n'est pas possible de lire ces textes comme les œuvres connues sous une forme étendue; mais sans les fragments, nous sommes réduits au silence. Et le défaut inverse, qui consisterait à révoquer en suspicion toute citation voire toute collection fragmentaire est non moins périlleux que la confiance naïve que mettent certains historiens à utiliser ces passages comme s'ils n'offraient aucune caractéristique différente de celles que présente la littérature historique classique.
m P. A. Brunt, On Historical Fragments and Epitomes, dans CQ, 30-2, 1980, p. 477-494. 275 L'étude de J. Moore sur Polybe et les excerpta antiqua tirés de son œuvre va dans le sens contraire, en montrant que les anthologies peuvent aussi être un reflet fidèle, en réduction, de l'original. Voir J. Moore, Polybiana, dans GRBS, 12, 1971, p. 412-449, spéc. p. 428.
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Plus récemment les travaux impulsés par G. W. Most 276 ou G. Schepens 2n ont assuré à cette thématique un nouvel élan, autour de la notion de cover-text : la citation fragmentaire permet certes de conserver ce qui serait sinon irrémédiablement perdu; elle recouvre l'original dont elle change la forme; elle l'insère dans une autre œuvre. Dans le cas qui nous occupe, les fragments sélectionnés au Xe siècle dans des entreprises d'histoire thématique illustrent parfaitement cette triple dimension. S'il est indispensable de considérer en elle-même l'œuvre qui reçoit et concentre les citations, sa logique spécifique - laquelle peut avoir connu des évolutions et la sélection ambrosienne, quel qu'en soit l'auteur, est l'exemple patent d'une anthologie aux multiples critères et à la logique floue-, il n'en demeure pas moins que notre objectif, en qualité d'antiquisant, est le retour au commentaire de l'œuvre originale, le retour à l'étude de la République romaine des JVe et me siècles. Diverses monographies ont repris au plan méthodologique la question même de la fiabilité du témoignage fragmentaire et ont fait avancer le débat par des analyses très précises 278• Assurément, la voie qui vaut d'être explorée pour les fragments dionysiens dans les années qui viennent est celle d'une véritable confrontation, pour les premiers livres, entre les passages connus sous une forme étendue et ceux transmis par l'anthologie ambrosienne. Cette enquête comporterait un intérêt philologique, mais surtout historique : elle seule permettrait de définir précisément la méthode et les intérêts des sélections ambrosiennes. Éditer les manuscrits de Milan pour euxmêmes et dans leur intégralité est une nécessité pour faire progresser le débat sur les derniers livres des A. R.
276 G. W. Most (éd.), Collecting fragments-Fragmente sammeln, Gôttingen, 1997. m G. Schepens, Die Fragmente der griechischlm Historiker continued, IV A l, Leyde, 1998. La grande entreprise de poursuite et de révision des FGrH s'accompagne actuellement d'un projet de mise en place d'une base de données bibliographiques concernant les sources fragmentaires, Abakion (An Analytical Databasefor the Study of Fragmentary Greek Historical Writing). 271 Citons en particulier ceux de W. E. Thompson, Fragments of the Preserve.d Historians, especially Polybius, dans The Greek Historians, Literature and History, Papers presentd to A. E. Raubitschek, Saratoga, 1985, p. 119-139; D. Lenfant, Peut-on se fier aux «fragments» d'historiens? L'exemple des citations d'Hérodote, dans Ktèma, 24, 1999, p. 103-121; Ead., Nicolas de Damas et le fragment comme adaptation, dans AncSoc, 30, 2000, p. 293-318, tout particulièrement la réflexion des p. 315-318. Dans le présent volume, voir D. Lenfant, Les citations de Thucydùk dans les schol~ d'Aristophane : contribution à l'analyse de fragments d'historiens... , p. 415-447, spéc. p. 415-416.
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Comme le résume finalement A. C. Dionisotti 279 , les fragments peuvent résulter d'accidents physiques (ce qui a survécu est l'unique copie d'un texte). Les fragments dionysiens répondent en partie à cette définition. Mais le fragment peut aussi résulter d'une sélection délibérée: anthologie, compilation (et ces sélections peuvent être la seule survivance du texte original). C'est le cas par exemple des Deipnosophistes, des Nuits attiques ou du Digeste. D. H. entre aussi dans cette catégorie. Il y a enfin le fragment qui a survécu par le biais de la citation, par exemple des morceaux de texte qu'on a commentés: c'est le cas, pour Cicéron, de l'Oratio in toga candida, connue par Asconius. Les fragments dionysiens relèvent aussi de cette catégorie parce qu'ils sont cités par les lexicographes comme Stéphane de Byzance, ou l'auteur de la Souda. Dès lors classer des fragments, c'est bien classer ou agencer au moins trois types de textes différents. Il y a, en outre, trois sens différents qu'on peut assigner aux missions de classement : - mettre le texte dans l'ordre le plus proche possible de l'original à supposer que cet ordre ait globalement suivi l'ordre chronologique
et ait connu peu de digressions; - distribuer le texte selon les vingt livres entre lesquels D. H. avait réparti son œuvre; - au sein des vingt livres, distinguer des chapitres qui ne soient pas des paragraphes conçus sur l'usage moderne, artificiellement plaqué sur le texte original. Nous avons pris le parti de faire correspondre ces chapitres soit à une origine manuscrite différente (ce que tous les éditeurs ont naturellement fait), soit à un changement incontestable de sujet dans une même tradition manuscrite. Quant à la fragmentation par les modernes en alinéas pour les épisodes très longs issus d'une même tradition manuscrite, nous l'avons conservée pour des raisons de lisibilité 280 , mais sans conséquence sur la numérotation des fragments (à l'inverse des solutions retenues par K.iessling ou Jacoby). Donc, parler d'un classement de fragments c'est sans cesse jouer sur ces différents sens. Car on parle tantôt de ce qui a existé dans l'organisation voulue par l'auteur, tantôt de pans de textes qui n'offrent plus un récit continu mais ont été regroupés par les éditeurs au sein d'un même «fragment-chapitre». Or Kiessling puis A. C. Dionisotti, On Fragments in Classical Scholarship, dans G. W. Most (éd.), Collecting fragments-Fragmente sammeln, Gôttingen, 1997, p. 1-33. 280 Les alinéas de Kiessling-Jacoby ne sont rien d'autre qu'une respiration. Ainsi en est-il du long discours de Fabricius au livre 19, connu à la fois par les Ambassades et par l'Ambrosianus. Le découpage interne du discours ne repose sur aucun critère philologique, tout au plus stylistique. Mais finalement cet arbitraire-là nous importe peu car l'ordre de ce type de fragments ne fait pas difficulté. 279
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Jacoby regroupaient en réalité des fragments au sein d'un même chapitre, des fragments au sein des fragments : mais les courtes citations des manuscrits ambrosiens ne se suivaient pas dans l'original et loin de les regrouper sous un même chapitre, il est à notre avis indispensable de les séparer, d'autant que certaines de ces citations sont éclairées par une lecture historique et non strictement philologique de leur contenu. Il a été possible de réinsérer certaines de ces courtes citations dans leur contexte et donc de les interclasser de façon plus conforme à la logique des événements retracés. C. Les principes retenus
- Ne pas toucher à l'ordre interne issu de chaque tradition manuscrite On admet que les fragments tirés du traité des Ambassades par exemple se présentent dans l'ordre où ils étaient dans le texte original et on ne le perturbe pas. En clair, on peut intercaler un fragment venant d'une autre tradition thématique entre deux fragments d'une même tradition thématique à la condition de ne pas perturber en interne cette tradition. Ceci suppose que les manuscrits que nous possèdons n'aient pas connu eux-mêmes de mutation dans leurs cahiers, que les pages que nous lisons aient été correcteipent copiées mais aussi reliées. S'il est vrai par exemple que l'ordre interne du manuscrit Peiresc a pu être discuté (Peiresc, rappelons-le, fait recoudre les cahiers), les passages concernés n'affectent pas le texte dionysien. En l'état actuel de la tradition manuscrite des livres 14-20, rien ne permet de dire que les archétypes utilisés auraient été copiés dans un ordre qui les pervertissait, ou que les copies qui en ont été tirées ont été à un moment mal reliées. Ceci est hautement probable pour les textes dionysiens, ce n'est pas forcément vrai pour les autres auteurs connus par les compilateurs byzantins, ce n'est pas forcément juste pour les autres livres de D. H. : cf. passages du livre 12 dans le De insidiis où figurent des extraits du livre 15 de Polybe, qui sont intercalés. - Ne pas faire table rase de la tradition éditoriale La vulgate Kiessling-Jacoby propose un découpage en livres, qui n'est d'ailleurs pas celui qu'avait adopté A. Mai en 1816. Ce décou-
page est commode, mais il comporte des incertitudes fortes quant aux points de rupture entre les différents livres. Le découpage en livres est-il totalement arbitraire? Encore fautil rappeler qu'un seul manuscrit, pour les extraits concernant la ha-
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taille d'Ausculum, nous fournit une indication sur le rattachement de ces passages à un livre précis de D. H. Tout le reste est conjectural, ce qui ne signifie pas forcément faux. Pourtant, ventiler les passages selon les livres n'est pas totalement vain car l'auteur l'avait fait; mais la frontière entre les livres, si elle est parfois plausible, est rarement stlre. D. H. n'est pas un annaliste, il n'y a pas forcément une rupture correspondant à une coupure chronologique de type annalistique (d'ailleurs chez Tite-Live un même livre peut regrouper plusieurs années). De plus, les citations de Stéphane de Byzance viennent aussi appuyer l'idée qu'il faille conserver ce découpage qui était celui de l'œuvre à l'origine. Bien stlr, dans le cas des fragments, on pourrait imaginer une numérotation en continu depuis le début de livre 12, en renonçant à la division en livres. De toute façon, toute séquence sérielle, avec ou sans distribution en livres, est potentiellement vouée à la péremption, compte tenu de l'enrichissement même du corpus dionysien que nous croyons possible. Le découpage en livres permet à l'historien de conserver quelques repères dans l'œuvre, malgré sa dimension artificielle et ses erreurs inévitables. L'existence de deux numérotations chiffrées, concurrentes d'ailleurs, celle de Mai (1816) et celle de Kiessling/Jacoby nous ont fait opter pour une désignation des fragments sur la base d'une combinaison numéro du livre/lettre alphabétique pour chaque unité fragmentaire. La question du découpage en livres fait aussi difficulté pour d'autres historiens grecs connus par des fragments, c'est le cas de certains livres de Polybe, mais aussi de Flavius Josèphe ou d'Appien. Étudiant la division interne des livres polybiens, J. Moore 281 faisait observer que pour le seul manuscrit du De uirtutibus, le copiste n'indiquait le numéro du livre que huit fois pour Flavius Josèphe et une seule fois pour Appien. Rien ne venait identifier les extraits tirés des livres de Thucydide ni ceux de Dion Cassius. Pour Polybe lui-même, quelques rares notations marquent le changement de livre dans le Tur. C 980, et parfois elles comportent des erreurs. Ces éléments de comparaison nous invitent à la prudence : il est possible que, très tôt, la numérotation ait été perdue ou objet de confusions. Rien n'interdit de croire que déjà, au Xe siècle, l'état du texte ffit endommagé ou incomplet quant aux indications de numérotation en livres 282• De plus, il se peut que l'excerpteur, compte tenu du thème J. Moore, Polybiana, dans GRBS, 12, 1971, p. 412-449, spéc. p. 428-431. Les copies des A. R. que nous pouvons consulter aujourd'hui ne sont pas celles que les excerpteurs constantiniens avaient à disposition. Ceci étant, que trouvons dans les principaux témoins des premiers livres pour les codices les plus anciens? Signalons que dans le Chis. gr. R Ill 60 (X• siècle), la séparation entre les livres est marquée par un titre (cf.f. 244v livre 8). Au folio 244•, la fin du livre 211 212
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qu'il avait pour charge de composer, ait carrément passé des livres dans leur intégralité. Une autre explication serait que l'excerpteur, qui n'avait plus besoin ensuite de se répérer dans la masse de l'original, ait seulement noté au début et à la fin du volume les références du texte qu'il utilisait. Or nous avons perdu tantôt les débuts, tantôt la fin des traités thématiques. Enfin, il se peut fort bien que le texte antique, dès la période tardive et en tout cas au Moyen-Age, ait été copié ou relié selon des divisions qui n'entretenaient plus de liens avec les unités entre lesquelles l'original avait été distribué. La perte de la numérotation première a donc de multiples causes potentielles. Il ne faut sans doute pas gaspiller trop d'énergie à rechercher les divisions en livres, d'autant que celles que nous connaissons pour la première décade dionysienne ne paraissent pas particulièrement chargées de sens. Tout juste peut-on y revenir si elles aident à retrouver l'essentiel, c'est-à-dire le classement relatif des fragments entre eux malgré la diversité de leur tradition. Ne pas faire table rase de l'existant, c'est aussi considérer que le classement de Mai n'est pas toujours erroné, il est même dans un cas plus probable que celui de Kiessling. Au livre 14, nous modifions la séquence des fragments 14.3 KJ et 14.4 KJ, qui est inversée. Il s'agit des portraits respectifs de Marcus Furius(= Camille) et de Manlius Capitolinus. A. Mai (1816, p. 48) considérait ce passage comme interpolé par les abréviateurs byzantins, aidant le lecteur à suivre le fil de la narration par cette présentation, avant le grand discours de Camille aux soldats. Il classait ce fragment, issu du manuscrit Peiresc, juste après les trois premiers du livre 14, extraits de l'Ambrosianus. La datation du fragment n'est pas certaine, mais les superlatifs employés peuvent laisser croire que le personnage est présenté au faîte de sa carrière politique. Nous proposons donc de revenir à l'ordre suggéré par A. Mai et de classer le fragment 14.3 KJ (14.D) après le 14.4 KJ (14.C). précédent est accompagnée d'une présentation du texte formant une sorte de sablier. Il en est de même auparavant pour le livre T) (au f. 210,-le «sablier» et au f. 210- le début du livre suivant). Mais ce n'est pas systématique: cf. le livre Çau f. 182", qui commence sur la même page, à la suite, avec simplement un titre séparateur et une lettre initiale détachée. À la fin du livre 10, figure la mention ttl.oç aùv 8&lbtoO 6t:uttpou '31'311.iou. Dans le Vat. gr. 1300 (XI• siècle; contient les livres 6-10 des A. R.), le début de chaque livre est signalé mais sans séparation après. Il s'agit d'un parchemin copié pleine page et le début d'un livre ne correspond pas forcément à un début de page. Pourtant, à chaque début de livre, le copiste répète le nom de l'auteur et de l'œuvre. Ainsi au folio 264•, Tl6t:Klltl)Jl{Jll.oç tflç ·pcoµaucftçliPXa1oloyiaç 'ijv cruvqpavato A1ovixnoç ·Aï,..:~av6pou.Le dernier folio contient la mention : fümttpov t1ti tftç aùtflç t~oooiaç tµtv(ov). Ces quelques exemples montrent la variété des situations quant aux mentions indiquant les changements de livres dans les manuscrits qui sont pourtant les mieux conservés pour les premiers livres des A. R.
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- Tenir compte des traditions croisées ou parallèles Si un même passage est connu par plusieurs traditions manuscrites, il faut veiller à respecter l'ordre interne de chacune d'entre elles dans l'interclassement. Si tel paragraphe est connu par le manuscrit Peiresc et par l'Ambrosianus, il faut l'interclasser en nC:heurtant ni l'ordre interne du premier ni l'ordre interne du second. Ainsi l'épisode de Rhégion, dont les débuts paraissent situés par D. H. en 282 lors du premier consulat de Fabricius, pourrait, dans la tradition du De insidiis se situer plus tôt dans le livre, au milieu de l'actuel livre 19. Mais l'existence du résumé de l'épisode que donne à connaître un des manuscrits de l'Ambrosianus nous pousse à glisser l'épisode au début du livre 20, et à centrer son déroulement sur 280, pour respecter la cohérence interne de notre deuxième source manuscrite. - Emprunter à d'autres historiens grecs connus par des fragments Il faut admettre que les fragments de D. H. doivent être édités selon des principes qu'ont permis d'établir des philologues qui ont travaillé sur Dion Cassius ou Flavius Josèphe, ou Polybe, ou Appien, c'est-à-dire des auteurs pour lesquels les passages connus par les compilateurs byzantins peuvent recouper une autre tradition manuscrite, continue. En d'autres termes, ces principes reposent sur des comparaisons extérieures au texte dionysien lui-même. Nous manquions de points de comparaison interne pour la dernière partie du texte dionysien, aussi ne pouvons-nous appuyer que sur les grands principes éditoriaux proclamés par exemple par U.Ph. Boissevain 283 pour Dion Cassius, ou par J. Moore 284 pour Polybe. - Emprunter aux autres sources sur la période On touche là le point le plus délicat du reclassement. Des erreurs de chronologie sont souvent imputées à D. H. par les commentateurs de l'œuvre historique. De fait, la comparaison avec les premiers livres montre que le comput dionysien pouvait sensiblement différer de celui des annalistes romains. Dans le cas des fragments, la question est encore plus complexe : les sources sur la période sont lacunaires. Ainsi le livre 10 de Tite-Live s'arrête en 293 et m U.-Ph. Boissevain, Cassii Dionis Cocceiani historiarum Romanarum quœ supersunt, Berlin, 1895, vol. 1.prœfatio. 214 J. Moore, The Manuscript Tradition of Polybius, Cambridge, 1965. À compléter par J. Moore, Polybiana ...
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nous ne possèdons que de modestes bribes du livre 11285• Quant aux periochœ, elles sont d'une grande imprécision chronologique, tout juste fournissent-elles un ordre relatif des événements. Qui plus est, c'est un postulat bien discutable que d'établir toute la chronologie de l'histoire romaine en se fondant de préférence sur la version livienne. Le rapport entre les deux auteurs n'est de toute façon pas clairement établi : ils sont contemporains, peuvent avoir eu connaissance l'un de l'autre, avoir eu des sources communes. Il n'est pas démontré que D. H. ait «copié» systématiquement Tite-Live, ni l'inverse. Comment dès lors établir la chronologie dionysienne tout en revoyant l'ordre même du texte, donc en jouant sur deux critères mouvants et incertains? Si on se fonde sur la chronologie livienne, alors on supprime les discordances possibles et on aplanit les difficultés très artificiellement. Mais force est de constater que les autres sources, Plutarque, Appien ou Dion Cassius sont elles aussi très partielles quant au traitement chronologique des événements (Plutarque ne sert guère que pour retracer les guerres contre Pyrrhus) ou tout simplement lacunaires (Appien et Dion sont essentiellement connus par des excerpta comparables à ceux de D. H. ou des abréviateurs comme Zonaras et il est impossible de suivre en parallèle tous les épisodes de la période en confrontant tous ces auteurs). De surcroît ces sources sont, de par la méthode historique qui leur est propre, d'un faible secours pour la datation précise des épisodes dont elles font le récit. À cela s'ajoute que, pour Appien et Dion, les difficultés liées à la transmission du texte sont les mêmes que pour D. H. : mêmes incertitudes de classement des fragments, erreurs comparables dans la tradition manuscrite (très largement commune pour les livres qui concernent ces périodes), donc le classement relatif des événements, indépendamment de toute précision chronologique n'est pas non plus sO.r.Enfin, les sources parallèles imitent l'original dionysien lui-même, parfois très fidèlement, ce qui est à double tranchant: la confirmation qu'elles apportent ne vaut pas argument si Appien ou Dion recopient D. H., mais cette similitude n'est pas non plus synonyme d'erreur partagée! Revoir l'ordre des fragments n'est pas supprimer ces difficultés et ces contradictions, c'est reprendre l'établissement d'un texte antique en faisant dialoguer au mieux la philologie et l'histoire. Il nous faut approcher l'ordre initial du texte dionysien dans sa chronologie, qui pouvait elle-même comporter des erreurs, et cela, sans plaquer 215 Elles intéressent directement les fragments dionysiens puisqu'il s'agit de passages sur Postumius Megellus, dont les excès sont évoqués en 18.A et 18.B. Voir la démonstration très convaincante de B. Bravo-M. Griffin, Un frammento del libro XI di Tito Livio?, dans Athenœum, 78, 3-4, 1988, p. 447-521.
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une chronologie reconstituée par les historiens à partir de Tite-Live, dont D. H. serait trop artificiellement rapproché. Notre lecture de l'histoire républicaine romaine est - peut-on y échapper? - déformée, biaisée par la vision livienne, les ruptures chronologiques qu'elle souligne, les épisodes qu'elle met en relief. Or pour les JVeet IIIe siècles avant J.-C., la source dionysienne est très précieuse, non seulement comme contrepoint mais aussi dans sa dimension supplétive. Pourtant dans certains cas, on est, à tort, tenté de reclasser D. H. en fonction de la chronologie livienne et dans d'autres, on risque d'échouer à reconstituer un ordre plausible faute précisément de disposer de cette comparaison livienne ! La reconstruction des derniers livres des A. R. doit garder à l'esprit qu'elle peut, dans le meilleur des cas, se rapprocher de ce qu'on suppose être la cohérence de l'original et sa chronologie. Mais les retours sur le passé existent dans les A. R. : pour prendre un exemple évident, le livre 19 revient sur les fondations coloniales grecques du VIIIe siècle avant J.-C. (19.A-E). Citons encore le cas de la le.xPœtelia, dont nous pensons qu'elle est mentionnée dans un rappel sur la législation, et non au moment où est modifiée la loi (18.F). En tout état de cause, l'éditeur des livres fragmentaires dionysiens doit mesurer que sa tâche est forcément en partie vaine quant au classement des extraits. L'ambition reste d'établir un ordre relatif des fragments le plus cohérent possible, philologiquement et historiquement parlant. - Emprunter à des citations de D. H. faites par Stéphane de Byzance 286 Le lexicographe a publié un lexique des noms géographiques et ethniques, lexique dans lequel il s'appuie sur des auteurs classiques en citant souvent le nom de l'œuvre à laquelle il a emprunté, voire le livre dans lequel cette citation figurait. C'est donc notre source principale pour ventiler les passages selon un découpage en livres qui s'approche au mieux de l'ordre original. Pour autant, il ne faut pas ignorer que le lexicographe peut avoir puisé ses informations non seulement dans les livres mêmes de D. H., mais aussi, pour une grande part, dans des sources indirectes comme ,-Elius Hérodien, le grammairien du nesiècle. Parmi les difLes remarques qui suivent empruntent à notre édition des fragments, spécialement à l'annexe 1 co-rédigée avec Renaud Robert (Denys d'Halicarnasse, Rome et la conqulte de l'Italie... , p. 463-478). Pour les citations de Stéphane de Byzance à propos des derniers livres des A. R., nous renvoyons à l'édition Meineke, Berlin, 1849 et à l'annexe précitée, qui reproduit le texte, assorti d'une traduction et de quelques commentaires, auxquels nous renvoyons pour de plus amples détails. 216
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férentes situations qui peuvent se présenter, deux intéressent notre propos aujourd'hui : 1 - Quand le nom défini dans les Ethnika figure dans la partie conservée du texte de D. H., l'attribution du fragment à un livre des Antiquités Romaines peut correspondre au passage transmis; mais il n'est pas impossible que dans certains cas, la mention relevée par Stéphane de Byzance renvoie plutôt à une page qui se trouvait dans la partie perdue du récit (c'est le cas pour Frégelles). 2 - Dans d'autres cas, en se référant formellement à un livre précis de D. H., le lexicographe cite un nom qui n'apparaît pas dans le texte conservé de l'historien grec. Alors, seule la comparaison avec les autres sources, tout particulièrement Tite-Live, permet de déduire quels épisodes D. H. retraçait dans les parties de l'ouvrage que nous ne connaissons plus et où le nom mentionné par Stéphane de Byzance pouvait trouver sa place (c'est le cas pour Calès ou Mintumes). À l'intérieur d'un même livre de D. H. mentionné par Stéphane
de Byzance, rien ne permet d'assigner un ordre aux différentes notices conservées en dehors des déductions fondées sur la chronologie. Parmi les citations du lexicographe qui n'étaient pas mises à profit par nos prédécesseurs, nombre d'entre elles viennent confirmer l'assignation de tel ou tel fragment à tel livre. Par exemple, la mention de Terracine pour le livre 15 semble bien coïncider avec la citation de la ville dans le fragment 15.E, à propos d'un campement des soldats romains qui se révolte en Campanie en 342. Il en est de même pour Kaudion, qui était citée au livre 16 des A. R. Il fait peu de doute que Kaudion était mentionnée à propos de la deuxième guerre samnite et de l'épisode des fourches Caudines (16.A). De même la ville d'Asklos (Ausculum) était rattachée par le lexicographe au livre 20 de D. H. Sur ce point, il n'y a aucun doute puisque le récit de la bataille d'Ausculum est précédé dans le manuscrit de la mention «Extrait du livre 20 de D. H.» 287• Donc globalement, les citations de Stéphane de Byzance servent à assigner avec une probabilité acceptable certains fragments à un livre précis. Cela ne signifie pas qu'elles soient forcément très utiles pour l'interclassement des fragments en général. Il faut aussi relever que certaines mentions du lexicographe nous laissént dans l'embarras: ainsi en est-il pour Frégelles, asso-
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IJ
Voir note 64.
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ciée au livre 16. Selon l'épisode de l'histoire frégellane auquel on relie la citation, le découpage même des livres est remis en cause (cf. infra p. 191-192).Il en est de même pour des citations qui renvoient à des- épisodes que la tradition manuscrite n'a pas conservés. Il est vraisemblable que les A. R. gardaient trace au livre 16 du débarquement, en 302, du Lacédémonien Cléonyme vers la côte des Vénètes, comme la mention concernant Ravenne autorise à le supposer. - Utiliser la Souda pour mieux comprendre la nature de certains fragments 288 Seize extraits dionysiens des livres 14-20 (et peut-être deux autres, incertains 289 ) se retrouvent aussi dans la Souda, ils se rattachent en réalité à une dizaine d'épisodes distincts (les deux éditions Teubner n'en signalaient que quatre). Les variantes textuelles sont relativement mineures. Ce qui est intéressant, ce n'est pas tellement le nombre de citations retrouvées en soi - encore que Jacoby soit loin de souligner toutes les coïncidences avec la Souda; nous avons ajouté les références que C. de Boor avait données bien après l'édition de Th. Büttner-Wobst, celles de G. Zecchini et A. Favuzzi, et nous avons proposé quelques identifications nouvelles. Mais ce qui est important dans ces coïncidences avec la Souda, c'est surtout l'origine des fragments: pour Polybe, C. De Boor avait montré que les extraits figurant dans la Souda dérivaient directement des·excerpta constantiniens 290 • Dans le cas de Diodore, si on en croit Fr. Chamoux et P. Bertrac 291 les excerpta constantiniens sont considérés comme la source de la Souda quand elle cite Diodore de Sicile (les extraits viennent aussi bien du De legationibus que du De Pour le détail des citations et des comparaisons, nous renvoyons à notre édition des fragments (Denys d'Halicarnasse, Rome et la conqtdte de l'Italie ... , p. 480-496), spécialement à l'annexe 2, co-rédigée avec Emmanuèle Caire. On y trouve reproduit le texte de la Souda (emprunté à l'édition A. Adler, 1928), sa traduction, quelques commentaires et le signalement des différences entre la leçon des manuscrits dionysiens et celle(s) du lexique. 289 Il s'agit d'un lemme consacré à Manlius Torquatus condamnant à mort son propre fils, qui avait désobéi aux ordres, quoiqu'il eOt remporté un duel contre le latin Pontius; l'autre lemme mentionne le passage sous le joug. Ces citations sont tirées du Florilège de Maxime Planude, mais ne peuvent être assignées ni à Appien, ni à Dion Cassius, seuls auteurs, en dehors de D. H., dont nous sachions avec certitude qu'ils rapportaient ces événements. Voir annexe 2 dans Denys d'Halicarnasse, Rome et la conquête de l'Italie ... , p. 490-493. 290 C. de Boor, Suidas und die Konstantinsche Exzerptsammlung /, ByZ, 21, 1912,p. 381-424 et Suidas und die Konstantinsche Exzerptsammlung Il, dans ByZ, 23, 1920, p. 1-127. Voir aussi J. Moore, Polybiana, dans GRBS, 12, 1971, p. 412449, spéc. p. 433. 291 Introduction au volume 1 de la BibliothèJjue historique, CUF, 1993, p. CXL. 211
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uirtutibus). J. Irigoin 292 a souligné que le centre de copie des excerpta constantiniens et celui où est préparée, plus tard, la Souda, avaient des caractéristiques communes quant à la bibliothèque où étaient conservés les modèles et quant aux méthodes suivies dans l'atelier de copie. Pour notre auteur, peut-on dire que les extraits de D. H. cités dans la Souda sont uniquement ceux des traités constantiniens? Si oui sont-ils comme on l'a longtemps considéré, uniquement tirés du traité De uirtutibus? Non, nous avons dans les livres 14 à 20 plusieurs exceptions à produire : nous retrouvons un passage qui coïncide avec le texte transmis dans l'Ambrosianus et un autre qui croise la tradition du traité sur l'Art du général. La deuxième exception (l'extrait commun à la Souda et au traité De strategematis) montre que d'autres traités thématiques que le De uirtutibus peuvent avoir été utilisés par le lexicographe auteur du catalogue 293 • Quant à la première exception (le passage commun à l'Ambrosianus et à la Souda), elle nous ramène à la question lancinante du statut des textes conservés à Milan. Évidemment le lexicographe byzantin a pu emprunter soit à un autre traité thématique constantinien aujourd'hui perdu mais qu'il utilisait pour cette citation, soit à une partie du traité De uirtutibus que la tradition manuscrite n'a pas conservée. Si nos hypothèses sur la composition tardive des excerpta ambrosiens sont validées, il est en tout cas chronologiquement impossible que ces fragments aient servi de source au lexicographe de la Souda. Parmi les fragments nouvellement identifiés, aucun ne pose véritablement de difficulté d'identification ou de classement. Ainsi les fragments assignés au livre 17 à propos des élections consulaires de 297 (le quatrième consulat de Fabius Rullianus et la désignation de son collègue Decius Mus) ne sont pas difficiles à interclasser entre la troisième guerre samnite et le second procès de Postumius Megellus en 291. En réalité ceux des fragments de la Souda qui peuvent être rattachés à D. H. le sont surtout grâce à des identifications prosopographiques; donc les repérages chronologiques préalable au classement du texte sont relativement simples, sans être forcément précis. Par exemple la citation dans la Souda du passage sur Sulpicius Rufus (14.J) n'apporte pas d'élément de datation plus fine. Le passage peut seulement être classé de façon relative par rapport aux autres
m J. lrigoin, Centre de copies et bibliothèques, dans Byzantine Books and Bookmen. A Dumbarton Oaks Colloquium, Washington, 1975, p. 17-27, spéc. p. 24-25. 193 En tout état de cause, rien ne permet d'exclure que le lexicographe, s'il a seulement emprunté à la version des A. R. transmise dans les traités constantiniens, ait puisé dans un autre traité Il&pl p Kal Â.1µtva01CaolvKai 61tot>tpayoç àÂ.µupovol6µa àµcpaya,r~ttnrov 4Kpov 1toÂ.1oto y&v&iou· tv8a Tapavta 1to100tni I:atupiou fitfia(bta. (Tourne tes regards vers Satyrion, vers l'eau limpide de Tarente et le port occidental, là où le bouc embrasse le flot
sali du bout de sa barbe écumante,· là, construis Tarente installée sur le site deSatyrion). Pour Rhégion, D. S. 8 frg. 23.2. :
n
'A'l'Ul 1totaµibv i&pc.irtatoç&(ç cUa 1ri1ttt:t fv8'&CocofiàÂ.À.OVtt tov dpo&va OfjÂ.uç61rud&t. tv8a 1t6Â.1voîK\Ç&,6t6ot 6t ao1 Aooova xci>pav. 0( 6t ICŒtàtOV "Aviav ltOtaµov &ùp6vt&Çdµ1t&Â.OV lt&j)llt&ffÂ.&yµ&V'lV tp1v&ij) tlCnoav 11:0Â.1v. (•Là où l'Apsias, le plus saint des fleuves, se jette dans la mer, là arrête-toi où une femelle épouse le mâle, là fonde une cité, le dieu te donne la terre d'Auso-
nie». •Ils trouvèrent une vigne embrassant un figuier sauvage au bord du fleuve Apsias et fondèrent une cité»). SS
PaUS.4.20.J-2.
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viendrait se désaltérer au cours de la Néda. G. Vallet les attribuait à la propagande idéologique du contingent messénien, d'où serait originaire le tyran Anaxilas qui domine la vie politique de la cité au ve siècle. Ce type d'oracle linguistique est bien connu, et l'on a voulu les attribuer à l'époque archaïque (que l'on songe aux oracles sur Géla ou Locres). - Les régimes politiques des cités grecques d'Occident et en particulier les tyrannies de l'époque archaïque. Il s'agit d'abord du fragment 20.A (= 20.7 KJ) qui évoque les tyrannies de Clinias de Crotone, d' Anaxilas de Rhégion, et de Denys l'Ancien. Ce fragment du traité sur les Vices et les Vertus est l'un de ceux dont la localisation pose problème, même si cela ne remet pas en question la chronologie de la période étudiée. K. Jacoby l'avait intercalé entre l'affaire de Rhégion et le retour de Pyrrhus. Il paraît en effet logique de dresser un tableau des régimes tyranniques d1talie du sud et de Sicile avant d'évoquer celui de Pyrrhus qui apparaît à Denys comme un simple prolongement de l'histoire antérieure de ces cités, ballottées entre péril barbare d'un côté (Carthaginois en Sicile, populations italiques en Grande Grèce) et la tyrannie des uns et des autres. On peut d'ailleurs supposer que ce tableau répondait à celui des fondations coloniales qui ouvrait le livre 19 et servait de préambule au livre 20. Il faudrait alors envisager que le livre 20 commençait avec l'expédition de Pyrrhus en Sicile et le premier pas des Romains vers la conquête de l'île. Une autre solution consiste à le placer avant l'affaire de Rhégion: l'excursus concerne essentiellement la région du Détroit, convoitée du fait de sa situation stratégique et Denys aurait pu établir un parallèle entre les prises de pouvoir illégales des différents tyrans et le coup d'État violent de Decius. Mais le texte de l'affaire de Rhégion 56 évoque une traversée de Pyrrhus; d'après Decius qui invente ce prétexte pour réprimer les Rhégins, celle-ci aurait déterminé les notables rhégins à jouer double jeu et à envoyer un message à Pyrrhus pour lui demander son aide. Si la traversée de Pyrrhus fait allusion à son passage en Italie, il faut situer l'affaire de Rhégion avant Ausculum; mais si elle fait allusion à sa traversée du Détroit, il faut la placer après la bataille d'Ausculum et placer ce fragment entre l'épisode de Rhégion et l'expédition de Sicile. Le terme füal3acnç utilisé par Denys, est néanmoins trop neutre pour être interprété dans un sens ou dans un autre. On utilise plus généralement le terme de n6poç, nop0µ6ç pour la traversée du Détroit 57• Le point de vue moralisant adopté tout au long de son ousi, Voir dans ce volume, S. Crouzet, Sources et reconstructions de l'épisode de Rhégion. Denys d'Halicarnasse, Antiquités romaines, 20.B et 20.Q. 57 F. Prontera, Appendice. Porthmoi e poroi, dans Lo Stretta crocevia di cultu-
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vrage ne permet pas de trancher en faveur de telle ou telle localisation du fragment. Il nous a paru néanmoins préférable d'y voir une introduction aux exactions de Decius à Rhégion, du fait de l'insistance dionysienne à condamner ce type de pouvoir. Ici comme précédemment, les remarques de Denys sont allusives et limitées : on ne peut rien tirer de la référence à Denys l'Ancien, mieux connu par Diodore de Sicile; Denys a dO.utiliser !'Histoire de la Sicile de Timée de Tauroménion qu'il cite dans son introduction (1.6), et dont le jugement à l'égard de Denys l'Ancien est particulièrement négatif. Les tyrannies évoquées ici par Denys ont toutes pour fondateur un homme qui a mené une politique violemment anti-aristocratique, en s'appuyant sur les classes populaires ou marginalisées (comme le groupe ethnique des Messéniens à Rhégion). Denys suit la tradition aristocratique, qui noircit généralement les tyrannies populaires. En réalité, seul Gélon, qui soutint la classe aristocratique de Syracuse et approvisionna Rome en grain dans les années 490, trouve grâce à ses yeux 58• 1. Sur Clinias de Crotone, la digression dionysienne est fondamen-
tale puisque le personnage n'est pas connu par ailleurs. Clinias de Crotone, lors de sa tyrannie, ôta leur liberté aux cités. Après avoir ramené les exilés, où qu'ils fussent, et affranchi les esclaves, il consolida sa tyrannie avec leur aide et massacra ou chassa de la cité les notables crotoniates 59•
Mais elle ouvre un certain nombre de débats. D'abord, la date de cette tyrannie. L'ordre de présentation choisi par Denys, probablement diachronique, a incité les commentateurs à voir en Clinias un prédécesseur ou un contemporain d'Anaxilas, dans les dernières années du Vl" siècle ou les premières décennies du V" av. J.-C.60 • En efra. Alti del 26° convegno di studi sulla Magna Grecia, 1986, Tarente, 1987, p. 128-
131. sa D. H. 7.1.
D. H. 20.A (= 20.7 KJ) : ·on 10.Eiviac;6 Kpotrovtcit11c; tûpavvoc; 0>vàq,EiÂ.Eto titv t.Â.Eu8Epiavtaie; 1t6Â.EGl,q,oyci6ac;à8poiaac; t,c 1tavtoc; t67tOU ,cal 6oÜÂ.OUÇ t.Â.Eu8Ep(OOUÇ· oie; titv tupavvi6a KpatuvciµEvoc;tOÙÇt1t1cpaVEatcitouc; KpotO>VlatlÎIV Ot>Ç6t tç&f3aÂ.EV t,c tf\Ç 1t6Â.EO>Ç. Ot>ǵtv Ùff&KtElVEV, '° K. Von Fritz, Pythagorean Politics in Southern Italy, New York, 1940, p. 68; E. L. Minar, Barly Pythagorean Politics in Practice and Theory, Baltimore, 1942, p. 72; contra, G. Camassa, La codificazione delle leggi e le istituzioni politiche delle città grechedella Calabria in età arcaica e classica, dans Storia di Calabria, 1987, 1, p. 67-68; et N. Luraghi, Tirannidi arcaiche in Sicilia e Magna Grecia. Da Panezio di Leontini alla caduta dei Dinomenidi, Florence, 1994, p. 72-73 (pour lequel Denys d'Halicarnasse pourrait opposer les régimes d'époque archaîque à celui de Denys l'Ancien sans chercher à établir de cohérence interne à son développement). 59
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fet la présentation dionysienne semble être diachronique. Le retour des exilés q1,1'auraitopéré Clinias se place dans un contexte de stasis, qui frappe la cité dans la seconde moitié du VIe siècle, lorsque le parti oligarchique en place à Crotone a cherché à évincer des éléments dangereux, tel Philippe, fils de Boutacidès 61, et a soutenu les oligarques exilés à Sybaris par Télys. Le pluriel mtç 1t6Â.Ecndu texte dionysien suggère également que la cité était au faite de sa puissance, ce qu'a rendu possible sa victoire sur Sybaris en 51062 • La zone d'influence de Crotone s'étend alors sur l'ensemble de la Sybaritide, presque jusqu'à Métaponte, et jusqu'à la mer Tyrrhénienne sur l'autre versant de la Sila. Ensuite, la politique de Clinias présente les caractéristiques stéréotypées prêtées à toute tyrannie par la tradition historiographique à partir du JVesiècle: ainsi chez Aristote, «la plupart des tyrans, en somme, furent d'abord des démagogues qui avaient acquis la confiance du peuple en diffamant les notables 63»; pour garder le pouvoir, ils doivent «abattre les personnalités éminentes et faire disparaitre les âmes nobles 64 ». Le témoignage dionysien demeure là encore vague et inutilisable. Enfin, faut-il, en faisant l'hypothèse d'une erreur de manuscrit soit chez les excerpteurs, soit chez les J>arœmiographes, rapprocher ce Clinias d'un certain Kainias, lui aussi tyran de Crotone, auquel un oracle aurait prédit une mort de cire? Celui-ci n'aurait compris le présage qu'à l'arrivée de deux jeunes gens porteurs d'une lettre cachetée65. L'allusion à Thourioi a incité certains commentateurs à abaisser la date de la tyrannie de Clinias à la seconde moitié du ve siècle, mais on connait d'autres textes où la cité porte le nom de Thourioi bien avant sa fondation par un anachronisme assez naturel66. Hdt. 5.47. G. De Sensi Sestito, LA Calabria in età arcaica e classica: storia, economill. società, dans Storia di Calabria, 1987, p. 248-249; M. Giangiulio, Ricerche su Crotone arcaica, Pise, 1989, p. 34-35 et 310-315. 63 Arist. Pol. 1310b : V y&y6vamv tK 6flµaymyibvci>Ç &in&tv,JtlCJt&u8tv"t&ç ta:toO 6taj3all&tv toùç yvmp{µouc;:trad. J. Aubonnet, Paris, CUF, 1973. 64 Arist. Pol. 1313a. : to toùç UJt&ptxovtaç1:oi..o6&1v a:al toùç cppoV'lµariaçàvmp&tv: trad. J. Aubonnet, Paris, CUF, 1973. 65 E. Leutsch et F. G. Schneidewin, Corpus Parœmiographmum Grœcorum, Hildesheim, 19652 (1851), 1, Appendicia Centuria, 3, 46, p. 426: KTIPlVOÇ Oâ.vatoç· Ka1viaç tv Kp6trovt rupavv(6a a:ataCJK&uaaciµ&voç n&pltf)ç àpxflç àVflpciltato 8tov· 6 6t àv&tn&vci>Ç KTIPlVOÇ aotov àvaµtv&t Oâ.vatoç. 'Ea: 6t tf)ç 8oup(aç 66o v&aviCJKot tJtÉCJtflCJŒV ypaµµad6tov àva616ovttç tv oocp 6t Â.l)(J)V toOto àvsy{vœmc&vUJt'aütibv 61
62
avnptlhl.
P.J. Bicknell, The Tyranny of Kleinias at Kroton, dans Klearchos, 1976, p. 5-25. 66
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2. Sur Anaxilas de Rhégion, la version dionysienne est également légèrement différente de celle rapportée par d'autres 67 • Anaxilas s'empara de l'acropole de Rhégion et la contrôla jusqu'à la fin de sa vie; puis il transmit le pouvoir à son fils Léophron 61•
N. Luraghi a bien souligné le rôle symbolique et idéologique de cette prise de l'acropole, siège des principaux cultes poliades et lieu de défense. Mais c'est en même temps un poncif des gouvernements tyranniques 69 • Denys est en revanche silencieux sur sa politique extérieure, que nous connaissons par ailleurs : le projet d'Anaxilas étant de constituer un royaume du Détroit, il vit ses ambitions bloquées par l'expansion des Deinoménides. On éliminerait d'emblée ce témoignage si Denys ne présentait pas une variante de la succession dynastique. Selon Diodore en effet (11.48), un régent Micythos succéda au tyran en attendant la majorité de ses enfants. Toutefois, l'existence de Léophron est attestée par Justin 70 selon lequel il aurait assuré le commandement des troupes de Rhégion contre Locres, en tant que «tyran des Rhégins»; d'après Athénée 71 , il aurait fêté une victoire olympique chantée par Simonide. La plupart des commentateurs admettent que les sources ont confondu Anaxilas et Léophron, ce qui paraît étonnant de la part du poète de cour contemporain des deux hommes qu'est Simonide. En outre, Anaxilas a été marié deux fois, suivant ainsi une de ces politiques d'alliance matrimoniale, courantes chez les tyrans de l'époque archaïque et destinées à leur assurer des soutiens politiques et éventuellement militaires : de son premier mariage, étaient nés Léophron et une fille, unie à Hiéron Jerde Syracuse après 480; un second mariage fut contracté avant 480 avec la fille du tyran Térillos d'Himère, Kydippè; cette alliance, qui scella un accord de symmachie tourné contre l'expansion agrigentine, donna naissance à deux enfants, ceux-là précisément que protégea la régence de Micythos. Il est probable que Léophron fut associé à son père, et qu'il le seconda dans des expéditions, comme l'atteste le texte de Justin. Une mort prématurée a pu perturber la succession 72 •
Arist. Pol. 5.12.1316a; Heraclid. Lemb. 55 Dilts. "D. H. 20.A (= 20.7 KJ): 'Avaçu.aç 6t 'Ptty(VO>v niv àKpo,rOÂ.lV KateMJkto 1ealuvta tov toO Plou xp6vov Kataaxcov Ae6cppovite\) 1tai6i niv àPXTIV1CatUt1t& . ., Cf. la prise de !'Acropole d'Athènes par Cylon entre 636 et 627 av. J.C. (Hdt. 5.71), puis par Pisistrate (Hdt. 1.59), celle de la Citadelle d'Agrigente par Phalaris (D. S. 9.18; Polyam. Strat. 5.1). 70 Just. 21.4. 11 Ath. l.3e. 72 G. Vallet, Rhégion et l:anck ... , p. 119-138. 67
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- la Sicile et la Grande Grèce aux JVe-fiJesiècles av. J.-C. 1. Évoquées à propos des ambassades et conflits romains en Italie du sud, les institutions et vicissitudes des cités italiotes de Néapolis, Rhégion ou Tarente, apparaissent en filigrane dans les fragments. Denys y confirme ce que l'on apprend chez d'autres historiens: ainsi Néapolis semble dirigée en 327 par un gouvernement démocratique, constitué d'un Conseil (ffouÀ.il)qui propose des 1tpoJ3ouÂ.e6µata,d'une Assemblée (11t1e1CÂ.T17totibv 6f1µaymyibv icuiccY>vtatµfl6tv tv tautatç txouaat 1eaic6v.
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fidèle à un courant historiographique opposé à la démocratie populaire'°, devait probablement expliquer ainsi le comportement humiliant des citoyens tarentins à l'égard des Romains, lorsqu'ils se moquent de l'accent de Postumius et que l'un d'entre eux se soulage sur la toge de l'ambassadeur. La répétition du terme tcbv tv I11eaA.{q. npayµata>v icatà voOv61à tô µTJl3a, tppol;&tv tdÂ.&oo&npôç tov cinOCJt&iÀ.avta ntlaav tT)VcU:itO&tav, icai npoç o{ç t0&6.aato Uy&tv, ôn AaJHvtoç6 'Pcoµa{rovünatoç aütov napaictl&t µT)MOpa dµ1t&1vtttpooç ftt toùç icatacnc&voµtvouç,cill' aùtov tA.Oovtaq,av&p6lç i6&tvt&ical µaO&tvtT)V 'Pcoµa{rov6uvaµtv). 104 D. H. 19.R (= 19.12 KJ). 105 P. Lévêque, Pyrrhos ... , p. 323-327. '°'D. H. 19.S (= 19.13-16 KJ). 187 D. H. 19.T (= 19.17-18 KJ). 102 103
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se concilier les Romains parce que ses succès lui coütent trop cher en moyens humains et matériels 108, mais on ne peut pas tirer de ce texte beaucoup d'informations historiques, dans la mesure où les discours de Pyrrhus et de Fabricius sont uniquement destinés à exalter les qualités de l'homme romain : du point de vue littéraire, ce dialogue est un exercice de style où les deux hommes se répondent par procédés rhétoriques plus ou moins lourds et élégants. M. T. Schettino a fort bien montré que le texte de Denys révélait à la fois les influences des sources annalistiques romaines et celles de l'idéologie du Jersiècle: il s'agit de défendre les valeurs de li tÂ.eo8ep{a 109 et de li 1tappT1vnoÀ.&µ{cov, &iç toOto x:ottq,&uyov, 'Pcoµotot µtv t:iç tTIVtx: Xt:tpoçx:oiatafüaiav µa111v,to 6t iii)v 'IDJ..ftvo,vinn1x:ov&iç tàç 7t&ptt:À.ciat:1ç ,cai toùç tl;t:ï..1yµouç·,cal oi µtv 6n6tt: 6ui>Kotvtoünè, tii)v 'IDJ..fivœv, tJtlatpÉ'tfavt&Çtoùç ÎMOUÇ,cal toùç XOÀ.lVOÙÇ ICOtavnt:Çii>vtfl µtv tµq,&pT1çt,ct:ivn, tfl 6t 6tciq,opoç. 'Eµq,&pTIÇ µtv icotà to aüµnav, 6tciq,opoç6t ,catà tà µtp11. To µtv yàp 6t:l;1ovx:tpaç tntppntatt:pov ü,ri\px&vtKattpotç, to 6 · àptat&pè,v ünoo&tatt:pov. Ou µtvtot aùv tij) àv t6>vv&&v t11:itàç fyytata t&v Ao1epéi)v 8tvaç tçtppaa&v. ·o 6t JiamÀ.&ÙÇ Katafl:À.ay&içdnavta tov K6aµov Kai toùç Oriaaupoùç cbt&OO>K& tfl 8&4>ci>ç11:apa1tria6µ&voç aûtflç füà toOto tOV X6À.OV· N1111:1oç, ou6t to t'\6&1,ô oû 11:&ia&a8a1 fµ&U&v. Où yap t· aiva 8&6>vtpt11:&ta1v6oç aitv t6Vtcov, t6>vi&péi)vttoÀ.µria&v 4'1'aa8a11PT1µcitmv mi ci>ç·0µ11pq>&Cprita,. "A).).· t11:&16it 11:opovÛffo8É0'8alffOÀ.ɵIDV, civ6vritov &ffo{ria& tflV fvvo,av aùtoO to OOlJ.&OVlOV, rvu napci6&1yµaKai 11:a{6wµa11:dmvciv8pci>fl:01ç ytvo1to totç µ&8" taut6v.
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particulier une grande quantité d'or enterré de manière à demeurer invisible de la foule. Séduit par ces flagorneurs et considérant que la nécessité était plus forte que tout, Pyrrhus utilisa comme hommes de main pour piller le sanctuaire l'idée. Il chargea sur des navires l'or enlevé au sanctuaire et l'envoya avec le reste des richesses à Tarente, désormais rempli d'une grande confiance. Mais la juste Providence manifesta sa puissance. Quand les navires eurent quitté le port, ils avancèrent d'abord grâce à une brise de terre. Puis se leva un vent contraire qui tint toute la nuit, faisant chavirer certains navires, en poussant d'autres vers le détroit de Sicile; quant à ceux qui transportaient les offrandes religieuses et, parmi elles, l'or consacré, ils allèrent s'échouer sur les rivages des Locriens. Ceux qui se trouvaient à bord périrent noyés dans le ressac des flots, cependant que les richesses sacrées, quand les navires se disloquèrent, furent rejetées sur les plages proches de Locres. Le roi, frappé de terreur, rendit toute sa parure et ses trésors à la déesse, pour apaiser ainsi sa colère, «sans même savoir l'insensé, qu'elle n'allait pas se laisser fiéchir, car l'esprit des dieux immortels ne varie pas d'un coup•, comme a dit Homère 135• À partir du moment où il osa porter la main sur les richesses sacrées et où il se proposa de les utiliser pour financer ses guerres, la divinité rendit vaines ses espérances pour que son exemple instruisît aussi les générations futures.
Ce texte évoque avec abondance de détails un épisode authentifié par de nombreuses sources 136• Denys distingue ainsi dans le butin, plusieurs types de richesses 137, ce qui correspond aux valeurs entreposées généralement dans les sanctuaires : de l'or monnayé ou sous forme de lingots, les offrandes et ex-voto, les parures des statues cultuelles et objets de libation et de sacrifices. L'or monnayé et les lingots étaient éventuellement prêtés et servaient de réserve bancaire. En revanche, les dons et ornements du dieu ne pouvaient être empruntés qu'en cas d'extrême nécessité 138• Ici la réserve souterraine est dite ci8uctov, qu'on n'a jamais touchée ou qu'on ne peut pas toucher. Il me semble préférable de traduire par «intouchable» 139 : c'est m Hom. Od. 3.146. 1l6V. Max. 1.1; D. S., 27.4.3; Ap. Sam.12.5-6; D. C. 9 frg. 40.48. 137 E. Caire, Py,rhus et les trésors th Persiphone, dans Pallas, 53, 2000, p. 243-
256. 131 Th. 2.13 : Périclès évoque l'éventuel recours à la parure de la statue chryséléphantine du Parthénon, qu'il faudrait remplacer ensuite intégralement, si les Athéniens étaient réduits à la dernière extrémité. Les autorités athéniennes y recourent à la fin de la guerre du Péloponnèse. 139 Contrairement à la traduction proposée par E. Caire, Py,rhus et les trésors th Persq,hone, dans Pallas, 53, 2000, p. 243-256 et à notre édition des Fragments,
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précisément parce qu'elle est ancienne (consetvée de tout temps : t1c: 1tavtoç ToOxpovou 1tecpuÀayµtvov),et donc particulièrement vénérable qu'elle est enterrée; et le fait d'y toucher représente un sacrilège qui justifie la colère de la déesse. Étant donné que l'on connait d'autres exemples de pillage du sanctuaire, en particulier par Denys l'Ancien, un siècle avant Pyrrhus, la résetve n'est donc plus • intouchée ». On sait également que le sanctuaire de Zeus Olympieios, situé intra muros, était dépositaire de fonds sacrés et prêtait de l'argent à la cité de Locres pour des travaux de réfection, l'approvisionnement en denrées de première nécessité ou des dépenses ponctuelles et onéreuses 140• On connait en particulier des prêts consentis à un basileus, que certains ont interprété comme Pyrrhus, étant donné la datation de ces tablettes à la fin du JVe-début me siècle av. J.-C. Or les tablettes de bronze, sur lesquelles étaient gravés les décrets du Peuple et du Conseil, et qui représentaient la reconnaissance de dettes officielle de la cité, étaient déposées, elles aussi, dans une cachette souterraine, constituée d'un cylindre de pierre subdivisé en quatre cavités 141• Le cylindre était fermé d'un énorme bloc de pierre poUIVUde gros anneaux en bronze, qu'il n'était pas facile de manipuler. Ces tablettes demeuraient donc «invisibles de la foule», comme c'est le cas de l'or inviolable du sanctuaire de la Mannella. - la bataille de Bénévent 142 Racontée semble-t-il en détail par Denys, la bataille n'est que très peu consetvée dans les manuscrits ambrosiens. Il nous reste le cauchemar de Pyrrhus et un épisode très bref de la bataille qui vit la défaite du roi 143• durant la nuit où Pyrrhus s'apprêtait
à faire passer
Rome et la conqulte de l'Italie aux fi.(' et III• siècles av. J.-C. (Antiquités Romaines, livres 14-20), texte grec, traduction et commentaire, S. Pittia et alii éd., Paris, 2002 (Fragments). 140 L. Migeotte, Sur ks rapports financiers entre œsanctuaire et la cité de ux:re.s,dans Comptes et Inventaires dans la cité grecque, actes du colloque de Neu.clu2tel en l'honneur de J. Tréheux, éd. D. Knoepfler, Neuchâtel-Genève, 1988, p. 191-203. 141 A. De Franciscis, Stato e societtl in lDcri Epiufiri (L'ArchiviD dell'Olympieion locrese), Naples, 1972. 142 D. H. 20.J-K (20.12 KJ). 143 Nous avons déplaœ le fragment 11 généralement situé avant le fragment 12 (fragments J-K dans notre édition des Fragments, Denys d'Halicarnasse, Rome et la conqulte de l'Italie... ), car nous avons estimé qu'il désignait les troupes romaines plutôt que les années de Pyrrhus, selon l'hypothèse de A G. Roos (De fragmentis nonnullis e Dionysii Halicarnassensis Antiquitatum Romanarum libris postremis, dans Mnemosyne, 38, 1910, p. 281-290); un texte de Dion Cassius peut être rapproché du nôtre: il s'agit d'une attaque de soldats romains, pendant la guerre contre les Samnites en 277 (Zonar. 8.6.1).
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son année dans la montagne pour aller attaquer secrètement le camp romain, il rêva que la plupart de ses dents tombaient et qu'un flot de sang s'échappait de sa bouche. Fortement troublé par cette vision qu'il interprétait comme le présage d'un grand malheur - car déjà précédemment, après avoir eu en songe une pareille vision, il avait essuyé un terrible échec - il voulut ajourner l'attaque. Mais il n'eut pas la force de vaincre l'arrêt du destin: ses amis s'opposèrent à ce report et jugèrent qu'ils ne devaient pas laisser échapper l'occasion favorable qu'ils tenaient là. L'armée de Pyrrhus achève l'escalade avec les éléphants: les Romains s'en aperçoivent et blessent un éléphanteau. Il en résulta un grand désordre parmi les Grecs et ce fut la débandade. Alors, les Romains tuent deux éléphants, en acculent huit autres dans un lieu sans issue, prennent vivants ces éléphants après la reddition de leurs cornacs indiens, et massacrent un grand nombre de soldats 144 •
Le rêve prémonitoire de Pyrrhus doit être rapproché de l'épisode de Locres : d'une part parce que, comme lors de la tempête, le roi prend peur des manifestations surnaturelles, ensuite parce que ses erreurs tactiques sont attribuées à ses proches, comme si l'historien Denys, ou sa source d'inspiration cherchait à rendre Pyrrhus irresponsable de certains de ses actes. On peut suggérer ainsi que Proxenos ou Pyrrhus lui-même, par le biais de ses Mémoires, présente une vision qui fait du roi une victime du destin. L'épisode des éléphants, qui est un échec épirote, doit être mis en parallèle avec celui de la bataille d'Ausculum où, là aussi, le recours aux animaux fut un désastre, d'après le récit dionysien, vraisemblablement tiré d'une source annalistique exaltant la bravoure des soldats romains face à des périls nouveaux. Les fragments ne constituent donc qu'une source d'appoint sur le monde grec, car procédant trop souvent par allusions, ils nous obligent à compléter les informations dionysiennes en recourant à
D. H. 20.J (= 20.12.1-2 KJ) : "Ev tfl vum, tv li rltv atpattàv cimil;&tv t,d to 6poç t'i) "Pcoµafmvtm9Tia61,1Evoç xapaKt M8pa, tool;& Katà tOOÇOffvouç&ICff&O'dV aùtoO toùç n:À.dovaç6Mvtaç ICQÎn:Â.f18oç aiµatoç &ICtOOvt&Ç O'ICl)µviovtÀ.tq,avtoç ntpcixncOOO'lV, ô n:0U11vciKoaµ(av totç "EUT16t Kataddaavt&Ç &iç xmpfov civtl;o6ov ,rapa66vtmv tlbv t,r· aotolç 'lv661vÇêbvtaçn:apaÀ.aµPcivoucn,tc!,v 6t qtpattcotci,v ,roÀ.ùvq,6vov tpyciÇovta,.
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d'autres sources; mais ils confirment, malgré leur caractère lacunaire et arbitraire, les objectifs et la méthode employée par Denys dans les livres complets : les digressions sur le monde grec sont autant de références aux parentés et différences culturelles entre Rome et les cités grecques. Elles nous permettent d'appliquer les problématiques proposées pour les livres complets à l'ensemble des fragments. À l'exception des manuscrits Ambrosiens et si on laisse de côté Pyrrhus, considéré comme partie prenante de l'histoire romaine, seul le traité des Vices et des Vertus présente des excursus sur l'histoire du monde grec égéen. Ce n'est pas un hasard; Denys a suffisamment répété dans les livres 1 et 2 la supériorité morale de Rome, seule détentrice de l'hellénisme authentique, celui des origines qui a permis l'essor de la Grèce. La volonté de l'empereur byzantin de mettre à la disposition de tous le modèle antique ne fait que renchérir sur la perspective dionysienne. Paradoxalement les fragments des excerpteurs byzantins du xesiècle, pourtant considérés comme des textes originaux de Denys, nous apportent moins d'informations que les manuscrits de l'Ambrosianus où se mêlent citations brèves et passages assez longs, résumés et abréviations, sans que la fidélité au texte original soit toujours parfaitement respectée. Sophie
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DENYS D'HALICARNASSE ET LES GAULOIS À TRAVERS LES FRAGMENTS* DES ANTIQUITÉS ROMAINES (LIVRES 14-20)
Depuis la fin du XIXesiècle, les passages consacrés aux Gaulois clans l'œuvre de Denys d'Halicarnasse sont disponibles en français grâce aux travaux d'E. Cougny•, travaux qui viennent de faire l'objet d'une réédition 2. Malgré cela, ils sont peu utilisés par les spécialistes du monde celtique qui lui préfèrent généralement son contemporain Diodore 3• Antérieur aux plus récentes éditions allemande et anglaise, le texte reproduit et traduit par E. Cougny présente quelques difficultés que la nouvelle édition aixoise publiée récemment tente d'éliminer. Malheureusement, le choix, justifié et assumé par ailleurs, de ne pas prendre en compte les fragments conservés des livres 12-13, appartenant à une tradition manuscrite spécifique, interdit une vision cohérente de l'apport de Denys à nos connaissances sur le monde celtique. Il suffit de rappeler que dans le découpage en livres adopté depuis la fin du XVIIIe siècle, le récit de l'expédition gauloise qui
• Cette communication doit beaucoup aux discussions du groupe de travail et, de façon encore plus précise, aux notes rédigées par Sophie Collin-Bouffier et Renaud Robert destinées au commentaire qui accompagne la traduction. On y retrouvera plus longuement développées les références aux auteurs antiques et modernes, notamment pour ce qui concerne la mythologie et les conceptions ethnographiques propres aux Grecs. Voir Denys d'Halicarnasse, Rome et la conquhe tk l'Italie (Antiquités romaines, livres 14 à 20), texte grec, traduction et commentaire, S. Pittia et alii éd., Paris, 2002 (Fragments). La numérotation des fragments pour les livres 14-20 renvoie à cette édition. 1 E. Cougny, Extraits tks auteurs grecs concernant la géographie et l'histoire tks Gaules,Paris, 6 vol., 1878-1892.Les textes de D. H. figurent dans le volume 2, p. 458-493. 2 Aux éditions Errance, 1993 pour le tome 2. J Par exemple, P.-M. Duval, us sources tk l'histoire tk la France. Des origines à la fin du XV• siècle. I. Lo.Gaule jusquau milieu du V• siècle, ne lui consacre qu'une seule page (1.2, p. 313), ne citant que les livres 1 à 8, contre trois pages pour Diodore (p. 287-289). Xavier Lafon, Université d'Aix-Marseille 1.
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aboutit à la prise de Rome par les Gaulois de Brennus est partagé entre le livre 13 et le livre 144 • Ces propos sont donc une tentative pour donner une certaine cohérence à la pensée dionysienne en sortant du cadre imposé par la nouvelle édition, même si le propos sera largement concentré sur les livres 14 et, à un moindre degré, 15. Deux points principaux retiendront notre attention, les observations ethnographiques à propos des Celtes (mot utilisé par D. H. suivant en cela la tradition grecque 5) et, peut-être plus originale par rapport aux autres sources littéraires conservées, la vision proprement géographique de l'espace celtique. Mais, pour commencer, il convient de revenir brièvement sur l'importance accordée par D. H. dès le livre 1 à cet épisode de la prise de Rome dans l'histoire de la Ville. Cette tragédie constitue, en effet, le pivot de la chronologie proposée par D. H. pour l'ensemble de l'histoire de Rome (1.74), avec un décalage de deux ans par rapport à celle, généralement suivie par les modemes 6, de la chronologie varronienne qui place le même épisode en 390. S'il n'y a pas lieu ici de revenir sur les questions posées par cette chronologie 7, il faut en retenir, comme pour Tite-Live, l'importance de la coupure qu'il sanctionne en raison, à cette occasion, de la destruction «obligatoire» des archives, à l'exception de quelques archives privées mentionnées dans le même passage par D. H. De fait, tout ce qui se passe avant appartient pour lui au domaine de la mythologie, seul ce qui se passe après relève de l'histoire. En conséquence, les informations sur les Gaulois eux-mêmes font, théoriquement, clairement partie de la seconde. On verra que dans les faits, cette distinction est loin d'être aussi bien établie, à commencer par la réalité de la destruction systématique de Rome par les bandes gauloises pendant leurs quelques jours de présence•. La limite exacte entre les livres 13 et 14 est, en elle-même, difficile à établir et a fait l'objet de nombreuses discussions. Nous avons adopté sur ce point la coupure traditionnelle. 5 Cf. en dernier lieu J. France et Chr. Delaplace, Histoire des Gaules (VI• av. J.-C./VJ• s. apr. J.-C.), Paris, 1997, p. 5. 6 Toutefois V. Kruta (Les Celtes. Histoire et dictionnaire, des origines à la romanisation et au christianisme, Paris, 2000, p. 189) retient la date de 387, alors qu'il ne cite pas le texte de D. H. consacré à ces invasions mais seulement ceux de Polybe (2.17-18), de Diodore (14.113-115), de Tite-Live (5.33-35) et de Pline l'Ancien (Nat. 12.5). 7 Ce double ancrage explique la pratique des deux dates que nous avons utilisée après d'autres pour replacer en chronologie absolue les épisodes mentionnés par D. H. à l'intérieur de ces Fragments, en particulier ceux les plus proches de cet événement central, à commencer par les autres expéditions gauloises en Italie dans la première moitié du N• siècle. • F. Coarelli, La stratigmfw. tkl Comitio e l'incendia gallico, dans le catalogue d'exposition, I Galli e l'ltalia, Rome, 1978, p. 229-230; M. Torelli, Il sacco gallico 4
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D. H. apporte toutefois une pierre majeure dans la reconstruction idéologique de cet épisode puisqu'il est le seul à mentionner la redécouverte du bâton de Romulus (14.B) au milieu des cendres du Palatin, le seul secteur de Rome où l'archéologie apporte des signes d'une destruction par le feu datable du tout début du JVe siècle malgré le témoignage apparemment discordant de Diodore (14.115) qui en fait, au contraire, le seul secteur épargné ... Cette mention du bâton romuléen revêt bien évidemment une importance beaucoup plus grande dans le contexte de l'époque augustéenne et de la refondation de Rome qui lui est associée que comme un témoignage véritable sur les destructions de Rome au début du JVe siècle. Les notations conservées de type ethnographique constituent un ensemble à première vue décevant, surtout si on les compare aux informations beaucoup. plus développées données par Diodore, notamment dans son livre 5 et davantage encore, par les auteurs latins à commencer par César lui-même. À propos de ce dernier, il semble bien que D. H. n'ait pas utilisé les Commentaires du général victorieux, préférant se référer, plus ou moins explicitement, au corpus des connaissances réunies avant 59 par les auteurs grecs. Cette situation est d'autant plus curieuse que, comme l'a bien montré J. France 9 , César lui-même est largement tributaire de ce corpus qu'il a su utiliser en le déformant pour justifier ses actions : D. H. ne pouvait a priori rester insensible à cet argumentaire en faveur de la gloire de Rome et de sa politique d'intervention mais, comme nous le verrons, n'y fait jamais directement allusion. Dans la pensée de D. H., le Celte est présenté comme le prototype du Barbare. D'un point de vue général cette position permet à D. H. de situer clairement le conflit entre Rome et les Gaulois dans le sens de la position qu'il défend régulièrement, la première étant la représentante de la civilisation (grecque) contre la barbarie. Une autre tradition, défendue notamment par des Grecs de Sicile et connue à travers un passage de Trogue Pompée 10, faisait, au contraire, des Gaulois des mercenaires appelés en Italie à l'initiative des tyrans de Syracuse pour lutter contre leurs ennemis étrusques, eux-mêmes étroitement liés aux Romains. L'insistance à placer à l'origine des invasions gauloises une intervention même involontaire d'un commerçant étrusque (13.10) permet à D. H. de concilier sa romanophilie avec ses origines grecques, sans les renier. di Roma, idem, p. 226-228. La tradition littéraire parle pourtant d'un séjour des Gaulois à Rome qui aurait duré sept mois (V. Kruta, ùs Celtes,Histoire... p. 189). 9 J. France, G«,gra.phieet politique. La. vision césarienne des Gaules avant la conqidte, dans Ol/odagos, Actes de la Sociité belge d'Études celtiques, 2, 3, 1991, p. 261-281. 18 Justin 20.4 et 22.4. Il
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Dans les Fragments conseivés il n'est fait aucune mention d'une des caractéristiques générales attribuées aux peuples barbares, leurs scrupules religieux auxquels D. H. fait allusion dans le livre 7.70. En revanche, le Celte fait preuve d'une étonnante capacité à boire et en même temps de son incapacité à résister à ce plaisir. Conséquence générale, sa capacité guerrière s'en trouve très fortement diminuée. Si le principe de l'adéquation entre barbare et ivrogne n'est guère original, on doit insister sur le contexte de ces beuveries rapportées par D. H. : dans tous les cas il s'agit des heures ou des jours qui précèdent (par exemple 14.B) ou suivent le combat puisque l'on est toujours, en raison de l'origine des Fragments, dans un contexte de campagnes militaires. Au-delà du cliché, on peut se demander, en suivant les récentes recherches de M. Poux 11, s'il ne s'agit pas d'un véritable trait de caractère de la civilisation laténienne : celle-ci accorde aux banquets et aux cérémonies qui précèdent et suivent l'engagement dans la bataille une valeur magique, sinon proprement religieuse, très forte. Selon M. Poux, les auteurs grecs auraient interprété ces pratiques dans un sens très restrictif, mettant l'accent sur le contraste existant entre le vin, symbole avec l'huile des «civilisations» méditerranéennes et l'usage, proprement barbare, qu'en font les Celtes. D. H. présente parfaitement ce point de vue dans son récit des origines de l'expédition gauloise (13.11) où il fait expressément mention de boissons (alcoolisées?) malodorantes, comme de graisses animales rancies tout aussi malodorantes pour un palais grec: les Gaulois ne peuvent qu'être séduits, sans retenue aucune, par les produits civilisés, au point de se mettre en guerre pour se les procurer par la force et non plus par le commerce. Par là-même, D. H., comme les autres auteurs grecs, gomme toute possibilité d'une interprétation proprement celtique de cette consommation collective d'alcool : le vin n'est qu'un produit de substitution, peutêtre seulement plus prestigieux parce qu'il est importé, mais qui assure en définitive les mêmes effets que la ceivoise. Dans le cas des expéditions gauloises en Italie où sont mentionnés l'abus de vin et ses conséquences funestes sur les combattants celtes (embonpoint, transpiration, etc. qui les rendent incapables de se battre longtemps: 14.K) les propos de D. H. posent un problème
En attendant la publication de sa thèse consacrée au vin chez les Celtes, on consultera différents articles dont M. Poux, I.e banquet des chefs, dans L'arc~ logue 41, avril-mai 1999, p. 19-22 et surtout Festins sacrés, ivresse collective et cultes guerriers en Gaule celtique. Traces littéraires, perspectives archéologiquesdans S. Verger (éd.), Rites et espaces en pays celte et médttemzni.en. Étude comparée à partir du sanctuaire d'Acy-Romance, Rome, 2001 (Collection tk ['École française tk Rome, 276), p. 305-335. 11
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de chronologie. Ces rituels d'ivresse collectives sont, en effet, principalement attestés, si on laisse de côté les témoignages récurrents des auteurs grecs depuis Hérodote, par des découvertes de matériel archéologique. Il s'agit notamment des amphores vinaires «républicaines• (gréco-italiques et surtout Dressel 1) trouvées en grand nombre dans les sanctuaires puis dans les tombes aristocratiques. En chronologie absolue, ces amphores nous renvoient, au plus tôt, à la période qui précède immédiatement ou, mieux, qui suit l'intervention romaine en Gaule du Sud (milieu nesiècle), et s'achève peu après la conquête césarienne. On est donc très loin des années couvertes par les livres 13-15de D. H., la première moitié du JVe siècle. Deux conclusions, sans aucun doute contradictoires, peuvent être tirées de cette divergence chronologique. Dans le premier cas, il s'agit d'un pur anachronisme, D. H. reprenant, pour cette période déjà ancienne, des données fournies par des auteurs contemporains ou de peu antérieurs, à commencer par Posidonios qui visite la Gaule au tout début du Jersiècle av. J.-C. La deuxième est plus prometteuse mais pas nécessairement mieux fondée ... On pourrait, en effet, admettre que D. H., même s'il reprend des clichés sur l'ivresse des Barbares présents déjà au début du JVesiècle chez Platon 12 , constitue en réalité un jalon significatif de la mise en place, dès le début du JVe chez les Celtes de ces pratiques collectives, avant même la diffusion massive en Gaule du matériel archéologique qui en constitue l'illustration la plus évidente. Une des difficultés de cette analyse réside dans la confusion entretenue chez les auteurs anciens et modernes sur un autre mode de consommation du vin dans le monde celtique. Il s'agit de la consommation, fondamentalement différente dans sa finalité, réservée aux membres de ce que l'on a coutume d'appeler les résidences princières de la fin du premier Âge du Fer (Hallstatt), dans le cadre d'échanges de type potlatch 13• Les découvertes de Vix et de Hochdorf symbolisent avec leur mobilier (cratères, œnochoés etc.) cette première forme de diffusion en milieu celtique du vin méditerranéen et de son utilisation selon des modalité finalement très proches. D. H. attesterait, en quelque sorte, après une période d'interruption, la réintroduction du vin au début du deuxième Âge du Fer (La Tène) dans ce que l'on considère toujours comme le monde celtique mais dans un contexte économique et social totalement différent. Ce «nouveau• produit, le vin, est destiné à remplacer très progressivement (comme l'atteste la très lente progression du nombre d'amphores italiennes), des produits alcoolisés strictement
12
Pl. Lg. 1.637d. Festins sacrés..., p. 306.
u M. Poux,
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locaux. Cette substitution ne modifie en rien sur le fond ces pratiques d'ivresse collectives non méditerranéennes, commencées à une date aujourd'hui impossible à préciser mais que, dans cette hypothèse, le témoignage de D. H. permet de remonter sensiblement dans le temps par rapport aux données archéologiques. Dans ce même passage du livre 13, D. H. mentionne un transport de vin (étrusque) en outres à l'origine de l'expédition gauloise. Ce texte a été utilisé 14 comme une preuve ou du moins, la possibilité d'une alternative au transport en amphores du vin italien, antérieurement à l'utilisation des amphores «républicaines• et après l'arrêt de la diffusion, au-delà de la vallée du Rhône, des amphores massaliotes traditionnelles. À la même époque, les amphores étrusques, bien connues également pour les périodes antérieures, connaissent également un creux dans leur diffusion. Aussi, malgré le caractère extrêmement concis de ce témoignage, malgré également la quasi impossibilité d'utiliser comme le raconte D. H. des chariots pour franchir les Alpes à cette époque, ces indications ne peuvent être totalement négligées: D. H. et plus sO.rement encore ses sources, présentent peut-être dans ces indications un intérêt a.priori insoupçonné pour établir un lien entre les deux types de consommation de vin attestés successivement dans le monde celtique, alors qu'ils constituent plus généralement une source de confusions multiples chez les auteurs anciens comme chez les modernes. Une deuxième série d'annotations ethnographiques concerne les Gaulois au combat. Là encore, les clichés qui paraissent totalement éculés sont nombreux et, à première vue, D. H. se montre peu original. La première caractéristique, de nouveau commune à l'ensemble des Barbares, est la taille démesurée (14.M) qui accompagne la fureur au combat (14.K, après le discours de Camille), aussi marquée au départ que prompte à disparaître si le premier assaut n'est pas victorieux. Au contraire de Diodore 15 et de la plupart des auteurs classiques 16, D. H. ne fait qu'une seule allusion (14.I), du moins dans les fragments conservés, à une nudité au combat en signalant expressément le bouclier comme seule arme défensive : il ne s'agit donc pas pour lui d'une nudité héroïque mais uniquement de folie. En conséquence, les blessures subies apparaissent irrémédiables puisqu'il fait régulièrement mention de membres sectionnés, par exemple, dans l'épisode de l'attaque surprise contre le Capitole (13.8), ou de gorges tranchées (13.6; 13.8; 14.K et 15.B), sans aucune
M. Poux, Festins sacrés ... , p. 312, note 35, avec bibliographie. D. S. 5.29.2. 16 Plb. 2.28; Liv. 22.46 et 38.21.9. 14
15
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difficulté par les Romains, puisque le peuple entier des Sénons sera encore en 283 liquidé par ce moyen (19.M). Cette fureur et la débandade qui suit l'échec d'un premier assaut sont mises au compte de la barbarie en général mais leurs conséquences se trouvent renforcées par la quasi absence, comme on l'a vu, d'armes défensives et par la faiblesse de l'armement offensif: les épées gauloises «beaucoup trop longues» (µaxaipat 61t&pµiiK&tc;),les 'tà µèv à1t&c:noµono,'tà 6è armes • cassées ou émoussées• ('tll'>v61tÂ.Olv cruv&tt8paOO'to)se tordent au premier choc et deviennent, de ce fait, rapidement inutiles 17• Dans ce domaine, D. H. ne fait que reprendre ce qu'il a pu rencontrer chez Polybe (2.33) à propos de la bataille de Télamon en 225 et l'anachronisme apparaît cette fois indiscutable, tout comme une très mauvaise connaissance des qualités réelles de ces armes. Pour le début du JVe siècle la longueur exagérée des épées celtiques constitue en effet une contre-vérité d'un strict point de vue matériel. En effet, toutes les typologies consacrées depuis J. Déchelette à ces armes considèrent leur allongement comme un phénomène tardif, commencé à la Tène moyenne (vers 250/200), ce qui peut, éventuellement, correspondre aux constatations de Polybe, mais cette modification n'est véritablement sensible qu'à partir du nesiècle". La raison principale de cette évolution est le passage d'une épée conçue pour frapper d'estoc, c'est-à-dire par son tranchant, à une épée conçue pour frapper de taille, c'est-à-dire principalement par la pointe. Les récits de combat conservés, où les Gaulois sont présentés comme gesticulant plutôt que combattant de façon rationnelle, ne permettent pas de trancher sur le type de frappe réellement pratiqué et donc, sur une éventuelle antériorité, dès le JVe siècle, de la frappe de taille. Les données archéologiques contemporaines font cependant pencher, comme on l'a vu, la balance en faveur d'un anachronisme caractérisé, D. H. décrivant, de fait, l'armement et les gestes des Gaulois du IIe, voire du Ja- siècle. Le même constat négatif peut être proposé à propos de la mention «d'épées courbes» (µaxaipat 1C01t{6&c;) dont l'archéologie ne retrouve pas la 19 trace puisque tous les poignards et épées gauloises connus ont des lames droites. Sur la qualité même de ces armes gauloises, depuis la découverte des armes sur le site de La Tène, les connaissances ont largement progressé. Toutes ces recherches tendent cependant à prouver D. H. 14.K. Brunaux et B. Lambot, Guerre el a.nnemmt chez les Gaulois. 450-52 av. 1.-C., Paris, 1987, p. 120. 19 A. Rapin, L'armement, dans S. Moscati el alii, Les Celtes, Venise, 1991, p. 321-331, spécialement p. 323. 17
11 J.-L.
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l'excellence des matériaux utilisés et des méthodes de travail qui donnent des lames proches, par leurs qualités de résistance et de souplesse, de celles que l'on obtiendrait avec de l'acier 20 • En conséquence, on retiendra de ce passage soit la mauvaise connaissance par les auteurs grecs des véritables qualités de l'armement celtique et donc, de son efficacité réelle; soit, plus simplement, une mauvaise compréhension de la souplesse, précisément, de ces armes, dans un contexte marqué par l'importance des batailles savamment ordonnées dans la tradition hoplitique (14.K). Il est remarquable que les Gaulois chez D. H. soient également représentés comme les champions du combat singulier (15.A : épisode de Corvinus en 349) que les autorités romaines s'efforcent, très peu de temps après, en 340, d'endiguer, comme le montre l'allusion par D. H. à la condamnation à mort de Manlius par son propre père (15.D). Toutefois, il me semble que dans cette description critique des pratiques militaires et de l'armement gaulois, on ne prend pas suffisamment en compte le contexte dans lequel D. H. nous fournit ces informations : elles sont rarement données dans un cadre objectif mais figurent pour l'essentiel dans le discours de Camille (14.K) destiné, précisément, à galvaniser (et à rassurer) ses troupes avant la bataille. Le général romain ne pouvait faire moins que de minimiser les forces adverses supposées redoutables dans l'esprit de ses soldats et de leur prédire, de ce fait même, la victoire. Ce discours est d'autant plus ambigu que l'on sait, en effet, que dès le premier Âge du Fer, les peuples italiens, à commencer par les Étrusques, n'hésitent pas à emprunter des armes (en particulier des casques) aux Celtes, contrairement à ce que l'on a pensé pendant longtemps où l'on envisageait ces échanges technologiques dans un sens unique, de la Méditerranée vers le monde celtique 21• Camille lui-même est souvent présenté par des sources plus tardives mais aussi plus complètes (par exemple dans le récit de Plutarque consacré au même épisode de la vie de Camille contre les Gaulois (Cam. 40-41),) comme un réformateur de l'armée et surtout de l'armement défensif romain afin d'augmenter la capacité de résistance face aux assauts des Gaulois 22 ... De fait, on utilise parfois le discours de Ca-
A. Rapin, L'armement ... , p. 3; J.-L. Brunaux et B. Lambot, Guerre et armement chez les Gaulois cit. note 18, p. 30-32. 21 A.-M. Adam, Emprunts et échanges de certains types d'armement entre l'Italie et le monde non méditerranéen aux V• et IV• siècles avant J.-C. dans A.-M. Adam et A. Rouveret (éd.), Guerre et sociétés en Italie aux V• et IV• siècles avant J.-C., Paris, 1986, p. 19-28 et A.-M. Adam et V. Jolivet, A propos d'une scène de combat sur un vase falisque du Louvre, ibidem, p. 129-144 (spécialement p. 133). "J.-L. Bruneaux et B. Lambot, Guerre et armement chez les Gaulois ... , p. 30. 20
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mille recomposé par D. H. pour souligner la diminution du nombre et donc, du rôle des casques celtiques à partir du IVe siècle en arguant du fait qu'il nous présente ces gueniers comme combattant tête nue. Si ce propos sur la mauvaise qualité attribuée aux armes celtiques apparaît en grande partie convenu, on ne peut donc en conclure à une sous-estimation de la valeur de ces combattants et de leurs armements : la réapparition du bouclier long à la fin du ve siècle et au début du IVe dans l'armement romain est clairement attribuée aujourd'hui à des influences celtiques 23, même si D. H. l'attribue aussi, de façon classique et peut-on dire automatique, aux Samnites (20.D). Dans ce domaine, les appréciations sur la qualité du travail réalisé par les métallurgistes gaulois transmises par les auteurs de l'époque impériale, à commencer par Pline l'Ancien et, comme on l'a vu, Plutarque, donnent une vision tout à fait différente de celle antérieurement véhiculée par les auteurs grecs depuis Polybe jusqu'à D. H. compris. Pour ce qui concerne l'armement et la technique de combat gaulois, D. H. ne peut constituer une source univoque, en particulier sous l'angle chronologique car il mêle souvent sans discernement des clichés établis et valables principalement pour la période postérieure avec ceux propres à celle qu'il est censé traiter. De ce point de vue, D. H. ne respecte pas les principes qu'il a lui-même énoncés, de se tenir à l'actualité plutôt qu'aux compilations antérieures. En revanche, l'éclairage donné à des faits à première vue secondaires comme l'absence de casque, signale peut-être des changements que l'archéologie tend également à mettre en évidence. À côté de ces références plus ou moins allusives et anachroniques à des réalités celtiques, D. H. nous présente au début du livre 14 (annexe 1) une description générale de cette partie de l'Europe septentrionale très peu utilisée par les auteurs modernes. Bien que fondamentalement barbare comme on l'a vu par ses habitants, cette région est largement «infiltrée• par les Grecs qui, notamment, s'attribuent jusqu'à la paternité de son nom de «Celtique» et donc, d'une certaine façon, s'approprient à travers un jeu de mots purement grec un droit de regard sur ce tenitoire. Plus fondamentalement, les auteurs grecs ne peuvent, en effet, concevoir les pays qui les entourent sans le passage d'au moins un de leurs héros, à commencer par Héraclès et la nombreuse progéniture qu'il laisse denière lui.
"A.-M. Adam et V. Jolivet, A propos d'une scène de combat sur un vase falisque du Louvre, p. 133-134, avec bibliographie.
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Même s'il prend une certaine distance par rapport à ces légendes, D. H. partage largement ces pratiques avec son contemporain Diodore qui, par exemple, fait d'Héraclès le fondateur d' Alésia (4.19.1-4), d'où naît Parthenios (5.2). Sur ce point, D. H. reprend, en effet, sans les nommer mais dans un pluriel qui en dit long sur l'importance de ces procédés, les auteurs grecs antérieurs. Il s'inscrit donc pleinement dans une tradition typiquement grecque comme l'a montré récemment Cl. Moatti 24, différente du système de pensée romain plus attaché à mettre en avant la totale diversité de «l'autre». Cette présentation de la Celtique qui ouvre aujourd'hui pour nous le livre 14 occupe une position a priori curieuse dans l'ensemble de l'ouvrage: comme on l'a vu, le récit des expéditions gauloises débute dans le livre précédent et on attendrait donc cette description générale un peu plus tôt. Malgré les problèmes de composition que continuent de poser les fragments attribués à ces deux livres, il est difficile de remettre en cause, à la vue de cette apparente anomalie, la place de ce fragment comme de proposer une véritable logique à cet excursus tardif sur le pays gaulois. Il s'agira dans les pages qui suivent de comprendre la logique interne de cette description en la comparant à celle donnée par certains de ses prédécesseurs ou de ses contemporains. Première constatation, D. H. raisonne en fonction d'une représentation cartographique puisqu'il mentionne plusieurs figures géométriques dont la combinaison doit se rapprocher de l'image que l'on se fait d'une carte antique, dans la tradition de la géographie grecque initiée au VJe siècle, largement développée par la suite à Alexandrie 25 • Il est possible, mais inversement rien ne le prouve véritablement, qu'il fasse référence à la fameuse carte d' Agrippa, prototype généralement admis pour l'ensemble de la cartographie impériale romaine. D. H. définit la Celtique par une forme simple, le quadrilatère (sans que l'on puisse préciser carré ou rectangle), intégrée dans une série où figurent également des triangles, en général réservés pour définir les îles comme la Bretagne de César ou Diodore 26• Trois aspects méritent quelques développements : les limites fixées à la Celtique par D. H., son découpage ainsi que l'orientation générale donnée à cet ensemble. La liste des points de repères établie par D. H. (Alpes, Pyrénées, Danube, Océan) n'a, en soi, rien d'original. On peut, en effet, la Cl. Moatti, La raison de Rome. Naissance de l'esprit critique à la fin de la Ripublique, Paris, 1997, p. 63-74. 25 Cl. Nicolet, L'inventaire du Monde. Géographie et politique aux origines de l'Empire romain, Paris, 1988, p. 71-79. 26 Chr. Jacob, Géographie et ethnographie en Grùe ancienne, Paris, 1991, p. 37-38. 24
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comparer avec celle déjà présente chez Hérodote (2.33) même si cette dernière comportait quelques erreurs manifestes : les Pyrénées étaient encore considérées comme une ville et les Alpes comme un fleuve (fig. 1). La Celtique selon D. H. apparait comme relativement limitée en swface, dans une configuration antérieure en conséquence à la grande expansion du monde celte dont le début coi'.ncide précisément avec l'invasion de 11talie. Ces mouvements lui font dépasser, selon d'autres auteurs, deux des autres repères donnés par D. H., les Monts Rhipées 27 et la Forêt Hercynienne 28 • Ces deux massifs constituent dans la tradition antique des lieux mythiques plus que strictement géographiques dont la localisation précise varie suivant les époques, surtout pour les premiers. Ces Monts Rhipées sont en effet mentionnés dès les premiers auteurs grecs. Ils séparent dans leur optique le monde civilisé de celui des Hyperboréens mais leur existence est déjà contestée par Hérodote 29 dont l'analyse critique est reprise par Strabon 30 • On peut donc admettre qu'utiliser cette limite
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Fig. 1 - Position de la Celtique selon Hérodote (O. A. W. Dilke, Greek and Roman Maps, Londres, 1985, fig. 8, p. 58).
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à l'époque de D. H. témoigne a priori d'une certaine légèreté scientifique ... De plus, cette notion renvoie à une «géographie• conçue étroitement en fonction de la Grèce et moins adaptée à une définition des régions occidentales de l'Europe. La forêt Hercynienne présente un point de repère plus facile à situer, largement utilisé par des auteurs contemporains de D. H. comme César 11 pour désigner une chaine de montagnes qui, le long du Danube, constitue la limite sud-est de la Germanie. C'est là que pour lui prennent leurs sources des fleuves comme le Danube, alors que D. H. en attribue faussement l'origine aux Alpes qu'il confond peut-être encore avec ce massif. Cette première différence explique sans doute pourquoi D. H. fait de cette forêt la limite nord du monde celtico-germanique. Sur ce point, il en reste, une nouvelle fois, à l'identification traditionnelle de la forêt Hercynienne, antérieure à celle proposée par les Romains qui assimilent, grâce à une meilleure expérience du terrain, son extrémité occidentale avec le massif de la forêt Noire. À propos des fleuves cités par D. H., on peut s'étonner de ne pas voir mentionné le Rhône largement utilisé par les autres auteurs depuis Aristote 12 et surtout Polybe 11 pour décrire les Gaules. On reviendra à propos des orientations sur la position du Rhin. L'impression générale qui l'emporte à propos de ces références géographiques est donc avant tout celle d'un très grand flou, caractéristique peut-être davantage de la littérature grecque orientale que des auteurs, y compris grecs, marqués en profondeur par les sources romaines, en contact direct avec les réalités celtiques. En revanche, une mention conseivée par Stéphane de Byzance et attribuée au livre 16 des Antiquités concerne les Iapodes, «peuple celte voisin de l'Illyrie». Si l'expression est bien de lui, D. H. tient compte de l'extension récente du monde celtique au-delà de la limite constituée par le Danube/ lster. Ce peuple des Iapodes est également cité par Strabon 34 comme «mêlé de Celtes», établi entre }'Illyrie et le Danube. Cette mention ne peut suffire pour attribuer à D. H. une claire vision de l'expansion celtique, en dehors, bien évidemment, de l'Italie septentrionale, mais tend à indiquer qu'il n'ignorait pas totalement ces mouvements complexes de population. La Celtique ainsi définie (même sans tenir compte des Iapodes) apparaît donc bien plus importante que celle admise dans les sources romaines depuis César, puisqu'elle déborde largement les limites de ce qu'il est convenu d'appeler les «Trois Gaules•, Aquitaine, Czs. Gal. 6.24-25. Arist. Mete. 1.13. 33 Plb. 3.59. J.4 Str. 4.6.9. 31
32
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277
Belgique et Celtique proprement dite. Dans la description encore proposée par Pline l'Ancien 35 les limites des Trois Gaules sont pourtant assez proches de celles utilisées par D. H. avec, au sud-est la Gaule Narbonnaise, au nord }'Océan, au sud les Pyrénées, à l'est le Rhin et le Jura considéré comme un prolongement septentrional des Alpes, ce qui correspond également à une définition large de la forêt Hercynienne. En réalité, la grande différence est liée au découpage proposé de la Celtique puisque pour D. H. (fig. 2), celle-ci englobe encore la Germanie, ainsi distinguée mais également étroitement liée à la Galatie. À travers le vocabulaire utilisé, ce découpage peut être comparé à celui donné, en dehors de Pline, par les auteurs légèrement postérieurs à César dont fait partie D. H. DH
César
Vitruve
Diodore
Strabon
Sud (Narbonnaise)
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Provincia
Gallia (Source du Rhône au nord) 8.2-6
Celtes (autour de Marseille) 5.32
Celtes
Nord
Galatie Germanie
Celtique Belgique Aquitaine
Celtique (source du Rhin au nord) 8.2.6
Galates Celtes (le Rhin Galates coule en Cel- (= Belges) tique) 5.25 4.13
On constate donc une étonnante variété dans l'utilisation d'un vocabulaire pourtant limité dont les différents composants ont fait l'objet de nombreuses études depuis les pages classiques de C. Jullian. Quelques éléments méritent cependant d'être précisés, même s'il nous éclairent plus, en définitive, sur l'histoire de Rome que sur celle des Gaulois. Le Rhin est présenté par D. H. comme faisant frontière entre ces deux «régions• celtiques que sont la Galatie et la Germanie. Ce fleuve, inconnu des premiers auteurs grecs, a été, comme on le sait, utilisé par César pour définir la limite entre Celtes et Germains, même si l'on note parfois quelques incohérences dans les propos du dictateur, par exemple quand il mentionne des Germains établis sur la rive gauche 36 • Pour des raisons politiques évidentes César insiste parallèlement sur les différences entre les deux peuples, même s'il remarque la très grande proximité entre Belges et Germains : les mouvements s Plin. Nat. 4.107, complétée par 3.30. Caes. Gal. 2.4.l.
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d'Héraclèa
Fig. 2 - La Celtique selon D. H. (carte R. Robert et X. Lafon).
DENYS D'HALICARNASSE ET-LES GAULOIS
279
des Germains, depuis l'épisode des Cimbres et des Teutons de la fin du nesiècle, puis avec celui d' Arioviste occupant la plaine d'Alsace avec ses Triboques dans le demi-siècle suivant, constituent une menace permanente pour Rome. Il est donc nécessaire de les distinguer clairement des Celtes dont une partie est, depuis longtemps, intégrée dans l'orbite de Rome. Mais les archéologues ont remarqué qu'aucune distinction ethnographique n'était discernable sur le terrain ou à travers le mobilier. De fait, on aurait plutôt tendance aujourd'hui37 à mettre en avant, à travers l'étude de certains faciès céramiques, une progression des Celtes au Jersiècle av. J.-C. en direction de l'Est. La position de D. H., assimilant les Germains à des Celtes, n'apparaît donc pas en contradiction avec ces données 38 , rejoignant également ce que dira plus tard Dion Cassius 39• Il distingue cependant, à l'intérieur du monde celtique, Galatie et Germanie : il est sans aucun doute difficile de ne pas voir dans l'introduction de cette notion de Galatie, traditionnellement réservée chez les auteurs grecs aux Celtes d'Asie avant de l'être aux Gaulois du nord, davantage la marque, précisément, de l'analyse césarienne, que de l'origine géographique de D. H. lui-même. De toute façon, l'assimilation globale habituellement proposée entre les «Celtes• des auteurs grecs et les «Gaulois• des auteurs latins se trouve profondément altérée par le découpage de D. H puisque les deux notions sont emboîtées et ne peuvent se recouvrir. Une illustration de cette approximation du vocabulaire et, de fait, des connaissances géographiques insuffisantes de D. H. est fournie par la mention du Golfe galate : chez lui cette notion qui marque une limite de la Galatie semble recouvrir approximativement le golfe du Lion mais la formulation demeure vague. En revanche, chez Strabon 40 elle est clairement dédoublée puisque elle désigne aussi bien l'arc méditerranéen entre Marseille et Narbonne que le golfe de Gascogne sur l'Atlantique. Si D. H. donne au Danube une orientation «classique• estouest, celle réservée chez lui au Rhin demeure ambiguë. Il parle bien, apparemment, d'un côté sud indiqué par la position de la Galatie mais la mention «de ce côté• peut également faire référence pour un oriental comme lui à l'est, celle de «l'autre côté• à l'ouest. Sur le schéma proposé (fig. 2), l'option suivie est néanmoins clairement la M. Zehner, La céramique de la Tme finale et du dibut de l'époque romaine en Alsace,Thèse de 11Jniversité Marc Bloch, Strasbourg, 2000. JI On doit cependant rappeler que D. H. reprend, en fait, des données fournies par Posidonios connues à travers les réfutations qu'en présente César. La concordance avec la réalité archéologique, si elle n'est pas fortuite, a donc les plus grandes chances de devoir être attribuée à cette source, par delà les données nouvelles fournies par César. ,, D. C. 39.45. • Str. 2.5.28. 7 J
280
XAVIER LAFON
première, donnant ainsi au Rhin un cours est-ouest. Cette orientation est en contradiction avec le système césarien, globalement repris par Strabon (fig. 3), qui fait du Rhin, ainsi que de la Seine, de la Loire et de la Garonne, des fleuves nord-sud 41• De ce point de vue, D. H. s'éloigne, si l'on retient cette interprétation, de la majorité des auteurs antiques qui, comme Strabon 42 soutiennent que les grands fleuves ont un cours nord-sud, à l'exception du Danube 43 d'orientation est-ouest ainsi que le dit, comme on l'a vu, D. H. lui-même. Mais l'imprécision de la formule retenue par D. H. peut également traduire sa propre perplexité devant des informateurs qui se contredisent.
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Fig. 3 - Les Gaules selon Strabon (Chr. Goudineau, César et la Gaule, s. d., p. 83 ).
41
Chr. Goudineau, César et la Gaule, Paris, s. d., p. 78-83. Str. 2.5.28 43 Str. 4.6.9. 42
DENYS D11ALICARNASSEET LES GAULOIS
281
En effet, même après les expéditions de Drusus et de Germanicus, les connaissances sur le cours véritable du Rhin demeurent encore très imparfaites 44 et l'ambiguïté dionysienne cache donc peutêtre tout simplement cet état de fait, encore plus marqué quand il écrit. Une autre explication consiste à voir dans cette imprécision une sorte de compromis par rapport aux affirmations de César reprises par Strabon 45 qui considère la Bretagne comme l'extrémité du monde habité, contraignant toute la façade atlantique, qui dans ce schéma lui fait face, à basculer pour former une limite parallèle estouest, scandée ou découpée par la présence de fleuves nord-sud 46 • Les indices, par ailleurs nombreux, d'une connaissance relativement bonne par D. H. des auteurs latins comme Tite-Live ne manquent pas pour aller dans le sens d'un compromis volontaire visant à ne pas contredire trop ouvertement les affirmations césariennes et la volonté de conquête de la Bretagne qu'elle sous-tend. Toutefois, il faut reconnaître qu'une interprétation beaucoup plus modeste, c'està-dire un recours généralisé, sans vérification, par D. H. à des sources au contraire beaucoup plus anciennes reste toujours possible. Le bilan des informations fournies par notre auteur sur les Celtes et la Celtique est donc obligatoirement mitigé, fortement conditionné par l'interprétation que nous estimons la plus juste en fonction des connaissances que nous avons par ailleurs de ces références éparses et tronquées. On ne peut exclure la prise en compte d'événements récents comme la conquête césarienne, bien attestée dans un passage du livre 847, dans, par exemple, la mention et la localisation de la Germanie. En revanche il est impossible de dire si les allusions à des réalités celtiques anciennes sont dues à une prise de conscience claire des changements intervenus dans ce milieu depuis le IVe siècle ou tout simplement à l'utilisation par D. H. de sources anciennes, plus proches par définition de cet état que la référence largement exploitée par les autres auteurs antiques que constitue le texte de Posidonios. Au total ce dossier mérite sans aucun doute un sort meilleur que l'ignorance dans laquelle on le tient mais il ne peut à lui seul bouleverser nos connaissances sur le monde celtique du IVe siècle. Xavier LAFON '"R. Dion, Rhenu.s bicomu.s, dans REL, 41, 1963, p. 189-209. 45 Str. 5.2.28. 44 J. France, Géographie et politique. Lo. vision césarienne des Gaules avant la conqulte, dans Ollodagos, Actes de la Société belge d'Études celtiques, 2, 3, 1991, p. 275. 47 D. H. 8.87.
Annexe 1
DENYS D'HALICARNASSE ANTIQUITÉS ROMAINES 14.A (= 14.1 KJ)
·tt ôt Ke).ntj 1eettat µtv tv tci>1tpoçtrtv tpeiouxé>).outca\ tflc; iOTlµ&ptvflc; ôooeO>Ç· tetpâ-ymvoc;ôt oooa t(, axtiµan totç µtv '.A).ndotc;6pecn µ&-y{c:notc; 000\ t(Î)VEùpcmt&ÎO>V V0.7tt&l icatà tàç àvatoMç, totc; ôt TiuppT1vaiotc; icatà µ&OTlµppiavte 1eaivé>tov dv&µov,tfl ôt tç,0>atllÂ.ô'.>V 'Hpadeirov 8aMttn icatà tàç ôooetc;,t(, ôt l:Ko8l1e(, te 1eal8pq.dip ytv&t 1eatà poptav dv&µovical 1totaµov ,c:npov, ôç àno tc7>v·.AÀ.neirov KataPu{vrov6pc7>v µtytc:noc;tc7>vtfjô& 1totaµc7>v 1eal mlaav trtV ün:o totc; dp1etotc;l\1t&tpovôt&À8rov eic;tO TiovttKOVtç&p&6yt:tmxt).ayoc;. Tooal>tll ôt ouaa tO µtye8oc;, 60TIµTtno).ù à1toôdv tt:tŒPtll ).ty&a8at µotpa tflc;EùpcimTJc;, &ùuôpé>çt&ical metpa 1eal1eapnotc;ÔŒ'lflÀTtc; 1ealICtTIVt:cnv àpi116u l'autre, plus proprement tarda-républicaine et augustéenne, qui s'attache à remettre en lumière les périodes anciennes de l'histoire de Rome 59 • Chez D. H., cette visée s'accompagne d'une intention qui lui est propre : souligner les parentés entre Romains et Grecs. Ces parentés pouvaient trouver à ses yeux confirmation dans l'évolution parallèle des arts chez l'un et l'autre peuples et surtout dans la mise en évidence de la précoce excellence de la production romaine. La position de D. H. prenait donc doublement à contrepied celle d'un Cicéron. Si le choix du modèle attique passait, pour les partisans de l'atticisme, par la défense de l'archaïsme en art, son rejet par Cicéron prend symétriquement la forme du refus ironique de l'art le plus ancien, relégué au rang de simple prolégomène 60• En outre, si D. H. et Varron, affirmaient que l'art romain avait atteint très tôt un haut degré de qualité, ils allaient à l'encontre du postulat cicéronien d'un mépris romain pour les arts, véritable frein, aux yeux de l'orateur, à leur développement 61• Je serai tenté de croire que c'est dans ce contexte que se situe «l'invention» de Fabius Pictor. Je ne m'engage pas ici sur la réalité historique du personnage. Les quelques témoignages conservés nous orientent cependant dans une direction précise : la figure du peintrearistocrate est au centre d'un débat portant sur la dignité du métier d'artiste. Ce débat me paraît lui-même découler des travaux des historiens et des antiquaires, tels Varron ou D. H. précisément, visant à réSur les implications politiques du classicisme dionysien, E. Gabba, Political and Cultural Aspects of the Classistic Revival in the Augustan Age, dans Classical Antiquity, 1, 1982, p. 43-65 (repris dans Dionigi e la storia di Roma arcaica, Bari, 1996, p. 31-60): pour D. H., le choix du modèle attique est celui d'une élo59
quence politique qui peut servir de culture commune aux élites romaines et grecques. Ce choix correspond donc à une volonté d'intégration culturelle que l'œuvre entière de D. H entend défendre par ailleurs. L'asianisme, en revanche, est l'éloquence de l'Asie révoltée contre Rome durant les guerres de Mithridate. Voir aussi, G. W. Bowersock, Histori.cal Problems in lAJe Republican and Augustan Classicism, dans Le classicisme à Rome, aux I" siècles avant et après J.-C., Vandœuvres-Genève, 1979 (Entretiens de la Fondation Hardt, 35), p. 57-78; F. Montanari, La letteratura greca in età imperiale, dansStoria di Roma. 2 L'impt!ro mditerraneo. III La cultura e l'impero, Turin, 1992, p. 586-591. 60 L'ironie de Cicéron à l'égard des amateurs de peintures anciennes encore trop imparfaites s'exprime clairement dans Orat. 169. L'existence de ce goOt archaïsant est confirmée par Quint. /nst. 12.10.3. Chez Cicéron (Brut. 70-71), le classement des sculpteurs, en fonction de la ueri.tas, est fondé sur l'opposition entre ceux qui «inventent» et ceux qui «portent l'art à sa perfection». A. Rouveret, Histoire et imaginaire ... , p. 430 sq. a bien montré que cette dichotomie revenait à valoriser les artistes modernes au détriment des anciens, simples «découvreurs». 61 Cie. Tusc. 1.2.
LE FRAGMENTDE. DENYS E.T LES PE.INTURE.SDE. FABIUSPICTOR
327
habiliter les vestiges artistiques de la Rome archaïque. Cette réhabilitation, si elle flattait le nationalisme romain, heurtait à la fois les tenants du modernisme - voyant dans les œuvres contemporaines l'aboutissement d'une évolution vers la perfection - et les partisans d'un modèle grec qui n'avaient que mépris pour les balbutiements artistiques d'une Rome réputée encore fruste. Le prestige de l'art romain archaïque s'incarnait donc parfaitement dans Fabius Pictor, aristocrate qui avait cru pouvoir s'adonner à la peinture sans déroger. Ce modèle idéal de «peintre noble» a d'ailleurs pu inspirer des artistes comme le célèbre Famulus sur lequel Pline nous a laissé une notice significative 62 : Fuit et nuper grauis ac seuerus idem.que f1.ori.dusac umidus pictor Famulus (... ) Paucis diei horis pingebat, id quoque cum grauitate, quod semper togatus, quamquam in machinis.
À la lecture de ce texte, on mesure la tension, au cœur de laquelle se situe le peintre, entre dignité sociale et exercice d'un art manuel. L'effort de Famulus pour surmonter la contradiction se manifeste non seulement dans l'attitude qu'il adopte, celle du togatus aux gestes empreints de sévérité et pratiquant, en apparence, son art en amateur plus qu'en professionnel, mais aussi dans sa peinture qui s'efforce d'allier le style floride et aisé à l'austérité et à la gravité de l'art ancien. Ce style, ainsi défini par Pline, rejoint les caractéristiques des peintures décrites par le fragment dionysien, qui combinaient l'àv&r\pé>v avec une simplicité respectable. L'archaïsme est la forme même de l'austérité, avant tout parce que c'est le style de l'art des origines, celui d'une époque révolue où l'on avait pu pratiquer la peinture cum dignitate. Le témoignage de Valère Maxime rappelle que cette position fut battue en brêche par ceux qui n'admettaient pas que les artifices pussent avoir une dignité. Le cas de Famulus, largement postérieur, ne put inspirer au moraliste son ironie à l'égard de Fabius Pictor. Mais d'autres exemples rapportés par Pline montrent l'existence, dès le règne d'Auguste, de comportements favorables aux peintres. L'assentiment d'Auguste, lorsqu'il fut question de former à la peinture le petit-fils muet de l'ancien consul O. Pedius, tend à le prouver 63 • L'attitude hostile, en revanche, culmine chez Sénèque, contemporain de
Plin. Nat. 35.120 : «Tout récemment vécut aussi le peintre Famulus, au style digne et sévère tout étant éclatant et fluide( ... ) Il ne peignait que quelques heures par jour, et cela avec dignité, car, même sur son échafaudage, il était toujours revêtu de Ja toge•. 63 Plin. Nat. 35.21. 62
328
RENAUD ROBERT
Famulus et d'autres artistes cités chez Pline, qui radicalise la méfiance déjà exprimée chez Valère Maxime 64 • Dans ce rapide examen de l'histoire de l'interprétation du fragment dionysien, j'ai voulu mettre l'accent sur le caractère conjectural d'une construction qui, d'hypothèse, s'est si bien muée en certitude que son origine - les annotations d'E. Q. Visconti au volume d' A. Mai - a été rapidement oubliée. Sur les mêmes bases de raisonnement d'autres reconstructions sont possibles, sinon assurées. Deux constatations me paraissent néanmoins s'imposer. Il n'est pas certain que la brève notice de D. H. s'applique à l'œuvre de Fabius Pictor. Quand bien même ce serait le cas, le rapprochement du fragment avec le passage consacré à l'orateur Isée, invite à voir dans ce texte un simple jugement sur la peinture qui s'inscrit parlaitement dans le «système esthétique• du classicisme augustéen et non une description précise, fondée sur la connaissance autopsique de l'œuvre. Or, si le fragment des A. R. ne doit plus être versé au dossier Fabius Pictor, la signification des sources restantes me paraît singulièrement altérée. En effet la convergence de ces quatre textes apparaît alors pleinement. Loin d'attester l'existence des peintures de Fabius Pictor, ces témoignages traduisent au contraire, l'embarras des auteurs anciens à l'égard d'un personnage dont la biographie se résumait à ce que l'on pouvait déduire de son nom Pictor et à l'égard d'une œuvre peut-être réduite à une inscription sur les murs du temple de Salus. Toutefois, si le texte de D. H. porte bien sur la peinture romaine du IV-IIIe s. av. J.-C., il n'est pas douteux que l'historien grec, tout comme les «inventeurs» de Fabius Pictor, prenait une part importante dans un débat esthétique et historique qui mettait en jeu le statut des arts plastiques à Rome dans les premières années de l'Empire. Renaud ROBERT
Sen. Ep. 88 et 90; M. Pani, La polemica di Seneca contro le A.rtes (Ep. 90). Un caso di sconcerto, dans Xenia. Scritti in onore di P. Treves, Venise, 1977, p. 14164
150.
SANDRINE CROUZET
SOURCES ET RECONSTRUCTIONS DE L'ÉPISODE DERHÉGION DENYS D'HALICARNASSE, ANTIQUITÉS ROMAINES, 20.B et 20.Q
C'est qu'à mon sens il faut pardonner leurs erreurs aux historiens parce qu'ils sont hommes et que la recherche de la vérité dans le passé est difficile. En revanche ceux qui, de propos délibéré, ne rendent pas compte exactement des faits tombent justement sous le coup de la critique lorsque, flattant certains ou en attaquant d'autres avec trop de hargne, ils s'éloignent de la vérité. Diodore de Sicile, 13.90.6-7
La plupart des historiens qui utilisent les excerpta de D. H. se préoccupent davantage de leur état lacunaire que de leur composition. Ils considèrent le texte des livres 12 à 20 comme un tout dont on aurait ôté certaines parties, alors qu'il s'agit d'un puzzle dont les pièces ont été ajoutées au fur et à mesure de l'édition des excerpta constantiniens et des manuscrits ambrosiens. Les principes qui sont à l'origine de la recomposition de ces livres reposent sur une chronologie bien souvent livienne. Les difficultés se présentent lorsque les fragments sont trop courts pour être rattachés avec certitude à un épisode, ou bien lorsque le texte de Tite-Live a disparu. Il est alors relayé par Plutarque et par une série d'auteurs qui ne nous sont également connus que par des fragments (Diodore de Sicile, Appien, Dion Cassius). Par conséquent on comprend l'arbitraire de certaines recompositions. Parmi les excerpta, on ne trouve jamais le même événement rapporté par deux traités constantiniens, comme si les excerpteurs avaient pris un soin extrême à ne pas relever les mêmes anecdotes. En revanche, les manuscrits ambrosiens comportent un résumé des Antiquités romaines qui, malgré ses raccourcis et ses lacunes, rejoint parfois des fragments constantiniens (19.S; 20.B; Sandrine Crouzet, Université de Caen.
330
SANDRINE CROUZET
20.J)'. En prenant note de ces recoupements et de l'origine disparate des fragments, les renseignements tirés du texte de D. H. et les jugements portés sur lui peuvent changer du tout au tout. Un exemple nous en est donné par l'étude de l'épisode de Rhégion. À une date controversée, au début de la guerre contre Pyrrhus, Rome envoya une garnison à Rhégion. La garnison se souleva, massacra les habitaRts et fut punie de ses fautes par un châtiment exemplaire quoique tardif. Tous les coupables furent fouettés et décapités sur le forum. Cette affaire, chronologiquement et idéologiquement complexe, conduit à la plus grande perplexité comme al.Utaffirmations les plus péremptoires. Elle a le charme et le désavantage de laisser la part belle à l'imagination des historiens, tellement les sources sont nombreuses et contradictoires. Les excerpta de D. H. en offrent la version la plus détaillée, avec une particularité : la duplication de la punition. Évidemment toutes les études sur la question ont signalé cette erreur dionysienne, mais aucune n'a étudié la composition des excerpta à ce point du récit. Et pourtant, il est aisé de constater que le double épisode de Rhégion nous est rapporté par trois manuscrits: l'Ambrosianus (Ambr. Q 13 sup. et Ambr. A 80 sup. = SVNC p. 520) et le Traité des complots (Scor. 0 I 11 = De insidiis 3). Le premier récit sur Rhégion est transmis par le De insidiis (20.B) et, jusqu'à un certain point, par les deux manuscrits ambrosiens, qui seront regroupés par commodité sous le nom d'Ambrosianus 1 au cours de cette étude. Le deuxième récit (en fait la deuxième punition) ne nous est parvenu que par l'Ambrosianus Q 13 sup. (20.Q); ce fragment sera appelé Ambrosianus 2. C'est sur la base de cette double transmission que je voudrais reprendre le problème posé par la révolte et la punition de Rhégion, d'abord en prenant en compte uniquement le texte de D. H. afin d'en tirer une chronologie, puis en comparant cette version avec celles des autres historiens antiques. Le schéma de transmission des textes que l'on peut tirer de cette confrontation permet de recentrer l'épisode de Rhégion dans son contexte, les prémices de la première guerre punique. L'objectif de cette étude n'est pas tant de proposer une énième reconstruction de cette affaire que de comprendre en quoi elle constitue un enjeu si important que de multiples propagandes en ont progressivement déformé le récit.
Pour les livres 14-20 de D. H., nous adoptons la numérotation suivie dans: Denys d'Halicarnasse, Rome et la conqidte de l'Italie aux IV• et III• sih:les (Antiquités romaines, livres 14-20), S. Pittia et alii éd., Paris, 2002 (Fragments). 1
SOURCES ET RE.CONSTRUCTIONS DE L~PISODE DE RHÉGION
1 - LACHRONOLOGIE
1
DE. L ~PISODE. CHEZ
331
D. H.
Si le manuscrit de l'Escorial ne peut rien nous apprendre quant à la chronologie relative de D. H. - en effet l'épisode précédent des Antiquités romaines rapporté par le De insidiis remonte aux années 343-342 -, il apporte plusieurs précisions chronologiques absolues. À l'inverse, le court résumé laissé par l'Ambrosianus n'offre qu'une seule indication chronologique, beaucoup plus floue, mais le fait que le manuscrit comporte de nombreux fragments identifiables permet une datation relative dans l'œuvre de D.H 2• Avant Rhégion, le dernier événement dont l'Ambrosianus ait gardé la trace est un extrait du discours de Fabricius à Pyrrhus, lors d'une entrevue qui eut lieu en 280 ou 279. Le fragment suivant évoque la libération sans rançon des prisonniers romains par Pyrrhus, après que le consul Fabricius lui a révélé un complot contre sa vie. Or cet épisode bien connu par ailleurs est daté de 278. D. H. abordait donc l'épisode de Rhégion dans son récit des années 280/278 (l'hypothèse d'un retour dans le passé n'étant néanmoins pas à exclure). Le parallèle avec Messine qui ouvre le récit se retrouve chez tous les auteurs grecs racontant l'épisode de Rhégion, et ne peut constituer un élément de datation. Reste la question de savoir si l'événement ayant lieu entre 280 et 278 est l'installation de la garnison romaine, le massacre des habitants de Rhégion ou la punition des soldats. Il est peu probable que tous ces événements se soient déroulés dans cette période de trois ans. En effet D. H. décompose son récit en deux temps : l'un évoque «les causes réelles et les prétextes des maux» 3 qui ont frappé la cité, l'autre les maux en eux-mêmes. Seuls ces «maux» se produisent entre 280 et 278, mais il est bien difficile de déterminer quand s'arrête la description des causes. 1) Le récit du De insidiis L'arrivée de la garnison à Rhégion correspond à une demande de la part des Rhégins. Ceux-ci s'inquiètent de l'agression de Thourioi par les Bruttiens et les Lucaniens, agression qui date probablement de 283 4 • Fabricius était intervenu lors de son consulat, en 282, pour déga2
Nous partons du principe que les excerpteurs constantiniens comme l'au-
teur de l'Ambrosianus ont copié ou résumé le texte de D. H. en suivant l'ordre du texte originel. L'Ambrosianus étant une prise de notes sur le livre de D. H., il de-
vait en conseiver l'ordre chronologique. Quant aux u.cerpta, la masse des textes à traiter imposait un relevé chronologique des anecdotes correspondant à chaque
thème. J Cf. dans ce volume E. Caire, Causalité et explication historique dans les fragmmts de Denys d'Halicarnasse, p. 505-535. 4 Oros. 3.22.12.
J2
332
SANDRINE CROUZET
ger la ville. D. H. ajoute que les Rhégins craignaient également Tarente. Cela se comprend puisque après avoir attaqué une flotte romaine devant leur cité, en 282, les Tarentins lancent une offensive contre la garnison romaine de Thourioi et y rétablissent la démocratie5. Cependant ce ne doit pas être après ce dernier événement que les Rhégins demandent à recevoir une garnison, car, pour que Fabricius puisse accorder des troupes, il faut qu'il soit sur place, ce qui n'est plus le cas après l'attaque navale (sinon les Tarentins n'auraient pas pureprendre Thourioi). L'installation de la garnison à Rhégion devrait donc avoir eu lieu entre la prise de Thourioi par Fabricius et l'attaque de la flotte romaine. La méfiance des Rhégins envers Tarente serait plutôt due aux pressions qu'elle exerçait sur les autres cités de Grande Grèce. En effet, la ligue italiote, fondée en 392 à l'initiative de Crotone pour défendre les cités grecques contre les barbares lucaniens et bruttiens, était repassée sous l'influence de Tarente après la mort d'Alexandre le Molosse en 327. Comme celui-ci avait placé Thourioi à la tête de la ligue italiote, il est possible que Tarente ait soutenu, voire poussé, les Lucaniens qui attaquèrent la cité. Après avoir exposé les motifs d'installation de la garnison, le texte du De insidiis décrit l'évolution des sentiments de Decius, son commandant, envers les Rhégins : admiration, envie, désir de s'approprier le bien d'autrui 6. Mais rien ne permet de savoir en combien de temps cette évolution a lieu. Puis viennent les discussions avec son secrétaire, et le passage à l'acte. Le prétexte à l'exécution des Rhégins est leur trahison en faveur de Pyrrhus, d'après une lettre écrite en réalité par Decius lui-même. Cette trahison semble s'être décidée à un moment bien précis, lorsque les notables sont «informés de la traversée de Pyrrhus». De quelle traversée s'agit-il? Pyrrhus effectue deux voyages pouvant être qualifiés de traversée : celui d'Épire jusqu'en Italie, puis celui d'Italie en Sicile. Le premier a lieu à la fin de l'hiver 281-280 (pour une arrivée au printemps sans doute 7, mais les Rhégins pouvaient en avoir été informés dès l'été ou l'automne 281), le second dans l'été 278. Il paraît douteux que, lors du passage de Pyrrhus en Italie, les notables rhégins se soient déclarés pour lui. En effet, à Thourioi comme à Tarente, les élites aristo-
s Str. 6.1; App. Sam. 7.1.
D. H. 20.B : ICQ'tQÀEÛElV 'i\~ato. 7 P. Wuilleumier, Tarente des origines à la conqulte romainl!, Paris, 1939, p. 109-111: selon Plutarque (Pyrrh. 15), la flotte aurait été prise dans une tempête exceptionnelle pour la saison, qui doit par conséquent être le printemps; cela correspond aux indications chronologiques données par Polybe (2.20.6) et Diodore 6
(22.8.1).
SOURCES ET RECONSTRUCDONS DE L'm»ISODE DE RIŒGION
333
cratiques sont plutôt favorables à Rome 8, alors que le peuple des deux cités veut conserver la démocratie et son indépendance par rapport aux Romains 9• Il est certes possible que Rhégion ait vécu la situation inverse, mais cela paraît peu probable à partir du moment où ce sont des notables qui ont le pouvoir dans la cité. De plus la fausse missive de Decius parle de 500 soldats pour s'emparer de la ville, ce qui n'est pas possible en 280 lorsque Pyrrhus arrive en Italie, puisqu'il rassemble alors ses troupes à Héraclée. Enfin la date de 281 ou 280 fait difficulté si l'on prend en considération la deuxième tradition rapportée par le De insidiis, selon laquelle le consul Fabricius aurait fait porter une lettre annonçant l'envoi de 500 hommes par Pyrrhus. Fabricius n'est consul qu'en 282 et 278. Soit le grade ou le nom de l'homme sont incorrects, soit cette histoire est totalement inventée, soit la traversée de Pyrrhus prise comme prétexte est celle de 278 vers la Sicile. Dans ce dernier cas, on comprendrait que le roi d'Épire veuille contrôler Rhégion s'il compte traverser le détroit. En outre, comme il semble que le «malheur» de Rhégion a déterminé la place de ce passage dans le récit de D. H., c'est-à-dire entre 280 et 278, il semble qu'il faille exclure l'année 281. Mais l'hésitation persiste entre 280 et 278 (si l'on accepte que les Rhégins ont été «informés de la traversée de Pyrrhus» très tardivement, ou si l'on ne retient pas cette phrase comme un critère de datation 10). Le texte de l'Ambrosianus 1, très résumé, ne fournit pas d'éclaircissement sur ce point, puisqu'il ne comporte aucune donnée chronologique. Quant au second fragment du De insidiis, il brouille un peu plus les pistes. Ce fragment rapporte d'abord que Decius fut puni de son acte par une maladie touchant ses yeux, tout comme le fragment Ambrosia.nus 1. La suite des événements est plus difficile à reconstituer. En effet, jusqu'au récit sur la maladie oculaire de Decius, l'Ambrosianus et le De insidiis portaient des versions semblables. Cependant le premier manuscrit s'arrête à cet endroit du récit, tandis que l'autre enchaîne sur la punition des soldats. Étant donné les nombreuses lacunes de l'Ambrosianus, on ne saurait s'étonner qu'une partie du texte soit manquante; le fragment suivant commence d'ailleurs par une citation d'Homère et passe sous silence le récit de la trahison du mé-
• P. Wuilleumier, Tarente... , p. 102, 103, 184. • Chez D. H. (19.H), comme chez Plutarque (Pyrrh. 13) et Dion Cassius (9. fr. 39.10), les aristocrates sont opposés à la venue de Pyrrhus comme le montre l'anecdote de Méton, qui aurait voulu montrer au peuple ce qui l'attendait sous la domination du roi d':E.pireet fut pour cela chassé du théâtre. io Polybe utilise la même expression Katà tTIV "1'.>ppou 61afkimv pour dater le traité entre Rome et Carthage de 279/278; l'expression pourrait par conséquent désigner de façon vague la période d'activité de Pyrrhus en Italie, de 281 à 278.
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decin de Pyrrhus. Cependant on ne trouve pas dans l'Ambrosianus 1, comme c'était le cas dans le De insidiis, l'annonce de la punition. Mais on peut effectivement considérer que cela ne s'imposait pas dans un résumé. La fin du récit dans le De insidiis est très brève par rapport au début. Une nouvelle traduction du texte de D. H. modifie sensiblement l'histoire telle qu'elle a été reconstituée par la plupart des historiens modernes. Le De insidiis précise que le Sénat fait lever une seconde armée et l'envoie à Rhégion avec à sa tête le totç. 19
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ment que dans le passage précédent du De insidiis; cela signifie que le texte originel devait être plus prolixe pour la deuxième exécution que pour la première, si le texte conservé par le De insidiis est bien une copie exacte du texte dionysien. La transition entre le premier et le second épisode semble logique puisqu'il est fait mention d'un second soulèvement, ce qui renvoie de façon implicite aux événements de 280/278. Ce soulèvement étant le fait de Romains et d'alliés, on retrouve-là les Campaniens et les Sidicins de 282 (cf. infra 111-2).Cependant une interrogation subsiste: même si au cours de la première punition Fabricius n'avait pas conduit à Rome tous les soldats pour qu'ils soient exécutés, il a fait évacuer la cité par l'ensemble de la garnison. Qui sont alors ces hommes qui se sont soulevés? Le texte de l'Ambrosianus 2 ne précise pas à quelle date cette seconde garnison aurait été laissée : s'agit-il de celle de 282, auquel cas on aurait là un non-sens, ou bien d'une autre qui devait remplacer la première, et dont les silences d'un texte fragmentaire nous ont caché l'existence? Il y a là une incohérence accentuée par l'impression que décidément cette cité de Rhégion provoque des comportements criminels chez les soldats romains. La description du second massacre est rapide : • beaucoup d'hommes furent égorgés ou prirent la fuite.» Deux différences avec la première description sont notables : certains hommes en réchappent, et rien n'est dit du sort des femmes. À ce point du récit, on peut être certain que D. H. rapportait deux massacres ayant eu lieu dans la cité de Rhégion, puisque deux massacres sont évoqués par l'Ambrosianus pour des dates différentes. Après ces phrases introductives, qui ne permettent pas de dater le second massacre, commence le récit de la punition sous la conduite de Caïus Genucius. Celui-ci porte le titre d'fütatoç consul en charge, ce qui est effectivement le cas en 276 et 270 24• Étant donné la place de cet épisode dans l'Ambrosianus, le consulat est celui de 270. Les phases de la punition sont les mêmes que dans le De insidiis : les coupables sont enchaînés et emmenés à Rome; si la procédure judiciaire est plus développée, la sentence est semblable puisque les hommes, condamnés comme des criminels, sont flagellés et décapités sur le forum. Les corps ne reçoivent pas de sépulture. Les exécutions semblent être plus nombreuses que la première fois : il est précisé que 4 500 soldats périrent, alors qu'apparemment seuls les chefs avaient été punis en 280/278. La brièveté du premier récit d'exécution et les similitudes entre les deux textes sont suffisam-
24 T. R. S. Broughton, 1968, 1, p. 195 et 198.
The Magistrales of the Roman Republic, New-York,
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ment étonnantes pour que l'on puisse se demander si ce n'est pas le même événement qui a été raconté deux fois. Cette hypothèse a bien entendu déjà été formulée 25: D. H. aurait dupliqué un événement en attribuant la même punition à deux consuls différents, parce que ses sources devaient être contradictoires. Prendre ainsi le problème, c'est oublier que les deux punitions nous sont connues par deux manuscrits différents. Serait-il possible que les deux soient des résumés du même texte de D. H.? Outre les difficultés soulevées par les divergences de détail, que nous allons énumérer, il faut tenir compte de la nature des excerpta. Théoriquement les excerpteurs se contentent de copier le texte original, se permettant parfois de le situer dans une œuvre 26• Il est difficile de trouver un mot, une expression, et à plus forte raison une phrase entière qui soit de façon assurée de la main de l'excerpteur et non de celle de l'auteur copié. Il paraitrait donc étonnant que l'un de ces copistes se soit permis de résumer un épisode. Pourtant les versions du massacre de Rhégion selon Diodore de Sicile montrent que cela n'est pas impossible. En effet deux paragraphes présentent les mêmes faits que l'Ambrosianus 1 (installation des Romains à Rhégion, massacre des hommes et maladie de Decius)27.Le premier de ces paragraphes a été transmis par les excerpta Hoescheliana, le second par les excerpta constantiniens (De uirtutibus). Selon P. Bertrac 28, les excerpta Hoescheliana ne suivraient pas le texte original à la lettre. Or la comparaison des deux fragments montre que le premier, bien que davantage résumé, offre quelques détails de plus que le second, en précisant notamment la cause de la venue romaine à Rhégion et la fonction de Decius lorsqu'il se réfugie à Messine. Ces détails ne sont certainement pas inventés par l'anonyme qui a collecté les excerpta Hoescheliana. Il semble plus probable que l'excerpteur constantinien a lui aussi résumé le texte de Diodore, choisissant d'autres détails. Et il n'y a pas de raison pour que cette pratique ait été réservée à ce seul passage de Diodore. Il n'est donc pas à exclure qu'une partie du texte du De insidiis soit un résumé du texte dionysien. Dans ce cas l'excerpteur pourrait avoir condensé en un seul épisode des faits se déroulant sur plusieurs années, et que l'Ambrosianus rapporte en suivant la narration frag-
25 La bibliographie est réunie par M. R. Torelli, Rerum Romanarum Fontes, Pise, 1978, p. 181-182. 26 P. Bertrac, Le texte de la Bibliothèque historique, dans Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, Introduction générah - livre 1, Paris, 1993, p. cx:xxv. La
bataille d'Ausculum chez D. H. est ainsi introduite par une courte phrase précisant le livre dont est issu le texte. 27 D. S. l.l-2. Sur les différences entre le texte de Diodore et celui de D. H., cf. infra 11.l. 2• P. Bertrac, Le texte de la Bibliothèque historique, p. CXXXVII.
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mentée de D. H. Cela signifierait que la punition rapportée dans le De insidiis serait la même que celle de l'Ambrosianus 2. Les points communs entre les deux textes sont le transfert à Rome dans des chaines, l'assimilation à des criminels et la sentence punitive 29 • Cela fait peu d'éléments en comparaison des divergences. La première concerne le sort de Decius, mentionné dans le premier récit mais pas dans le deuxième. Dans le De insidiis, les soldats auraient ouvert les portes de la ville alors que l'Ambrosianus 2 ne donne aucun détail sur la prise de la cité par Genucius. Le premier acte du consul dans l'Ambrosianus 2 est de rendre la ville aux exilés, tandis que selon le De insidiis le général libérateur l'aurait rendue aux survivants. D'un mot à l'autre, la nuance est essentiellement politique. Genucius fait ensuite arrêter ceux qui ont attaqué la ville; le texte ne précise pas à ce moment-là s'il s'agit de toute la garnison (le nombre est donné lors de l'exécution, où il est question de 4 500 hommes). Dans le De insidiis, seuls les chefs avaient été arrêtés. Faut-il assimiler les chefs à «ceux qui ont attaqué la ville»? Le nombre de condamnés fait écarter cette hypothèse, cependant la formule est étrange: pourquoi n'avoir pas écrit tout simplement «la garnison», ou «tous les soldats»? Des chiffres d'exécution différents d'un manuscrit à l'autre ne permettent pas de conclure qu'il y avait deux récits de punition chez D. H., puisqu'un fait similaire se retrouve pour le nombre de soldats prétendument envoyés par Pyrrhus (500 selon le De insidiis, 5 000 selon l'Ambrosianus 2). Enfin, après la description du jugement et de l'exécution, plus longue dans l'Ambrosianus 2 que dans le De insidiis, les phrases finales sont différentes. Le De insidiis rapporte le sort de Decius et de son secrétaire, tandis que l'Ambrosianus 2 ne parle que des cadavres des hommes exécutés. Si les deux récits de punition que nous possédons sont les résumés d'un même texte, il faut croire que les excerpteurs n'ont retenu que des détails sensiblement différents. La comparaison des deux versions de cet épisode chez Diodore de Sicile montre un phénomène équivalent : le fond est commun, quelques mots ou expression sont les mêmes, mais il existe plusieurs détails dissemblables. Les divergences relevées précédemment ne permettent donc pas d'exclure qu'il s'agit d'un même texte originel. En revanche un élément s'y oppose totalement : le nom du personnage qui mène la répression. Le De insidiis évoque à la fois un préteur urbain et Fabricius, alors que l'Ambrosianus 2 parle uniquement du consul Genucius (6 fütatoç). Ni l'excerpteur constantinien ni l'auteur de l'Ambrosianus n'ont inventé ces noms; ils se trouvaient bien tous les deux
29
Pour constater le parallélisme entre les deux ~extes, se reporter à l'annexe 2.
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SANDRINE CROUZET
dans l'œuvre de D. H., mais peut-être pas dans deux passages distincts. La dernière phrase du fragment du De insidiis affirme que l'affaire est réglée, ce qui est loin d'être le cas lorsqu'on lit la totalité du livre 20 dans les éditions de Kiessling ou Jacoby. La comparaison du De insidiis et de l'Ambrosianus 2 montre que seules quelques lignes, entre la maladie de Decius et l'exécution sur le forum, diffèrent fortement d'un texte à l'autre. Il est donc tout à fait possible que, comme pour la variante sur la lettre reçue par Decius, D. H. ait exposé les deux versions de l'épisode qu'il a recueillies, l'une chargeant Decius, l'autre accusant Fabricius. L'excerpteur qui donne les deux versions avant le massacre a choisi la tradition pro-fabricienne, peut-être parce qu'elle lui semblait plus claire; l'auteur de l'Ambrosianus a préféré passer sous silence les divergences de tradition et n'a conservé que l'une d'elles, la plus répandue et sans doute la plus développée chez D. H. Ainsi notre auteur augustéen n'aurait pas dupliqué l'épisode; il aurait, en racontant la prise de la ville, rapporté plusieurs traditions, ce qui montre qu'il comparait ses sources et parfois, comme Tite-Live ou d'autres historiens, préférait ne pas trancher entre elles et les présenter toutes à ses lecteurs. Cela n'est qu'une hypothèse de départ, qu'il faut confronter avec les autres versions de l'épisode. En tous les cas, pour ce qui est de la chronologie dionysienne, on connaît de façon certaine les points suivants: 1) D. H. date de 282 l'arrivée des soldats campaniens à Rhégion; 2) il y eut deux massacres dans la cité, perpétrés par des troupes dont la composition est semblable; 3) le massacre eut lieu en liaison avec une traversée de Pyrrhos; 4) les soldats coupables furent emmenés à Rome puis exécutés sur le forum au moins en 270. Les zones d'ombre concernent le nombre de punitions et la date exacte des massacres et de la première punition. Le récit de chaque manuscrit est cohérent; en fait c'est la juxtaposition des deux récits qui met en évidence des contradictions ou des doublets. Il -
COMPARAISON AVEC LES AUTRES AUTEURS
ANTIQUES
1) Les divers récits
Nombreux sont les autres témoignages antiques sur Rhégion 30, presque aussi nombreuses sont les traditions qu'ils rapportent. Après avoir comparé, élément après élément, le contenu de ces traLes sources sont citées par M. R. Torelli, Fontes... , p. 132-136, 180-181, 230-236. A cette liste il faut rajouter Strabon 6.1.6 et Pausanias 6.3.12. 30
SOURCES ET RECONSTRUCTIONSDE L'ÉPISODEDE RHÉGION
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ditions diverses, nous avons choisi de les présenter en parallèle avec D. H., de la plus ressemblante à la plus divergente. L'auteur présentant le plus de points communs avec D. H. est sans conteste Appien. Son récit, détaillé, suit exactement celui de D. H. 31• Par rapport au problème qui nous occupe, savoir si D. H. évoquait une ou deux punitions, la fin de l'épisode chez Appien est particulièrement instructive. Fabricius est envoyé pour rétablir l'ordre, et son grade, comme chez D. H., n'est pas spécifié. Cette punition se termine, comme dans le premier récit des excerpta, par l'exécution des hommes et le suicide de Decius. Mais dans cette version, se trouvent aussi des indications qui apparaissent dans le récit dionysien pour l'année 270. Ainsi les révoltés punis par le consul sont-ils désignés par une expression semblable dans l'Ambrosianus 2 ('toi>ç à1tO- taVTac; dtEpoc;t&v ü1tcitmvru1oc;rE1111œc; qy in ~pe111,n~ to ..,_ VUIClOÇ t~11yayt:rilv mpanciv· yev6µsJ&GKOY Kal toùc; Ô4p8GÂ.,Oùc; àYO~IIÇ voç 6t t17ç1r6Aeœç ty,cpan)ç 'l'fJy{va>v fyYOI ù,ç 4'1'EIÇtmmupboç Kal tOY µtv roCç q,uyam â1rt6oJKBrà taVt'd>v i~ tKEiYOIJ XpGYOY61&JŒIYItlMp~• lzsiv, rovç6t t1r,6sµtvovç tj'I 1r6ù1 qptpac; TE ÔÂ.iyac;in XEplEVty1eac; crullaflà,v kopiouç 1iç 'Pqa1111 mn\ü1tozdp1oc; totc; 'Pmpclio1c;yiyvEta1 yayew· tep. ore; O'Otmc;cbpy(a811lCŒl llT1~8Elc;üxo Tcf)vi6imv. Ta6tqv qyava1CtT)CJEV 1'tE Jk>uÀJI 1eal6 6flµoc;, yàp oi6pevo( nvEc;ci1toÂ.Oy(av [4)a,Sp1- dMrtEJ11}6EJ1(UV yvd,µqv t1tlEl1Cfl yEvt1Ciou] Tflv TE 1t6Â1v civtcp~av t(l> a8a1 1tt:plaùt&v, cillà 1tâcra1c; talc; cpucnpan1Y(l>1eal TOVAt1Clov6flcmVTEc; Aatc;ri1tciVTmv t&v tv talc; ai tiat.c; tôv mpt6ocmv 4)a1Jp11Cfcp. 'Q 6è tflV pèv tà totç KCIKOupyotç 'tEtayµtvov ÜffO 1t6Â1v ch:o6{6mcn totc; ,np100cn tti>vv6µmv Kam-.11cp1o9flva1 Oavatov. 'P1')y(vmv,toùc; 6è cppoupoùc;dmVTa Kupco8tVToc; 6è toO 1tEpltf\c; t1µmp(ac; 1C41tŒÂlKEÎV aùT68l 1CEÂE6cmc; ri1tqya- Myµatoc; xcittdof tE 1eatE1tci'Y'1a«v tw YEVoù6èv t1t1cpEpoµtvouc;f~m tcf,v àyopt, 1Cal11:apay6µEVOl ICŒTà 61tÀ.mv·tç MVt'OVÇ KOpvqHZIOt'Qt'OVÇ dv- Tp,a1eocrlouc; civ6pac;,:rtEpn1yµtvo1 'tOÙÇ 6~ tmleçaµevoç, o~ 1.ilrtq,aivov oi ci'Y'Cd')vac; ô,dam :rtpoaE6oOVTo totc; mtlouroi rd>vâvooiœv /jouAeuµarœv el- 'tUÀot.c; yupvo(· l1re1ra ~'" ainwn Ko1va>vovç,kopiouç 1iç 'Pqa1111 otMl'tEÇtimivrœv opcbvrœvmKÔK'tOY1ff8TEI'° oiJc;il' àyopt pac,t~IY aiaffd.ÉIŒI 'tOÙÇ üKOtait; IŒ~ aapEYOI,mç q11Ntpu,v tKl totç m- va>naiouç rtvovraç- 1ealpEtà to6touc; KoopyOIÇ IŒq&EYOY, àKÎKtEIYGY fi) aftEpol 'tplCIICÔCJ\Ol,1CalaU8\Ç ciÂÂOl 1.tm tàc;~ ciKOKOUl'tGÇ, t1Ctôriy{q> 'Pmµa{mvt1tl a0>tT1p{9 ,cal cpuÀ.CllCfl tflc; 1t6À.&O>Ç, 1111 n 1tci8o1&v û1tot{bvtx8p(bv, 1taptµ&vov,aûto{ t& ,cal âtlCloc;6 'l'lr&µèi>v aût(bv, JCal,ulâ;avt&Ç aùtoùç tùcoxouptvooç totc; âya8otc; t(bv 'Priy{vmvf8ovqcravt&Ç. tv toptfl 61tcp8&1cpav, JCalta~ yuvaa;\vm.oucria~cn.>vflcrav. Ilp6cpamv 6t tflc;1tapavoµiac; fcp&pov6n 'PYJytvottllV cppoupàv 1tpo&6{6oaavIlüppq>. Kal Atnoç ,.tv avtl •poupci,xou fl>fNIVVOÇ ~v. JCalcp1À.{av t8no Maµ&pnvo1c;totc; t1tl toO Kop8µo0 toO l:tlC&À.llCOO 1Catq>ICT1Jl&VOlÇ, où ,rpo 1tolloO lCâJC&iVOlÇ te; i6iouc;!;tvouc;6µ01a 6&6paK6atv.2 - 'AAY11aavta6' aûtov totc; 6cptaÀ.µotc;, ,cal totc; tv 'J>riy{q> iat~ àmatoOvta, p,:tWJ&Ktc»çGKOMtcrtn)V1J'it8&pci1t&u& 'PYJytvoc; ~v àyvooüµ&voc;.Qu. âVllP, µ&tq>1CT11CO>Ç te; MtacniV1Jv,rpo 1tolloO, 6n 'PYJytvoc; toc; aùtov f1t&1a&v t,rl à1tallayfl auvt6µQl cpapµciKcov àvaaxta8a1 8&pµ6)v,1eal xpiaac; totc; 1Cata1Ca{olXn Kal 6a1tav(bmvtJCtÀ.&oo&v àvaaxta8a1 toO ,r6vou µtxp1 aùtoc; t1tavtÀ.8o1,Kal À.Cl8èi>v f1tÀ.&oo&v te; M&acniVTIV. ·o 6 · te; 1toÀ.ùtflc; ~ÛV1JÇàvaax6µ&voc;ci1t&vi\jfato, ,cal &Ùp& toùc; 6cptaÀ.µoùc; 6&6a1taVT1µtvouc;. 34>aPpiKtOÇ 6t û,ro 'Pmµaicovt,rl 61op8(oa&1 t6)v6&1t&µcp8&lc; n,v r,: A'6l1vro~ ira 'Prr,tvo" louro" à,r,:81&,v,JCalt(bv cppoup(bvw~ airiovç rflç à,rourausœç tç 'Pcbµ17v l1rsµy,sv, oi µaatiyco8tvt&c;tv àyop{l µtan t~ KEfGÂ.~ àu11:01r11crav Kal t!;tpp{cpT1aavdtacpoi. At11:1oç6t cpuÀ.aaa6µ&voc; àµ&À.(bç,ora 1tT1P6c;, tautov &qpiJcrato(&l. H. White, 1912). Des Romains étaient en garnison à Rhégion pour la sécurité et la protection de la cité afin qu'elle ne subît aucun dommage de la part des ennemis. Eux et leur chef Decius devinrent envieux des biens des Rhégins et, épiant le moment où ceux-ci participaient à un banquet lors d'une fête, ils les tuèrent et violèrent leurs femmes. Ils prétextèrent pour excuser ce crime que les Rhégins étaient sur le point de livrer la garnison à Pyrrhus. Decius,
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SANDRINE CROUZET
de chef de la garnison, devint tyran, et conclut un traité d'amitié avec les Mamertins, qui s'étaient installés sur le détroit de Sicile et avaient eux aussi accompli, peu de temps auparavant, des actes semblables envers leurs propres hôtes. Atteint d'une douleur oculaire et, se méfiant des médecins de Rhégion, Decius envoya chercher à Messine pour lui procurer des soins, un homme originaire de Rhégion, qui avait émigré à Messine longtemps auparavant et dont on ignorait qu'il était rhégin. Celui-ci persuada Decius de supporter des remèdes cuisants pour un rapide soulagement, et ayant enduit les yeux d'un onguent bnllant et corrosif, il l'exhorta à supporter la souffrance, jusqu'à ce qu'il revienne. Puis il s'embarqua secrètement pour Messine. Après avoir supporté la douleur pendant longtemps, Decius se nettoya et se rendit compte que ses yeux étaient brOlés. Fabricius, envoyé par les Re>mains pour rétablir l'ordre, restitua la ville aux Rhégins survivants et envoya à Rome les membres de la garnison qui étaient responsables de la rébellion. Ceux-ci, après avoir été fouettés en plein forum, furent décapités; leurs corps furent jetés sans sépulture. Decius, gardé avec négligence parce qu'il était aveugle, se donna la mort.
PAUL CORBIER
LES PORTRAITS DANS LES LIVRES 12 À 20 DES ANTIQUITÉS ROMAINES DE DENYS D'HALICARNASSE
Dans les fragments encore conseivés des livres 12 à 20 de ses Antiquités romaines, Denys d'Halicarnasse mentionne naturellement un grand nombre de personnalités; certaines ne sont qu'un simple nom, d'autres nombreuses sont traitées plus longuement et acquièrent une dimension supplémentaire; elles sont alors dotées d'une existence réelle qui permet d'en dresser le portrait. Leur importance était-elle aussi grande dans l'œuvre originale, nous ne pouvons évidemment pas répondre à cette question; notons toutefois que le mode de transmission du texte dionysien (en partie dO à des passages hérités de traités thématiques qui choisissent des morceaux d'un ouvrage) peut modifier la proportion de ces portraits, à notre sens en l'amplifiant. En effet la sélection opérée à l'époque de Constantin VII Porphyrogénète, à la demande du souverain, tend à retenir uniquement ce qui illustrait le mieux le thème pris en charge par l'excerpteur et à s'interrompre ensuite lorsqu'il n'est plus concerné; la meilleure preuve de cette méthode de travail est l'interruption brusque d'un passage cité et le renvoi à un autre traité: c'est le cas par exemple dans l'extrait d'un passage connu du Traité des complots (De insidiis) où est annoncé un discours de Minucius qui, lui, est recopié dans un autre traité, celui des Discours au peuple qu'il fallait aller consulter si l'on voulait en connaître le contenu (mais celui-ci a été depuis perdu) 1 : M&t&mpou6T1tflç PouÂ.flçt1tl tfl 1tpoaood~ )'&VOµtVTIÇt1eaÂ.&ttov MT1vi>1e1ov, 1eà1edvoç fÂ.t;&v· [Zrit&t tv t4) 1t&pl 6T1J1Tl)'Optébv ]. On ignore également comment se faisait le choix de tel ou tel personnage: liberté totale de l'excerpteur dans une liste d'auteurs fixés à l'avance ou sélection opérée par quelqu'un d'autre? Tel passage sur Lucius Postumius Megellus dans Denys est recopié dans le De uirtutibus tandis que le même incident choisi dans !'Histoire romaine de Dion Cassius figure dans le De sententiis. Mais en même D. H. 12.1.15: «Comme le Sénat s'impatientait, il (Camille) appela Minucius qui dit [Voir le traité sur les Discours au peuple]• (trad. personnelle). 1
Paul Corbier, Université d'Aix-Marseille 1.
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temps cette méthode utilisée privilégie l'anecdote, le pittoresque, le saugrenu et aussi les figures individuelles. Le découpage d'un fragment l'ampute presque toujours de son contexte et lui fait perdre une grande partie de son sens. En revanche les extraits, plus longs, issus de l'Ambrosianus (sans doute les deux manuscrits connus 2 posent-ils d'autres problèmes qui sont développés dans une autre contribution 3), permettent une meilleure insertion des personnages dans leur contexte historique et fournissent des informations plus nombreuses sans que l'on puisse être certain toutefois qu'elles sont plus fiables pour l'historien : s'agit-il en effet du texte de Denys recopié tel quel, de notes réécrites ou les deux à la fois selon les endroits? Nous voudrions étudier ces portraits dont Denys d'Halicarnasse lui-même convenait qu'ils étaient indispensables dans une œuvre historique comme modèle de conduite pour le lecteur et comme une nécessité pour illustrer ce que l'auteur entend par beauté littéraire: TolyapoOv napEO'î\Kal 0'01 Ka86.neptv 8eatpql KaÎ..ébV amµatmv iôtaç &~latopdv Kai tflç &Kdvmv'lfUXflc; ànav8iÇea8m tè>Kpdttov, Kai tov tflç noÀ.uµa8daç Ëpavov O"UÀ.À.&yovn oùKt~it11À.ovxpovQ>YEVTIO'Oµtvriv 4 EiK6vatunoov àÀ.À.à8avatov t&XVTIÇ • KaÀ.À.oç Devant cet ensemble de portraits, nous voudrions avant d'en esquisser une typologie nous interroger à la faveur d'un exemple sur la méthode dont l'historien doit s'inspirer pour déjouer les pièges que l'interprétation de telles figures doit maîtriser; ensuite nous souhaitons étudier ceux qui appartiennent à la catégorie de ce que les Romains appelaient des exempla, c'est-à-dire des modèles fournis par des personnages du passé dont la conduite ancienne doit inspirer les actes de ceux qui lisent aujourd'hui le récit de leurs exploits : Kai navtmv µaÀ.\ata toùç àvaypaq>ovtaç iatopiaç, tv aiç 1e:a8lôpi>o8al titv àÀ.i}8e1.av navteç ùnoÀ.aµJ}avoµevàpxT)vq>povi}aeroç te Kai aocpiaç oùaav, nptepov10• Mais il ne faut jamais oublier que l'excerpteur fait un tri dans l'ouvrage qu'il lit et peut de ce fait ne retenir qu'une facette de la figure en liaison avec le thème qu'il illustre. Il peut aussi faire preuve de subjectivité dans le choix de la personne retenue. Dans les extraits du livre 18, Postumius Megellus fait preuve de l'impertinence exacerbée d'un patricien : en regard de son collègue consul d'origine plébéienne, Caïus Iunius Brutus 11 auquel il impose un changement des théâtres d'opérations respectifs qui leur avaient été attribués, le Samnium pour le premier contre l'Étrurie pour le second 12; ensuite vis-à-vis de ses soldats auxquels il impose des travaux de défrichement sur ses terres; enfin face à Fabius, le proconsul auquel un conflit de compétence l'oppose dans une partie du Samnium'3, querelle qui se double d'une forte rivalité entre ces deux grandes familles, les Fabii et les Postumii 14• Il fait aussi preuve de déiinvolture envers le Sénat en libérant ses soldats sans attendre la nomination de son successeur. Autant d'actes, selon Denys, qui lui valent la haine du peuple et une accusation portée par deux tribuns; le tout se solde par un procès qui se déroule sans doute en 290 et sa probable condamnation. Ce portrait caustique de Postumius esquissé par Denys selon les propos retenus par l'excerpteur ne correspond pas à la version que d'autres sources littéraires présentent. La comparaison avec un fragment du livre 11 de Tite-Live et de Dion Cassius 15 complètent les renseignements fournis par Denys sur le lieu de rassemblement des troupes, sur la na10 D. H. Pomp. 11.1.3: «Mais lorsqu'on cherche à discerner ce qui constitue l'essentiel dans telle ou telle existence, ou quelle est l'œuvre la meilleure dans une même catégorie, on se doit de présenter l'analyse la plus rigoureuse sans négliger aucun des traits, bons ou mauvais, qui s'y trouvent. C'est de cette manière que l'on découvre le mieux la vérité, qui est au monde ce qu'il y a de plus précieux• (trad. G. Aujac). 11 F. Münzer, RE, X, 1, 1918, p. 1020-21, s. u. Iunius, Il° 56. 12 Le mode d'attribution fait débat, tirage au sort, échange entre les deux hommes ou, après discussion, vote au sein de l'assemblée. 13 Il s'agit de Quintus Fabius Maximus Gurges, cf. F. Münzer, RE, VI, 2, p. 1788-89, s.u. Fabius, n° 112. 14 L. Loreto, Un'epoca di buon senso. Decisione, consenso e stato a Roma (326-264), Amsterdam, 1993, p. 52-53. 15 B. Bravo-M. Griffin, Un frammento del libro XI di Tito Iivio?, dans Alhenœum, 18, 3-4, 1988, p. 447-52; le début du fragment de Dion Cassius est al~ré.
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ture des travaux effectués par les soldats mais nuancent les condamnations de Denys. En effet, d'après notre connaissance des événements de l'époque, la lectio 16 du Sénat de 289 n'entraîne aucune peine à l'encontre de Postumius; qui plus est, l'extrait du livre 19 en fait le consulaire chef de file de l'ambassade romaine auprès des Tarentins en 282, preuve que ce personnage n'a pas perdu de son influence au Sénat. Chaque reproche de Denys à l'égard de Postumius pouvait s'expliquer. En 291, par exemple, les deux consuls ne sont pas sur un plan d'égalité et n'ont pas des mérites équivalents; il est normal qu'un uir triumphalis comme Postumius prenne le commandement dans le Samnium où se profile un conflit militaire majeur alors que des opérations de simple police suffisent en Étrurie; de plus, l'un est patricien, l'autre, plébéien. Sans doute Denys en dressant un tel tableau est-il victime de sources liées aux Fabii qui prennent parti au sein des oppositions qui se font jour alors au Sénat, période où évoluent les équilibres à l'intérieur de l'assemblée, sans qu'il soit facile de distinguer les rancœurs personnelles et les divergences politiques à propos des changements de majorité17; à partir de 294, les adversaires de Postumius sont plus nombreux et veulent détruire son influence mais on ne peut pas déterminer ceux qui le sont pour des raisons personnelles et ceux qui le sont pour des raisons politiques. La dramatisation issue de l'attitude d'un personnage qui s'appuie sur une part de vérité ressort plus d'une technique narrative que d'un souci de la recherche historique; elle est accentuée sans doute par les sélections opérées par l'excerpteur. En revanche, Postumius au livre 19 offre une image très différente; c'est un homme maitre de lui qui affronte les quolibets de la foule tarentine rassemblée au théâtre, qui subit les vexations d'un certain Kotyle, un énergumène éméché qui souille la toge de l'ambassadeur; c'est de plus un homme cultivé qui prononce un discours adressé aux Tarentins en grec, ce qui prouve la forte implication des Postumii en faveur de la culture hellénique; lors de la bataille du lac Régille en 499 (ou 496) Aulus Postumius Albinus, un de ses ancêtres, avait promis de consacrer un temple à des divinités grecques, les Dioscures, selon le témoignage de Tite-Live18 et avait dédié un sancPh. Boissevain dans son édition de Dion Cassius (8.36.32) de 1895 a proposé une restitution du passage manquant. 16 L'absence du texte de Tite-Live ne nous permet pas de connaître ce qui s'est passé lors de ce recensement et de la cura morum des sénateurs. 17 L. Loreto, Sui mecanismi tklla lotta politica a Roma tra ü 314 e il 294 a.C., dans AFLM, 24, 1991, p. 61-76. Il LÎV. 2.20.2.
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tuaire à Cérès 19• Celui dont nous évoquons la figure avait, quelques années auparavant, introduit le culte de la déesse Victoria à Rome, déesse qui n'était que la transposition romanisée de Nikè:zo.Au deuxième siècle avant notre ère, Aulus Postumius Albinus, descendant de cette même gens, consul en 151, écrit vers cette même date des Annales d'histoire romaine en grec et est accusé par quelques-uns de ses contemporains de grécomanie; toutefois Cicéron 21 se sert encore de ses écrits, que Denys a peut-être consultés, connaissance qui expliquerait tous les détails qu'il nous livre; néanmoins M. Chassignet22 nie toute connaissance de Postumius Albinus par Denys mais elle ne fournit aucun élément d'explication pour étayer cette assertion. Ces deux portraits contrastés du même individu doivent donc nous inciter à la plus grande prudence dans l'interprétation des extraits de Denys connus par l'intermédiaire des traités thématiques qui nécessitent d'être comparés à d'autres sources quand elles existent pour rechercher l'interprétation la plus proche possible de la vérité en les confrontant les unes aux autres.
LES EXEMPLA Parmi les exempta, le premier mentionné dans les livres 12 à 20 concerne Camille. Au livre 12.14, Marcus Furius Camillus 23est dictateur et prend Veies en 396 (selon la chronologie de Tite-Live, malmenée dans les fragments de Denys qui fait preuve, à de nombreuses reprises dans son œuvre, d'indications chronologiques surprenantes : par exemple, erreur sur la date de naissance de Démosthène dans la Lettre à Ammée (4.1) ou la coupure en deux parties de la 'Première Philippique); c'est au livre 13.1-3,le siège de Faléries en 394 et le célèbre épisode du maitre d'école de cette ville puis l'installation de la déesse Junon à Rome; au paragraphe 8, la condamnation en 391 au paiement d'une amende de cent mille asses et son départ en exil à Arclée, enfin c'est son intervention contre les Gaulois qu'il met en déroute. En 14.D, un court extrait du De uirtutibus et uitiis émet un jugement de portée générale sur Camille, opinion qui se retrouve à quelques variantes près chez tous les historiens et moralistes de l'Antiquité. L'Ambrosianus en 14.H-I reproduit un discours qu'est censé prononcer le dictateur devant ses troupes pour les exhorter au D. H. 6.17.2. Liv. 10.33.9. 21 Cie. Brut. 81. 22 M. Chassignet, L'annalistique romai~, t. 1, C.U.F., Paris, 1996, p. 23 F. Münzer, RE, VII, 1, 1910, p. 326-48, s. u. Furius, n° 44. 19
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combat contre les Gaulois qui occupent alors le tenitoire d'Albe; il s'agit sans doute des moments qui précèdent la seconde bataille de l'Allia, qui se situe en 367. Réel ou mythique, cet homme est le grand héros romain, le deus ex machina qui survient pour délivrer Rome du danger. Du début du IVe siècle jusqu'à la fin de la République et à l'époque augustéenne, il est célébré comme le prouvent les livres 5 à 7 de l'Histoire romaine de Tite-Live ou l'elogium 24 rédigé sur le piédestal de sa statue érigée sur le forum républicain 25 ; naturellement, Denys participe à ce mouvement. La similitude du récit chez Tite-Live, chez Denys et dans d'autres sources avait déjà été soulignée dans l'Antiquité 26 ; elle prouve que la personnalité de Camille qui s'est forgée avant cette date sous l'influence des annalistes et des pièces de théâtre 27, s'est enrichie continuellement jusqu'à devenir, à partir d'un certain moment, figée; ses traits sont empruntés aussi bien à Quintus Fabius Maximus Cunctator qu'à Scipion l'Africain, Sylla, César et même Auguste; il existe même une référence à la vie d'Achille, lorsque, avant son départ pour l'exil, ses propos, son sentiment d'injustice et son appel aux dieux rappellent les propos tenus par Achille lors de sa colère contre Agamemnon lorsque ce dernier lui reprend Briséis pour compenser le retour de Chryséis auprès de son père, prêtre d'Apollon, au livre 1 de l'Iliade, les injures exceptées. Nul ne doute que la connaissance d'Homère faisait partie de la culture grecque à l'époque de Denys d'Halicarnasse. Quelle que soit l'origine de son surnom, latine, étrusque ou même grecque 28 , Camillus en latin désigne un garçon qui accompagne le prêtre au moment du sacrifice. Le héros, surnommé Camillus, incarne donc la piété. Cette dévotion et ce respect envers les dieux se manifestent particulièrement au livre 12.14après la prise de Veies. C'est le seul passage 29 à propos de Camille où Denys innove CIL 6.1308 (= ILS 52) ---] Veios post urbemlcaptam commigralri passus non est/Etruscis ad Sutriumldeuictis œquis et/Volscis subactisltertium triumphauit quart(um) seu[ere in]/Velitern[os animad]l[uertit--24
" Sur l'emplacement de cette statue sur le forum républicain et non sur le forum d'Auguste, cf. S. Panciera, lscrivoni greche e latine del Foro Romano e del Palatino, Rome, 1996, p. 131-139. 26 cf. App. Ital. 8 ou Plu. Cam. 13. R. M. Ogilvie (A Commentary on Livy, Books 1-5, Oxford, 1965) a étudié cet aspect notamment p. 699. 27 Chr. Bruun, What every Man in the Street used to know; M. Furius Camillus, Italie Legends and Roman Historiography, dans Chr. Bruun (éd.), Roman Middle Republic, Politics, Religion and Historiography, Rome, 2000, p. 41-68. Des drames historiques devaient exister et être représentés à Rome avant l'œuvre de Livius Andronicus; cf.T. P. Wiseman, Historiography and Imagination. Eight Essays on Roman Cuhure, Exeter, 1994. :zaChr. Bruun, What eve,y Man in the Street used to know ... , p. 52. 29 D. H. 12.16.
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par rapport à Tite-Live en expliquant le déroulement du premier sacrifice fait par Énée au moment de son arrivée en Italie. Interrompu dans son action de grâces par le passage d'un ennemi, Ulysse ou Diomède, le fils d'Anchise et de Vénus se voile le visage pour ne pas être reconnu et tourne le dos à l'importun. Remarquons que Denys ne mentionne rien de tel au moment où il décrit l'arrivée d'Énée en Italie au livre 1. À la suite de cet incident, le Troyen prit l'habitude de sacrifier de cette manière, tradition que respecte Camille et qui sert à expliquer le faux pas du dictateur à la fin de ce sacrifice, annonciateur de sa proche disgrâce. Les extraits dionysiens comportent un second exemplum, le portrait de Caïus Fabricius Luscinus 30 connu par deux manuscrits qui se complètent; le De legationibus traite en 19.S-T de l'ambassade de 280 auprès de Pyrrhus et du début de la réponse de Fabricius aux offres du roi, discours dont l'Ambrosianus présente la fin. Ce même manuscrit en 20.L-M mentionne la censure du Romain et explique le sens de cette magistrature spécifique à Rome; bien que séparés dans l'œuvre originale, ces deux passages se répondent l'un à l'autre et sont conçus pour que le lecteur grec ait une meilleure compréhension des actions de Fabricius. En outre, selon un procédé rhétorique, ce portrait est l'antithèse de celui du roi épirote. Au moment de sa nomination comme ambassadeur auprès de Pyrrhus avec deux collègues, Fabricius jouit déjà d'une grande renommée; il est le vainqueur des Samnites, des Lucaniens et des Bruttiens et a mis fin en 282 au siège de Thouroi; il joue d'ailleurs le rôle central dans ces contacts diplomatiques. Pris à l'écart par le roi qui tente de le corrompre, Fabricius par sa réponse est présenté par Denys comme la figure type du dirigeant romain de l'époque, patriote, dévoué à la cause publique, se contentant d'une vie frugale, un de ceux qui sont responsables de la grandeur et de la supériorité de Rome. D se fait gloire de sa pauvreté, (toute relative puisque ses titres prouvent qu'il était détenteur du cens le plus élevé nécessaire pour occuper de telles magistratures), il avoue que ses propriétés sont de superficie réduite, un simple petit domaine 31; surtout il se glorifie de ne faire aucun prêt à intérêts et de ne pas pratiquer le commerce d'esclaves mais de vivre de manière économe et frugale. À peine regrette-t-il que sa modeste fortune ne lui permette pas de secourir éventuellement des démunis. Face aux offres d'argent du roi, il fait preuve d'un grand mépris pour la richesse, qualité qu'il incarne puisqu'il est réF. Münzer, RE, VI, 2, 1909, p. 1931-1938, s. u. Fabricius, n° 9. D. H. 19.S: ... vtte tébv 1CŒt01tlV U1tEÔÉXEtO i..iµvri paat:ta, 1ÏV1tt:plt:Â.8dvµtv xw1t0V~v 1tt:p1te.:xuµtvc.ov 1tavtax68.:v tébv 1toi..t:µicov, ôtt:i..8dv ôt fut6 n: iÀûoç 1tÀi)8ouç,11vtà 1ttp1ç ttÀµata dx.:, teal j3a8ouçüôatoç toO Katà µÉCJllVautitv v1ealô1· üôatoç 1toÀÀoO ôtco1œ1v) t1tl toùç dllouç IaPivouç tpt1tt:tat· 6 ôt Koûpttoç 1toÀÀàµoteti)aaç oùv xpovq>acoÇt:taitt: tJCtflç Àiµvriçtà Ô1tÂ.a txcov Kal dç tè>vxapaKa àmxyt:tal. OÙtOÇ6 t61toç àvaKÉXCOOOf:COÇ
àµdÂ.tKtov65 • Une action des tribuns de la plèbe aboutit à la condamnation de l'officier. C'est sans aucun doute un récit conçu pour un public grec puisqu'il ne nous est pas connu par ailleurs sauf de Valère-Maxime66. On peut supposer que les abréviateurs byzantins ont choisi de recopier ce passage pour illustrer le poids de la morale au sein du corps civique romain qui n'hésite pas à prononcer une condamnation à mort contre un officier. On peut aussi se demander dans ce cas précis si les excerpteurs n'ont pas été guidés par des problèmes de leur temps.
Liv. 3.32. Fior. J.37.7; Plu. Py,rh. 16.8; Zonar. 8.3.8. 64 F. Münzer, RE, XII, 1, 1924, p. 450, s.u. ùetorius, n° 11. 65 D. H. 18.F : «Je vais raconter, [dit Denys], encore un épisode concernant la cité et qui est digne d'être universellement célébré; grâce à lui, les Grecs percevront combien étaient intenses alors à Rome, la haine du mal et la sévérité envers ceux qui transgressent la loi commune de la nature humaine». 66 V. Max. 6.1.lJ. 6J
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À la suite de ce récit de quelqu'un qui refuse de céder aux demandes d'un supérieur, un autre exemple est cité par Denys qui, d'après lui, serait antérieur au précédent et illustre le même souci de respect de la morale. L'anecdote raconte l'histoire d'un jeune homme libre devenu esclave maltraité par son maitre. Son nom est inconnu, il est qualifié simplement de fils de Publilius, tribun militaire passé sous le joug des Samnites après la défaite des fourches Caudines. À la mort de son père, il avait dü emprunter pour pouvoir procéder à ses funérailles mais il n'avait pas pu rembourser cet emprunt; il fut réduit en esclavage pour dettes. Tite-Live et ValèreMaxime citent 67 des cas identiques mais les noms sont différents et les châtiments varient eux aussi d'un cas à l'autre; il nous est donc impossible de lever l'anonymat de ce pauvre jeune homme. Le vote de la /ex Pœtelia (suppression de l'esclavage pour dettes) est la conséquence que les autorités romaines tirèrent de tels exemples, indices aussi de la crise économique que connait Rome à la fin du IVe siècle 68 • L'ensemble de ces portraits issus des fragments des livres 12 à 20 des Antiquités romaines de Denys d'Halicarnasse proviennent pour quatre d' ente eux de l'Ambrosianus mais la majorité nous est connue par des extraits des traités thématiques d'époque byzantine, quatre par le De uirtutibus, deux par le De legationibus, un par le De insidiis. En revanche la majorité des fragments de Denys pour les livres 12 à 20 émanent de l'Ambrosianus. Ces diverses proportions sont le reflet du mode de transmission des manuscrits; l'auteur de ce dernier texte, peut-être Gémiste Pléthon, recherchait-il plus à retranscrire des faits irrationnels et bizarres qu'à s'attacher à des portraits d'individus? A contrario, les abréviateurs sont automatiquement obligés de retenir des figures qui servent d'illustration à leurs propos; il serait intéressant d'examiner les autres auteurs antiques que nous connaissons aussi par des traités byzantins pour examiner la proportion des portraits que l'on y retrouve, ce qui pourrait renforcer notre hypothèse ou l'infirmer. L'étude des portraits des· fragments des livres 12 à 20 montre que ceux dont la vie sert d'exemplum et ceux qui sont responsables des affaires politiques et des victoires militaires sont tous issus de grandes familles et ont géré le cursus honorum; tous sont des consulaires. À l'inverse, ceux dont l'image est négative sont des démagogues non élus qui s'appuient sur le peuple pour prendre le pouvoir. Les sources de Denys, sa propre idéologie sont responsables de
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Liv. 8.28; V. Max. 6.1.9. M. Di Paolo, Lex Pœtelia de nexis, dans Index, 24, 1996, p. 275-288.
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cette histoire romaine confondue avec celle de ses dirigeants mais ce type d'œuvre correspond aussi à l'opinion de son temps. Auguste avait décoré deux portiques de son forum des statues des hommes illustres, les summi uiri, statues en pieds avec leurs insignes de tous les personnages qui avaient remporté des triomphes et avaient ainsi contribué dans le passé à édifier la grandeur de Rome. Un édit du princeps expliquait les raisons de ces choix : /taque et opera cuiusque manentibus titulis restituit et statuas omnium triumphali effi.gi.ein utraque fori sui portica dedicauit, professus et edicto : « commentum id se, ut ad ülorum uelut ad exemplar et ipse, dum uiueret, et insequentium œtatium principes exigerentur a ciuibus» 69 • Nul doute, ses écrits le confirment, que Denys partageait ce point de vue et se souciait de volonté pédagogique en écrivant son histoire. Ces portraits pris collectivement dessinent par touches successives les qualités d'un dirigeant romain apte à conduire Rome et à accroitre sa grandeur. Se manifestent d'abord sa piété et son sens religieux qui se définit par le respect scrupuleux des rites et la soumission aux volontés divines. Il doit aussi faire preuve d'un dévouement total au bien public et montrer un désintéressement et une absence d'ambition personnelle. Sa vie dénote un refus prononcé du luxe ostentatoire et un goüt marqué pour la frugalité. Enfin, vertueux, il incarne le refus des passions et la recherche du consensus entre les citoyens aisés. Mais les portraits sont aussi l'occasion pour Denys d'Halicarnasse d'illustrer sa conception de l'histoire et de donner libre cours à des compositions rhétoriques. Alterner parties oratoires et morceaux narratifs est possible dans le portrait, porteur d'une diversité qui a pour but d'éviter au lecteur l'ennui de la monotonie et en revanche d'obtenir ce que lui-même appelait un plaisir total. Paul
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Suet. Aug. 31.8: «Mais il fit ériger, sous les deux portiques de son forum, des statues qui les représentaient tous avec leurs insignes de triomphateurs, en déclarant même dans un édit 'qu' il avait imaginé cela pour que lui-même, tant qu'il vivrait, et les princes, ses successeurs, fussent tenus, devant leurs concitoyens, de se modeler, pour ainsi dire, sur l'image de ces grands hommes'• (trad. H. Ailloud). 69
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III
LA FORME FRAGMENTAIRE CHEZ LES HISTORIENS GRECS
DOMINIQUE LBNFANT
LES CITATIONS DE THUCYDIDE DANS LES SCHOLIES D'ARISTOPHANE: CONTRIBUTION À L'ANALYSE DE FRAGMENTS D'HISTORIENS
Pour commenter les comédies d'Aristophane, les scholies citent volontiers des auteurs antiques dont certains ne sont plus conseIVés aujourd'hui. Les allusions des scholiastes acquièrent alors aux yeux des modernes le statut de «fragments», témoins supposés d'un morceau de l'œuvre perdue. C'est ainsi que, pour son recueil de Fragmente der griechischen Historiker, Felix Jacoby tira des scholies d'Aristophane près de cent trente fragments d'historiens disparus•. Or, si la collection de fragments vise ouvertement à donner quelque idée de l'œuvre disparue, un tel objectif suppose que l'on ait d'abord apprécié la fiabilité des témoins qui nous restent 2• Il importe notamment de prendre en compte les méthodes qui ont conduit à l'élaboration de ces textes d'accueil que Guido Schepens a judicieusement analysés comme des cover-texts - des textes qui couvrent l'original, en ce triple sens qu'ils le préservent (d'une perte totale), mais aussi qu'ils le masquent (sous une nouvelle forme) et l'incluent (dans un nouveau contexte) 3• L'idéal serait que chaque texte faisant 1
Les références des fragments d'historiens tirés des scholies d'Aristophane
par F. Jacoby sont données par P. Bonnechere, Die Fragmente der griechischen
Historilœr. Indexa of parts /, Il and Ill, vol. 1, Leyde-Boston-Cologne, 1999, p. 139-140. J Plusieurs travaux récents ont insisté sur cette nécessité. Cf. G. Schepens, Jacoby's FGrHist: Problems, Methods, Prospects, dans G. W. Most (éd.), Collecting fragments - Fragmente sammeln, Gôttingen, 1997, p. 144-172, et D. Lenfant, Peut-on se fier aux «fragments• d'historiens? L'exemple des citations d'Hérodote, dans Ktèma, 24, 1999, p. 103-121. 1 Sur la définition du cover-text, je ne puis que citer G. Schepens, Jacoby's FGrHist... , p. 166-167, n. 66: les trois sens de cover correspondent à trois opérations auxquelles peuvent se livrer les auteurs qui transmettent un texte antérieur: «they, first of ail, preserve (= protect from being lost) texts drawn from works that are no longer extant; very often, too, they more or less conceal the preCW"SOrtext (form characteristics such as the original wording and style of the precursor text are no longer discemible; often also fragments seem to 'bide' in the cover-text, so that one can only guess where a paraphrases begins or where a quotation ends); and, last but not least, the cover-text encloses the precursor Dominique Lenfant, Université Marc Bloch-Strasbourg 2.
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office de cover-text soit spécifiquement étudié en tant que livreur de citations•. C'est à un exercice de ce genre que je souhaiterais m'adonner ici, en étudiant la manière dont Thucydide est cité dans les scholies, afin d'en tirer des conclusions sur les méthodes des commentateurs antiques et byzantins d'Aristophane dans leur utilisation des historiens classiques. Mais il convient d'abord que je m'explique sur le choix et la définition de cet objet d'analyse, le corpus des scholies d'Aristophane et les références à Thucydide en son sein 5• À première vue, le corpus des scholies 6 est un cas plus complexe que d'autres: constitué au terme d'un processus de plusieurs siècles, sur la base de travaux d'érudition datant des époques hellénistique et byzantine 7, il repose sur text : it is inserted or enveloped in a new con-text, which may impose interpretations that differ considerably from the original writer's understanding of his texb. 4 Le besoin d'une critique fonctionaliste du texte d'accueil a été souligné par R. Tosi, Studi sulla tradiz,ione indiretta dei classici greci, Bologne, 1988, p. 56-57; F. Montana, L'Athenaion Politeia di Aristotele negli scholia vetera ad Aristo{aM, Pise-Rome, 1996, p. 14-15, 36; D. Lenfant, Peut-on se fier aux «fragments» d'histc; Citation littérale d'un début de phrase (5 mots). 2) Schol. Ach. 12 [vet Tr]. nlbç to0t' taeiat µou.( ... ) 1Ctxp11tatat tfl 011:tpl30À.fltfl tnl tf\ç 1eap6iaç 1eal 9ou1CU6i611ç tè> v0011µa t1ecppal;covRErI.h (éd. N. G. Wilson, 1975, p. 7). Il s'agit de commenter l'emploi de 1eapfüa par Aristophane quand il fait dire à Dicéopolis: •tu imagines comme cela m'a secoué le cœur (de voir 11téognissélectionné à la place d'Eschyle) !• : «Thucydide aussi use de l'hyperbole concernant le cœur lorsqu'il décrit le fléau•. Th. 2.49.3. 6 1t6voç ( ... ) · 1eal 61t6tt tç tTIV1eap6{av~p{çe1ev, àvtatp&cpt te aotTIV 1eal à1to1ea8apaetç xoÀ.f\çmlaat ooai onè>iatpli'.)v mvoµaaµtvat ti auv&n0tt tati touc;, Kal t6T)MOO&v
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'A9ttvaio1ç, ... ti fk>6Â.Ovtatxspl -ro6'tœvysvta8at. clU.mv 6t cilla uy6vtcov 10.tcov àva(J'tàç &1t11îîdÀ.v àpt8µov xpoc,9dç, s{(J(I) t1edVO)vdçstv aù-ro6ç,ci>çytÀ.Co'taxoJ..ùvica-r· a6'to0 ysvta8at, àyayèov 6t amoùç ci>çt6iav 11:pclçtv ica-rop8cooaç txsasµv6vs-ro VEr8M (éd. D. Merwyn Jones-N. G. Wilson, 1969, p. 22-23). Il s'agit de commenter ce que dit le serviteur de Démos : que le Paphlagonien lui a pris des mains pour le servir comme venant de lui «le pain laconien que j'avais pétri à Pylos». Cette allusion appelle une explication, que le scholiaste tire de Thucydide comme on le ferait aujourd'hui : «Autre commentaire: il a tiré cela de l'histoire qu'évoque Thucydide. Elle se présente comme suit : Démosthénès, stratège des Athéniens, envoyé en Sicile à cause de la guerre qui s'y déroulait, alors qu'il longeait la côte, s'empara, avec une armée, de Pylos et de Sphactérie, prit trois cents prisonniers et fit savoir aux Athéniens ... ce qu'ils voulaient qu'il advînt en la matière. On avait tenu des propos divers quand Cléon se leva et promit, en indiquant un nombre de jours, que, dans ce délai, il les ramènerait, si bien qu'il suscita quantité de sarcasmes et, quand il les eut ramenés, il se glorifia d'avoir bien conduit l'action en la présentant comme la sienne propre•. Th. 4.2-5; 4.13-14; 4.27-30; 4.39. Résumé légèrement biaisé par l'influence d'Aristophane. 8) Schol. E:q. 55c [Tr]. t(J'top{a oxcoç xapsaniaa-ro rliv 06).ov 10.tcov. ri xspl 'tfjç Il6J..ou t(J'topia, ~ç ical 8omcooi6riç µtµvri-ra1, txs1 oü-rcoç.Ariµoo8tV"lç (J'tPŒ't'lîOÇ'A9ttvaicov Ka-rà Aaics6a1µoviœv &IC(J'tpauooaµsvoç icai. -roùç µtv &À.C.i>V, 'tOÙÇ6t ICŒ'tacpuy6vtaç dç IluÀ.ov ffOÀ.lOplCci>V, OÙIC 116uvf)9tt1tapaxpflµa &À.dv·xtµ\lfaç oùv xpoç 'A9ttvaiouç 1tÀ.dova 66vaµtv 1'-r&td>vÜff &iç-rov 6flµov &'"lîî&i.À.a-ro&vtè>ç11µsp6>v&ficomxapacm\· À.&vtcov), xap&À.8èov oso8at -roùç 1toÀ.1opicouµtvouçsi J..afk>t-rriv 66vaµtv i\v Ariµoo8tvriç aiut. xpox&tpta8slç oùv (J'tpa-rrirè>çicai à1t&À.8èov µs-rà 1tÀ.dovoç6uvô:µscoçxap&cm\· to aa-ro 06J..ov 1eai-roùç ticd Aaics6atµoviouç &iÂ.sical t6o!;sv sooo1etµT1K&val, 't&À.oçlicpapxaoaç -rci>v 1t6vcov-roOAriµoo8tvouç. µtµvri-rat 6t ical tv NscptÀ.alÇ -ra6TT1Ç 'tfjç t(J'top{aç J..tycov-rotç &K06J..ou J..ricp8stm-rotç Aa1ecovt1eotç. Vatlh (éd. D. Merwyn Jones - N. G. Wilson, 1969, p. 24). Il s'agit toujours de commenter le vers 55 (cf. supra n° 7). «Récit de la manière dont Cléon s'empara de Pylos: l'histoire de Pylos, que rapporte Thucydide, se présente comme suit: Démosthénès, stratège des Athéniens, avait été envoyé en expédition contre les Lacédémoniens et il avait pris les uns et assiégeait ceux qui s'étaient réfugiés à Pylos, mais ne put les prendre dans l'immédiat; il envoya demander aux Athéniens des forces plus importantes, de manière à s'emparer d'eux; des propos divers ayant été tenus, Cléon, qui était on ne peut plus fourbe, et qui savait que, du fait du siège, de la faim et de la soif, ils ne pourraient résister de nombreux jours (c'est ce qui était dit par ceux qui avaient été envoyés par Démosthénès), se présentant devant le peuple, promit qu'il s'emparerait des assiégés dans un délai de vingt jours s'il recevait les forces que demandait Démosthénès; désigné stratège et parti avec des troupes importantes, il s'empara de Pylos, prit les La~
LES CITATIONS DE lllUCYDIDE DANS LES SCHOLIES D'ARISTOPHANE
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démoniens qui s'y trouvaient et jugea bon d'en retirer l'honneur, dérobant le fruit des efforts de Démosthénès •· Th. Cf. n° 7. Résumé nettement contaminé par l'influence d'Aristophane. 9) Schol. &/, 84b (II) [vet]. ( ... ) Iuµµaxoc; 6t q,ricn '!'&OO&a8al1t&pi8&J.UO't01CÀ.&ouc;. oüt& yàp 'Hp66otoc; oüt& 8ou1eu6i611c;iatop&t. ( ... )VEre (éd. D. Merwyn Jones - N. G. Wilson, 1969, p. 31). D s'agit de commenter une allusion au suicide de Thémistocle par absorption de sang de taureau. Le scholiaste a d'abord rapporté tout un récit des dernières années de Thémistocle. «Symmachos dit que l'on ment au sujet de Thémistocle, car ce n'est rapporté ni par Hérodote ni par Thucydide• 51. Cf. Th. 1.138.4 : VOO'llO'aàno8av&tv aùtov. Thémistocle «est mort de maladie, mais certains prétendent qu'il mit volontairement fin à ses jours en prenant du poison•. Vague allusion. 10) Schol. &/. 762 - 762a. (I) [vet] toùc; 6d.cptvac;µ&t&mp«;ou.6&Â.q>ic; ôpyavov vaun1eov. µ&t&mp{l;oo 6t, tout&O'tlV ⁣Ü'l'oc; aip&. tn&i 1eal tibv 8aÂ.Œammv6&Â.q>ivmv tà K116ftJ.111tŒ µ&ttmpa. µtµvrita1 6t 1eal 8ou""6i6ric;. VEr0M (éd. D. Merwyn Jones - N. G. Wilson, 1969, p. 180) «Fais monter les dauphins: le dauphin était un instrument naval. Fais monter, c'est-à-dire lève vers le haut; car les dauphins marins font aussi des bonds en l'air; Thucydide aussi les mentionne•. - 762a (ill) [vet] : ( ... ) 1eai 8ou1eoo{6ric;6&Â.q>1voq,6pov dpfllC& tl)V vaOv tl;riptila8c11. VEf'l8M. - 762d [Tr] : ( ... ) 1eai 8ou""6i6ric; 6t 6&Â.q>1voq,opov &Cp111e& tl)V vaOv tl)V t;T1PTT1Jt&vov txol>O'Uv6&Â.q>tva to100tov. Lh (ibid., p. 181) «Thucydide aussi a dit qu'était porte-dauphin le navire qui était équipé de ce dauphin•. Th. 7.41.2: il est question des vergues porte-dauphins (6d.qnvoq,opo1) que l'on dresse au-dessus des chalands pour empêcher l'avancée des ennemis. Allusion (1er cas) ou citation d'un terme (2c et 3c cas). 11) SchoL &/. 793b [vet]. où1etÂ.&aip&1c;. oû 1eatouct&ip&1c;. 6&ilCVl>Ol 6t füà toûtmv ôtt ô KmÂ.l)Q)V 1taooacr8a1 tov 1t6Â.&µ6v tat1v ô IO.tmv. 61t&poùv 1eai8oulCU6i6ric; iatop&t füà toûtmv· t1t&16ti1eai 11tv 'Aµcp11toÂ.&1 11aaatotc; 'A8ttvaio1c; trtv&tO, ICŒitt&9vft1C&l IO.tmv t& lCŒiBpaO'i6ac;,OÎ1t&pàµcpot&pol IJaÂ.lO'tŒ 11vavnoOvto tft &ipftvn, ô µtv füà to &ûtux&tvt& 1eal nµda8a1 t1e toO noÂ.&µ&tv, 6 6t y&voµtvric;&ûroxiac;1eatacpavtat&poc;t& voµ{Çmv&iva11ea1eoupyibv 1eaià1t1at6t&pov.VEr8MLh (éd. D. Merwyn Jones - N. G. Wilson, 1969, p. 233). D s'agit de commenter une accusation du Charcutier contre le Paphlagonien: d'après lui, si ce dernier a couru des risques pour ramener les prisonniers lacédémoniens, c'est parce qu'il était ivre. Le scholiaste explique: «L'année d'avant, Cléon avait promis aux Athéniens de conclure la guerre de Pylos en vingt jours; et, dans leur étonnement, tous disaient qu'il était ivre; Thucydide dit aussi que les Athéniens étaient étonnés de cette folle promesse et qu'ils en riaient». Th. 4.28.5 : totç 6t 'A8fivafotç tvtneae µtv n ,cal ytÂ.mtoç'tfl 1eoucpoÂ.oyiq aûtoO. Paraphrase fidèle. 13) Schol Eq. 1331a [vet Tr]. tsttlyocpopoç. t8oç ~v totç 'A&r]vaiotçto ,raÂ.atovt&tt\Ç\ xpoootç civa6da8a\ tTtV1C0µ'1V, cl>ç8001CU6i6T1Ç VEr8MLh (éd. D. Merwyn Jones - N. G. Wilson, 1969, p. 268). Il s'agit d'expliquer le terme tunyocpopoç «porteur de cigale•, qualificatif que le Charcutier applique à Démos régénéré. • Les Athéniens avaient jadis coutume d'attacher leur chevelure avec des cigales en or, d'après Thucydide». ... xpood)v tsniycov tvtpTh. 1.6.3 : oi ,rpeafJvi-eporavmrç i-mvev&z1µ6vcov ast ,cpcopûÂ.ov civa6oûµevot tlilv tv tfl KtcpaÂ.fl tptxlilv· «les hommes âgés de la classe aisée ... nouaient sur leur tête la touffe de leurs cheveux en y insérant des cigales en or». Paraphrase approximative. 14) Schol. Nub. 608a [Tr]. ( ... ) auvttl'Ylcivetat àvtl toO 1eatà tUX'lVauµPaivst. 1eai8ou1CU6i6T1ç· outm nou ÇUvtUXOV Tjto\ auµpav (éd. W. J. W. Koster, 1974, p. 97). À propos de l'emploi de auvtuyxoOaa (sens et construction) au vers 608 des Nuées (li I:eÂ.TJVTI çuvtuyxo0a· riµtv &1ttatetÂ.evcppciam),la scholie invite à ne pas comprendre auvtuyxoOaa riµtv «nous ayant rencontrées-, mais auvtuyxoOaa seul, «apparaissant par hasard•, riµtv allant seulement avec le
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verbe t1ttcrtElM:V.Elle prétend citer à l'appui un emploi comparable chez Thucydide. Th.: Koster comprend, après d'autres, que la prétendue citation est composée des trois mots oü-tco1tou çuvrux6v, qui représentent une séquence introuvable dans le texte de Thucydide. Mais, étant donné les usages des scholiastes (cf. schol. Nub. 52h, où oü-tco1tou U-ycov introduit une citation d'Aristophane), on peut comprendre que oütco 1tou annonce la citation («Thucydide aussi dit textuellement quelque part:») et que celle-ci consiste en un seul mot: çuVTI>x6v,qui est expliqué par le synonyme croµPciv". Dans le texte de Thucydide, on trouve en 3.59.3 tov çuvtux6vta ldv6uvov, où le participe a effectivement le sens indiqué par la scholie. Cette dernière a peut-être emprunté la citation et sa définition à un lexique qui citait au neutre le terme lu chez l'historien. Citation d'un terme. 15) SchoL Nub. 984 (post schoL vet. 984d) [Ald] : Ka\ 8o01cu6i6T1c;· 1eai oi 1tp1taP6t1tpolaùtotc; tlbv Eù6alµ6vcovoù 1toÀ.ùç... À.lvoix; ... tEtt{-ycovtv tpaEl 1epcopuÀ.eov ... tplxlbv· (Scholia scholiorumque partes editionis Aldimu propria, éd. W. J. W. Koster dans D. Holwerda, Scholia vetera in Nubes, 1977, p. 275). Dans les Nuées, le Raisonnement Injuste critique les vieilleries «avec tout plein de cigales». La scholie ancienne qui expliquait ce qu'étaient ces dernières est étoffée dans l'édition Aldine des éléments d'une citation de Thucydide. Th. 1.6.3 : Ka\ oi 1tp1taP6t1tpolaùtotc; tlbv 1t1>6mµ6vcov 6là to cippo6{altov OÙ KOÀ.ÙÇ xp6voc; È1tEl6flXltlbvâc;tE Â.lVOOc; t1taooavto cpopoOvtEc;Kai xpoolbv tplXlbV· tEtnJO>VtvtpaEl 1epcopuÀ.OV civa6ouµEVO\tlbV tv tf\ KEq,aÂ.ft Éléments de citation. 16) Schol. V. 502d [vet Ald]. ( ... ) 6'1e6troc;6è tEaaapcov 6vtmv Kat' tviouc; tibv IlEtmatpan6lbv tov 'l1t1t{av1taptÀ.aP1tv·1tp1taP6tatoc;yàp ~v aùtoc; 1eaitflV tupavvi6a ..rxttv, Ka8à Kai 8ouKu6{6T1c; «pT1aiV. vrAld (éd. W. J. W. Koster, 1978, p. 81). Pour montrer que la notion de tyrannie est galvaudée dans l'usage contemporain, un personnage dit qu'une prostituée l'a accusé de vouloir rétablir la tyrannie d'Hippias quand il lui a demandé de prendre la posture d'un cheval ((1t1toc;).La scholie explique que la tyrannie d'Hippias semble avoir été pénible. «Alors que, d'après certains, les Pisistratides étaient sans doute quatre, il (se. Aristophane) a choisi Hippias: car il était l'aîné et il détenait la tyrannie, d'après ce que dit aussi Thucydide». Th. 1.20.2 : 'l1tmac; µèv 1tp1taP6tatoc; o\v ~PXE tlbv Il1t1mcnpatou uitœv; 6.54.2 'Imac; µtv 1tp1taP6tatoc;o\v taxE tflV ciPXriv. Paraphrase. MEÀ.T1aiou ui6c;, Il&ptdd civt117) Schol V. 947b [vet Ald]. 8ouKu6{6T1c; 1toÀ.1tEOOCJµEvoc;. ttaaupec; 6t &im 8ouKU6{6al 'A8Tivatol· icnoptoypacpoc;1eai 6
"Dans le cas contraire, on s'expliquerait mal que le seul O'UµPâvprétende paraphraser la curieuse expression oütm 1tou~uvrux6v.
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DOMINIQUE LENFANT
rapyfitttoç 1ea\ o 8tu~ 1ea\ outoç, Pfltœp dp1Cnoç wrxaVO>v.vrAld (éd. W. J. W. Koster, 1978, p. 150). Cf. n° 6. 18) SchoL Poe. 212 [vet]. ( ... ) to aùto 6è 6f1Â.Ol 1ea\ to 8ouacu6i6'1ç c:rovtypa'lfE tov 1t6À.8povteî>vIlEÀ.01tOVVf1ai0>v 1ea\ "A9Tivaiœv(va aùteî>vp4llov to tpyov Ti-V (éd. D. Holwerda, 1982, p. 39-40). Dans la Paix, représentée aux Dionysies de 421, après les dernières négociations qui s'étaient achevées aux derniers jours de l'hiver et juste avant la ratification du traité (Th. 5.20), Hermès explique que, si les dieux se sont éloignés des Grecs, c'est que ces derniers avaient rejeté toutes les occasions de trêve, qu'ils fussent laconiens ou athéniens. Le scholiaste trouve qu'il est habile, de la part d'un poète qui s'adresse à des Athéniens, d'invoquer en premier lieu la responsabilité des Laconiens. «C'est ce qui ressort aussi de la formule : "Thucydide a composé l'histoire de la guerre entre Péloponnésiens et Athéniens", pour que ce soit davantage l'œuvre des premiers». Th. 1.1.1 : 8ou1CU6{611ç 'A9Tivatoç çuvtypa'lfE tov 1t6À.8povteî>vIl&Â.OKOVVTI· aiœv 1ea\ 'A811va{rov. Citation littérale (8 mots). 19) Schol. Pac. 242a [vet]. ièoR Ilpama\ RV. 1t6À.tçÀ.a1CO>Vl1Cll. dpa 6t 1tpaaov tpPcU,À.rov taOtci cpf1c; X:6Â.6000V'tQÇ à1to1tÂ.stvtç ci1toÂ.oy{av envTl1t6Â.1ç tvsx:cU.s1. Paraphrase exacte. 26) Schol. Av. 186c [Ald) 55 • Â.l~ VErM MT1Â.{Q) RVErM. 'AV'tl.toO µst'.>1tè> yiatq>. Mf\À.OÇ6t tan 1t6Â.1ç8saaaÀ.iaç. ical. oi MrtÂ.1011toÂ.1opico6µsvo1 "A9TJvaioov Â.1~ tmta8T1aav icai 1tapa6s&oicamv tautoùç, RVErM ci>c; 8ou1CU6i6T1Çtv tfl 1tâµ1ttn Ald (éd. D. Holwerda, 1991, p. 34). Pisthétairos donne aux Oiseaux le conseil suivant: «quant aux dieux, vous les ferez périr par une faim ... mélienne». La scholie explique: «faim mélienne: pour «très grande». Mélos est une ville de Thessalie. Et les Méliens, étant assiégés par les Athéniens, étaient pressés par la faim et se rendirent, comme le dit Thucydide au livre 5». Th. 5.114-116: siège de Mélos et reddition des Méliens. Th. ne parle pas explicitement de faim et, s'il est vrai que c'est le but évident d'un siège, Mélos fut d'après lui livrée par trahison. Résumé approximatif.
ss La scholie est ancienne, mais la référence à Thucydide n'apparaît que dans l'Aldine.
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27) Schol Av. 484b [vet Tr ]. outoç aatpa7tT)Ç Aapdou ô tTIV Afyu,ttov ÀaJxi,v.ou µVT)µov&i>&l 8outruô{ôT)c;tv tf\ xpcinn ypétq,covoütœç· M&yciPt>Çov tov Zcmrupouxtµx&t civôpa Iltf)(Jllv µt:tà xollflc; c:npandc;, ôç àcpucoµevoçmtà yflv, toi>çt& Aiyu7ttiouç 1eaitoùç cruµµcixouçµcixn t1epatT)a&1ealt1e Mtµcpt~ TjAacn: toùç "EllT)vaç. RvrLh (éd. D. Holwerda, 1991, p. 82). Il est question de Darius et de Mégabyze, cités comme exemples de commandants des Perses. La scholie identifie ici le second. «Ce dernier était le satrape de Darius, celui qui prit l'Égypte. Thucydide le mentionne au livre 1, en écrivant textuellement : 'il envoie Mégabyze fils de Zopyros, un Perse, avec une année nombreuse; celui-ci arriva par voie terrestre, il vainquit les Égyptiens et leurs alliés au combat et il chassa les Grecs hors de Memphis'•. Th. 1.109.3-4 : M&ycipuÇov6t tov Zcmrupou xtµx&t civôpa Iltf)(Jllv µ&tà c:npandc; xollflc;· ôç àcpt1e6µ&voç1eatà yflv toi>ç tt: Aiyu7tt{ouç 1eai toùç çoµµcixouç µaxn t1epatT)a&1eal t1e tf\c; Mtµcpi~ tl;itÀ.aa& toùç "EllT)vaç. Citation littérale (27 mots). 28) Schol. Av. 556b [vet]. i&pov 7tOÀ&µov ... [suit une longue explication qui se réfère à Philochore] iatop&t x&pi aotoO 1eai8outruôfôT)c;vr (éd. D. Hol• werda, 1991, p. 93). «La guerre sacrée ... Elle est également évoquée par Thucydide•. Cf. Th. 1.112.5. Allusion. 29) Schol. Av. 1569b [vet Tr]. ( ... ) toOtov ôt tov Aatcntoôiav Kai atpatt)yflaai cpT)m8ou1CU6iô11c; tv t)'. RVELh (éd. D. Holwerda, 1991, p. 225). Il s'agit de commenter Aata7to6iaç ei trtv cpi>mv«Es-tu fait comme Laispodias? • : Laispodias avait une jambe abîmée et se la drapait (ce qui explique le passage); tel et tel comique l'ont représenté de telle ou telle manière; puis: «Ce Laispodias a aussi été stratège, d'après Thucydide au livre 8•. Thucydide mentionne effectivement Laispodias au livre 8 (8.86.9), mais il y apparait comme ambassadeur des Quatre-Cents; c'est au livre 6 qu'il apparait comme commandant militaire (6.105.2), soit au printemps 414, époque de la représentation des Oiseaux. Étant donné que Laispodias est également mentionné au livre 8, l'inexactitude de la référence résulte d'une confusion plutôt que d'une erreur de copie. Allusion (indication ponctuelle tirée du texte). 30) Schol. Lys. 453b [vet]. ttnap&c; Àoxot. "Apyé>t&povtà Aa1emvœv tOllC&V tl;&tpyaa8at ô 7tOlT)tTIÇÀoXOlyàp 001e&icri.ttnap&c; tv Aa1e&6atµoviq..àUà t:', °E&>Àoç~ Iivtc;, "Apiµac;, IlÀoàç, MtaoatT)ç. ô ôt 8outruôiô11c;Ç' cpT)cri., xo,plç tlbv VllCTJpttlbv. r (éd. J. Hangard, 1996, p. 25). Lysistrata déclare qu'elle a quatre bataillons de femmes bien années. La scholie met en balance le nombre des bataillons lacédémoniens : non quatre, mais cinq. «Mais Thucydide dit qu'ils étaient six, sans compter les nikérites•. Th. 5.68.3 dit que, sans compter les Skirites, sept bataillons furent engagés dans la bataille (Mxoi µtv yàp tµaxovto txtà civ&uIIClpttlbv ôvtcov tl;aKoaicov). Paraphrase inexacte(?).
LES CITATIONS DB THUCYDIDE DANS LES SCHOLIBS D'ARISTOPHANB
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31) SchoL Lys. 619a [vet]. tf\ç 'Imou wpavviooç r. Tt:aaapcov ovtcov t&v Ilt:1t11piaaav toùç 'Epµ~. 6tt: tn:\ l:11Ct:Â.iav tµt:Uov 11:Â.Etv tttl>v tt:aaapcov tflç Ka8tat:coçtoutou toO ôpaµatoç. tT1Vôt attiav tŒUîTIV oi µtv totç n:t:p\ 'MnP1aôriv n:poatypacpov, ci>Ç 0ouKUôiôriç· oi ôt Kop1v8io1ç,ci>Ç1Â.oXOpoç.µ6vov ôt cprimv où 1tt:p11eon:flvm tov 'AvôoKiôou 'Epµflv.) BarNeap (éd. J. Hangard, 1996, p. 49). Le coryphée conseille aux hommes en érection de mettre leurs manteaux pour éviter d'être vus de l'un des Hermocopides. Le scholiaste explique: «les Hermocopides: c'est que les Hermocopides avaient coupé les extrémités des Hermès quand on allait s'embarquer pour la Sicile (quatre ans avant la représentation de cette pièce; certains en attribuèrent la responsabilité à Alcibiade et aux siens, selon Thucydide, d'autres aux Corinthiens, selon Philochore; et il affirme que l'Hermès d'Andocide ne fut pas mutilé)». Th. 6.28.1-2 : mise en cause d'Alcibiade dans les affaires de sacrilège. Résumé. 33) Schol. Th. 697. tpoxatov· 1tpon:t:p1µtvcoç àvayYO>t&po1ç1to1ritatç (éd. Dübner, p. 268-269). Le commentaire porte sur l'accentuation du mot tponatov / tp61ta1ov, donnée pour identique (propérispomène) chez Aristophane et chez Thucydide, alors qu'elle est différente (proparoxyton) chez les poètes plus récents. Th. : le mot est effectivement propérispomène chez Thucydide, comme, du reste, dans la littérature attique classique en général. Citation d'un terme isolé. 34) Schol Ra. 540h [vet Ald]. Il s'agit de commenter une allusion à Théramène : après une longue notice rassemblant des indications de nature et d'origine diverses, la scholie précise: 6 8ou1CUôi611c; ôt aùtov tv npcincptna1vt:t VE8Barb(Ald) (éd. M. Chantry, 1999, p. 81) «Thucydide fait son éloge au livre 1». Th. 8.68.4 : Théramène «fut au premier rang de ceux qui renversaient la démocratie, c'était un homme qui ne manquait ni d'éloquence ni de jugement» (tv totç çuyKataÂ.UOUta,v àptcnc:El,xtµ,tE dv6pa KlatOV tnl 8alanav. add. Musurus ( ... ) (éd. M. Chantry, 1996, p. 27). Le commentaire porte sur l'emploi des cas: «les Attiques emploient de la sorte l'accusatif au lieu du génitif, comme Thucydide 57 : "si ces propositions t'agréent en quelque façon, envoie sur la côte un homme de confiance"• Th. 1.128.7 : Ei oov ti aE to6tmv àptmcE1, ntµxE dv6pa ,nmov t,d OcUaaaav. Citation littérale (11 mots). 0
36) Schol. Pl. 445b [vet]. napà noÂ.6 R. naw noÂ.6· ,cal 8outru6Ui11çtv napà 1toÂ.6RVE8BarbAld. (éd. M. Chantry, 1tpcotcp·1eal tvi1CT1aavKEp1CUpato1 1994, p. 86).
ll s'agit d'un commentaire linguistique, portant sur l'expression Kapo noÂ.6: «"grandement", comme chez Thucydide au livre 1 : "et les Co~ns sortirent largement vainqueurs"•. Th. 1.29.5 : ,cal tvi1CT1aavKEp1CUpatOl xapà noÂ.6. Citation littérale (5 mots). 37) Schol. Pl. 470cP [rec]. ( ... ) 1eal 8ou1CU6i6t11eatapxàç toO tpitou n,ç cnry-ypacp1'ç. 1ealEi µtv auµPf\,; ,n:tpa· Ei 6t µri, M1tuÂ.Ttvaio1ç Eindv vaOçtE 1tapa600va1 ,cal n:ixTI 1ea8sÂ.dv.Ald (Mus.) (éd. M. Chantry, 1996, p. 125). La scholie commente l'ellipse des v. 469-470 en renvoyant à d'autres exemples, dont une phrase de Thucydide: «chez Thucydide aussi, au début du livre 3 : 'si la tentative réussissait ... ; sinon, on devait ordonner aux Mytiléniens de livrer leurs navires et d'abattre leurs murs'•. Th. 3.3.3 : 1ealtlv µtv !;uµPf\ ,; ndpa· Ei 6t µ11,Mut1Â.Tjvaio1ç Eindv vaOçtE 1tapa600va1 1ealtEiXTI1ea8EÂ.dv. Citation littérale (16 mots). 38) Schol. Pl. 917c [rec]. 1ea8iv.icai 8ouKUôi6riç· âp!;aµEvoç Eù8i>ç1ea81ataµtvou toO noÂ.tµou. PacVa (éd. M. Chantry, 1996, p. 237). ll s'agit d'expliquer le sens du verbe ica8iatriµ1 : «ica8iatriµt : je fais. 1ea8{ataµat : j'agis sur quelque chose. Et «la guerre s'engage• (ica8{atatm 6
S6
Le début de la scholie est ancien, mais l'additif tiré de Thucydide est
récent. Il faut comprendre: «de même que Thucydide emploie dans cet exemple l'accusatif au lieu du datif• : dans le texte d'Aristophane, l'accusatif est employé (au lieu du génitif) avec ,rov86.voµa1;dans celui de Thucydide, l'accusatif est employé (au lieu du datif) avec àptcncEt. 57
LES CITATIONS DE TifUCYDIDE DANS LES SCHOLIES D'ARISTOPHANE
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x6Â.6µoç») : «elle se déclenche», comme chez Thucydide: «ayant commencé dès l'engagement de la guerre». Th. 1.1.1 : 8omcoo{6ric;( ... ) çuvtypa,v& tOV 7t6Â.&µov( ... ) àpçaµ&voç &t>8ùç 1ea817tapx6vtcov6t à&l not& àpyup{ou tn1011µou tça1CtÂ.atatflc; à1epo71:6Â.tmc; 1eal tàU.a oiico60µ11µata, 1eai te; Ilotl6a1av tnavriÂ.0>8T). RVE8N BarbAld (éd. M. Chantry, 1994, p. 190). Chrémyle propose au prêtre d'installer Ploutos là où il était, «comme gardien à jamais de l'opisthodome de la déesse•. La scholie porte sur l'opisthodome: elle explique d'abord que c'était l'endroit où l'on déposait le trésor et poursuit: «on faisait monter l'argent à l'acropole et c'était là qu'on le gardait, comme le dit en ces termes Thucydide au livre 2 : "tandis qu'ils avaient en réserve sur !'Acropole six mille talents d'argent monnayé (trois cents de moins que la somme maximale, sur laquelle on avait prélevé les sommes nécessaires à la construction des Propylées de l'Acropole et à celle d'autres édifices, ainsi qu'au financement de l'expédition de Potidée)"•. Th. 2.13.3. unapx6vtcov 6t tv 't1'à1epon6Â.61ln t6't& àpyup{ou tm011µou tçaic1ax1Â.icovtal.avtcov {tà yàp nÂ.dara tp1a1eocrlcovàno6tovta µvp,a tytv&-ro, àcp· covte;tt tà npom.'>Â.ata 'tflc;àicpon6Â.tmc;ical taÂ.Â.aoilco60µ11µata icai te; Ilotd6a1av ànavriÂ.0>8T)). Citation littérale (34 mots).
MICHEL CASEVITZ
SUR LES FRAGMENTS DES HISTORIENS GRECS, PARTICULIÈREMENT DIODORE DE SICILE
La connaissance de la littérature grecque est tributaire des aléas
de la transmission des textes: d'où se fait-il que des textes soient parvenus à l'état de texte continu et non mutilé, formellement, et d'autres dans un état fragmentaire et souvent non autonome, mais dépendant d'autres textes? En outre, de la même œuvre, il anive qu'une partie soit intacte et l'autre mutilée ou manquante. L'exemple de la Poétique d'Aristote est bien connu, encore plus depuis Umberto Eco, mais celui de Diodore de Sicile est aussi remarquable : l'œuvre de Diodore comprenait quarante livres; la première pentacle est préservée, mais la deuxième Oivres 6-10) est à l'état de fragments, sans que les manuscrits présentant les livres entiers, avant ou après, en aient la moindre trace. De même, la deuxième décade est complète (livres 11-20), mais les suivantes ne sont que bribes. On peut faire une remarque analogue pour l'œuvre historique de Denys d'Halicarnasse, dont les livres 12 à 20 sont à l'état de fragments', mais plus homogènes que les fragments de Diodore 2 • Peut-on expliquer cet état de choses? Il faut examiner d'abord les conditions de transmission des textes, notamment des historiens 3• La matière sur laquelle on écrivait et éditait les textes a son importance, le rouleau de papyrus : format des feuilles et longueur du rouleau ont conditionné la conservation. Le Banquet de Platon tenait sur un rouleau (= soixante-dix pages imprimées environ, le papyrus était d'une longueur exceptionnelle, sept mètres). La division Voir E. Cary, introduction de l'édition dans la collection Loeb, 1950. Voir ci-dessous l'appendice pour les éditions des fragments de Diodore. 3 Quelques pistes bibliographiques générales: J. lrigoin, ùs manuscrits d'historiens grecs et byzantins à 32 lignes, dans Studia codicologica, ed. K. Treu, Berlin, 1977, p. 237-248; P. Lemerle, Le premier humanisme byzantin. Notes et remarques sur enseignement et culture à Byzance des origines au X• siècle, Paris, 1971; R. Pfeiffer, History of Classical Scholarship {rom the Beginnings to the End of the Hellenistic Age, Oxford, 1968; Id., History of Classical Scholarship {rom 1300 to 1850, Oxford, 1976; L. D. Reynolds et N. G. Wilson, D'Homère à Érasme. La transmission des classiques grecs et latins, Paris, 1984, traduction de Scribes and scholars : A Guide to the Transmission of Greek and Latin Literature, Oxford, 19742;N. G. Wilson, Scholars of Byulntium, Londres, 1983. 1
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Michel Casevitz, Université de Paris 10-Nanterre.
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MICHELCASEVITZ
en livres de l'œuvre d'auteurs tels qu'Hérodote, Thucydide, - pour parler des historiens, objets d'intérêt ici - correspond à la division en rouleaux. Le livre 1 de la Bibliothèque historique de Diodore est divisé en deux parties, elles doivent correspondre aussi à la longueur des rouleaux. Le parchemin ne fut pas d'un usage courant avant les premiers siècles de notre ère. Et le rouleau a été la forme conservée pour longtemps avant d'être remplacé par la forme du codex (qui s'imposa au IIIe siècle apr. J.-C. et triompha au JVe), en papyrus ou en parchemin d'abord et puis uniquement en parchemin, avant d'être en papier. La forme du codex contribue à préserver l'intégralité du texte, puisqu'une table des matières ou un sommaire peuvent être dressés, une numérotation des pages établie, et également parce que le codex pouvait contenir beaucoup de textes, les œuvres maîtresses d'un auteur, un corpus de textes apparentés aussi. Ce qui contentait des « hommes enclins à condenser leur héritage intellectuel sous une forme maniable 4 ». Mais la transcription des rouleaux en livres a entraîné des pertes, car on ne recopiait que ce qui était très demandé, et comme les rouleaux finissaient par être détériorés, les œuvres complètes d'un auteur ne subsistèrent pas toujours, si certains rouleaux n'étaient pas disponibles au moment voulu. Nous sommes donc dépendants des conditions de transmission bien connues : si l'on excepte les textes de l'Antiquité tardive, nous n'avons pas de manuscrits contemporains de l'auteur. On doit se contenter de manuscrits tardifs qui dépendent de manuscrits euxmêmes copiés sur des manuscrits plus ou moins proches de l'auteur, etc. Et les papyrus, mutilés, sont rares. Ainsi, pour Pausanias par exemple, tous les manuscrits qui sont dits de base sont postérieurs à 14505 et dérivent d'un manuscrit perdu, qui appartint à Niccolô Niccoli et devait n'être pas postérieur au XIIe ou XIIIe siècle, sans qu'il y ait de papyrus pour cet auteur. Pour Diodore de Sicile, la situation est un peu plus favorable : les plus anciens manuscrits sont du X• siècle. La date de l'auteur ne conditionne pas cependant la nature et le mode de la tradition ni sa valeur; ainsi l'œuvre de Sappho n'est connue, sauf quelques bribes, que par des papyrus, donc tardifs et en mauvais état. La transmission ne s'est pas faite indifféremment selon les auteurs, le genre où on les classait. La philologie ancienne, au cours des siècles, s'est exercée pour favoriser la transmission mais aussi
L. D. Reynolds et N. G. Wilson, D'Homère à Éras~ ... , p. 24. Voir A. Diller, The Authors named Pausanias, dans TAPhA,86, 1955, p. 268279; Pausanias in the Middle Ages, dans TAPhA, 86, 1956, p. 84-97; The Manus· cripts of Pausanias, dans TAPhA, 87, 1957, p. 169-188 (ces articles sont repris dans A. Diller, Scripta minora, Amsterdam, 1983). 4
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SUR LES FRAGMENTS DES IIlSTORIENS GRECS
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pour l'altérer. La conservation des textes anciens est fonction des époques : elle est historicisée. Avec le IV" siècle et le christianisme qui finit par triompher à la fin du siècle, se posa le problème de la conservation des textes païens. De plus, il me parait que la transmission des textes grecs intéressant les Romains est un cas singulier : les historiens grecs d' époque romaine ont dû avoir un sort particulier, en fonction du contenu susceptible d'éveiller l'intérêt du public romain. Cela vaut, entre autres, pour Diodore de Sicile (Ier siècle av. J.-C.) comme pour Denys d'Halicarnasse (même époque), mais aussi pour tous les historiens grecs des premiers siècles, et par exemple pour un auteur comme Pausanias, qui écrivait pour les hommes de son temps désireux de connaître l'état de la Grèce et ce qui restait de la Grèce classique. Mais si, après le III" siècle, on a fait tant de choix dans la littérature classique qu'on a beaucoup réduit la taille du corpus, il n'en reste pas moins que sont encore lues des œuvres qui n'étaient pas incluses au nombre de ce choix scolaire. C'est si vrai que, au IX" siècle encore, en pleine «renaissance byzantine», favorisée par l'essor de la minuscule grecque, dont le premier témoignage, les Évangéliaires Uspensky (Petriburgensis gr. 219), date de 835 - et elle existait sans doute depuis un demi-siècle -, popularisée à partir du Stoudios, monastère de Constantinople, Photius (vers 810-893) lisait encore des auteurs dont il ne reste rien aujourd'hui: vers 855, avant son voyage auprès du gouvernement arabe, il rédige son catalogue, qui fait état de 280 codices, dont 122 pour les auteurs profanes. Pour Diodore de Sicile, on sait ainsi qu'une bonne partie de ce que cet auteur écrit sur la Perse ou 11nde provient de Ctésias ... Mentionnons aussi les deux codices de Photius consacrés à Diodore. Photius catalogue et résume ses lectures concernant trente-trois historiens (les plus nombreux étant des auteurs profanes), dont, pour une vingtaine, les œuvres sont perdues aujourd'hui. Au IX" siècle, Aréthas (vers 860935), qui fut archevêque de Césarée de Cappadoce, avait sans doute un exemplaire de Pausanias (dans le Parisinus gr. 1410, f. 142r, manuscrit de base, une scholie mentionnant une inscription de Patras en l'honneur de Nicagora victorieuse aux jeux olympiques, épreuves féminines, semble provenir d'Aréthas); pourtant il ne s'intéresse pas à l'histoire. À la fin de l'époque byzantine, après la mort d' Aréthas, il faut faire une grande place à l'empereur Constantin VII Porphyrogénète (913-959), qui rédigea des traités sur l'art de gouverner, compilations encyclopédiques, très importantes pour nous, car elles puisent à diverses sources historiques, souvent perdues désormais. À la même époque sans doute, la Souda, dictionnaire et encyclopédie à la fois, transmet des renseignements souvent utiles, et elle peut fournir
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MICHEL CASBVITZ
un état de texte dans les citations qui peut être précieux (je pense à Pausanias, par exemple : le texte est de loin antérieur aux manuscrits dont nous disposons). C'est du Xe siècle que datent les plus anciens témoins pour quelques auteurs : il en est ainsi, par exemple, pour les historiens tels Polybe (copié par le moine Ephrem en 947, c'est le Vat. gr. 124) et Diodore, comme nous l'avons dit plus haut, ou bien sOr Denys d'Halicarnasse (pour ne parler que des derniers livres des Antiquités romaines, c'est le .cas du Par. Suppl. gr. 607, qui contient des fragments du livre 20, concernant la bataille d'Ausculum entre Pyrrhus et les Romains). On sait que les grands noms ensuite, au XIIe siècle, furent Eustathe (actif entre 1160et 1192environ), Jean Tzetzès (vers 1110-1180) et Michel Choniatès, son correspondant, derniers Byzantins, qui ne se sont pas beaucoup intéressés à l'histoire. On trouve un fragment de Diodore de Sicile 6,3 dans Eustathe (Commentaire de l'Iliade) et cet auteur le mentionne rarement. Les auteurs eurent encore à subir de gros dommages : la JVe Croisade s'achève en 1204 par la prise et la mise à sac de Constantinople, et les bibliothèques souffrirent énormément. Beaucoup des textes rares encore connus des grands noms mentionnés ci-dessus disparurent, sans qu'on en trouve trace lors du rétablissement du gouvernement byzantin, après la chute du royaume latin, en 1261. « Sans les Croisés, ces volumes auraient fort bien pu être acheminés vers l'ouest par les innombrables voyageurs et bibliophiles italiens qui se rendaient en Grèce et en rapportaient des manuscrits 6 •. La prise et le sac de Constantinople en 1453 n'ont pas détruit beaucoup de textes importants; simplement pour nous, le seul texte important détruit par les Turcs, comme l'atteste Constantin Lascaris', c'est justement un exemplaire complet de Diodore. La fin du XIIIe et le début du XJVcsiècles furent malgré tout de bonnes époques pour la philologie byzantine s'exerçant sur les classiques, mais ni Planude (1255-1305),qui fit la liaison entre Byzance, où il tenait une école, et l'Occident (il fit une ambassade à Venise), ni Triclinius (qui résida à Thessalonique de 1305 environ à 1320) ne s'intéressaient aux historiens (Planude a dressé un catalogue des œuvres de Plutarque, cela ne suffit pas pour le dire intéressé par l'histoire). Byzance en définitive a bien aidé à la survie des auteurs classiques et cela jusqu'au moment où des érudits d'un autre pays purent travailler sur les textes arrivés en Italie par les visiteurs et les
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L. D. Reynolds et N. G. Wilson, D'Homère à Erasme ... , p. 48. PG, tome 161, col. 918.
SUR LES FRAGMENTSDES HISTORIENSGRECS
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bibliophiles. L'Orient hellène fut la source du fonds italien de manuscrits, surtout dans le dernier siècle de l'Empire de Byzance, qui n'en garde plus pour ainsi dire. Hélas, les auteurs grecs qui avaient composé de l'histoire romaine avaient beaucoup souffert: ils n'étaient pas des classiques, et l'histoire romaine ou l'histoire des temps non-classiques n'avaient pas la faveur des érudits ni des bibliophiles que leur go0t portait surtout vers de grands auteurs ou des auteurs dont le sujet était l'époque classique ou les auteurs classiques. De ce point de vue, on peut dire que Denys d'Halicarnasse, critique et historien, a été mieux traité que Diodore de Sicile, «seulement historien•, si je puis dire. En règle générale, toute œuvre monumentale risque d'être parvenue altérée ou abrégée ou bien altérée et abrégée. Cela ne vaut pas pour les œuvres dites canoniques ou devenues classiques, ainsi pour Homère, pour Platon et pour Virgile par exemple. Beaucoup d'historiens entrent dans cette catégorie d'œuvres dites monumentales. Genre, sujet et taille de l'œuvre, go0t des différentes époques de transmission et de critique philologique, voilà qui explique la perte dans les œuvres historiques autrefois et longtemps mésestimées. Il faudrait encore ajouter une raison à la perte d'œuvres entières, dans le genre historiq1=1e: aucun poète ne rend caduc un poète précédent, aucun orateur, aucun philosophe, mais un historien peut piller un historien qui l'a précédé - il n'y a pas de notion de propriété littéraire absolue, ni de plagiat - et l'auteur qui, dans ce domaine, plagie avant de poursuivre l'œuvre historique pour la mener plus loin dans le temps et même jusqu'à son temps rend inutile l'œuvre du devancier: pourquoi conserver Ctésias, Éphore ou Timée, puisqu'il y a Diodore, auteur qui au demeurant se flattait (voir sa préface générale) d'embrasser non seulement toute l'histoire comme Éphore, mais de plus les temps d'avant l'histoire réinsérant la mythologie dans l'histoire - et tous les lieux - grecs et barbares - et d'aboutir jusqu'aux temps contemporains? Pour les érudits et la transmission des textes qui les intéressèrent, l'universel le plus récent - la Bibliothèque universelle, compilation et réunion de tous les ouvrages sur tous les temps et tous les lieux - a tôt tué le particulier (histoires locales, monographies particulières) ou l'ancien universel, avant que cet ouvrage totalisant ne subisse luimême les outrages de la perte partielle. Diodore prend soin de souligner chaque fois le début et la fin de ses livres et tente de se prémunir contre les altérations, mais il n'échappe pas lui-même aux mutilations. Pour l'histoire ancienne des Romains, je me demande si, comme beaucoup d'historiens et annalistes de langue latine, Denys d'Halicarnasse n'a pas été victime de la comparaison avec TiteLive, si l'on excepte le «morceau de choix• que constitue le récit des toutes premières origines de Rome.
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MICHELCASEVITZ
Mais puisque nous venons d'expliquer, au moins en partie, comment et pourquoi des parties d'œuvres historiques, en prenant Diodore pour exemple, ont disparu, il faudrait maintenant expliquer comment et pourquoi des fragments ont subsisté, dans une tradition totalement différente des œuvres ou parties conservées. Les fragments de Diodore fournissent un très bon exemple. La source principale des fragments est d'ordinaire la citation, dont la fréquence et la variété dépendent de la notoriété de l'auteur, dès son époque et ensuite. Or Diodore n'a jamais été considéré par les Anciens comme un auteur majeur pour l'histoire des temps classiques bien s0r- mais le sujet a d0 aider à sa conservation, on l'a w - et, quant à l'histoire pré-classique et à l'histoire après Alexandre et les Épigones, ce sont elles qui ne furent pas en honneur, d'où l'absence de citations par les auteurs anciens. Il n'est d'ailleurs pas exclu que Diodore soit cité mais non nommé dans des œuvres ultérieures, vu qu'il n'était pas renommé, ce qu'il faut cependant nuancer, car (voir ci-dessous l'appendice), on trouve avec son nom la mention 6 crocpta-roç chez Jean d'Antioche[= Malalas], et Eusèbe' dit: 6 l:uceÂ.1ci>'t11ç â16ôcopoç, yvmp1µco-ra-roç àVflp -rote; 'Ell11vmv Â.oytID'tCI'totç. Il n'en reste pas moins vrai que, comme beaucoup d'auteurs, il pouvait être utilisé sans être identifié (lui-même ne s'est pas gêné et, redisons-le, ce n'était pas scandaleux); aujourd'hui encore, alors qu'on est plus sourcilleux sur les droits des auteurs et les droits d'auteurs, on pille souvent des ouvrages dits de vulgarisation ou des encyclopédies sans citer ses sources. Inversement, il n'est pas sOr qu'on ait identifié tous les fragments de Diodore; ainsi récemment Édith Parmentier a pu repérer des lignes de Nicolas de Damas dans les œuvres de Flavius Josèphe 9 • Cela étant, dans l'Antiquité Diodore de Sicile est cité par Photius, qui résume plus souvent qu'il ne cite. Photius (codex 70 et surtout codex 244) est très intéressé par des récits qui heureusement nous sont essentiels : ainsi ses récits sur les Juifs aux livres 34-35 et 40; son récit de la première révolte des esclaves (livres 34-35,2,1-24) peut être confronté à une autre source de fragments, et la confrontation prouve qu'il condense beaucoup. Au moins, il donne un important aperçu du contenu de livres manquants (21-40). Il est curieux cependant qu'à la fin du codex 244, il fournisse un récit des événements qui suivent l'assassinat de Pompée (393a 11jusqu'à la fin, au milieu d'une phrase); R. Joly (éditeur dans la Collectiondes Universités de France) rapporte qu'il a demandé à F. Walton, l'éditeur dans la 1. p. 24, l. 18 ed. Mras. Thèse sur les fragments de Nicolas de Damas soutenue à Paris 10 - Nan• terre, 1998; madame Parmentier doit en publier une version remaniée dans la collection I.A.Roue à Livres, aux éditions Les Belles-Lettres (Paris). 8
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PE 1.6.9 =
SUR LES FRAGMENTS DES IUSTORIENS GRECS
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collection Loeb, pourquoi il n'a pas donné la fin du codex: la réponse qui lui parvint, en juillet 1968, fut que cela dépassait les limites annoncées par Diodore de Sicile, et d'ailleurs Walton ajoutait qu'il n'avait aucune idée de l'origine de cet «appendice»; effectivement, au livre 1, Diodore disait être allé dans le récit jusqu'à l'expédition de César en Gaule. Je me demande si on n'a pas là, - plutôt que d'aller accuser Photius de s'être «fourni• auprès d'un autre auteur -, une preuve des vains efforts de Diodore pour «baliser• son ouvrage : un continuateur a dO, avant Photius, prolonger le récit de Diodore, et Photius ne serait donc pas de mauvaise foi. .. Pour Denys d'Halicarnasse, Photius (codex 83) est de peu de secours; il mentionne les vingt livres d'Histoire romaine, avec jugement sur le style; dans le codex 84, il dit avoir lu un sommaire en cinq livres du même auteur, qu'il situe avant Dion Cassius et Appien. Revenons à Diodore: il y a aussi, surtout pour les livres 6-10, quelques fragments tirés des Pères de l'Église (voir appendice) ou d'écrivains byzantins, surtout Georges Syncelle, et aussi Tzetzès, qui aime l'exotique et le pittoresque. Je viens de faire allusion à une autre source, il s'agit de la plus importante source. C'est grâce aux excerpteurs, en l'occurrence principalement Constantin VII Porphyrogénète (première moitié du Xe siècle), que beaucoup de fragments, d'inégale longueur, sont conservés, dans quatre ouvrages conservés (sur cinquante-trois): excerpta De legationibus, De uirtutibus et uitiis, De insidiis, De sententiis. La nature des fragments préservés est donc fonction du sujet que ces quatre traités entendaient regrouper - sans que la division en livres soit indiquée. Sans doute les traités perdus devaient-ils contenir aussi des fragments, concernant donc d'autres sujets. Les excerpta Constantinia nous font donc connaître quelques faits concernant la diplomatie (un fragment 10 entre dans la première catégorie, celle des ambassades romaines auprès des peuples, les autres concernent les ambassades des peuples à Rome), beaucoup d'histoire militaire (les stratagèmes), l'histoire morale. Évidemment, ce qui a été conservé est surtout l'extraordinaire, le paradoxal, le remarquable, l'exemplaire, mais il semble assez fidèle, là où on peut le confronter. Il manque l'ordinaire de l'histoire, c'est-à-dire l'histoire ordinaire. Mais je ne veux pas marcher sur les brisées de Bernard Flusin 11• Des fragments des livres 21-26 sont connus comme les eclogœ Hœschelianœ. Indépendants de la collection constantinienne, ces fragments indiquent le livre d'où ils sont tirés. Le sujet privilégie le
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D. S. 21.15.2 Voir dans ce volume B. Flusin, Les Excerpta constantiniens : logique d'une anti-histoire, p. 537-559. 11
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récit plus que l'exemplaire, l'intérêt porte surtout sur les affaires de Sicile, avec des passages étendus. Mais ces fragments sont clairement des résumés du récit originel, et surtout il semble bien que l'abréviateur ait beaucoup trahi la langue elle-même de l'auteur - vocabulaire et style. Naguère P. Goukowsky avait commencé d'étudier les fragments et il avait bien montré en séminaire, l'ineptie, le manque d'attention et l'infidélité de l'excerpteur. Hœschel avait publié une partie des eclogœ de legationibus en 1603, la première partie ayant été publiée par Fulvio Orsini (Vrsinus) en 158212; Rhodoman avait aidé Hœschel pour cette édition mais il n'a pas inclus dans sa propre édition (1604) les fragments de Diodore publiés par Hœschel (c'est Wesseling qui les a réunis, tous ceux des excerpta de legationibus, en 1746, outre ceux de Photius, déjà publiés par H. Estienne en 1559 et par Rhodoman). Nos excerpta dits Hœscheliana ont été publiés par Hœschel en appendice aux excerpta de legationibus dont il continuait l'édition. Hœschel dit seulement 13 : His corollarium atldidimus Eclogas librorum Diodori Siculi amissorum, quas e Codiœ Ludouici Alemanni Florentini doctiss. R. Thomson Anglus mecum amict communicauit. Mais la même année (1603), il écrit à un ami, en recommandant Rhodoman qui suam mihi àyz{voiav ,cai svarox{av probauit in libro tcpsafJsid>vtctpi, quod constabit cum notas edidero; nunc enim textus, quem uocant, impressus est modo (cf. Wesseling qui cite cette lettre). Or jamais Hœschel n'a mis de notes, et on n'a plus jamais entendu parler du manuscrit original ni de la copie de Thomson : nul ne sait d'où Hœschel a tiré ses fragments. On est donc très méfiant sur les «fragments Hœschel». Je me suis attaché ici aux fragments des livres 21-40, mais les fragments des livres 6-10 ne posent pas autant de problèmes. Ils sont surtout empruntés aux auteurs byzantins, excerpta Constantinia ou citateurs (voir ci-dessous l'appendice). Les spécialistes de Denys d'Halicarnasse trouveront, j'espère, matière à méditer sur la nature et aussi l'ordre des fragments de leur auteur en songeant au destin des fragments de Diodore, dont beaucoup sont épars (puisque les excerpta ne disent à peu près rien de leur ordre et qu'ils sont en plus dispersés dans quatre recueils) et beaucoup aussi sujets à caution. Michel
CASEVITZ
12 Voir dans ce volume R. Mouren, La redécouverte des fragments~ Denys..., p. 27-84. 13 Voir l'introduction de Francis R. Walton, tome 11 de Loeb, 1957, p. XII.
Appendice
LES SOURCES DES FRAGMENTS DE DIODORE
Un premier ensemble de fragments constitue ce qu'il reste des livres 6 à 10; on les consultera dans l'édition procurée par F. Vogel. dans la collection Teubner (Diodorus, Bibliotheca Historica, t. 2, 1890, réimp. 1985, cf.la praefatio, t. 1, p. 5-10), ou dans l'édition procurée par C. H. Oldfather, dans la collection Loeb (Diodorus of Sicily, t. 3, 1939, réimp. 1952; t. 4, 1946, réimp. 1961). Mais ces éditions ont vieilli (Vogel n'a pu connaître, par exemple, l'édition moderne des excerpta constantiniens) et les textes qui s'y trouvent doivent pour beaucoup être vérifiés dans les éditions postérieures à ces deux ouvrages. Nous proposons ci-dessous une mise à jour et quelques précisions. L'édition des fragments des livres 21-40 publiée dans la collection Loeb par F. R. Walton (tome 11, 1957 et tome 12, 1967) étant plus commode et plus neuve, il ne nous a pas paru nécessaire de nous livrer au même travail. On sait par Diodore lui-même (1.4.6) que «les six premiers livres embrassent les événements et les mythologies antérieurs à la guerre de Troie, les trois premiers concernant les Barbares, les trois suivants à peu près Tp{TQ> T1'c;aûToO ic:nopiac; Ta6t (paragr. 35). Le fragment 6.1, est au contraire ainsi présenté : ~t tcaTà À.t~tv q,ao,crov(paragr. 52), et il est possible qu'ici Eusèbe cite uerbatim. Ce premier fragment figurait déjà dans l'édition Estienne (1559). 2. Jean Malalas Chronogr. p. 54, ed. Dindorf, Bonn, 183P. Six lignes. Le nom de Diodore y figure aussi, et le fragment commence ainsi: Iltpl cov (se. 3 Ta0Ta, ôn 8e«>v)tv Tate;m,yypaq,atc;aûToOMytt tca{6 .!1166ropoc; 6 aocpci)TaToç Nous suggérons, en nous fondant sur les constantes du style de l'auteur, d'ajouter, avant axe6ov, 1tcivtaç. 2 La référence donnée dans l'édition Vogel est erronée. 3 Diodore de Sicile est dit aussi 6 00q,mtatoc; dans les deux autres passages présentés par Malalas. 1
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En admettant qu'il s'agit bien de notre Diodore (rien ne s'y oppose, puisqu'Archiloque aussi a droit aussi au titre de aocpcôtatoç, p. 68), il nous paraît que ce court texte est en réalité un résumé des récits de Diodore au début de son œuvre, par exemple en 1.17, sur les dieux qui furent en vérité des hommes particulièrement bienfaisants et conquérants. 3. Sur les Titans Xanthos et Balios. Fragment cité par Eustathe Comm. ad Homeri Jliadem à Il. 19.400 (ed. M. van der Valk, vol. 4, Leyde, 1987)4 • 4. (latin) Sur le couronnement de Zeus : Tertullien De Corona 13, ed. Marra, 1927. 5. Jean Malalas Eclogœ e cod. Parisinus gr. 1336, ed. J. A. Cramer, Oxford, 1839, (réimp. Hildesheim, 1967), p. 236. La chronologie des rois argiens est aussi évoquée, avec mention de Diodore, dans la Chronographie, p. 68. 6. Cinq extraits constantiniens, commençant comme de juste chacun par 6n, sur les Dioscures, Épôpeus roi de Sicyone, Sisyphe, Salmôneus (Excerpta De uirtutibus et uitiis, 2, 1, p. 210-211, Büttner-Wobst et Roos, Berlin, 1906). 7. Sur l'histoire de Salmôneus, extrait du manuscrit de Hambourg T Odyssée 11.236: A. Ludwich a édité ce fragment (RhM, 34, 1879, p. 619) dont la 1.. partie s'accorde avec 6.4-5, et «toute la teneur sent Diodore• (totus tenor sapit Diodorum), c'est ce que dit Vogel dans son apparat. 8. 1-2. Deux fragments constantiniens, qui se trouvent à la suite des précédents, Excerpta De uirtutibus et uitiis, 2, 1, p. 211, Büttner-Wobst et Roos, Berlin, 1906. Le premier parle d'Admète et d'Alceste, l'autre de Mélampous. 9. Ce fragment constantinien est dans le De insidiis, ed. C. de Boor, Berlin, 1905, p. 197. Sur Bellérophon. K. t. À....
Livre 7 Comme indiqué en 1.4.6 (cf.aussi 13.1.2 et 14.2.4), le récit de Diodore, à partir du livre 7, traitait des faits à partir de la guerre de Troie: «Dans les onze livres après les six premiers, nous avons rapporté les koinai praxeis après la guerre de Troie jusqu'à la mort d'Alexandre•. 1. Tzetzes, Chi/. 12, Hist. 399, 173-182 Leone; on citera désormais d'après l'édition procurée par P. A. M. Leone (Joannis Tzetzœ Historiœ, Naples, 1968). 2. Anecd. Paris., Cramer, p. 227. 3. Fragment constantinien, De insidiis, p. 197 (il suit le fragment 6.9). 4. 1-6 : fragment constantinien, Excerpta de uirtutibus et uitiis, p. 211(ce fragment suit immédiatement le fragment 6.8.2). 5. Eusèbe de Césarée Chronique, fragm. 5, avec aussi G. Syncelle (Ecloga chron., ed. A. A. Mosshammer, Leipzig, 1984, p. 229), dont la version est préférée par les éditeurs, puis Eusèbe encore. On concultera la Chronique d'Eusèbe dans les versions traduites de l'arménien soit en latin (cf. Vogel) soit en allemand (cf. Walton, adoptant l'édition de J. Karst, Leipzig, 1911).
4
Eustathe fait ailleurs allusion à Diodore, cf par exemple sur Aùas, ibid.,
vol. 1, p. 18.
SUR LES FRAGMENTS DES msrORIENS
GRECS
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6. De insidiis, p. 197 (se trouve dans les Excerpta à la suite de 7.3). 7. De uirtutibus et uitiis, p. 211 (se trouve dans les Excerpta à la suite de 7.4). 8. Eusèbe de Césarée Chronif/ue, Rois de Lacédémone, «d'après les livres de Diodore•· 9. G. Syncelle, Ecloga chron., p. 209-210. 10. De uirtutibus et uitiis, p. 29 (se trouve dans les excerpta à la suite du fragment 7.7). 11. Eusèbe de Césarée Chronif/ue 1, p. 225 : «des écrits de Diodore brièvement sur l'époque des Thalassocrates ... et liste de peuples avec la durée de leur thalassocratie, jusqu'à l'expédition de Xerxès•. 12. Fr. 1. Dans le De uirtutibus et uitiis, p. 212, l'extrait s'arrête après fmt taô&, avec mention ZHTEI EN TruIlEPI rNOMON. Dans le De sententiis, p. 272, l'extrait commence, après lacune, à ft ·oroµal, roAt>1coOpy& (dans le texte d'Hérodote 1.65, qui cite l'oracle pythien, on lit fÀ.1toµalau lieu de ft' oCoµm). Chez Galien (Adhortat. ad artes addiscendas 9) et dans l'Anthologie grecque, 14.69, il manque les deux derniers vers. Eusèbe de Césarée (PE 5.27.8 = Oinomaos, fr. 10 Mullach) cite l'oracle jusqu'à &oom.Cf. aussi Théodoret 9.10 et 10.33. Les fragments d'Oinomaos conservés par Eusèbe ont été traduits par L. Paquet, Les Cynif/ues grecs, fragments et témoignage, Ottawa, 1975, p. 233-263. Fr. 2-4, 5-6 et 7. Les trois fragments sont extraits du De sententiis, p. 272-273 (ils suivent l'extrait précédent). À signaler, dans le premier vers cité dans le fragment 7.12.5-6, que Vogel (suivant Dindorl) adopte une correction 6À.&tpour fÀ.ol,sans aucune justification. Il faut garder l'optatif et lui donner une valeur d'affirmation au potentiel (sans la particule, mais ce n'est point étonnant dans ce style). Fr. 8. De sententiis, p. 212 (à la suite de 7.10.1). 13. Deux fragments du De sententiis, p. 197 (se trouvent à la suite de 7.6). 14. Jean Malalas, avec le nom de Diodore, 6 aocpcî)tatoç... Malalas, p. 68. 15. Eusèbe de Césarée Chronif/ue 1, p. 227. 16. Excerpta de sententiis, p. 274 (se trouve à la suite de 7.12.6 et 7). 17. G. Syncelle, p. 499, le nom de Diodore y est. Livre 8 Les onze premiers fragments sont tirés des Excerpta constantiniens. 12. Long fragment du Vaticanus gr. 1354, cf. F. Jacoby FGrH 2 B.513-514.
13-25. Excerpta. 26. Tzetzès Chü. 5, Hist. 15, 557-562 Leone. 21. Excerpta 28. Tzetzès Chil. 1, Hist. 16, 385-392 Leone. 29-32. Excerpta constantiniens. Livre 9
Une trentaine d'excerpta constantiniens, d'inégale longueur. Deux fragments de Tzetzès (fr. 15 et 19) où se trouve le nom de Diodore. Fr. 15:
...
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Tzetzes Chü. 2, Hist. 38, 558-562 Leone. Fr. 19 : Chü. 1, Hist. 25, 649671 Leone (à noter que la correction de Wannington indiquée par Lodfather au vers 667 ü1toacopt:6t:1pour t1t1acopt:6t:1des manuscrits n'est même pas in• diquée dans l'apparat de l'édition moderne de Tzetzès). 17. Ulpien (sur le Contre Timocrate de Démosthène, 9, p. 805 Dindorf); le nom de Diodore figure. 21. Eusèbe PE 10.10.4.
Livre JO Tous les fragments sont tirés des excerpta constantiniens, sauf deux qui sont de Tzetzès. Fr. 29 : Chil. 1, Hist. 132, 269-281 Leone. Fr. 31 : Chü.1. Hist. 22, 585-596 Leone.
ÉDITH PARMENTIER-MORIN
LES FRAGMENTS DE DENYS D'HALICARNASSE ATTRIBUÉS À NICOLAS DE DAMAS RECHERCHES SUR LA COMPOSmON DES EXCERPTA CONSTANTINIENS
Deux passages des Antiquités romaines sont inclus dans l'Histoire universelle de Nicolas de Damas1, œuvre conseivée sous une forme fragmentaire par les Excerpta de uirtutibus et uitiis, l'un des volumes de l'encyclopédie historique conçue au xesiècle par l'empereur Constantin VII Porphyrogénète 2• Il s'agit d'extraits des premiers livres (A. R. 1 et A. R. 2), attribués à Denys d'Halicarnasse luimême par les autres manuscrits de la tradition 3, mais à Nicolas de Damas dans ce recueil des Excerpta constantiniens, qui rassemble des fragments tirés de treize historiens grecs• : Denys d'Halicarnasse, Antiquités romaines 1 82.3-84.2 = Nicolas de Damas F 30 des Excerpta de uirtutibus et uitiis (éd. Th. BüttnerWobst)5. 1 Les fragments qui subsistent de l'œuvre de Nicolas de Damas portent le n° 90 des Fragmente der Griechischen Historiker de F. Jacoby (FGrH Il A/texte-Il C/commentaire, Berlin, 1926). 2 Des cinquante-trois livres qui composaient cette étrange collection, il ne subsiste qu'à peine le 1/30-(cf. P. Lemerle, I.e premier humanisme byzantin, Paris, 1971, p. 281) : Excerpta historica iussu imp. Constantini Porphyrogeneti confecta, 1-4, éd. U.-Ph. Boissevain, C. de Boor, Th. Büttner-Wobst, Berlin, 1903-1910. Vol. 1 Excerpta de legationibus, éd. C. de Boor, Berlin, 1903. Vol. 2 Excerpta de uirtutibus et uitiis, éd. Th. Büttner-Wobst, Berlin, 1906 (édition du Turonen.sis C 980). Vol. 3 Excerpta de insidiis, éd. C. de Boor, Berlin, 1905 (édition du Scorialensis n I 11). Vol. 4 Excerpta de sententiis, éd. U.-Ph. Boissevain, Berlin, 1906. 1 Le Chisianus R VIII 60 (X• s.), l'Urbinas gr. 105 (X•-XI•s.) et le Marcianus gr. 372 (XV• s.). Cf.Denys d'Halicarnasse, Antiquités romaines. Livre 1, éd. V. Fromentin, Paris, 1998, p. LXXXV. 4 Excerpta Historica iussu lmperatoris Contantini Porphyrogenili, volume 2: Excerpta de uirtutibus et uitiis, éd. Th. Büttner-Wobst, Berlin, 1906, p. 349-353, F 30 et F 31. Dans ce recueil, Denys d'Halicarnasse et Nicolas de Damas voisinent avec Hérodote, Thucydide, Xénophon, Diodore de Sicile, Polybe, Appien, Dion Cassius, Flavius Josèphe et trois chroniqueurs byzantins : Georges le Moine, Jean Malalas et Jean d'Antioche. 5 Cf. Denys d'Halicarnasse, Antiquités romaines. Livre 1, éd. V. Fromentin, Paris, 1998, p. 206-210. Ce fragment est le FGrH 90 F 69 (Nicolas de Damas) du
Édith Parmentier-Morin, Université d'Angers.
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~DITH PARMENTIER-MORIN
Denys d'Halicarnasse, Antiquités romaines 2 32.1-34.1 = Nicolas de Damas, Histoire universelle F 31 des Excerpta de uirtutibus et uitiis (éd. Th. Büttner-Wobst) 6 • Dans le recueil des Excerpta de uirtutibus et uitiis, le premier passage des Antiquités romaines inséré dans !'Histoire universelle prend la suite d'un fragment de Nicolas de Damas consacré à Cyrus 7• Les deux textes se succèdent sur la même page du manuscrit de ces Excerpta 8 : celui de Nicolas se termine au milieu d'une ligne, celui de Denys commence au même endroit 9 • L'extrait de Denys se poursuit alors au verso, puis jusqu'à la moitié de la page suivante 10• Sur la même ligne, commence ensuite le deuxième passage des Antiquités romaines, qui se poursuit jusqu'au bas de la page suivante", où il s'achève sur la formule déroutante: T&Â.oc:; toùc; Ç' Â.6'youtflc; Nucol.aou icrrop{ac;.«Fin du livre 7 de !'Histoire de Nicolas 12».
Comment expliquer cette anomalie? Les deux historiens sont contemporains : Denys est né à Halicarnasse vers 60 av. J.-C., Nicolas à Damas en 64 av. J.-C. Le premier est arrivé à Rome en 30 av. J.-C., à peu près au moment où le second, jusqu'alors précepteur des enfants d'Antoine et de Cléôpatre à Alexandrie, devenait le conseiller d'Hérode et, attiré par la politique, se tournait de la philosophie vers l'histoire. Les deux œuvres ont été rédigées à la même époque : Nicolas de Damas a commencé à composer son Histoire universelle à partir de 14 av. J.-C., date à laquelle Denys d'Halicarnasse entamait probablement la rédaction des corpus de F. Jacoby. Pour simplifier les références, nous l'appellerons désormais D. H.1.
Cf. Dionysi Halicamasensis Antiquitatum Romanarum, vol. 1, éd. C. Jacoby, Leipzig, 1885, p. 198-201 (= FGrH 90 F 70). Ci-après D. H. 2. 7 FGrH 90 F 68. • Tur. C 980, fol. 162. Sur ce manuscrit du X• siècle, témoin unique des E.%ce,pta de uirtutibu.s, cf. A. Dorange, Catalogue descriptif et raisonné des manuscrils de la bibliothèque de Tours, Tours, 1875, p. 428-429. 9 Tur. C 980 fol. 162•, 1.9, après un espace de séparation d'environ 2,5 cm qui est le même dans tout le manuscrit. 10 Tur. C 980, fol. 155. Le fragment D. H. 1 commence donc au fol. 162 et se poursuit au fol. 155•, dans cet ordre : fol. 162• (1. 9-32), fol. 162• et fol. 155• O.114). Le fol. 155 suit le fol. 162, de la même façon que les fol. 152-154 (texte de Nicolas de Damas) prennent la suite du fol. 227. En effet, l'une des anomalies du Tur. C 980 est son désordre (l'ordre du texte ne suit pas celui des folios). Pour se faire une idée de l'entrelacement des feuillets du Tur. C 980, se reporter à l'annexe n° 1 : Place des fragments de Denys d'Halicarnasse attribués à Nicolas de Damas dans le Tur. C 980. 11 Tur. C 980, fol. 155•, 1.30. Le fragment D. H. 2 occupe donc les fol. 155" du Tur. C 980. 12 Tur. C 980, fol. 155•, 1. 31-32. 6
LES FRAGMENTS DE DENYS ATl'RIBUÉSA NICOLAS DE DAMAS
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Antiquités romaines, dont le pemier livre fut publié quelques années plus tard (en 7 av. J.-C.). L'erreur a donc pu se commettre à chacune des étapes de la fabrication et de la transmission des textes. Tout d'abord, l'un des deux historiens a pu copier l'autre, à moins que tous les deux n'en aient copié un troisième, qui serait une des «sources perdues» qu'affectionnait la Quellenforschung. C'est le problème que posent tous les compilateurs et, dans le cas présent, celui que pose la composition des Antiquités romaines et de l'Histoire universelle par deux auteurs contemporains que rapprochent de nombreux points communsu. Cependant, plutôt que de partir à larecherche d'une source commune imaginaire, nous examinerons d'abord l'hypothèse du plagiat. L'autre hypothèse à envisager est ensuite celle d'une confusion ultérieure, commise au moment de la réalisation del' encyclopédie des Excerpta ou même plus tard encore, par des copistes ignorants ou simplement négligents. Nous solliciterons donc l'histoire du Turonensis C 980 et, au-delà, celle des Excerpta, c'est-àdire celle de leur origine, de leur conservation et de leur transmission. L'HYPOTHÈSE
DU PLAGIAT
La première question qui se pose est donc de savoir si les deux passages des Antiquités romaines qui figurent parmi les vestiges de l'Histoire universelle ont été empruntés (sans vergogne) par Nicolas de Damas à son contemporain Denys d'Halicarnasse. Le premier passage (D. H. 1) décrit l'arrestation de Faustulus et son interrogatoire par Amulius après la scène de reconnaissance entre Romulus, Rémus et Numitor; puis il raconte l'assassinat d'Amulius. Le deuxième (D. H. 2) est consacré aux victoires de Romulus sur les Caminètes et sur les Antemnates, après l'épisode de l'enlèvement des Sabines 14. Ces récits peuvent-ils s'insérer dans !'Histoire universelle de Nicolas de Damas? Manifestement, Nicolas de Damas avait déjà lu Diodore de Sicile, dont la Bibliothèque historique était parue quelque temps avant qu'il n'entreprenne lui-même la rédaction de son œuvre historique15 : le plan de !'Histoire universelle s'apparente à celui de l'œuvre u Notamment leur opposition à l'épicurisme, signalée par Diogène Laërce: •Diotimos le Stoïcien, qui était l'ennemi d'Épicure, l'a odieusement calomnié en lui imputant la paternité de cinquante lettres scandaleuses[ ... ]. Nicolas et Denys d'Halicarnasse lui emboitèrent le pas : ils prétendent qu'Épicure allait de maison en maison avec sa mère pour lire des formules magiques et aidait son père, qui était maître d'école, pour un salaire ridicule» (Vie d'Epicure 3-4). 14 Références supra et n. 5-6. 15 La Bibüothèque historique de Diodore est parue vers 30 av. J.-C., Nicolas de Damas a commencé son Histoire universelle en 14 av. J.-C.
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IIDrrH PAllMENTIER.-MORIN
de Diodore, qui fait commencer l'histoire par le mythe (livres 1-6), puis la développe en deux périodes, l'une allant de la guerre de Troie à la mort d'Alexandre (livres 7-17)16, l'autre de la mort d'Alexandre à la conquête des Gaules par César (livres 18-40). De la même façon, l'Histoire universelle s'ouvre sur des récits mythiques, ceux de l'origine des grands empires orientaux d'Assyrie et de Médie (livres 1-2), puis ceux du monde grec avant la guerre de Troie (livre 3). La structure interne de l'œuvre se complique ensuite, car, à partir du livre 4, Nicolas de Damas reprend la méthode d'Éphore et superpose un plan thématique à l'ordre chronologique, en fusionnant les éléments grecs et les éléments orientaux. Néanmoins, le schéma général ne s'écarte guère de celui de Diodore: les fragments qui subsistent des livres 4 à 7 de l'Histoire universelle portent sur la Lydie jusqu'à la fondation de l'empire perse, d'une part, et sur la Grèce archaïque, d'autre part. Les quatre-vingt quinze livres suivants (livres 8 à 102) ont presque entièrement disparu. Puis les fragments qui subsistent des livres 103 à 116traitent de l'histoire de Rome à la fin de la République et pendant la période du principat. Enfin, les derniers livres de l'Histoire universelle, qui est réputée avoir eu des dimensions gigantesques (cent quarante-quatre livres) 17, sont consacrés au règne d'Hérode, protecteur de l'auteur et commanditaire de l'ouvrage. Selon ce schéma, les fragments de Denys d'Halicarnasse pourraient trouver leur place dans l'énorme lacune des quatre-vingt quinze livres de l'Histoire universelle dont il ne subsiste rien et qui devaient comporter un passage obligé sur les origines de Rome••. Ce sont précisément les dimensions extraordinaires de cette lacune, et celles de l'œuvre dans son ensemble, qui ont fait dire à plusieurs lecteurs de Nicolas de Damas 19 que ce dernier n'avait pas hésité à recopier Denys d'Halicarnasse, parce qu'il était un compilateur et, comme tel, ne s'embarrassait d'aucun scrupule dans sa hâte de fournir de la copie à Hérode. Et de fait, il est vrai que, dans son Autobiographie, Nicolas se plaint d'avoir dO.accomplir pour Hérode une tâche écrasante, qu'Eurysthée lui-même n'aurait pas osé infliger à Rappelons que le contenu des livres perdus de la deuxième partie de la Bibliothèque historique peut se déduire de la fin qui, elle, est conservée entièrement (livres 11-17, retraçant les événements suivenus de 420 à 323 av. J.-C.). 17 D'après le témoignage d'Athénée, Deipnosophistes 6.54 (FGrH 90 T 11). "Voir l'annexe n° 2 : Plan de l'Histoire universelle de Nicolas de Damas. 19 Notamment Henri de Valois, auteur de l'editio princeps du Tur. C 980, en 1634 (Polybii, Diodori Siculi, Nicolai Damasceni, Dionysii Halicarn., Appiani Alexandr., Dionis et Ioannis Antiocheni Excerpta ex collectaneis Constantini Augusti Porphyrogenetœ Henricus Valesius nunc primum grœce edidit, latine uertil notisque illustrauit. Parisiis, sumptibus M. Du Puis). L'historique du débat a été résumé par G. Witte, De Nicolai Damasceni fragmentorum Romanorum fontibus, Berlin, 1900, p. 5. 16
LES FRAGMENTS DE DENYS ATI'RIBUÉS À NICOi.AS DE DAMAS
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Héraclès 20• Le livre 1 des Antiquités romaines ayant été publié en 7 av. J.-C., alors que Nicolas avait commencé à composer son propre ouvrage depuis sept ans, on a donc pu penser que, manquant d'inspiration à la fin de son septième livre, il n'avait pas hésité à se seIVir chez un «collègue». Le premier passage qu'il aurait emprunté aux Antiquités romaines (D. H. 1) pourrait intervenir au début des livres perdus de !'Histoire universelle. En effet, le fragment D. H. 1 prend la suite d'un passage de Nicolas sur la prise de Sardes par Cyrus21. Sachant que dans la Bibliothèque historique de Diodore, la fondation de Rome était traitée au livre 8 et les guerres entre Cyrus et Crésus au livre 9, on pourrait en inférer que les mêmes événements intervenaient à peu près au même endroit de l'œuvre de Nicolas de Damas (toutes proportions gardées, puisque la Bibliothèque historique ne compte que quarante livres, alors que !'Histoire universelle en comporte cent quarante-quatre). Cependant, ni la chronologie de la composition de !'Histoire universelle, ni la méthode de Nicolas de Damas en tant que compilateur ne viennent étayer cette hypothèse. En effet, rien dans !'Autobiographie de Nicolas de Damas 22 ni dans les Testimonia sur sa vie et sur son œuvre 23 ne suggère ni qu'il se soit lassé de composer son œuvre historique, ni qu'il ait dQ recourir à de quelconques stratagèmes pour rester en grâce auprès d'Hérode. Il avait d'autant moins de raisons de s'inquiéter que son crédit auprès du roi ne cessait de s'accroitre et qu'au contraire, c'est pendant cette période d'intense production littéraire qu'il se vit confier les missions les plus importantes qu'il eOt jamais remplies 24• Par ailleurs, la comparaison avec les nombreux passages où Nicolas de Damas compile ses prédécesseurs (en particulier Xanthos de Lydie, Ctésias, E.phore, Xénophon et Aristote) montre qu'il ne les copie jamais mot à mot. Dans le meilleur des cas, il les paraphrase, non sans en transformer le texte, quelles que soient les circonstances, pour l'adapter à ses propres objectifs historiographiques 25• Par ailleurs, il zo«Hérode se tourna vers l'histoire avec ardeur, en poussant Nicolas à écrire un ouvrage historique. Se mettant à l'œuvre avec une ardeur décuplée, ce dernier réunit les éléments d'une Histoire générale et entreprit une tâche écrasante, que nul autre n'avait accomplie. Ce fut un long et pénible labeur et, quand il l'eut achevé, il déclara que, si Eurysthée avait imposé cette épreuve à Héraclès, il l'aurait totalement épuisé» (FGrH 90 F 135). 21 FGrH 90 F 68. 22 FGrH 90 F 131-139. 23 FGrH 90 T 1-15. 24 En 5 av. J.-C., c'est à Nicolas de Damas qu'Hérode confia la conduite du procès contre son fils aîné Antipater, qui avait pris la tête d'une conjuration contre son père (cf.Flavius Josèphe AJ 17.93-133 et BI 1.620-640). 25 Sur ce point, voir notamment M. Toher, On the use of Nicolaus' historical fragments, dans Classical Antiquity, 8, 1989, p. 159-172 et D. Lenfant, Nicolas de Damas et k corpus des fragments de Ctésias : du fragment comme adaptation, dans
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a.DITH PARMENTIER-MORIN
ne compile aucun de ses contemporains, au contraire de Denys qui, par exemple, cite fréquemment Valerius Antias 26 • Cet emprunt à Denys serait donc un hapax dans l'œuvre de Nicolas, exception au demeurant bien périlleuse pour l'auteur qui, s'adressant à un public informé, lié à l'entourage d'Auguste et d'Agrippa, n'aurait pas manqué d'être démasqué 27. Et de ce point de vue, rien n'empêche de renverser la question, car si Nicolas est un compilateur, Denys en est un autre: pourquoi Denys n'aurait-il pas emprunté à Nicolas entre 14 et 7 av. J.-C.? Dans le fragment D. H. 1, l'historien rapporte deux versions concurrentes du même épisode, en citant ses sources: d'abord Fabius Pictor nommément, dont la version mythologisante des «enfances» de Romulus et Rémus est évoquée en premier, puis «d'autres auteurs, qui jugent tout élément fabuleux indigne de la narration historique» 28et dont l'historien préfère la version rationalisante, selon laquelle la louve qui a nourri Romulus et Rémus était en fait la femme de Faustulus, Laurentia (ou [Acca] Larentia), surnommée Lupa parce qu'elle s'était jadis prostituée. Or, tous les récits de Nicolas de Damas sont empreints d'un scepticisme rationaliste de la même veine: par exemple, dans l'Histoire universelle, Œdipe n'épouse pas Jocaste; après avoir tué Laïos, il est poursuivi pour meurtre par la reine et finit par rentrer se cacher chez lui, à Corinthe29. Le souci de réalisme, la rationalisation constante du mythe et l'insertion de modalisateurs du doute dans le récit sont des traits constants de Nicolas de Damas et la seule raison pour laquelle l'hypothèse d'un emprunt de Denys à Nicolas n'a jamais été envisagée Ancient Society, 30, 2000, p. 293-318. Quoique d'un avis différent de celui de M. Toher sur l'utilisation de Ctésias par Nicolas, D. Lenfant souligne néanmoins que, si les emprunts de Nicolas sont incontestables, ils ne se font pas sans transformations et que «l'Histoire universelle n'est pas une reproduction littérale de son modèle• (p. 313). 26 En particulier dans le passage D. H. 1. D'ailleurs, D. H. cite Valerius Antias si souvent que les Anciens considéraient les Annales de ce dernier comme le modèle des Antiquilés romaines. On retrouve cette opinion commune chez l'auteur anonyme de l'Origo gentis Romanœ, à la fin du IV• siècle après J.-C. (PseudoAurélius Victor, O. G. R. 20, éd. J.-C. Richard, Paris, 1983, n. 2, p. 171-172). n Les premiers à faire cette remarque - que F. Jacoby reprend à son compte (FGrH II C, p. 253) - furent A. Korais dans sa Bibliothèque hellénique (llp6ôpoµoç
t.U17vild7ç/31/JltofhjlCflÇ 1rep1tzwv
K).a1Jf5iov Ail1avov
n)v 1ro1m11v iCTTopiav,
N11c0Àaovwvç.daµa01C71vov rà ao,Çoµeva,Paris, 1805) et J. C. von Orelli, auteur de l'editio uariorum de Nicolas de Damas (Nicolai Damasceni Historiarum ucerpta et fragmenta quœ supersunt, Leipzig, 1804-1811 : Supplementum notarum in Nicolaum Damascenum, p. 43). 21 "En:pOl 6t ot'>Stv-rillvµuO, infatti, in auge, quella di Giuba dopo l'età giustinianea fu definitivamente abbandonata115.
110 Paus. 1.17.2 : tv 6t t«î>yuµvaoiq, tf\ç àyopdç àdxovn où JtoÀ.u,Iltoltµaiou l>t àJto toO Katamctooaaµtvou KaÀ.Ouµtvq,,li8ol tt dmv 'Epµat 8taç ci!;tol a:ai dKvIltOÀ.tµaiou XaÀ.ICf\ · Kai 6 tt A{puç 'I6paç &vta08a Ktltal Kai [6] Xpoountoç 6 Iolt(>ç. « Nel ginnasio, che non è molto distante dall'agora e che dal suo fondatore si chiama ginnasio di Tolemeo, ci sono erme in marmo degne di essere viste e una statua bronzea di Tolemeo; ci sono poi le statue del libico Giuba e di Crisippo di Soli•. La collocazione dell'erma, che si trovava probabilmente nel ginnasio di Tolemeo II Filadelfo (cf. L. Beschi, D. Musti (edd.), Pausani.a. Guida dellaGreci.a. L'Attica, Milano, 1982, p. 320) sottolineava i legami politico-culturali di Giuba con i Lagidi. 111 M. James Moscovich, Cassius Dio on the Death of Sophonisba, in AHB, li, 1991, p. 25-29 ipotizza inoltre l'uso (non esplicito) di Giuba Il da parte di Dione, sulla base delle somiglianze rintracciabili nelle sue descrizioni del suicidio di Sofonisba, racconto ricostruibile attraverso Zonar. 9.11, e di quello di Cleopatra. in D. C. 42.34.45. 112Cf. supra, p. 495 n. 76. 111 In tutto 12 : 8 da Ateneo; una rispettivamente da Esichio, da Schol Ar. Th., da Schol. D. 19.247 e da Appendix Proverbiorum 1.56. 114 Sulla fortuna di Dionisio di Alicarnasso che coïncide nella cultura tardo antica (V-VI secolo) con la sua fama di retore cf. M. T. Schettino, Gli storici di tltl romana nella Suda, in G. Zecchini (ed.), Il lessico Suda e la memoria del Passaloa Bisanzio, Bari, 1999, p. 113-138, spec. p. 123-124. Le Antiquitates Romana sono menzionate solo due volte in Stefano di Bisanzio : Eth. p. 8 e 707. 115 L'unica menzione in Fozio riguarda il Iltpi q,8op4ç Uçtcoç.
GIUBAD, LA SUA STORIADl ROMAE L'ETÀAUGUSTEA
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I legami reali tra i due autori sono difficili da individuare, pur nella somiglianza di interessi, che si accordano con la temperie del loro tempo, cosmopolita e tradizionalista insieme, con l'accento sui rapporto tra Greci e Romani; solo in forma di suggestione essi si profilano in relazione alla fortuna delle loro opere storiche: l'attenzione verso di esse mostra intervalli a fasi altemate. In età giustinianea, in un momento di declino perle Antiquitates, la 'Proµaucri ic:rcopiadi Giuba avrebbe goduto, seppur en passant, di un qualche successo, forse in virtù della sua brevità, per poi cadere nell'oblio nel X secolo, quando l'opera dionisiana tomô a essere letta e apprezzata. L'effimera fortuna di età giustinianea, se si possono considerare indizio in tal senso le cursorie citazioni di Stefano di Bisanzio, si spense, lasciando nell'oblio non solo l'opera storica del re mauretano, ma anche la sua azione politica, i cui contomi appaiono alterati, risultato di fraintendimento. Dell'azione politica di Giuba in accordo con Augusto, a capo di un regno vassallo alleato di Roma nella Sud.a non vi è più traccia 116 : si allude ai suoi rapporti con l'Oriente (matrimonio con Cleopatra Selene), mentre della sua cultura a due facce (latina e greca) il lemma abbreviato tace. Maria Teresa
ScHEITINO
D lemma della Suda (s. u. 16Paç) è abbreviato della parte bibliografica; sui versante storico-politico, presenta diversi errori, dando del sovrano un'immagine falsata : attribuisce a Giuba il titolo di re della Libia e della Mauretania e di aver subito torture ad opera dei Romani, mentre della sua attività secondo gli intendimenti augustei si è perso ormai il ricordo. 116
EMMANUÈLE CAIRE
CAUSALITÉ ET EXPLICATION HISTORIQUE DANS LES FRAGMENTS DE DENYS D'HALICARNASSE
Choisir, pour étudier le système d'explication historique et la notion de causalité chez un historien antique, un corpus de fragments, paraît au premier abord relever de la gageure, voire de la tentative désespérée. Et s'il est bien un type de texte où les obstacles s'accumulent et semblent se conjuguer pour décourager une telle entreprise, ce sont précisément les derniers livres des Antiquités romaines de Denys d'Halicarnasse: le texte dont nous disposons n'a sans doute plus qu'un rapport assez lointain avec l'œuvre originale dont ne subsistent que des épisodes de longueur variable; ceux-ci peuvent être amputés de leur début ou de leur fin; ils proviennent de sources différentes et ont été retenus pour des raisons qui relèvent de la logique propre des excerpteurs et non de celle de la continuité historique; clans les différentes éditions' ils se succèdent selon des critères d'interclassement parfois discutables 2, et, pour certains enfin, ont été réécrits tardivement sous forme d'épitomé ou de morceaux choisis, selon des principes qui restent encore à élucider 3• Mais en même temps, c'est précisément dans ce type de texte que le traducteur et le commentateur se trouvent à maintes reprises confrontés à la nécessité de comprendre et de reconstituer le sys-
1 Il s'agit des éditions de A. Mai, Dionysii Halicama.ssei Romanorum Antiquitatum pars hactenus desiderata nunc deniqiu ope codicum Ambrosi.anorum ... quantum licuit restituta, Milan, 1816; A. Kiessling, Dionysi Halicarnensis Antiquitatum Romanarum quœ supersunt, vol. 4, Teubner, Leipzig, 1870; A. Kiessling-V. Prou, Dionysi Halicarnensis Antiquitatum Romanarum quœ supersunt, Paris, 1886; K. Jacoby, Dionysius Halicama.sseus, Antiquitates Romanœ, vol. 4, éd. Teubner, Leipzig, 1905; E. Cary, The Roman Antiquities of Dionysius of Halicarna.ssus wilh an English tmnslation, vol. 7, Loeb Classical Library, CambridgeLondres, 1950. 2 Voir dans ce volume, S. Pittia, Pour un nouveau classement des fmg,nents tÜ Denys d'Halicarnasse (liwes 1~20), p. 85-227, spéc. p. 175-190. >Tel est le cas du texte connu par les • manuscrits ambrosiens• (Ambr. Q 13 sup. et Ambr. A 80 sup.). Ils sont désignés dans cette étude sous l'appellation commune Ambrosi.anus. Sur la nature de ce texte, voir S. Pittia, Pour un nouveau classement ... , cit.
Emmanuèle Caire, Université d'Aix-Marseille 1.
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EMMANlIBLECAIRE
tème d'explication historique de Denys, qu'il s'agisse parfois de trancher des problèmes d'interprétation ou plus globalement de réfléchir sur l'enchaînement et le statut propre des fragments. Encore faut-il que l'on puisse parler de «système d'explication historique»: Denys qui, comme historien, mais aussi comme rhéteur et comme critique littéraire, a longuement réfléchi sur la fonction et les conditions que doit remplir l'écriture de l'Histoire4, a-t-il eu, à propos de la recherche et de l'exposé des causes, une doctrine établie ou, pour le moins, une attitude cohérente? En tout cas, il lui est arrivé à plusieurs reprises de formuler des remarques d'ordre méthodologique à propos de la causalité historique. C'est pourquoi, avant d'aborder plus particulièrement les fragments des livres 12 à 20 qui seront au centre de cette étude, je voudrais examiner trois passages de son œuvre qui se révèlent, sur le sujet qui nous occupe, particulièrement intéressants. Le premier se trouve au livre 11des Antiquités romaines. Au tout début de ce livre, alors qu'il s'apprête à relater le renversement des décemvirs5, Denys annonce son projet : s'efforcer d'exposer depuis le début (tç àpxflç) et dans le détail «de quelle façon (ôv tpé>nov)les Romains ont renversé ce gouvernement, sous la conduite de quels hommes (tivrov àv~p&v fl'YTtCJaµtvrov), et quelles furent enfin les 6 causes et les prétextes (ôtà noiaç aidaç ml 1tpoq>a.crEiç) de ces événements»7. Cette déclaration est l'occasion d'une assez longue digression sur l'utilité d'un tel exposé pour le lecteur: «de telles connaissances, selon moi, sont nécessaires et bonnes pour à peu près tous les hommes, elles le sont plus particulièrement pour ceux qui s'adonnent à la spéculation philosophique ou à la politique•'· S'appuyant alors sur deux exemples précis, celui de la victoire des Grecs lors des guerres Médiques puis celui de la capitulation d'Athènes en H. Verd.in, La fonction de l'Histoire selon Denys d'Halicamasse, dans Andent Society, 5, 1974, p. 289-307. 5 447 selon la chronologie dionysienne (450/449 selon la chronologie traditionnelle). 6 Nous nous en tenons, dans un premier temps, à la traduction usuelle de aida par «cause» et de xp6q,acnç par «prétexte» en attendant d'essayer de préciser le sens de ces concepts chez D. H. 7 D. H. 11.1.1Les références au texte des Antiquités romai~ sont celles des éditions Kiessling, Jacoby et Cary (voir note 1) lorsqu'elles sont données avec trois chiffres. Pour les livres 14 à 20, elles sont données sous la forme d'un numéro suivi d'une lettre. Il s'agit alors des références à Denys d'Halicarnasse, Rome et la conquite de l'Italie (Antiquités romaines, livres 14 à 20), texte grec, traduction et commentaire, S. Pittia et alii éd., Paris, 2002 (Fragments). • D. H. 11.1.1: àvayxaiaç uxoÂ.aµPciVO>v &\VU\ical ical.àç tàç to,ai>taç µa9ftcn:«; dxam µtv ci>,to,ç,µaÂ.\OV 8&mpiavicai1tt· 4
pl tàç xoÀ,nicàç füatpij3oum xpa;&,ç.
CAUSALITÉ ET EXPLICATION HISTORIQUE DANS LES FRAGMENTS
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404, Denys constate que la connaissance de ces seuls faits ne saurait être considérée comme suffisante, mais qu'il est nécessaire de préciser pour le lecteur les circonstances de leur accomplissement, l'histoire des lieux évoqués, les acteurs des événements. Au plaisir intellectuel éprouvé alors par le lecteur, s'ajoute l'utilité des connaitre tous ces détails pour acquérir une expérience rhétorique qui lui permettra de secourir sa patrie dans des circonstances difficiles. Comme tous les autres éléments que doit intégrer l'historiographie, l'exposé des causes a donc avant tout une valeur paradigmatique. C'est l'œuvre de Thucydide, à l'égard de laquelle Denys se montre particulièrement sévère, et plus particulièrement le célèbre passage sur les causes de la guerre du Péloponnèse 9 , qui offre au critique littéraire l'occasion de revenir sur le problème de l'exposé des causes, avec d'autres arguments. Une première fois, dans son Thucydide, il critique «l'ordonnance de la matière» (àq,opµT))chez !'Athénien, en lui reprochant d'avoir exposé la cause fictive avant la cause présentée comme vraie, et antérieure de surcroit : Thucydide aurait dll, en commençant cette enquête sur les causes de la guerre (tàç aitiac; toO noÀ.tµou)présenter en premier la cause vraie ou celle qu'il croit telle. C'est une exigence de la nature que l'antérieur précède le postérieur et que le vrai soit énoncé avant le faux; d'ailleurs la narration aurait une bien meilleure entrée en matière, et de loin, si l'économie en avait été de ce type• 0 •
Il revient une seconde fois sur ce même passage dans la Seconde Lettre à Pompée Geminos, toujours à propos de l'ordre de présentation de événements, pour critiquer cette fois le manque d'esprit patriotique de Thucydide : Thucydide, lui, a pris pour point de départ (àpxitv t.Kol11aato)le commencement de la décadence pour le monde grec; or, étant grec et athénien, il ne devait pas procéder ainsi (. .. ), ni montrer une telle malignité : il impute à sa propre cité les causes manifestes de la guerre (tàc; cpavepàc;a(tiac; toO 1t0Àtµou), alors qu'il pouvait invoquer bien d'autres raisons susceptibles de l'expliquer (tttpatc; txovta noÀ.À.atc; àq,opµatc;1t&pla'lfU1 tàc; aitiac;). Et puis il aurait dll commencer son récit non par les événements de Corcyre, mais par les admirables réali-
Th. 1.23.5-6. D. H. Thue. 11.1: "Expflv 6t aùtOV (8ou1C00{6T)V)cipl;âµ&vov tàç aidaç tOO ,rol.tµou ÇT)tdv Jtpébtov ci1to600vm tflV ciÂ.TJ8flKal tautq) 601CoOaav."H t& yàp q,ixnç 9
10
Œff\lt&l tà fl:pot&pa tCÎIVoottpcov OPX&lV Kal tciÂ.TJ8flnpo tCÎIV'lf&u&i>v ).ty&a8al, 1't& Tflç füTJ'}'TIO'&COÇ &iaf3oÂ.fl Kp&incov dv tyivno µaKpq), totaUtT)Ç oiKovoµ{aç ruxoOaa
(trad G. Aujac).
JJ
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EMMANUÈLE CAIRE
sations de sa patrie au lendemain des guerres Médiques (il les a mentionnées ultérieurement, mais mal à propos, assez maladroitement, et à la va-vite); il fallait les décrire avec complaisance, en bon patriote, puis ajouter que c'était par haine contre les Athéniens et par crainte, que les Lacédémoniens, s'abritant sous de tout autres prétextes (1tpocpaa&tç ù1to8tvt&ç tttpaç), s'étaient lancés dans la guerre; il pouvait parler alors des événements de Corcyre, du décret des Mégariens et de tout ce qu'il voulait dans le même genre 11•
Ces trois passages manifestent un intérêt certain de Denys pour l'exposé des causes, mais avec un souci qui est davantage celui d'un rhéteur, d'un moraliste ou d'un pédagogue, que celui d'un historien, puisque l'attention prêtée à la forme ou à des critères moraux tels que le devoir patriotique l'emporte visiblement sur la volonté de rechercher la vérité ou d'établir une hiérarchie des causes en fonction de leur valeur effective. Mais comment ces principes s'appliquent-ils dans son œuvre personnelle? Une lecture d'ensemble des fragments montre que dans leurs grandes lignes, les systèmes d'explication que l'on y rencontre ne se distinguent ni par leur variété, ni par leur originalité, ni enfin par leur complexité. Ils peuvent, de façon générale, se ranger dans l'une ou l'autre de ces deux catégories de causes: les traits de caractère propres aux peuples ou aux individus 12 et la volonté divine 13• Ces reD. H. Pomp. 3.8 : ·o 6t 8omcu6{6riç âpx1iv µtv t1ton1aato aq,· 'flÇt1pçato ica1ecilç 1tpatt&tv to 'D.A.riv11e6v· 61t&p-aA.riva ôvta icai 'A9Tivatov où1ef6&t xo1&tv ( ... )· 1eaioùtat&1ealtfl 1t6À.&1 tfl tautoO tàç q,av&pàçatt{aç toO xoA.tµou 1t&p1a.1tt&1v, tttpa1ç fxovta xoUatç âq,opµatç 1t&pta.'1'attàç aitiaç, mi dp!;ao9a{ y&tflç 6tri"flla&(pacnçdans ce passage de Thucydide a été longuement discuté. Voir en particulier G. M. Kirkwood, Thucydides' Word.sfor «Cause» dans AJP 73, 1952, p. 37-61; L. Pearson, Prophasis and Aitia, dans TAPhA, 83, 1952, p. 205-223. S. Schuller, About Thucydides' Useof airia and 1rpéxpacnr; dans Revue Belge de Phüologie et d'Histoire, 36, 1956, p. 971984; H. R. Rawlings, A Semantic Study of Prophasis to 400 B. C., dans Hermes, Einzelschriften 33, 1975. 1 dans An• H. Verdin, ui fonction de /'Histoire selon Denys d'Halicamas~. cient Society, 5, 1974, p. 303. 19 Le cas le plus complexe est sans doute celui de l'affaire de Rhégion (D. H. 20.B). En annonçant qu'il va parler des causes des maux qui frappèrent cette cité, Denys emploie une expression comparable à celle utilisée pour aborder l'exposé des causes du renversement des décemvirs: àvayK116t tàç aidaç Kai tàç npoq,ciot:tçtil>v1Cataox6vnov aùtTJVKaicil>v 1tpot:t1tt:lv.Dans la suite de l'exposé on retrouve soulignées la perversité de certains hommes, les fausses déclarations du personnage principal, l'intervention de la divine providence, mais aussi les différentes versions de l'origine du massacre. Il n'est donc pas facile a priori de démêler ce que Denys entend par tàç a(daç et par tàç npoq,aot:tç. 16
CAUSALl'Œ ET EXPLICATION HISTORIQUE DANS LES FRAGMENTS
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duire, elle rend en même temps cette compréhension d'autant plus nécessaire que celle-ci conditionne souvent l'interprétation de l'ensemble du fragment. Seuls, l'examen et la comparaison de leurs emplois peuvent permettre de se faire une idée du sens qu'on doit leur donner dans chaque contexte particulier. Pourtant, la compréhension de la démarche étiologique de Denys dans le cadre particulier des fragments ne saurait s'en tenir aux seules occurrences des termes aitia et 1tp6cpamc;, c'est-à-dire aux passages où l'historien souligne explicitement sa démarche. Le plus souvent, c'est la seule ordonnance de la narration qui, par des moyens stylistiques divers ne se résumant pas seulement aux catégories grammaticales de l'expression de la cause, élabore un système d'explication. Mais, une fois encore, une telle étude est-elle possible dans le cadre de fragments? C'est ce que je voudrais d'abord examiner avant d'en venir à l'étude des aitiat et 1tpoq,cio-e1c; chez Denys d'Halicarnasse. A -
SYSTÈMES
EXPLICATIFS ET FORME FRAGMENTAIRE
l) La spécificité de l'Ambrosianus: l'exemple des invasions gauloises de 367 20
Le récit des invasions gauloises de 36 7 a été transmis par les manuscrits ambrosiens dans lesquels il constitue un ensemble assez long, succédant directement à deux phrases sans lien apparent l'une avec l'autre: la première concerne la dictature de Titus Quinctius en 380 21 et la seconde, dont l'objet est beaucoup plus obscur, est visiblement incomplète 22• Il est directement suivi du récit de la deuotio de Marcus Curtius en 362. L'épisode lui-même se décompose de la manière suivante : à une description du relâchement de mœurs des guerriers gaulois après les ravages exercés sur le territoire d'Albe succède un long discours de Camille à ses troupes, puis une description du combat entre Gaulois et Romains, organisée en une antithèse qui oppose la façon de combattre des deux peuples. Ces trois moments du récit s'enchaînent de manière assez lâche: un participe juxtaposé à valeur temporelle ou causale introduit la seconde partie (TaOta µa8o>v6 téi>v'Pcoµaicov6uctcitcopKciµtÂ.Â.oç), bien que le dis20
D. H. 14.K. H. 14.H : Kpa-niaaç t&v 1toÀ.t:µ(o,vical tflV CJtpat1àvtmtlooaç tatç cbq,&tv T)µtpa1ç tvvta 1t6À.t:1ç tvvta 1toA.&µ{0>v fÂ.a• i..eia1ç T{toç K61vtoç füictatop&OO>V Jkv. «Titus Quinctius vainquit les ennemis et répandit sur l'armée des flots de bu21 D.
tin: durant sa dictature, il prit, en neuf jours, neuf villes ennemies». u D. H. 14.I : Ariq,8tvt&Ç âµcpottpco8&vây&Â.f16ovo( 8&µtv ,cpii)tov 1tptap&1çf1t&µljlav:«Les Romains ayant appris que les Samnites rassemblaient une armée, commencèrent par envoyer des ambassadeurs». sz D. H. 15.1 : 'A6uc&tt&,civ6p&çIauvîtat, 1tapapaivovt&Çtàç 6µoÀ.Oyiaç,ciç t1to111aaa8&1tpoç1'!µ4ç. 53 D. H. 15.1 : Nov 6t 1tapacnc&uciÇ&a8& atpanàv tte mvtoç ày&ipovt&çt6Kou xp6q>amvµtv tttpav 1to106µ&vo1, tè>6' cU:r18tçtxl toùç l'lµ&ttpouç tyvcoteôt&çciy&tv àxoiteouç. 54 D. H. 15.1 : 'H 6t xapacnc&uTJ tflç atpatt4ç 1'!µcbv&at\V oüx o'>çàcpatf)11µ&ttpouçàxo{teouçtà {6ta, ail' ci>Çtà {6ta t!;6vtmv 6tà cpuMiteflç. 55 D. H. 15.1 : [ ... ] &i 6' aùtTJ n ttÂ.TJµµd.oOCJa tà 1t&pltflç cplÂ.{aç ôpteta xpoq,ci1tpcia&tç teatacnc&uciÇ&tat tflç tx8paç oùte àÂ.TJ8&tç, µTJt&Poui..àç6p8oOvaùtotç µ11-r& !;&1ç. 51
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Il n'est jamais question dans tout ce passage d'aitial, mais toujours de xpocpac:r&lc;. La comparaison entre les deux fragments successifs du De legationibus permet de mieux cerner le sens que prend ce terme, mais aussi de revenir sur l'analyse des causes de la guerre. La xp6cpac:ru; est la raison dite, ouvertement affirmée pour déclarer la guerre, rompre les accords ou justifier sa conduite. Elle n'est en soi ni vraie ni fausse, mais reste subjective. Dans la chaîne des événements qui se succèdent, chaque camp en met un en avant, qu'il affirme déterminant, et qu'il présente par là-même comme la cause directe du conflit. Dans les discours qui constituent l'élément essentiel de l'ambassade et qui sont, tour à tour, accusation et défense, chacun présente sa propre xp6cpacrlc; comme «juste» ou «vraie», celle de l'autre comme «fausse» ou «injuste». Mais à travers ce procès diplomatique on voit se préciser l'analyse des causes du conflit qui oppose les Romains aux Néapolitains puis aux Samnites. Les causes immédiates en sont chaque fois la situation des sujets ou des colons de Rome, que les Romains accusent Néapolitains et Samnites d'attaquer injustement et qu'ils affirment vouloir défendre. Mais la cause profonde est la volonté d'expansion samnite, qualifiée de «visées ambitieuses» et «d'injustice», par les Romains, de «défense et de protection de leurs propres biens» par les Samnites. La 1tp6q>acr\Ç est donc ici le choix, puis la mise en forme verbale, de l'un ou l'autre de ces deux types de causes : «justification» lorsqu'elle présentée par l'un, «prétexte» lorsqu'elle est récusée par l'autre. Cela n'est pas guère étonnant dans le contexte d'une ambassade s'achevant par une déclaration de guerre mais, parce que Denys ne commente jamais les propos des uns et des autres, tout au moins dans les passages conservés comme excerpta, et s'en tient donc à une présentation totalement subjective des raisons du conflit, l'analyse des causes reste en partie dissimulée 56 • Un troisième excerptum du De legationibus, concernant toujours les guerres samnites, devrait permettre de préciser le rapport entre aida et 1tp6cpamc; dans le contexte particulier du déclenchement des guerres. Ce passage est d'autant plus intéressant qu'il paraît avoir 56 On pourrait objecter que la première phrase, lacunaire, du fragment 15.H, qui faisait allusion aux dommages causés (par les Néapolitains) aux alliés des Romains, anticipant ainsi l'exposé des griefs de ces derniers au cours de l'ambassade, privilégiait comme cause de la guerre la np6cpaatçchoisie par les Romains. Mais on peut reconstituer de bien des manières le début de la phrase; soit par exemple en reprenant la coordination et en supposant que Denys mettait en regard les deux npoq,âa&tç,soit, plus probablement, en considérant que la phrase annonçait l'expédition contre Néapolis présentée du point de we des Romains. Il est donc impossible d'avoir une certitude sur le statut de l'explication introduite par 6totl.
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conseivé un développement dans sa totalité, de l'introduction à la conclusion. En effet, la première phrase annonce qu'il s'agira d'un exposé sur la cause de la reprise du conflit entre Romains et Samnites57,et l'extrait s'achève effectivement avec la rupture des traités et l'enrôlement des deux armées. Il est donc assuré ici que l'analyse de l'ai-da de la guerre est menée par Denys à l'occasion de l'ambassade précédant son déclenchement. La narration comporte les éléments suivants : 1 - attaque des Samnites contre les Lucaniens, « mus par quelque vieille haine» 2 - ambassade des Lucaniens auprès des Romains, pour leur demander de l'aide 3 - traité d'amitié entre les Romains et les Lucaniens 4 - ambassade romaine auprès des Samnites «pour leur faire va-
loir que les Lucaniens étaient alliés et amis des Romains. Les ambassadeurs devaient inviter les Samnites à restituer aux Lucaniens la terre qu'ils leur avaient enlevée et à ne plus commettre aucun acte hostile ... » 5 - réplique indignée des Samnites qui accusent les Romains de «fabriquer un prétexte qui n'est ni juste ni honorable pour rompre les traités» 58 • 6 - réponse arrogante des Romains et rupture des négociations. On retrouve donc un enchaînement de faits assez semblable à ceux qui sont relatés à propos des ambassades précédentes, et le singulier ai tia ne semble guère plus précis que le pluriel utilisé par Denys pour renvoyer au déroulement de l'ambassade chez les Néapolitains. Mais la narration proprement dite est ici suivie d'un commentaire de l'historien, qui consiste plus particulièrement en une analyse de la position romaine : • La raison officielle (,; q,av&pà ,rpé>cpacnç)de la guerre samnite, celle qu'il convenait de présenter devant tous, c'était le secours accordé aux Lucaniens qui avaient trouvé refuge auprès des Romains : c'est en quelque sorte une habitude commune et ancestrale dans la cité romaine que de venir en aide aux victimes d'injustice et à ceux qui se réfugient auprès d'elle. La raison officieuse (1'16" àq>aV11Ç),celle qui les contraignait davantage à briser leur amitié avec les Samnites, c'était la force de ces derniers, d'ores et déjà grande et jugée susceptible de croître davantage si, après la soumission des Lucaniens et, à travers
57 D. H. 17.A : 6 IauvttUCOÇ aùetç àv&ppurlcnhJK6Mµoç àKOtO\UutlJÇa(tiaç àpl;aµ&voç.• La guerre contre les Samnites se ralluma, prenant naissance pour la raison que voici...•· 51 D. H. 17.A: 1tp6cpacnvoüt& ~uca{av oüt" &ùc:rxflµova tcatamc:E~ôµsvO\ toO tcataÀ.Offll\tàç mtovMç.
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eux, de leurs voisins, les nations barbares limitrophes devaient suivre
les Samnites•"·
Les causes de la guerre s'identifient donc avec les 1tpocpac:n:tç, qui sont les raisons reconnues et également admises par les Romains. Toutes deux sont des causes réelles et ce qui les oppose n'est plus, comme dans le fragment précédent, que chacune représente la version subjective de l'une des parties en présence, c'est bien plutôt le public auquel elles s'adressent et l'usage qui en est fait. Si la première peut être déclarée devant tous (1\ cpavspà 1tp6cpa01ç... 1eal1tpè>ç d1tavtaç tù1tpt1tT)ÇÂ.&yt0'8at),Romains, Samnites, voire Lucaniens, la seconde est réservée aux seuls Romains, et peut-être même à une partie seulement d'entre eux (1\ àcpaVT)ç).Ce qui les oppose aussi, c'est leur importance effective, la seconde étant reconnue par Denys, et sans doute par les Romains eux-mêmes, comme plus déterminante (µdÂ.À.ovaùtoùç àva'YICaÇoooa)que la première. 2) ù llepi tmfJovÂD>v: les causes des conjurations
Avant d'en venir à l'examen des aidai et 1tpoq>auÀ.éi'.>v Katà 61, je souhaiterais examiner un autre fragment 62 pamÀ.tcovysyovméi'.>v connu par ce même traité et qui pose des problèmes particuliers, non seulement en tant qu'excerptum, en raison de son découpage, D. H. 17.A: "H µtv 6'1 q>avt:pàtoO IauvmteoO noÀtµou npocpaatç teal npôç dxavtczç t:Ù1tpt:7titç >..tyt:o8at1'At:uteavd'>v tytvt:to Pit8t:tatcY>v 1eataq,uy6vt0>v tn· aù1t6Àt:ttotç à611eouµtvo1ç toûç· cbç teoivôv 611n toOto teal ncitptov f8oç tf\ "P0>µaivt6plovtx:ciÀ.t:at:v· 6t:118t:iç6t étnétv-rcov ànoppritooç cpuÀ.~mtoùç ).6yooç Kiv6uvov tcp11µtyav aùtci)&JtlKpt:µa0'8flvm noUflç mivu cpuÀ.ax:flç x:ai taxt:taç fü:6µt:vov.cbç toO x:mpo0 µTl6\Mv-roç livaatpocpiJv. TTt:m>aµtvooçyàp t'IV TT6ppou6\6:Pamv toùç t,ncpovt:at6:-rooç·pytytvcovicpucpo6ladµnt:a8al npôç aùtôv umaxvouµtvooç icataacpa;t:lv t'IV cppoupàvx:al napa&ôat:lV &Kt:{vcp t'IV JtÔÀ.lV.
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samnite, où la pluralité des 1tpocpâatiç correspond à l'opposition entre un discours exprimé dans un cercle restreint (ici les deux hommes à l'origine du complot), et celui adressé à un public plus large, les «raisons» ou «justifications» variant en fonction de ceux que l'on désire convaincre. Mais dans le cas de Rhégion le pluriel 1tpocpaa&içrecouvre peut-être une situation plus complexe encore. Car, à propos du message reçu par Decius en plein conseil, Denys se fait l'écho de deux traditions différentes. La première est celle que nous avons indiquée. Il s'agit d'une machination de Decius qui a luimême rédigé la lettre et «prétend» qu'elle provient d'un ami. Chaque groupe de mots de la phrase insiste sur la fausseté de l'information 79. Mais Denys mentionne ensuite une seconde version selon laquelle le messager aurait été envoyé en toute hâte par Fabricius. Dans l'un et l'autre cas, il s'agit bien d'une 1tp6cpamç,d'une raison invoquée pour justifier le massacre, mais qui est évidemment fausse si l'on s'en tient à la première version, conforme à la vérité si l'on préfère la seconde. Alors que, par l'organisation de la narration, Denys paraît privilégier la première version, il n'en admet pas moins que les deux sont valables. Ainsi, si les aitiai se confondent bien avec le récit même du déclenchement du massacre, les 1tpocpcia&tç s'identifient avec les différentes justifications évoquées par les principaux acteurs du drame, justifications dont la teneur et surtout la sincérité varient en fonction des sources utilisées par l'historien 80 • En arrivant au terme de cette étude, nous pouvons donc affirmer que loin d'être aléatoire, l'utilisation que fait Denys des termes aitfa 81 et 1tp6cpamçest autant le résultat d'une réflexion cohérente sur la notion de causalité que d'une conception précise de ce que doit être l'étiologie dans le domaine de l'historiographie. Examiner l'aida, ou les attiai d'un événement particulier, c'est rendre compte de ce qui l'a provoqué. Lorsqu'il s'agit d'un événement isolé, comme D. H. 20.B : "Ett taOta ltyoVtoç aùtoO napflv ttc; ty,câ8uoç, aùXµru>oc;cl>çtç 6600, ypâµµata Ù7t. aùtoO Au:iou Kat&cncwaaµtva Koµ{Çcov, ci>çnapà l;tvou 6iJ nvoç (6iou, tv oie; t611ÀoOtoµtllcov 6 pacnÀ&ÙÇ à1t00ttll&1v td tb 'Pi]ytov 7t&VtatCooiouç atpattci>tac; ci>çxataÀ.11\lfOµtvouçriJv n6Àtv, àvo{l;&tvù1t&V 'Annirp füà tov f!pmta· npoa8iticri yàp aütl) y& ml -rd.emaia Tflç6pyi'lç t&v 611µo-rtbv aida µupimv dllo>v npori'Yl'laaµtvmv,cill' cicp'env il~a-ro 11:ptb'tov 1')n6Â.1çûno Tflç6&Ka6apxiaçûppiÇ&0'8a1;«Je commencerai mon récit de ces événements non pas par les derniers incidents que beaucoup croient ~ la cause unique du rétablissement de la liberté, je veux parler des fautes commises par Appius envers la jeune fille en raison de la passion qu'il éprouvait pour elle (ceci n'est en effet que la dernière cause de la colère des plébéiens, s'ajoutant à un nombre considérable d'autres qui l'avaient précédée), mais par les premiers outrages que la cité subit de la part des décemvirs». 15 Cf.D. H. 7. 6; 11.1et l'analyse de H. Verdin, La fonction de /'Histoire selon Denys d'Halicarnasse, dans Ancient Society, 5, 1974, p. 305-306.
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passages, Denys utilise le terme technique, ce n'est pas pour préciser qu'ils ont un statut différent du reste de la narration, mais plutôt pour souligner l'importance d'un événement donné, à la fin, ou parfois au début d'une séquence chronologique, par un effet d'anticipation destiné à le mettre en valeur. Il en va différemment bien sür lorsque le terme aitia se trouve dans un discours, où l'orateur privilégie dans la succession des événements un fait particulier qu'il présente comme la cause unique ou déterminante de la situation. Mais on n'est plus alors dans le cadre de l'écriture de l'histoire, mais dans celui de la recherche ou de l'affirmation des responsabilités, quand ce n'est pas de l'accusation proprement dite. Dans la fin de l'épisode de la révolte de la garnison romaine de Campanie tel qu'on le trouve chez Appien, les soldats présentent leur endettement comme la cause de leur séd.ition 86 • Mais ce qui est aida pour un acteur impliqué dans l'histoire est simplement 1tp6cpa.cnçaux yeux de l'historien. Pour Denys la 1tp6cpacnçest toujours de l'ordre de la parole 87 , de l'affirmation subjective. Il s'agit de la raison que l'on donne, de la justification que l'on fournit pour ses actes. Elle n'est en soi ni vraie ni fausse et ne s'oppose à l'aida ni par sa moindre véracité, ni par son immédiateté. Tout au plus n'en représente-t-elle parfois qu'une partie. Tour à tour explication, justification ou prétexte, sa valeur dépend du contexte psychologique dans lequel elle est formulée. Lorsque les propos sont ceux d'un individu, ou d'un groupe s'exprimant par une même voix, on ne trouve généralement qu'une seule np6cpa.cnçque son unicité rend justement suspecte88. Mais dans un affrontement de type judiciaire, comme le sont les ambassades préludant aux guerres, chaque partie présente sa propre 1tp6q,acnç,qu'elle affirme être la seule vraie, considérant du même coup comme mensongère celle du camp adverse. Le pluriel peut également apparaître dans des contextes particuliers, lorsqu'une même personne ou un même groupe présente une justifica-
verne
Cf. supra et note 71. On peut rapprocher cet emploi de celui du ainlla8a1. Lors de l'ambassade précédant la seconde guerre samnite (D. H. 15.H), les Samnites, en présentant les prétentions romaines comme la cause de la guerre, en reportent la responsabilité sur les Romains, comme ceux-ci le constatent : l3ouÂ.&6&a6& -rbv 'Pcoµairovôflµov a(nétc:ma8at. 17 Sur le vaste champ sémantique couvert par la notion de 11:poq,acnç chez les historiens et les orateurs grecs, voir L. Pearson, «Prophasis and Aitia», dans TAPhA, 83, 1952, p. 205-223. 11 Il peut s'agir aussi bien d'un enjeu privé que d'un enjeu politique, d'Amms partant en Gaule np6