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Français Pages 316 [165] Year 1891
/ of Ollawa 111111111111111111111111111111111111111
002281896
• COURSÉLÉ 1E TAIRE
DE RHÉTORIQUE D'ÉLOQUENCE
COURS
'out exemplaire non revêtu de la griffe de ['Éditeur sera 1·egai·dé comme contre{ ait. 1
A ..
D'ÉTUDES
JSAGEDES PETITSSÉMINAIRES ET DES COLLÈGES
COURSÉLÉJ\iIETAIRE DE
RHÊTORIQUE KT
D'ÉL OOUEN CE PAR
ffl. L'ABBÉJ. VERNIOLLES DU MÊME
AUTEUR:
Cours élémentaire de Littérature, 7° édition. t vol. in-t8 jésus, cartonné ............................. , 2 50
CHANOINE HONORAIRE DE TULLE,
SUPÉRIEUR DE SJ:RVIÈRES
QCATORZIÈ~IE ÉDITIO~ SOIONEUSK.UE.H IIBYCK .H CORRIGÉE
Cours abrégé de Littérature,
3• édition. i vol. in-t8 jésus, carlonné.................................... 2 50
PAHlS {5, Coulommiers, -
Typ. PAUL BRODARD,
DU PETIT
RUE
SÉMINAIRE
PRÉFACE
La faveur croissante du public pour notre Cmtrs classiquede littérature nous impose de sérieux devoirs. Loin de nous reposer sur le succès des premières éditions, nous avons soumis notre travail à une révision sévère. Quelques définilions ont été éclaircies, de lég'eres lacunes ont été comblées, un certain nombre de citations nouvelles sont venues se placer dans le corps de l'ouvrage.
Parmiles professeurs qm nous ont aidé de leurs conseils, quelques-uns nous engageaient à donner
plus d'étendue à notre seconde partie. Néanmoins nous avons été so~:e de développements et nous avons évité avec le plus grand soin la prolixité et IP.s
PRÉFACE.
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longueurs.
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Prenez garde surtout, nous disait un
ami très-expérimenté
dans ces matières,
prenez
garde, sous prétexte de compléter votre ouvrage, de le surcharger et de le grossir outre mesure ; je
PRÉFACE.
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moyen, à notre avis, de donner aux jeunes gens des connaissances précises, sérieuses et approfondies.
connais d'excellents livres classiques qu'on a fini, à force d'éditions de plus en plus complètes, par rendre inadmissibles et tout à fait.détestables ... J'ose vous
Pour rendre notre livre plus commode, nous avons employé assez fréquemment des caractères distincts
supplier de ne pas trop allonger, nous écrivait un
du texte de l'ouvrage. Les mots importants sont im-
autre. J'aime beaucoup le précepte : Quidquid prœcipies, esto brevis. L'explication en classe supplée avantageusement à la longueur. >1
primés en petites capitales, et les définitions en lettres italiques. Par ce moyen, l'élève fixe d'abord son attention sur ce qu'il y a d'essentiel dans chaque page; son intelligence et sa mémoire sont aidées par
Ces avis nous paraissent fort sages, et nous les avons suivis. Au lieu d'aio~ter tout ce qui pouvait être utile, nous nous sommes borné à ce qui nous a paru nécessaire.
le premier regard qu'il jette sur son livre, et il distingue sur-le-champ ce qu'il doit apprendre et retenir mot à mot.
ous croyons aussi rendre service aux jeunes proOn se plaint, il est vrai, que les élèves ne retiennent presque rien de ce qu'on leur dit de vive voix. Mais si, après des explications orales et des lectures bien choisies: on donne à faire des dissertations écrites sur les principales questions que soulève un cours de rhétorique, nous sommes convaincu que cette méthode portera d'heureux fruits. C'est le seul
fesseurs en indiquant les meilleurs auteurs à consulter sur chaque question traitée dans notre Cours
élémentaire. Pour expliquer et compléter les préceptes de rhétorique, quelquefois les livres manquent; d'autres fois, on a les ouvrages sous la main, d l'on ne sait où se trouvent les documents et les te~ \es qui sont nécessaires. C'est donc épargner un temp!>précieux à des pr~fesseurs déjà chargés de
flll
PRÉFACE,
travail que de leur montrer les so\.nccs ou ils pour• ront puiser les développements dont ils ont besoin.
COURS ÉLEMENTAIUE DE
Plusieurs de nos collègues nous ont adressé de judicieuses observations qui nous ont servi pour
RHÉTORIQUE
celte édition nouvelle : nous ieur en témoignons
ET
ici notre reconnaissance. Puisse le travail que nous nous sommes imposé pour améliorer ce livre le
D'ÉLOQUENCE
rendre plus digne de let\r bienveillance et plus utile aux enfants de nos maisons chrétiennes!
NOTIONS PRÉLIMINAIRES
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i. L'éloquence est la faculté de dominer le! esprits, les cœurs et les volontés par la parole. 2. L'éloquence ne consiste pas seulement dans l'émotion du cœur. Quintilien a dit, il est vrai : Pectus est quod disertos facit, c'est le cœur qui rend éloquent. M. Villemain a dit à son tour : a L'éloquence est un don et un art. 1> D'après ces deux autorités, quelques auteurs récents définissent l'éloquence : le don d'être ému et l'art àe t1·ansmettre l'émotion. Cette définition ' A::teurs à consulter : Cicéron, De Oratore, l. I, n" 31-33, 1. II, n" 32-38; Fénelon, Premier dialogue 1ur Ctloquence; Marmontel Etémen11de liutrature, art. 1Uoq., t. II, p. 32-48; Laurentie, De f É rude et de l'en1eignemen1de.s leitre.o.-.l••édit., p. 296-SOC; Geruzez, Cours de liltüarure.
NOTIONS PRÉLIMINAIRES,
indique bien le caractère principal de la haute éloquence, mais elle ne fixe point assez son domaine et 'f\ l'embrasse pas tout entier. Pour être éloquent, il faut aussi savoir convaincre les esprits et diriger les volontés. 3. Pour éviter tous les malentendus et pour bien comprendre ce que les rhéteurs modernes ont écrit sur l'élÔquence, il est bon de r~marquer que ce mot peut se prendre en trois sens différents: dans un sens tout à fait large, dan~ un sens moyen, dans un sens rigoureux et restreint. i• Dans un sens tout à fait large, l'éloquence n'est que l'émotion éprouvée et communiquée, et elle se trouve dans tout ce qui est capable de produire une forte impression sur les cœurs. Dans ce cas, l'éloquence n'est pas nécessairement attachée à la parole. Elle peut être dans un tableau, dans le geste, dans le regard, dans l'attitude extérieure de. l'homme, et jusque dans son silence. De là vient qu'on a dit : l'éloquence du geste, l'éloquence des yeux, l'éloquence des larmes. 2° Dans un sens moyen, elle est la faculté de dom;11er les esprits, les cœurs et les volontés par la parole. Par conséquent, il ne faut pas seulement chercher l'éloquence dans les discours de l'avocàt, du prédicateur, de l'homme d'État, et en général dans les paroles qui s'adressent à une multitude assemblée. Elle se montre aussi fort souvent dans les œuvres de l'historien, du philosophe et du poêle. Quelquefois, dit M. Laurentie, elle tonne contre les passions du haut d'une tribune; d'autres fois elle parle à la raison dans ~s pages muettes d'un livre. Il semble même que sa
NOTIO S PRÉLIMINAIRES.
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puissance est plus merveilleuse quand elle s'adresse à des hommes calmes et réfléchis par la plume de !'écrivain. 3° Dans un sens rigoureux et restreint, l'éloquence est le talen! de persuader par le discours revêtu des formes oratoires. C'est ainsi que la considéraient les anciens quand ils la définissaient: Ars bene dicendi, l'art de bien dire, ou l'art de parler de manière à persuader. Lr.s préceptes qu'ils nous ont laissés sur l'art nratoire doivent tous être entendus dans ce sens, e~ quoique les règles que nous donnons ici soient souvent applicables à !'écrivain, nous n'avons ordinairement en vue que l'orateur proprement dit. 4. D'après Quintilien et tous tes anciens, la vertu est une condition nécessaire à l'éloquence. Caton définit l'orateur : Vir bonus dicendi pe1·itus, un homme qui veut le bien et qui le sait persuader. Fénelon parle mieux encore : cc L'homme digne d'être écouté, ditcc il, est celui qui ne se sert de la parole que pour la « pensée, et de la pensée que pour la vérité et pour « la vertu. » 5. Quelques rhéteurs modernes prétendent qu'on peut être éloquent sans être vertueux; et, pour le prouver, ils citent Catilina, J.-J. Rousseau, Voltaire, Mirabeau et quelques autres. Saas doute, l'homme le plus vicieux rencontre quelquefois de bell~s inspirations, et l'on peut atteindre à l'éloquence sans avoir été constamment et complétement vertueux. Il est d'ailleurs facile de remuer la foule quand on flatte les mauvaises passions. Mais il demeure toujours vrai que là où l'éloquence se montre dans toute sa
NOTIONSPRÉLIMINAIRES.
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NOTIONSPRELIMINAIRES.
dignité et toute sa grandeur, l'orateur obéit à des convictions sincères, à des sentiments nobles et ver•· Lueux. (Voir le n° I.) Il,
Rhétorique
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6. La rhétorique est une collection de préceptes, d'exe,·cices et de conseils sur l'éloquence. Elle a pour but de développer et de diriger le talent de ceux qui sont nés plus ou moins éloquents, et elle sert à Lous pout· apprécier les discours d'un orateur ou les œuvres d'un écrivain. Aristote la définit : le moyen de trouver dans chaquf-, sujet ce qu'il y a de prop1·eà persuader. 7. Il y a une grande différence entre la rhétoriqu~ et l'éloquence. L'éloquence est surtout un talent 011 un don de la nature, la rhétorique est un fruit de l'étude ou un art; l'une trace la méthode, l'autre la suit; l'une enseigne les moyens, l'autre les emploie. Elles diffèrent l'une de l'autre comme la théorie diffère de la pratique. 8. L'éloquence a précédé la rhétorique, commn dans tous les arts la pratique a précédé la théorie. ll y eut des orateurs avant que personne enseignât à lu deve:iir, ou du moins à l'être plus sûrement. On Sfi mit, dit Girard, à étudier, à observer ces orateurs; on examina par quel art ils éclair~ient l'esprit et tou • Auteurs à consulter: Aris-tote, Rhétorique, l. I, n" 1-6; Qumtilier, Institutioru oratoires, 1. II, ch. xv1-u:11; .Marmontel, Élén,. de lit~r., art. Rhétorique, t. IIl, p. 270-298; Girard,Précepte, IÙ rhétorique,, Notions prélim., p. 2-10. 1
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cbaient le cœur. Ces ol\servations, recueillies par des bommes judicieux, formèrent des orateurs plus habiles encore. Ainsi, de siècle en siècle, les règles se complétèrent, el c'est de là qu'est venu peu à peu ce corps de préceptes vulgairement appelé Rhétorique. 9. Les préceptes seuls ne peuvent pas rendre un homme éloquent, et la rhétorique suppose les dons 11aturels. Celui qui n'aurait pas reçu une intelligence capable de grandes pensées et un cœur accessible aux fortes émotions étudierait vainement tous les rhéteurs nnciens et modernes; il n'y puiserait jamais le pouvoir de dominer les esprits et d'entraîner les volontés. Le travail ne peut que développer et perfectionner J'éloquenle. S'il en était autrement, il suffirait d'apprendre les règles de cet art pour être éloquent, et rien ne serait plus commun que les orateurs. tO. L'étude des préceptes est indispensable pour mus. Sans doute, le génie peut produire de nobles idées, des sentiments sublimes, des morceaux vraiment éloquents; mais seul, il ne peut composer un discours qui ait de la régulaité et de l'ensemble, et qui soit irréprochable dans toutes ses parties. L'expérience prouve que, sans la connaissance des règles, les hommes, même les plus heureusement doués s'égarent sur plusieurs points. Je ne vois pas, dit Horace, ce que peut le travail sans le génie, ni le génie sans le travail, et il doivent se prêter un mutuel secours : . . . . . . Ego nec studium sine divite vena, Nec rude quid possit video ingenium : alterius sic Altera poscit opem res, et conjurat amice.
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NOTIONS PRtLIMINAIRES.
H. On a dit souvent que les modèles tracés par un homme de génie valent mieux que les méthodes des rhéteurs. Rien n'est plus vrai, dit Marmontel, quand il s'agit d'échauffer l'âme et de l'élever. Mais les modèles les plus frappants ne jettent la lumière que sur un point, les règles éclairent toute la roule. N'ayez donc pour elles ni un respect se1·vileni un présomptueux mépris. Étudiez-les de préférence chez les grands maitres: Aristote, Longin, Cicéron, Quintilien pour les anciens; Fénelon, Rollin, Balleux, La Harpe, pour les modernes. Il y a ordinairement chez les anciens plus de profondeur, de raison et de goût. 12. Comme les préceptes de rhétorique sont fondés sur l'expérience et sur la nature du cœur humain, l'essentiel est moins de les connaitre que d'en découvrir l'esprit et l'usage. Si l'on manque de goût pour en faire l'application, si l'imagination ne leur donne pas le mouvement et la vie, la science des règles est une science morte et stérile, qui ne fournit aucun secours. Il faut donc en faire un exercice pour son jugement plutôt que pour sa mémoire, et étudier avant tout les secrets du cœur humain. 13. Ou peul dire, en un sens très-vérita hie, que tout homme a besoind'être éloquent, du moins dans une certaine mesure. Depuis le petit enfant qui demande une grâce à sa mère, jusqu'au savant Je plus consommé, chacun cherche à obtenir que les autres hommes admettent ce qu'il pense et fassent ce qu'il veut. Le père de famille dans sa maison, le professeur dans sa chaire, l'homme d'affaires et l'homme d'État dans les conseils, l'homme du monde dans un cercle ou dans
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un salon, tous ont besoin de demander à l'art oratoire le secret de sa puissance. La rhétorique est donc utile à tous, même à ceux qui ne se destinent pas à parler en püblic. 14. La Logique, la Grammaire et la Rhétorique sont trois sœurs qui devraient toujours marcher de compagnie. La logique, dit Batteux, est l'art de bien penser; la grammaire est l'art de bien parler; la rhétorique est !'art de bien dire. Bien penser, c'est mettre de la précision et de la netteté dans ses idées, de la vérité dans ses jugements, de la justesse dans ses raisonnements. Bien parler, c'est se servir de termes reçus et de constructions légitimes, c'est éviter le barbarisme dans les mots et le solécisme dans les phrases. Bien dire, c'est parler de manière à se faire écouter et à persuader ceux qui écoutent. i5. Les règles de rhétorique se divisent en règles générales et règles particulières. Les règles générales embrassent les principes communs à toutes sortes de discours; les règles particulières sont celles qui s'appliquent aux divers genres d'éloquence. Dans la première partie de ce Traité, nous parlerons des règles générales, et dans la seconde, des règles particulières. Comme ces règles particulières ont un but plus pratique et montrent les principes appliqués à chaque genre, on a rlonné quelquefois à cette parti6 le nom d'éloquence. Dans ce dernier cas, l'éloquence est considérée simplement comme un art, ou un recueil dP, préceptes. (Voir le n° n.)
PREUIÈRE
PARTIE
RÈGLES GÉNÉRALES
DE RHÉTORIQUE f6. Les règles générales